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123 Bull. Soc. Pharm. Bordeaux, 2012, 151(1-4), 123-140 PRIX DE THÈSE DE LA SOCIÉTÉ DE PHARMACIE DE BORDEAUX Le jeudi 11 octobre 2012 a eu lieu l’audition orale des candidats au “ Prix de thèse de la Société de Pharmacie de Bordeaux ”. Parmi les thèses de Doctorat d'État en Pharmacie soutenues à l'Université Bordeaux Segalen entre le premier septembre 2011 et le 31 aout 2012 et autorisées à être présentées au Prix de thèse de la Société, huit ont été reçues et retenues par le Jury. Les étudiants ont exposé brillamment leur travail sur PowerPoint. Après délibération, la récompense a été attribuée à Mesdemoiselles Coralie Bouchiat pour son travail intitulé “ Caractérisation par mutagenèse dirigée des résidus de la piline majeure pile impliqués dans la signalisation médiée par les pili de type IV chez N. meningitidis ” (thèse dirigée par le Pr. Xavier Nassif et présidée par le Pr. Claudine Quentin) et Marie Boureau pour le travail suivant : “ Les pharmaciens, la vigne, et le vin en France : Étude historique de 1800 à nos jours ” (thèse dirigée et présidée par le Pr. Jean-Michel Mérillon). Un chèque d'un montant de 500 euros a été remis aux lauréates. Les prix seront décernés officiellement lors de la Cérémonie de remise des Prix et des serments de Galien qui a lieu chaque année début juillet. Nous adressons aux lauréats nos plus vifs compliments. On trouvera ci-après les résumés des thèses des candidats.

PRIX DE THÈSE DE LA SOCIÉTÉ DE PHARMACIE … · 124 Marie Boureau et Coralie Bouchiat. • Coralie BOUCHIAT — Caractérisation par mutagenèse dirigée des résidus de la piline

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Bull. Soc. Pharm. Bordeaux, 2012, 151(1-4), 123-140

PRIX DE THÈSE DE LA SOCIÉTÉ DE PHARMACIE DE

BORDEAUX

Le jeudi 11 octobre 2012 a eu lieu l’audition orale des candidats au “ Prix de thèse de la Société de Pharmacie de Bordeaux ”. Parmi les thèses de Doctorat d'État en Pharmacie soutenues à l'Université Bordeaux Segalen entre le premier septembre 2011 et le 31 aout 2012 et autorisées à être présentées au Prix de thèse de la Société, huit ont été reçues et retenues par le Jury. Les étudiants ont exposé brillamment leur travail sur PowerPoint.

Après délibération, la récompense a été attribuée à Mesdemoiselles Coralie Bouchiat pour son travail intitulé “ Caractérisation par mutagenèse dirigée des résidus de la piline majeure pile impliqués dans la signalisation médiée par les pili de type IV chez N. meningitidis ” (thèse dirigée par le Pr. Xavier Nassif et présidée par le Pr. Claudine Quentin) et Marie Boureau pour le travail suivant : “ Les pharmaciens, la vigne, et le vin en France : Étude historique de 1800 à nos jours ” (thèse dirigée et présidée par le Pr. Jean-Michel Mérillon).

Un chèque d'un montant de 500 euros a été remis aux lauréates. Les prix seront décernés officiellement lors de la Cérémonie de remise des Prix et des serments de Galien qui a lieu chaque année début juillet.

Nous adressons aux lauréats nos plus vifs compliments. On trouvera ci-après les résumés des thèses des candidats.

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Marie Boureau et Coralie Bouchiat.

• Coralie BOUCHIAT — Caractérisation par mutagenèse dirigée des résidus de la piline majeure pile impliqués dans la signalisation médiée par les pili de type IV chez N. meningitidis

Neisseria meningitidis, ou méningocoque, est une bactérie à Gram négatif associée en diplocoque. Habituellement commensale, elle est hébergée au niveau du rhinopharynx de l’Homme, son hôte exclusif. Ce phénomène, appelé portage, est tout à fait asymptomatique et est variable en fonction de l’âge. 10 à 35 % de la population est porteuse avec une prévalence accrue chez les enfants et le jeune adulte. Néanmoins, le méningocoque peut être responsable d’infections invasives parfois gravissimes comme la septicémie à méningocoque, pouvant se compliquer d’un purpura fulminans, et la méningite cérébro-spinale. Dans ce dernier cas le méningocoque arrive à franchir la barrière hémato-méningée (BHM), malgré les jonctions serrées liant les cellules endothéliales et rendant cette barrière imperméable. Comprendre par quel mécanisme N. meningitidis passe à travers la BHM est un enjeu essentiel.

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Le méningocoque présente à sa surface de longs appendices filamenteux, les pili de type 4 (Pt4). Les Pt4 sont un assemblage de multiples sous-unités protéiques appelées pilines, dont la principale est la piline PilE. Les pili de type 4 sont impliqués dans différentes fonctions. Ils permettent entre autre l’adhésion de N. meningitidis à la cellule hôte et l’agrégation entre bactéries. Plus récemment, il a été montré que les Pt4 sont également capables de déclencher des voies de signalisation chez la cellule endothéliale. On parle de fonction de signalisation. L’activation de ces différentes voies induit la relocalisation des protéines formant les jonctions serrées entre les cellules endothéliales de la BHM. Les jonctions intercellulaires étant déstabilisées, la BHM devient alors perméable. Le phénomène de signalisation est donc une étape clé de l’infection méningée par N. meningitidis. Le domaine des pili de type IV responsable de cette fonction reste encore inconnu. Nous avons donc souhaité déterminer la zone précise de la piline PilE, constituant majoritaire des Pt4, déclenchant les voies de signalisation.

La protéine PilE est soumise à variation antigénique. Les recombinaisons génétiques qu’elle subit aboutissent à des protéines légèrement différentes. Dans le but de déterminer le rôle de la piline PilE dans la signalisation cellulaire induite par la bactérie, nous avons comparé deux variants protéiques de PilE décrits : SA et SB. Le variant SA de la piline PilE est déjà connu pour présenter un déficit pour les fonctions d’agrégation bactérienne et d’adhésion aux cellules hôtes, contrairement au variant SB qui est hyper agrégatif et hyper adhésif. Nous avons montré que ces deux variants présentent des capacités de signalisation différentes, le variant SA de la piline PilE étant incapable de déclencher une signalisation cellulaire, contrairement au variant SB. Ces deux variants se distinguent par une variation de séquence au niveau d’une boucle cystéine en C-terminal de la piline PilE, appelée région D, probable support de ces fonctions.

Nous avons donc voulu déterminer l’épitope responsable de la signalisation dépendante de PilE en effectuant un criblage alanine par mutagénèse dirigée. Ainsi, nous avons muté un à un chacun des 14 acides aminés du variant PilE-SB qui différaient du variant PilE-SA au niveau de la région D.

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Les mutations obtenues n’altéraient ni la production ni la stabilité des protéines. L’ensemble des 14 mutants exprimait en effet les protéines PilE mutées en quantité normale. D’autre part, nous nous sommes assurés qu’aucune autre fonction médiée par les Pt4 et pouvant influencer la signalisation n’était affectée. L’étude de la fonction de signalisation des mutants a ensuite été réalisée par immunofluorescence, mettant en évidence l’activation des différentes voies de signalisation. Les résultats ont permis de montrer que les quatre résidus Q129, K147, D149 et D150 sont impliqués dans le phénotype de signalisation. Nous souhaitons confirmer ces résultats en étudiant l’effet propre des protéines mutées. Pour cela nous avons entrepris la production de protéines de fusion MBP-PilE mutée où la Maltose Binding Protein (MBP) sert de socle à PilE, ce duplex protéique étant ensuite coaté sur une souche de S. aureus. Nous poursuivrons l’étude de ces résidus, notamment par des études de modélisation, afin de comprendre comment la piline PilE du méningocoque est impliquée dans le franchissement de la barrière hémato-méningée.

Directeur de thèse : Pr. Hervé FLEURY

Président de thèse : Pr. Dominique BREILH

• Marie BOUREAU — Les pharmaciens, la vigne, et le vin en France : Étude historique de 1800 à nos jours

Pendant longtemps, les domaines de la viticulture et de l’œnologie ont été gouvernés par une tradition plus ou moins empirique. À partir du XIXe siècle, ce secteur va bénéficier des progrès de la science grâce à l’implication de scientifiques parmi lesquels on compte beaucoup de pharmaciens. Cette étude se propose de mettre en valeur l’œuvre de ces derniers, qui, jusqu’à l’heure, à quelques exceptions près, a été pratiquement ignorée par les historiens de la vigne et du vin.

En premier lieu, les pharmaciens se sont préoccupés de la santé de la vigne en participant à la lutte contre les affections parasitaires qui l’ont durement affectée au cours du XIXe siècle. Ainsi, Pierre Batilliat, pharmacien à Mâcon, en donnant sa caution scientifique au procédé de l’échaudage des ceps, contribua à l’éradication de la Pyrale de la Vigne. Il publia également, en 1846, un ouvrage d’œnologie remarquable, le Traité

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sur les vins de la France. Dans la lutte contre l’oïdium, les pharmaciens ont proposé d’utiliser des poudres composées à base de soufre. C’est ainsi que Pierre Fonta, un pharmacien de l’Ariège, fit breveter une poudre magnésienne sulfurée, et qu’Alexandre Édouard Baudrimont, Professeur à la Faculté des Sciences de Bordeaux, mit au point une poudre anti‐oïdique qui fut très employée dans la région bordelaise. À partir de 1863, plusieurs pharmaciens participèrent à la lutte contre le phylloxéra. Parmi ceux‐ci, Jules‐Emile Planchon, Professeur à l’École supérieure de Pharmacie de Montpellier, jouera un rôle déterminant, d’une part en découvrant l’insecte responsable, d’autre part en proposant d’utiliser des vignes américaines résistantes comme porte‐greffes pour reconstituer le vignoble français. Avant cette étape décisive, d’autres pharmaciens proposeront de renforcer la résistance de la vigne au parasite par l’utilisation d’engrais (Gaston Guy, de Bergerac, et son « Compost‐Guy »), ou préconiseront l’emploi d’insecticides (Benjamin Cauvy, de Montpellier, et son « Insecticide Cauvy » à base de sulfocarbonate de calcium). Par la suite, la survenue de deux autres affections cryptogamiques, le Mildiou et le Black‐rot, fut à l’origine de nombreux travaux de la part de deux pharmaciens lot‐et‐garonnais, Émile Fréchou et Gaston Lavergne. Émile Fréchou étudia plus particulièrement le Mildiou et mit au point la « Bouillie Fréchou » pour le combattre, tandis que Gaston Lavergne proposa une composition nommée « Sporivore » pour augmenter l’activité de la bouillie bordelaise. Il publiera également un ouvrage apprécié sur le black‐rot, et sa notoriété le mènera jusqu’en Amérique latine où il fondera le Laboratoire de Pathologie végétale de Santiago‐du‐Chili.

Parallèlement à la santé de la vigne, les pharmaciens se sont occupés de la santé du vin afin d’en préserver la salubrité. Leur intervention a été présente à tous les stades : élaboration, conservation, et analyse du vin. Ainsi, en ce qui concerne l’élaboration du vin, Jean‐Baptiste François, pharmacien à Châlons‐sur‐Marne, trouva le moyen d’obtenir une pression convenable à l’intérieur des bouteilles de vins mousseux, résolvant pour la Champagne l’important problème de la casse des bouteilles. De son côté, le célèbre pharmacien militaire Antoine‐Augustin Parmentier étudia la pratique du sucrage ou chaptalisation, préconisant l’emploi du sucre de raisin plutôt que celui du sucre de canne. La pratique ancienne du plâtrage fît l’objet de nombreux travaux de la part des pharmaciens : c’est en particulier le cas du pharmacien militaire Jean‐Hippolyte Marty, ainsi que de John Casthélaz à Paris et de Pascal Hugounenq à Lodève, ces derniers ayant proposé des alternatives au plâtrage. Pour ce qui est de la conservation

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des vins, les pharmaciens luttèrent contre les diverses maladies du vin, et notamment celles dites « de la casse ». La casse oxydasique fut étudiée par Paul Cazeneuve, Professeur à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Lyon, tandis que l’innocuité du collage bleu, utilisant le ferrocyanure de potassium pour prévenir la casse ferrique, fut démontrée à Bordeaux par Louis Chelle, Professeur à la Faculté de Médecine et de Pharmacie, et à Alger par le pharmacien Émile Couerbe. Les travaux nombreux des pharmaciens concernant l’analyse des vins comportent notamment l’établissement de règles œnologiques permettant la détection du mouillage (travaux du Professeur Charles Blarez à Bordeaux, de Lucien Roos du Professeur Fonzès‐Diacon, et de Slizewicz à Montpellier), ainsi que la recherche de substances indésirables éventuellement présentes dans le vin (pesticides, antiseptiques, colorants artificiels). Enfin, les pharmaciens ont joué un rôle déterminant dans la création du Codex œnologique. En effet, sous l’impulsion du Professeur Paul Jaulmes, de la Faculté de Pharmacie de Montpellier, un chapitre sur les « Produits utilisés en Œnologie » a été introduit dans la 8e édition de la Pharmacopée française (1965), les pharmaciens ayant ainsi voulu fixer des normes pour les matières premières utilisées en œnologie sur le même modèle que cela existait pour les médicaments, premier pas vers le Codex œnologique international maintenant adopté partout.

Un dernier aspect de l’intérêt des pharmaciens pour le vin concerne l’impact de cette boisson sur la santé. La période historique est celle des vins médicinaux dont on suit l’évolution de la présence dans les éditions successives de la Pharmacopée française, tandis que l’on souligne le très grand succès des vins médicinaux spécialisés au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe siècle. Les travaux contemporains visent quant à eux à étudier les effets physiologiques et les potentialités thérapeutiques des composants du vin. Sans passer sous silence les effets délétères de l’alcool et son interaction avec certains médicaments, quatre aspects de ces recherches sont plus particulièrement développés : propriétés antiseptiques des vins, vin et protection cardiovasculaire, vin et maladies neurodégénératives, produits issus de la vigne et cosmétologie. Des équipes pharmaceutiques s’appliquent à déterminer les molécules actives présentes dans le vin ainsi que les mécanismes physiologiques impliqués dans leur action. À titre d’exemple, pour ce qui est de l’activité cardiovasculaire, à Strasbourg, les équipes des Professeurs Stoclet et Schini‐Kerth ont mis en évidence un effet vasorelaxant et antiangiogénique de certains polyphénols du vin. De même, à Bordeaux, l’action des polyphénols sur les maladies

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neurodégénératives fait l’objet de recherches des équipes des Professeurs Mérillon et Monti qui ont montré pour certains d’entre eux une activité antiamyloïdogénique et un effet inhibiteur sur la neuro‐inflammation.

En conclusion, cette étude historique montre le rôle scientifique important joué depuis plus de deux siècles par les pharmaciens dans toutes les problématiques de la filière viti‐vinicole. Les pharmaciens sont bien là dans leur mission de protection de la santé en veillant à garantir la salubrité du vin et à en promouvoir un bon usage, tandis qu’ils y recherchent aussi d’éventuelles sources d’inspiration thérapeutique.

Directeur et Président de thèse : Pr. Jean-Michel MÉRILLON

• Caroline DARIE — Soleil et santé : les deux côtés du miroir

Une irradiation solaire excessive, de même qu’une exposition non contrôlée à des rayonnements UV produits artificiellement peuvent être responsables d’effets délétères, notamment au niveau des tissus cutanés et oculaires.

La première partie de ce mémoire présente les principales conséquences immédiates ou à long terme de telles irradiations et effectue un mise au point sur les mécanismes moléculaires des troubles cutanés et oculaires photo-induits. Ces connaissances sont indispensables au pharmacien d’officine afin que celui-ci puisse remplir efficacement son rôle d’information et de prévention à l’égard du public.

À côté de ces effets néfastes le plus souvent associés à une surexposition aux rayonnements UV, la lumière solaire intervient aussi dans certaines fonctions biologiques vitales comme la biosynthèse de la vitamine D ou la production de mélatonine. La deuxième partie de cette thèse est consacrée à une analyse des données bibliographiques récentes qui suggèrent des perspectives thérapeutiques mettant à profit certaines radiations lumineuses pour la prévention ou le traitement de diverses pathologies humaines. Ce volet du mémoire est aussi l’occasion de rappeler les applications thérapeutiques actuelles de la vitamine D et de ses analogues.

Directeur et Président de thèse : Pr. Alain NUHRICH

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• Céline LAPÈGUE — Personnalités hors du commun et troubles bipolaires

Le trouble bipolaire est une pathologie psychiatrique sévère caractérisée par l’alternance d’épisodes dépressifs et d’épisodes maniaques. Ces états sont séparés par des périodes au cours desquelles les sujets sont a priori indemnes de dysfonctionnements psychiques majeurs. La cause exacte est inconnue, mais l’hérédité, des modifications au niveau des neurotransmetteurs du cerveau et des facteurs psychosociaux peuvent être incriminés. Les premières descriptions de ce trouble ont eu lieu dès l’Antiquité mais il faudra attendre le XIXème siècle pour que manie et dépression soient reconnues comme pouvant appartenir à une seule entité diagnostique.

À l’instar de nombreuses maladies psychiatriques, le trouble bipolaire se présente sous différentes formes et à divers degrés. Ainsi, les classifications internationales telles que la Classification Internationale des Maladies (CIM 10) émise par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et le Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux (DSM-IV) de l’American Psychiatric Association (APA) nous permettent non seulement de définir les épisodes caractérisant le trouble bipolaire mais également de distinguer les différents types de troubles bipolaires. Quatre formes d’épisodes pathologiques sont ainsi déterminés : l’épisode maniaque caractérisé par une humeur euphorique ; l’épisode hypomaniaque caractérisé par une humeur expansive ; l’épisode dépressif caractérisé par une humeur triste et l’épisode mixte caractérisé par une humeur à la fois euphorique et triste. De plus, il existe trois types de trouble bipolaire :

Le trouble bipolaire de type I est défini par l’alternance d’accès maniaques à part entière et d’importants épisodes dépressifs dits épisodes dépressifs majeurs. C’est la survenue d’un ou plusieurs épisodes maniaques qui le caractérise.

Le trouble bipolaire de type II est défini par un antécédent d’au moins un épisode dépressif majeur et d’au moins un épisode hypomaniaque. Les épisodes de dépression alternent avec l’hypomanie.

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La cyclothymie est caractérisée par l’existence pendant au moins deux ans de nombreuses périodes d’hypomanie et de « mini dépression » où l’on retrouve des symptômes dépressifs sans que soient réunis les critères d’un épisode dépressif majeur.

Longtemps nommé « psychose maniaco-dépressive », le trouble bipolaire se révèle le plus souvent au début de l’âge adulte, en moyenne entre 18 et 24 ans. Les comorbidités, anxieuses ou addictives, et les taux importants de suicide associés à la maladie en font un problème majeur de santé publique. Son évolution et la fréquence des symptômes en font une maladie chronique.

Bien qu’il touche environ entre 1 et 6 % de la population, le grand public reste peu informé sur cette pathologie. Il en résulte souvent une stigmatisation voire une discrimination envers les malades. Conséquence de cet état de fait, le taux de chômage varie de 63 à 70 % chez les personnes atteintes de trouble bipolaire. Par suite, les malades perdent alors souvent l’estime de soi et doivent faire face à des difficultés relationnelles : rupture familiale, divorce, conduite à risque. La maladie bipolaire expose le patient outre son trouble psychique et affectif à des pathologies somatiques graves cardiaques ou hépatiques entre autres. Il est donc important de privilégier la prise en charge très précoce du patient par un traitement médicamenteux qui doit nécessairement être complété d’une psychothérapie.

Au travers de mon travail de thèse, j’ai voulu montrer que cette pathologie peu connue du grand public touche pourtant des personnes que nous connaissons tous et dont, pour certains, nous admirons le talent. En effet, les biographies de nombreuses célébrités font état de leurs variations de l’humeur impliquant périodes de mélancolie et périodes d’activité hors du commun. Le trouble bipolaire a perturbé leur quotidien dans tous les domaines où les portaient leurs dons, leur énergie et leur génie : la littérature, la musique, la peinture ou la politique. « Oh, que le génie et la folie se touchent de bien près » remarqua Diderot.

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De tout temps, des auteurs souffrant de trouble bipolaire ont exprimé leurs tourments par l’écriture qui leur offrait un exutoire tout désigné. Aujourd’hui, en relisant les textes et en analysant la personnalité de quelques auteurs, des scientifiques ont émis l’hypothèse que certains d’entre eux pouvaient être atteints par un trouble bipolaire. Ainsi, il semblerait que Charles Baudelaire, Emily Dickinson, Honoré de Balzac, Virginia Woolf ou encore Ernest Hemingway aient du faire face à ce trouble durant leur vie

Les musiciens aussi comptent dans leurs rangs des personnes touchées par cette maladie comme les compositeurs Haendel, Schumann, Mozart, Beethoven et Berlioz. Plusieurs artistes peintres et sculpteurs remarquables ont également très probablement été atteints par cette pathologie : Paul Gauguin, Edvard Munch, Georgia O’Keeffe, Vincent Van Gogh ou encore Jackson Pollock. Le trouble bipolaire a eu une influence à la fois sur leurs périodes de production artistique et dans l’expression même de leur art.

Mais les artistes ne sont pas les seuls concernés. En effet, il semblerait qu’au cours de l’Histoire, des empereurs, des Présidents ou encore des Premiers ministres célèbres aient vécu et exercé leur pouvoir tout en souffrant de cette pathologie. Parmi eux, on peut citer Napoléon Bonaparte, Saddam Hussein, Winston Churchill ou Boris Eltsine.

Pour conclure, si le trouble bipolaire a parfois influencé les œuvres ou les prises de décisions de ces personnalités hors du commun, il ne les a pas empêchés de réaliser d’étonnants parcours. Néanmoins, n’oublions pas que tous les malades bipolaires ne sont pas des artistes ou des génies et qu’il n’est pas non plus nécessaire de souffrir de trouble bipolaire pour être créatif. Si le trouble bipolaire favorise l’expression d’un don, il faut souligner que la personne le possédait déjà.

Directeur de thèse : Dr. Marie-Christine BRET

Président de thèse : Dr. Martine LEMBÈGE

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• Olivia LE FLOCH BOSSI — Évaluation de la trousse Hémosil HIT PF4/heparin Ab dans la stratégie de la prise en charge d’une suspicion de TIH : étude prospective sur 51 patients au CHU de Bordeaux

La thrombopénie induite par l’héparine (TIH) est un effet indésirable

médicamenteux fréquent et potentiellement grave. Sa fréquence varie en fonction de nombreux paramètres comme le contexte clinique, le type d’héparine utilisé, la durée du traitement et probablement selon de certains facteurs génétiques. La physiopathologie de la TIH n’est pas entièrement comprise et fait intervenir de nombreux acteurs. Parmi eux se trouve bien évidemment l’héparine. Elle peut se lier à une protéine tétramérique présente au niveau de l’endothélium et sécrétée par les plaquettes activées : le facteur 4 plaquettaire ou PF4. Si les conditions sont favorables, avec un rapport équimolaire entre le PF4 et l’héparine et en présence de chaines longues d’héparine, des complexes de grande taille peuvent se former. Au sein de ces complexes les chaines d’héparine subissent des contraintes physiques et se replient. Ces tensions entrainent le rapprochement non physiologique de tétramères de PF4 qui entrainerait l’apparition d’un néo épitope. Ce dernier formerait une séquence répétitive et immunogène à l’origine des anticorps (Ac) anti PF4/héparine. Ces Ac sont détectables entre 5 et 14 jours après l’introduction de l’héparine, les isotypes G, A et M pouvant être retrouvés simultanément ou de façon isolée. Les immunoglobulines G (IgG) liées aux complexes PF4/héparine présents en surface des plaquettes peuvent activer ces dernières en se fixant aux récepteurs de leur fragment constant (FcɣIIa) présents dans leur membrane. Cette activation provoque l’agrégation et la consommation des plaquettes à l’origine de la thrombopénie. Si l’activation des plaquettes est suffisante, un caillot se forme provoquant une thrombose. Les monocytes et les polynucléaires neutrophiles pourraient aussi être activés par les complexes PF4/héparine/Ac et ainsi participer à la formation du caillot par synthèse de thrombine. Du fait des risques de complications thrombotiques artérielles ou veineuses, le diagnostic de TIH est une urgence.

Le diagnostic de la TIH est clinico-biologique. Les arguments cliniques en faveur de la TIH sont évalués à l’aide d’un score de probabilité clinique dit des 4T qui prend en compte l’intensité de la thrombopénie, le délai de survenu de la thrombopénie, la présence ou l'aggravation d’une thrombose et l’existence d’un diagnostic différentiel pour l’origine de la thrombopénie. Si le score est compris entre 0 et 3 le risque de TIH est faible,

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s’il est de 4 ou 5 il est modéré, s’il est supérieur ou égal à 6 le risque est élevé. Le versant biologique consiste à mettre en évidence les Ac anti PF4/héparine. Ces anticorps peuvent être des Ig G, A ou M, mais le rôle pathogène de ces deux dernières classes est fortement remis en question. Il existe sur le marché de nombreuses trousses diagnostiques permettant de rechercher ces anticorps, détectant soit les trois isotypes soit les IgG seules. Au CHU de Bordeaux, la stratégie diagnostique consiste à utiliser dans un premier temps un test de dépistage, le test ID PaGIA Biorad®, réalisé 24 heures/24 et 7 jours/7 associé au score de probabilité clinique des 4T afin de donner un premier résultat très rapide et de gérer le mieux possible la décision de substituer ou non l’héparine par un autre anticoagulant. Ce test utilise le principe d’immuno-diffusion en gel et détecte les trois isotypes d’Ac. Les résultats préliminaires du score et du test de dépistage sont intégrés à un arbre décisionnel permettant soit d’exclure le diagnostic soit d’effectuer un diagnostic de confirmation par des tests complémentaires. Ceux que nous utilisons sont le test ELISA PF4 enhanced de GTI® et le test fonctionnel d’agrégation plaquettaire induite par l’héparine.

Notre travail a consisté à évaluer comparativement à notre test actuel et à notre stratégie diagnostique, un nouveau test de dépistage : le test HemosIL® HIT PF4/heparin Ab, au travers une étude prospective sur 51 patients suspects de TIH. Pour cette étude, les deux tests de dépistage ont été réalisés en parallèles sur plasma (HemosIL® HIT) ou sérum (ID PaGIA Biorad®) frais. Pour l’étude, le test ELISA a été effectué pour tous les patients, quelque soit le résultat des tests de dépistage. Le test d’agrégation plaquettaire a été réalisé si l’un de ces test était positif ou si le score était supérieur ou égal à 6. Les échantillons nécessaires à la réalisation de ces analyses sont deux tubes citratés (tube BD Vacutainer® de 5 ml à 0,105 M de citrate de sodium) et un tube sec (tube BD Vacutainer® sec avec microparticules de silice de 7 ml), à prélever simultanément. La réalisation de l’étude ne nécessitait pas de prélèvement supplémentaire.

Le réactif HemosIL® HIT PF4/heparin Ab est automatisable, rapide (résultats en 30 minutes) et réalisable 24 heures/24 et 7jours/7. Il utilise le principe d’immuno-turbidimétrie. Il est composé d’un réactif contenant des billes de polystyrène recouvertes d’anticorps murins anti PF4/héparine, d’un «stabilizer», et d’un réactif composé de complexes PF4/polyvinyle sulfonate (qui mime l’héparine). Le plasma du patient est mis en présence du premier réactif et du «stabilizer», puis le second réactif est rajouté. Si le plasma du patient ne contient pas d’anticorps anti PF4/héparine, les anticorps présents

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à la surface des billes se lient aux complexes et les agglutinats ainsi formés troublent le milieu dont l’absorbance augmente. À l’inverse, si le plasma du patient contient des anticorps, ceux ci entrent en compétition avec les anticorps du réactif et l’agglutination sera moins importante. L’absorbance du milieu est donc inversement proportionnelle à la quantité d’anticorps présente dans le plasma du patient. L’automate rend directement le résultat calculé (inversement proportionnel) en U/ml (unité arbitraires). Des contrôles, un normal et un pathologique, sont effectués chaque jour. Le résultat ne nécessite pas de lecture et d’interprétation visuelle, contrairement au test ID PaGIA).

Les dossiers des 51 patients ont été étudiés par les biologistes en charge des suspicions de TIH afin d’établir les diagnostics, en fonction des résultats des tests biologiques et du contexte clinique. Quatre catégories de patients ont été distinguées : ceux pour qui la TIH est certaine, au nombre de 2, ceux pour qui la TIH est possible, au nombre de 5, ceux pour qui la TIH est peu probable, au nombre de 2 et enfin ceux pour qui le TIH est exclue, au nombre de 42. Les patients pour qui la TIH n’a pas pu être exclue ont été considéré comme ayant une TIH pour le calcul des valeurs diagnostics des deux tests de dépistage.

La sensibilité des deux tests de dépistage est identique, à 88,9 %. La spécificité du test HemosIL® HIT PF4/heparin Ab est supérieure à celle du test ID PaGIA Biorad® : 90,5 versus 80,9 %. De plus, le test HemosIL® a une meilleure valeur prédictive positive, à 66,7 contre 50 % pour le test Biorad, et une meilleure valeur prédictive négative, à 97,4 contre 97,1 % pour le test Biorad®. Le test HemosIL® est donc plus performant que le test Biorad® tout en étant adapté à l’urgence. Enfin, nous avons pu confirmé grâce à cette étude que nous avons plus de faux positifs avec la nouvelle version du test ID PaGIA (disponible depuis le milieu de l’année 2011) qu’avec l’ancienne : 43,7 contre 22,4 % lors d’une étude de 2007.

Nous avons aussi comparé le test HemosIL® au test ELISA. La co-positivité et la co-négativité avec l’ELISA GTI® PF4 enhanced sont élevées : respectivement 81,8 et 92,5 %. Ce test a donc une excellente sensibilité et apporte une amélioration en termes de spécificité et d’utilisation du fait de son automatisation.

Directeur de thèse : Dr. Christine MOUTON Président de thèse : Pr. Philippe DERACHE

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• Antoine LE GARREC — La thymuline : de la découverte d’un peptide à son utilisation en thérapeutique homéopathique et à son contrôle analytique

Cette thèse présente les travaux allant de la découverte de la

thymuline à son utilisation en thérapeutique homéopathique. Cette hormone, également dénommée facteur thymique sérique (FTS), est impliquée dans la maturation et l’activité des lymphocytes T. Ces propriétés immunologiques sont mises à profit en thérapeutique.

Alors que l’homéopathie, fondée par Samuel Hahnemann, a connu un développement relativement important ces dernières années, cette discipline reste encore souvent critiquée par de nombreux professionnels de santé. Il a donc paru intéressant dans ce contexte, de rappeler les principes fondateurs de l’homéopathie, et de mettre en lumière les différents travaux menés sur l’homéopathie et les hautes dilutions en règle générale.

Les trois principes fondateurs de l’homéopathie sont les principes de similitude, d’individualisation et d’infinitésimalité. Cependant, c’est le paradigme des signifiants qui permet d’expliquer l’action des hautes dilutions en immunologie.

On estime aujourd’hui que 36 % de la population française a régulièrement recours à l’homéopathie. Cet engouement peut s’expliquer par la reconnaissance de l’homéopathie en tant que discipline médicale et par le remboursement des actes médicaux et des traitements homéopathiques.

Les préparations homéopathiques sont des médicaments au sens de l’article L5111-1 du Code de la santé publique (CSP) et doivent par conséquent obéir à de nombreuses règles, assurant aux patients une sécurité d’emploi. Elles entrent également dans le champ d’application de la Pharmacovigilance.

Les différentes étapes de la fabrication d’un médicament homéopathique sont : le contrôle des matières premières, les dilutions hahnemanniennes ou korsakoviennes, et l’imprégnation de la forme galénique souhaitée. Le contrôle de l’imprégnation des granules peut se faire en chromatographie liquide haute performance, après imprégnation par un traceur tel que la caféine.

La thymuline a été caractérisée en 1970, par Jean François Bach, une dizaine d’années après avoir découvert le rôle primordial du thymus dans la maturation et l’activité des lymphocytes T. Cette caractérisation a été

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permise par le test des rosettes, réalisé à partir de sang de porc défibriné. Par la suite, des inhibiteurs et transporteurs de cette hormone ont été mis en évidence.

Le séquençage de ce nonapeptide a eu lieu en 1977 par l’équipe de J-F Bach qui a utilisé la méthode d’Edman. Cette équipe a par ailleurs mis en lumière le rôle de l’atome de zinc dans sa conformation spatiale et son activité biologique.

La thymuline est une hormone du thymus impliquée dans la différenciation intra- et extrathymique des cellules T chez l’homme, et chez les mammifères en règle générale. Elle augmente la cytotoxicité médiée par les cellules T chez les animaux thymectomisés, agit sur les cellules impliquées dans l’hypersensibilité retardée, et a une activité importante sur les cellules T suppressives (Treg). Cette dernière activité explique son intérêt dans le cas des pathologies auto-immunes.

La thymuline pourrait être utilisée chez l’homme dans un large éventail de pathologies dépassant le cadre de l’immunologie et de l’infectiologie. Cependant, les principales preuves de son efficacité clinique reposent sur le traitement prophylactique de patients atteints d’infections chroniques de la sphère ORL et sur le traitement curatif de la grippe prise en charge dès les premiers symptômes.

Il est à noter que la thymuline n’ayant pas été expérimentée chez l’homme sain, elle ne possède pas de pathogénésie connue.

Ces troubles s’expliqueraient par une interaction des médicaments dopaminergiques avec le circuit de récompense. En effet, une étude a montré une suractivité au niveau du système méso-cortico-limbique chez des patients parkinsoniens traités et présentant un comportement de jeu pathologique. Ces médicaments agiraient donc conjointement sur la voie dopaminergique nigro-striée (dans le cas d’un traitement de la maladie de Parkinson) et sur les récepteurs dopaminergiques au niveau du circuit de récompense.

Bon nombre de données sur l’obtention et le contrôle du médicament Thymuline devant encore demeurer confidentielles, cette partie présente l’une des techniques possibles pour l’obtention d’un peptide : la technique de Merrifield, ainsi que le contrôle des peptides tel qu’il est préconisé dans la Pharmacopée Européenne.

La méthode de Merrifield, développée par le Prix Nobel de chimie Robert Bruce Merrifield, est une technique de synthèse peptidique réalisée sur un support solide, constitué d’une multitude de petites billes de polystyrène.

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La thymuline synthétique est identique à la thymuline naturelle, tant au niveau biochimique que biologique et radioimmunologique. Elles agissent notamment à la même concentration dans le test des rosettes.

Le contrôle analytique du peptide synthétisé est effectué via une chaîne de chromatographie liquide haute performance couplée à un détecteur. Cette analyse nécessite l’hydrolyse du peptide en acides aminés et la dérivatisation des acides aminés pré- ou post-colonne.

Enfin, la monographie de la thymuline, nécessaire à l’obtention de l’AMM, rassemble ses caractéristiques et les modalités de son identification et de son contrôle. Certaines de ces données sont encore confidentielles.

Directeur et Président de thèse : Pr. Jean-Pierre DUBOST

• Malika LÉZOT — Évolution du facteur XI au cours de la grossesse

Diminué, stable ou encore augmenté selon les auteurs, le facteur XI (facteur Rosenthal) et son évolution au cours de la grossesse demeurent aujourd’hui encore peu connus. La découverte d‘un déficit en fin de grossesse suscite des interrogations quant aux risques d'hémorragie du post-partum (HPP) et à ceux encourus par l’analgésie péridurale.

Ce travail est composé d’une première partie bibliographique et d’une seconde regroupant deux études menées en collaboration avec la maternité du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Bordeaux. Les objectifs étaient d’estimer la fréquence des déficits en facteur XI durant cette période et d’évaluer les risques vis-à-vis des HPP et de la péridurale.

La première étude, rétrospective, a été réalisée chez 50 femmes ayant accouché entre juillet 2011 et janvier 20l2 à la suite d'une grossesse normale. Seul un déficit constitutionnel en facteur XI a été retrouvé et le taux moyen à l’accouchement était de 85 % (écart-type 14 %) chez les 49 autres femmes. Le facteur XI est ainsi le facteur de la coagulation ayant la concentration la plus faible au moment de l’accouchement.

La seconde étude, rétrospective, a permis de recenser les cas de déficits en facteur XI objectivés en fin de grossesse par le laboratoire d’hémostase du CHU entre mai 2009 et mai 2011. Au total, 17 cas de déficits ont été mis en évidence sur cette période : quatre constitutionnels, huit acquis (majoritairement associés à des pathologies gravidiques) et cinq non caractérisés (dont trois grossesses pathologiques). En comparant ces deux études, on observe que les patientes déficitaires étaient deux fois plus

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concernées par les HPP, par ailleurs plus sévères, que les femmes non déficitaires (24 contre 12 %) mais aucune différence statistiquement significative n’a pu être mise en évidence (p > 0,2). L’existence d’autres facteurs de risque obstétricaux ou biologiques doivent néanmoins être pris en compte. Des péridurales ont été réalisées sans complications chez sept patientes ayant des taux de facteur XI compris entre 31 et 46 %.

Par ailleurs, l'évolution du taux de facteur XI a été variable chez des patientes présentant un déficit constitutionnel, pouvant aussi bien augmenter de plus de 50 % ou diminuer de plus de 20 %.

Enfin, ces études ont vérifié les sensibilités des TCA et TCK aux déficits modérés en facteur XI dans ce contexte d’hypercoagulabilité de fin de grossesse. Ces tests, prescrits lors des bilans préopératoires, paraissent donc bien adaptés au dépistage des déficits en facteur XI.

Directeur de thèse : Dr. Viviane GUÉRIN

Président de thèse : Pr. Christian DOUTREMEPUICH

• Amandine WOILLEZ — Anémies par carence martiale au cours de la grossesse et du post-partum

Le fer est un élément extrêmement précieux, bien plus qu’un simple

complément alimentaire il est indispensable à la vie. Dans un premier chapitre, nous reviendrons sur le rôle primordial de

celui-ci dans l’organisme, sur l’homéostasie du fer et sur sa régulation complexe par l’hepcidine. La découverte récente de ce peptide, régulateur majeur de l’homéostasie du fer a permis des avancées considérables dans la compréhension du cycle complexe du fer.

La carence en fer représente la cause la plus fréquente d’anémie. Ainsi, dans un deuxième chapitre, nous étudierons la physiopathologie d’une carence en fer et l’installation progressive de l’anémie ferriprive avec ses conséquences cliniques

L’objectif de notre travail est d’étudier plus particulièrement le cas de l’anémie ferriprive dans deux contextes particuliers de la vie d’une femme : lors de la grossesse et lors du post-partum. En effet, la femme, tout au long de sa vie est plus sujette à la carence martiale que l’homme du fait des

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pertes menstruelles. Les femmes ont souvent un régime alimentaire inadapté qui fait d’elles des patientes à risque carentiel marqué notamment dans un cadre où les événements hémorragiques physiologiques ou pathologiques, comme les ménorragies, les métrorragies, la grossesse, l’accouchement, peuvent aggraver ou révéler cette carence.

Bien souvent, la carence martiale chez la femme en âge de procréer est très rarement diagnostiquée, nous reviendrons sur les bons marqueurs de diagnostic de l’anémie ferriprive. Dans le contexte de la grossesse, les besoins en fer sont considérablement augmentés et les réserves doivent être importantes, surtout pour assurer les besoins du deuxième et du troisième trimestres. Une carence martiale préexistante entraine chez une femme enceinte le risque de l’installation d’une anémie ferriprive avec des complications délétères pour la femme et l’enfant durant la grossesse et le post-partum. Il est essentiel que ces réserves en fer soient reconstituées pour prévenir la morbidité et la mortalité.

Cependant, à l’heure actuelle les symptômes d’asthénie qui accompagnent cette carence lors de la grossesse sont largement acceptés, cet état de fatigue est rarement reconnu comme un symptôme de carence martiale et de ce fait, rarement traité.

Nous allons voir qu’un bon diagnostic et qu’une prise en charge précoce par un traitement adapté de l’anémie ferriprive dès le stade de la carence martiale en pré-partum peuvent réduire les facteurs de risque durant la grossesse et le post-partum.

L’objectif du traitement de la carence en fer latente en début de grossesse est de prévenir l’anémie ainsi que ses répercussions graves sur la santé de la mère et de l’enfant à naître. Plus l’anémie est sévère et plus les risques sont importants.

Une meilleure prise en charge va permettre d’éviter le recours à la transfusion et améliorer la qualité de vie des jeunes mères et ainsi permettre l’arrivée d’un enfant dans des conditions optimales.

L’anémie ferriprive est un réel problème de santé publique ; il est intéressant de se poser la question : est-il assez pris en compte par le milieu médical ? Sensibiliser les équipes soignantes à l’interprétation des bons marqueurs de diagnostic et insister sur les conséquences cliniques de l’anémie ferriprive me semblent être un travail essentiel, ainsi la qualité de vie sera améliorée et ce dès le stade carence martiale.

Directeur de thèse : Dr. Vanessa DESPLAT Président de thèse : Pr. Christian DOUTREMEPUICH