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7/28/2019 Les.afriques.diplomatie.1 http://slidepdf.com/reader/full/lesafriquesdiplomatie1 1/8    D    I    R    E    C    T    E    U    R     D    E    L    A     P    U    B    L    I    C    A    T    I    O    N     :    A    B    D    E    R    R    A    Z    Z    A    K    S    I    T    A    I    L L’UNESCO À LA CROISÉE DES CHEMINS GÉOSTRATÉGIE AMBASSADEUR DOSSIER UNESCO L’UNESCO à la croisée des chemins Rached Farah Le Sud doit ’approprier ’UNESCO» Mali Les vrais enjeux de la guerre dans le nord-Mali Philippe Hugon Les perspectives du Nouveau Mali Les perspectives du Nouveau Mali Alain Pellegrini INTERVIEW INTERVIEW DIPL O MATIE N° 1 - Février 2013 lesafriques.com

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   D   I   R   E   C   T   E   U   R    D

   E   L   A    P

   U   B   L   I   C   A   T   I   O   N    :

   A   B   D   E   R   R   A

   Z   Z   A   K

   S   I   T   A   I   L

L’UNESCOÀ LA CROISÉEDES CHEMINS

GÉOSTRATÉGIEAMBASSADEUR DOSSIERUNESCO

L’UNESCOà la croiséedes chemins

Rached Farah

Le Sud doit’approprier’UNESCO»

Mali

Les vrais enjeux de la guerredans le nord-Mali

Philippe Hugon

Les perspectivesdu NouveauMali

Les perspectivesdu NouveauMali

Alain PellegriniINTERVIEW INTERVIEW

DIPLOMATIEN° 1 - Février 2013

lesafriques.com

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SOMMAIRE

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4

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8

Pour tous les décideurs qui s’intéressentau continent africain et qui cherchentdésespérément des clés de lecture qui leur

apportent un regard analytique sur les muta-tions, les défis et les changements que connaîtl’Afrique, vous êtes désormais servis. Votredemande est exhaussée avec le lancement de cenouveau mensuel que notre rédaction a nommé

 Les Afriques Diplomatie qui vient complétervotre journal hebdomadaire Les Afriques.A travers ce nouveau lancement, le groupe

 Les Afriques apporte un complément essen-tiel au journal hebdomadaire panafricain Les

 Afriques qui ne cesse de s’enrichir pourmieux répondre aux exigences d’un lectoratintellectuel en quête d’informations écono-miques, financières et politiques sur l’Afriquequi avance.Avec une fréquence de sortie d’un numéro audébut de chaque mois,  Les Afriques Diplo-

matie  s’est choisi volontairement une ligneéditoriale basée sur l’objectivité et l’ouvertured’esprit afin de délivrer une vision analytiqueneutre des aspects géopolitiques, géostraté-giques et diplomatiques en rapport avec lecontinent africain.

 Les Afriques Diplomatie s’adresse en prioritéaux décideurs de la sphère diplomatique, dumonde politique, du monde des affaires quicherchent des outils pour comprendre lesenjeux du continent. Le support vous offre ainsiune bonne grille de lecture qui aide à mieux comprendre les enjeux sur les événements mar-quants, les phénomènes importants, les muta-tions qui impactent le continent africain surle plan économique, politique, et stratégique.Dès ce premier numéro, vous découvrirez notredossier spécial sur l’Unesco (page 4), cette ins-titution onusienne phare qui traverse une zonede turbulence depuis quelques années. Vouspouvez lire également notre analyse géostra-tégique qui explique les différents enjeux quise cachent derrière le conflit du nord-Mali(page 6). Entre-autres. Bonne lecture.

L’Afrique des enjeux diplomatiques

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Directeur de la PublicationAbderrazzak Sitaïl

Directeur de la RédactionAdama [email protected]

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B.O.N°5618-26 rabii 1429 (3-4-2008)

Crédit photosAFP, DR 

© Reproduction interdite sans l’accord écritde l’éditeur

DIPLOMATIE N°1FÉVRIER 2013

AMBASSADEURRached Farah, ambassa-deur de Djibouti à Paris,candidat à la direction gé-nérale de l’UNESCO.

DOSSIERAvec un budget de fonctionne-ment réduit et une efficacitémitigée, l’UNESCO risque deperdre toute son influence entant qu’organisation onusiennede premier plan. Mais l’institu-tion tente d’opérer une nou-velle orientation stratégiquevitale pour sa survie. Entre lesmachinations politiques et lesnombreux défis à relever sur leterrain, la tâche s’annonceardue pour le nouveau direc-teur qui sera élu à la tête del’institution à la fin 2013.

GÉOSTRATÉGIEBien que la lutte contre le terro-risme soit l’objectif affiché, leconflit dans le nord-Mali cachede multiples enjeux. En effet,pour les différentes parties pre-nantes (le Mali, le MNLA, laFrance, la CEDEAO, les groupesislamistes, et même la commu-nauté internationale) chacun ases intérêts à défendre. Eclairagesur les enjeux d’une guerre iné-dite au cœur du Sahel.

6INTERVIEWPhilippe Hugon, directeur derecherche à l’IRIS, auteur degéopolitique de l’Afrique, ParisSEDES 2012, rappelle qu’à labase du chaudron Nord Ma-lien, il y a des revendicationstouarégues anciennes.

INTERVIEWPour Alain PELLEGRINI, Gé-

néral français à la retraite,Consultant en stratégie mili-taire et maintien de la paix, an-cien commandant de la Forceintérimaire des Nations uniesau Liban(FINUL), le conflitmalien est une conséquence dela guerre en Libye.

MOUVEMENTSET NOMINATIONSChakib Benmoussa, ambassa-deur du Maroc en France / unbrillant technocrate ambassa-deur du Maroc en France.

8AGENDADIPLOMATIQUELes dates clés pour les grandsrendez-vous diplomatiques àne pas manquer.

2 • FÉVRIER 2013

Abderrazzak Sitaïl,Directeur de Publication

ÉDITORIAL

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AMBASSADEUR

L es Afriques Diplomatie :Vous êtes

candidat à la direction générale del’UNESCO. Est-ce une candidature

Djiboutienne ou africaine ?Rached Farah : Nous présentons cette candi-

dature comme celle du Sud. Elle est africaine,

arabe mais aussi elle est celle de l’ensemble des

pays du Sud. L’UNESCO compte 198 pays

membres dont le groupe des 77 et de grands

pays comme la Chine. C’est une organisation

unique qui a contribué énormément à faire

avancer la paix dans le monde. Ces nobles ob-

 jectifs ont créé un courant de tolérance et de

réconciliation à la fin de la deuxième guerremondiale, avec le soutien de personnalités em-

blématiques comme Eisenhower et De

Gaulles. Plus que la paix, l’Unesco a contribué

à la construction de l’Union Européenne avec

le soutien de la société civile, du monde scien-

tifique et universitaire. C’est fort de ces sou-

tiens que l’organisation a pu promouvoir

l’intégration à travers la promotion de la

science et de la culture, pour imposer l’école

de Jules Ferry. Après la seconde guerre mon-

diale, l’autre grand rendez-vous avec l’histoire

aura été la chute du Mur de Berlin.

L’UNESCO a adopté l’approche de la crois-

sance et développement comme moteurs de la

paix en Europe. L’intégration du vieux conti-

nent a eu comme socle la culture de la paix et

le développement. Ce sont autant d’objectifs

atteints par l’Europe, mais qui constituent en-

core des défis pour le Sud. Nous avons encore

dans la partie Sud du globe des problèmes liés

au manque de tolérance, des populations dé-

placées, des réfugiés. Si le HCR et l’UNICEF

 jouent bien leur rôle, en apportant les soins né-

cessaires aux 700 000 réfugiés massés dans un

camp au Kenya, quid de l’éducation ? L’impli-cation de l’UNESCO est indispensable dans

ces points chauds du globe pour promouvoir

la paix et la tolérance, à travers l’éducation et la

culture. Voilà pourquoi je trouve pertinent que

le Sud se réapproprie l’UNESCO. Les conflits

et les camps déplacés menacent la croissance

dans les pays du Sud. A l’exemple de l’Europe

qui s’est reconstruite avec la consolidation de

la paix, nous pouvons dire que toute croissance

pérenne doit s’accompagner d’un développe-

ment scientifique. Et, comme le disait Nehru,

l’UNESCO doit être la conscience universelle.Nous devons faire en sorte que l’UNESCO ré-

investisse le terrain et soit à l’écoute des popu-

lations du Sud, pour promouvoir le dialogue

à travers la culture et la paix.

 LAD :Pourquoi c’est à l’UNESCO et non à

l’ONU de faire cette promotion de la paix dans les pays du Sud ?RF :Vous savez, l’UNESCO de par son archi-

tecture démocratique présente une opportu-

nité pour faire avancer la paix. Peut être c’est

une machine qui manque de souplesse et qui

a pris un peu d’âge. En 2015, l’UNESCO fê-

tera ses 70 ans, d’où la nécessité de revoir le

dispositif et d’impliquer la jeunesse. En com-

posant avec les jeunes, l’organisation se met-

tra au diapason des enjeux du 21e siècle.

 LAD :Vous considérez-vous comme lecontinuateur de l’œuvre du sénégalaisAmadou Mahtar Mbow, ancien directeurgénéral de l’UNESCO ?RF : Absolument. Monsieur Mbow avait eu

à faire avec quelques tiraillements nés de la

guerre froide. C’est un personnage impor-

tant. Son passage à l’UNESCO correspond à

une étape importante de l’histoire de l’orga-

nisation. Je m’inscris dans la continuation

de son œuvre de rendre l’UNESCO univer-

selle, quoique, il faut le dire, notre époque

fait face plutôt aux enjeux de la globalisation

et d’une certaine unipolarisation. Le Sud a,

dans ce cadre, besoin de l’UNESCO comme

l’Europe en avait besoin à la fin de la

deuxième guerre mondiale.

 LAD :Quelles sont vos chances par rapportau directeur général sortant, citoyenne bul-gare, candidate à sa propre succession ?RF : La Bulgarie est un pays européen des

Balkans qui n’a pas les caractéristiques de

nos pays du Sud. Je suis persuadé que la re-

conduction automatique doit être l’excep-

tion dans les grandes organisations commel’UNESCO. Il faudrait que ce qu’on exige des

gouvernements soit aussi appliqué par les or-

ganisations internationales. La reconduction

automatique appartient au 20e siécle, aux ar-

rangements politiques et aux compromis du

temps de la Guerre froide. Cela ne doit pas

être un réflexe dans un monde de débat. La

transparence doit être au cœur du débat.

 LAD :L’UNESCO a été la première organi-sation à avoir admis la Palestine comme

observateur. Comment allez-vous gérer cedossier délicat une fois élu ?RF : Le cas palestinien est un dossier qui date

d’il y a 60 ans. La Palestine a été acceptée à

l’UNESCO en tant qu’Etat observateur. Les

choses vont dans la bonne direction. Il est

temps de faire en quelque sorte que la Pales-

tine soit reconnue à part entière. C’est ma

conviction.

 LAD :Vous êtes Djiboutien, c'est-à-dire res-sortissant d’une région de l’Afrique de l’Estfort agitée. Comment impliquer l’UNESCOdans la résolution des dossiers chauds decette partie du monde ?RF : Nous devons créer une dynamique plus

forte dans la culture de la paix, de la tolérance

et du vivre ensemble. L’UNESCO est dans

son rôle de bâtir la paix par l’éducation, laculture et la science. En Afrique, en Asie et en

Amérique Latine, beaucoup reste à faire dans

ce domaine. L’exemple de l’Europe est assez

intéressant. Il y a quelques années, on a connu

un génocide dans les Balkans. Les pays euro-

péens ont dépassé cette tragédie grâce à la cul-

ture de la paix. Nous devons, nous pays du

Sud, nous approprier l’UNESCO à notre tour

pour promouvoir la culture de la paix. Nous

avons eu quelques exemples de success story 

en Afrique. C’est le cas de la Somalie où avec

les efforts du président djiboutien, Ismaël

Guelleh, et d’autres leaders de la région, à

faire revenir la paix au terme d’un référen-

dum dont les résultats furent accepté par tous

les protagonistes. Il y a espoir tant que les gens

peuvent s’entendre sur une responsabilité

partagée. La culture dans la paix est une cul-

ture de responsabilité, de droits et de devoirs.

L’UNESCO de par son background peut ac-

compagner dans la durée toutes les initiatives

engagées dans les pays du Sud pour ramener

la paix et la stabilité. On n’insistera jamais

assez sur le parcours de l’Europe depuis la fin

de la deuxième guerre mondiale. Voilà unerégion qui a connu le nazisme et les cata-

clysmes de la Shoah et qui, en l’espace d’une

génération, est parvenu à la réconciliation

puis a créé un mouvement politique, écono-

mique et de développement. Nous devons ar-

river à cela. L’UNESCO a rempli son rôle en

Europe. Il lui faut ouvrir une nouvelle page

avec les pays du Sud. Il y a eu quatre direc-

teurs généraux européens. Il appartient

maintenant aux pays du Sud (avec la paren-

thèse de Amadou Mahtar Mbow) de s’appro-

prier l’UNESCO. Je suis musulman modéré,africain et arabe. Je demeure persuadé qu’on

peut tourner la page du clash des civilisations.

Propos recueillis par 

Adama Wade

FÉVRIER 2013 • 3

Rached Farah, ambassadeur de Djibouti à Paris,candidat à la direction générale de l’UNESCO

«Le Sud doit s’approprier l’UNESCO»

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Créée il y a plus de 60 ans pour pro-

mouvoir la paix dans le monde à tra-

vers notamment l’éducation, la

science et la culture, l’UNESCO peine

à jouer pleinement son rôle aujourd’hui. D’ail-

leurs le prochain directeur général qui sera élu

cette année à la tête de l’instance culturelle aura

du pain sur la planche. Et pour cause, le contextedéfavorable dans lequel végète, aujourd’hui,

«l’organisation intellectuelle» des Nations Unies.

C’est, en principe, en novembre prochain que se

tiendra l’élection du successeur de la bulgare

Irina Bokova. Une élection qui interviendra

dans un contexte délétère pour l’organisation

qui fait face depuis quelques années à une multi-

tude de défis dont le manque crucial de moyens

pour financer ses ambitieux programmes dans le

monde. Le budget de l’UNESCO a été amputé

de plus de 20 % pour les exercices 2012 et 2013

suite à la décision des Etats-Unis, jusqu’ici plus

gros contributeur, de suspendre leur finance-

ment à l’organisation. En plus de cela, certains

Etats donateurs ont fait fluctuer leur contribu-

tion à cause notamment du contexte de crise

économique de ces dernières années.

Enjeux politiquesL’UNESCO paie par-là le prix fort pour avoir va-

lidé l’adhésion de la Palestine en tant que 195e

membre de l’organisation, et ceux contre la vo-

lonté des Etats-Unis et d’Israël opposés à cette

idée. C’était à l’automne 2011, un an après l’en-

trée de la Palestine comme membre observateurde l’ONU. L’affaire avait, à l’époque, défrayée la

chronique, notamment à cause de la tournure po-

litique des choses (d’un côté les mises en garde

des Etats-Unis et d’Israël alors que de l’autre côté

les palestiniens étaient soutenus par de nombreux 

pays dont de grandes puissances occidentales).

En guise de représailles à cette adhésion de la Pa-

lestine, les Etats-Unis ont décidé de suspendre

leur contribution financière qui constituait une

partie conséquente du budget de l’UNESCO. Plu-

sieurs Etats, musulmans pour la plupart, ont tenté

de compenser ce manque à gagner en créant unfonds d’urgence qui a été alimentée par le Qatar à

hauteur de 20 millions d’euros, la Turquie avec 5

millions, entre autres. Mais cette contribution est

loin de compenser l’aide américaine.

Cure d’austéritéL’UNESCO s’est vu donc dans l’obligation d’opé-

rer une coupe drastique dans plusieurs pro-

grammes faisant chuter le budget de

l’Organisation pour 2012 et 2013 à 350 millions

d’Euros, soit une réduction de 29 % sur les deux 

ans, selon la directrice de l’organisation lors d’un

récent conseil exécutif de l'agence qui s’est tenu àParis. Cela s’est traduit dans les faits par une ré-

duction des effectifs et la suspension de plusieurs

projets de grande envergure et programmes dans

différents pays. Tout cela a considérablement ré-

duit la marge de manœuvre de cette institution.

Priorité à l’AfriqueAujourd’hui , avec des moyens l imités

l’UNESCO tente d’opérer un revirement straté-

gique de son plan d’action à court et moyen

terme et, par la même occasion, de redorer son

blason. C’est le pari actuel de la directrice géné-

rale qui a engagé un ambitieux programme qui

devrait atteindre sa vitesse de croisière en 2013.

«Les circonstances sont difficiles, et les contraintes

sont fortes – mais ces dernières doivent nous pous-

ser à l'action, et c’est exactement ce que nous fai-

sons» a plaidé à l’occasion la directrice générale

de l’UNESCO, Irina Bokova. Le programme à

moyen terme de l’Organisation a été orienté au-

tour de trois axes stratégiques. Il s’agit de culti-

ver la diversité, de favoriser le développement

durable et de promouvoir l’innovation pour

construire la paix.

Pour se faire, l’UNESCO qui était fortement criti-quée pour le gaspillage des moyens mis à sa dis-

position par les Etats membres a décidé de mettre

en place une «culture de responsabilité et d'effica-

cité» en matière de gouvernance. Dans le même

temps, un recentrage des programmes de l'agence

a été opéré. Par ces actions Irina Bokova entend

d’une part, résorber le déficit budgétaire, mais

également et surtout «mieux positionner

l’UNESCO» et mieux définir sa valeur ajoutée.

En tout cas, en dépit des difficultés auxquelles

elle est confrontée, l’UNESCO ne manque pas

de faire entendre sa voix à chaque fois que l’oc-casion se présente comme l’illustre la crise ma-

lienne où l’organisation a pris des mesures pour

sauvegarder l’immense patrimoine historique

et culturelle que recèle la région de Tombouctou

face à la destruction du patrimoine culturel par

les groupes islamistes. «A l’heure où le monde

cherche des voies nouvelles pour construire la

 paix et le développement durable, nous devons

compter sur le pouvoir de l’intelligence à innover,

à élargir nos horizons pour faire vivre l’espoir 

d’un nouvel humanisme», proclame l’UNESCO

qui se dit exister « pour donner à c ette inte lli- gence les moyens de se développer, car c’est dans

l’esprit des hommes et des femmes que doivent 

s’élever les défenses de la paix, et les conditions du

développement durable».

Concernant les défis pour l’avenir, l’UNESCO

cherche à renforcer la réflexion sur la «durabilité»

du développement. Reste à savoir comment

concrétiser de telles ambitions avec des moyens li-

mités. Ce qui sera le lourd héritage et le pari pour

le prochain directeur général de l’organisation, à

défaut d’une plus grande marge de manœuvre.Ibrahim Souleymane

A la tête de l’UNESCO depuis 2009, l’actuel

directrice générale, la bulgare Irina Bokova

termine son premier mandat cette année.

En novembre prochain se déroulera l’élec-

tion pour choisir son successeur. Si Irina

Bokova est candidate pour un second man-

dat, ses chances de réélection sont minces

puisque selon les règles de la tradition decette institution, le poste, qui a échu quatre

fois à un européen, devrait revenir à un can-

didat africain. Le diplomate djiboutien Ra-

chad Farah part favori, soutenu par le

monde arabe, l’Afrique et de nombreux 

pays en développement. L’intéressé qui oc-

cupe déjà le poste de vice-président du

groupe africain au Conseil Exécutif de

l'Unesco a déjà reçu le soutien de l’Organi-

sation de la conférence islamique dont les

voix comptent beaucoup lors du vote. S’il

est élu, Rachad Farah sera le deuxième afri-cain à occuper ce poste après le Sénégalais

Amadou-Mahtar M'Bow qui a été porté à la

tête de l’UNESCO en 1974.

Un africain à la têtede l’UNESCO ?

4 • FÉVRIER 2013

DOSSIER UNESCO

 Avec un budget de fonctionnement réduit et une efficacité mitigée, l’UNESCO risque deperdre toute son influence en tant qu’organisation onusienne de premier plan. Mais

l’institution tente d’opérer une nouvelle orientation stratégique vitale pour sa survie. Entreles machinations politiques et les nombreux défis à relever sur le terrain, la tâche s’annonceardue pour le nouveau directeur qui sera élu à la tête de l’institution à la fin 2013.

L’UNESCO à la croisée des chemins

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GÉOSTRATÉGIE Mali

FÉVRIER 2013 • 5

Pourquoi une intervention française

soudaine dans le nord-Mali ? Com-

bien de temps faudra-t-il pour re-

prendre le contrôle du nord du Mali

aux groupes islamistes ? Quelles seront les consé-

quences de ce conflit ? Quels enjeux ? Autant de

questions que se posent aujourd’hui de nom-

breuses personnes. En effet, après l’euphorie despremiers jours qui ont suivi l’entrée en guerre des

forces françaises au Mali, place aux interrogations

sur ce conflit inédit dans le Sahel. Pour beaucoup

d’observateurs, le conflit dans le nord-Mali res-

semble à toutes les guerres contre le terrorisme.

Une guerre qui risque d’être longue, avec des

conséquences au-delà des frontières maliennes.

De l’Etat failli, à l’invasion terroristeLes djihadistes ont profité de la faiblesse du gou-

vernement malien et de ses forces armées. «Forte-

ment armés par les équipements puisés dans les

arsenaux libyens et aguerris par la guerre en Libye,

les mercenaires Touaregs ont fait la jonction avec 

les groupes islamistes. La petite armée malienne

n’a pu résister à une telle poussée.», explique Jean-

François Daguzan, Directeur-adjoint de la Fon-

dation pour la recherche stratégique. «Mais plus

 globalement, cette affaire est le fruit de l’islamisme

radical combattant tel qu’il s’est développé depuis

trente ans - dont la guerre civile algérienne fut un

de ses creusets majeurs». Dans leur offensive ra-

pide, les groupes islamistes ont profité d’une

conjugaison de facteurs qui leur était favorable. Il

 y’avait d’abord, la faiblesse de l’armée malienne,qui manque d’organisation et de moyens. En-

suite, la situation politique fragile depuis le coup

d’Etat du 22 mars 2012 qui a renversé le président

Amadou Toumani Touré (ATT). Enfin, les hésita-

tions de la communauté internationale qui tergi-

verse pour adopter un plan solide afin de sortir le

Mali de l’impasse politico-militaire qui y règne.

Les multiples enjeux de la guerredu MaliLes maliens quant à eux cherchent à reconquérir

la totalité de leur territoire et restaurer la souve-raineté de leur pays. Les rebelles touaregs du

MNLA veulent créer leur propre Etat dénommé

Azawad, dans la partie nord du Mali. La France

cherche à sécuriser ses intérêts économiques au

Mali et au Niger notamment, et en même temps

protéger les ressortissants français. La CEDEAO

cherche à éviter un embrasement de la sous-ré-

gion à cause de la multiplication des groupes isla-

mistes en Afrique de l’Ouest et des risques de

connexions qui existent entre eux (Boko Haram

du Nigeria, MUJAO, Ansar Eddine, etc.). La com-

munauté internationale cherche à restaurer ledroit international dans le nord-Mali et éradiquer

le terrorisme de cette zone, pour empêcher la

contagion de toute l’Afrique de l’Ouest et éviter la

création d’une base arrière pour le terrorisme in-

ternational. De l’autre côté, il y a les groupes ter-

roristes qui eux veulent s’approprier un vaste

territoire afin de s’établir de façon durable, pour

instaurer la charia, mais aussi pour gérer libre-

ment le trafic de drogues, le trafic d’armes et le

«business des enlèvements» de ressortissants oc-

cidentaux qu’ils pourraient ensuite échanger

contre des rançons afin de financer leurs activités.

Le rapport de forces sur le terrainBien que la plupart des pays s’accordaient à dire

qu’une opération militaire était inévitable pour

enrayer la menace islamiste au Mali, les ater-

moiements de la communauté internationale

qui peinait à fixer un calendrier précis de l’inter-

vention militaire qui doit libérer le nord-Mali

ont bien profité aux jihadistes qui ont pu, entre-

temps, renforcer leurs effectifs de combattants

en provenance de plusieurs pays (Algérie, Nige-

ria, Pakistan, Afghanistan, Mauritanie, …).

Se sentant en position de force, les combattants is-lamistes entament une remontée vers le sud en di-

rection de la capitale Bamako. Dès le 10 Janvier,

une intervention militaire de la France (opération

Serval) est lancée pour «stopper l’avancée des isla-

mistes». Des troupes de la CEDEAO (MISMA)

sont également déployés progressivement.

Quelques jours après le lancement de l’opération

Serval, plusieurs villes du Nord-Mali ont été libé-

rés du joug des islamistes. La tactique est assez

simple et bien rodée : l’aviation française entre en

scène à travers des frappes ciblées qui réduisent

considérablement la capacité de frappe des com-battants islamistes avant que n’interviennent les

troupes au sol pour permettre à l’armée ma-

lienne de s’installer par la suite dans les villes re-

conquises alors que l’armée française continue

d’avancer plus au Nord. C’est ainsi qu’après

Konna, Douenzta et Diabaly, les villes de Gao

puis Tombouctou ont été libérées avec pour ces

dernières l’appui des militaires nigériens (avec

500 soldats) et tchadiens (2.000 soldats) sous le

mandat de la CEDEAO. Avec la prise des villes

stratégiques qui faisaient office de QG pour les

groupes islamistes (Kidal pour Ansar Eddine,Gao pour Aqmi et Tombouctou pour le Mujao),

le rapport de force a été inversé en défaveur des

islamistes qui ont perdu le gros de leur matériel

dans les frappes aériennes de l’aviation française.

Quelle suite pour ce conflit ?Mais l’euphorie des premiers jours de «l’opéra-

tion Serval», a rapidement fait place à des inquié-

tudes. D’abord, il y a la crainte d’un enlisement

du conflit et d’un scénario de type «Afghanistan».

Les experts militaires redoutent surtout un épar-

pillement des jihadistes du nord-Mali vers les

pays voisins (Algérie, Mauritanie, Lybie, Ni-

ger…). Certains essayeront, de s’infiltrer dans les

grandes agglomérations de la sous-région (Ba-

mako, Niamey, Ouagadougou) en se mélangeant

avec la population. Dans les deux cas, les jiha-

distes se retrouveront sur un terrain qui leur est

plus propice, celui de la guérilla urbaine ou des at-

taques ciblées. «Il faut remarquer que les talibans

n’ont jamais voulu contrôler aucune ville depuis le

début de l’intervention américaine» rappelle un

consultant pour qui cette éventualité mérite

d’être prise au sérieux. En tout cas la prise d’otage

d’In Amenas en Algérie est venue apporter unnouvel élément dans cette guerre, le risque d’insé-

mination d’éléments terroristes dans les autres

pays du Sahel. Une menace prise au sérieux par

Paris qui a par exemple, décidé d’envoyer une

force spéciale pour appuyer l’armée nigérienne à

sécuriser les installations minières dans le Nord

du Niger où le géant français AREVA exploite de

l’uranium et s’apprête même à ouvrir, d’ici

quelques années, la deuxième plus grande mine

d’uranium au monde. Une fois les groupes isla-

mistes chassés du nord-Mali, la question épineuse

de la rébellion touareg sera aussi remise sur la ta-ble. Car jusqu’à présent, les Touaregs maliens

maintiennent leur projet de création de d’un Etat

touareg, l’Azawad dans le nord du Mali.Ibrahim Souleymane

Bien que la lutte contre le terrorisme soit l’objectif affiché, le conflit dans le nord-Mali cache

de multiples enjeux. En effet, pour les différentes parties prenantes (le Mali, le MNLA, laFrance, la CEDEAO, les groupes islamistes, et même la communauté internationale) chacuna ses intérêts à défendre. Eclairage sur les enjeux d’une guerre inédite au cœur du Sahel.

Les vrais enjeux de la guerredans le nord-Mali

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INTERVIEW Géostratégie

6 • FÉVRIER 2013

L es Afriques Diplomatie : Des groupesislamistes se sont emparés d’un vasteterritoire dans le nord du Mali, au

cœur du Sahel. Comment en sommes-nousarrivés là ?Philippe Hugon : Il y a eu conjonction de plu-

sieurs facteurs qui se sont enchaînés. Dans la

longue durée. Les revendications touarègues

sont anciennes et se sont traduites depuis l’in-

dépendance par des successions de rébellions,

de répression et de négociation. Elles ontconduit après la chute de Khadafi à un retour

des mercenaires armés, la constitution du

MNLA réclamant l’indépendance de l’Azawad

et le renforcement d’Ansar Eddinne. Aqmi

s’est installé après avoir été bouté d’Algérie.

L’influence salafiste et wahhabite appuyée par

les Etats pétroliers (Arabie Saoudite, Qatar)

s’est renforcée en opposition à la tradition de

l’Islam des confréries et du soufisme. Le Nord

Mali est devenu depuis une dizaine d’années

un espace non contrôlé par les autorités de dif-

férents trafics à commencer par la drogue.

L’appareil d’Etat malien, à l’époque du prési-

dent Touré ATT, a fait preuve de faiblesse et de

connivence au niveau politique et militaire. Le

putsch des militaires de base du 22 mars n’a

fait en réalité qu’accroitre la décomposition de

l’armée. Il faut aussi prendre en compte, à côté

de l’extension d’un islamisme radical salafiste

et de la faiblesse de l’Etat malien, les causes

socio économiques de la crise sahélo-saha-

rienne. Il y a conjonction entre une explosion

démographique, des jeunes sans perspectives,

une prolifération des trafics notamment de

drogue et d’armes sur un territoire noncontrôlé, de crises environnementales et ali-

mentaires liées au climat et à la vulnérabilité

des éco systèmes, et de marginalisation de po-

pulations rurales vulnérables. L’insécurité n’a

fait qu’accentuer la défaillance de l’Etat et des

collectivités décentralisées.

 LAD : Quels sont les enjeux de ce conflitpour le Mali ? Pour les groupes islamistesqui tiennent le nord-Mali ? Et pour lacommunauté internationale ?

PH : Les enjeux pour les djihadistes sont à lafois mafieux (contrôle des différents trafics à

commencer par la drogue) et idéologiques ou

religieux (califat de la Mautritanie à la Soma-

lie pour certaines Katibas d’Aqmi, mise en

place de la charia au Mali pour le chef d’Ansar

Eddine). Les mouvements touaregs qui se sont

alliés de manière versatile à certains circuits

mafieux, au Mujao et Aqmi, ont désiré la re-

connaissance de droits et une plus grande au-

tonomie voire l’indépendance de l’Azawad qui

n’avait aucune légitimité historique. Il y a col-

lusion entre les narco trafiquants, les djiha-

distes et les salafistes. Certains chefs tels

Mokhtar Belmokhtar voudraient devenir

l’émir du Sahara en remplaçant Ben Laden.Les enjeux pour la communauté internatio-

nale sont le retour à l’intégrité nationale du

Mali, la lutte contre le terrorisme et le djiha-

disme, le respect de la souveraineté des Etats et

la sécurisation d’un territoire y compris pour

protéger des intérêts stratégiques. Le conseil

de sécurité a, à l’unanimité, voté en décembre

la résolution 2085. Tous les pays du monde ont

approuvé cette intervention à l’exception par-

fois versatile de l’Egypte, de la Tunisie et du

Qatar. Les opinions publiques africaines ont

approuvé à l’exception de certains pays

d’Afrique du Nord ou de certains imams wah-

habites. En revanche, les forces africaines ont

mis du temps à se mobiliser, l’armée malienne

est décomposée dans sa hiérarchie et mal

équipée et l’Europe a soutenu verbalement

plus que militairement. L’attaque contre le

bloc gazier d’In Aminas en Algérie en février

2013 a toutefois fait basculer certains hésitants.

Il faut néanmoins rappeler que, malgré des ré-

sultats a priori rapides de l’armée française et

malienne, la vision de territoires libérés peut

se transformer en celle de zones occupées et

que l’intervention d’un pays occidental, an-cienne puissance coloniale, peut créer un cer-

tain malaise en dévoilant notamment les

insuffisances du dispositif militaire africain.

 LAD : Certains observateurs affirmentque le conflit qui se déroule au Nord-Maliest une conséquence de la guerre en Libye.Est-ce bien le cas ?PH : La chute de Khadafi a été un des facteurs

contribuant à la crise et des dégâts collatéraux 

prévisibles. Il était à la fois un pyromane et un

pompier et après avoir attisé les conflits, il étaitle négociateur de la paix. Il voulait constituer

un ensemble autonome ou indépendant toua-

reg. Sa chute s’est traduite par un retour des

mercenaires essentiellement touareg avec

armes constituant les mouvements du MNLA

et de Ansar Eddine. Le non contrôle du terri-

toire Lybien a conduit depuis à des trafics

d’armes vers le Mali transitant par l’Algérie.

 LAD : Peut-on faire un parallèle entrele conflit au Nord-Mali et la guerre enAfghanistan ?PH : Il y a effectivement certaines proximités

en termes de terrains (grottes, zones monta-

gneuses), d’intégrisme religieux, de risquesd’enlisement dans certaines zones et surtout

de risques d’échecs de la reconstruction na-

tionale . Mais les djihadistes sont beaucoup

plus un corps étranger que les Talibans. L’Af-

ghanisatn n’a jamais été conquise de son his-

toire. L’Algérie peut ne pas jouer le rôle du

Pakistan en approvisionnant les djihadistes en

armes, essences et autres soutiens. Les djiha-

distes isolés peuvent se réfugier durablement

dans certaines zones mais ils seront asséchés

en essence et armes si les pays limitrophes

contrôlent leurs frontières. En même temps

l’Afghanistan est un exemple à ne pas suivre

pour la reconstruction de l’Etat et l’alimenta-

tion de la corruption au sein de l’appareil

d’Etat. Il s’agit pour l’aide au sahel d’appuyer

les projets de développement de base et de fa-

voriser la recomposition du tissu social et du

vouloir vivre ensemble.

 LAD : Quelle leçon peut-on tirer de ceconflit ?PH : Ce conflit montre que le monde a changé

et que l’intervention militaire française n’est

pas néo coloniale ou une croisade contre l’Is-lam mais une action contre des actions inté-

gristes et mafieuses qui menacent les pays

africains et au-delà l’Europe. Elle répond au

sens large à une sécurisation de l’Afrique sa-

hélo saharienne y compris pour des intérêts

miniers et pétroliers africains et internatio-

naux. Il montre également que les conflits mo-

dernes correspondent à des emboîtements

d’échelle allant du local à l’international, par

des enchevêtrements de facteurs et d’acteurs

éloignant les guerres modernes et asymé-

triques des guerres anciennes. Elle a été aussi lesigne d’une Europe non puissance et d’une re-

lative faiblesse des armées africaines limitant

la solution d’une pax africana.

Propos recueillis par Ibrahim Souleymane

Philippe Hugon, directeur de recherche à l’IRIS, auteurde géopolitique de l’Afrique, Paris SEDES 2012, rappelle

qu’à la base du chaudron Nord Malien, il y a des revendications

touarègues anciennes.

Les perspectives du Nouveau Mali

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INTERVIEW Géostratégie

FÉVRIER 2013 • 7

Pour Alain Pellegrini, Général français à la retraite, Consultanten stratégie militaire et maintien de la paix, ancien commandant

de la Force intérimaire des Nations unies au Liban(FINUL),

le conflit malien est une conséquence de la guerre en Libye.

Les perspectives du Nouveau Mali

L es Afriques Diplomatie : Certainsobservateurs affirment que leconflit qui se déroule au Nord-Mali

est une conséquence de la guerre en Libye.Est-ce que c’est bien le cas ?Alain PELLEGRINI : Le conflit au Mali est

effectivement une des conséquences de la

guerre en Libye. On peut dire que la guerre

en Libye a contribué à la naissance du

conflit dans le nord-Mali. Beaucoup

d’hommes qui combattaient pour Kadhafisont venus au Mali avec leur armement. Il y 

a également des armements libyens qui cir-

culent dans la région et qui ont été vendus

aux groupes islamistes qui occupent actuel-

lement le nord du Mali. La guerre en Libye

a donc eu des conséquences sur le conflit

malien, ça c’est sûr. Et il apparaît qu'elles

n'ont pas été clairement anticipées lorsque

les opérations en Libye ont été menées. Ou

bien elles ont fait partie, à l'époque, des

risques acceptés.

 LAD : Quels sont les enjeux de ce conflitpour le Mali ? Pour les groupes islamistesqui tiennent le nord-Mali ? Et pour lacommunauté internationale ?AP : Les enjeux pour le Mali et pour son

gouvernement sont de rétablir la souverai-

neté nationale en reprenant le contrôle de la

totalité du pays. Pour la communauté toua-

reg, l’enjeu est d’arriver à une situation de

compromis qui soit acceptable pour le gou-

vernement central et pour les touaregs.

Pour les islamistes, l’objectif principal est de

se maintenir dans cette position centraled'une zone sahélienne qui va du Mali

 jusqu’au Soudan. Ils veulent continuer à se

maintenir dans cette zone de circulation

aisée qui leur permet d'exercer leur in-

fluence, voire leur contrôle, sur les popula-

tions de nombreux pays à majorité

musulmane (Mauritanie, Algérie, Mali,

Niger, Libye, Tchad, Soudan).

Par contre pour la communauté internatio-

nale, le but est d’éradiquer et de mettre fin

au terrorisme dans la région. Afin d’éviter un

«Afghanistan» africain et la persistance del'existence d'une zone de non-droit. L’autre

enjeu pour la communauté internationale

est de faire respecter le droit international

dans cette région. Et pour certains pays oc-

cidentaux et africains qui participent à la re-

conquête du nord-Mali, l’enjeu est aussi de

préserver leurs intérêts économiques au Mali

et dans les pays voisins.

 LAD :Un tel conflit présente t-il des risquespour les pays voisins du Mali ?AP : Bien sûr, ce conflit présente des risques

pour les pays voisins. Car les pays voisins du

Mali sont aussi des pays à majorité musul-

mane et donc des cibles privilégiées pour leprosélytisme islamiste. Les groupes islamistes,

quand ils vont, sous la pression des opérations

en cours, devoir quitter le Mali, vont sûre-

ment tenter de s’implanter en Algérie ou en

Mauritanie, voire au Niger et en Libye. Les

frontières sont particulièrement perméables

et très difficiles à contrôler. Donc il faut que

les pays voisins du Mali se préparent à faire

face à la menace de ces groupes islamistes.

 LAD : Sans l’aide de l’armée Française etdes forces armées de la CEDEAO, les mili-taires maliens disposaient-ils des moyensnécessaires pour faire face à cette invasiondes groupes islamistes ?AP : Sans l’intervention de la France, les ma-

liens n’avaient pas les moyens de faire face à

ces islamistes. Le Mali est passé par un coup

d’Etat. C’est un gouvernement de transition

qui gère le pays, avec une armée en pleine

décomposition. Bamako ne pouvait pas

compter sur son armée pour reconquérir le

nord du pays. Une partie d'ailleurs a rejoint

les groupes terroristes.

 LAD :S’a-git-il d’une guerre comparable àcelle de l’Afghanistan ?AP : Il y a très peu de similitudes entre les

deux cas. La situation au nord-Mali est com-

parable à celle de l’Afghanistan à un seul

point de vue : le mali est un pays enclavé,

sans ouverture maritime, donc difficile d’ac-

cès. Aucune intervention ne peut s'y mener

sans une coopération à minima des pays qui

l'entourent (autorisations de survol, ache-

minement de convois par la voie terrestre,

appuis logistiques extérieurs). Le fait de vou-loir rétablir le droit international dans la

zone de souveraineté, d'éradiquer le terro-

risme et d’aider à un retour de la stabilité est

un but comparable au but poursuivi en Af-

ghanistan. Par contre en ce qui concerne la

population (moins nombreuse), les condi-

tions climatiques, les choses sont moins dif-

ficiles qu’en Afghanistan.

En plus pour le Mali, les Français connais-

sent ce genre de région pour y avoir mené

plusieurs missions dans un cadre semblable

(Tchad). L’environnement Malien est plus

facile à maîtriser pour eux que l’Afghanis-

tan. Et les bonnes relations avec les popula-

tions maliennes depuis longtemps font quele dialogue est plus facile.

 LAD : Selon les officiels, l’objectif finalsera la libération totale du nord du Mali.Est-ce que cet objectif est réalisable ?AP : Oui l’objectif est réalisable. Plusieurs

pays ne vont pas s’engager sur des objectifs

qu’ils ne peuvent pas réaliser. Mais la ques-

tion est de savoir dans quel délai ? Car il

faudra quand même du temps pour recon-

quérir la totalité du pays et y maintenir la

sécurité.

 LAD : Quelle est l’issue probable pour ceconflit ?AP : Le Mali va rétablir sa souveraineté sur

l’ensemble de son territoire. Mais cela risque

d’être long. Car la France n’a pas vocation à

mener cette guerre seule. Rétablir sa souve-

raineté, c’est une mission régalienne qui re-

vient à l’armée malienne avec l’aide de la

CEDEAO. Il faut que les forces françaises

soient relayées par les forces maliennes et les

forces de la CEDEAO. Et cela risque d’être

relativement long. D'un point de vue poli-tique ce conflit devrait déboucher sur l'éta-

blissement de nouvelles relations, apaisées et

durables, entre le gouvernement central ma-

lien et la communauté touareg. Cette der-

nière a contribué à la situation actuelle, car

elle espérait en tirer des avantages. Mais elle

a dû déchanter et le temps du dialogue de-

vrait revenir avec la reconquête du terrain

par les forces légales.

Il y a un seul pays qui a agi en tant qu'ultima

ratio, c’est la France. Car il fallait absolument

riposter rapidement. Sinon c’était Bamakoqui risquait de tomber aux mains des

groupes islamistes, et ce serait la fin du Mali

en tant qu’Etat souverain.

Propos recueillis par Ibrahim Souleymane

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MOUVEMENTSET NOMINATIONS

Chakib Benmoussa, ambassa-deur du Maroc en France / unbrillant technocrate ambassa-deur à Paris L'ex-ministre maro-

cain de l'Intérieur, devientambassadeur en France. C’est untechnocrate surdiplômé qui prendainsi les rennes de la diplomatie marocaine en France (ChakibBenmoussa est lauréat de l'École polytechnique de Paris, diplôméde l’École nationale des ponts et chaussées de Paris, diplômé del’Institut d'administration des entreprises de Lille (IAE Lille) et lau-réat du Massachusetts Institute of Technology (MIT)). Par cette no-mination le Maroc comble un vide, le poste était resté vacantdepuis Octobre 2011 lorsque El Mostapha Sahel alors Ambassa-deur en France a été nommé conseillé du Roi Mohamed VI.

8 • FÉVRIER 2013

C’est désormais offi-ciel, John Kerry prendla tête de la diplomatieaméricaine. Ce franco-phile candidat démo-crate malheureux aux 

élections présiden-tielles de 2004 rem-place ainsi Hilary Clinton qui n’a passouhaité être recon-duite à son poste desecrétaire d’Etat, du-rant le second mandatde Barack Obama.

John Kerry, qui parleparfaitement le fran-çais, va-t-il donnerplus de tonus aux rela-tions entre les Etats-Unis et les paysfrancophones commela France où il a vécudurant des années ?

Gestionnaire puispolitologue, le jeuneambassadeur duBénin en Turquie néle 12 Aout 1979 àCotonou a un par-

cours professionnelbien accompli. Il estmembre de conseild’administration deplusieurs sociétésprivées. Promoteurde la Société Afri-caine de Pétrole,d’Investissement etde Négoce (SAPINSarl). Titulaire d’unMaster en RelationsInternationales,Moïse Tchando Ké-

rékou fils du Géné-ral Mathieu Kérékouex-président duBenin a créé en2010 sa formationpolitique, le Mouve-ment Pour la Relève(MPR), dont il de-meure le Président.

Jack Lang nouveau présidentde l’Institut duMonde ArabeJack Lang ancien minis-tre français de la Cul-ture, vient d’êtrenommé président del’Institut du MondeArabe. L'Institut duMonde Arabe est lefruit d'un partenariat

entre la France et vingt-deux pays arabes.L’IMA conçu pour faireconnaître et rayonnerla culture arabe est de-venu aujourd'hui un vé-ritable «pont culturel»entre la France et lemonde arabe.

Du 14 au 15 février2013 : 2ème Conférenceannuelle de l’AllianceBorderless, à Ouaga-dougou. La deuxièmeconférence annuelle del’Alliance Borderless sedéroulera à Ouagadou-gou au Burkina Faso du14 au 15 février 2013.L’Alliance Borderlessqui vise à accroître leséchanges commer-ciaux en Afrique del’Ouest est une coali-tion dirigée par le sec-teur privé. La CEDEAOet l'UEMOA qui se sont

accordées sur la poli-tique commerciale de larégion participent éga-lement à cette impor-tante rencontre auxcotés des représentantsdes différents départe-ments ministériels del'Afrique de l'Ouest.Cette année, la rencon-tre est placée sous lethème : «Intégrer lesMarchés».Du 26 au 30 Mars 2013 :Forum Social Mondial, àTunis. Le Forum SocialMondial (FSM) tiendrasa prochaine édition à

Tunis du 26 au 30 Mars2013. Créé en 2001 auBrésil, le FSM qui réunitles mouvements de lasociété civile du mondeentier est un espace derencontre, de réflexionet de débat sur les ques-tions de démocratie, decrises financière, écono-mique, alimentaire etenvironnementale quiaffectent la planète. LeFSM s’emploie à bâtirune société planétaireaxée sur l’être humain.Mars 2013: 5ème Som-met des BRICS à Dur-

ban, en Afrique du Sud.Le 5ème sommet desBRICS (Brésil, Russie,Inde, Chine, Afrique duSud) se tiendra le 30mars prochain, à Dur-ban en Afrique du Sud.Le thème de cette édi-tion s’intitule «le BRICSet l’Afrique – un parte-nariat pour le dévelop-pement, l'intégration etl'industrialisation».4 avril - Sommet Inter-national du Pétrole, àParis. Le 14ème SommetInternational du Pétroleva se tenir le 04 avril

2013 à Paris. De nom-breux enjeux serontexaminés lors de cettenouvelle édition. Rap-pelons que le précé-dent sommet avait misen évidence les muta-tions que connait lemarché de l’énergie,notamment avec le dé-veloppement du gaz deschistes, un gaz écono-mique dont le prix est90% inférieur à celuidu pétrole, et qui esten passe de changer ladonne sur le marchéénergétique mondial.

Paul Badji, Nouvelambassadeur duSénégal en France

Moïse TchandoKérékou,Nouvelambassadeur

du Béninen Turquie /Un jeuneambassadeurpour la diplo-matie beninoise

Paul Badji, diplomatede carrière devientAmbassadeur du Sé-négal en France unposte très convoitélaissé vacant depuis le29 octobre 2012 parMankeur Ndiaye,suite à sa nomination

comme ministre desaffaires étrangères duSénégal. Paul Badji aune riche expériencediplomatique. Eneffet, il a occupé plu-sieurs postes diplo-matiques dans lepassé.

Amadou SOW,nomméAmbassadeur duSénégal au MarocPrécédemment Ambas-sadeur du Sénégal àTunis, Amadou SOWvient d’etre nommé

Ambassadeur du Séné-gal auprès du Royaumedu Maroc, en remplace-ment d’Amadou Habi-bou NDIAYE, appelé àd’autres fonctions.

John Kerry,nouveausecrétaire d’Etataméricain/

Un francophileà la tête de ladiplomatieaméricaine

AGENDA DIPLOMATIQUE