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Ch. des Bouleaux 14, 1012 LAUSANNE, SUISSE Tél. +41 79 778 71 67 Fax +41 21 311 15 33 [email protected] www.easse.org EASSE european association single-sex education NUMERO 6 - MAI 2011 JDP Les milieux de l’éducation ont-ils bien accueilli votre livre sur l’échec des garçons ? JLA Non seulement mon travail n’a pas été re- mis en question depuis la publication de mon ou- vrage, mais le constat que j’avais crûment révélé est aujourd’hui admis par tous. J’ai été invité ces derniers mois par de nombreux établissements scolaires à donner des conférences sur le sujet, et aussi dans de nombreuses villes françaises et devant des publics très variés. JDP Vous vous fondez sur PISA pour démontrer la différence de performances scolaires entre garçons et filles. De ce point de vue, vos chiffres sont inattaquables, mais proposez-vous vraiment quelque chose de nouveau ? Osez-vous la non- mixité, pour le dire ainsi ? JLA PISA 2010 a bien mis en lumière l’existence d’une triple fracture, sociale, ethnique et sexuée qui nécessite pour s’y attaquer de travailler la pé- dagogie différenciée à proposer aux élèves. Ce peut être, par exemple, d’enseigner séparément aux garçons et aux filles durant deux moments- clés du développement de l’enfant, à l’apprentis- sage de la lecture entre 5 et 7 ans et lorsque les différences de maturité sont les plus marquées, c’est-à-dire entre 13 et 15 ans. C’est d’ailleurs ce que met en avant la Commission Euro- péenne dans le rapport EURYDICE (voir notre encadré à la page sui- vante). JDP Et de telles propositions ne provoquent-elles pas un tollé ? JLA Je constate plutôt un soulagement, voire une délivrance parmi les enseignants qui m’écoutent. Ils se rendent bien compte des difficultés qu’il y a dans l’enseignement à ces âges. Ils sont contents d’entendre que l’on peut envisager une approche différenciée entre garçons et filles. JDP Donc l’enseignement non-mixte est désor- mais chose admise ? JLA Ce n’est plus un tabou de parler de possibilité de moments séparés et de différenciations péda- gogiques. C’est matière à débat. JDP Mais même ainsi, est-ce qu’il n’y a pas une question financière qui pourrait freiner cette ap- proche pédagogique ? Est-ce que cela ne coûte pas plus cher d’avoir des classes de filles et des classes de garçons ? Entrevue avec Jean-Louis Auduc, auteur de Sauvons les garçons Jean-Louis Auduc, directeur adjoint de l’IUFM de Créteil Les professeurs se rendent bien compte des difficultés qu’il y a dans l’enseignement à ces âges. Ils sont contents d’entendre que l’on peut envisager une approche différenciée entre garçons et filles. NEWSLETTER

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NUMERO 6 - MAI 2011

JDP Les milieux de l’éducation ont-ils bien accueilli votre livre sur l’échec des garçons ?

JLA Non seulement mon travail n’a pas été re-mis en question depuis la publication de mon ou-vrage, mais le constat que j’avais crûment révélé est aujourd’hui admis par tous. J’ai été invité ces derniers mois par de nombreux établissements scolaires à donner des conférences sur le sujet, et aussi dans de nombreuses villes françaises et devant des publics très variés.

JDP Vous vous fondez sur PISA pour démontrer la différence de performances scolaires entre garçons et filles. De ce point de vue, vos chiffres sont inattaquables, mais proposez-vous vraiment quelque chose de nouveau ? Osez-vous la non-mixité, pour le dire ainsi ?

JLA PISA 2010 a bien mis en lumière l’existence d’une triple fracture, sociale, ethnique et sexuée qui nécessite pour s’y attaquer de travailler la pé-dagogie différenciée à proposer aux élèves. Ce peut être, par exemple, d’enseigner séparément aux garçons et aux filles durant deux moments-clés du développement de l’enfant, à l’apprentis-

sage de la lecture entre 5 et 7 ans et lorsque les différences de maturité sont les plus marquées, c’est-à-dire entre 13 et 15 ans. C’est d’ailleurs ce que met en avant la Commission Euro-péenne dans le rapport EURYDICE (voir notre encadré à la page sui-vante).

JDP Et de telles propositions ne provoquent-elles pas un tollé ?

JLA Je constate plutôt un soulagement, voire une délivrance parmi les enseignants qui m’écoutent. Ils se rendent bien compte des difficultés qu’il y a dans l’enseignement à ces âges. Ils sont contents d’entendre que l’on peut envisager une approche différenciée entre garçons et filles.

JDP Donc l’enseignement non-mixte est désor-mais chose admise ?

JLA Ce n’est plus un tabou de parler de possibilité de moments séparés et de différenciations péda-gogiques. C’est matière à débat.

JDP Mais même ainsi, est-ce qu’il n’y a pas une question financière qui pourrait freiner cette ap-proche pédagogique ? Est-ce que cela ne coûte pas plus cher d’avoir des classes de filles et des classes de garçons ?

Entrevue avec Jean-Louis Auduc, auteur de Sauvons les garçons

Jean-Louis Auduc, directeur adjoint de l’IUFM de Créteil

Les professeurs se rendent bien compte des difficultés qu’il y a dans l’enseignement à ces âges. Ils sont contents d’entendre que l’on peut envisager une approche différenciée entre garçons et filles.

NEWSLETTER

EASSE NEWSLETTER NUMERO 6 MAI 2011 PAGE 2

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ENTREVUE AVEC JEAN-LOUIS AUDUC

JLA Pas du tout. La plupart de nos anciens établis-sements ont été conçus ainsi.

JDP Est-ce que ce sont les écoles privées ou pu-bliques qui sont les plus ouvertes à vos sugges-tions ?

JLA Tous les établissements sont en réflexion sur la question. Certains établissements publics se posent la question d’expérimenter des moments

séparés. Certains établissements gérés par l’ensei-gnement catholique sont restés non-mixtes, plus par tradition que par réflexion pédagogique. Il se-rait aujourd’hui très important d’en faire scientifi-quement un bilan concernant leurs élèves et de former les enseignants concernés à des pratiques pédagogiques différenciées.

JDP Et quelles sont pour vous les évolutions fu-tures dans ce domaine ?

JLA Maintenant que la question de la différenciation pédagogique filles/garçons, n’est plus un tabou, j’attends une prise de conscience des associations de parents d’élèves dans ce domaine.

Propos recueillis par Jean-David Ponci

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Certains établissements publics se posent la question d’expérimenter des moments séparés. Donc, il y a beaucoup de réflexions en cours.

Le rapport EURYDICE Différences entre les genres en matière de réussite scolaire : Étude sur les mesures prises et la situation actuelle en Europe, publié par la Commission Européenne en juin 2010, essaie de sortir du débat piégé : classe ou école non mixte/ classe mixte en mettant bien en avant les expériences où, dans une classe mixte, il y a des moments séparés non mixtes pour mieux favoriser les apprentissages et la réussite de tous. « Certaines écoles primaires (en Écosse et dans les pays nordiques) sépa-rent les filles des garçons pendant de courtes périodes durant la journée, sans organiser de classes non mixtes fixes. L’idée est d’offrir plus d’espace à la fois aux garçons et aux filles ». Le rapport, en présentant ces dispositifs, indique qu’ils sont liés à des réflexions sur la façon de lut-ter contre l’échec scolaire et les problèmes com-portementaux. Ces réflexions « permettent aux enseignants d’employer des stratégies éventuel-lement plus adaptées pour un genre ou l’autre. Les groupes non mixtes dans le cadre de classes mixtes permettent par exemple aux filles de se sentir plus libres de répondre aux questions et

de participer davantage aux cours, et permettent aux garçons de travailler

plus dur sans se soucier de leur image en tant qu’apprenant. » Il

rappelle également que « seuls quelques pays ont élaboré des programmes spéciaux en vue d’améliorer les compétences des garçons en lecture. »

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C’est sans doute la première fois en France qu’une réunion sur ce thème descend telle-ment dans le détail. L’approche en était ré-solument novatrice. Les organisateurs ont su échapper au débat piégé : faut-il séparer garçons et filles ou encore pourquoi les filles s’intéressent-elles moins à l’informatique ? Sil-vestre Baudrillart a très bien su donner le ton dans l’introduction à la conférence en parlant de pédagogie constructive et efficace, où il ne s’agit pas d’être antifémisniste ou antimixité.

En s’éloignant des questions sociétales, la conférence a pu se centrer sur la didactique : comment enseigner les maths, l’histoire, le français aux garçons et aux filles ? Chaque enseignant aura su en tirer du concret. Jean-David Ponci a beaucoup insisté sur le fait que certaines différences de fonctionnement entre garçons et filles ne sont pas dues qu’à la culture. Il a illustré son propos en se référant à des expériences récentes menées en An-gleterre et aux Etats-Unis. En même temps il a aussi souligné que les préjugés ont une grande influence sur les résultats des élèves.

Céline Guérin, grâce à un admi-rable schéma, a passé en revue les différences entre garçons et filles dans l’en-seignement des mathématiques. Elle a insisté sur la tendance des filles à la mémo-risation et à celle des garçons à trouver à leur façon.

L’expérience d’Hélène Parisy nous a été très utile. C’était l’unique intervenante qui ensei-gnait à la fois à des garçons et à des filles

en situation de mixité et de non-mixité. Dans l’atelier de gestion de classe, elle a expliqué qu’il fallait apprendre aux garçons à respecter les formes — avec eux l’humour en classe fonctionne très bien, mais gare aux déborde-ments — tandis qu’il faut apprendre parfois aux filles à se libérer des formes.

Silvestre Baudrillart a expliqué qu’il faut encourager les garçons à être soigneux, puisqu’ils ne le sont pas spontanément. Dans un travail écrit, il a préconisé de donner des points pour la présentation et l’écriture, la manière de colorier, etc.

Cette journée a été si riche qu’il vaut mieux se contenter de ces quelques coups de pin-ceau. Heureusement, la conférence a été fil-mée et trois DVD sont en vente à la Fonda-tion pour l’école (tél. 0033 1 42 62 76 94).

L’assistance était composée des élèves de l’Institut Libre de Formation des Maîtres et de personnes de l’extérieur : environ 120 per-sonnes à la conférence plénière et 70 dans les ateliers. La conférence a eu lieu à la FACO (Faculté Autonome CO-gérée), dans le 6ème arrondissement. La dynamique du cours était excellente et les remarques du public parti-culièrement enrichissantes. Il est vrai qu’il y avait 5 directeurs d’écoles et nombre d’en-seignants expérimentés. A refaire...

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Journée de formation sur l’approche pédagogique différenciée pour les garçons et pour les filles à Paris

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Silvestre Baudrillart (à gauche) et Jean-David Ponci, lors de la conférence plénière.

Céline Guérin, lors de l’atelier «mathématiques»

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21 juin 2011

Advancing Girls in STEM : An NCGS Symposium (The National Coalition of Girls‘ Schools), Wellesley College, Wellesley, Massachussetts, USA, http://www.ncgs.org/STEMSymposium2011/overview/

10-13 juillet 2011

18ème conférence annuelle de la IBSC (International Boys‘ Schools Coalition), The City of London School, London, Royaume Uni, http://www.theibsc.org/

7-8 octobre 2011

3ème congrès international de l’EASSE (European Association Single Sex Education), Varsovie, Po-logne, http://www.easse.org.pl/en

8-9 octobre 2011

7ème conférence internationale de la NASSPE (National Association For Single Sex Public Educa-tion), Orlando, Florida, www.singlesexschools.org

21-23 novembre 2011

Conférence annuelle de la GSA (Girls’ Schools Association), Marriott City Centre Hotel, Bristol, United Kingdom, www.gsa.uk.com/About+GSA/events/GSA+Annual+Conference

25-27 mai 2012

Conférence bisannuelle de l’Alliance of Girls‘ Schools Australasia, Merbourne Girls Grammar School South Yara, Australia, http://www.agsa.org.au/events.php?EventID=98

Conférences à travers le monde