Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Février 2016

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  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

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    Mardi 23 fvrier 2016 - 72eanne - No 22116 - 2,40 - France mtropolitaine - www.lemonde.fr Fondateur : Hubert Beuve-Mry - Directeur : Jrme Fenoglio

    Algrie200 DA,Allemagne 2,80 ,Andorre 2,60 ,Autriche 3,00 ,Belgique 2,40 ,Cameroun 2 000 F CFA, Canada 4,75 $,Cte d'Ivoire 2 000 F CFA,Danemark 32 KRD,Espagne 2,70 ,Espagne Canaries 2,90 ,Finlande 4,00 ,Gabon 2 000 F CFA, Grande-Bretagne 2,00 ,Grce 2,80 , Guadeloupe-Martinique2,60 ,Guyane 3,00 ,Hongrie 990 HUF,Irlande 2,70 ,Italie 2,70 ,Liban 6 500 LBP,Luxembourg 2,40 ,Malte 2,70 ,Maroc 15 DH,Pays-Bas 2,80 , Portugal cont. 2,70 ,La Runion 2,60 ,Sngal 2 000 F CFA,Slovnie 2,70 , Saint-Martin 3,00 ,Suisse 3,60 CHF,TOM Avion 480 XPF, Tunisie 2,80 DT, Turquie 11,50 TL,Afrique CFA autres 2 000 F CFA

    LES FEMMES,AVENIR DE LAFRIQUE

    SUPPLMENT

    L

    aptre du renouveau vadonc sannoncer Vesoul.

    Dans cette cit, haut lieude la chrtient au Moyen Age po-pularis par Jacques Brel dans unechanson vibrante de frustration,Bruno Le Maire va se librer dunpoids. Le dput (Les Rpublicains,Eure) y dclarera sa candidature la primaire de la droite et du cen-tre lors dune runion publique,

    mardi 23 fvrier. Pourquoi Vesoul ?Dabord parce que le maire, Alain

    Chrtien, un proche de longuedate, le recevra avec les honneurs.Mais surtout parce que la prfec-ture de Haute-Sane est loin deParis, loin des ministres, loin decette noblesse dEtat dont BrunoLe Maire dit tre lincarnationchimique la plus pure .

    LIRE LA S UITE PAGE 7Un an aprs la suppression desquotas laitiers, les revenus desleveurs sont en chute libre.En 2014, le prix moyen de latonne de lait atteignait 365 euros,et mme 400 en dbut danne.En janvier et fvrier 2016 elle nese ngocie qu 270 euros.

    La chute de la demande mon-diale frappe dabord les produc-teurs les plus spcialiss, qui sesont endetts pour investir oudvelopper leur cheptel. En dixans, le nombre dexploitationslaitires est dores et dj pass

    de 100 000 66 600.LIRE LE CAHIER CO PAGES 6-7

    ET LA CHRONIQUE PAGE 20

    PORTRAIT

    BRUNO LE MAIRE : DROITE,DU RENOUVEAU ?

    par matthieu goar

    et alexandre lemari

    Le prix payer

    de la fin desquotas laitiers

    AGRICULTURE

    LE REGARDDE PLANTU

    Unedic et droit du travail,les deux dfis de Franois HollandeLe patronat et les syndi-cats ont entam, lundi22 fvrier, des ngociationssur une nouvelle conven-tion dindemnisationdes demandeurs demploi

    La dgressivit des allo-cations perues par leschmeurs ou une majora-tion des cotisations desentreprises qui abusentdes CDD sont envisages

    Au mme moment,le projet de rformedu code du travail suscitedes interrogations au seindu gouvernement et destensions au Parti socialiste

    Trois ministres, Jean-Marc Ayrault, SgolneRoyal et Marisol Touraine,sopposent lutilisationdu 49.3 pour ce texte LIRE PAGES 8, 9 ET DBATS PAGE 12

    Les Kurdesentre deux fronts

    Un milicien, dans le quartier de Firat, Nusaybin. MILIEN URBANO/MYOP POUR LE MONDE

    Les milices kurdes quicontrlent plusieurs quartiersde Nusaybin sattendent uneoffensive de larme turque

    Cette ville-frontire du sudde la Turquie vit au rythmede la guerre civile en Syrie

    LI RE PA G E 2

    FINANCELA CHINE TENTEDENRAYER LA FUITEDES CAPITAUXLI RE LE C A HI ER C O PA G E 3

    TATS-UNISTRUMP CREUSELCART CHEZLES RPUBLICAINSLI RE PA G E 6

    A Calais, lultimatum que lEtata pos pour lvacuation de lazone sud de la jungle doitexpirer mardi 23 fvrier au soir.Dans un entretien La Voixdu Nord,le ministre de lint-rieur, Bernard Cazeneuve, dfend une opration humanitaireo nous proposons des solutions tous . Les associationsqui uvrent dans le campde migrants contestentles projets de substitutionet dnoncent une politique la petite semaine .

    LI RE PA G E 1 0ET LEN Q U TE PA G E 1 1

    Calais :en attendantlvacuation

    SOCIT

    DAVID CAMERONJOUE LEUROPE QUITTEOU DOUBLE LIRE P AGE 20 ET NOSINFORMAT IONS P AGE 4

    DISCOVERTHEPOTENTIALDcouvrezle potentiel

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    JEAN-MICHELALBEROLA,

    REPR

    ENDRELACONVERSATION,

    2005.

    ADAGP,PARIS2016

    19 FV - 16 MAI 2016PARTENAIRES ANNUELS

    AVEC LE SOUTIEN DEPARTENAIRES MDIA

    PARTENAIRE DE LEXPOSITION

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    REPORTAGE

    nusaybin (turquie) -envoy spcial

    Sous le pont Ahmet-Kaya, mis horsdusage en aot 2015 par unebombe artisanale pose par lescombattants kurdes, la chausseperfore par le souffle de lexplo-sion laisse apparatre les eaux peu

    profondes du agag. Sombre, lourd, le ruis-seau glisse sur son lit de vase vers la Syrie voi-sine et Qamichli, la capitale des Kurdes sy-riens, moins de 2 kilomtres en aval. Sur larive gauche, un camion-citerne calcin mar-que lentre des quartiers insurgs de la petite

    ville-frontire de Nusaybin. Dans le prolonge-ment du viaduc dsormais barr par cettepave crible dimpacts de balles, commencele Sirin Bulvari avenue jolie en turc , lar-tre qui traverse les zones contrles par lagurilla urbaine du Parti des travailleurs duKurdistan (PKK). Les autorits turques ont an-nonc, dbut fvrier, une opration immi-nente contre cette partie de la ville.

    Dun pas las, de rares mres de famille sor-tent de ces quartiers qui comptent parmi lesplus dfavoriss de la ville. Les rues quellesviennent de quitter, barricades par des em-pilements rguliers de pavs renforcs desacs de sable, sont bordes de maisons aban-donnes. Aprs avoir subi plusieurs phasesdaffrontements violents entre les combat-tants kurdes et les forces de scurit, Nusay-bin se prpare dsormais au pire. La guerreurbaine pour l administration autonome des zones-rgions, dclenche par le PKK lt 2015 dans le sud-est de la Turquie, na eudautre issue que la destruction de quartiers

    entiers, la mort de nombreux civils ainsi quedimportants dplacements de population.

    Les habitants sont terroriss. La majorit adj quitt la ville. Ils savent que la police et lar-me nhsitent pas abattre de simples ci-toyens , indique Yusuf, qui a dj mis ses en-fants labri et se prpare partir son tourds la reprise des hostilits. Quelques famillesresteront pourtant jusquau dernier moment. Nous nous sommes installs ici aprs la des-truction de notre village par larme turqueen 1993. On est repartis zro Nusaybin et denouveau, nous navons plus rien ni nulle parto aller , se dsole un habitant du quartier deFirat. Il partage avec deux autres familles ledernier appartement encore en tat de sonimmeuble dvast par les combats de

    lautomne. Quelques enfants livrs eux-m-mes courent et jouent au dtour de ruelles ose sont amasss les dbris ordinaires de laguerre, avec, figs dans des flaques de boue ouabandonns dans les caniveaux, des vte-ments et des jouets casss, souvenirs dunquotidien perdu.

    Au cours des derniers mois, le trac des rues

    sest doubl dun complexe de barricades etde tunnels qui, le moment venu, permettrontde protger les combattants kurdes des blin-ds et des tireurs dlite turcs. Les murs desjardins ont t ventrs pour leur permettredvoluer sans emprunter les voies principa-les dont certains accs sont dfendus par desengins explosifs improviss prts tre d-clenchs si les forces de scurit sy enga-geaient. Une nouvelle gographie se dessine,impose par la mcanique dune guerre ve-nue dailleurs.

    L EXPRIENCE DE KOBANLe quartier appartient dsormais ceux quiprtendent le dfendre, les combattants kur-des qui se sont constitus en units de pro-tection civile (YPS). Cette nouvelle mana-tion du PKK a t cre sur le modle desYPG, les milices kurdes de Syrie affilies auPKK et en guerre contre lorganisation Etat is-lamique (EI) de lautre ct de la frontire. Le camarade Khabat, 22 ans, est lun dentre

    eux. Aprs avoir combattu avec les Kurdes de

    Syrie lors du sige de la ville de Koban parlEI en 2014, il a rejoint la lutte en territoireturc comme nombre de volontaires recruts

    alors par les YPG. Tout ce que nous avons ap-pris Koban, nous lutilisons ici. Au Rojava[appellation du Kurdistan syrien], nousavons t forms aux mthodes de combat enville. Les tunnels, les barricades, les fortifica-tions, les piges explosifs que nous mettons enplace ici, tout cela vient de notre exprience Koban ,explique-t-il, kalachnikov en ban-doulire et grenade la ceinture tandis quungroupe de combattants, aids de quelquesenfants du quartier, creuse un foss en tra-vers dune rue voisine au son de chants depropagande du PKK diffuss par des encein-tes portables.

    Toutes les familles que je connais ont vu aumoins un de leurs fils ou une de leurs filles par-tir au Rojava ,reconnat, les yeux dans le va-gue, une mre de famille du quartier en tenuepaysanne, venue saluer les combattants. Cer-tains dentre eux, comme Khabat, sont reve-nus. Ils conoivent leur guerre dans les villeskurdes de Turquie comme le prolongementde leur lutte contre lEI en Syrie. La direction

    du PKK a promis pour le printemps une impli-cation plus forte des combattants retranchsdans les montagnes kurdes, et les conflits depart et dautre de la frontire turco-syrienneconvergent dangereusement.

    Les autorits turques considrent commeune menace pour la scurit nationale lesavances des forces kurdes syriennes, du faitde leurs liens avec le PKK. En attribuant lat-tentat du 17 fvrier Ankara (28 morts) auxKurdes syriens, malgr labsence de revendi-cation de leur part et des mthodes qui nesont pas les leurs, les autorits turques trou-vent une justification pour affaiblir directe-ment leurs positions en territoire syrien etmettre en pril leur coopration avec la coa-lition internationale contre lEtat islamique.

    Elles bombardent la rgion kurde dAfrin, aunord-ouest de la Syrie, et permettent desgroupes rebelles syriens vous empcherla progression des Kurdes dans la rgiondAlep de transiter par le territoire turc.Autant de signes de lintrication croissantedes conflits de la rgion, qui se manifesteaussi Nusaybin.

    La frontire qui spare Nusaybin de Qami-chli nous a t impose. Nous sommes touskurdes, dun ct comme de lautre , justifiele camarade Devrim, un des cadres duPKK dans la ville qui, 44 ans, dit avoir vingt-sept annes de gurilla derrire lui. Origi-naire de Turquie, il affirme avoir lui-mmecombattu Afrin dans les rangs des Kurdessyriens avant de rejoindre les bases de la gu-rilla du PKK la frontire turco-irakiennepuis, il y a trois mois, les quartiers insurgsde Nusaybin. Assis sur un matelas dpos

    dans lherbe dun terrain vague entourdimmeubles vides, il sattend une batailledcisive Nusaybin, plus importante que lesaffrontements qui se sont succd dans lesud-est de la Turquie depuis lt dernier etdont les forces kurdes nont rien obtenu : Nous percevons la proximit de la frontireavec la Syrie comme un avantage stratgiquequi pourra nous tre utile le cas chant. Nosluttes en Syrie et en Turquie vont continuer saffecter lune lautre.

    NO MANS LAND TRUFF DE MIRADORSAlors que le silence de la ville, dj videdune partie de sa population, vient dtrebris par le vrombissement dun avion dechasse, dont on ignore la nationalit et siltraverse le ciel syrien ou le ciel turc, des dto-nations darme feu retentissent. Suivies deprs par une sirne dambulance, elles pro-viennent de Nusaybin. On apprendra quunemre de famille dune cinquantaine dan-nes vient dtre tue et sa fille blesse par

    des tirs provenant dun blind des forces ar-mes dans le quartier de Yenisehir.

    Dans la nouvelle annexe du carr des mar-tyrs du PKK, au cimetire de Nusaybin quijouxte le no mans land min et truff de mi-radors longeant la frontire du Rojava , unevingtaine de nouvelles tombes ont t rcem-ment creuses. Les dpouilles de jeunes hom-mes et de jeunes femmes de la ville, tombsen Syrie face lEtat islamique au cours desdernires annes, y reposent aux cts deceux qui sont morts dans les quartiers de Nu-saybin en combattant les forces de scuritturque. En cas de ncessit, la superficie duterrain permettra den installer plusieurs cen-taines dautres.p

    allan kaval

    CES DERNIERS MOIS,LE TRAC DES RUES

    SEST DOUBLDUN COMPLEXEDE BARRICADESET DE TUNNELS

    CENS PROTGERLES COMBATTANTS

    KURDESLE MOMENT VENU

    A Nusaybin,les Kurdes face aux TurcsLes forces turques se prparent une vaste offensive contreles combattants kurdesdans la ville de Nusaybin, deux pas de la frontire syrienne

    Une femme fuitle quartier de Firat, Nusaybin, par craintedes combatsentre larme turqueet les rebelles kurdes,le 18 fvrier.MILIEN URBANO/MYOP

    POUR LE MONDE

    Alep

    Afrin

    SYRIE

    TURQUIE

    IRAK

    LIBAN

    Damas

    100 km

    Koban Qamichli

    Nusaybin

    Mer

    Md.

    La Turquie se dit en lgitime dfense

    La Turquie agit en lgitime dfense contre la milice kurde sy-rienne quelle accuse dtre lorigine de lattentat meurtrierdAnkara (28 morts), mercredi 17 fvrier, et se rserve le droit demener toutes sortes doprations militaires, a dclar samedi20 fvrier Recep Tayyip Erdogan. Personne ne peut limiter ouempcher le droit la lgitime dfense de la Turquie face des at-taques terroristes ,a dit le chef de lEtat turc, sans prciser silcomptait envoyer des troupes en Syrie. Lattaque contre des vhi-cules militaires a t revendique par un groupe kurde turc dissi-dent du PKK, les Faucons de la libert du Kurdistan (TAK), maisles dirigeants turcs lattribuent aux combattants kurdes syriensdes units de protection du peuple (YPG).

  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

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    En Syrie, lEtat islamique frappe les chiites Homs et DamasLes attaques, qui ont fait plus de 150 victimes, ont notamment vis le grand sanctuaire chiite de Sayeda Zeinab, dans la capitale

    Lorganisation Etat islami-que (EI) a revendiqu, di-manche 21 fvrier, ses at-

    taques les plus meurtrires enSyrie, frappant tour tour Homspuis Damas, deux villes sous lecontrle du rgime. Au moins150 personnes ont t tues danscette srie dattentats. Elle con-cide avec de nouvelles pertes en-registres par le groupe djiha-diste face aux forces allies auprsident Bachar Al-Assad danslest de la province stratgiquedAlep, dans le nord du pays. Di-manche, au moins 50 djihadistesde lEtat islamique ont t tusdans les combats avec larme etsous les frappes russes, selon

    lObservatoire syrien des droitsde lhomme (OSDH).

    Un double attentat la voiturepig a dabord vis dimanchematin le quartier de Zahra, ma-jorit alaouite, Homs, troisimeville du pays. La chane gouverne-mentale Al-Ikhbariya a diffusdes images dchoppes endom-mages, de dbris jonchant lesrues, de blesss et de voitures cal-cines. Lattaque a fait au moins59 morts, selon lOSDH. Le gou-verneur de la province de Homs,Talal Barazi, a quant lui fait tatdun bilan provisoire de 25 morts.La ville, entirement contrlepar le rgime, avait dj t lethtre en janvier dun double at-

    tentat revendiqu par lEI, quiavait fait 20 morts.

    Plus tard dans la journe, lesalentours du grand sanctuairechiite de Sayeda Zeinab, Damas,ont t la cible dune srie datta-ques, dont une la voiture pige.Au moins 83 personnes ont ttues, selon lagence officielle sy-rienne. LOSDH a pour sa partdonn un bilan de 96 morts dontau moins 60 civils et 160 blesss.

    Crise humanitaireLa localit au sud de la capitaleabrite notamment des familles demiliciens chiites trangers quicombattent aux cts des forcesdu rgime et des Gardiens de la r-

    volution iraniens. Les attentatsont concid avec la sortie des co-les, tuant plusieurs lves , a pr-cis la tlvision syrienne.

    LEI avait dj revendiqu un tri-ple attentat meurtrier dans cequartier damascne, le 31 janvier,au dbut des efforts mens Ge-nve pour entamer des pourpar-lers de paix entre le rgime et lop-position. Lattaque avait t pr-sente par le chef de la dlgationgouvernementale, Bachar Jaafari,comme une preuve de la menaceque reprsentaient les terroris-tes , dsignant sous ces termeslensemble de lopposition.

    Depuis, les ngociations ontachopp le 3 fvrier. Aux exigen-

    ces poses par lopposition de me-sures humanitaires pralables,Damas et ses allis avaient r-pondu par une vaste offensivecontre les zones tenues par les re-belles autour dAlep, qui a cr unenouvelle crise humanitaire. Lac-cord sign Munich, le 11 fvrier,par les dix-sept pays du Groupeinternational de soutien la Syrie(ISSG), pour un accs humanitaireaux villes assiges et une cessa-tion des hostilits sous une se-maine, tarde se concrtiser. Lespourparlers ne pourront repren-dre, comme prvu, le 25 fvrier.

    Dimanche, le secrtaire dEtatamricain John Kerry a annoncavoir dfini avec son homologue

    russe, Serguei Lavrov, les modali-ts dun accord sur une cessationdes hostilits. Il devrait tre pr-sent aux pays de lISSG, avantdtre finalis dans les prochainsjours entre le prsident amri-cain, Barack Obama et le chefdEtat russe, Vladimir Poutine, adit esprer M. Kerry. de son ct, leprsident Bachar Al-Assad sestdit prt samedi un cessez-le-feu si les terroristes ne lexploitentpas et si les puissances trang-res cessent dappuyer les rebelles.Lopposition a pour sa part vo-qu la possibilit dune trve,en change de garanties, dont lar-rt des frappes russes.p

    hlne sallon

    Les Egyptiensindigns par

    les violencespoliciresLe prsident Sissi a d intervenirpour dnoncer des actes de torturesqui restent largement impunis

    Les cas de torture et de vio-lence policires se succ-dent sans interruption enEgypte. Lenchanement

    et la gravit des affaires sont telsque le prsident, Abdel Fattah Al-Sissi, a ordonn, vendredi 19 f-

    vrier, que des amendements lgis-latifs soient soumis sous quinzejours au Parlement pour endiguerle flot d actes irresponsablescommis par certains membres desforces de police contre des ci-toyens. Le sujet, souvent dbattudans les mdias depuis 2015, a prisun tour inquitant avec la mort encore non lucide de ltu-diant italien Giulio Regeni, dont ladpouille mortelle a t retrouveportant des signes de torture, le3 fvrier, sur un bas-ct duneroute de la banlieue du Caire (LeMondedu 6 fvrier).

    Les autorits ont beau assurerque les forces de scurit nont rien voir avec la disparition du jeunehomme de 28 ans au Caire, le25 janvier, ni avec sa mort, le doutesubsiste. Dans une enqute pu-blie le 12 fvrier, des journalistes

    duNew York Timesont tabli, sur labase de plusieurs tmoignages, ycompris au sein des forces de scu-rit, que le doctorant de luniver-sit de Cambridge avait t arrtle soir de sa disparition. Lexistencedun tmoin entendu par les en-quteurs italiens a aussi t vo-que par la tlvision italienne.Linformation a t strictement d-mentie par les autorits gyptien-

    nes. Mais lenqute confie unofficier condamn en 2003 pourtorture sur un dtenu navancepas, et lItalie simpatiente.

    Les dfenseurs des droits delhomme pointent plusieursaspects troublants. Le jeune

    homme a disparu le soir du cin-quime anniversaire de la rvolu-tion de 2011, en pleine vague dar-restations massives de jeunes etdactivistes destine prvenirdes manifestations. Contestant lathse dun accident de la routeavance par le pouvoir, lautopsiepratique en Italie a rvl desbrlures de cigarettes, des coupsde couteau et une fracture du cou,autant de marques dj observessur les victimes de tortures endtention.

    Faux rapport mdicalLes voix slvent pour dnoncerle retour dun Etat policier , plusfroce encore qu lre du prsi-dent Hosni Moubarak (1981-2011).Dans un rapport rendu public le10 janvier, le Centre Nadeem pourla rhabilitation des victimes de

    torture a estim que 474 person-nes ont t tues par les forces depolice en 2015 dont 137 en dten-tion et 676 autres tortures. Unnombre jamais observ depuis lacration de lONG en 1993, quiparle de politique de rpressionutilise comme moyen de gouver-nance . Linjonction qui lui a tfaite le 17 fvrier par le ministrede la sant de fermer, au motif

    dune absence dautorisation, estperue par lONG comme unemanuvre pour la faire taire.

    Lampleur des violences polici-res cristallise la colre dune par-tie de plus en plus importante dela population. Le syndicat des m-decins a entam un mouvementde protestation contre les atta-ques policires sur le personnelmdical aprs la dtention abu-sive, le 28 janvier, de deux mde-cins de lhpital public de Mata-riya, dans le nord du Caire, quiavaient refus de signer un fauxrapport mdical pour cacher des

    tortures sur un prvenu. Ven-dredi, des milliers de rsidents duquartier cairote de Darb Al-Ah-mar ont scand des slogans anti-gouvernementaux devant ladirection de la scurit du Caire,pour protester contre le meurtredun jeune homme de 24 ans, laveille, par un policier.

    Lappel de dputs la dmis-sion du ministre de lintrieur,

    Magdi Abdel Ghaffar, et la rvi-sion des pratiques de lappareil

    scuritaire, a divis le Parlement,dimanche. Le renforcement delarsenal juridique prconis parle prsident Sissi est, lui, jug inu-tile par les experts. Le problmeest politique, et la solution cettecrise rcurrente rside dans lamise en uvre et lapplication dela loi tous, citoyens comme poli-ciers transgresseurs, a commentChawqi Al-Sayyed, un professeur

    de droit pnal renomm, dans unentretien samedi au quotidienAl-Masry Al-Youm. Le problmerside dans linaction et lindiff-rence face la non-applicationdes lois qui prvoient des sanc-tions dissuasives pour chaque em-ploy outrepassant les limites desa fonction.

    Poursuites abandonnes

    La multiplication des cas de tor-ture et de violence policires estmise sur le compte de limpunitqui prvaut tous les chelons delEtat. Il ny a pas de volont poli-

    tique de tenir la police pour res-ponsable de ses actes. Le prsidentSissi la, de multiples reprises, pu-bliquement assure de son sou-tien, dnonce Bahey Eddine Has-san, le prsident du Cairo Insti-tute for Human Rights Studies.Aucune enqute na encore touverte dans la mort de plus de800 manifestants islamistes tusau Caire, le 14 aot 2013, par les for-

    ces de scurit. Cest le cas de beau-coup daffaires individuelles et col-lectives de violences policires.

    Plusieurs enqutes ont touvertes contre des membres desforces de lordre. Elles se limitentsouvent aux policiers dchelonsinfrieurs, directement responsa-bles de faits de violence, sans miseen cause de leurs suprieurs.Dans plusieurs cas, les poursuitesont t abandonnes ou les con-damnations annules en appel, lexemple de celles prononcescontre les responsables de la mortde 900 manifestants lors de la r-

    volution de 2011.Les dfenseurs des droits dnon-

    cent des enqutes bcles et unejustice laxiste. Ils craignent quelhistoire se rpte dans le procsdu policier accus davoir tu lamilitante de gauche Chaymaa Al-Sabbagh, en janvier 2015, dont lacondamnation quinze ans deprison a t casse le 14 fvrier.p

    hlne sallon

    Jai mal ,exprimeun mdecingyptienlors dunemanifestationau Caire,le 12 fvrier,aprs ladtentionabusive dedeux docteursdun hpitalde la capitale.AMR NABIL/AP

    Le Centre

    Nadeem pour

    la rhabilitation

    des victimes de

    torture voque

    474 personnes

    tues par la

    police en 2015

  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

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    Boris Johnson dfie David Cameron sur le Brexit En se prononant pour une sortie du Royaume-Uni de lUE, le maire de Londres affaiblit le premier ministre

    londres -correspondant

    Cest un sisme dans lacampagne balbutiantepour le rfrendum du23 juin sur lEurope et

    peut-tre un tournant dans la viepolitique du Royaume-Uni. Enannonant, dimanche 21 fvrier,sa dcision de faire campagne enfaveur du Brexit ( Britishexit ou sortie du Royaume-Unide lUnion europenne), le mairede Londres, Boris Johnson, donneune impulsion potentiellementdcisive aux partisans du vote out . Mais celui que les Britan-niques appellent Boris ne sentient pas l.

    Moins de quarante-huit heuresaprs que David Cameron aobtenu larrach un accord Bruxelles sur les rformes quilexigeait pour entrer lui-mme en

    campagne pour le in (maintiendans lUE), M. Johnson, figure cha-rismatique des tories, passe dansle camp adverse et lance un doubledfi au premier ministre : pour leleadership du Parti conservateur,et pour la succession DowningStreet. Lenjeu europen risque depasser au second plan dune cam-pagne dsormais domine par laf-frontement sans merci entre deuxfigures du Parti conservateur.

    Le fait que M. Johnson ait in-form le premier ministre de sadcision par un SMS neuf minutesavant den faire part la presserisque de ne pas apaiser une riva-lit qui remonte leurs annescommunes dtudes luniversitultrachic dEton.

    Meilleur contrat Je ferai campagne pour sortir de

    lUE parce que je veux un meilleurcontrat pour le peuple de ce pays,pour quil conomise de largent etreprenne le contrle , a dclarM. Johnson, dimanche en f indaprs-midi, aprs un faux sus-pense mdiatique qui a brouill ledbut de campagne du premierministre. Je souhaite une nouvellerelation [avec lUE]plus fonde surle commerce, la coopration, avecbeaucoup moins de contenu supra-national , a lanc le maire devantson domicile du nord de Londres,vtu dun costume-cravate etcoiff, alors quil apparat souventbouriff et en anorak.

    Il ne faut pas confondre les mer-veilles de lEurope, les vacances enEurope, la nourriture fantastique et

    les amitis avec un projet politiquequi est en marche depuis desdcennies et menace maintenantdchapper au contrle dmocrati-que , sest-t-il encore justifi.

    Dans sa chronique hebdoma-daire du Telegraphpublie lundi,M. Johnson se rfre Winston

    Churchill, dont il a crit une bio-graphie et auquel il aime se com-parer, pour justifier sa position.LUE ncoute vraiment les peu-ples que quand ils disent non,crit-il. Cest le moment dtrecourageux, de tendre les bras maispas de faire des clins dans les ju-pes de linfirmire de Bruxelles ense rfrant dautres pour pren-dre toutes les dcisions. () Unvote en faveur du maintien [danslUE] sera peru Bruxellescomme un feu vert en faveur dedavantage de fdralisme et dat-teintes la dmocratie .

    Alors quil a renonc briguer untroisime mandat de maire en maiet ne cache ni son vif euroscepti-cisme ni ses ambitions de succ-

    ou de la relation du Royaume-Uniavec lUE , a-t-il estim. La princi-pale motivation mise en avant parle maire de Londres concerne lasouverainet du Royaume-Uni.Pour M. Johnson, le projet politi-que europen court le dangerdchapper un contrle dmocra-

    tique normal .

    Fracture ouverteLa dfection de M. Johnson consti-tue un lourd revers pour DavidCameron et le camp du in . Lespartisans du Brexit man-quaient jusqu prsent dun por-te-parole de poids. Le talent de ba-teleur du maire de Londres pour-rait faire la diffrence. Une rcenteenqute dopinion indique quelavis de M. Johnson sera impor-tant dans le choix de 32 % deslecteurs (44 % pour M. Cameron)alors que les sondages refltentune opinion trs divise. Mme sila personnalit fantasque, impr-visible et lopportunisme politi-que de M. Johnson agacent aussi

    bien des Britanniques. La fracturedu Parti conservateur sur lEurope,que M. Cameron ambitionnait derduire avec son rfrendum,apparat plus ouverte que jamais.

    Alors quil a t brillamment re-conduit en mai 2015 et que loppo-sition travailliste est dans un tat

    de faiblesse indit depuis des an-nes, le premier ministre se re-trouve paradoxalement dans unesituation dextrme instabilit. Lemaire de Londres rejoint en effetdans le camp du out cinq minis-tres dont le titulaire du porte-feuille de la justice, Michael Gove,ami personnel de Cameron , et lecandidat conservateur la mairiede Londres, Zac Goldsmith.

    David Cameron pensait tenir son rival en lui ayant promis den-trer au gouvernement sil ralliaitle camp pro-UE. Le premier minis-tre a annonc quil ne se retireraitpas en cas de victoire du vote out afin dviter une bagarrepour le leadership. Auparavant, ilavait indiqu quil ne briguerait

    pas de troisime mandat en 2020,ouvrant de fait sa succession paranticipation. Le choix de M. John-son compromet cette subtile stra-tgie. Il risque de transformer lerfrendum sur lUE en une sortede primaire pour le leadership destories, voire en plbiscite. George

    Osborne, le ministre des finances,est gnralement considrcomme le successeur naturel deDavid Cameron.

    Dimanche matin sur la BBC, lepremier ministre avait encoretent de retenir le maire de Lon-dres. Je voudrais dire Boris ceque je dis tout le monde, savoirque nous serons plus en scurit,plus forts et plus prospres danslUnion europenne , a-t-il dclaren qualifiant la sortie de lUE de saut dans le vide . Aprs le coming out europhobe deM. Johnson, cette menace pse d-sormais sur M. Cameron, sur leParti conservateur, et peut-tre surle Royaume-Uni.p

    philippe bernard

    Le maire de Londres, Boris Johnson, sadresse aux mdias, le 21 fvrier, devant son domicile londonien. PETER NICHOLLS/REUTERS

    La Hongrie relance sa politique natalisteLe gouvernement de Viktor Orban propose 32 000 euros daide au logement pour les couples voulant trois enfants

    budapest -envoy spcial

    F in 2015, lors du congrs deson parti, le Fidesz, le pre-mier ministre hongrois,Viktor Orban, a fait de la relancede la natalit la priorit absoluede son gouvernement jusquauxlgislatives de 2018. Une nouvellemesure incitative spectaculaire at encadre par plusieurs d-crets en fvrier.

    Dsormais, les couples senga-

    geant avoir trois enfants dansles dix prochaines annes et lesfoyers en ayant dj trois bnfi-cieront de 10 millions de forints(32 230 euros) daide financirepour lachat dun logement neuf,ainsi que de 10 millions de forintsde crdits taux rduit.

    Ces sommes sont trs impor-tantes, dans un pays o le salaireminimum ne dpasse pas les333 euros bruts par mois.

    On essaie de dtruire les barri-res qui se trouvent devant les jeu-nes, et le logement est lune dentreelles, explique Katalin Novak, lasecrtaire dEtat la famille.Les

    tudes montrent quils veulentplus denfants quils nen auront enralit. Il sagit galement dencou-rager la construction, trop faible. Seuls 8 000 programmes neufssont sortis de terre en 2014. En casde promesses non tenues, les cou-ples sans justificatifs mdicauxne prsentant pas dexcuse rece-vable seraient amens rembour-ser les subventions accordesavec des pnalits reprsentantjusqu cinq fois le taux dintrt

    tel quil est dfini par le code civil.

    Rponse aux quotas de rfugis En Europe, notre pays est le seulavec lAllemagne o, depuis trente-cinq ans, le nombre des dcs atoujours dpass celui des nais-sances , explique Zsuzsanna Ma-kay, secrtaire scientifique lIns-titut hongrois de recherche d-mographique. Budapest consacre4 % de son PIB aux politiques fa-vorisant la fcondit. Les famillesayant un ou deux mineurs charge sont aides. A partir de latroisime naissance, le systmede rduction dimpts et de coti-

    sations sociales est trs gnreux.Et il existe dj une batterie demesures pour concilier emploi etgarde denfants.

    Comme ses voisins dEuropecentrale, la Hongrie peine malgrtout inverser franchement latendance. Actuellement, elle en-registre 126 000 dcs par an pourseulement 90 000 naissances. Lepays est mme pass sous la barresymbolique des 10 millions dha-bitants (9,85 millions) en perdant

    850 000 rsidents depuis 1980. Lenombre moyen denfants parfemme tait de 1,35 en 2013, con-tre 1,55 pour la moyenne euro-penne. Il a augment sensible-ment, pour stablir 1,41 en 2015.

    Un chiffre encore trop modeste,qui ne satisfait pas Viktor Orban.Depuis le dbut de la crise des mi-grants, la politique volontaristemene depuis 2010 par ce gou-vernement conservateur appa-rat aussi comme une rponseaux quotas de rfugis, vouluspar lUnion europenne. Lorsdun forum dmographique in-ternational, organis en novem-

    bre 2015 Budapest, Maria Sch-midt, une historienne proche dupouvoir, a estim que le faibletaux de fertilit dune Europe matrialiste la prparait au suicide en la soumettant unemasse de migrants musul-mans impossibles intgrer etdont les deux tiers seraient cons-titus dhommes en ge deffec-tuer leur service militaire .

    Politique intrusive

    Avant de fermer ses frontires, laHongrie a enregistr 177 000 de-mandes dasile en 2015, mme sila grande majorit des personnesqui les ont dposes ont gagn de-puis lAllemagne, lAutriche ou laSude. Dans ce nouveau contexte,Jozsef Benda, chercheur en pda-gogie, pousse Viktor Orban as-sumer une politique intrusive.

    Dpendant du gouvernement eten partie financ par des fondseuropens, son Institut de recher-che et de dveloppement de len-seignement uvre rechristiani-ser la socit hongroise. Selon lui,entre 1948 et 1975, le taux dem-

    der M. Cameron, Boris Johnson acru bon daffirmer que sa dcisionavait t atrocement difficile prendre. Il a ajout que son choixlui avait caus beaucoup de mauxde tte car la dernire chosequ[il voulait]tait de sopposer David Cameron ou au gouverne-ment . Compte tenu du tempsdont il disposait, [David Cameron]sest trs bien dbrouill dans sarengociation avec ses partenaireseuropens, a salu M. Johnson. Mais je pense que personne nepeut prtendre que [cet accord]estune rforme fondamentale de lUE

    ploi des femmes envoyes dansles usines par le rgime commu-niste serait pass de 25 % 75 %. Leplacement massif en crche desnourrissons ds la sixime se-maine aurait dtruit la culture dela famille traditionnelle.

    Notre devoir est de rapprendreaux Hongrois tre parents , es-time ce spcialiste de la natalit,pour qui les enfants privs ducontact de leur mre dans la pre-mire anne nont pas pu trouver

    la confiance ncessaire pour semarier leur tour et pour pro-crer . Cette approche ne con-vainc pas tout le monde.

    Quand jentends parler les gensproches du pouvoir, jai limpres-sion dtre opprime. On nie mondroit au libre arbitre. On tente desaccaparer ma gnration , ex-plique Zsuzsanna Simon, une ar-tiste ge de 27 ans. Pour protes-ter, elle a post en ligne unephoto de son ventre sur lequelelle avait fait crire : Jaccouche-rai aprs le changement de gou-vernement ! p

    blaise gauquelin

    Le choix du maire

    de Londres risque

    de transformer

    le rfrendum sur

    lUE en primaire

    pour le leadershipdes tories

    LE PROFIL

    Boris JohnsonLEurope est omniprsente dansla biographie de Boris Johnson,51 ans. Son pre, Stanley, futhaut fonctionnaire la Commis-sion europenne dans les an-nes 1970, puis dput euro-pen (conservateur). Boris ,lui-mme, a t correspondantdu Daily Telegraph Bruxellesau dbut des annes 1990,o il a men bataille contrela politique de Jacques Delors.Ses prises de position provocan-tes ont jou un rle importantdans la monte de leuroscepti-cisme au sein du Parti conserva-teur. Maire de Londres depuis2008, il prne limmigration

    comme facteur de prospritde la ville mais dnoncela colonisation lgale du payspar lUnion europenne. Cesderniers temps, il a louvoy surlide europenne au point quecertains militants du out leconsidrent davantage commeun opportuniste que commeun partisan sincre du Brexit .

    BOLI VI EEvo Morales auraitperdu son rfrendumPlusieurs mdias boliviensont annonc que le nonlavait emport, dimanche 21fvrier, lors du rfrendumpropos par le prsident EvoMorales, qui souhaite treautoris briguer un qua-trime mandat. Le pouvoir ajug cette annonce prmatu-re, le vote des Boliviens deltranger et des campagnesrecules, souvent favorables M. Morales, nayant pas tpris en compte. En cas de vic-toire du non, il sagirait de lapremire dfaite politique deM. Morales, au pouvoir depuis2006. Il devrait quitter la pr-

    sidence en 2020. (AFP.)

    ALLEMAGNEAttaque contreun foyer de rfugisEntre 20 et 30 personnes ontassist, avec une joie nondissimule selon la police, lincendie probablementcriminel dun foyer de rfu-gis prs de Dresde, dans lanuit de samedi dimanche21 fvrier. Plusieurs ministresont dnonc un acte rpu-

    gnant . Cet ancien htelinoccup devait accueillir desrfugis en mars. (AFP.)

  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

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  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

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    10 | MDIAS&PIXELS MARDI 23 FVRIER 20160123

    Course linnovation dans le mobileSamsung et LG multiplient les accessoires et fonctions pour contenir lessor des chinois

    La photo a fait le tour deTwitter, dimanche 21 f-

    vrier. On y voit Mark Zuc-kerberg se promener

    tranquillement dans les allesdune salle bonde. Personne nele voit. Car tous portent un casquede ralit virtuelle. Plus dun mil-lion de personnes visionnent quo-tidiennement des vidos 3600surFacebook. Nous voulons faire deFacebook la meilleure plate-formede vidos pour la ralit virtuelle ,a lanc une fois sur scne le fonda-teur du rseau social, invit sur-prise de la confrence de presse deSamsung organise en pram-bule du Mobile World Congressde Barcelone. On laura compris,la ralit virtuelle et la photo se-ront lhonneur lors de la grand-messe des fabricants de mobiles,qui ouvre officiellement ses por-tes lundi 22 fvrier.

    Saturation du march

    Ds dimanche, le gant sud-co-ren, premier fabricant mondialde mobiles, a annonc le lance-ment de deux nouveaux modles,le Galaxy S7 et sa version incurve,le S7 Edge. Disponibles le 11 mars,ils seront commercialiss 699 et799 euros. Ces nouveaux appareilsressemblent sy mprendre leurs prdcesseurs. Par rapportaux S6, les S7 prsentent un designplus travaill et un appareil photoplus performant intgrant unautofocus. Ils sont aussi capablesde rsister leau et la poussire.

    Mais Samsung a surtout surprislauditoire en annonant une ca-mra 3600. Lappareil vient sajou-

    ter deux autres accessoires re-lis au smartphone et dj com-

    mercialiss, une montre connec-te, la S2, et un casque de ralitvirtuelle, le Gear VR. Les conte-nus qui seront gnrs par la ca-mra pourront tre visionns sur lecasque de ralit virtuelle , expli-que Jean-Philippe Illarine, direc-teur de la division mobile de Sam-sung France. Un petit luxe pourlequel le consommateur devra d-bourser 400 euros.

    Avec ces nouveaux produits, lesud-coren russira-t-il mainte-nir son rang ? En 2015, Samsung avu sa part de march au niveaumondial dgringoler de 2,2 pointspour descendre 22,5 %, selonGartner. Avec les S7, le fabricant vatenter dlargir son offre haut degamme, un segment qui repr-senterait 70 % des profits dugroupe, selon le Wall Street Jour-

    nal. Mais les S7 ne vont pas effa-cer les S6. Nous allons essayer defaire vivre nos cinq modles , ex-plique M. Illarine.

    Alors que lindustrie est en voiede saturation dans les pays indus-trialiss, linnovation sembleavoir atteint un plateau, et lesnouvelles gnrations de mobilesressemblent furieusement auxprcdentes. Il y a une forme destandardisation du march. Quelleest la diffrence entre tous les ap-pareils ? , sinterroge Neil Maws-ton, de Strategy Analytics. Desfabricants comme Apple, avecliPhone 6S, ou HTC, avec le OneM9, ont eu du mal communiquersur les amliorations , corroborelinstitut IHS. Pour la premire

    fois, au quatrime trimestre 2015,les ventes diPhone ont dclin de4,4 %, daprs Gartner.

    Les accessoires lancs par les fa-bricants sont donc l pour donnerune raison au client de se rqui-per. La Gear 360 doit persuaderles consommateurs de changer de

    smartphone, afin quils bnficientdes innovations en termes de ralitvirtuelle. Cest un outil marketing ,estiment les analystes dIHS.

    LG a pouss plus loin cette stra-tgie. Lautre sud-coren a pr-

    sent Barcelone son smart-phone dernier cri, le G5, dot dunoptique grand angle et auquel onpeut ajouter et retirer des acces-soires, dont une batterie et un ap-pareil photo supplmentaire. LG agalement lanc une camra 3600, et dispose aussi dun casquede ralit virtuelle miniature.

    Objectif : gnrer une crois-sance deux chiffres, au-dessus decelle du march, qui devrait pro-gresser dans le monde de 5 % 8 %cette anne , explique StphaneCurtelin, directeur marketing deLG France. Lenjeu est important.LG a vu sa part de march mon-diale descendre 4 %, derrire lesfabricants chinois, selon IHS.

    Cela suffira-t-il ? Ce que fait LGest plutt intelligent, juge ThomasHusson, analyste chez Forrester

    Research. Mais les fabricants ontde plus en plus de mal se diffren-cier, et la ralit virtuelle est une ni-che pour les gamers. Selon lui,

    lavenir appartient ceux capa-bles de crer un cosystme de

    services, combinant matriel et lo-giciel . Cest lobjectif de Sam-sung, avec son systme de paie-ment Samsung Pay. Mais le logi-ciel nest pas dans lADN des fabri-cants, contrairement Amazon,Facebook ou Google, qui dvelop-pent tous des services dintelli-gence artificielle lis la voix.

    En attendant, la principale me-nace pour les fabricants tradition-nels, Apple compris, vient deChine. Lan pass, Huawei estmont sur la troisime place dupodium, avec 8 % du march mon-dial, et des ventes en hausse de53 % au quatrime trimestre 2015,selon Gartner. Le patron de sa divi-sion mobile, Richard Yu, a dit viser 15 % de parts de march rapi-dement , et 25 % dans cinq ans pour devenir le numro un mon-

    dial. Dans le classement mondial,Huawei, Lenovo et Xiaomi talon-nent Samsung et Apple.p

    sandrine cassini

    Les fabricants

    tentent de sediffrencier alors

    que les nouvelles

    gnrations

    de tlphones

    ressemblent

    furieusement

    aux prcdentes

    Vivendi sintresseau Canal+ italienLe groupe franais aurait soumis une offrepour acqurir la filiale premium de Mediaset

    L Italie est bien une terre deconqute prioritaire pourVivendi, lheure o legroupe de mdias contrl parVincent Bollor place l expan-sion internationale au premierrang de ses axes stratgiques. Se-lon le quotidien Corriere dellaSera, Vivendi a soumis une offre

    pour acqurir une participationmajoritaire au sein de MediasetPremium, la filiale de tlvisionpayante du groupe audiovisuelMediaset.

    Le journal italien a fait tat, ven-dredi, dune offre en numraire eten actions qui valoriserait lqui-valent italien de Canal+ 900 millions deuros un prix quiserait jug insuffisant par la fa-mille Berlusconi, qui contrle Me-diaset. Samedi, un porte-paroledu groupe transalpin a dmentilexistence de discussions.

    Vivendi, en revanche, na pas d-menti lexistence de contacts. Me-diaset Premium est une cible co-hrente pour un groupe qui veutdevenir un acteur continental dela tlvision payante, sur le mo-dle de Sky. Cela fait partie deschoses envisageables , com-

    mente une source proche du dos-sier, sans confirmer.

    Sur les marchs, lintrt pr-sum de Vivendi pour Mediasetnourrit des rumeurs rgulires.Celles-ci sappuient sur le rle quejouerait Tarak Ben Ammar, mem-bre du conseil de surveillance deVivendi et figure des affaires et dela production audiovisuelle, no-tamment en Italie et au Maghreb.

    Un tel mouvement pourrait trecomplmentaire de la relancedun Canal+ France actuellement la peine, qua annonce Vivendi,le 18 fvrier. Btir un acteur euro-pen de la tlvision payante per-

    mettrait au groupe dlargir sabase dabonns et de mieuxamortir ses contenus premium.

    Dans un communiqu publi,jeudi 18 fvrier, loccasion de laprsentation de ses rsultats 2015,Vivendi ne faisait pas mystre de sa volont d investir en Euro pedu Sud, march qui partage une

    culture et des racines latines iden-tiques aux siennes .

    Actionnaire de long terme

    Or, daprs leCorriere della Sera, legroupe italien est de nouveaumont au capital de loprateur detlcommunications Telecom Ita-lia. Entre le 16 et le 19 fvrier, Vi-vendi aurait acquis 1,4 % du capi-tal, portant sa participation 22,8 %.

    En dcembre 2015, Vivendi avaitrussi obtenir quatre siges auconseil dadministration de lop-rateur, et il se prsente comme actionnaire de long terme .

    Autre objectif dans la pninsulepour Vivendi : densif ier sa pr-sence dans la production. Legroupe sintresse notamment la socit Cattleya, qui a produitplusieurs films ou sries italiens

    remarqus ces dernires annes(Romanzo Criminale, Gomorra,Piazza Fontana) et que dirige leproducteur Riccardo Tozzi.

    Dans le cadre de sa politiquedinvestissements dans des conte-nus latins, Vivendi explore des op-portunits dinvestissement dansplusieurs socits de production enEurope du Sud , expliquait legroupe dans son communiqu du18 fvrier.

    Forte de 6,4 milliards deuros fin 2015, sa trsorerie abondantelui autorise potentiellement plu-sieurs oprations.p

    alexis delcambre

    A UD IOVISUELSignature dun accordsur la transparencedes comptesLe ministre de la culture aannonc, vendredi 19 fvrier,la signature dun accord envue d harmoniser les prati-ques contractuelles entre lesdiffrents acteurs de la filire[audiovisuelle]et de permettre

    une mise en uvre transpa-rente et efficace du partage derecettes . Il doit rendre plustransparents les cots desproductions, jugs trop opa-ques par les chanes. Des dis-cussions interprofessionnellesdoivent souvrir pour en prci-ser les modalits.

    INTERNETYahoo! prt cderdes actifs stratgiquesAffect par de mauvais rsul-tats, Yahoo! a indiqu, ven-dredi 19 fvrier, mettre enplace un comit indpendantpour examiner ses optionsstratgiques. Celui-ci fera desrecommandations au conseildadministration du portail.Parmi les potentiels acqu-

    reurs figureraient VerizonCommunications, Comcast,AT&T, TPG, Bain Capital Par-tners ou encore KKR.

    152EMQA6M

    SOCIT DITRICE DU MONDE SA - 80, BOULEVARD AUGUSTE-BLANQUI - 75013 PARIS - 433 891 850 RCS Paris - Capital de 94 610 348,70. Offre rserve auxnouveaux abonns et valable en France mtropolitaine jusquau 31/12/2016. En application des articles 38, 39 et 40 de la loi Informatique et Liberts du 6 janvier1978, vous disposez dun droit daccs, de rectification et de radiation des informations vous concernant en vous adressant notre sige. Par notre intermdiaire,ces donnes pourraient tres communiques des tiers, sauf si vous cochez la case ci-contre.

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    7 JOURS7

    169

  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

    31/34

    Cahier du Monde No 22116 dat Mardi 23 fvrier 2016- Ne peut tre vendu sparment

    les dbats

    du monde

    afrique, mardi

    23 fvrier,

    muse du quai-

    branly, paris 7e

    Une chance inexploreCest indniable, la croissance de lAfrique dpend du fort potentiel de ses femmes.Le 23 fvrier, Le Monde organise une journe de rencontres pour en tmoigner

    Tous les bailleurs de fonds, lesagences de dveloppement, lesONG et mme les socits

    daudit le d isent : lamlio-ration de la condition des fem-mes est indissociable de la

    croissance africaine.Il y a dabord ces chiffres, grens au fil des

    rapports. Les femmes produisent 80 % desressources alimentaires du continent, maisny possdent que 15 % des terres. Tout aussifrappant : la production agricole du BurkinaFaso, selon la Banque mondiale, augmente-rait de 20 % si lon procdait un changedes terres cultives entre mari et femme.Autrement dit : les hommes se gardent lesmeilleures terres, mais travaillent moins

    que leur pouse 96 minutes de moins cha-que jour, rapporte Makhtar Diop, vice-pr-sident de la Banque mondiale pour lAfri-

    que. De fait, les Africaines sont plus fiablesque les hommes pour rembourser leur mi-crocrdit, crent plus dentreprises, sontmoins concernes par les affaires de cor-ruption et consacrent une plus grande partde leurs revenus au bien-tre de leurs en-fants et de leur communaut.

    Pourtant, elles continuent de subir unediscrimination juridique et sociale en ma-tire de proprit foncire, de succession,dinstruction, daccs au crdit ou auxtechnologies, sans parler des violencesdont elles sont les premires victimes, enparticulier sexuelles.

    Malgr la chute des cours des matirespremires, des conomies du continentcontinuent de crotre, et les pays qui ont fait

    une place aux femmes sen sortent mieux.Au Rwanda, elles occupent 51 des 80 sigesde lAssemble nationale. En Cte dIvoire,elles dirigent 60 % des entreprises. AuSngal, la loi sur la parit dploie ses effets.

    Mais la pleine expression des ressourcesde lAfrique dpendra du dveloppement delenseignement, de la libert et des possibi-lits demploi en faveur des femmes.Comme le rappelle Joaquim Chissano, an-cien prsident du Mozambique, elles doi-vent pouvoir choisir si et avec qui elles semarieront et dterminer elles-mmes lop-portunit et le moment de leurs grossesses.

    Pour montrer ce que vivent les Africaineset de quoi elles sont capables, Le Mondedonne la parole des personnalits excep-

    tionnelles et inspirantes lors dune journede conversations et de dbats, le 23 fvrier.Nos publications prolongeront les chan-ges et viendront confirmer que les femmes,davantage que le ptrole ou les diamants,reprsentent le potentiel le plus promet-teur sur lequel le continent peut btir sonavenir, linvestissement le plus dcisif quilpourrait raliser dans sa qute dune crois-sance inclusive et quitable. p

    jrme fenoglio,

    directeur du monde ,

    et serge michel,

    rdacteur en chef du monde afrique

    Les femmes, avenir

    du continent africain

    De gauche droite et de hauten bas : Mariama

    Morou (Niger),

    BelindahMalutoava(Ouganda),

    FlorenceNabukenya

    et Diana Lalule(Ouganda),

    une habitantedu village de

    Kosseye (Niger).Ces imagessont issues

    dun reportagede Stphan

    Gladieu ralisen 2015 dans cinq

    pays dAfrique.STPHAN GLADIEU

  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

    32/34

    2 | les femmes, avenir du continent africain MARDI 23 FVRIER 20160123

    Le fminisme rayonnant

    de ChimamandaNgozi Adichie Nous sommes tous des fministes , le texte dun discours

    prononc Londres en 2012 par la romancire nigriane,a fait grand bruit sur Internet avant de devenir phnomne littraire

    Quand, ce jour de d-cembre 2012, Chima-manda Ngozi Adichie

    avance vers le micro,sur lestrade du TEDx-Euston, Londres, ellese demande si son

    discours a la moindre chance de capterlattention de son auditoire. Quelquessemaines plus tt, son frre et sonmeilleur ami, organisateurs de lvne-ment pour cet organisme destin pro-mouvoir la diversit, le dynamisme et lepotentiel de lAfrique, lui avaient pro-pos dintervenir. Mais voil : lcrivainenigriane pense quelle na rien dire. Jai failli refuser,se souvient-elle.Alorsils mont dit : Pourquoi ne parlerais-tupas des sujets qui animent tes discus-sions avec tes amis et ta famille ? Il se

    trouve que le fminisme tait cettepoque lordre du jour.

    Trente minutes plus tard, elle quitte la

    tribune sous les applaudissements. SurYouTube, son discours affiche aujour-dhui plus de 2,5 millions de vues. On yvoit la romancire expliquer avec intelli-gence, humour et lucidit pourquoi ellese dfinit comme une fministe afri-caine heureuse qui ne dteste pas les hom-mes, qui aime mettre du brillant lvreset des talons hauts pour son plaisir, nonpour sduire les hommes .Inspir de sonvcu, le texte devient viral. Au pointquen dcembre 2013 Beyonc en sampledes extraits dans sa chansonFlawless.

    Pourtant, rien dans la bibliographie delauteure deLAutre Moiti du soleil(Galli-mard, 2008), Orange Prize britannique2007, ne la prdispose devenir une

    icne Web du fminisme. Dailleurs,avant cette confrence Londres, Chi-mamanda Ngozi Adichie avoue navoir

    jamais rien crit ou prononc sur lesujet. Pour la gense de cette confrenceTED, il faut donc remonter bien plusloin, dans les annes 1980, un jour derentre scolaire, sur les bancs dunecole primaire Nsukka, dans le sud-estdu Nigeria. La matresse annonce que ce-lui qui obtiendra la meilleure note undevoir sera nomm chef de classe. Lafuture romancire a 9 ans et rve dtrechef. Elle obtient la meilleure note. Puis, ma grande surprise,dcrit-elle,la matresse a dclar que le chef de classedevait tre un garon. Persuade que celacoulait de source, elle avait oubli de leprciser. Ctait un garon qui avait eu lameilleure note aprs la mienne. Il serait

    Stphan Gladieu, 47 ans,

    est photographe. Il se

    consacre principalement

    au portrait, en reportage,

    des valles dAfghanistan

    aux coulisses du Festival

    de Cannes. Il a prsent

    ses photographies dans

    plusieurs livres, dont

    Femmes afghanes(Ho-

    beke, 2001) et Destins de

    harkis (Autrement, 2003).

    En 2015, il a parcouru cinqpays dAfrique pour mettre

    en images le travail pour

    lautonomisation des

    femmes de la Banque

    mondiale, qui a fait de

    lgalit entre les hommes

    et les femmes lune de ses

    priorits.

    Portraitsdanonymes

    LEA CRESPI/PASCO POUR LE MONDE

    Novembre 2015. MariamaMorou est en classe de CE2 lcole primaire du villagede Kosseye, une quin-zaine de kilomtres de Nia-mey, la capitale du Niger.Si, au niveau du primaire,le taux de frquentationscolaire chez les fillesatteint presque 80 %, dansle secondaire, elles ne sontpourtant plus que 25 % poursuivre leurs tudes.A la rentre scolaire 2015-2016, le ministre de ldu-cation a lanc une campa-gne de sensibilisation la scolarisation des filles.

    Juin 2015. Belindah Maluto-ava, 21 ans, lve pas moinsde 200 poulets dans lequartier de Kikaaya Kam-pala, en Ouganda. Elle estmaman dun jeune enfantet gre une petite entreprisequi fournit de la viande etdes ufs aux supermarchslocaux. Elle a pu dmarrerson entreprise grce laidede sa tante et dun prtdu groupe de microfinancedu club fminin de Kikaaya. Dans cinq ans, jaimeraisavoir une grande ferme,

    assure-t-elle. Une trsgrande ferme, avec norm-ment de poulets, genremille poulets. Oui, voil ceque je veux !

    Juin 2015. Florence Nabuke-nya, 21 ans, et Diana Lalule,26 ans, jouent aux checsau club de filles du quar-tier de Kikaaya, Kampala,en Ouganda. La Banquemondiale a valu que fr-quenter de tels clubs aug-

    mente de 72 % la probabi-lit que les filles se lancentdans des activits gnra-trices de revenus, diminuede 26 % les taux de gros-sesse chez les adolescenteset de 58 % le taux de ma-riage ou de cohabitationprcoces. Le pourcentagede filles ayant des relationssexuelles non consentiesa chut de moiti.

    Novembre 2015. Dansles zones rurales du Niger,la majorit des habitantsnont pas accs leaupotable. Chaque jour,cette habitante du villagede Kosseye, 15 kmde Niamey, vient puiserleau du puits mis ladisposition des villageoispar une voisine quipossde trois hectaresde terre. Le village estpourtant situ aux abordsdu fleuve Niger maisses habitantes prfrentsapprovisionner dansle puits de leur voisineplutt que de devoircompter sur les eauxpollues du fleuve.

  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

    33/34

    0123MARDI 23 FVRIER 2016 les femmes, avenir du continent africain | 3

    Fadumo Dayib : Dfier la notionde pouvoir, le patriarcat, les privilges

    e n t r e t i e n | La candidate la prsidentielle en Somalie entend rebtirune socit dtruite, rgie par les hommes, les clans et les milices islamistes

    En septembre 2014, FadumoDayib a annonc son intentionde se prsenter llection pr-sidentielle somalienne, cense

    se drouler en 2016. Cette quadra-gnaire a tout connu : lexpulsion duKenya, o elle est ne, le statut de rfu-

    gie dans son propre pays, la Somalie,puis lexil vers la Finlande, o ellerside depuis ladolescence. Illettrejusqu lge de 14 ans, aujourdhuidtentrice de trois masters en santpublique et en dveloppement inter-national, cette mre de quatre enfantsveut provoquer d es changementssociaux en Somalie .

    Quest-ce qui vous a dcid vous porter candidate llectionprsidentielle en Somalie ?

    Il y a quelques annes, je travaillaispour les Nations unies au Liberia. Jaivu les Libriens reconstruire leur paysaprs la guerre civile. Ils taient opti-mistes, patriotes, dvous. Jai ren-contr la prsidente Ellen JohnsonSirleaf et je me suis dit que nousavions besoin de la mme chose pourmon pays. Jai aussi un devoir civiqueenvers la Somalie. Ma gnration et

    celle de ma mre ont dtruit ce pays.Nous devons maintenant tout fairepour que la gnration de nos enfantsait quelque chose hriter. Un endroito retourner, o ils trouveront dignitet prosprit. Nos dirigeants nous ontlaisss tomber. Nous, Somaliens, som-mes responsables de la guerre. Nossilences, nos absences nous rendentresponsables.

    Vous naurez pas la tche facile,dans une socit trs patriarcale

    En Somalie, pour tre lu, il faut treun homme, avoir des cheveux gris etun ventre rond. Nous avons vu o leleadership des hommes a men le pays.Il est temps de donner sa chance une

    femme. Compare ceux contre qui jevais concourir, jai les mains propres.

    Si vous tes lue, vous aurez affronter limmense influencedes clans sur la politique

    Il nest pas question pour moi dradi-quer les clans. Il est normal pour cha-cun de savoir do il vient. Mais les clansvampirisent la politique. Nous devonsnous en manciper. Je travaillerai avecles chefs claniques, mais je ne pense pasque le pouvoir doive tre partag avecles principaux clans comme cest le casaujourdhui. Cest un systme injustequi marginalise les femmes, les jeuneset les clans minoritaires.

    Malgr largent de la communautinternationale et la prsencedes troupes de lUnion africaine(Amisom), la menace des milicesislamistes chabab existe toujours

    Cette question est la pierre angulairede la paix en Somalie. Mais je ne voispas les Chabab comme la plus grandemenace. Ils ont merg parce quil yavait un vide dans la socit cause dela politique internationale des Etats-Unis, qui ont soutenu lentre des trou-pes thiopiennes en Somalie en 2006.Les jeunes quils recrutent nont ni du-cation ni emploi. Pour eux, rejoindre

    les pirates ou les Chabab est un moyende gagner de largent. Jinviterai doncles Chabab la table des ngociations condition quils dsarment leurs trou-pes, quils rompent leurs liens avec leterrorisme international et quils arr-tent de tuer. Tout le monde, en Soma-

    lie, les connat, ce sont nos enfants,nos maris, nos oncles Nous savonscomment les contenir.

    Le Somaliland, qui a dclar sonindpendance vis--vis deMogadiscio en 1991, a su maintenirpaix et stabilit, contrairementau reste de la Somalie

    Ce que le Somaliland, en tant que r-gion de la Somalie, a russi est remar-quable. Jadmire la faon dont la rgiona t pacifie. Le pays peut en apprendrebeaucoup sur lorganisation dlectionsdmocratiques, le respect de la loiCependant, je crois en une Somalieunie. Je crois en un gouvernement uni-taire, avec des fonctions dcentraliseset des rgions charges de leur proprefiscalit, avec un accs gal au pouvoiret aux ressources. Cela dit, nous de-vrions organiser un rfrendum sur leSomaliland. Si la population va dans le

    sens de lindpendance, nous devronsrespecter ce choix. Mon but nest pasdtre lue ni davoir du pouvoir, maisde provoquer des changements sociauxen Somalie. Lune des faons dy parve-nir est de dfier la notion du pouvoir enSomalie, de dfier le patriarcat, de dfierles privilges. Pour moi, llection de2016 nest quun dbut.ppropos recueillis par vincent defait

    Parcours

    1973Fadumo Dayib natau Kenya.

    1989Sa famille, somalienne,est expulse du Kenyaet rentre en Somalie, ola guerre civile clate.

    1991Aprs plusieurspripties, la famillearrive en Finlande.

    2005Fadumo Dayib revienten Somalie pour la premirefois depuis son exil lorsdune mission de lUnicef.

    2013Elle obtient son docto-rat sur la participation gou-vernementale des femmes luniversit dHelsinki.

    2014Elle annonce sa candi-

    dature la prsidentielle so-malienne prvue pour 2016.

    2015Elle est diplmedHarvard (Boston).

    Bruktawit Tigabu,marionnettiste messages

    Cette Ethiopienne de 34 ans a cr un vritable succs tlvisuel. Sa girafe Tsehai,idole des tout-petits, aborde des sujets graves de manire ludique

    Depuis 6 heures ce matin,Bruktawit Tigabu a le braslev. Devant un fond vert,elle fait mouvoir la chaus-

    sette jaune use qui recouvre son bras. Seme Tsehai ( Je mappelle Soleil en amharique), lance-t-elle dune voixenfantine en remuant la bouche de lamarionnette Tsehai, la girafe institu-trice prfre des tout-petits.

    Depuis prs de dix ans, lEthiopiennede 34 ans, institutrice de formation,prte sa voix ce personnage quelle ainvent avec son mari amricain,Shane Etzenhouser, et qui est lem-blme de leur entreprise sociale WhizKids Workshop. Elle apprend aux en-fants le b.a.-ba en matire de sant et

    les bons comportements adopterdans la vie quotidienne. Des centai-nes de milliers denfants thiopiensmeurent encore avant leur cinquimeanniversaire cause de maladies quipeuvent tre vites comme les diar-rhes chroniques, le paludisme, la mal-nutrition , dplore Bruktawit Tigabu.

    Dans chaque pisode de huit dix mi-nutes, la girafe pose des questions surlhygine, la scurit routire, lhonn-tet, la tolrance Lide est de traiterde manire ludique des sujets graves.Chaque semaine, ils sont jusqu 5 mil-lions de tlspectateurs suivre Tse-hai adore apprendre en amhariquesur la chane nationale. Le programme

    a t traduit en plusieurs langues thio-piennes et dclin en une mission deradio qui touche 25 millions daudi-teurs. Lquipe de Bruktawit Tigabu sedplace aussi avec son matriel dans lesvillages, les centres de sant, avec par-fois un gnrateur compte tenu descoupures frquentes dlectricit.

    Deux missions pour adolescentsLAgence des Etats-Unis pour le dve-

    loppement international (Usaid) a r-cemment confi Whiz Kids Workshopune enveloppe de 1,2 million de dollarssur trois ans pour produire une tren-taine dpisodes supplmentaires desaventures de la girafe. Le succs tlvisde Tsehai a convaincu Bruktawit Tigabu

    de produire deux autres missions pourun public adolescent grce lappui fi-nancier dONG comme Save The Chil-dren. Dans le programme Involve Me ,des adolescents aux parcours difficilesracontent leurs preuves un viol ou unmariage forc, la mort de parents mala-des du sida face camra. Un exutoire qui leur permet daller de lavant .

    Lancienne institutrice sest aussilance dans ldition de livres et de car-tes de support visuel, disponibles enplusieurs langues thiopiennes, aveclaide de spcialistes de la lecture et delcriture. Elle veut mettre en place desbibliothques avec ce matriel dans lescoles publiques dAddis-Abeba et

    dautres villes plus recules dEthiopie.Pour linstant, sur les 300 coles de la ca-pitale, une vingtaine dtablissementstentent lexprience pour des classes deCE1, grce au soutien financier de dona-teurs du monde entier qui ont particip une campagne de crowdfunding. Aterme, Bruktawit Tigabu voudrait queTsehai soit inscrit au programme du mi-nistre de lducation. En attendant, sonquipe forme des professeurs des coleset aimerait crer des centres ducatifsdans chaque grappe dimmeubles oles enfants ne savent pas quoi faire .

    Les nombreuses rcompenses rem-portes pour le programme Tsehaiadore apprendre dont le prestigieuxRolex Awards for Enterprise en 2010

    ont permis Bruktawit Tigabu de finan-cer son projet. Dsormais, une ving-taine demploys travaillent ses cts,notamment sur une application ddu-cation interactive pour mobile.

    Dans son studio fait de bric et de broc,les spots de lumire sont accrochs avecdu scotch, la chaleur est crasante etlinsonorisation se rsume un matelaspos contre la porte. Nous avons com-menc avec les moyens du bord. Pour-quoi aurions-nous besoin de plus ? Les-sentiel est que tout cela ait du sens pourles jeunes Ethiopiens , affirme cettemre de deux enfants. Trois, si loncompte Tsehai p

    meline wuilbercq

    Parcours

    1981Bruktawit Tigabu nat Addis-Abeba, en Ethiopie.

    2001Jeune diplme,elle commence enseigneren cole primaire et mater-nelle.

    2005Elle cre avec sonmari, lAmricain Shane

    Etzenhouser, lentrepriseWhiz Kids Workshop.Le programme Tsehaiaime apprendre dmarreen 2006 la tlvisionthiopienne.

    2008-2011 Tsehaiaime apprendre remporte le Japan PrizeInternational, le RolexAwards for Enterprise,et le Prix de lducationMicrosoft.

    Parcours

    1977Chimamanda Ngozi

    Adichie nat Enugu,au Nigeria.

    1996A 19 ans, elle sinstalleaux Etats-Unis.

    2001Elle obtient un masteren communicationet sciences politiques.

    2003Elle publie son premierroman,LHibiscus pourpre.

    2008Elle obtient une ma-trise dtudes africaines luniversit de Yale et reoitune bourse de la FondationMacArthur.

    2012Le discours quelle pro-nonce lors dune confrenceTED est publi en franais

    sous le titreNous sommestous des fministes.

    2013Elle publie son qua-trime roman,Americanah,bientt adapt au cinma.

    donc le chef de classe. La petite fille estchoque, dautant que le garon en ques-tion, adorable et doux ,na nullementenvie de cette position de pouvoir. Plusloin dans son discours, la romancire ra-conte ce soir o, vingt ans plus tard, unvoiturier quelle gratifie dun pourboireremercie lhomme qui laccompagne,pensant que, si une femme a de largent,il vient forcment dun homme.

    Telle est la force de son discours : d-montrer lapprentissage du sexisme

    ds lenfance comment les petits gar-ons sont levs pour tre des leadersnaturels et ses consquences dans lemonde adulte. Chaque histoire ouvreles yeux sur ce que nous faisons au quo-tidien. Chaque anecdote ranime le sou-venir dune humiliation ou dune faute.Le fminisme empirique et pratique deChimamanda Ngozi Adichie, qui lesouvrages acadmiques sur le sujettombent des mains, a un pouvoir deconviction indniable et universel.Prsents comme les victimes collat-rales dune ducation sexiste qui, aufinal, les dessert normment, les hom-mes qui liront ce livre ne pourront plusrenvoyer le fminisme au rang des pr-occupations de bonnes femmes. Lcri-vaine les invite construire avec lesfemmes un monde plus quitable.

    Comme un pamphlet

    Fin 2014, les maisons ddition sem-parent du phnomne. Le discours pa-rat au Royaume-Uni et aux Etats-Unissous le titre We Should All Be Feminists.En France, Marie-Pierre Gracedieu, di-trice de luvre de Chimamanda NgoziAdichie chez Gallimard, dcide duneparution dans la collection Folio 2 ,pour quil circule comme un pam-phlet .Le petit livre rougeNous sommestous des fministes aura une trs bellerception, notamment lors dune soire la Maison de la posie Paris. Jamais,de mmoire dabonne, on ny avait vuune ambiance aussi lectrique, avec unpublic rajeuni qui interpellait la roman-cire, leve ce soir-l au rang de gourouou de star du rock.

    A New York, Charles Buchan, lagent delcrivaine, croule sous les demandes detraduction. Seize langues dont le portu-gais du Brsil, le chinois, le catalan, le ta-moul, lhbreu. En ce moment, il ngo-

    cie avec la Thalande. Ovni littraire,Nous sommes tous des fministespour-suit sa vie parallle au monde de ldi-tion. En dcembre 2015, une associationsudoise, le Swedish Womens Lobby, enpartenariat avec les ditions Albert Bon-niers Frlag, annonce son intention dedistribuer le livre gratuitement tous leslycens. En France, Marie-Pierre Grace-dieu regrette que lducation nationalene se soit pas saisie du texte, avant de sa-luer linitiative de La Franaise des jeux.Stphane Pallez, prsidente du groupe,offrira le livre chaque collaborateur le8 mars, loccasion de la Journe inter-nationale des droits des femmes.p

    gladys mar ivat

  • 7/24/2019 Monde 3 en 1 Du Mardi 23 Fvrier 2016

    34/34

    4 | les femmes, avenir du continent africain MARDI 23 FVRIER 20160123

    Les dbats du Monde Afrique,mardi 23 fvrier,Muse du quai Branly,37, quai Branly, Paris 7e.

    thtreclaude-lvi-strauss

    10 heuresMot daccueil de JrmeFenoglio,directeur duMonde,et de Serge Michel,rdacteuren chef du Monde Afrique.

    10 h 15Bande annonce deLHomme quirpare les femmes, et prsenta-tion du film par son ralisateur,Thierry Michel,avec AnnickCojean,journaliste auMonde.

    10 h 30Prise de parole de Makhtar Diop,vice-prsident de la Banquemondiale pour lAfrique.

    10 h 50Conversation avec Awa MarieColl Seck,ministre de la santet de laction sociale du Sngal.Modration : Coumba Kane.

    11 h 10Conversation avec Leymah

    Gbowee,militante et Prix Nobelde la paix. Modration :Georja Calvin-Smith,journaliste France 24.

    12 heuresConversation avec FadumoDayib,candidate llectionprsidentielle de Somalie.Modration : El Asu,journaliste Canal+.

    12 h 40Projection de la bande-annoncede la srie tlvise Cest la vie .

    14 heuresPerformance musicale de

    la chanteuse Patricia Essong.

    14 h 15Projection de trois portraits defemmes, prsents par le Fondsfranais Muskoka.

    14 h 25Conversation avec ChimamandaNgozi Adichie, crivain.Modration : Sylvie Kauffmann,journaliste auMonde.

    15 h 25Projection dun portfoliode portraits de femmesafricaines par Stphan Gladieu,avec le soutien de la Banquemondiale.

    15 h 30Conversation avec MagatteWade, fondatrice et directricede Tiossan. Modration :Dominique Laresche,journaliste TV5 Monde.

    16 h 10Table ronde : Le rle des fem-mes dans lessor conomiquedu continent , avec CarenGrown,directrice genre laBanque mondiale, Safia Otokor,charge des relations extrieuresgenre de lAFD,Bruktawit Tigabu,entrepreneuse sociale etlaurate du prix Rolex lespritdentreprise, et Ebele Okobi,directrice des politiquespubliques de Facebook Afrique.

    Modration : Serge Michel,rdacteur en chef du MondeAfrique.

    17 h 40Mot de clture par lcrivainErikOrsenna,membre de lAcadmiefranaise.

    18 heuresUn mot de lartiste Salif Keitasur sa fondation, suividune performance musicale.

    salle de cinma

    11 h 30Projection du documentaireLHomme qui rpare les femmes,de Thierry Michel.

    16 heures

    Projection dun pisode de la srie Cest la vie , en prsence dela scnariste Marguerite Abouet.

    le programme

    Femmes, Africaines, elles sont...

    En Afriquesubsaharienne,

    les femmes produisent80 % des denres

    alimentaires

    Elles reprsentent70 %de la force agricole

    du continent

    C'est grce

    aux femmes africaines

    que les foyers sont

    approvisionns

    en eau. Au Malawi,

    les femmes consacrent

    9,1heures par semaine

    la collecte.

    63 %

    des Subsahariennes

    sont bnficiaires

    dun micro-crdit,

    contre 37 %pour

    les hommes

    SOURCES : BANQUE MONDIALE, FAO, UNCCD, UNESCO, BANQUE AFRICAINE DE DVELOPPEMENT, MIX MARKET, HERRINGTON & KELLY, 2012Infographie Elisa Bellanger, Marianne Boyer, Laureline Savoye, Eric Bziat

    Nourricires Vitales Dynamiques

    55 %

    des Capverdiennes sont

    propritaires terriennes,

    alors que la moyenne

    mondiale est de 30 %,

    15 %pour le reste

    de lAfrique.

    Les femmes sont

    propritaires dun tiers

    des entreprises

    en Afrique.

    Au Nigeria et au Ghana,

    il y a plus de femmes

    entrepreneuses que

    dhommes.

    2 femmes africaines

    figurent dans

    le classement

    des milliardaires

    de Forbes 2015.

    Elles psent, elles

    deux, 5milliards

    de dollars.

    Au Rwanda, les femmes

    occupent 51

    des 80 siges

    de l'Assemble

    nationale.

    En France, elles

    reprsentent 26 %.

    LAfrique compte

    3 femmes prsidentes,

    en Centrafrique,

    lle Maurice et au

    Liberia, tandis

    que l'Europe

    en compte 4.

    Enseignement

    primaire : 18 pays

    africains ont atteint

    la parit des sexes

    en 2011.

    La mortalit maternelle

    a diminu de 42 %

    depuis 1990.

    Propritaires Patronnes Riches Impliques Puissantes Eduques Vivantes

    De fabuleux destinsLune a reu un Oscar, lautre est aux commandes de son usine de traitement du lait. La preuve du dynamisme desfemmes africaines par les portraits de lactrice knyane Lupita Nyongo et de lleveuse tanzanienne Feddy Tesha

    Lexpression femmes afri-caines , qui a mobilis la r-daction du Monde Afriqueet ses partenaires, a-t-elleseulement un sens ? Quelsnoms, quels visages surgis-

    sent lvocation de ce vocable ? Le simplefait quil faille dsormais prciser sonpays, sa catgorie sociale ou profession-nelle est le signe des progrs considra-

    bles accomplis depuis quelques dcen-nies. Lexpression ne dsigne plus seule-ment les femmes obliges de porter leauentre le puits et le village, ou le bois pourfaire cuire les repas. Il y a des prsidentes,des entrepreneures, des artistes, des juris-tes, des journalistes, des couturires etbien sr encore beaucoup de femmes aufoyer ou aux champs. Dune certaine ma-nire, les femmes africaines sont deve-nues aussi diverses que leur continent. Lapreuve par un double portrait, celui duneactrice clbre et dune paysanne. Deuxfaons dtre femme africaine, deux extr-mes peut-tre entre lesquels existentaujourdhui heureusement mille etune possibilits.

    Commenons par lactrice. Comment nepas tre boulevers par Lupita Nyongo ?Bien sr, la Knyane de 32 ans a crevlcran dans son rle de Patsey, la jeune es-clave martyrise dans la plantation de

    12 Years a Slave,de Steve McQueen (2013).Pour sa premire apparition au cinma,

    elle a t rcompense par lOscar de lameilleure actrice dans un second rle. Elleest aussi devenue clbre du jour au len-demain. Ne au Mexique, originaire du Ke-nya, suivant depuis deux ans des tudesdart dramatique luniversit Yale, auxEtats-Unis, elle semblait faite pour a : in-carner une femme universelle qui soitaussi une femme noire, la beaut et lagrce si clatantes quelles ont des vertus

    tonnantes, comme celle de faire renoncerde jeunes filles noires lusage de crmesclaircissantes pour la peau.

    Lupita Nyongo, qui fait remonter lesventes de Vogue quand elle apparat encouverture, est aussi le produit dune his-toire politique particulire. Son pre, PeterAnyang Nyongo, est lun de ces intellec-

    tuels un temps marxisants qui se sontdresss contre le rgime parti unique de

    lex-prsident Daniel Arap Moi. Dans lesannes 1980, le Kenya est sous le coup deson pouvoir autoritaire. Peter AnyangNyongo est arrt sans cesse, malmen.Pour sloigner, il prend, comme Trotski, laroute du Mexique et y sera embauchpour crer le dpartement dtudes afri-caines dans une universit. Cest l quenatra sa fille, Lupita.

    Au Kenya, les temps changent. Bientt,

    les Nyongo sont de retour. Peter militepour le retour au multipartisme. Long-temps opposant, puis ministre, sans ja-mais renier ses valeurs morales, il estaujourdhui snateur du comt de Kisumu, louest du Kenya. Lupita Nyongo est len-fant de ce Kenya-l, ouvert sur le monde,prometteur en toutes choses.

    Feddy Tesha, elle, est loin des sunlights.Lorsque lon croise ce petit bout de femmede 59 ans dans les runions off icielles Dar es-Salaam, dans les traves de saferme ou sur les routes de Tanzanie quellearpente sans cesse, on se pose deux ques-tions. Dabord : quel est le ressort qui lui apermis de dvelopper une des principalesexploitations laitires de son pays ? Maisaussi : quoi ressemblerait lAfrique si toutle monde tait comme elle ?

    Un jour, il y a dix-huit ans, Feddy Teshainstalle une vache larrire de sa maisonpour mieux nourrir ses quatre enfants.

    Les soins quelle prodigue lanimal luifont produire 10 litres de lait par jour, bien

    plus que la moyenne de 3 litres. Elle com-mence en vendre ses collgues fonc-tionnaires. Devant le succs, elle prendune deuxime vache, puis dautres, cons-truit une table, puis deux. Aujourdhui,Feddy Tesha a 60 vaches, produisant plusde 1 000 litres par jour, et son usine de trai-tement du lait reoit la production de135 petits producteurs, en majorit desfemmes. Elle est prsidente de lassocia-

    tion laitire de Tanzanie et sa socit, Pro-fate Investment Ltd, cherche 1,2 million dedollars pour dvelopper une cooprativelaitire dans le district de Mkuranga, ausud de Dar es-Salaam, o 624 petits pro-ducteurs, des femmes massa pour la plu-part, se prparent livrer leur lait. Elle ades chances de trouver cet argent : les in-vestisseurs internationaux considrentdsormais le lait comme plus sr que leptrole, et lAfrique comme lune des desti-nations les plus rentables de la plante.

    Feddy Tesha veut transformer la filirelaitire de son pays. Entre-temps, son suc-cs a transform la vie de ses enfants.Lane est laborantine dans un hpital. Ladeuxime informaticienne. Le troisimefait un MBA dans une bonne cole. Quant son fils adoptif, le dernier, il a tudi lafinance et travaille dans limmobilier. Maisalors, qui va soccuper des vaches ? Nevous inquitez pas,plaisante Feddy Tesha.

    Il y a assez de paysans en Tanzanie. p

    jean-philippe rmy et serge michel

    Devant le succs,

    Feddy Tesha prend

    une deuxime vache, puis

    dautres, construit

    une table, puis deux