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Inspection générale des affaires sociales RM2011-063P - Mai 2011 - RAPPORT : TOME I Établi par Marie-Hélène CUBAYNES et Didier NOURY Membres de l’Inspection générale des affaires sociales Muriel DAHAN et Evelyne FALIP Conseillères générales des établissements de santé Le circuit du médicament à l'hôpital

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Inspection générale des affaires sociales

RM2011-063P

- Mai 2011 -

RAPPORT : TOME I

Établi par

Marie-Hélène CUBAYNES et Didier NOURY

Membres de l’Inspection générale des affaires sociales

Muriel DAHAN et Evelyne FALIP

Conseillères générales des établissements de santé

Le circuit du médicament à l'hôpital

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IGAS, RAPPORT N°RM2011-063P I

Synthèse

Le circuit du médicament en établissement de santé recouvre deux circuits, distincts et interconnectés.

Le premier circuit, clinique, est celui de la prise en charge médicamenteuse du patient hospitalisé, depuis son entrée, au moment où son traitement personnel est pris en compte, jusqu’à sa sortie au moment où une prescription, qui sera dispensée en ville, est effectuée. Au sein de l’hôpital, ce circuit clinique inclut les phases de prescription, dispensation et administration.

Le second circuit, logistique, concerne le médicament en tant que produit, de l’achat jusqu’à la délivrance dans l’unité de soins, rejoignant le circuit clinique au stade ultime, celui de l’administration du médicament au patient.

Chacune des phases de ces deux circuits fait intervenir des acteurs différents. Leur formation initiale et continue, leur positionnement sur les tâches où leur plus value est maximale ainsi que leur coordination et collaboration, conditionnent la qualité, la sécurité et l’efficience de la prise en charge thérapeutique du patient.

La mission de l’Inspection générale des affaires sociales devait capitaliser les précédents rapports établis sur le thème du circuit du médicament à l’hôpital, en complétant l’expertise sur des établissements non universitaires ayant mis en œuvre des initiatives intéressantes sur ce champ et en explorant l’ensemble de la problématique dans ses dimensions sécurité, qualité, efficience et pilotage. Elle a inscrit ses travaux et réflexions dans le cadre des évolutions impulsées ces dernières années par les pouvoirs publics pour améliorer la prise en charge des patients à l’hôpital. Ses recommandations s’appuient sur les exigences et les possibilités ouvertes par la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), en particulier son volet de modernisation des établissements de santé, ainsi que celles de ses dispositions qui organisent les collaborations entre professionnels de santé et ont pour objectif de garantir la continuité du parcours de soins. Ces recommandations convergent vers un objectif commun, qui a constitué le fil directeur des travaux de la mission : l’intérêt des patients.

La prise en charge médicamenteuse du patient hospitalisé, un enjeu de qualité.

Avec l’instauration des démarches d’accréditation puis de certification, la démarche qualité a connu une nette accélération. Les progrès accomplis dans le domaine du médicament sont cependant inégaux et imparfaits. Les visites de certification effectuées par la Haute autorité de santé (HAS) en 2008, 2009 et 2010 montrent que le médicament est le domaine où le plus grand nombre de recommandations et de réserves sont émises. Le médicament fait désormais partie des domaines où la HAS impose des exigences renforcées et fait l’objet d’une attention particulière de la part des experts visiteurs.

Le circuit du médicament est un processus complexe, hétérogène qui implique de nombreux professionnels de santé. Il repose sur une chaîne de savoir-faire dans laquelle la transmission de l’information et la coordination des interventions sont des facteurs essentiels.

Parce qu’il repose sur des facteurs humains, le circuit du médicament comporte des risques importants d’erreurs. Ces risques sont accrus dans un environnement hospitalier soumis à une obligation de performance, une accélération de la mobilité professionnelle des personnels, une réduction de la durée moyenne de séjour des patients et une augmentation constante du nombre de molécules référencées, avec une part importante de molécules innovantes encore mal maîtrisées et souvent très onéreuses. Mais le facteur humain, source d’insécurité, est également une source de richesse, puisqu’il permet la prise en charge thérapeutique sur-mesure et son adaptation constante, parfois en urgence absolue.

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Dans la recherche de la qualité, il est donc important de trouver un juste équilibre pour tenir compte de la spécificité du processus de soin et de la nécessité de l’individualiser pour l’adapter au plus près des besoins de chaque patient. Il reste encore une marge de progression dans la mise en place de procédures qualité. Un nouveau champ est à investir, celui des solutions technologiques (informatisation et automatisation), encore peu implantées dans les hôpitaux. Toutefois, ces solutions technologiques ou procédurales, avec la standardisation qu’elles introduisent, ne peuvent garantir une sécurisation absolue qui repose d’abord sur l’utilisation optimale des compétences et du temps des professionnels.

La continuité du parcours de soins du patient est fragilisée en deux points de « transition thérapeutique » : à l’entrée à l’hôpital, l’histoire thérapeutique et le traitement personnel doivent être pris en compte ; à la sortie de l’hôpital, le patient va devoir se reprendre en charge. La rupture de la chaîne de soins entre secteurs ambulatoire et hospitalier est encore aujourd’hui une réalité prégnante, qui affecte la qualité et la sécurité du parcours de soins. Elle représente également un enjeu économique par le poids financier des prescriptions hospitalières exécutées en ville, principal facteur de progression des dépenses de médicament en ville (200 M€ en 2009).

Les recommandations de la mission sur le thème de la qualité sont de :

Positionner chaque acteur sur les secteurs où sa plus value est la plus importante pour le patient. L’infirmier doit pouvoir se consacrer à l’administration des médicaments, en particulier les plus à risque tels que les injectables, en s’appuyant sur le préparateur pour la préparation des doses à administrer et la gestion des médicaments. Le pharmacien doit se rapprocher du soin par l’analyse des ordonnances et plus largement apporter son expertise clinique au médecin. Ce dernier doit pouvoir se consacrer à une prescription de qualité, il doit en avoir les moyens (informatisation ergonomique) et le temps (simplification des tâches administratives).

Développer et accompagner les solutions technologiques, telles que l’informatisation et l’automatisation, et leur intégration dans le circuit du médicament pour fluidifier et sécuriser les processus. Il faut en évaluer l’efficacité et l’efficience et anticiper les risques futurs que tout nouveau système fait émerger.

Donner la priorité au développement le plus exhaustif possible de l’analyse pharmaceutique, verrou indispensable du processus clinique, mais également vecteur d’amélioration continue de la qualité de la prise en charge thérapeutique. Le déploiement de la délivrance nominative apparaît moins prioritaire et devrait être ciblé sur les services dont les patients ont des traitements relativement stables et sur les médicaments les plus à risque tels que les injectables.

Renforcer la continuité du parcours de soins du patient en créant du lien entre professionnels de ville et hospitaliers.

Les erreurs médicamenteuses, un enjeu de sécurité.

La perception du risque est souvent liée à la survenue d’événements graves et médiatisés.

Au-delà de ces erreurs, l’ampleur du risque médicamenteux, reste mal appréhendée. L’Enquête nationale sur les évènements indésirables liés aux soins (ENEIS), réalisée pour la deuxième fois en 2009 a confirmé l’enjeu que constituait le médicament dans le domaine de la sécurité des soins. Après les actes invasifs et les infections liées aux soins, les médicaments sont la troisième cause d’événements indésirables graves (EIG) : 60 000 à 130 000 EIG par an en lien avec le médicament, dont 15 à 60 000 sont évitables. Parmi ces EIG, certains sont liés au produit (problèmes d’étiquetage ou de conditionnement notamment) et d’autres aux pratiques (erreurs de prescription ou d’administration par exemple). Le plus souvent, différents facteurs s’intriquent pour conduire à l’accident final.

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Cependant la France ne dispose pas d’un système pérenne de recueil des signalements liés aux EIG médicamenteux, permettant des analyses approfondies et fondant des actions correctrices. De la même façon, peu de données permettent de cerner le coût important de ces erreurs pour l’hôpital et la collectivité, estimé il y a dix ans à 5 305 € par EIG et en seul coût direct (hors perte de productivité des actifs).

Fréquents et graves, les accidents sont intolérables quand ils sont évitables, ce qui est le cas dans près de la moitié des EIG médicamenteux. Depuis la loi HPST, une politique formalisée de gestion des risques a vocation à se mettre en place dans chaque établissement de santé. Le parcours sera toutefois long car le passage d’une politique de qualité à une politique de sécurité, même si la seconde s’inscrit dans la continuité de la première, représente pour les professionnels un véritable changement de culture. Il ne s’agit plus de respecter des normes, des procédures ou des référentiels de bonnes pratiques. Il s’agit de s’interroger sur ses risques et ses erreurs et de mettre en place des actions correctrices adaptées aux spécificités de l’organisation de chaque établissement.

Cette évolution devra être nécessairement accompagnée pour permettre au sein des établissements de santé à chaque professionnel intervenant dans le circuit de s’approprier une culture de gestion des risques, qui nécessite de passer d’une pratique punitive (« j’ai fait une erreur, je suis sanctionné ») à une pratique de déclaration (« j’ai fait une erreur, je la déclare pour qu’elle ne se reproduise plus »).

Les recommandations sur la sécurisation du circuit sont de :

Améliorer les connaissances. Dans un premier temps, la mise en œuvre d’un circuit de remontée des erreurs médicamenteuses au sein des établissements de santé est à privilégier. Ce circuit doit contribuer à l’analyse des risques en interne, à la mise en place d’actions correctrices et donc à l’amélioration des pratiques en prenant en compte les spécificités d’organisation de chaque établissement. Ce temps d’appropriation est important pour permettre de sensibiliser les professionnels à la gestion des risques. Dans un deuxième temps, l’amélioration des connaissances au niveau régional et national avec la mise en place d’indicateurs est envisageable. Pour dépasser l’impasse de la mise en œuvre d’un dispositif de déclaration de l’ensemble des EIG, il est proposé d’organiser un système spécifique aux seuls EIG médicamenteux. Ce dispositif de surveillance pourrait être complété par des enquêtes de prévalence sur des sujets ciblés qui apparaissent particulièrement à risque « à dire d’experts ».

Développer la culture de la gestion des risques dans les établissements de santé en privilégiant les actions de terrain, au sein des unités de soins, à vocation pluridisciplinaire et en développant une culture de la déclaration des erreurs et non pas de la faute. La non-déclaration est un frein important à l’analyse des risques. Pour lever ce frein, il importe que les acteurs soient déculpabilisés et qu’ils puissent rapidement percevoir les bénéfices de leur déclaration. C’est pour ces deux raisons que la mission recommande la mise en place, dans un premier temps, d’une « boucle courte » de signalement des erreurs avant la mise en place d’une « boucle longue » de déclaration des EIG dont l’effet palmarès peut être rédhibitoire.

Poursuivre les actions entreprises en matière d’étiquetage (en particulier pour les médicaments injectables et les solutés massifs) et de conditionnement unitaire des médicaments (pour les formes sèches) pour identifier parfaitement le produit jusqu’au lit du patient et sécuriser son administration.

Le médicament, second poste de dépenses à l’hôpital, un enjeu d’efficience.

Les dépenses de médicaments sont en constante croissance dans un contexte où des efforts budgétaires importants sont demandés aux établissements de santé. La part de marché du médicament hospitalier a doublé en 20 ans pour atteindre 5,5 Mds€ en 2009.

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Le statut particulier du médicament à l’hôpital, dont le prix est en partie négocié et non administré comme en ville, amène les établissements de santé, et en particulier les pharmaciens, à investir un temps important dans les procédures d’achats. La massification des achats, au moyen du regroupement des commandes d’établissements, ainsi que la massification des procédures, au travers de quelques très grands appels d’offres, a permis de peser sur les prix et de limiter les charges de gestion. Cette approche doit être à la fois poursuivie mais aussi affinée pour qu’elle soit pleinement compatible avec les objectifs suivants : renforcement de la négociation, notamment tarifaire, et de la réactivité contractuelle face aux baisses de prix ; amélioration de la sécurité juridique des marchés par l’utilisation des opportunités et souplesses de la réglementation dans le strict respect des règles de la commande publique ; insertion des achats de médicaments au sein d’une fonction unique d’achats hospitaliers avec allègement substantiel des tâches administratives les plus répétitives ; développement de relations de partenariat avec les industriels pour une offre répondant davantage aux besoins de qualité et de sécurité des hôpitaux.

S’agissant des aspects logistiques du médicament, les opérations de commande et facturation, de réception et déballage des livraisons, de manutention et de stockage des colis représentent une charge importante pesant sur les pharmacies hospitalières. Ayant souvent fait l’objet d’investissements insuffisants, cette fonction logistique doit être remise à niveau pour un coût qui doit être mis au regard des économies potentielles en matière de personnel comme de surfaces de locaux.

La mission a donc porté une attention particulière à ces questions de logistique et d’achats avec trois préoccupations principales : optimiser les processus pour dégager des marges budgétaires permettant d’investir dans la politique de qualité et de sécurité, économiser le temps du pharmacien pour le recentrer sur son cœur de compétences, l’expertise clinique et la qualité de la prise en charge thérapeutique, renforcer la contribution de la politique d’achats et de la logistique à la sécurisation du circuit du médicament.

Les recommandations en matière d’efficience sont de :

Décharger le pharmacien de tout ce qui n’est pas du domaine de l’expertise pharmaceutique, renforcer la professionnalisation de la fonction achats pour la sécuriser, identifier et hiérarchiser les enjeux de la politique d’achats pour développer la négociation et la réactivité contractuelle.

Alléger les tâches administratives en poursuivant la dématérialisation des procédures d’achat et en engageant, avec les fournisseurs, celles des commandes et facturations ; développer l’automatisation et la robotisation pour réduire les charges de travail des manutentionnaires, des préparateurs et des infirmiers en distinguant les mesures et équipements de base, peu coûteux et immédiatement rentables (rationalisation des commandes, stockeurs rotatifs, etc.) des projets plus ambitieux dont la rentabilité doit être évaluée au préalable (automates de rangement, armoires automatisées, etc.)

Exploiter au mieux les potentialités offertes par les coopérations hospitalières au-delà de la simple massification des commandes : soutenir les groupements d’achat aux politiques volontaristes de référencement commun dans une optique de gains tarifaires, d’économie de gestion mais aussi de sécurisation du parcours du patient ; développer des plates-formes logistiques et mutualiser certaines missions des PUI, sur la base d’une analyse préalable précise des conditions économiques, techniques et logistiques permettant d’assurer une taille critique suffisante.

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La politique du médicament et la responsabilisation des acteurs de terrain, un enjeu de pilotage.

En raison de ses multiples enjeux, la politique du médicament mobilise de nombreux acteurs nationaux : directions d’administration centrale, organismes d’expertise indépendants, agences de sécurité sanitaire, assurance maladie. Face à ces acteurs nationaux, les agences régionales de santé (ARS) constituent désormais un correspondant unique pour les établissements de santé. Mais leur taille et leur récente mise en place ne permettent pas aux professionnels d’identifier facilement les interlocuteurs en charge du médicament et dilue ce sujet autrefois porté par les inspections régionales de la pharmacie.

Si la multiplicité des acteurs témoigne sans doute de l’importance de la question, la vision des acteurs de terrain n’est pas très claire, ceux-ci se demandant souvent qui est le donneur d’ordre et quels sont les objectifs poursuivis. Le contrat de bon usage, qui pourtant a montré qu’il était un outil précieux d’amélioration de la politique des produits de santé dans les établissements, en est une illustration. Ses objectifs couvrent à la fois l’encadrement de la qualité des prescriptions des produits de la liste en sus et la maîtrise des dépenses afférentes mais également les questions de qualité et de sécurisation du circuit du médicament.

A ce manque de lisibilité du pilotage, s’ajoute une évolution incertaine en matière de réglementation. Alors que l’un des objectifs désormais inscrit dans la loi est de responsabiliser les établissements sur la gestion de leurs risques, la réglementation souvent complexe et contraignante ne prend pas toujours en compte la souplesse nécessaire à la mise en place des coopérations que ce soit entre établissements ou entre professionnels ainsi que la marge de manœuvre qu’il paraît indispensable de laisser aux établissements de santé.

Les recommandations pour optimiser le pilotage du circuit du médicament sont de :

Renforcer la visibilité des acteurs en charge de la politique du médicament au niveau national et au sein des ARS, en particulier la lisibilité du positionnement des missions inspection contrôle et des OMEDIT.

Faire évoluer les contrats de bon usage pour qu’ils permettent à la fois d’avoir une vision nationale grâce à un petit nombre d’indicateurs communs et de personnaliser au mieux les objectifs fixés localement en fonction de l’organisation de chaque établissement.

Assouplir les dispositions du code de la santé publique qui semblent faire obstacle aux coopérations entre établissements de santé (sur les règles d’implantation des pharmacies à usage intérieur et leurs missions) et aux transferts et délégations de tâches entre professionnels.

Favoriser les évolutions de métiers qui vont permettre de mieux sécuriser le circuit du médicament : accroître le temps de présence minimal des pharmaciens au sein des établissements pour arriver progressivement à un équivalent temps plein ; clarifier les dispositions qui sont porteuses d’incertitudes pour les professionnels de santé, en particulier les notions d’analyse pharmaceutique et de contrôle effectif qui engagent la responsabilité des pharmaciens ; définir précisément les personnels habilités à effectuer des préparations au sein des établissements de santé afin de sécuriser les préparateurs et infirmiers dans leur rôle respectif ; poursuivre les réflexions sur le nouveau métier qu’exerce le préparateur hospitalier dans une pharmacie à usage intérieur, son statut et sa formation.

Au terme de son travail, la mission souhaite souligner que l’importance des enjeux de qualité, de sécurité et d’efficience en matière de circuit du médicament justifie la poursuite voire l’accélération des efforts déployés ces dernières années.

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Dans une période où les contraintes budgétaires qui pèsent sur les établissements de santé sont fortes, il est également important de mettre en avant la marge de progression existant à moyens constants. Un investissement ciblé sur un segment peut avoir un effet d’entrainement sur toute la chaîne. A titre d’exemple, l’achat de stockeurs rotatifs peut, pour un coût modique, libérer du temps de préparateur qui par son intervention dans les unités de soins soulagera l’infirmier lui permettant de se consacrer à l’administration des médicaments injectables, les plus à risques. De la même façon, une partie du temps consacré par le pharmacien à des tâches administratives dans le cadre de la fonction achats peut être plus utilement consacrée à effectuer l’analyse pharmaceutique des ordonnances pour sécuriser la prescription.

La mission tient toutefois à souligner que des moyens humains et financiers seront nécessaires pour aller plus loin. C’est le cas pour mettre en place un système de signalement des effets indésirables graves médicamenteux digne de ce nom et pour l’accompagnement de la mise en place des systèmes d’information du circuit du médicament. C’est enfin le cas si les exigences réglementaires ne sont pas assouplies. En l’état actuel, les effectifs de pharmaciens et de préparateurs dans les établissements de santé ne leur permettent pas de réaliser à la fois la délivrance nominative et l’analyse pharmaceutique a priori de toutes les prescriptions. La mission a souligné les bénéfices à attendre du développement de la pharmacie clinique, en particulier de l’analyse pharmaceutique et de la présence de l’équipe pharmaceutique dans les unités de soins. Elle est plus réservée sur la faisabilité et les bénéfices à attendre d’une généralisation de la délivrance nominative dans tous les services au regard des investissements conséquents qu’elle nécessitera et propose de privilégier la traçabilité du produit de santé d’un bout à l’autre de la chaîne par le développement du conditionnement unitaire.

L’amélioration de l’efficience des fonctions achats et logistique devrait permettre aux établissements de dégager des marges de manœuvre pour sécuriser le circuit du médicament. Dans le domaine des achats, elles sont toutefois relativement limitées au regard des stratégies de massification déjà déployées ces dernières années. Dans le domaine logistique, les exemples récents de plates-formes ou de rationalisation des commandes montrent que les marges sont plus importantes. Mais à tous les niveaux, au sein des établissements comme au niveau des décideurs publics, il faut intégrer le retour sur investissement bénéfique que peuvent avoir les efforts déployés pour sécuriser le circuit du médicament, ne serait-ce que parce que les EIG médicamenteux, au-delà de leur caractère intolérable, ont un coût important pour l’hôpital et la collectivité.

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Sommaire

SYNTHESE ...........................................................................................................................................I

SOMMAIRE .........................................................................................................................................7

INTRODUCTION ...................................................................................................................................9

1. LA QUALITE ET LA SECURITE DU CIRCUIT DU MEDICAMENT A L’HOPITAL SONT ENCORE

IMPARFAITEMENT MAITRISEES .........................................................................................................10 1.1. Un processus complexe et hétérogène .................................................................................10

1.1.1. La complexité tient à de multiples facteurs ...............................................................10 1.1.2. Les organisations sont hétérogènes ...........................................................................11 1.1.3. Entre l’hôpital, les soins de ville et le médico-social, le risque de rupture est important..............................................................................................................................11 1.1.4. Les difficultés ont été sous estimées et aggravées par un environnement instable ...14

1.2. Un processus reposant essentiellement sur des facteurs humains.......................................16 1.2.1. Une chaîne de savoir-faire.........................................................................................16 1.2.2. La lente émergence de solutions technologiques.......................................................22

1.3. Un circuit générateur de risques .........................................................................................27 1.3.1. Un risque avéré..........................................................................................................27 1.3.2. Un risque imparfaitement appréhendé.......................................................................28 1.3.3. La nécessité d’aller plus loin dans la connaissance ...................................................29

2. SECOND POSTE DE DEPENSES A L’HOPITAL, LE MEDICAMENT SUIT UN CIRCUIT LOGISTIQUE

INSUFFISAMMENT EFFICIENT ............................................................................................................30 2.1. Les dépenses de médicaments prescrits à l’hôpital continuent de croître...........................30

2.1.1. Les coûts directs liés aux achats de médicaments par l’hôpital.................................30 2.1.2. Le coût des erreurs médicamenteuses .......................................................................31 2.1.3. Le poids des prescriptions de l’hôpital sur la ville et le médico-social .....................32

2.2. Mobilisant à l’excès les pharmacies hospitalières, la gestion des achats de médicaments est perfectible...............................................................................................................................33

2.2.1. Les textes ne prévoient pas que le pharmacien doive être le responsable des achats de médicaments ...................................................................................................................33 2.2.2. La gestion des achats de médicaments peut être optimisée .......................................34 2.2.3. La mutualisation des achats n’est pas toujours la panacée ........................................36

2.3. Les enjeux d’efficience logistique ont été largement négligés.............................................37 2.3.1. Une multiplication coûteuse des commandes et des livraisons .................................37 2.3.2. Des conditions de stockage inégales et pas toujours performantes ...........................38 2.3.3. Un transport dans les unités de soins qui reste perfectible ........................................38

3. LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DU MEDICAMENT A L’HOPITAL N’A PAS ATTEINT SA PLEINE

EFFICACITE........................................................................................................................................39 3.1. Les établissements de santé ne se sont pas encore approprié les possibilités offertes par la loi HPST ..................................................................................................................................39

3.1.1. Le nouveau rôle des instances ...................................................................................39 3.1.2. L’importance des coopérations..................................................................................39 3.1.3. Le renouvellement de l’exigence de qualité ..............................................................40

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3.2. Le pilotage régional est encore immature face à la fragmentation des acteurs nationaux.43 3.2.1. Les ARS, nouvel acteur de la politique du médicament en région............................43 3.2.2. Une multitude d’acteurs nationaux avec des objectifs propres .................................46

3.3. Un cadre juridique complexe source d’interprétations diverses .........................................48 3.3.1. Les autorisations de PUI, confrontées à la réalité des coopérations..........................48 3.3.2. Une réglementation qui donne lieu à des interprétations diverses ............................49

4. LES RECOMMANDATIONS ............................................................................................................55 4.1. Sécuriser le circuit au sein de chaque établissement de santé ............................................55

4.1.1. Assurer la continuité du parcours de soins du patient ...............................................55 4.1.2. Développer les solutions technologiques ..................................................................57 4.1.3. Améliorer l’efficacité des professionnels ..................................................................61 4.1.4. Développer la démarche qualité et la gestion de risque ............................................67

4.2. Optimiser les fonctions achats et logistiques.......................................................................71 4.2.1. Renforcer la professionnalisation de la fonction achat..............................................71 4.2.2. Remettre à niveau et mutualiser les activités logistiques ..........................................77

4.3. Renforcer le pilotage national et régional...........................................................................80 4.3.1. Augmenter les capacités de décision .........................................................................80 4.3.2. Sécuriser le cadre juridique .......................................................................................84 4.3.3. Objectiver les exigences de qualité et de sécurité vis-à-vis des industriels du médicament..........................................................................................................................87

CONCLUSION...................................................................................................................................90

PRINCIPALES RECOMMANDATIONS DE LA MISSION ...........................................................91

LISTE DES PERSONNES RENCONTREES....................................................................................99

LISTE DES SIGLES ET ACRONYMES.........................................................................................109

LISTE DES ANNEXES - TOME 2 DU RAPPORT ........................................................................111

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INTRODUCTION

[1] Par lettre en date du 27 octobre 2010, le chef de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) mandatait une mission chargée de procéder à une évaluation du circuit du médicament à l’hôpital dans le cadre du programme annuel de l’IGAS.

[2] La mission était composée de Mmes Marie-Hélène CUBAYNES, Muriel DAHAN, Evelyne FALIP et de M. Didier NOURY, membres de l’IGAS.

[3] La mission a souhaité circonscrire son propos au médicament en excluant les dispositifs médicaux qui ont fait l’objet d’une autre mission1. Elle n’aborde qu’accessoirement la question des médicaments de la liste en sus2, qui devrait être traitée par une mission spécifique. Elle n’a pas davantage développé de comparaisons internationales faute de temps et de pertinence au vu des différences d’organisations entre les pays. Elle a pris en compte l’ensemble du processus clinique de prise en charge médicamenteuse du patient hospitalisé ainsi que la chaîne logistique « produit », de l’achat du médicament jusqu’à sa délivrance dans l’unité de soins. La notion d’hôpital a été entendue au sens générique du terme, incluant les établissements de santé publics, privés à but lucratif ou d’intérêt collectif.

[4] La mission a capitalisé les travaux menés par l’IGAS antérieurement, missions d’inspection contrôle suite à la survenue d’accidents graves et missions d’évaluation du circuit du médicament dans un établissement donné. Alors que ces travaux avaient permis de dégager un certain nombre de points de faiblesse du circuit du médicament, la mission a souhaité pouvoir disposer d’une vision complémentaire. Elle a réalisé une évaluation sur site auprès d’un nombre limité d’établissements de santé de tout type et de toute taille, reconnus pour leur investissement dans l’amélioration du circuit du médicament. Sept structures, chacune dans une région différente et représentant dix établissements ont ainsi été visitées. Cet échantillonnage n’avait pas vocation à être représentatif mais a permis de repérer certaines bonnes pratiques et solutions innovantes mises en œuvre. Lors de chaque déplacement, les avis des Agences régionales de santé (ARS) et des Observatoires des médicaments, des dispositifs médicaux et des innovations thérapeutiques (OMEDIT) ont été sollicités. La mission a également rencontré les acteurs nationaux impliqués dans l’organisation et le fonctionnement du circuit du médicament.

[5] La mission a inscrit ses travaux et réflexions dans le cadre des préoccupations de qualité, de sécurité et d’efficience portées ces dernières années par les pouvoirs publics.

[6] Depuis 20 ans, le législateur renforce la politique de qualité au sein des établissements de santé. La procédure de certification menée par la Haute autorité de santé (HAS) porte une attention particulière au circuit du médicament. C’est le domaine où le plus grand nombre de réserves et de recommandations sont formulées. La démarche qualité de la prise en charge médicamenteuse du patient est devenue une pratique exigible prioritaire dans le cadre de la troisième version de la procédure de certification dite V2010.

[7] Dans la continuité de cette politique de qualité, le législateur a souhaité pouvoir disposer d’une estimation de la fréquence des effets indésirables liés aux soins. L’Enquête nationale sur les évènements indésirables liés aux soins (ENEIS) réalisée pour la deuxième fois en 2009 a confirmé l’enjeu que constituait le médicament dans le domaine de la sécurité des soins. Après les actes invasifs et les infections liées aux soins, les médicaments sont la troisième cause d’événements indésirables graves (EIG) liés aux soins. L’enquête estime que le médicament est responsable de 60 000 à 130 000 EIG par an et que 15 à 60 000 d’entre eux seraient évitables.

1 IGAS, rapport N°RM2010-154P 2 Médicaments financés, dans le cadre de la tarification à l’activité, en sus des groupes homogènes de séjour.

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[8] Fréquents, graves et évitables, les accidents liés au médicament justifient une mobilisation pour mieux sécuriser chacun des déterminants du circuit du médicament au sein de l’hôpital. Parce que le médicament est également à l’origine d’environ 120 000 séjours hospitaliers, la mission a pris en compte le patient dans la globalité de son parcours de soins, en intégrant en amont la question de son traitement personnel lors de l’admission dans l’établissement et celle en aval, de la prescription de sortie de l’hôpital.

[9] Le médicament est également le second poste de dépense hospitalière, poste en constante croissance dans un contexte où des efforts budgétaires importants sont demandés aux établissements de santé. Le statut particulier du médicament à l’hôpital, dont le prix est en partie négocié et non administré comme en ville, amène les établissements de santé et en particulier les pharmaciens, à investir un temps important dans les procédures d’achats. La mission a donc porté une attention particulière à cette question avec trois préoccupations : optimiser les procédures pour dégager des marges budgétaires permettant d’investir la politique de qualité et de sécurité, économiser le temps pharmaceutique pour le recentrer sur son cœur de compétences, l’expertise clinique et la qualité de la prise en charge thérapeutique, renforcer la contribution de la politique d’achats à la sécurisation du circuit du médicament.

[10] Les recommandations émises en fin de rapport se veulent pragmatiques et tiennent compte des exigences et des possibilités ouvertes par la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (loi n°2009-879 du 21 juillet 2009 dite HPST) dans son volet modernisation des établissements de santé, ainsi que des dispositions visant une plus grande continuité des parcours de soins et les collaborations entre professionnels.

1. LA QUALITE ET LA SECURITE DU CIRCUIT DU MEDICAMENT A L’HOPITAL SONT ENCORE IMPARFAITEMENT MAITRISEES

1.1. Un processus complexe et hétérogène

1.1.1. La complexité tient à de multiples facteurs

[11] L’entrée d’un patient à l’hôpital déclenche un processus de prise en charge thérapeutique dont le médicament est une composante essentielle.

[12] La complexité du circuit clinique du médicament est structurelle. Lors de la rédaction d’une ordonnance, le prescripteur hospitalier initie un circuit clinique dont les principales étapes sont bien identifiées : prescription, dispensation, administration, suivi et réévaluation du traitement. Chacune de ces étapes recouvre en réalité non pas une mais plusieurs actions et fait intervenir de multiples acteurs dont les médecins, pharmaciens, préparateurs et infirmiers. Il s’agit donc d’un ensemble d’opérations successives et interdépendantes, dont l’objectif final, que « le bon patient reçoive le bon médicament au bon moment, à la bonne dose et selon la bonne voie d’administration » mobilise, autour du patient, plusieurs métiers.

[13] Cette complexité interne au circuit clinique est majorée par ses interfaces. Le circuit clinique est dépendant du parcours physique du médicament. Les conditions d’achat, de transport et de stockage, central au sein de la pharmacie à usage intérieur puis intermédiaire dans les armoires des unités de soins3, constituent en elles-mêmes un processus complexe. La prise en charge médicamenteuse du patient à l’hôpital est une étape de son parcours de soins, mais se déroule pour l’essentiel hors de l’hôpital. Entré avec un traitement personnel, le patient va durant son hospitalisation faire l’objet de nouvelles prescriptions et continuera lors de sa sortie son parcours de soins avec un nouveau traitement.

3 L’arrêté du 31 mars 1999 ne prévoit de « stock » de médicaments dans les services que dans le cadre d’une « dotation pour soins urgents ».

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[14] Elle est accrue par la spécialisation mise en place pour de nombreux médicaments dans une logique de sécurisation ou d’efficience. C’est le cas pour les médicaments dérivés du sang ; les médicaments stupéfiants (190 spécialités4) ; les médicaments en essai clinique ; les médicaments bénéficiant d’une autorisation temporaire d’utilisation (287 spécialités) et les médicaments facturés en sus des GHS (331 spécialités) ou d’exception (203 spécialités) et dans une moindre mesure les médicaments à prescription restreinte (3631 spécialités).

[15] La complexité du circuit du médicament est un des facteurs explicatifs de la difficulté à mettre en place une politique de qualité et de sécurité du circuit du médicament. Cette complexité doit être prise en compte, au niveau national, lors de la définition de la stratégie en matière de médicament à l’hôpital et au niveau des établissements de santé dans leur programme d’actions pour améliorer la qualité et la sécurité.

1.1.2. Les organisations sont hétérogènes

[16] L’hétérogénéité du circuit du médicament porte sur les aspects cliniques et physiques du circuit du médicament.

[17] La taille de l’établissement, sa configuration architecturale et son type d’activité sont autant de contraintes externes qui structurent l’organisation du processus. A titre d’exemple, les différences sont évidentes entre le groupement audois de prestations mutualisées qui fonctionne avec une plate-forme logistique qui approvisionne onze établissements différents (dont un hors département) et le centre de lutte contre le cancer d’Angers qui n’a qu’un seul site.

[18] L’importance des ressources humaines consacrées au circuit du médicament, le niveau d’utilisation des solutions technologiques et des systèmes d’information, l’investissement dans la politique de sécurité et de qualité traduisent des niveaux de maturation très divers. On peut difficilement comparer le centre hospitalier de Compiègne qui emploie 5 pharmaciens pour 385 lits de court séjour et l’hôpital privé de Pessac qui a un seul pharmacien temps plein pour 265 lits.

[19] L’étude Sécurimed5 a permis de disposer d’un état des lieux sur l’organisation du circuit du médicament dans les deux tiers des établissements de santé et a mis « en évidence une très grande hétérogénéité des organisations mises en place pour sécuriser le circuit du médicament ».

[20] Il est ainsi illusoire de vouloir aboutir à la standardisation du processus par comparaison à ce qui a été est fait dans l’industrie, dans l’aéronautique par exemple souvent citée en exemple. La prise en compte des spécificités de chaque établissement est un élément incontournable de la mise en place de la politique de qualité et de sécurité.

1.1.3. Entre l’hôpital, les soins de ville et le médico-social, le risque de rupture est important

1.1.3.1. La continuité des parcours de soins

[21] La continuité des parcours de soins, telle que préconisée par la loi HPST, est encore peu développée. Les relations entre professionnels de ville, de l’hôpital et d’établissements médico-sociaux sont généralement non formalisées et très inégales.

4 Données issues de la base Thériaque extraites le 11 mars 2011 5 Sécurimed : étude d’impact organisationnel et économique de la sécurisation du circuit du médicament dans les établissements de santé – octobre 2009 - DHOS

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[22] Si le nom du médecin traitant est bien recueilli systématiquement à l’admission en établissement, il ne s’agit généralement que d’une formalité administrative, celui-ci étant très rarement contacté durant l’hospitalisation, rarement à l’admission, un peu plus souvent à la sortie. Les liens entre infirmiers de ville et hospitaliers sont également peu fréquents. S’agissant des pharmaciens, les contacts entre hospitaliers et officinaux sont également en général relativement rares, alors même que, comme pour les médecins et les infirmiers, une culture commune issue de leur formation initiale les relie.

[23] Cet obstacle à une prise en charge coordonnée au service du patient a conduit très récemment la Société française de pharmacie clinique (SFPC) à engager, sur la base notamment des articles L. 1111-2 et L. 5125-1-1 du code de la santé publique6, des travaux en collaboration avec la HAS afin de faire évoluer les relations ville-hôpital-médico-social7 (référentiel officinal, protocoles de suivi du patient ambulatoire, continuité des soins et réseau ville/hôpital, développement professionnel continu).

[24] Des expériences de collaboration ville-hôpital, tels les projets « rein-médicament EPVH (échanges pharmaceutiques ville-hôpital) » ou « suivi du patient post-IDM (infarctus du myocarde) » sont également intéressantes à suivre pour envisager des solutions innovantes permettant de créer ou renforcer le lien ville-hôpital.

1.1.3.2. L’intégration des traitements personnels

[25] L’intégration des traitements personnels dans la prise en charge à l’admission reste une source majeure de risques, dont les équipes ont pour la plupart pleine conscience, chacune tentant d’y pallier au mieux en fonction des outils dont elles disposent. Selon une revue de la littérature8, un quart des erreurs de prescription à l'hôpital est dû à un historique médicamenteux incomplet à l'admission. Dans la majorité des établissements visités par la mission, les médicaments sont intégrés à la prescription, soit délivrés par la pharmacie à usage intérieur (PUI), soit, quand ils ne sont pas au livret, récupérés dans les unités de soins lorsque le patient les a sur lui. Ils sont ensuite intégrés dans le plan d’administration.

[26] Toutefois, il semble que cette problématique ne soit jamais réellement maîtrisée et pose des difficultés allant également au-delà de la prise en charge directe des patients :

la nécessité d’un arbitrage sur la poursuite ou non des traitements non disponibles dans l’établissement : quel médecin de l’établissement doit en prendre la responsabilité, sachant que celui qui prend en charge les patients dans le service d’hospitalisation n’est pas forcément au fait des recommandations thérapeutiques actualisées du diabète ou des pathologies cardiaques par exemple.

la disponibilité dans l’établissement des médicaments habituellement utilisés en ville : l’inscription dans le livret thérapeutique de spécialités utilisées de façon ponctuelle peut être préjudiciable tant à la sécurisation (car ce qui est utilisé rarement est moins bien maîtrisé et les substitutions peuvent être génératrices de risques) qu’à la performance économique.

[27] Une tentative de structuration et de formalisation de ce qu’on pourrait appeler la « transition thérapeutique » est en cours au travers de l’expérience « Med’Rec » (Medication Reconciliation ou conciliation des traitements médicamenteux), dans le cadre du projet « High 5s » de l’OMS. La conciliation des traitements médicamenteux est un processus pluri-professionnel, interactif, garantissant la continuité des soins en intégrant à une nouvelle prescription les traitements en cours.

6 Articles L. 1111-2, L. 5125-1-1 L. 4011-1 du CSP 7 Source : communication journée formation continue SFPC – 10 mars 2011 8 TAM VC. et al. “Frequency, type and clinical importance of medication history errors at admission to hospital : a systematic review.” JAMC ; 2005 ; 173 (5) : 510-5

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[28] D’autres expérimentations françaises (i.e. « l’observation pharmaceutique »9) s’appuient sur les services développés par le pharmacien en unité de soins pour améliorer la sécurisation de la transition thérapeutique : l’analyse des prescriptions, le suivi pharmaceutique, la consultation d’éducation thérapeutique et la visite de sortie.

[29] Il importe de noter que la conciliation médicamenteuse est d’autant plus délicate qu’il s’agit d’hospitalisations non programmées, la programmation permettant à tout le moins de demander au patient d’apporter ses prescriptions, voire ses médicaments au moment de son admission.

1.1.3.3. L’éducation thérapeutique du patient

[30] Inscrite par la loi HPST et ses textes d’application dans le CSP et son article L. 1161-110, l’éducation thérapeutique est appelée à devenir un outil important d’amélioration de la sécurisation de la prise en charge thérapeutique sur l’ensemble du parcours de soins, permettant notamment d’impliquer davantage le patient dans la qualité de sa prise en charge (cf. 1.2.1.3).

[31] Selon les textes, l’éducation thérapeutique devrait permettre « d’aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique ». Le malade apprend à mieux exprimer ses besoins, à repérer et gérer certaines situations, à ajuster son traitement, à alerter un professionnel bien identifié et à même de coordonner la prise en charge, etc.

[32] Les programmes d’éducation thérapeutique sont proposés au malade par un médecin, mais peuvent être coordonnés par un autre professionnel, ou une personne désignée par une association de patients. Ils permettent de mobiliser des professionnels de santé et d’autres professionnels (dont l’un au moins a suivi une formation d’au moins 40 heures) autour du patient, qui en est lui-même acteur, sur la base d’un programme personnalisé.

[33] Pour être mis en œuvre au niveau local, ces programmes doivent obligatoirement être autorisés par les ARS. La HAS et le ministère de la santé mettent en ligne régulièrement sur leur site Internet des documents d’aide et d’accompagnement (foire aux questions, guides méthodologiques, recommandations, etc.) pour aider les professionnels et les patients à mettre en place ces programmes. Il semble toutefois, selon certains interlocuteurs de la mission, que la complexité de la constitution des dossiers de demande d’autorisation aux ARS soit un obstacle au déploiement de ces programmes.

1.1.3.4. Les prescriptions de sortie

[34] La connaissance des médicaments pris par les patients au sein de l’établissement, l’anticipation de la sortie pour assurer la continuité des traitements ainsi que la transmission des analyses/avis pharmaceutiques (bénéfice de l’expertise hospitalière, facilitation de l’adhésion du patient aux éventuelles modifications apportées aux traitements habituels, continuité d’actions de suivi et d’éducation thérapeutique, etc.) sont autant de problématiques encore peu étudiées et rarement protocolisées.

9 ALLENET B et al. “De l’historique médicamenteux à l’observation pharmaceutique”. Journal de pharmacie de Belgique 2010, n°2 10 Décret n°2010-904 relatif aux conditions d’autorisation des programmes d’ETP ; décret n°2010-906 relatif aux compétences requises pour dispenser l’ETP ; arrêté du 2/08/2010 relatif aux compétences requises pour dispenser l’ETP ; arrêté du 2/08/2010 relatif au cahier des charges des programmes d’ETP et à la composition du dossier de demande de leur autorisation ; décret du 31/08/2010 relatif aux programmes d’apprentissage.

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[35] L’article L. 1111-2 du CSP (article 37 de la loi HPST précitée), crée une obligation légale pour les établissements de recueillir les coordonnées des professionnels de santé prenant en charge le patient hors établissement, afin de pouvoir échanger des informations entre professionnels de ville ou médico-sociaux et de l’hôpital. Cette disposition ne paraît pas pour l’instant avoir fait l’objet d’une information, et encore moins d’une formalisation des procédures de relais hôpital-ville/médico-social, au sein des établissements visités. De même, la possibilité ouverte au patient par l’article L. 5125-1-1 (article 38 HPST) de désigner un pharmacien correspondant au sein de l’équipe de soins, ou encore les nouvelles modalités de coopérations entre professionnels prévues aux articles L. 4011-1 et s. (article 51 HPST), ne sont pas pour l’heure réellement utilisées en pratique courante.

[36] Il semble par ailleurs que, compte tenu des nouvelles orientations réglementaires visant à réguler les ordonnances hospitalières dispensées en ville11, les médecins aient tendance à restreindre celles-ci aux seuls médicaments en cours au moment de la sortie, pour une durée courte, laissant les médecins traitants de ville prendre le relais et prescrire les autres thérapeutiques. Il importe d’observer ces évolutions avec attention afin d’éviter que cela ne génère des difficultés d’accès aux soins pour les patients ne pouvant obtenir de rendez-vous en ville rapidement après leur sortie d’hospitalisation.

1.1.3.5. Les établissements sous budget global

Les établissements médico-sociaux.

[37] Les EHPAD font actuellement l’objet d’attentions particulières (actions de gestion du risque, rôles des médecins coordonnateurs et mise en place des nouveaux pharmaciens référents, etc.). Des progrès restent à accomplir pour les établissements hébergeant les personnes handicapées en matière de politique du médicament.

Les établissements de santé sous budget global.

[38] Il importe également de noter que les établissements encore financés sous budget global, ne bénéficient pas de la tarification à l’activité et donc d’un financement spécifique des médicaments les plus onéreux (en sus des GHS), ainsi que la mission a pu le constater en particulier à l’hôpital intercommunal du Haut-Limousin (HIHL) ou au syndicat interhospitalier de Caudan. Ces établissements peuvent avoir des difficultés à financer les traitements onéreux de certains patients.

[39] Il peut en résulter des difficultés d’accès à ces produits, voire des refus d’admission ou des renvois vers des structures de court séjour qui bénéficient d’un financement en sus des GHS pour ces médicaments. Cette situation crée de nouvelles ruptures dans les parcours de soins.

1.1.4. Les difficultés ont été sous estimées et aggravées par un environnement instable

1.1.4.1. Les difficultés ont été sous estimées

[40] Dès la fin des années 80, la direction de la pharmacie et du médicament du ministère chargé de la santé a édicté deux circulaires pour améliorer la qualité du service rendu au malade. Deux leviers d’action avaient été identifiés :

11 cf. article L.162-30-2 issu de l’article 72 de la LFSS pour 2011 et Instruction n°DGOS/MSIOS/2010/396 du 29 novembre 2010 relative aux modalités de marquage des prescriptions hospitalières exécutées en ville avec les codes à barres

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le premier concernait les bonnes pratiques de dispensation des médicaments12. Une enquête menée en 1984 montrait que la dispensation individuelle ne concernait que 6,8 % des lits dans le secteur public. La circulaire préconisait la mise en place de la dispensation individuelle mentionnant le fait « qu’il n’existe aucune raison fondée de ne pas la pratiquer » ;

le deuxième portait sur l’informatisation du circuit du médicament13. Celle-ci était jugée indispensable pour analyser, calculer, mémoriser, classer et communiquer et donc permettre à l’équipe pharmaceutique de se consacrer aux activités cliniques et scientifiques.

[41] L’arrêté du 31 mars 199914 puis la mise en place des contrats de bon usage des médicaments, des produits et prestations (CBU)15 en 2005 et leur évolution en 2008 ont renouvelé ces exigences d’amélioration et de sécurisation du circuit du médicament. Les CBU reprennent entre autres les exigences d’informatisation et de dispensation nominative.

[42] Mais 25 ans après les premières circulaires et alors que les contrats de bon usage vont entrer, pour certaines régions, dans leur troisième génération, les établissements de santé rencontrent toujours des difficultés pour atteindre ces objectifs.

[43] L’étude Sécurimed réalisée en 2008 indique ainsi que la délivrance nominative ne concerne que 26 % des lits, avec des difficultés importantes quand le rythme de modifications de prescription est élevé, en particulier dans les disciplines de court séjour, médecine, chirurgie et obstétrique (MCO).

[44] Elle montre également que seul un établissement de santé sur trois dispose d’une solution d’informatisation du circuit du médicament. De surcroit, comme les visites de la mission sur site ont permis de le constater, le déploiement des solutions d’informatisation revêt un état d’avancement sur le terrain très inégal. A titre d’exemple de ces avancées inégales du déploiement :

un cahier des charges rédigé et un appel à projet en cours pour le CLCC d’Angers ;

une prescription informatisée en cours de déploiement au CH de Carcassonne ;

un système d’information complet au CH de Compiègne, déployé sur l’ensemble des aspects cliniques et logistiques mais délicat à faire migrer vers un nouveau système d’information intégrant le dossier médical du patient. L’hôpital privé de Pessac est confronté à la même problématique avec le déploiement d’un système d’information unique sur l’ensemble des établissements du groupe privé de cliniques auquel il appartient ;

un système d’information très intégré au SIH de Lorient, chaque activité (médicale, pharmaceutique, logistique, économique) et chaque acteur (directeurs, soignants, pharmaciens et préparateurs, qualiticiens …et surtout patients) en tirant de multiples bénéfices.

12 Circulaire n°666 du 30 janvier 1986 relative à la mise en application des pratiques de bonne dispensation des médicaments en milieu hospitalier 13 Circulaire n°667 du 15 septembre 1986 relative à l’informatisation des systèmes de dispensation des médicaments et de gestion des pharmacies hospitalières 14 Arrêté du 31 mars 1999 relatif à la prescription, à la dispensation et à l’administration des médicaments soumis à la réglementation des substances vénéneuses dans les établissements de santé, les syndicats interhospitaliers et les établissements médico-sociaux disposant d’une pharmacie à usage intérieur 15 Décrets n°2005-1023 et décret 2008-1121 relatifs au contrat de bon usage des médicaments et des produits et prestations

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1.1.4.2. Les difficultés sont aggravées par un environnement instable

En premier lieu, la durée moyenne de séjour (DMS)16 s’est raccourcie.

[45] La majorité des séjours à l’hôpital dure moins de 24 heures : en 2007, les établissements de santé ont pris en charge plus de 25 millions de séjours dont plus de la moitié, soit 13, 3 millions de venues, en hospitalisation partielle ou de moins d’un jour.

[46] La durée de séjour en soins aigus qui concerne 87 % des prises en charge s’est également amenuisée au fil du temps. Selon l’OCDE17, elle est passée en France de 9 jours en 1985 à 6,2 en 1995 et à 5,3 en 2007. La France est particulièrement concernée avec une DMS en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE18 et parmi les plus faibles (seuls les pays nordiques, la Turquie et le Mexique ont des DMS plus courtes). Alors que les patients restent de moins en moins longtemps, la charge en soins reste identique.

En deuxième lieu, la rotation des professionnels de santé s’est accentuée.

[47] L’étude de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques19 (DREES) parue en 2002 a montré que 11 % des professionnels de santé salariés de l’hôpital public n’y travaillaient pas l’année précédente. Cette étude met l’accent sur la mobilité, en particulier, des médecins et pharmaciens, qui étaient 16,5 % à quitter l’hôpital public en 2001. Ces données ne prennent pas par ailleurs en compte la rotation liée aux remplacements temporaires (intérim, mobilité d’un service à l’autre), à la réduction du temps de travail et celle liée aux personnels en formation (interne et élève infirmière). Cette rotation ne favorise pas l’inscription dans le temps d’une politique de qualité qui nécessite une certaine pérennité dans le poste. Elle est un facteur d’insécurité. Le statut d’intérimaire sans expérience des services de soins dans lesquels le personnel était amené à intervenir, ou l’intervention de professionnels en formation sont parmi les facteurs explicatifs d’un certain nombre d’accidents graves dont l’IGAS a eu à connaître.

En troisième lieu, l’évolution des référencements est également une source d’instabilité.

[48] Elle est liée aux renouvellements lors des appels d’offres, à l’apparition des molécules innovantes, à de nouveaux conditionnements et à la montée en charge des génériques.

[49] Cet environnement instable est peu propice à la mise en place de procédures de qualité qui nécessitent une certaine continuité des personnels qui doivent se les approprier et des produits auxquels elles doivent s’appliquer.

1.2. Un processus reposant essentiellement sur des facteurs humains

1.2.1. Une chaîne de savoir-faire

1.2.1.1. La prescription, acte fondateur et fondamental

[50] La prescription, est le point de départ du circuit du médicament. C’est la prescription qui déclenche l’activité pharmaceutique. En dehors des soins urgents, il n’y a pas de délivrance de médicaments sans ordonnance. C’est également la prescription qui déclenche l’acte de soins. En dehors des interventions protocolisées, l’infirmier ne peut administrer un médicament que s’il a été prescrit, même quand il s’agit de soins qui revêtent un caractère d’urgence.

16 Données de cadrage du programme qualité et efficience maladie de la sécurité sociale dans le cadre du PLFSS 2011 17 OCDE. Panorama de la santé 2003 et 2009. Les indicateurs de l’OCDE. 18 La DMS moyenne dans les pays de l’OCDE était de 9,6 en 1985 ; 8,7 en 1995 et 6,5 en 2007. 19 DREES. Études et résultats. La mobilité des professionnels de santé salariés des hôpitaux publics. N° 169 d’avril 2002.

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Une exigence de qualité

[51] La liberté de prescription est, pour les médecins, un principe fondamental inscrit dans les textes (article R. 4127-8 du CSP). Cette liberté est toutefois encadrée. Le code rappelle dans le même article les devoirs corollaires : limiter les prescriptions à ce qui est nécessaire à la qualité, la sécurité et l’efficacité des soins et tenir compte des avantages, inconvénients et conséquences des différentes thérapeutiques possibles.

[52] Le code de la santé publique fait porter sur le prescripteur une exigence de qualité importante, au regard de la complexité des situations cliniques rencontrées à l’hôpital et du nombre de médicaments. Ces difficultés sont aggravées dans un environnement hospitalier où plusieurs médecins peuvent intervenir dans la prise en charge médicamenteuse. Parmi ces médecins, certains peuvent être des internes. La prescription de ces médecins juniors peut être une source d’erreurs quand elle est insuffisamment encadrée (c’est un des facteurs explicatifs repérés par les missions antérieures lors des missions d’inspection réalisées après la survenue d’accidents graves).

[53] Les lacunes de la formation initiale en pharmacologie lors des études de médecine et de la formation continue ont déjà été largement pointées. Le Sénat a souligné que les « questions thérapeutiques apparaissent comme le parent pauvre de l’enseignement en faculté de médecine » avec en France le temps d’apprentissage le plus court d’Europe20. Il pointait également la nécessité d’une formation continue de qualité pour des médicaments en constante évolution. Il faut rappeler que plus de 1 000 autorisations de mise sur le marché sont octroyées chaque année et que l’hôpital est de surcroît le lieu privilégié de mise en place des thérapies innovantes et des essais cliniques.

[54] Les médecins peuvent s’appuyer sur des référentiels pour améliorer la qualité de leur prescription. Les contrats de bon usage ont développé une exigence spécifique en la matière pour les produits pris en charge en sus des prestations d’hospitalisation. Mais la multiplication des référentiels et la nécessité de prendre en compte les avancées scientifiques (congrès, publications) sont une autre source de complexité.

L’informatisation de la prescription

[55] Les contrats de bon usage ont mis l’accent sur la nécessaire informatisation de la prescription qui facilite la circulation de l’information, sécurise la lecture de l’ordonnance et élimine les retranscriptions.

[56] L’informatisation est également un gage d’amélioration de la qualité de prescription parce qu’elle contraint à la rigueur. Les précisions concernant le produit, sa posologie, son mode et le rythme d’administration doivent être obligatoirement renseignées pour que la prescription soit prise en compte par le logiciel. Elle favorise la rédaction de protocoles qui ont vocation à faciliter la saisie et qui obligent à réfléchir sur les pratiques. Elle permet d’accéder aux bases de données. Enfin, elle rend possible l’analyse pharmaceutique qui vient compléter l’expertise du médecin (cf. infra).

[57] Les médecins ont adhéré à la procédure de dématérialisation de la prescription quand elle leur est proposée (la prescription de 58 % des lits était informatisée en 2009 selon la statistique annuelle des établissements21). Ils ont accepté de consacrer un temps plus important à la prescription parce qu’ils considèrent que son informatisation est un gage de sécurité. Ils en voient les effets bénéfiques et les premières réticences à utiliser l’outil informatique sont tombées.

[58] Mais la mission a pu constater que leur tâche reste difficile et que ces efforts ne sont pas toujours récompensés.

20 Rapport du Sénat. Les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments – Médicament : restaurer la confiance. Mmes HERMANGE et PAYET. 2006 21 Ils n’étaient que 21 % des lits en 2007 à la date de réalisation de l’étude Sécurimed. Toutefois la notion de lits informatisés recouvre des réalités très différentes selon la déclaration des établissements.

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[59] L’absence ou les limites du système d’information ne permettent pas d’avoir une vision globale du patient. Les constats de la mission lors de ses visites sur site montrent que l’accès au résultat des examens biologiques est inconstant et qu’aucun éditeur ne permet de disposer d’une vision globale du patient. Le recours aux bases de données quand il est possible (13 % des établissements n’en disposent pas) est souvent jugé peu ergonomique. La mise à disposition de référentiels nationaux est inconstante et la multiplication des sources émettant ces référentiels est un élément de complexité supplémentaire. Enfin, l’analyse pharmaceutique, dont l’apport quant à la qualité de la prescription est reconnu n’est pas toujours réalisée, même quand la prescription est informatisée.

[60] La mission note également les difficultés rencontrées par le processus de certification des logiciels d’aide à la prescription. Aucun n’a été certifié par la Haute autorité de santé (HAS) pour ce qui concerne la prescription en établissement de santé. La HAS considère le marché trop peu mature pour accéder à cette exigence. Il n’est pas certain que la certification, très centrée sur la prescription en dénomination commune internationale22, simplifie le rôle du prescripteur.

[61] La prescription est donc un acte éminemment complexe. Son informatisation améliore la qualité intrinsèque de la prescription, facilite l’intervention du pharmacien pour l’analyse pharmaceutique et celle de l’infirmière pour la mise en place d’un plan de soins informatisé. Mais elle peut rendre la tâche du médecin plus ardue. Elle consomme ce que le médecin a le moins, du temps, dans un environnement où les contraintes administratives se sont multipliées : codage de l’activité à la source, documents de traçabilité pour tous les médicaments qui le nécessitent, justification du bon usage des médicaments de la liste en sus…Il faut donc veiller à faciliter la tâche du médecin lors de l’informatisation de la prescription (en particulier en termes d’ergonomie) si on veut qu’il adhère durablement à la démarche.

1.2.1.2. La dispensation : le rôle pivot du pharmacien et de l’équipe pharmaceutique

[62] Quel que soit le type d’établissement, le rôle central du pharmacien sur le circuit du médicament est reconnu de tous (directions, médecins, équipes de soins, responsables qualité, responsables des systèmes d’information, etc.), étant le référent dès lors qu’une question se rapporte aux médicaments. Ce que comporte cette opinion générale peut toutefois revêtir des réalités très différentes. Si le rôle du pharmacien le plus évident est l’approvisionnement des services en médicaments, sa place dans le parcours de soins des patients est souvent plus floue.

[63] Le circuit logistique des médicaments, allant du fabricant à la PUI puis aux services nécessite des compétences spécifiques, tant pour le choix des produits les plus adaptés que pour le contrôle, la gestion des stocks et l’organisation des approvisionnements en fonction des besoins de l’établissement.

[64] D’autres activités de l’hôpital ont gagné également à être organisées, voire gérées par ces professionnels de santé polyvalents, à l’exemple de la stérilisation des dispositifs médicaux qui, dès lors que la responsabilité en a été confiée aux pharmaciens hospitaliers, a connu une amélioration rapide de sa qualité. Ces aspects ne doivent cependant pas entraver la valeur ajoutée pharmaceutique sur la prise en charge thérapeutique, qui devrait être indissociable de la gestion « physique » des produits.

[65] L’exercice de l’analyse pharmaceutique23 était, jusqu’à une époque récente, extrêmement difficile, les ordonnances étant en établissement de santé soit manuscrites, soit orales et retranscrites, mais en tout état de cause, elles ne sortaient généralement pas des services de soins.

22 Article L.161-38 du code de la sécurité sociale. 23 Selon le référentiel de pharmacie hospitalière de la SFPC, 1997, l’analyse pharmaco-thérapeutique (ou analyse pharmaceutique) des prescriptions consiste à vérifier a minima, la posologie, les interactions médicamenteuses, les rythmes d’administration, les incompatibilités physico-chimiques, l’adéquation avec la présentation commerciale prescrite et à émettre des conseils pharmaceutiques de bon usage. L’historique médicamenteux peut entre autres, aider à la recherche éventuelle d’équivalents thérapeutiques. La traçabilité

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[66] Avec le développement de la prescription informatisée, encore très inégal selon les établissements, de plus en plus d’ordonnances sont accessibles aux pharmaciens. Ceux-ci ont dès lors les moyens d’apporter leur expertise au service du patient pour améliorer le bon usage des médicaments et éviter les erreurs ou incertitudes de prescription.

[67] Selon l’étude Sécurimed, la seule réalisation de l’analyse pharmaceutique nécessiterait 0,9 équivalent temps plein de pharmacien pour 100 lits. Ce chiffre doit cependant être relativisé au regard des situations constatées dans des établissements de santé qui ont au préalable repensés leurs organisations et qui ont l’expérience de l’analyse pharmaceutique (cf. annexe 16). Au SIH de Caudan, par exemple (cf. annexe 7), cette analyse demande 3 à 4 heures par jour de temps pharmaceutique pour un peu plus de 400 lits. Le CH de Compiègne (600 lits, cf. annexe 1) évalue également la charge de travail à 3 à 4 heures par jour, chaque pharmacien ayant plusieurs services désignés, tandis qu’au HIHL (un peu moins de 200 lits, annexe 3) une heure trente à deux heures par jour permettent la validation de toutes les ordonnances.

[68] Cette analyse est souvent effectuée a posteriori, et ce qu’elle recouvre est très variable, pouvant se borner à la vérification de la cohérence interne de l’ordonnance. Le plus souvent, elle tient compte des données biologiques, et peut aller jusqu’à la discussion des opportunités thérapeutiques avec le prescripteur.

[69] Dans des établissements qui ont mis en place l’analyse pharmaceutique depuis longtemps, comme au centre hospitalier de Compiègne, 209 995 lignes de prescription ont été analysées en 2009 et 7 245 opinions pharmaceutiques émises (soit 3,5 opinions pour 100 lignes de prescriptions).

[70] La mission a pu constater que, lorsque ce type d’analyse est réalisé en routine sur la plupart des prescriptions, les prescripteurs en apprécient l’impact. Le pharmacien devient rapidement un interlocuteur habituel des médecins et des équipes de soins pour mieux connaître la pharmacocinétique et la biodisponibilité des médicaments, les contre-indications et interactions, les modalités optimales d’utilisation, les données de pharmacovigilance, l’analyse scientifique sur les avancées thérapeutiques, les derniers textes, recommandations et référentiels relatifs aux produits de santé, etc. Les remarques issues de l’analyse des prescriptions donnent souvent lieu à échange entre prescripteurs et pharmaciens. Les médecins rencontrés considèrent que cela améliore de façon notable leur pratique quotidienne et la qualité des soins.

[71] Cette analyse pharmaceutique peut être réalisée « à distance » de l’unité de soins depuis la pharmacie à usage intérieur (Caudan, Compiègne) : elle constitue en soi une avancée et un service précieux lorsqu’elle est effectuée en routine sur la majorité des ordonnances.

[72] Mais le développement de la pharmacie clinique, le pharmacien étant présent dans les services, voire accompagnant la visite des médecins au lit des patients24 ouvre des champs multiples d’implication du pharmacien.

[73] Au CHU de Grenoble, pour le service de diabétologie, le pharmacien clinicien a effectué 1 789 interventions pharmaceutiques (cf. annexe 15). Ceci a des impacts sur la qualité, la sécurité et l’efficience des soins : formation des personnels de santé et information sur le médicament au plus près des services, pharmacovigilance, gestion des effets indésirables, considérations de pharmacocinétique ayant des conséquences cliniques, suivi thérapeutique, gestion des protocoles thérapeutiques, conseil au patient, voire éducation thérapeutique, historique médicamenteux à l’admission, suivi économique, logistique et clinique de l’usage des molécules innovantes, etc.

[74] Aux États-Unis, où ces activités sont développées dans les hôpitaux, plusieurs travaux ont mesuré l’impact des actions de pharmacie clinique en termes tant de réduction des coûts globaux de prise en charge25, des coûts médicamenteux26 et, enfin, de la mortalité27. de l’analyse est assurée et sa validation est effectuée compte tenu des éléments raisonnables disponibles. Toute intervention pharmaceutique visant à optimiser ou sécuriser le traitement du patient est tracée. 24 Le CHR d’Orléans expérimente dans quelques services un tel accompagnement de la visite par le pharmacien ; non généralisable, cet accompagnement peu ponctuellement être envisagé pour réduire des difficultés de prescription ou engager des relations plus construites avec les prescripteurs.

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[75] La question de la délivrance nominative, également prévue par les textes, n’est pas dépendante de la réalisation ou non d’une analyse pharmaceutique.

[76] Cette dernière peut être effectuée sans pour autant exiger une organisation spécifique de la dispensation dans le service concerné. Or il semble que dans certains établissements, ces deux exigences réglementaires soient considérées comme indissociables28, ce qui peut constituer un frein au déploiement de l’analyse pharmaceutique qui devrait être considérée prioritaire pour le patient.

[77] Pour autant, la délivrance nominative est bien une modalité de sécurisation, d’une part parce qu’elle est individualisée et permet une traçabilité de la prescription à l’administration, d’autre part parce qu’elle porte en elle-même l’exigence d’analyse pharmaceutique. Elle permet par ailleurs une gestion optimisée des stocks. Elle ne peut cependant être réalisée dans des délais urgents et ne doit pas faire l’objet de changements de traitements fréquents, entraînant alors des risques d’erreurs (cf. expérience du SIH Caudan). De plus, la charge de travail nécessaire peut être très importante pour les préparateurs dans les services concernés. La délivrance nominative individualisée se met en place plus facilement dans les services accueillant des patients dont les traitements sont relativement stables (en particulier, les services de moyen et long séjour) et ne peut généralement concerner les initiations ou les modifications de traitement.

[78] Selon les services et les ressources de l’établissement, la délivrance est donc toujours en partie globale, dans une proportion plus ou moins importante. Elle peut alors être fondée sur les prescriptions, voire les consommations réelles, ce que permettent l’informatisation et l’automatisation (armoires dites « sécurisées » ou « automatisées », dans toute la mesure du possible interfacées avec le système d’information). Cette modalité de délivrance est alors appelée29 « nominative globalisée » ou « reglobalisée ». Elle optimise la gestion des stocks dans les unités de soins mais ne garantit la continuité de l’intervention pharmaceutique que lorsque les préparateurs et non les infirmiers réalisent la préparation des doses à administrer.

[79] Il semble que soit de plus en plus utilisée la sémantique suivante pour parler de l’ensemble du processus : dispensation à délivrance nominative (DDN) ou dispensation à délivrance globale ou dispensation à délivrance globalisée (DDG).

[80] La part nominative de la délivrance peut être réalisée manuellement, mais son automatisation (automates de dispensation nominative) est souhaitable30, dès lors que les gains en termes de sécurité et d’optimisation des ressources ont été évalués.

[81] Par ailleurs, les préparateurs jouent également un rôle important, qui peut être plus ou moins étendu selon leur niveau de formation (cf. 3.3.2.5), le mode d’organisation de la PUI et la prise en charge de certaines tâches par les personnels techniques.

[82] Outre leur expertise et leur technicité en matière de préparations, ils sont les pivots de la gestion logistique des médicaments, assurant, sous la responsabilité des pharmaciens, la réception, le stockage, la préparation des commandes des services, etc. Leur métier est en évolution, se rapproche parfois des services, les liens se nouant avec les infirmières et les équipes de soins étant bénéfiques à la sécurisation en permettant des échanges et l’instauration d’un dialogue.

25 BOND CA, RAEHL CL, FRANKE T. “Clinical pharmacy services, pharmacy staffing, and the total cost of care in United States hospitals.” Pharmacotherapy 2000; 20, 609-621. 26 BOND CA, RAEHL CL, FRANKE T. “Clinical pharmacy services, pharmacist staffing, and drug costs in United States hospitals.” Pharmacotherapy 1999; 19, 1354-1362. 27 BOND CA, RAEHL CL. “Clinical pharmacy services, pharmacy staffing, and hospital mortality rates.” Pharmacotherapy 2007; 27, 481-493. 28 Le terme « dispensation » recouvre juridiquement les deux notions, l’analyse de la prescription, appelée « validation pharmaceutique», et la délivrance des médicaments, ainsi que la mise à disposition d’informations et de conseils pour le bon usage des médicaments (article R. 4235-48 du CSP) 29 Non sans risque de confusion quant aux objectifs fixés dans les contrats de bon usage 30 Voir 1.2.2 et DAHAN M., SAURET J. « Sécurisation du circuit du médicament à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ». IGAS RM2010-098P. La documentation française, juillet 2010.

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[83] Le temps de travail pharmacien et préparateur est un élément important de la sécurisation du circuit du médicament.

[84] S’agissant des pharmaciens, depuis 200031, les textes imposent une présence minimale (un mi-temps pour chaque établissement). Or, les besoins peuvent être très différents selon le type d’activité de l’établissement : MCO ou SSR, activités spécialisées ou couvrant un champ thérapeutique très large, implantation géographique et environnement, etc. Par ailleurs, il importe de tenir compte de l’évolution des métiers, tant pharmaceutiques (cf. supra) que médicaux et paramédicaux, en particulier avec l’émergence probable de nouveaux métiers32 et la mise en œuvre des coopérations entre professionnels de santé prévues aux articles L. 4011-1 et suivants du CSP. Une dynamique positive paraît actuellement constatée dans certains établissements, avec une prise de conscience et une plus grande implication des directeurs d’établissement sur l’importance à accorder au médicament. Par exemple, il est de plus en plus courant que les recrutements de pharmaciens dans les petits établissements, privés et publics, soit effectué pour un temps plein. Les contrats de bon usage et la certification HAS ont constitué des moteurs à cet égard.

[85] Les évolutions démographiques sont à surveiller.

[86] Si le nombre de pharmaciens diplômés tous les ans paraît globalement satisfaisant, il semble que des difficultés de recrutement de pharmaciens hospitaliers puissent être constatées dans certaines zones (exemple du Limousin, cf. annexe 3), situation porteuse de risques.

[87] De même, l’exigence nouvelle de diplôme de préparateur en pharmacie hospitalière (cf. 3.3.3) alors même que le rythme de formation par les centres mis en place est actuellement insuffisant, risque de conduire à des difficultés importantes de recrutement de préparateurs hospitaliers dans les prochaines années.

1.2.1.3. L’administration : l’infirmier, dernier filet de sécurité

[88] Dernier professionnel de santé à intervenir, c’est l’infirmier qui est le dernier acteur du circuit du médicament.

[89] Même si le patient est le principal concerné et le dernier maillon de la chaîne, au centre des préoccupations thérapeutiques et au cœur des efforts d’amélioration de la qualité du service qui lui est rendu, force est de constater qu’il n’est pas réellement acteur du circuit du médicament. Le plus souvent, il ne gère pas son traitement personnel. Il lui est difficile d’identifier les traitements, y compris pour les formes sèches. Même quand le médicament est conditionné à l’unité, les différences de références entre ville et hôpital rendent son identification incertaine.

[90] L’infirmier est ainsi le dernier rempart pour sécuriser le processus. A ce titre, c’est donc souvent lui qui est identifié comme étant la cause des erreurs médicamenteuses et sa responsabilité peut être mise en cause. L’analyse des rapports antérieurs de l’IGAS et des accidents dont la mission a eu connaissance montre qu’il s’agit le plus souvent d’une cascade d’erreurs tout au long du processus qui se concrétisent quand le dernier filet de sécurité ne fonctionne pas.

[91] L’infirmier est celui qui, généralement, prépare les doses à administrer (hors les cas où la délivrance nominative est mise en place). Hormis l’incertitude juridique qui entoure cet acte (cf. 3.3.2), l’infirmier, très souvent dérangé (voir infra) n’est pas le mieux à même pour effectuer cette tâche dans les meilleures conditions de sécurité. A ce titre, l’intervention des préparateurs en pharmacie dans les unités de soins comme la mission a pu le voir à Compiègne apporte une réelle plus value. Elle sécurise le travail (le préparateur connaît bien les médicaments et n’est pas dérangé dans sa tâche) et libère du temps infirmier ce qui permet à l’infirmier de se consacrer pleinement à l’administration des médicaments, de porter une attention particulière aux médicaments à marge

31 Décret 2000-1316 du 26 décembre 2000 codifié au sein du CSP (article R.5126-33) 31 « Rapport relatif aux métiers en santé de niveau intermédiaire» HENART L et al.

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thérapeutique étroite et surtout aux produits injectables identifiés du fait de leur seul mode d’administration comme à risque.

[92] L’administration est donc un moment clé. L’infirmer doit opérer d’ultimes vérifications : il doit s’agir du bon médicament, à la bonne dose conformément à la prescription, selon la bonne voie d’administration33 et du patient auquel il a été prescrit. La qualité de cet acte est étroitement dépendante de la qualité de la prescription et en premier lieu de sa lisibilité et de la clarté des indications portées sur l’ordonnance. L’informatisation de la prescription est un vecteur d’amélioration de la qualité en permettant d’abolir les retranscriptions et d’améliorer la lecture des prescriptions. L’administration dépend également de la qualité de délivrance des médicaments et en particulier de la capacité de l’infirmier à identifier précisément par rapport à la prescription le nom du médicament, son numéro de lot et sa date de péremption. Le conditionnement unitaire qu’il soit industriel ou élaboré au sein de la PUI est un élément majeur de cette traçabilité.

[93] Enfin, l’interruption de tâches est un facteur important d’insécurité. Il est identifié par tous les professionnels comme un facteur de risque, mais il est particulièrement sensible en ce qui concerne les infirmiers qui sont le dernier maillon de la chaîne. Le centre de lutte contre le cancer d’Angers a audité les pratiques autour de cette question. A titre d’exemple, les infirmières disent « nous sommes très souvent interrompues dans nos soins par les collègues, le téléphone, un patient ou un membre de sa famille34… ». Il s’agit également d’une des actions correctives portées dans le cadre du projet européen EUNetPaS35 par la HAS (projet des gilets jaunes).

[94] Face à ce problème, les établissements mettent en œuvre des solutions diverses : la préparation des doses à administrer par exemple est réalisée par l’infirmier de nuit censé être moins dérangé, ou par un infirmier dédié ou par un préparateur. Ces différentes solutions mériteraient d’être auditées et partagées quand elles ont prouvé leur efficacité. Ainsi, la mission s’interroge sur l’habitude très ancrée des établissements de santé qui consiste à faire préparer les médicaments par l’infirmier de nuit, alors qu’il est souvent seul, qu’il ne peut donc surseoir à répondre à un appel. De plus, la nuit est un moment où la vigilance est moindre.

1.2.2. La lente émergence de solutions technologiques

1.2.2.1. L’informatisation

[95] Comme dans les autres pays européens, la progression du niveau d’informatisation des hôpitaux a largement concerné les fonctions classiques de gestion-administration pour lesquelles la mise en cohérence des traitements automatisés est la plus simple à atteindre. Souvent engagée au travers de grands projets trop ambitieux (« grands soirs informatiques »), et donc jalonnée d’échecs coûteux et démobilisateurs, l’informatisation des activités liées aux soins s’est engagée au travers d’un suivi médico-économique, en particulier avec la mise en place du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI), sans que la nécessaire interopérabilité entre les logiciels budgétaires, logistiques et cliniques ne soit atteinte. Cette informatisation des soins présente un bilan plus modeste : pour ces activités multiformes et plus délicates à faire entrer dans le moule d’un traitement automatisé, l’informatisation correspond surtout à la multiplication d’applications « locales » ou achetées sur étagères, formant un patchwork couvrant, sans cohérence d’ensemble ni pérennité, une partie variable des activités de soins.

33 Pour exemple, l’administration par erreur par voie intrathécale de vincristine a été source de plusieurs accidents, ayant conduit à la mise en place de recommandations nationales et internationales préventives spécifiques 34 La revue de l’infirmière, juin 2009, n°151, « des lecteurs scanner pour sécuriser l’administration des chimiothérapies ». 35 European Union Network for Patient Safety

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[96] Au sein des activités liées aux soins, l’informatisation du circuit du médicament a connu des difficultés particulières suscitées par la dualité de ce circuit à la fois clinique et logistique, le nombre d’acteurs impliqués (patient, médecin, pharmacien, préparateur, infirmier, acheteur, logisticien, gestionnaire financier) mais aussi par la réticence initiale des acteurs, à commencer par les prescripteurs, premier maillon du circuit du médicament. Cette informatisation a été relancée avec la mise en place de la tarification à l’activité et de ses contraintes (création de la liste en sus puis des contrats de bon usage et contrôle des dépenses des médicaments onéreux).

[97] Près de 25 ans après la sortie de la circulaire de 1986 sur « l’informatisation des systèmes de dispensation des médicaments », et même si la montée en charge semble s’accélérer ces dernières années, l’état des lieux est encore très mitigé36 : 21 % des lits étaient considérés comme informatisés en 2007 et seul un établissement de santé sur trois dispose d’une solution d’informatisation de son circuit du médicament, solution dont le déploiement sur le terrain revêt de surcroît un état d’avancement très inégal.

Les difficultés structurelles

[98] Plusieurs difficultés affectent tout d’abord l’offre de solutions techniques :

la taille du marché apparaît trop limitée pour permettre aux éditeurs de supporter les coûts de développement nécessaires aux multiples adaptations logicielles réclamées par les établissements. Chaque évolution logicielle intervenant dans des systèmes de plus en plus complexes fait « bouger » l’architecture même du système, nécessitant de nombreuses journées de travail pour stabiliser une nouvelle version ;

la dispersion actuelle du marché, avec plusieurs dizaines d’éditeurs gérant des systèmes de type « métier » à la pérennité aléatoire, ne favorise pas les économies d’échelle et accentue d’autant ces difficultés, la plupart des établissements devant chacun faire appel à plusieurs prestataires ;

alors que l’informatisation est coûteuse, les hôpitaux n’y consacrent que des moyens relativement modestes37 au regard de l’enjeu que ce chantier représente et qui ne permettent pas aux éditeurs, en dépit de leurs promesses, de faire des réels développements sur mesure, indispensables pour résoudre les problèmes d’interopérabilité, de codage des données et de décalage entre le modèle implicite des applications informatiques et la réalité complexe et hétérogène des processus de travail dans l’établissement.

[99] Mais les principales difficultés résultent de la faible capacité des établissements à exprimer clairement leurs besoins en matière d’informatisation. Chaque groupe d’acteurs du monde hospitalier a une compréhension différente de l’utilité de l’informatique et a naturellement tendance à privilégier son point de vue sans intégrer celui des autres. Ces préoccupations très diverses sont rarement abordées de façon globale, faute d’avoir procédé aux réflexions organisationnelles et aux arbitrages internes que l’informatisation suppose.

[100] Le manque de réflexion globale et approfondie affecte la conception même du système d’information à mettre en place. Elle conduit à des frustrations et favorise la mise en œuvre de projets fragmentaires : pour la prise en compte des spécificités irréductibles de telle spécialité médicale, pour le suivi financier des consommations, pour l’organisation des plans de soins du personnel soignant, pour la gestion cohérente de l’ensemble des activités de la pharmacie, etc.

36 « Il apparaît que certaines activités sont complètement sous investies comme le parcours patient, la sécurisation de la dispensation des médicaments pourtant essentielle dans l’organisation et la sécurité de l’hôpital ». Rapport IGAS RM 2011-029P sur les systèmes d’information hospitaliers. 37 Les hôpitaux sont loin de consacrer à leur informatique les 4 à 5 % de leur budget jugés indispensables par la directrice d’EVALAB, au cours de sa rencontre avec la mission. Pour mémoire, le marché informatique hospitalier est évalué à 850 M € en 2010 pour des charges hospitalières de 75 Mds €. Par ailleurs, l’édition logiciels représente 30 % des dépenses mais seulement 13 % des recettes des éditeurs (rapport Igas RM 2011- 029P précité).

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[101] Des analyses techniques souvent superficielles (visites de quelques sites utilisateurs) peuvent conduire au choix de solutions fondées sur des contraintes techniques et sur l’offre disponible. L’adaptation aux besoins des utilisateurs se fait alors dans un deuxième temps, lorsque cela reste possible ; parfois il est laissé à la charge des utilisateurs, ce qui peut entraîner des réactions de rejet.

[102] Cette situation résulte pour partie du manque de compétences techniques et de management pour mener des projets d’informatisation complexes. Les établissements disposent rarement de ressources en matière d’organisation et de méthodes, capables d’analyser et de modéliser en amont les activités, de produire un diagnostic des fonctionnalités des logiciels proposés par le marché, puis d’accompagner les évolutions organisationnelles liées aux migrations techniques. Ainsi, les cellules d’assistance à la maîtrise d’ouvrage, souvent logées dans les directions informatiques, sont certes composées de représentants d’utilisateurs et peuvent contribuer à la traduction technique des besoins qu’ils expriment ; mais celles-ci ne sont pas en mesure de porter les réorganisations de tâches et de comprendre les interactions qu’engendre l’informatisation de processus aussi complexes que le circuit du médicament.

Les difficultés techniques

[103] Le problème majeur et récurrent a trait aux difficultés de mise en place dans les établissements d’une configuration logicielle prenant en compte, de façon satisfaisante, le circuit du médicament :

une première solution, à caractère vertical, conduit à mettre en place un logiciel métier de pharmacie ; cette solution est intéressante en termes fonctionnels dès lors qu’elle annexe, comme au CH de Compiègne, les fonctions de prescription ; ses limites ont trait à sa déconnection du dossier patient et de la gestion comptable ; des progrès sont toutefois annoncés par l’éditeur de deux logiciels métiers majeurs, PHARMA® et CHIMIO®, avec un nouveau logiciel « encapsulé » dans le dossier patient ;

la seconde solution consiste à relier par des interfaces, les différents logiciels verticaux dédiés à la gestion de la pharmacie, à la prescription et au plan de soins infirmiers et à la gestion économique et financière ; cette solution se heurte aux problèmes d’interopérabilité de ces logiciels et peut-être dangereuse de par les difficultés qu’elle génère dans la circulation de l’information entre prescripteurs, pharmaciens et infirmiers ;

la troisième solution, la plus logique, vise à mettre en œuvre une solution intégrée à partir d’un noyau central constitué du dossier patient ; beaucoup d’éditeurs du dossier patient proposent ainsi d’inclure leur propre outil de gestion de la pharmacie ; cette solution résout les problèmes d’interface mais ne couvre pas un périmètre fonctionnel suffisant pour permettre le plein exercice de la pharmacie clinique (analyse pharmaceutique réduite à une validation sur un mode binaire, dispersion des informations de prescription alourdissant à l’excès les temps d’analyse, etc.).

[104] Au-delà de cette difficulté de base, plusieurs dysfonctionnements logiciels majeurs peuvent être listés : l’absence de vision globale des données relatives à un patient (biologie, radiologie, diagnostic, traitements), les problèmes posés par la modification des ordonnances (traitée comme la création d’une nouvelle ordonnance) et la suspension des traitements (confondue avec la date de fin de l’ordonnance), les lacunes dans la prise en compte des traitements personnels, les difficultés de réitération des données patient telles que la taille (constante) et le poids (qui peut varier).

L’émergence de nouveaux risques

[105] L’informatisation du circuit du médicament se traduit dans la plupart des cas, par une réduction des erreurs médicamenteuses dans des proportions importantes, voire considérables38.

38 Ammenwerth E., Schnell-Inderst P., Machan C., « The effect of Electronic Prescribing on Medication errors and Adverse Drug Events: a Systematic Review », J Am Med Inf Assoc, 2008, 15-5 ; citée par la directrice d’EVALAB, cette méta-analyse portant sur 25 études d’évaluation de l’effet des logiciels de type « circuit du médicament » en milieu hospitalier sur les erreurs de médicaments, fait ressortir que 23 de ces études montrent un effet positif, avec réduction significative du risque variant de 13 à 99%.

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[106] Mais informatisation ne rime pas toujours avec sécurisation : certaines études ont ainsi montré une augmentation des événements indésirables graves médicamenteux lors de l’informatisation du circuit du médicament, en particulier parce que la prescription devient asynchrone39, nuisant à la quantité et à la qualité des informations échangées entre médecin et infirmier.

[107] Il convient de ne pas engendrer, par l’amélioration des performances du système d’information, un cloisonnement et une perte du dialogue entre médecins, pharmaciens et préparateurs et équipes de soins. Repenser les organisations est un préalable indispensable au déploiement d’un système d’information performant autour du circuit du médicament : ces problèmes organisationnels sont bien plus importants que ceux d’interfaces techniques.

[108] S’agissant de la prescription, une étude menée à la pharmacie du CH de Calais montre que les erreurs induites par l’informatisation de la prescription se concentrent sur la posologie (erreurs d’unité), la durée de traitement (oubli d’arrêt de traitement) et la dénomination des médicaments prescrits (pouvant induire des erreurs de dosage)40. Ces erreurs mettent en évidence trois problèmes majeurs.

Le premier est en rapport avec la formation des utilisateurs qui constitue l’une des étapes clef d’une informatisation réussie. Celle-ci ne peut se résumer à une formation initiale pour présenter les grandes fonctions du logiciel ; elle doit être suivie de formations pratiques, adaptées aux situations rencontrées au quotidien par les utilisateurs, sans oublier la formation continue liée aux évolutions du logiciel.

Le deuxième est lié aux choix de paramétrages du logiciel par la pharmacie, dont les conséquences peuvent être sous-estimées : ainsi, la mise à disposition d’un grand choix d’unités de prescription disponibles pour le prescripteur (seringues, millilitres, unités internationales...) peut générer des erreurs grossières comme la prescription de 2 000 seringues d’une héparine à bas poids moléculaire au lieu de 2 000 unités de son principe actif.

Enfin, le troisième problème est lié à l’ergonomie et à l’intuitivité du logiciel. Une ergonomie insuffisante peut, par exemple, conduire au maintien des retranscriptions de l’ordonnance prescrite sur un support autre (cahiers infirmiers, pancartes, fiches personnelles) que le système informatique. Or, la retranscription est porteuse de risques majeurs d’erreurs médicamenteuses, au même titre que les prescriptions illisibles ou incomplètes. De même, une succession d’écrans peut conduire à privilégier, lors de l’administration, la consultation du seul écran synthétique qui contient beaucoup d’informations, sauf « quelques-unes ». Et ce sont ces « quelques-unes » qui peuvent justement générer des erreurs.

1.2.2.2. L’automatisation et les autres solutions

[109] L’introduction de nouvelles technologies, dans un circuit reposant jusqu’alors essentiellement sur des facteurs humains, a pour objectif de sécuriser le circuit du médicament. En économisant du temps de travail sur les métiers, elle a également vocation à permettre à chacun des acteurs de se repositionner sur son cœur de compétences.

[110] Les constats de la mission lors des visites sur le terrain montrent qu’il existe quelques solutions simples et peu coûteuses mais qu’en matière d’automatisation, il s’agit encore pour beaucoup de solutions émergentes, voire de prototypes. Ce constat peut étonner alors que les premières expérimentations datent du début des années 70 aux États-Unis et que l’automatisation des officines pharmaceutiques est depuis longtemps mise en œuvre. Une explication tient sans doute au fait que l’informatisation de la prescription est un préalable indispensable à la mise en place de la plupart de ces solutions technologiques.

39 Décalage entre la décision thérapeutique et l’acte de prescription, qui pour des raisons techniques ne peut souvent être effectué au lit du malade 40 V. VIALLE. « Connaître, comprendre et lutter contre les erreurs médicamenteuses induites par l’informatisation du circuit du médicament », Thèse de doctorat en pharmacie, Université de Nantes novembre 2009.

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[111] L’automatisation peut intervenir à divers endroits du circuit du médicament.

Les automates de dispensation.

[112] Les automates de dispensation nominative, qui sont en fait des automates de distribution nominative permettent de conditionner les médicaments en sachets ou blisters individuels, à partir des prescriptions informatisées. Ils représentent une forme d’automatisation très attrayante car ils permettent théoriquement de réaliser la distribution journalière nominative préconisée par la réglementation. Ils concernent le plus souvent les seules formes orales sèches. Certains automates réalisent un reconditionnement à partir de médicaments en vrac (rarement fournis par les industriels, le plus souvent déconditionnés par la pharmacie à usage intérieur), d’autres un sur-conditionnement. Les premiers sont les plus fréquents et les moins coûteux. Un automate de distribution nominative des formes sèches est en cours de mise en place au Centre hospitalier de Compiègne, le syndicat interhospitalier de Caudan en a également planifié l’acquisition. Les automates de sur-conditionnement sont en place ou sont testés dans certains gros centres hospitaliers comme les Hospices civils de Lyon, le centre hospitalier universitaire de Toulouse ou le centre hospitalier d’Annecy41.

[113] Un de leurs avantages indéniables est l’automatisation de la traçabilité, qui peut aller jusqu’à l’administration. Le code-barres ou le code Data Matrix de la dose unitaire généré grâce à l’informatisation de la prescription permet à l’infirmier de vérifier l’adéquation entre le produit prescrit et le produit délivré.

[114] La nécessité d’une phase préalable de déconditionnement limite l’intérêt des automates de reconditionnement. Les médicaments étant rarement commercialisés sous forme de vrac en France, l’automatisation oblige à une phase préalable de déconditionnement, souvent manuelle qui nécessite un temps préparateur important. La destruction du conditionnement industriel primaire qui répond à des normes internationales de qualité génère des incertitudes en termes de stabilité des produits. L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) est réservée sur ces pratiques même si l’agence n’a pour l’heure recensé aucun signalement d’effet indésirable grave ou d’erreur médicamenteuse liée à l’utilisation des automates de distribution nominative42. La Société française de pharmacie clinique (SFPC) partage ces réserves. La crainte exprimée de part et d’autre est de créer de nouveaux risques liés au déconditionnement, en voulant sécuriser le circuit en automatisant la distribution. Le vide juridique entourant cette activité est également à prendre en compte (cf. 4.3.3.1).

[115] Par ailleurs les interlocuteurs de la mission ont signalé l’intérêt de disposer de deux automates identiques pour pallier les risques de dysfonctionnements. A cet égard, la mission souligne la nécessité de disposer d’un contrat de maintenance adapté aux impératifs de la continuité des soins.

Les automates de rangement et de cueillette

[116] Les automates de rangement et les automates dits de cueillette optimisent les conditions de stockage et de cueillette des médicaments au sein de la pharmacie. Ce sont les automates les plus fréquemment utilisés par les établissements de santé, les plus souvent rencontrés au cours des déplacements sur site de la mission. Le centre hospitalier de Compiègne utilise ainsi des stockeurs rotatifs à la pharmacie qui facilitent la cueillette des préparateurs et optimisent le volume de stockage. Le groupement audois de prestations mutualisées utilise deux solutions technologiques qui sont apparues, à des niveaux très différents, également performantes. Les dispositifs de stockage avec couloirs dynamiques permettent pour un faible coût de faciliter le chargement et la cueillette et d’optimiser la gestion des péremptions. Le robot de stockage et de cueillette optimise la surface de stockage et le temps de travail par une utilisation pour le stockage (la nuit), en temps masqué par rapport à la cueillette (le jour) et la gestion du stock (en continu).

41 Le coût d’un automate de distribution peut varier selon le type d’automate : entre 150 K € pour un automate de reconditionnement et jusqu’à et 2 M d’€ pour un automate de sur-conditionnement. 42 Seuls des risques de confusion entre médicaments reconditionnés avec des étiquetages très similaires ont pour l’heure été recensés

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[117] Au sein des unités de soins, les armoires en système plein-vide permettent une gestion plus efficace du stock que les armoires traditionnelles en limitant les périmés et en facilitant le réapprovisionnement (cf. annexe 1 CH de Compiègne). A un degré de technologie plus avancé, les armoires automatisées sécurisent la distribution globale des médicaments, et apportent des gains d’efficience, d’autant plus qu’elles sont connectées au système d’information. L’ouverture des tiroirs est commandée par le système informatique à partir de la prescription. La gestion du stock tampon des unités de soins est alors complètement dématérialisée.

[118] L’armoire automatisée43 est une solution plus coûteuse que le système plein-vide mais est plus sécurisante, la délivrance étant alors directement liée à la prescription. La gestion du contenu de l’armoire relevant de la pharmacie à usage intérieur, le stock de médicaments est connu en temps réel, le circuit du médicament reste maîtrisé par l’équipe pharmaceutique et la traçabilité est assurée jusqu’à l’utilisation par l’infirmier. Elle répond aux exigences d’une distribution globale maîtrisée, sécurisée et efficiente, en particulier pour la délivrance des médicaments dans des unités où le rythme de prescription est élevé (réanimation par exemple).

Le code-barres ou le code Data Matrix

[119] Enfin, l’utilisation du code-barres ou du code Data Matrix, comme c’est le cas au centre de lutte contre le cancer d’Angers, permet d’assurer la traçabilité à plusieurs étapes du circuit clinique. L’utilisation d’un enregistrement par lecteur portable sans fil (dit douchette) du code-barres facilite l’identification du patient (carte personnelle), de son dossier et de la prescription, de la poche de chimiothérapie, de l’administration du produit et des différents incidents qui peuvent survenir à ce moment-là.

[120] Les coûts de la mise en place de ces nouvelles solutions technologiques et les retours sur investissement sont difficiles à évaluer. Les différences de prix à l’achat sont significatives mais pour les technologies de pointe, non représentatives de ce que pourrait être le prix lors d’un déploiement de masse qui générerait des économies d’échelle. Les coûts indirects, interface avec les systèmes d’information, maintenance, consommables, acquisition de matériels spécifiques compatibles doivent également être prises en compte. A l’inverse, il faudrait intégrer les économies de temps infirmier ou préparateur (qui sont souvent des économies en termes d’activité et non en termes de poste), les économies en matière de dépenses de médicament en lien avec une meilleure gestion du stock et celles générées par la diminution des erreurs dans le circuit. En raison de la complexité du sujet et de l’importance de certains investissements, l’intérêt d’études comparatives sur ce sujet est réel.

1.3. Un circuit générateur de risques

1.3.1. Un risque avéré

[121] La perception du risque par le décideur est souvent liée à la survenue d’évènements très graves et médiatisés. Il apparaît ainsi significatif que l’IGAS ait été saisie à 5 reprises depuis 2004 pour des évènements qui ont en commun leur caractère de gravité (ils ont conduit au décès dans tous les cas) et leur survenue chez des enfants (pour 4 des 5 cas). Ces deux aspects, nature évitable du risque et gravité des conséquences souvent sans commune mesure avec le risque encouru par le patient du fait de sa pathologie, leur ont donné un caractère intolérable.

[122] S’ils ont attiré l’attention, ces événements ne permettent pas d’appréhender la réalité du risque.

[123] Le risque a été longtemps estimé sur la base de données provenant d’autres pays, en règle générale des pays anglo-saxons. Ces données ne sont pas reprises dans le rapport. Le risque d’erreur dans un processus est intimement lié à son organisation et n’est donc que partiellement transposable d’un pays à l’autre.

43 Le coût d’une armoire automatisée est évaluée entre 20 et 30K€ soit entre 10 et 13 fois celui d’une armoire traditionnelle. Le coût d’une armoire plein vide est une fois ½ supérieur à celui d’une armoire traditionnelle

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[124] Les données françaises disponibles se sont étoffées ces dernières années.

[125] Les deux enquêtes ENEIS menées par la DREES en 2004 et 2009 ont porté, dans le contexte de la loi de santé publique du 9 août 2004, sur les événements indésirables graves (EIG) associés aux soins. Elles montrent que les médicaments constituent la troisième cause d’événements indésirables graves (EIG) évitables après les actes invasifs et les infections associées aux soins.

[126] En 2009, les EIG liés au médicament représentent entre 19 et 29 % de l’ensemble des EIG identifiés. L’étude estime que 6,2 EIG surviennent pour 1 000 jours d’hospitalisation dont 2,6 EIG évitables. Parmi les EIG évitables, le médicament est à l’origine de 0,7 EIG pour 1 000 jours d’hospitalisation (0,9 en 2004) ce qui rapporté aux séjours décomptés par les systèmes d’information hospitaliers sur le champ de l’enquête, permet d’estimer le nombre d’EIG liés au médicament entre 60 et 130 000 par an dont 15 à 60 000 sont évitables.

[127] L’expérimentation menée par l’Institut de veille sanitaire (InVS) sur les effets indésirables liés aux soins attribue dans 11 % des cas la cause des effets indésirables graves à une erreur médicamenteuse. L’erreur médicamenteuse se place ainsi au troisième rang des causes d’EIG.

[128] Le guichet des erreurs médicamenteuses mis en place par l’Afssaps a permis de collecter 448 signalements en 2008. Mis en place en 2005, ce guichet s’est tourné vers le recueil des erreurs avec l’objectif de mettre en place des actions correctrices. Cela a conduit dans un premier temps à la mise en place d’un plan d’harmonisation de l’étiquetage puis dans un deuxième temps à 145 actions correctrices.

[129] Enfin, le nombre de réclamations44 adressées à la Société hospitalière d’assurances mutuelles (SHAM) et mettant en cause le médicament est proportionnellement stable sur les vingt dernières années (0,7 % de l’ensemble des réclamations) mais augmente en valeur absolue (moins de 10 en 1990, un peu moins de 50 en 2008).

[130] Les données de la DREES et de l’expérimentation de l’InVS sont concordantes. Elles placent le médicament parmi les trois grandes causes d’événements indésirables liés aux soins.

1.3.2. Un risque imparfaitement appréhendé

[131] L’enquête ENEIS, réalisée en 2009, avait pour objectif d’estimer la fréquence et la part d’évitabilité des EIG et d’observer les évolutions depuis 2004. Elle concerne les EIG quelle qu’en soit la cause et donc perd de sa puissance statistique dès que l’on s’intéresse au seul médicament. Par ailleurs, si les résultats de l’enquête de 2009 sont proches de ceux de 2004, la DREES précise que les indicateurs ne sont pas adaptés pour juger de l’impact des actions de gestion des risques sectoriels ou de l’émergence de nouveaux risques. Elle ne peut donc pas permettre, au-delà de l’estimation de fréquence, d’appréhender la réalité du problème, ses causes, ses effets et son évolution dans le temps.

[132] Chacune des études décrites suit des objectifs qui lui sont propres : suivi des indicateurs de la loi de santé publique pour l’étude de la DREES ; recueil, analyse et mise en place d’actions correctrices pour les actions « produit » du guichet « erreurs médicamenteuses » de l’Afssaps étude de faisabilité de la déclaration des EIG liés aux soins pour l’expérimentation de l’InVS.

[133] Ces études recouvrent des champs différents : soins de court séjour pour la DREES, soins dans les établissements de santé et les établissements médico-sociaux pour l’expérimentation de l’InVS.

44 Une réclamation est une demande en réparation amiable ou contentieuse et adressée à l’assuré ou à son assureur. Sur 100 réclamations, 20 à 30 font l’objet d’une indemnisation.

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[134] Elles concernent indifféremment les erreurs médicamenteuses ou les événements indésirables, parfois évalués quant à leur gravité, parfois quant à leur évitabilité. La difficulté lexicale ne facilite pas la compréhension de la réalité du phénomène et il est difficile de savoir ce que recouvrent exactement les données disponibles. La société française de pharmacie clinique a édité un dictionnaire français dont la préface souligne « une multitude d’évènements d’étiologies et de natures différentes aux conséquences très diverses. Ainsi, un événement indésirable médicamenteux peut être l’effet indésirable d’un médicament et provenir d’une erreur médicamenteuse, mais une erreur médicamenteuse peut survenir sans pour autant qu’il y ait de conséquence pour le patient. »

[135] Les données disponibles restent approximatives et complexes à interpréter. Les autorités sanitaires ont donc une compréhension limitée du phénomène.

1.3.3. La nécessité d’aller plus loin dans la connaissance

[136] Cette méconnaissance est préjudiciable à la qualité de l’action publique. Les systèmes de signalement des évènements indésirables sont nécessaires à l’accompagnement d’une politique de qualité et de sécurité du circuit du médicament. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a recommandé en 2004 aux États membres de mettre en place de tels systèmes dans le cadre de l’Alliance mondiale pour la sécurité des patients.

[137] La Mission nationale d’expertise et d’audit hospitalier (MEAH), intégrée ultérieurement à l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) a souligné en 2004 combien dans le contexte français, « la production de l’information nécessaire sur les incidents liés au circuit du médicament est un facteur critique et limitant ». Si l’absence d’information robuste et de qualité n’empêche pas la mise en place d’actions pouvant cibler des dysfonctionnements mis en évidence « à dire d’experts », elle limite les possibilités de priorisation et d’évaluation des actions mises en œuvre et donc l’efficacité des interventions.

[138] De la même façon, en 2007, la DREES a considéré que les systèmes de signalement des événements indésirables liés aux soins sont indispensables pour développer une approche cohérente de la sécurité du patient dans les établissements de santé ainsi que pour développer une approche nationale de veille et d’alerte des risques liés aux soins.

[139] Pourtant, en 2011, malgré la volonté du législateur affichée sept ans plus tôt, la mise en place officielle d’un réseau de signalement des EIG aux objectifs clairement définis n’est toujours pas effective en France. Le décideur sanitaire, à quelque niveau qu’il se trouve, est donc en partie aveugle.

[140] Il lui faut pour mieux appréhender les étapes clés du circuit et l’impact des mesures mises en œuvre pour le sécuriser, se référer à des publications étrangères, avec les limites de transposition déjà soulignées. Des études américaines évaluent à environ 98 000 le nombre d’effets indésirables liés aux médicaments par an45, et le coût moyen de prise en charge hospitalière d’un EIG médicamenteux, pour les USA, a été estimé à 3.244 $46. L’étude du New England Journal of Medecine47 évalue à 39 % les erreurs médicamenteuses graves liées à la prescription et à 38 % celles liées à l’administration.

45 MURFF HJ et al. “Detecting adverse events for patient safety research: a review of current methodologies. Safer Health System.” National Academies Press. J Biomed Inform. 2003 Feb-Apr;36:131-43. 46 BATES DW et al. “The costs of adverse drug events in hospitalized patients.” Adverse Drug Events Prevention Study Group. JAMA 1997; 277(4):307-311 47 G. POON E. et al. “Effects of Bar-Code Technology on the safety of Medication Administration”. New England Journal of Medicine, 6 mai 2010, vol.362, n°18, p1698-1707

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2. SECOND POSTE DE DEPENSES A L’HOPITAL, LE MEDICAMENT SUIT UN CIRCUIT LOGISTIQUE INSUFFISAMMENT EFFICIENT

2.1. Les dépenses de médicaments prescrits à l’hôpital continuent de croître

2.1.1. Les coûts directs liés aux achats de médicaments par l’hôpital

[141] En 2009, selon l’Afssaps, le marché du médicament en France atteint 27,1 Mds€. Même si la pharmacie d’officine reste largement prépondérante, les établissements de santé représentent une part significative et croissante de ce marché : avec une progression annuelle moyenne de 8 % de leurs achats depuis 1999, ceux-ci ont dépensé à ce titre 5,5 Mds€ en 2009, soit 20 % du marché du médicament ; cette part de marché a pratiquement doublé en 20 ans.

[142] Pour les hôpitaux, le médicament représente désormais environ 10 % des charges d’exploitation48, avec toutefois de fortes variations en fonction de l’activité de l’établissement (par exemple, près de 25 % des charges du centre de lutte contre le cancer d’Angers).

[143] Le marché du médicament à l’hôpital présente deux caractéristiques principales.

[144] En premier lieu, il s’agit d’un marché compartimenté en trois segments distincts dont la dynamique est différente, où l’intensité de la concurrence est très inégale et qui sont soumis ou non à une logique de prix administrés :

les médicaments inclus dans les différents tarifs des groupes homogènes de séjours (GHS avec 1,8 Mds€, soit 31 %) qui sont les plus soumis à la concurrence, notamment des génériques, et pour lesquels les dépenses sont stables ;

les médicaments onéreux remboursés par l’assurance-maladie en sus des GHS (2,5 Mds€, soit 43 %) qui sont des produits innovants et en exclusivité à quelques exceptions près (érythropoïétines, immunoglobulines, quelques anticancéreux) ; ces molécules onéreuses font l’objet d’une inscription sur une liste réglementaire (« liste en sus ») et sont dotées d’un tarif de responsabilité négocié dans la plupart des cas par les pouvoirs publics avec les laboratoires ; très largement responsables de la progression des dépenses, ces molécules sont encadrées par les contrats de bon usage signés avec les agences régionales de santé (ARS) (progression des dépenses fixée par les textes49, suivi qualitatif des prescriptions) et peuvent être rayées de la liste en sus ;

les médicaments que les hôpitaux peuvent vendre au public (médicaments inscrits sur la liste dite de « rétrocession »50 avec 1,45 Mds€, soit 25 %) qui sont souvent innovants, peu susceptibles d’être concurrencés par un équivalent thérapeutique ou un générique et dont le prix de vente est fixé règlementairement ; très dynamique jusqu’en 2004 (1,7 Mds€), cette activité de rétrocession a connu un coup d’arrêt avec la réforme intervenue en 2005 et le passage en officine de nombreuses spécialités auparavant en réserve hospitalière51.

[145] En second lieu, en dépit de l’inflation des références de médicaments et de l’émiettement des fournisseurs52, le marché du médicament à l’hôpital apparait fortement concentré :

ainsi, 20 médicaments représentent 42,2 % des dépenses hospitalières en 2009 ; ces produits sont pour la plupart en exclusivité et remboursés hors GHS (antinéoplasiques et immuno-modulateurs, sang et organes hématopoïétiques, anti-infectieux) ;

48 Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, chapitre 9, Cour des comptes, 2007. 49 Article L. 162-22-7-2 du CSS 50 Prévue à l’article L. 5126-4 du CSP 51 Les médicaments soumis à réserve hospitalière ne sont prescrits et dispensés qu’à l’hôpital et ne peuvent être administrés qu’à des patients hospitalisés (article R5121-83 du CSP) 52 Le LEEM recense en France, 5 300 produits, comprenant un ou plusieurs principes actifs de base de médicament, sous 11 200 présentations proposées par 324 laboratoires pharmaceutiques

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de même, une dizaine de grands laboratoires représentent plus de 50 % des achats hospitaliers, ce qui représente une concentration un peu plus forte que celle du marché officinal.

2.1.2. Le coût des erreurs médicamenteuses

[146] Les établissements de santé doivent souscrire des contrats de responsabilité civile hospitalière contre les risques liés à leurs activités médicales. Face à l’augmentation des procédures contentieuses et à l’alourdissement du coût des sinistres, les quelques assureurs qui se sont maintenus sur le marché (AXA, SHAM) ont sensiblement augmenté leur tarification du risque de responsabilité médicale en général et hospitalière en particulier.

[147] Au sein de la responsabilité civile hospitalière, le risque médicamenteux concerne les activités internes de soins mais également la dispensation externe au public (rétrocession) ou les activités pour le compte d’autres établissements (préparations notamment).

[148] Alors que l’on estime que 15 000 à 60 000 personnes hospitalisées sont victimes chaque année d’effets indésirables graves et évitables, liés à la prise de médicaments, les données disponibles sur le coût des erreurs médicamenteuses à l’hôpital sont limitées.

[149] Une étude déjà ancienne s’est efforcée d’analyser les conséquences socio-économiques des 113 cas d’effets indésirables d’origine médicamenteuse, ayant duré au moins 5 jours et notifiés au centre régional de pharmacovigilance de Bordeaux pendant 3 mois (août-novembre 1999)53. Cette étude estimait le coût direct moyen d’un effet indésirable médicamenteux à 5.305 €, actualisé à 6 288 € (cf. annexe 16). Ce coût couvre les soins et indemnités journalières, compte non tenu de la perte de productivité que génère, pour les actifs, une durée moyenne de soins de 37 jours par effet indésirable.

[150] Plus récemment, l’Observatoire des risques médicaux a analysé sur la période 2006-2009, les dossiers clos d’accidents médicaux d’un préjudice supérieur à 15 000 €. Sur ces 4 ans, 4 083 accidents médicaux coûteux ont entrainé une charge globale de 470,8 M€ (indemnisation et prise en charge des tiers-payeurs) : les accidents dus à la prescription ou à la délivrance de produits ne concernent que 3 % des dossiers, ce qui est faible au regard des actes de soins, fautifs ou non fautifs (61 %) mais aussi des infections nosocomiales (18 %).

[151] Enfin, les données de la Société hospitalière d’assurances mutuelles (SHAM), qui assure 80 % des établissements publics et 25 % des établissements privés, confirment que la part du risque médicamenteux reste modérée dans la sinistralité : la cinquantaine de réclamations annuelles correspond à 0,7 % du nombre total de réclamations et se traduit par une indemnisation représentant 0,8 % des montants versés par l’assureur ; les visites de risques dans les établissements qui conditionnent une éventuelle réduction de la cotisation conduisent à des recommandations de l’assureur dont 5 % concernent le circuit du médicament.

[152] Il n’en reste pas moins que le risque médicamenteux constitue une préoccupation croissante pour les assureurs, du fait de la mise en évidence tant de la grande complexité du circuit du médicament que de la multiplicité des erreurs que cette complexité génère. L’inquiétude se renforce paradoxalement au vu des efforts de sécurisation engagés par les établissements, et qui visent à réduire les facteurs de risques humains au moyen d’une informatisation et d’une robotisation. Si cette automatisation réduit le niveau global des risques, elle engendre aussi des risques sériels qui peuvent se révéler particulièrement graves et coûteux de par la multiplication des victimes concernées (à l’exemple des accidents de radiothérapie d’Épinal ou de Toulouse).

53 APRETNA E et al. « Conséquences médicales et socio-économiques des effets indésirables médicamenteux ». La Presse médicale. 2005 ; 34 ; 271-6

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2.1.3. Le poids des prescriptions de l’hôpital sur la ville et le médico-social

[153] En 2009, l’assurance-maladie a remboursé 21,1 Mds€ de médicaments délivrés en officine. Si globalement, la progression des prescriptions des médecins en ville est faible (130 M€, soit + 0,8 %), celle liée au renouvellement par les médecins de ville des prescriptions initiées à l’hôpital apparaît en revanche très dynamique (200 M€). Cette situation résulte de deux éléments distincts mais cumulatifs :

les durées d’hospitalisation ont connu une diminution importante, rendue possible par l’offre aux patients hospitalisés de solutions thérapeutiques ambulatoires alternatives (avec la sortie de la réserve hospitalière d’un nombre important de médicaments, après la parution du décret dit « rétrocession »54) ; cette évolution favorable a permis de peser structurellement sur les dépenses de l’hôpital, mais elle a aussi eu pour corollaire, une progression des prescriptions hospitalières initiées à l’hôpital mais exécutées et renouvelées en ville ;

le choix de faire de l'hôpital le sas d'entrée du progrès médical et thérapeutique, a conduit les laboratoires à placer la relation médicament-hôpital au centre de leur stratégie : certaines spécialités peuvent ainsi être vendues à un prix très bas aux hôpitaux, car ces spécialités ont toutes les chances d’être maintenues dans les traitements poursuivis après l’hospitalisation, sur la base de prix nettement plus rémunérateurs fixés réglementairement pour les ventes de produits remboursables en officine55 ; cette différence de coût d’une même prescription selon qu’elle est exécutée à l’hôpital ou en ville, profite aux finances hospitalières mais pèse en revanche sur l’enveloppe accordée aux soins de ville.

[154] Face à ces constats, l’assurance-maladie s’est récemment engagée dans une politique de maîtrise de l’évolution des dépenses des prescriptions hospitalières exécutées en ville. Celle-ci passe par la présentation au sein de l’hôpital de mémos56 de bonne pratique et de mémos médico-économiques (par exemple sur les statines). Elle passe également par la meilleure identification des prescripteurs hospitaliers dont le code devra figurer sur ses ordonnances. Enfin, conformément à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, un taux d’évolution des prescriptions hospitalières exécutées en ville est défini et des contrats assortis de sanctions financières pourront être conclus avec les établissements qui connaissent des progressions de ce type de prescriptions au-delà d’un seuil déterminé par les textes.

[155] Permettant de lutter contre d’éventuelles dérives, cette action devra toutefois se garder d’introduire une dose excessive de complexité et donc de risque dans le circuit du médicament. Peu mobilisés par les considérations médico-économiques, les prescripteurs ne pourront raisonnablement pas jongler dans l’élaboration de leurs prescriptions entre les deux tarifs des spécialités à l’hôpital et en ville, sans le secours de l’informatique : ce qui se traduira par une nouvelle charge pesant sur des logiciels d’aide à la prescription dont la fiabilité devra être accrue.

54 Décret n° 2004-546 relatif aux catégories de médicaments à prescription restreinte et à la vente de médicaments au public par certains établissements de santé 55 Le prix fabricant hors taxe est fixé par convention entre le laboratoire et le Comité économique des produits de santé et, à défaut, par arrêté ministériel ; les marges des grossistes répartiteurs ainsi que les marges et les remises des pharmaciens d’officine font également l’objet d’arrêtés ministériels ; les différences de prix d’une même spécialité entre l’hôpital et la ville sont souvent importantes voire considérables (cf. annexe 14) 56 Support d’aide édité par la CNAMTS

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2.2. Mobilisant à l’excès les pharmacies hospitalières, la gestion des achats de médicaments est perfectible

2.2.1. Les textes ne prévoient pas que le pharmacien doive être le responsable des achats de médicaments

[156] Le directeur d’hôpital a une compétence générale pour régler les affaires de l’établissement dont il est le représentant légal. Dans le domaine des achats, sa responsabilité juridique est entière puisqu’il est chargé de la définition de la politique d’achat, du choix de l’offre économiquement la plus avantageuse et de la signature des marchés57.

[157] Cette compétence du directeur en matière d’achat ne s’oppose naturellement pas à ce que le choix des fournisseurs résulte d’une démarche collégiale, associant étroitement les différentes compétences techniques de l’établissement.

[158] Ainsi, même s’ils ne figurent pas explicitement dans la liste des missions légales des pharmacies à usage intérieur (PUI), les achats de produits pharmaceutiques concernent très directement le pharmacien. Il assure les actes d’exécution des marchés, pour l’approvisionnement en produits de son domaine de compétence, c’est-à-dire les médicaments et les dispositifs médicaux stériles.

[159] Le pharmacien est de ce fait, un « acteur essentiel participant à la définition des besoins et des critères de choix techniques pour les achats de produits pharmaceutiques »58.

[160] Cette participation nécessaire du pharmacien a, en pratique, souvent dérivé vers une large sinon totale prise en charge des achats de médicaments par la pharmacie hospitalière : celle-ci gère alors l’estimation des besoins, la définition des spécifications techniques, la rédaction des cahiers des charges, le choix des procédures et des modalités d’allotissement, la définition et la pondération des critères, l’analyse des offres, la notification des marchés et l’archivage papier des dossiers.

[161] Dans nombre d’établissements, des cellules spécifiques achats au sein de la PUI mobilisent ainsi un voire deux pharmaciens et plusieurs agents administratifs pour cette gestion très large du processus d’achats des médicaments et dispositifs médicaux. Les liens avec les services économiques, qui sont en charge des autres achats de l’hôpital, peuvent être réduits à la sous-traitance d’opérations purement matérielles (publicité, ouverture des plis) et à la vérification de la légalité externe des procédures de marché lancées par la pharmacie.

[162] Au regard d’autres configurations dans lesquelles les services économiques sont restés prépondérants, cette maîtrise de la fonction achats par les pharmaciens ne constitue pas, loin s’en faut, pour l’établissement un facteur de moindre performance dans l’achat de ses médicaments. Cette maîtrise sécurise par ailleurs le pharmacien pour l’exercice de ses responsabilités légales dans l’établissement et lui permet, en outre, d’entretenir des contacts avec l’industrie pharmaceutique. Mais quelle que soit la capacité, parfois grande, des pharmaciens à acquérir des compétences de juriste et d’acheteur, cette situation n’apparaît pas optimale.

57 Selon l’article R. 6145-70 du code de la santé publique : « le directeur est seul compétent pour passer les marchés de travaux, de fournitures et de services pour le compte de l’établissement ». 58 GEM-PS. Guide de l’achat public Produits de santé en établissement hospitalier. Février 2008

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2.2.2. La gestion des achats de médicaments peut être optimisée

[163] Les pharmaciens rencontrés par la mission s’efforcent de gérer au mieux des procédures d’achat souvent complexes. Les résultats sont globalement probants59, même si des situations peu acceptables ont pu être identifiées dans des rapports antérieurs de l’IGAS : tenue des dossiers peu rigoureuse et éparpillement des pièces, difficulté de reconstituer les bases du processus décisionnel, recours peu sécurisé à des procédures dérogatoires (urgence), irrégularités formelles importantes (délai, signature), etc.

[164] Cette gestion par la pharmacie d’une fraction très importante des marchés hospitaliers se traduit par plusieurs difficultés.

2.2.2.1. L’émiettement de la fonction achats au sein de l’hôpital

[165] Considérée comme le parent pauvre dans les établissements alors qu’elle représente 25 % des dépenses d’un hôpital, la fonction achats est dispersée entre la pharmacie, les services économiques voire les services travaux. Cet émiettement qui affecte la vision d’ensemble des enjeux ainsi que le suivi des achats hospitaliers, entrave la définition d’une politique d’achat sur des sujets d’intérêt commun. A titre d’exemple :

le développement de la dématérialisation, qui constitue un enjeu majeur de productivité, est redevable de démarches de concertation avec les fournisseurs, de choix techniques et de décisions de financement qui ne peuvent être envisagés qu’au niveau de l’établissement et non à celui de tel ou tel service ;

de même, le maintien de certaines clauses des cahiers des charges ne peut relever des seules responsabilités et habitudes des services, de par les conséquences qu’elles emportent pour l’établissement ; ainsi, le franco de port majore non seulement le prix d’achat mais se traduit aussi par une multiplication des commandes et livraisons, ce qui accroît la charge de travail des services et singulièrement celle de la pharmacie (cf. infra) : ces coûts doivent être arbitrés au niveau de la direction au vu des économies financières et de locaux potentiellement générées par la réduction des surfaces nécessaires au stockage.

2.2.2.2. La forte massification de la procédure d’achats

[166] La gestion d’un volume important d’achats de médicaments par des équipes souvent réduites et peu formées à la commande publique60 se traduit par un souci d’allégement et de simplification qui conduit à massifier les opérations autour de quelques très grandes procédures pluriannuelles, qui regroupent des centaines de lots de médicaments différents mais attribués sur la base des mêmes critères pondérés de qualité et de prix.

[167] Dans ces conditions, les quelques marges de négociation existant sur un marché du médicament déjà largement monopolistique et aux prix en partie administrés (cf. supra) ne sont pas mises à profit. La plupart des marchés portant sur des produits concurrentiels dépassent en effet le seuil de 206 K€ à partir duquel l’appel d’offre est obligatoire. Lorsque ce seuil n’est pas atteint, le recours aux procédures adaptées introduites en 2006 dans le code des marchés publics reste rare. De surcroît, les facultés de négociation que comportent ces procédures sont jugées trop complexes ou trop risquées à mettre en œuvre. De fait, ces procédures adaptées ne se distinguent guère des appels d’offres classiques.

59 Au niveau des prix payés, des marges de progression existent toutefois ; dans une étude à paraître de la DREES « Les facteurs de variabilité du prix du médicament dans les établissements de santé : une approche empirique » B Juillard-Condat et al., l’alignement de tous les établissements sur les établissements les plus efficients permettrait une réduction des dépenses d’environ 10 % sur les médicaments inclus dans la tarification des séjours (GHS), soit un gain de 100 à 150 M€. 60 Même si certaines pharmacies s’efforcent de recruter des pharmaciens ayant des compétences en achats publics en intégrant dans leurs fiches de poste une spécialité « commande publique ».

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[168] Le souci d’alléger la gestion des achats fait également que les critères de sélection ne peuvent pas être trop développés car ils doivent s’appliquer aux centaines de références que comportent les grandes procédures d’achat. Dans la plupart des établissements visités, les critères se bornent à couvrir la qualité et le prix dans un rapport d’ailleurs très variable de 75/25 (centre hospitalier de Compiègne), de 70/30 (assistance publique des hôpitaux de Marseille), de 60/40 (centre hospitalier d’Ajaccio, HIHL) mais aussi 40/60 (GCS Audois). Cette pondération de critères est appliquée à tous les produits, qu’il s’agisse de produits basiques relevant d’une approche moins-disant (prix) ou de produits plus sensibles justifiant d’une priorité à la qualité (mieux-disant).

[169] Enfin, en matière de durée des marchés, les établissements privés disposent contractuellement d’une réactivité leur permettant de profiter très rapidement des opportunités du marché, ce qui constitue un avantage substantiel s’agissant de l’achat des molécules onéreuses passant en générique. Les établissements publics convergent vers des contrats annuels renouvelables une ou deux fois. Ceci permet de concilier allègement des charges de gestion (sous réserve des reconductions expresses annuelles), relative stabilité des références (gage de sécurité et d’économies de gestion) et possibilité de sortie annuelle de certaines molécules (pour profiter mais avec quelques mois de retard d’opportunités tarifaires sur le marché). Peu d’établissements ont des approches différenciées permettant de traiter la plus grande partie des références en des marchés stables de 2 à 3 ans tout en passant des marchés annuels pour les quelques 20 % de molécules les plus concurrencées ou les plus onéreuses.

2.2.2.3. Une concertation limitée et peu productive dans la définition des achats

[170] Le recensement des besoins est effectué par le pharmacien, essentiellement sur la base des consommations passées et des évènements qu’il prévoit (évolution de structures, d’activité, innovations attendues, développement de génériques à venir..). Pour les nouveaux produits, la consultation des prescripteurs est jugée peu productive, ceux-ci n’étant apparemment pas en mesure de quantifier leur demande potentielle.

[171] Dans plusieurs établissements visités par la mission, l’estimation des besoins est approximative, avec une fourchette très large allant de 1 à 4, fourchette parfois indûment considérée comme une prescription formelle du code des marchés publics61. Cette fourchette large écarte le risque potentiel d’une pénalisation de l’établissement du fait du niveau insuffisant de commandes mais peut avoir des conséquences sur les prix proposés par les industriels qui, tout en n’ayant pas la garantie d’un volume important de commandes, doivent prévoir des capacités de production qui seront très éventuellement employées.

[172] Le découpage des marchés de médicaments en lots doit être effectué en lien étroit avec les travaux de la COMEDIMS (ou de son équivalent) relatifs à la définition des équivalents thérapeutiques substituables et à la rédaction du livret thérapeutique de l’établissement. La capacité du pharmacien à faire émerger en COMEDIMS des consensus avec les prescripteurs sur les équivalences thérapeutiques est donc très importante pour promouvoir des regroupements dans les achats de molécules. En pratique, la collaboration insuffisante en COMEDIMS entre pharmaciens et prescripteurs peut conduire à un allotissement quasi systématique des marchés au niveau le plus fin de la molécule (niveau 5 de la classification anatomique, thérapeutique et chimique de l’OMS dite ATC).

61 En cas de difficulté à déterminer précisément son besoin, le pouvoir adjudicateur peut indiquer une fourchette minimale et maximale des prestations à réaliser. Jusqu’à l’entrée en vigueur en 2006 du nouveau code des marchés publics, il était précisé que cette fourchette ne pouvait aller au-delà d’un delta de 1 à 4.

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[173] Cet allotissement très fin permet certes à un maximum d’entreprises d’entrer en compétition et favorise une certaine sécurité de l’approvisionnement. Mais ce faible regroupement de produits en sous-classe pharmacologique (niveau 4 ATC) ne permet pas de bénéficier de meilleures remises tarifaires (perte d’un éventuel effet-volume) et accroît le poids des charges administratives (multiplication des fournisseurs et des marchés, du nombre de commandes et des factures). De surcroît, un découpage trop fin peut générer des risques de confusion et d’erreur dans les soins si les produits d’une même gamme pharmacologique mêlent des fournisseurs avec des présentations différentes (absence d’effet de gamme).

2.2.3. La mutualisation des achats n’est pas toujours la panacée

2.2.3.1. Une évolution positive largement engagée

[174] La mutualisation des achats de médicaments est une évolution déjà ancienne. Dans les grands établissements publics et dans les groupes privés, lucratifs ou non, elle a pris la forme d’une centralisation des achats : Agence générale des équipements et produits de santé à l’Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP) qui a le statut de PUI ; Service central de la pharmacie et du médicament à l’Assistance publique des hôpitaux de Marseille (AP-HM), sans statut PUI et détaché depuis 2008 des services économiques ; Consortium d’achats des Centres de lutte contre le cancer qui constitue un groupement d’intérêt économique; direction nationale des achats au sein du groupe Générale de Santé, etc.

[175] Pour les autres établissements, notamment publics, le mouvement de regroupement des achats s’est engagé dans un cadre souvent départemental avant de pâtir un temps de l’approche rigide du code des marchés publics qui a prévalu de 2001 à 2004. Une nouvelle dynamique est à l’œuvre avec la promotion de regroupements au niveau régional avec l’appui des ARS. Le mouvement s’est même étendu au niveau national avec la création en 2006 d’UniHA qui réunit une cinquantaine des plus grands établissements publics (essentiellement des CHU).

[176] Ces regroupements présentent l’immense avantage d’extraire ou de décharger de la gestion des achats de médicaments et dispositifs médicaux les pharmaciens exerçant dans les établissements adhérents ; ils doivent également permettre d’obtenir de meilleures conditions tarifaires ; ils peuvent enfin contribuer à sécuriser les parcours de soins des patients entre structures de soins d’un territoire donné, par homogénéisation des médicaments dispensés.

2.2.3.2. Les difficultés de mise en œuvre

[177] Même si des progrès sont en cours, le regroupement des achats correspond encore largement à la simple collection des références médicamenteuses demandées par les établissements, sans qu’une réflexion commune suffisante ne permette de mettre en place un référencement centralisé sur une partie substantielle des achats du groupement. Faute d’effet volume, les bénéfices en termes de prix sont réduits alors que l’hétérogénéité des traitements médicamenteux entre établissements reste entière.

[178] L’allègement des tâches de gestion des achats qui en résulte peut être pour partie absorbé par la nécessaire participation des pharmaciens des établissements de santé aux travaux de la commission technique du groupement, qu’il s’agisse de partager les pratiques d’achat et les connaissances du marché, de répondre au mieux aux besoins exprimés par les prescripteurs, de travailler sur les équivalences thérapeutiques ou d’allotir au niveau le plus pertinent sur la base d’un référencement largement centralisé. Il est moins concevable qu’une partie des gains obtenus sur la gestion des achats soit absorbée par l’alourdissement des tâches de commandes du fait de la multiplication du nombre de marchés (segmentation excessive des marchés du groupement, coexistence des marchés du groupement et des marchés de l’établissement auprès des mêmes fournisseurs).

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[179] Le développement des groupements conduit ensuite à une massification des achats hospitaliers qui accroît la concentration du marché du médicament autour d’une poignée de fournisseurs, au détriment des quelques 300 autres industriels qui contribuent aussi à faire de la France le premier producteur européen de médicament62. Les risques potentiels sont d’ordre économique, avec une réduction de la concurrence sur un marché déjà en partie monopolistique ce qui, à terme, peut créer les conditions d’une hausse des prix, voire un retrait ou une disparition de certains producteurs de médicaments ce qui pourrait avoir des conséquences sanitaires. Les risques affectent également la sécurité des approvisionnements avec des ruptures de stocks chez des industriels dont les capacités peinent à satisfaire des commandes massives, lorsque ceux-ci obtiennent plusieurs des marchés des grands groupements (dont UniHA).

[180] Enfin, le regroupement des achats de médicaments des plus grands établissements dans UniHA semble poser des problèmes spécifiques, au-delà du poids majeur de ce groupement sur le marché hospitalier du médicament. Cet achat « national» est parfois vécu comme imposé et allant à l'encontre de la possibilité de choix locaux, ciments d'une collaboration et d'une cohésion au sein d'un établissement : cette situation tend à peser sur l’investissement, déjà insuffisant, des médecins dans les COMEDIMS.

[181] Surtout, ce regroupement national s’articule mal avec la promotion d’approche territoriale : adhérent à UniHA, le principal établissement hospitalier du territoire ou de la région ne participe plus aux travaux locaux sur le médicament, travaux qui constituent un des éléments de dynamique du réseau territorial et de cohérence du parcours de soins du patient ; par ailleurs, cette adhésion au groupement national affecte directement la capacité des autres établissements à constituer et à faire vivre un groupement régional d’achat d’une taille critique suffisante, notamment dans les plus petites régions (cas du Limousin, cf. annexe 3).

2.3. Les enjeux d’efficience logistique ont été largement négligés

[182] Alors que la place prédominante du pharmacien dans les achats de médicaments doit sans doute être réétudiée, la responsabilité de la pharmacie hospitalière sur la logistique du médicament à l’hôpital apparaît centrale : à titre d’illustration, si c’est le directeur de l’établissement qui signe les marchés de médicaments, c’est au pharmacien de signer les bons de commande afférents à ces marchés. Même si les situations apparaissent très diverses selon les établissements, ces activités logistiques ont fait l’objet d’investissements insuffisants et représentent une charge de gestion importante pour les services de pharmacie.

2.3.1. Une multiplication coûteuse des commandes et des livraisons

[183] La pression pour la réduction des stocks pharmaceutiques, les facilités de commandes imposées aux fournisseurs (franco de port), l’inflation des références médicamenteuses, conduisent à la multiplication des commandes, livraisons et factures dans nombre d’établissements. Cette multiplication est d’autant plus pesante que les établissements ne disposent pas des moyens nécessaires pour en assurer la gestion.

[184] Ainsi, les difficultés fréquentes d’interfaçage entre le logiciel de gestion des stocks de la pharmacie et le logiciel de gestion économique et financière entravent la mise en place de préconisations automatiques de commandes, allégeant le travail de commande des préparateurs.

[185] De même, la chaîne qui va des achats à l’approvisionnement est alourdie par de multiples ressaisies des mêmes informations (références marchés, codes marchés, conditionnement, prix, quantités, etc.) ce qui, en outre, est source d’erreurs et donc de litiges chronophages dans la livraison ou la facturation.

62 Depuis 1995, la France est le premier producteur européen de médicament : 34 Mds€ devant l’Allemagne (26 Mds€) et le Royaume-Uni (23 Mds€) ; atteignant près de 7 Mds€, le solde des échanges de médicaments constitue le 4ème poste d’excédent commercial de la France « L’industrie du médicament en France, faits et chiffres 2009 », Les entreprises du médicament (LEEM), 2010

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[186] Enfin, même lorsqu’un cadencement des commandes et des livraisons est organisé au travers de plages horaires mobilisant du personnel dédié, le développement de petites commandes ponctuelles d’urgence ou de dépannage, permettant de répondre, au risque de rupture d’approvisionnement, perturbe et désorganise les plans de charge des personnels.

2.3.2. Des conditions de stockage inégales et pas toujours performantes

[187] Dans nombre d’établissements, les locaux de la pharmacie affectés à la livraison et au stockage n’ont souvent guère évolué depuis 25 ou 30 ans, c’est-à-dire qu’ils sont vétustes et surtout largement insuffisants au regard des nouveaux besoins : aire de déballage distincte et zones de stockage dédiées (froid, stupéfiants, rétrocession), références médicamenteuses de plus en plus nombreuses, passage à l’usage unique des dispositifs médicaux, etc.

[188] La mécanisation est souvent limitée à quelques transpalettes et lorsque l’équipement est plus conséquent (tour de rangement, à l’AP-HP) les matériels peuvent être à bout de souffle.

[189] La gestion des stocks apparaît perfectible qu’il s’agisse de la mise en œuvre de méthodes adaptées ou de la mise en place d’inventaires réguliers63. Le suivi des stocks et des consommations peut également être approximatif avec des divergences parfois très fortes entre les données issues de la pharmacie, notamment des inventaires physiques et celles du contrôle de gestion : absence d’interfaçage entre l’outil informatique de prescription et le système de gestion de la pharmacie, erreurs de saisie, décalage dans l’enregistrement des sorties, voire disparition physique, etc.

[190] Le niveau des stocks lui-même est délicat à apprécier sur la base du seul chiffre affiché au bilan de l’exercice pour la seule journée du 31 décembre qui ne prend en compte que les stocks existants dans les locaux de la pharmacie, à l’exclusion des stocks parfois importants détenus dans les unités de soins. Même dans des établissements performants en matière de médicaments, ces stocks peuvent dépasser les 30 jours de consommation prévus par la circulaire du 15 septembre 1986 et constituer de ce fait une source d’économie potentielle.

2.3.3. Un transport dans les unités de soins qui reste perfectible

[191] Hormis dans les rares cas de dispensation nominative, le personnel de la pharmacie ne contrôle plus physiquement les médicaments dès que ceux-ci franchissent la porte de la pharmacie. Le transport vers les services est pris en charge par les personnels de service de l’hôpital (sauf pour certaines spécialités : stupéfiants par exemple) ou par les personnels soignants qui viennent chercher leur commande de dépannage.

[192] Même si la situation a progressé, des difficultés persistent dans la planification des livraisons aux services (entreposage « temporaire » dans un local ad hoc par exemple), les modalités de transport (contenant non scellé, non réfrigéré…), la traçabilité des approvisionnements à leur arrivée dans les services.

63 Moins lourds à organiser, les inventaires tournants sont encore peu développés ; de même, le principe du « premier à expirer, premier à sortir » est plus adapté que le principe classique du « premier entré, premier sorti ».

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3. LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DU MEDICAMENT A L’HOPITAL N’A PAS ATTEINT SA PLEINE EFFICACITE

3.1. Les établissements de santé ne se sont pas encore approprié les possibilités offertes par la loi HPST

3.1.1. Le nouveau rôle des instances

[193] La loi Hôpital, patients, santé, territoires (HPST) a supprimé les alinéas du code de la santé publique imposant la constitution de diverses commissions dans les établissements de santé, dont la commission du médicament et des dispositifs médicaux stériles, COMEDIMS. Elle confère à la CME (conjointement avec le directeur) une responsabilité générale d’organisation de la politique d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, dont la politique des produits de santé64, en fonction de ses ressources et besoins, à charge pour elle de décider des sous-commissions éventuelles qu’elle souhaitera constituer.

[194] La COMEDIMS a souvent joué un rôle très important dans l’amélioration de la prise en charge thérapeutique, du bon usage et de l’efficience des produits de santé, constituant un lieu de rencontre régulier obligatoire entre médecins, pharmaciens, préparateurs, infirmiers, équipes de soins et représentants des directions concernées, autour de toutes les questions touchant aux produits de santé dans l’établissement. Il importe de conserver cet acquis précieux, nonobstant la suppression du caractère contraignant de son existence ; sa suppression est susceptible d’induire une dégradation de la structuration de la coordination du bon usage et de la gestion des produits de santé à l’hôpital.

[195] Les CME devraient, compte tenu des nouvelles règles érigées par HPST, réviser prochainement leur règlement intérieur pour décider du devenir de leur COMEDIMS. Dans la plupart des établissements visités par la mission, il est prévu pour l’instant qu’elle reste en tant que sous-commission de la CME. Il importe toutefois de rester vigilant quant à la consolidation de cette avancée importante.

[196] Par ailleurs, la place de la CME au sein de l’établissement paraît, depuis l’adoption de la loi HPST, sujette à débats, la répartition des rôles et les modalités de collaboration avec la direction nécessitant souvent des clarifications. La multiplication des contrats et des indicateurs, des visites, enquêtes et audits, la tarification à l’activité, les nouvelles mesures de régulation des prescriptions hospitalières dispensées en ville (imposant l’apposition d’étiquettes d’identification des prescripteurs), les difficultés créées au quotidien par les systèmes d’information, etc. paraissent s’ajouter à ces incertitudes pour créer un climat de tension et de démotivation.

[197] La perte d’interlocuteurs bien identifiés depuis la création des ARS est également source de découragement et d’abandon des projets. Certains acteurs rencontrés par la mission ont en effet souligné qu’auparavant, la direction et le président de la CME avaient, en général, un contact direct avec le directeur de l’ARH et que chaque établissement avait au moins un interlocuteur désigné, autonome et réactif. La création des ARS a entraîné de la perte de lisibilité, compte tenu du nombre de niveaux hiérarchiques parfois difficiles à franchir pour obtenir une décision.

3.1.2. L’importance des coopérations

[198] A la recherche d’une meilleure efficience et en particulier de l’efficacité de leur politique d’achat, les établissements de santé ont utilisé les instruments mis à leur disposition, outils de coopération autorisés par le code de la santé publique ou groupements de commande de l’article 8 du code des marchés publics.

64 Articles R. 6111-10 et R. 6144-2 du CSP

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[199] Cette démarche a été engagée par loi du 31 décembre 197065 qui a instauré des instruments comme les syndicats interhospitaliers dont l’objectif était la mise en commun d’équipements ou de services. Elle s’est poursuivie par la loi du 31 juillet 199166 qui a permis la création des groupements d’intérêt public (GIP) et des groupements d’intérêt économique (GIE). Enfin, la possibilité a été ouverte par l’ordonnance du 24 avril 199667 de former des groupements de coopération sanitaire (GCS).

[200] Malgré les insuffisances souvent pointées de ces dispositifs, la palette de ces possibilités a été utilisée dans le cadre du médicament pour mutualiser les achats :

SIH comme celui de Caudan ;

GCS de moyens comme UniHA ou le groupement audois de prestations mutualisées (GAPM) ;

GIE comme le Consortium Achats des centres de lutte contre le cancer (GIE CAC) ;

GIP comme le réseau des acheteurs hospitaliers d’Île-de-France (Resah-IDF)

groupements de commande dans la plupart des cas.

[201] La Loi HPST s’est donné pour objectif d’apporter une nouvelle impulsion après le constat d’un échec relatif d’instruments tournés vers la coopération entre secteur public et secteur privé dans un encadrement juridique jugé trop incertain.

[202] La loi rénove un certain nombre d’outils de coopération et prescrit la transformation d’outils jugés obsolètes comme les SIH dans un délai de 3 ans. Les conditions de cette transformation et le futur statut des professionnels posent encore question dans l’attente de la parution du décret qui doit préciser les modalités de cette évolution.

[203] Les orientations prises doivent permettre aux établissements d’aller plus loin que la seule mutualisation des achats. Plusieurs possibilités s’ouvrent aux établissements de santé dans ce cadre. Le GCS de moyens peut permettre l’exploitation en commun d’une PUI ou l’exploitation d’une plate-forme médico-logistique.

3.1.3. Le renouvellement de l’exigence de qualité

3.1.3.1. Une exigence qui concerne désormais le médicament

[204] L’encadrement réglementaire a été longtemps le seul mode d’amélioration en matière d’organisation des soins à l’hôpital.

[205] La politique qualité s’est ensuite progressivement structurée. Impulsée par la loi du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière qui introduit l’évaluation de la qualité des soins comme une exigence pour tous les établissements de santé publics et privés, elle était axée essentiellement sur l’amélioration de la compétence des professionnels par le biais de l’évaluation des pratiques professionnelles.

[206] Cette politique a ensuite connu une nette accélération avec l’ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 instaurant l’accréditation (devenue certification) des établissements de santé. Fin 2009, 86 % des établissements de santé avaient réalisés leur procédure.

[207] Très récemment, le circuit du médicament a pris au sein de la politique qualité une place déterminante. La HAS a donné à ce sujet une importance particulière parce que c’est le domaine où elle a été amenée, ces trois dernières années, à prendre le plus grand nombre de décisions et parce que ce thème est très souvent pris en compte dans les processus d’accréditation mis en œuvre dans les pays étrangers.

65 Loi n°70-1318 du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière 66 Loi n°91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière 67 Ordonnance n°96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l’hospitalisation publique et privée

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[208] La démarche qualité de la prise en charge médicamenteuse du patient est donc devenue avec la V2010 une pratique exigible prioritaire. Pour ce critère, en 2010, 108 décisions ont été émises sur un total de 1030 dont 48 recommandations, 56 réserves et 4 réserves majeures.

Tableau 1 : Part des décisions concernant l’organisation du circuit du médicament dans la procédure de certification

Nombre

d’établissements certifiés

Part des décisions concernant

l’organisation du circuit du médicament

Rang des décisions circuit du médicament par rapport aux autres

décisionsAnnée 2007 490 8,08 % 4Année 2008 706 8,74 % 1Année 2009 685 10,09 % 1Année 2010 185 10,5 % 1

Source : Rapports d’activité de la HAS ; années 2010 – 2009 et 2008

[209] En moins de 10 ans, les établissements français ont donc du prendre un véritable tournant et conjuguer respect de la réglementation et démarche qualité. Le respect de la réglementation reste incontournable dans le sens où il favorise par le respect d’un socle de règles communes, la mise en place d’un cadre homogène de pratiques qui permettent d’assurer la sécurité sanitaire. Les missions d’inspection des ARS et singulièrement des pharmaciens inspecteurs de santé publique contrôlent ces exigences et doivent se poursuivent. Parallèlement, les procédures d’accréditation puis de certification menées par la HAS ont permis de promouvoir la démarche qualité. Le niveau d’appropriation de cette démarche est encore inégal même si la publicité de ses résultats constitue un aiguillon fort de son développement. Il faut également tenir compte de l’espacement entre deux visites de certification pour un même établissement (4 ans environ) qui montre que la certification ne peut pas être l’unique outil de la démarche qualité.

[210] Les exigences de la réglementation et de la certification apparaissent parfois comme hétérogènes. Dans l’organisation du circuit du médicament, la dispensation nominative et l’analyse pharmaceutique sont des exigences réglementaires que nombre d’établissements ne parviennent pas à satisfaire. La certification V2010 exige un simple engagement de l’établissement dans ces deux domaines. La HAS privilégie une approche pragmatique basée sur les constats de terrain mais en gardant, dans le cadre d’une approche graduelle, l’objectif d’atteindre à terme le respect de la réglementation. Pour la mission, cette approche nécessiterait d’être différenciée. Il faut progresser sur l’analyse pharmaceutique qui est un vecteur essentiel de sécurité et d’amélioration de la qualité et dont il convient de maintenir le niveau d’exigence réglementaire. Cette exigence doit être plus forte dans le cadre de la certification dès lors que la prescription est informatisée. En revanche, l’exigence d’une délivrance nominative à 100 % doit être révisée, aussi bien dans la procédure de certification que dans la réglementation.

3.1.3.2. Un contexte international favorable

[211] L’OMS a lancé en 2006 le projet dit « High 5s » pour répondre aux problèmes majeurs qui se posent aux patients en matière de sécurité. L’objectif est d’atteindre un niveau significatif, mesurable et pérenne d’élimination de cinq problèmes très répandus de sécurité des patients dans des hôpitaux sélectionnés. Deux des cinq problèmes portent sur le circuit du médicament.

[212] Le premier concerne les médicaments concentrés injectables, le deuxième l’exactitude des ordonnances aux points de transition dans le processus de soins. La solution normalisée portant sur ce dernier projet est actuellement en cours de test dans des hôpitaux français sous l’égide de la Haute autorité de santé. Le test en cours débuté en 2010 devrait durer 5 ans.

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[213] Le conseil de l’Union européenne a de son côté émis le 9 juin 2009 des recommandations relatives à la sécurité des patients.

3.1.3.3. L’importance des politiques de qualité et de sécurité dans la loi HPST

[214] La loi HPST inscrit dans le code de santé publique l’obligation pour les établissements de santé de mener « une politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins et une gestion des risques visant à prévenir et traiter les effets indésirables liés à leur activité ». Il s’agit d’un levier fort qui permet d’affirmer l’importance de la qualité et de sécurité au sein des établissements de santé.

[215] Même si la politique de gestion des risques s’inscrit dans la continuité de la politique de qualité, elle introduit un nouveau bouleversement qui va demander un profond changement de culture dans l’hôpital. Il s’agit de passer d’une politique de normalisation (respect des procédures, des référentiels, de bonnes pratiques) à une politique d’analyse des risques, analyse a priori des points de faiblesse ou a posteriori des erreurs.

[216] Dans le même temps, la loi HPST a rénové la gouvernance hospitalière et bousculé les rôles traditionnellement dévolus à chacun :

le directeur de l’établissement « décide, conjointement avec le président de la CME de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins » ;

le président de la CME « est chargé conjointement avec le directeur d’établissement de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins…Il est chargé du suivi de cette politique…Il veille à la mise en œuvre des engagements de l’établissement en matière d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins qui résultent notamment des inspections des autorités de tutelle et de la procédure de certification » ;

la CME contribue « à l’élaboration de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins » notamment en ce qui concerne la politique du médicament. Elle doit proposer au directeur un programme d’actions assorti d’indicateurs de suivi. Ce programme doit intégrer les exigences de la certification, du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens de l’établissement et du contrat de bon usage des médicaments.

[217] De nombreux autres acteurs interviennent comme le conseil de surveillance ou la commission des soins infirmiers qui donnent « leur avis » sur les questions de qualité et de sécurité ou le comité technique qui est obligatoirement « consulté ».

[218] Le rôle de la CME tel que décrit à l’article L. 6144-1 du CSP est diversement interprété. La contribution « à l’élaboration de la politique d’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins » devient la première mission de la CME alors que, un peu paradoxalement, les obligations de créer des sous commission spécialisées comme celle de disposer d’une COMEDIMS ont été supprimées. Cette nouvelle mission donne à la CME une responsabilité en termes d’objectifs sans que les moyens soient mis à sa disposition. Elle pose par ailleurs la question de l’articulation avec les autres acteurs, son président au premier chef mais également le directeur, la direction qualité et la direction des soins en particulier.

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3.2. Le pilotage régional est encore immature face à la fragmentation des acteurs nationaux

3.2.1. Les ARS, nouvel acteur de la politique du médicament en région

3.2.1.1. Un nouvel acteur régional sans IRP

[219] La constitution des agences régionales de santé (ARS), prévue par la loi HPST68, est actuellement en phase de montée en charge. L’ampleur du champ d’action de ces nouvelles agences rend complexe la stabilisation de leur fonctionnement. Certaines n’ont pas encore réellement atteint leur « vitesse de croisière », ce qui, du point de vue des établissements et des professionnels, peut avoir des effets déroutants. La compréhension mutuelle entre personnels de l’ARS et des hôpitaux paraît toutefois encore la règle, chacun étant conscient que les réformes importantes en cours dans chacune des structures expliquent certaines difficultés.

[220] Avant leur création, les agences régionales de l’hospitalisation (ARH) pouvaient s’appuyer sur des structures dédiées aux questions pharmaceutiques et biologiques, aux contours bien identifiés, les Inspections régionales de la pharmacie (IRP) positionnées au sein des directions régionales des affaires sanitaires et sociales. L’autonomie conférée aux ARS, notamment en matière d’organisation interne, a conduit certaines d’entre elles (environ la moitié) à conserver une structure dédiée à la pharmacie et aux produits de santé, les pharmaciens inspecteurs (PHISP) étant pour la plupart regroupés, le cas échéant avec des médecins inspecteurs (MISP), voire avec des médecins ou pharmaciens-conseil de l’assurance maladie, au sein de ses pôles ou directions, qui assurent la transversalité avec les autres directions de l’ARS et animent, en lien avec l’OMEDIT (voir infra), les travaux régionaux relatifs aux médicaments.

[221] D’autres ont a contrario choisi de répartir les pharmaciens dans les différentes directions de l’ARS, considérant que leurs compétences transversales sont utiles sur des sujets aussi variés que la veille et la sécurité sanitaire, la surveillance épidémiologique ou la maîtrise des dépenses de santé. Il peut en résulter une perte de cohérence et de structuration des missions d’inspection contrôle, rendant complexe la réalisation de plans d’inspections annuels.

3.2.1.2. La plus value encore inégale des OMEDIT

[222] En 2001, la région PACA expérimente une nouvelle structure régionale : l’observatoire des médicaments et des innovations thérapeutiques, OMIT. En 2002, un observatoire interrégional, partagé entre la Bretagne et les Pays de la Loire, est constitué sur le même modèle. Rapidement devenus des acteurs importants en cancérologie, les OMIT PACA69 et Bretagne-Pays de la Loire ont représenté un exemple pour la mise en place, à l’initiative de l’INCa sur des crédits du plan cancer70, d’observatoires sur l’ensemble du territoire, par la suite appelés OMEDIT (observatoires des médicaments, des dispositifs médicaux et des innovations thérapeutiques).

68 L’ARS rassemble au niveau régional les ressources de l’Etat et de l’Assurance maladie, et regroupe en une seule entité plusieurs organismes chargés des politiques de santé dans les régions et les départements : directions régionales et départementales des affaires sanitaires et sociales (DRASS et DDASS), agences régionales de l’hospitalisation (ARH), groupements régionaux de santé publique (GRSP), Unions régionales des caisses d’assurance maladie (URCAM), missions régionales de santé (MRS) et volet hospitalier de l’assurance maladie, composé d’une partie du personnel des caisses régionales d’assurance maladie (CRAM), du régime social des indépendants (RSI), de la Mutualité sociale agricole (MSA), des directions régionales du service médical (DRSM). 69 Provence-Alpes-Côte-D’azur 70 La dotation des OMEDIT est aujourd’hui financée sur le volet aide à la contractualisation des MIGAC

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[223] Ces OMEDIT ont pour la plupart été créés par les ARH, mais certains sont issus de comités préexistants (en particulier Centre, Aquitaine et PACA), pionniers en termes de structures régionales de définition et suivi d’une politique des produits de santé structurée (groupes de travail définissant et actualisant des référentiels médicaments et dispositifs médicaux, suivi des consommations, début de démarches comparatives de type « benchmarking », etc.)

[224] En 2005, un décret codifié à l’article D. 162-1671 du CSS a donné une assise juridique à ces OMEDIT, positionnés « auprès des ARS » et dont les principales missions sont d’assurer un suivi et une analyse des pratiques de prescription au niveau régional, d’organiser des échanges réguliers sur les pratiques relatives à l'usage des produits de santé et de créer du lien entre professionnels de santé, hospitaliers essentiellement. Ils ont cinq grands champs d’action : observer, analyser, anticiper, permettre la concertation permanente, restituer et informer. Ils établissent le modèle de rapport d'étape annuel des contrats de bon usage (CBU) et répertorient les protocoles thérapeutiques relatifs aux médicaments financés en sus des groupements homogènes de séjours (hors GHS).

[225] Les OMEDIT, selon le dynamisme de leur coordonnateur et de son équipe, mettent en place des commissions et groupes de travail auxquels participent médecins, pharmaciens et autres professionnels concernés par les thèmes étudiés, pour alimenter l’expertise, informer, former, tant au niveau local des établissements qu’en remontée au niveau national. Des thèmes variés sont étudiés et font l’objet de recommandations, telles que le bon usage des produits de santé et la sécurisation de leur circuit (bonnes pratiques de prescription, gestion des traitements personnels des patients, continuité ville-hôpital…), l’évaluation des suites données par les médecins aux analyses pharmaceutiques, la robotisation, etc.

[226] La politique de suivi du circuit du médicament passe donc aujourd’hui par les OMEDIT, en lien avec les ARS. Ils jouent un rôle moteur et accompagnent, suivent et contrôlent l’effectivité de la déclinaison sur le terrain des engagements des établissements de santé.

3.2.1.3. Les atouts et limites du contrat de bon usage

[227] Au travers des CBU72, les établissements s’engagent à améliorer la qualité et la sécurité de la prise en charge médicamenteuse et du circuit du médicament, au travers d’actions définies régionalement (ARS/OMEDIT, en concertation avec les professionnels des établissements) dans les domaines de l'organisation, l'évaluation, les moyens techniques, le médico-économique, la pluridisciplinarité.

[228] Le respect de ces engagements est évalué annuellement au travers de rapports d'étape fournis par les établissements, mais aussi des résultats des contrôles de l’inspection régionale et de l’Assurance maladie menés sur site, ainsi que de l’accréditation, devenue certification par la HAS.

[229] Fin 2010, 1373 établissements de santé ont signé un contrat de bon usage (CBU).

Tableau 2 : Bilan des CBU

Source : DGOS/PF2 – (OQN : objectif quantifié national et DG : dotation globale)

71 Modifié par le décret n°2010-344 du 31 mars 2010 (art. 323) 72 Introduits par l’article L. 162-22-7 et définis aux articles D.162-9 et suivants du CSS

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[230] En 2009, 19 ARH ont appliqué une réduction du taux de remboursement des produits de la liste en sus, le nombre d’établissements sanctionnés en 2009 étant supérieur à 2008. Le montant financier des sanctions a par ailleurs augmenté : 2,2 M € en 2009 contre 1,3 M € en 2008.

[231] A noter qu’en l’absence de CBU (établissements hors MCO) voire en complément de celui-ci, la certification ISO peut être utile pour compléter la démarche HAS. Elle conduit l’établissement à auditer le circuit du médicament, à rédiger un manuel qualité et à décrire précisément chacun des processus engagés dans ce circuit et les actions à mettre en œuvre

Un aiguillon incontestable de l’amélioration de la qualité de l’organisation du circuit

[232] Les OMEDIT ont identifié de multiples bénéfices de la mise en œuvre des CBU de première, ou pour certains de deuxième génération (selon la durée choisie régionalement, qui peut aller de 3 à 5 ans) : la réunion régulière du COMEDIMS, la généralisation de la tenue d’un livret thérapeutique (qui est un outil d’amélioration tant de la qualité que de l’efficience), la nécessaire collaboration rapprochant médecins/pharmaciens/équipes de soins, l’amélioration de la traçabilité de la prescription à l’administration, le développement de l’analyse pharmaceutique au moins par priorité, de la dispensation nominative (au minimum médicaments hors GHS, dérivés du sang, anticancéreux antibiotiques), implication de tous dans le suivi spécifique des médicaments hors GHS (traçabilité, conformité aux référentiels), etc.

Des limites à prendre en compte pour la conception des prochains contrats

[233] L’informatisation du circuit du médicament n’a pas connue les progrès que la fixation d’indicateurs ambitieux aurait pu faire espérer. En premier lieu, de nombreux établissements n’ont pas commencé à informatiser leur circuit ou n’ont informatisé qu’une ou deux étapes. Peu d’établissements ont une couverture complète. Parmi eux, les établissements ayant œuvré à l’intégration à la pratique courante de l’utilisation du système d’information pour le circuit du médicament (prescription, dispensation, administration), sont aujourd’hui confrontés à la nécessaire intégration du dossier patient, ce qui génère, outre de grandes difficultés, des frustrations et démotivations pouvant être porteuses de nouveaux risques. Or, cette évolution est impérative, ne pas la mettre en œuvre aujourd’hui fait courir des risques d’impasse à court ou moyen terme.

[234] Il est nécessaire de développer des systèmes d’information performants pour garantir la qualité des soins incluant les flux logistiques et la composante systémique de prise en charge médicamenteuse. Il ne suffit pas pour ce faire d’inscrire un indicateur dans les CBU. Les difficultés et les retards s’expliquent par des défauts internes d’organisation et par le manque d’appui extérieur personnalisé.

[235] La politique de gestion du risque médicamenteux est mal appréhendée au travers d’indicateurs. Le changement de comportement des acteurs dans le cadre de la déclaration des erreurs va logiquement avoir tendance à augmenter le nombre de déclarations sans pour autant signifier une augmentation des erreurs et une dégradation des conditions de sécurité.

[236] Les indicateurs de régulation des consommations des produits financés en sus des groupements homogènes de séjour (hors GHS) sont imparfaits. Ils ne rendent pas compte du bon usage des médicaments dans des indications innovantes. La formulation de la justification des situations hors référentiels de bon usage (hors autorisations de mise sur le marché AMM et hors protocoles thérapeutiques temporaires PTT) est souvent trop vague et donc difficilement contrôlable.

[237] La démarche d’évaluation des pratiques reste encore liée à des dynamiques ponctuelles. Peu d’outils permettent de développer les autoévaluations et valoriser le développement professionnel continu.

[238] Le CBU ne permet pas de s’adapter à des activités très spécialisées comme par exemple la mission a pu le constater au CLCC d’Angers.

[239] Enfin, malgré le foisonnement d’indicateurs au niveau régional, il n’existe pas de valorisation nationale de ces données.

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3.2.2. Une multitude d’acteurs nationaux avec des objectifs propres

[240] De nombreux acteurs interviennent dans le champ du pilotage de la politique du médicament à l’hôpital, d’une part sur la définition des orientations et des règles, d’autre part sur le médicament en tant que produit et, enfin sur l’organisation des services de soins et du circuit du médicament clinique et logistique. La lisibilité du pilotage national et, surtout, la cohérence des interventions successives de ces différents acteurs, obéissant chacun à des objectifs propres sur un même champ, sont souvent mal comprises par les acteurs de terrain.

3.2.2.1. Des compétences partagées entre plusieurs directions 73

[241] S’agissant du circuit du médicament et de la politique du médicament à l’hôpital, la direction générale de l’organisation des soins (DGOS) en est le pilote naturel. Elle est « responsable » de l’élaboration des mesures d’organisation et de fonctionnement applicables dans ces établissements ainsi que du pilotage de leur performance. Elle a également compétence pour toute question relative à la détermination et à l'emploi des ressources nécessaires à l'offre de soins, notamment en matière de ressources humaines, de régulation financière ou d'organisation territoriale. Ce positionnement qui semble naturel est rendu peu lisible par l’intervention d’une part au sein même de la DGOS de plusieurs bureaux et d’autre part des autres directions d’administration centrale.

DGOS et DGS interviennent conjointement en matière de qualité et de sécurité des soins

[242] Si la DGOS est chargée de la réglementation relative aux pharmacies, elle veille à leur mise en œuvre et « assure » la qualité et la sécurité des soins conjointement avec la direction générale de la santé (DGS) qui « veille » à la qualité et la sécurité des soins et élabore notamment la politique de prévention des risques iatrogènes non infectieux. De ce fait nombre de documents adressés aux établissements de sante sur la qualité et la sécurité des soins sont cosignés.

Trois directions sont compétentes en matière de régulation des prix

[243] La réglementation relative à la prise en charge du médicament par l’assurance maladie, relève de la DSS conjointement avec la DGS qui instruit, en outre, les décisions en matière de rétrocession hospitalière de médicaments et est membre du comité économique des produits de santé (CEPS), dont le secrétariat est assuré par la DSS, et du Conseil national de l’hospitalisation,74 piloté par la DGOS.

[244] La DGOS, quant à elle, « assure » la conception, la mise en œuvre et le suivi des règles de tarification et de régulation financière des établissements de santé, publics et privés et est responsable, dans ce cadre, du développement de l’utilisation efficiente des systèmes d’information par les établissements de santé.

3.2.2.2. Un grand nombre d’autres acteurs

[245] La HAS, l’Afssaps et l’institut national du cancer (INCa) ont compétence sur le champ du médicament en tant que produit et de sa prise en charge par l’Assurance maladie et publient également des règles de bonnes pratiques professionnelles.

[246] L’évaluation scientifique du service médical rendu par les médicaments, les dispositifs médicaux et l’intérêt médical des actes professionnels, est confiée à la HAS qui propose ou non leur remboursement par l’assurance maladie et a également pour mission de promouvoir les bonnes pratiques et le bon usage des soins et d’en améliorer la qualité. Elle assure la certification des établissements de santé prévue par l’article L. 6113-3 du CSP.

73 Les attributions des directions sont fixées par l’article D.1421-2 du CSP pour la DGOS, l’article R1421-1 pour la DGS et l’article 6 du décret no 2000-685 du 21 juillet 2000, modifié, relatif à l'organisation de l'administration centrale du ministère de l'emploi et de la solidarité et aux attributions de certains de ses services pour la DSS. 74 Crée par l'article L. 162-21-3 du CSS

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[247] L’Afssaps a pour mission d’évaluer les bénéfices et les risques liés à l’utilisation des produits de santé et de contribuer ainsi, par ses diverses formes d’intervention, à ce que les risques inhérents à chaque produit puissent être identifiés, analysés et maîtrisés dans toute la mesure du possible, en prenant en compte les besoins thérapeutiques et les impératifs de continuité des soins. Sans préjudice des règles sur la pharmacovigilance, l’agence a ouvert en 2005 le guichet des erreurs médicamenteuses.

[248] L'INCa, dans son rôle d’observation et d’évaluation du dispositif de lutte contre le cancer, définit notamment les référentiels de bon usage des médicaments hors GHS utilisés en cancérologie.

[249] La CNAMTS75, gestionnaire du risque, assume le coût du remboursement des médicaments et a pour préoccupation première la maîtrise de l’évolution des dépenses.

[250] Par ailleurs, trois agences participent au pilotage de la politique du médicament dans les établissements de santé sur la gestion des risques et sur les systèmes d’information :

l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) assure l’appui et l’accompagnement des établissements et des ARS particulièrement sur les questions de sécurité des organisations de soins, de retours d’expériences et d’informatisation du circuit du médicament ;

l’Agence des systèmes d’information partagés de santé (ASIP)76 est chargée de la réalisation et du déploiement du Dossier Médical Personnel et de la certification, la production, la gestion et le déploiement de la carte de professionnel de santé77. Elle assure la définition, la promotion, l’homologation et la mise en œuvre, de référentiels, standards, produits ou services contribuant à l’interopérabilité, à la sécurité et à l’usage des systèmes d’information de santé78 ;

l’Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH) contribue au suivi et à l’analyse financière et médico-économique de l’activité des établissements de santé.

[251] Il convient de rappeler que si l’Institut de veille sanitaire (InVS) n’a pas, quant à lui, de rôle direct sur la politique du médicament, il est chargé de rassembler, analyser et actualiser les connaissances sur les risques sanitaires, leurs causes et leur évolution. A ce titre il a mené l’expérimentation sur la déclaration des événements indésirables graves prévue par l’article 11 de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004.

3.2.2.3. Les contrats de bon usage, exemple de la multiplicité des donneurs d’ordre

[252] La réglementation relative aux contrats de bon usage (CBU) des médicaments et des produits et prestations est inscrite au sein du code de la sécurité sociale79. Ces contrats engagent les établissements de santé quant au respect d’indicateurs de qualité qui portent à la fois sur des bonnes pratiques de prescription et sur la sécurisation du circuit du médicament en contrepartie du remboursement intégral des produits de la liste en sus.

75 cf. sur son site le guide des «Références juridiques - Produits de santé »75 qui recense l'ensemble des instructions relatives aux règles de prescription, de délivrance et de leur prise en charge. 76 Le Conseil d’administration du Groupement d’intérêt public Dossier Médical Personnel (GIP-DMP) a voté le 16 juillet 2009 la transformation de sa convention constitutive, portant ainsi création de l’ASIP 77 ainsi que des dispositifs assurant les fonctions d’identification, d’authentification, de signature et de chiffrement permettant aux professionnels de santé de faire reconnaître, dans les conditions de sécurité et de confidentialité requises, leur identité et leurs qualifications professionnelles par les systèmes d’information et d’échanges électroniques qu’ils utilisent. 78 Elle peut intervenir en appui des établissements pour accompagner des projets publics et privés sous forme de conventions d’assistance à maîtrise d’ouvrage, de partenariat ou de mise à disposition de services. 79 Articles D. 162-9 et suivants du CSS

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[253] Instrument de maîtrise des dépenses liées à la liste en sus, les CBU sont à ce titre portés par l’Assurance maladie et la DSS. Instrument incitatif de la politique de respect des référentiels et de sécurisation du circuit du médicament à l’hôpital, les CBU mobilisent également la DGOS, l’HAS et l’InCA. Les professionnels de terrain avouent une incertaine incompréhension quant aux modalités d’utilisation du CBU. Les sanctions peuvent concerner des établissements de santé qui respectent les référentiels d’usage des produits de la liste en sus mais n’arrivent pas à respecter les indicateurs qualité sur le circuit du médicament, indicateurs qui peuvent de surcroît diverger de ceux de la visite d’accréditation.

[254] En raison de la croissance persistante des dépenses au titre de la liste en sus, une régulation supplémentaire est venue s’ajouter aux CBU. La maîtrise médicalisée de ces dépenses a donc trouvé ses limites. Inscrit dans la LFSS pour 2009, un taux prévisionnel de dépenses est désormais fixé au niveau national et les ARH (désormais ARS) concluent des plans d’actions avec les établissements dont la croissance des dépenses est supérieure au taux national fixé (10 % en 2009, 8% en 2010 et 3 % en 2011). L’accès équitable à l’innovation thérapeutique est aujourd’hui remis en question.

[255] On peut comprendre les interrogations des établissements de santé quant à l’articulation entre ces deux dispositifs et la superposition des instruments visant dans un même temps à maîtriser les dépenses et améliorer la qualité des pratiques. La logique est celle de sanctions financières et non pas celle d’une valorisation des efforts accomplis.

[256] Aujourd’hui, alors que l’attention se porte sur l’évolution des dépenses de ville liées aux prescriptions hospitalières, et que de nouveaux contrats vont voir le jour, les objectifs poursuivis par les pouvoirs publics sont de moins en moins lisibles.

3.3. Un cadre juridique complexe source d’interprétations diverses

[257] Le cadre juridique relatif au circuit du médicament à l’hôpital est important et contraignant eu égard à l’impératif de qualité et de sécurité. Toutefois ce cadre qui a évolué au gré des réformes législatives successives est complexe et sujet à interprétations.

[258] Les annexes 8, 9 et 10 sur les référentiels juridiques et les données portant sur les personnels des PUI détaillent ce cadre.

3.3.1. Les autorisations de PUI, confrontées à la réalité des coopérations

3.3.1.1. L’implantation des PUI

[259] Les règles de création des PUI et singulièrement celles qui concernent le lieu d’implantation de ses locaux sont complexes. Des articles embrassent des dispositions concernant tout à la fois des établissements et des structures de coopération (GCS et SIH) et de ce fait, pour répondre à des situations spécifiques, d’autres articles dérogent aux principes posés par les précédents.

Les notions d’établissement, de site géographique, de lieu d’implantation et de locaux se télescopent

[260] Si l'article L. 5126-1 stipule que les établissements de santé, les groupements de coopération sanitaire « peuvent disposer d'une ou plusieurs pharmacies à usage intérieur », les articles R. 5126-3 et R. 5126-480 précisent qu'une seule PUI peut être créée sur un même site géographique d'implantation d'un établissement de santé dans lequel sont traités des malades – le site géographique d’implantation de l’établissement s’entendant de tout lieu où sont installées des structures habilitées à assurer des soins et non traversé par une voie publique.

80 cf. tableau de synthèse dans annexe 8 / Référentiel juridique sur la politique du médicament dans les établissements de santé et les PUI

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[261] Toutefois, la PUI créée au sein d’un établissement de santé peut disposer de locaux implantés sur plusieurs emplacements distincts, situés dans un ou plusieurs sites géographiques et desservir plusieurs sites géographiques.

Des dispositions dérogatoires existent déjà

[262] De plus l'article R. 5126-5 du CSP prévoit par dérogation qu’une PUI peut être implantée en tout lieu dépendant d'un établissement d'un GCS ou d’un SIH mais exclusivement pour l’approvisionnement des autres PUI de cet établissement ou des membres du syndicat ou du groupement, la stérilisation des dispositifs médicaux, la rétrocession au public des médicaments et des dispositifs médicaux stériles, leur dispensation à des patients pris en charge par des établissements d’hospitalisation à domicile et des unités de dialyse à domicile.

[263] Dans le contexte de la loi HPST qui affiche la volonté du législateur de faciliter les coopérations entre établissements de santé et dans lequel il est en effet possible de constituer un GCS de moyens titulaire d’une autorisation de PUI, ces dispositions mériteraient d’être simplifiées. La notion de site géographique gagnerait à être confrontée aux évolutions socio-économiques et à la réalité d’implantation des établissements de santé et des coopérations actuelles ou à venir.

3.3.1.2. L’obligation pour une PUI de remplir l’ensemble des missions

[264] L’article L. 5126-5 précise que la PUI « est chargée de répondre aux besoins pharmaceutiques de l'établissement » et en particulier qu’elle doit « assurer, dans le respect des règles qui régissent le fonctionnement de l'établissement, la gestion, l'approvisionnement, la préparation, le contrôle, la détention et la dispensation des médicaments, produits ou objets mentionnés à l'article L. 4211-1 ainsi que des dispositifs médicaux stériles et, le cas échéant, des médicaments expérimentaux tels que définis à l'article L. 5121-1-1 et d'en assurer la qualité ».

[265] Il faut s’interroger sur les freins que certaines de ces dispositions représentent par rapport aux possibles coopérations et spécialisations offertes par des regroupements d'activités. A titre d’exemple, les préparations de chimiothérapie, nécessitent un haut niveau de spécialisation et de technicité et pourraient gagner à être effectuées dans des PUI qui ne rempliraient pas, par ailleurs, l’ensemble des missions obligatoires (article L. 5126-5 CSP).

[266] A cet égard, les nombreuses dispositions introduites par la loi HPST pour promouvoir la coopération entre les établissements de santé devraient permettre de faciliter la mise en place de ce type de spécialisation sans passer par la création éventuelle de structures plus lourdes telles que les établissements pharmaceutiques.

3.3.2. Une réglementation qui donne lieu à des interprétations diverses

[267] La lecture du CSP, le rapprochement des dispositions législatives et réglementaires sur les PUI et leur confrontation aux réalités du terrain font émerger des failles qui génèrent des interprétations divergentes et peuvent mettre les professionnels en difficulté.

3.3.2.1. L’analyse pharmaceutique

[268] Les articles L. 5121-5 et R. 4235-48 stipulent que l’acte de dispensation par le pharmacien doit inclure « l'analyse pharmaceutique de l'ordonnance médicale si elle existe ».

[269] Le concept d’analyse pharmaceutique peut s’entendre de différentes façons. Cette analyse peut relever du simple contrôle de conformité à la réglementation, notamment quant à la date de l’ordonnance et à l’identification du prescripteur, du patient et des médicaments. Elle peut aller jusqu’à une véritable expertise pharmacologique de la prescription (contre-indications, associations déconseillées, redondances, adaptation de la forme pharmaceutique au patient). Dans ce dernier cas, le pharmacien est amené à replacer la prescription dans un contexte plus large qui n’est plus celui-ci stricto sensu de l’ordonnance et dans l’idéal à disposer d’une vue globale du patient, de l’historique de ses traitements, de l’accès à son dossier médical et de ses données biologiques

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contextuelles. Ces informations, même quand l’informatisation du circuit du médicament est une réalité, sont rarement disponibles.

[270] Par ailleurs, rien n’est dit explicitement sur la temporalité de l’analyse pharmaceutique par rapport au moment où s’effectue la délivrance, mais les objectifs de vérification de la conformité et de sécurisation du soin médicamenteux permettent de penser qu’idéalement l’analyse devrait précéder la délivrance.

[271] Toutefois la mission a pu constater que l’atteinte d’un objectif de validation a priori de 100 % de toutes les prescriptions quelle que soit l'activité médicale de l'établissement, est irréalisable sauf à mettre un pharmacien derrière chaque prescripteur. Il faut rappeler également que la responsabilité de la prescription repose en premier lieu sur le médecin.

[272] Enfin, dans certains hôpitaux cette analyse est dite « validation pharmaceutique » ce qui peut être parfois source de tensions avec les prescripteurs, même si la mission a constaté, dans les établissements où le dialogue s’est instauré au travers de la mise en place d’une prescription informatisée, la satisfaction de la majorité des médecins rencontrés d’avoir, en retour de leur prescription, des opinions pharmaceutiques dont ils reconnaissent l’intérêt. Ce terme de « validation » apparaît impropre.

[273] L’analyse juridique publiée au bulletin de l’ordre des pharmaciens81, se fait l’écho des incertitudes précédemment décrites. Entre la sécurisation du soin médicamenteux qui est un minimum et la réalisation de l’expertise de l’ordonnance qui serait optimale, la marge est importante.

[274] Le terme d'« analyse » ainsi que sa temporalité et son contenu devraient être précisés par la réglementation d’autant que l’analyse pharmaceutique engage la responsabilité du pharmacien. Sa réalisation peut avoir de lourdes conséquences puisque un pharmacien peut être amené à refuser de dispenser un médicament lorsque l’intérêt du patient paraît l’exiger (article R. 4235-61 du CSP). Il est donc important que cette notion soit clarifiée.

3.3.2.2. Le contrôle effectif

[275] L’article L. 4241-13 stipule que les préparateurs en pharmacie hospitalière « exercent leurs fonctions sous la responsabilité et le contrôle effectif d'un pharmacien ». Il reprend pour partie les mêmes dispositions que pour les préparateurs des officines82.

[276] Ce texte est le corollaire du devoir d’exercice personnel du pharmacien défini par les articles L. 5126-14 et R. 4235-13 : il doit «exécuter lui-même les actes professionnels, ou à en surveiller attentivement l’exécution s’il ne les accomplit pas lui-même »83 et de la règle fixée par l’article R. 5126-14 qui dispose qu’une PUI ne peut fonctionner sur chacun de ses sites d’implantation qu’en présence du pharmacien chargé de sa gérance ou de son remplaçant ou d’un pharmacien adjoint.

[277] Cependant la notion de contrôle effectif est diversement interprétée :

elle n’est pas définie par les textes réglementaires ni par des textes d’interprétation ;

81 Bulletin de l’ordre 375 – l’acte pharmaceutique – Francis Megerlin 82 Article L.4241-1 « Les préparateurs en pharmacie sont seuls autorisés à seconder le titulaire de l'officine et les pharmaciens qui l'assistent dans la préparation et la délivrance au public des médicaments … Ils assument leurs tâches sous la responsabilité et le contrôle effectif d'un pharmacien. Leur responsabilité pénale demeure engagée. » 83 En outre l’article 7 de l’arrêté du 31 mars 1999 dispose que les médicaments sont délivrés à l’unité de soins par des pharmaciens ou sous leur responsabilité par « des internes en pharmacie et des étudiants de cinquième année hospitalo-universitaire ayant reçu délégation du pharmacien dont ils relèvent » et « des préparateurs en pharmacie sous le contrôle effectif des pharmaciens.

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la jurisprudence est quasi inexistante, particulièrement pour l’exercice hospitalier. L’on peut citer un arrêt de la Cour d’appel d’Amiens du 19 novembre 2008, qui évoque la notion de « contrôle serré » mais, en l’espèce, il s’agissait d’un pharmacien d’officine vis-à-vis d’une employée non titulaire du diplôme de préparateur en pharmacie ;

le ministère chargé de la santé a une interprétation stricte de la notion qui apparaît dans une réponse à une question parlementaire écrite en 200584. « Les préparateurs en pharmacie exerçant dans une pharmacie à usage intérieur ne peuvent pas remettre le semainier au personnel infirmier sans que les pharmaciens en aient contrôlé le contenu. Une telle pratique serait contraire à la législation en vigueur » (Il est utile de noter que ni la question ni la réponse ne tiennent compte de l’introduction dans le CSP de la qualification de préparateur en pharmacie hospitalière intervenue en 2004).

elle varie selon les professionnels de santé que la mission a pu interroger entre l’affirmation stricte de l’obligation pour le pharmacien gérant de contrôler tous les actes du préparateur et une conception plus souple - et sans doute plus réaliste- imposant seulement au pharmacien d’être présent pendant les heures de travail des préparateurs afin qu’ils puissent, en cas de besoin, s’adresser au pharmacien. Entre les deux, certains procèdent à des contrôles aléatoires de la qualité du travail des préparateurs.

[278] Dans tous les cas, l’absence de définition normée génère des inquiétudes pour les pharmaciens et les préparateurs en pharmacie hospitalière.

[279] Les premiers qui, afin d’organiser le fonctionnement de leur PUI, ont mis en place des fiches de poste établies par le chef de service de la pharmacie (et validées par la direction de l’établissement) en fonction de la qualification et de l’expérience professionnelle des PPH ou des contractuels craignent d’engager leur responsabilité.

[280] Les seconds manifestent également la crainte d’aller au-delà de leurs missions, crainte qui semble justifiée par la position des juges. Par exemple, en 2008, le tribunal correctionnel d’Avignon a mis en cause des PPH pour exercice illégal de la pharmacie parce qu’ils avaient délivré des médicaments hors la présence d’un pharmacien.

[281] Au-delà de ce contrôle effectif qui devrait faire l’objet d’une définition par la DGOS, c’est aussi la question du temps de présence du pharmacien qui doit être revu en fonction des modalités de fonctionnement de la PUI (un ou plusieurs sites, nombre de pharmaciens …).

[282] Le temps de travail pharmacien et préparateur est en effet un élément important de la sécurisation du circuit du médicament. S’agissant des pharmaciens, l'article R.5126-42 fixe le temps de présence du pharmacien gérant à l'équivalent au minimum de cinq demi-journées par semaine85. Un ou plusieurs pharmaciens adjoints86 peuvent assister le pharmacien gérant lorsque l'importance de l'activité de la PUI l’exige. Pour les établissements de santé, le nombre de ces pharmaciens est fixé en tenant compte du contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens87, et en prenant en considération l'amélioration de la qualité du fonctionnement de la pharmacie, notamment à l'issue de la certification (lorsque la pharmacie dispose d'assistants associés ou de praticiens attachés associés, il en est tenu compte pour la détermination de ce nombre)88.

84 Question écrite n° 60478, 12ème législature, JO Assemblée nationale du 4 octobre 2005 85 Toutefois, dans les établissements médico-sociaux, ce temps de présence peut être réduit compte tenu des besoins des personnes accueillies, sans qu'il puisse être inférieur à l'équivalent de deux demi-journées par semaine. 86 Articles R.5125-34 et suivant du CSP 87 Prévu à l'article L.6114-1 88 Articles R.5126-45 et R.56126-46

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[283] L'importance de l'activité de la PUI ne peut se résumer au seul nombre de lits. Elle peut être très différente selon le type d’activité de l’établissement (MCO ou SSR, activités spécialisées ou couvrant un champ thérapeutique très large, implantation géographique et environnement, etc.). Il importe en outre de tenir compte de l'évolution des qualifications des préparateurs en pharmacie hospitalière et de la présence d'autres professionnels au sein de la pharmacie (personnels administratifs et techniques89).

[284] Une dynamique positive est actuellement constatée dans certains petits établissements, privés et publics, où l'implication des directeurs sur la politique du médicament au sein de leur structure, les a conduit à procéder à des recrutements de pharmaciens à temps plein. Les contrats de bon usage et la certification de la HAS ont constitué des moteurs à cet égard.

3.3.2.3. Le pharmacien gérant

[285] Selon les textes actuels, les PUI des établissements, quel que soit leur statut, sont dirigées par un pharmacien gérant. Cette notion de gérance est historique : elle date de l’entrée des pharmaciens d’officine à l’hôpital comme gérant d’un fonds qui ne leur appartient pas, en tant que « gardien des poisons ». Cette notion qui serait justifiée par la différenciation entre « pharmacien propriétaire » et « pharmacien salarié » 90 apparaît peu pertinente, notamment dans le domaine de la responsabilité.

[286] Dans les établissements privés, les pharmaciens continuent à signer un contrat de gérance91 précisant le cadre de leurs interventions92 et de leurs obligations93.

[287] Dans les établissements publics, cette notion porte à confusion notamment quant aux responsabilités et rôle que le CSP y attache. La responsabilité du gérant sur l’organisation et les actes de la PUI est de fait puisqu’il est le chef du service. Elle n’est pas exclusive, dans le respect des règles déontologiques ou professionnelles du PH, de la responsabilité du directeur d’établissement. Ce dernier doit donner à la PUI les moyens de fonctionner et vérifier que la qualité et la sécurité du circuit du médicament sont assurées.

[288] Les missions du pharmacien hospitalier évoluent, comme celles de l’officinal inscrites dans la loi HPST, vers une meilleure utilisation des compétences spécifiques des pharmaciens au service des patients. Le dénominatif de gérant renvoie à une vision commerciale de la fonction du pharmacien de PUI qui ne correspond pas à la réalité de l’exercice actuel et qu’il conviendrait de modifier. C’est d’autant plus important que la notion de « responsable de l’approvisionnement » donne lieu à confusion et il est utile de rappeler que, selon l’article L. 6143-7, le directeur de l'établissement a seul compétence pour signer les contrats et les marchés et peut, dans le cadre du contrat de pôle, déléguer sa signature au seul chef de pôle, notamment pour les dépenses de médicaments et de dispositifs médicaux (art. R.6143-5).

[289] La mise en place des pôles d'activité clinique ou médico-technique a d'ailleurs des conséquences sur les PUI et est venue encore complexifier le paysage :

Si la PUI est incluse dans un pôle d’activité médicale, quelle est sa légitimité au regard des autres pôles d'activité médicale?

89 Le corps des aides préparateurs a été mis en voie d'extinction en 2001. 90 Dans les officines, le pharmacien propriétaire de sa pharmacie est dit « pharmacien titulaire » tandis que ses pharmaciens salariés sont des « pharmaciens adjoints » ; dans les entreprises l’on parle de « pharmacien responsable » 91 Article R.5126-34 et 35 du CSP 92 Conforme à un contrat type fixé, après avis du Conseil national de l'ordre des pharmaciens, par arrêté du ministre chargé de la santé en date du 6 mars 1989. 93 Arrêté du 6 mars 1989 relatif aux contrats types des pharmaciens gérants des établissements de soins, modifié par le décret n° 2007-1428 du 3 octobre 2007 relatif aux pharmacies à usage intérieur

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Si elle est englobée dans un pôle médico-technique qui, dans certains hôpitaux regroupent des fonctions support, quel est son poids vis-à-vis des autres services de ce pôle pour faire valoir les impératifs qui découlent de ses obligations légales spécifiques ?

Si le pharmacien gérant n’est pas chef de pôle et ne peut bénéficier des responsabilités afférentes, comment exerce-t-il sa responsabilité au regard des dispositions ayant trait à l'activité pharmaceutique (article L.5126-5 du CSP)?

3.3.2.4. La préparation des médicaments

Les préparations hospitalières

[290] La préparation des médicaments est soumise au monopole des pharmaciens et les différentes notions de préparations sont définies à l’article L.5121-1.

[291] Au titre de l’article L. 4241-1 du CSP, les préparateurs officinaux sont seuls autorisés à seconder le pharmacien dans la préparation et la délivrance des médicaments.

[292] Ce monopole des préparateurs est moins évident à l’hôpital. Il peut être mis en brèche par l’article L. 5126-5 qui dispose que les pharmaciens exerçant au sein d’une PUI peuvent se faire aider par « d’autres catégories de personnels qui sont attachés à la PUI en raison de leur compétence ». Selon les données de la SAE 2009, on observe que ces « autres personnels », représentent 30% des effectifs des PUI du secteur privé et 41% dans les PUI du secteur public94.

[293] L’imprécision de ces termes est préjudiciable. Ils recouvrent tout à la fois des agents administratifs, techniques, des ouvriers, des informaticiens présents à temps complet ou partiel dans de nombreuses PUI mais aussi des infirmiers qui peuvent alors être amenés à effectuer des actes relavant de la compétence des PPH, comme par exemple des préparations.

Les préparations extemporanées

[294] L’activité de préparation extemporanée, préparation réalisée au moment de l’emploi, conformément au résumé des caractéristiques du produit, est en pratique le plus souvent réalisée par les infirmiers.

[295] Cette activité, par exemple pour des suspensions orales ou pour des produits destinés à la voie parentérale, n’est pas codifiée. La circulaire de la DHOS n°666 du 30 janvier 198695 précise que « Les doses individuelles…doivent être administrées immédiatement après leur préparation par la personne qui a préparé la dose si cette opération galénique n’a pas été effectuée sous responsabilité pharmaceutique ». De même, l’arrêté du 6 avril 2011 relatif au management de la qualité de la prise en charge médicamenteuse et aux médicaments dans les unités de soins précise « le cas échéant, la reconstitution des médicaments est réalisée extemporanément selon le résulté des caractéristiques du produit et les protocoles d’administration écrits et validés au sein de l’établissement ». Dans les deux textes, rien n’est précisé quant au statut de la personne qui effectue la préparation.

[296] Le positionnement des infirmiers au regard de ces actes est incertain. Leur rôle tel que définit à l'article R.4311-7 ne prévoit ni la possibilité de faire des préparations ni même celle de réaliser des préparations extemporanées (cf. annexe 9).

[297] Eu égard à la responsabilité des infirmiers qui réalisent de façon quotidienne des préparations extemporanées et de façon plus exceptionnelle des préparations hospitalières, ces notions mériteraient, pour les premières, d’être clarifiées par une circulaire et pour les secondes, d’être encadrées par les procédures de délégations d’actes.

94 cf. annexe 10 relative aux données sur les personnels des PUI 95 Circulaire n° 666 du 30 janvier 1986 relative à la mise en application des pratiques de bonne dispensation des médicaments en milieu hospitalier – BO du ministère chargé de la santé n° 86/11 bis

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3.3.2.5. La situation des préparateurs

[298] L’article L. 5126-5 précise que les pharmaciens exerçant au sein d'une PUI peuvent se faire aider par des personnes autorisées au sens du titre IV du livre II de la partie IV.

[299] Ce titre concerne tous les personnels de la pharmacie. Les articles L. 4241-1et L. 4241-13 stipulent, le premier que les préparateurs en pharmacie sont seuls autorisés à seconder le titulaire de l'officine et le second que les PPH dans les établissements de santé publics sont autorisés à seconder le pharmacien chargé de la gérance d’une PUI. Aucun article ne vise expressément les PUI des établissements de santé privés.

[300] L’article L. 4241-13 définit le PPH dans les établissements publics de santé comme « toute personne titulaire du diplôme de préparateur en pharmacie hospitalière défini par arrêté pris par le ministre chargé de la santé, après avis de la commission prévue à l'article L. 4241-53 ».

[301] C’est l’article 112-2° de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique qui a introduit la qualification de PPH dans le CSP. Le décret du 7 septembre 2001 l'avait déjà faite figurer dans le statut particulier des préparateurs en pharmacie hospitalière96 en transformant le corps précédemment des « préparateurs en pharmacie » en « préparateurs en pharmacie hospitalière ». Désormais seuls peuvent être recrutés dans ce corps, par voie d’un concours sur titre, dans chaque établissement public les candidats titulaires du diplôme de préparateur en pharmacie hospitalière.

[302] Au moment de la création du corps, les préparateurs en pharmacie exerçant en établissement public de santé, titulaires et stagiaires, ont été intégrés en qualité de titulaires et stagiaires dans le corps des préparateurs en pharmacie hospitalière à la date de publication du décret. Des dispositions transitoires prévoyaient, en outre, la possibilité d’organiser des concours sur épreuves pour des candidats titulaires du brevet professionnel de préparateurs en pharmacie, jusqu’à fin 2005.

[303] Depuis la création du corps, prés de la moitié de ses membres ont été formés par les centres agréés et sont donc titulaires du diplôme de PPH. Au rythme de 300 formés/an il faudra plus de cinq ans pour que l’ensemble du « stock » soit formé. Ainsi, pourrait-on être confronté à une mise en cause de ces préparateurs non formés et donc, légalement, non habilités à exercer dans une PUI de secteur public.

[304] En outre comme le montre le graphique ci–après, si le nombre de membres du corps de PPH stagne, celui des non titulaires (dont en 2009 67% sont des contractuels en contrat à durée déterminé) a plus que doublé en trois ans.

96 Décret n°89-613 du 1er septembre 1989, modifié relatif aux statuts des personnels médico-techniques de la fonction publique hospitalière

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Graphique 1 : Évolution des effectifs de préparateurs exerçant dans les établissements de santé publics

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

3500

4000

4500

5000

5500

6000

6500

7000

2007 2008 2009

Non titulaires

Titulaires non diplômés PPH(eff.physiques)

T itulaires diplômés PPH (ETP)

Source : Données DGOS et centre de formation du CHU de Lyon

[305] L’exigence de l’obtention d’un diplôme supérieur97 pour les préparateurs affectés dans une PUI répond bien à un souci d’amélioration des pratiques. La mission a pu vérifier lors de ses déplacements la satisfaction des pharmaciens de pouvoir s’appuyer sur des collaborateurs bien formés et celles des préparateurs d’avoir pu améliorer leur compétence.

[306] La stagnation du nombre des PPH titulaires et la forte augmentation des contractuels, risque d’engendrer une baisse de la qualification du corps. Cette situation peut s’expliquer d’une part, par la difficulté dans certains établissements de recruter des candidats titulaires du diplôme de PPH mais, d’autre part, par la préférence donnée par les établissements à un recrutement de contractuels, en CDI plus rapide et moins onéreux ou en CDD, pour faire face à des besoins jugés ponctuels sans s’engager à long terme. A terme, et au regard des évolutions actuelles, il faut craindre une baisse du niveau moyen de qualification des préparateurs au sein des établissements de santé et des risques juridiques.

4. LES RECOMMANDATIONS

4.1. Sécuriser le circuit au sein de chaque établissement de santé

4.1.1. Assurer la continuité du parcours de soins du patient

4.1.1.1. Fluidifier la circulation de l’information

[307] La loi Hôpital, patients, santé, territoires (HPST) a ouvert de nombreuses voies d’amélioration de la fluidité des parcours de soins entre secteurs de ville, médico-social et hospitalier. Or, bien que la plupart des textes d’application aient été publiés, il semble que leur mise en œuvre en pratique soit encore balbutiante, alors même que les difficultés relatives à la « transition thérapeutique » sont reconnues de tous comme représentant autant de maillons faibles dans la sécurisation de la prise en charge.

97 Aujourd’hui l’on constate une hétérogénéité dans le niveau de formation des préparateurs hospitaliers. Certains ont été formés selon l’ensemble des réglementations (CAP suivi d’une mention complémentaire suivi d’un BP), d’autres sont bac + BP, les PPH formés bac plus trois.

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Recommandation n°1 : Accélérer la mise en œuvre des dispositions de la loi HPST visant l’amélioration de la « transition thérapeutique », (conciliation médicamenteuse à l’entrée, suivi de l’ordonnance de sortie), le recueil par l’hôpital des coordonnées des professionnels de santé ambulatoires ou médico-sociaux, la désignation du pharmacien correspondant, les coopérations entre professionnels, l’éducation thérapeutique. Finaliser la publication des textes d’application et renforcer progressivement la place de ces dispositions au sein des outils d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins (certification, CBU, formation professionnelle, en particulier).

[308] Par ailleurs, 19 000 des 23 000 officines sont actuellement équipées du dossier pharmaceutique (DP). C’est un outil, piloté par l’Ordre national des pharmaciens, qui a vocation à terme d’alimenter le dossier médical personnel (DMP) lorsque ce dernier sera opérationnel, mais qui dès à présent permet de suivre les consommations médicamenteuses des patients ayant donné leur accord, sur 4 mois, de vérifier les contre-indications et interactions, quelle que soit la pharmacie ayant dispensé les produits, médicaments non prescrits compris. De nouvelles fonctionnalités sont régulièrement développées (circulation d’informations en matière de sécurité sanitaire, base de données anonymisées, etc.).

[309] Une première expérimentation d’interfaçage avec l’hôpital a concerné les médicaments rétrocédés (vendus par l’établissement à des patients non hospitalisés), avec la participation de 50 établissements de santé. Une deuxième expérimentation de ce type est en cours d’autorisation (CNIL).

[310] Le rapprochement des logiciels libéraux et hospitaliers (évoqué dans le rapport Hubert98) paraît également un enjeu d’avenir pour fluidifier la circulation des informations entre centres hospitaliers, structures d’HAD, hôpitaux de proximité, SSR, USLD, EHPAD…

Recommandation n°2 : Déployer le dossier pharmaceutique en établissement de santé et médico-social, en mettant en place les interfaces nécessaires à la communication entre les systèmes d’information afin de faciliter la « transition thérapeutique » et de fluidifier le parcours de soins.

4.1.1.2. S’appuyer sur les ARS et les OMEDIT

Pour décloisonner les relations ville / hôpital et médico-social

[311] La mise en place des ARS permet la réunion au sein d’une même structure de la gouvernance régionale des secteurs du soin ambulatoire, hospitalier et médico-social et de gestion du risque assurance maladie, favorisant les convergences sur ces différents thèmes ayant pour objet commun la santé des patients.

[312] Elle présente toutefois l’inconvénient de créer de grosses structures très hiérarchisées. Les acteurs sanitaires (directions d’établissements, professionnels de santé, associations, etc.) ont, à ce stade de la construction des ARS, le sentiment d’avoir perdu la visibilité sur les leviers décisionnaires à solliciter pour concrétiser des démarches ou faire aboutir des négociations. Il en résulte un climat de démotivation pour initier ou soutenir des projets, voire de défiance vis-à-vis des demandes ou des nouvelles dispositions émanant de l’ARS ou des instances sanitaires nationales.

98 E. HUBERT. Rapport « Mission de concertation sur la médecine de proximité ». http://www.elysee.fr/president/root/bank_objects/rapport_definitif_.pdf

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[313] La perte d’identification, dans certaines ARS, d’une structure chargée de l’inspection de la pharmacie et de l’amélioration de la qualité et de la sécurité thérapeutique est également source d’interrogations. La place et le rôle des OMEDIT, positionnés auprès des ARS mais n’y étant pas intégrés, et leur articulation avec les médecins et pharmaciens inspecteurs et les autres agents de l’ARS intéressés par la politique régionale du médicament, doivent encore être clarifiés dans certaines régions. La proximité géographique de l’OMEDIT et de l’ARS est indispensable pour coordonner les réflexions et les stratégies.

[314] Mais le maintien d’une certaine indépendance de l’OMEDIT par rapport à l’ARS est également nécessaire pour préserver la séparation entre les fonctions d’observation, d’analyse et de concertation scientifique et les fonctions de contrôle et de décision. Il importe de disposer d’une instance d’observation, d’accompagnement, d’échanges et de lien entre professionnels, différente de l’instance chargée de décider, contrôler et expliquer les dispositions réglementaires destinées à l’amélioration de la qualité et de la sécurité thérapeutique. Les deux structures doivent travailler de façon coordonnée pour permettre à l’ARS de conduire une politique régionale du médicament cohérente.

[315] Il importe de favoriser un climat de confiance et de collaboration productive en identifiant clairement (site Internet, courriers, listes de diffusion, etc.) les missions respectives des interlocuteurs des établissements au sein de l’ARS et des OMEDIT.

[316] Par ailleurs, des initiatives régionales et/ou nationales devraient créer des occasions de rencontres, d’échanges et de collaborations ville-hôpital, qui permettront d’améliorer les prises en charge au travers de parcours de soins mieux coordonnés entre la ville et l’hôpital.

Recommandation n°3 : Élargir le champ des interlocuteurs des OMEDIT en incluant au-delà des professionnels hospitaliers, d’une part les professionnels libéraux et les officinaux, d’autre part les praticiens des établissements médico-sociaux (invitation à participer aux réunions et groupes de travail). Rénover le site e-omedit.fr et ses sites régionaux et élargir leur accès à l’ensemble des professionnels de la région pour répondre aux besoins en matière de circulation de l'information.

Pour favoriser des référencements et des référentiels communs

[317] Le soutien des ARS au regroupement des achats hospitaliers de médicaments doit, au-delà des préoccupations médico-économiques, comporter des objectifs de santé publique. Il s’agit ainsi de promouvoir l’égalité territoriale dans l’accès aux traitements médicamenteux (notamment dans les petites structures) ainsi que la sécurisation du parcours du patient entre structures de soins d’un territoire donné (par homogénéisation des médicaments dispensés). Sur ce dernier point, la qualité des échanges et des travaux au sein du groupement est déterminante pour parvenir à un référencement commun optimal (cf. infra 4.2.1.5).

[318] Le rôle des OMEDIT dans l’organisation d’échanges réguliers entre professionnels de santé sur les pratiques relatives à l'usage des produits de santé doit être conforté dans toutes les régions. En ouvrant autant que possible leurs réflexions et travaux aux représentants des praticiens de ville et du médico-social, il importe que ces structures créées auprès des ARS produisent et diffusent des recommandations et référentiels de sécurisation du circuit du médicament (bonnes pratiques de prescription, poly-médication des personnes âgées, gestion des traitements personnels des patients, continuité ville-hôpital…).

4.1.2. Développer les solutions technologiques

4.1.2.1. Soutenir une informatisation performante du circuit du médicament

[319] Même si, par sa complexité, le circuit du médicament est un des domaines les plus difficiles à informatiser au sein de l’hôpital, plusieurs établissements sont parvenus à des résultats probants, donnant satisfaction aux utilisateurs et renforçant sensiblement la sécurité du patient. Ces résultats ne sont pas l’apanage de quelques grands CHU dotés de compétences techniques particulières.

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[320] Ils peuvent être obtenus par des établissements de taille moyenne, conjuguant parfois leurs efforts comme dans le cas du SIH de Caudan, visité par la mission. Les principaux hôpitaux de ce syndicat ont inscrit dès le début des années 2000, leur démarche d’informatisation dans un cadre dont les principales caractéristiques ont été décrites dans une thèse d’exercice99.

[321] Les objectifs fixés à la démarche d’informatisation sont d’atteindre les exigences réglementaires concernant la prescription, la dispensation et l’administration, de constituer un vecteur d’amélioration de la qualité des soins pour satisfaire aux exigences de la certification et de participer à la maîtrise des budgets en évitant nombre de mésusages ou d’incidents médicamenteux qui sont coûteux. La démarche doit concerner l’ensemble du circuit du médicament et profiter aux différents intervenants, médecin, pharmacien, préparateur, infirmier autour du patient.

[322] Les différentes étapes sont constituées de l’identification précise des besoins et des exigences de chaque profession, de la réorganisation des tâches pour assurer la conformité réglementaire du circuit du médicament, puis de l’examen des solutions logicielles sur la base des fonctionnalités (couverture des besoins), de l’ergonomie (acceptabilité par les utilisateurs), de l’intégration dans le système d’information (limitation des interfaces) et du coût (qualité de la maintenance et des évolutions).

[323] Le projet de Caudan a été mené par une équipe constituée très en amont et associant les représentants des différents métiers, avec le soutien de compétences externes. Cette prestation d’assistance a permis la réalisation d’un audit des besoins des établissements : analyse avec les personnels des points forts et faibles du circuit non informatisé, description d’un système cible sous contrainte de moyens techniques et budgétaires ; définition des besoins pour la rédaction du cahier des charges ; aide au choix de la solution à partir de la pré-sélection de 3 candidats appelés à faire une démonstration de leur solution.

[324] Le choix s’est porté sur un logiciel du syndicat interhospitalier Bretagne (GENOIS®) centré sur une base médicaments qui alimente trois modules de prescription, dispensation et administration interfacés avec le logiciel de dossier patient (C-Page patient) et de gestion économique et financière (C-Page éco). Le déploiement a été progressif, permettant l’identification des points faibles et leur amélioration logicielle par l’éditeur (interfaces dossier patient, lisibilité des plans de soins, gestion des armoires à pharmacie) : si aucun logiciel n’est parfait, il importe qu’il puisse évoluer en fonction des besoins exprimés.

[325] Avec bien d’autres, cette expérience montre que :

la démarche d’informatisation du circuit du médicament à l’hôpital est longue mais pas insurmontable, à condition de ne pas brûler les étapes : en l’occurrence, quatre années de travail ont été nécessaires depuis les premières réflexions sur l’informatisation ;

la gestion du projet doit s’appuyer sur une équipe à même d’analyser l’activité et les processus de travail, d’aider au choix de la solution technique, de tester les logiciels et d’accompagner les utilisateurs dans l’installation du nouveau système : impliquant la direction de l’hôpital, cette équipe doit comprendre des représentants des différents métiers pour l’analyse des besoins, le diagnostic des points-clés, la correction des lacunes, insuffisances et dysfonctionnements ;

compte tenu des enjeux et de la complexité des problématiques, le recours à des compétences externes dans l’accompagnement des projets d’informatisation et l’adaptation des produits logiciels aux situations de travail, favorise, pour un coût relativement modeste100, la migration vers un nouveau système d’information plus intégré et à l’ergonomie optimisée.

99 Agnès MADIC, « L’informatisation du circuit du médicament à l’hôpital, de l’intention à la réalisation. L’expérience du Centre hospitalier Charcot à Caudan (Morbihan) ». 2001 100 A titre indicatif, l’analyse de l’activité, l’aide au choix de la solution logicielle, les tests et l’accompagnement dans l’installation de DX-Care Médasys ont été réalisés par EVALAB pour un coût de 65.000 € au CH de Denain (500 lits dont 196 MCO et 75 places).

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[326] Au vu de ces éléments et afin de favoriser une informatisation performante du circuit du médicament, plusieurs recommandations peuvent être formulées.

[327] Il apparait nécessaire de développer des outils d’aide et de méthode à l’intention des établissements permettant une gestion rigoureuse de la conduite des projets d’informatisation ; ces « guides utilisateurs » devront notamment aider à prendre en compte le ratio coût/efficacité des solutions envisagées, éclairer la stratégie de déploiement (extension lente autour de sites pilotes, généralisation rapide même avec des fonctionnalités incomplètes). Les OMEDIT Pays de Loire et Aquitaine travaillent sur ces questions. Ces outils devront également préconiser, dans le cadre notamment de l’analyse pharmaceutique, un recensement et un suivi des erreurs dues aux dysfonctionnements générés par l’informatisation du circuit du médicament.

[328] De même, les difficultés de certification des logiciels du marché ne peuvent occulter la nécessité de fournir à tous les hôpitaux une connaissance approfondie des solutions informatiques disponibles. Cette évaluation suppose une connaissance des solutions informatiques mises en place dans les établissements. Elle passe par l’élaboration d’un référentiel qualité (règles d’interopérabilité, fonctionnalités attendues) qui pourrait conduire à une labellisation autour de quelques grandes règles nationales ; ces référentiels devront être définis par l’ASIP Santé.

[329] Dans la même perspective, mais en matière d’ergonomie, des experts pourraient être réunis pour constituer un dossier d’aptitude à l’utilisation (« utilisabilité101 ») des logiciels hospitaliers, qui seraient validés nationalement. Des ergonomes pourraient ensuite soutenir sa mise en œuvre dans les établissements.

[330] Enfin, dans un contexte budgétaire tendu pour de nombreux hôpitaux, il est souhaitable de poursuivre l’effort engagé dans le plan d’investissement et de modernisation Hôpital 2012 102 en faveur des projets d’informatisation les plus performants.

Recommandation n°4 : Soutenir une informatisation performante du circuit du médicament :

- développer des « guides utilisateurs » à l’intention des établissements permettant une gestion rigoureuse de la conduite des projets d’informatisation ;

- mettre en place, dans le cadre de l’analyse pharmaceutique, un recensement et un suivi des erreurs spécifiques dues aux dysfonctionnements générés par l’informatisation ;

- évaluer les solutions informatiques disponibles sur la base d’une cartographie des logiciels mis en place dans les établissements et d’un référentiel qualité (règles d’interopérabilité, fonctionnalités attendues) ;

- constituer un dossier d’aptitude à l’utilisation (« utilisabilité ») des logiciels hospitaliers, validé nationalement ;

- soutenir financièrement les projets d’informatisation les plus performants

4.1.2.2. Automatiser

[331] L’apport des nouvelles solutions technologiques en matière de sécurisation du circuit du médicament présente une avancée significative, encore insuffisamment développée en France.

[332] La complexité du circuit du médicament a été soulignée à plusieurs reprises dans ce rapport. Le circuit en tant que processus de soins doit par ailleurs s’adapter sans cesse. Il ne s’agit pas d’introduire de la standardisation mais de remplacer des tâches répétitives par des solutions technologiques. Celles-ci doivent dégager du temps humain chez les professionnels de santé pour leur permettre d’appréhender les situations complexes qui nécessitent une adaptation de la réponse que la machine ne peut pas effectuer.

101 Un système est dit « utilisable » lorsqu'il permet à l'utilisateur de réaliser sa tache avec efficacité, efficience et satisfaction dans le contexte d'utilisation spécifié 102 La première tranche a permis de financer 500 projets d’un montant de 690 M€ avec 350 M€ d’aide État à l’investissement. La deuxième tranche devrait permettre de financer de nouveaux projets : 910 M€ dont 410 d’aide d’État.

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[333] Pour soulager les pharmacies hospitalières de leurs tâches de manutention et de gestion des stocks, un développement de la robotisation apparaît incontournable.

[334] Pour pallier le manque de surface dans les pharmacies, l’installation de stockeurs rotatifs représente un investissement accessible (de l’ordre de 3 stockeurs pour un établissement de 600 lits comme à Compiègne, à environ 20 K€ l’unité). Ce stockage allège le travail de cueillette des préparateurs et réduit les risques d’erreurs (pour autant que le stockeur soit correctement chargé). Pour les plus grands établissements, et à condition que des surfaces soient disponibles, des automates de rangement peuvent être envisagés : le coût important d’acquisition et de maintenance de ces appareils doit cependant être mis au regard de l’économie de temps-préparateurs induite notamment par un fonctionnement en continu (rangement la nuit et cueillette le jour).

[335] La robotisation peut s’étendre à certaines fonctions de conditionnement ou de préparation. L’acquisition d’automates de dispensation nominative permettent aux préparateurs de sécuriser le circuit du médicament jusque dans les unités de soins et jusqu’au stade de l’administration par l’infirmier, ainsi déchargé de ses tâches de préparation des piluliers.

[336] Les avantages de la traçabilité par code-barres ont déjà été exposés au paragraphe 1.2.2.2.

[337] Le coût des investissements peut être important au regard des volumes d’activités à traiter, mais il doit être apprécié au regard des gains générés par l’utilisation de ressources humaines rares à des activités à valeur ajoutée réelle pour le patient, (pharmacien, préparateur, infirmier…). Il peut être, le cas échéant, réduit grâce à la mise en œuvre de coopérations logistiques entre établissements.

[338] Le schéma ci-dessous met en évidence les gains attendus lors de la mise en œuvre de quelques unes de ces solutions.

Schéma 1 : Impact des technologies de l’information en santé sur les étapes clés de la prise en charge thérapeutique

Source : PESTY F. Administration du médicament. La lecture du code-barres au lit du malade.

Gestions hospitalières. N°499. Octobre 2010103

103 Nota bene : les données chiffrées de ce schéma portant sur la répartition des erreurs (prescription, dispensation, administration) sont évaluées dans un système organisé à l’anglo-saxonne peu comparable avec le système français.

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[339] Pour permettre un développement optimal de ces nouvelles solutions, l’informatisation de la prescription est un préalable indispensable.

[340] En raison de l’investissement financier important que les solutions les plus avancées peuvent représenter et ceci sans que l’on connaisse toujours le retour sur investissement attendu104, il apparaît nécessaire d’évaluer par des études comparatives les différentes solutions technologiques proposées et par des études médico-économiques, le rapport coût / retour sur investissement de ces technologies. Au-delà des établissements de santé, cette évaluation bénéficiera également aux établissements médico-sociaux.

4.1.2.3. Évaluer et prévenir les nouveaux risques

[341] La mise en place des systèmes d’information et des autres solutions technologiques a pour objectif principal de sécuriser le circuit du médicament.

[342] Toutefois, la mise en œuvre de solutions technologiques va générer ses risques propres. Les accidents sériels en radiothérapie rappellent la nécessité d’anticiper ce risque. Dans chaque établissement, l’implantation des nouvelles technologies doit donc être encadrée par une démarche qualité rigoureuse et une politique de gestion des risques ciblée.

Recommandation n°5 : Implanter les nouvelles solutions technologiques en fonction des capacités financières des établissements en commençant par les robots les plus abordables et les plus rentables en logistique (stockeurs rotatifs). Envisager des rapprochements inter-établissements pour les automates les plus complexes et onéreux.

Accompagner cette implantation par des études comparatives et des études médico-économiques en évaluant le retour sur investissement. Encadrer la mise en place par une démarche qualité et par une politique de gestion des risques pour anticiper les nouveaux risques.

4.1.3. Améliorer l’efficacité des professionnels

4.1.3.1. Mobiliser les directions hospitalières sur les enjeux

[343] Pour les directions, les enjeux du circuit du médicament sont d’abord financiers en raison de l’importance des sanctions au titre des CBU. La qualité de la prise en charge est également une préoccupation importante dans le cadre de la procédure de certification des établissements.

[344] Au-delà de ces deux enjeux majeurs, il existe également un enjeu de responsabilité. Pour faire face aux risques juridictionnels en cas d’erreur ou de faute, il est important de clarifier les interventions des différents acteurs du circuit du médicament en prenant en compte l’évolution des pratiques. Cet enjeu est au moins aussi important que les arguments financiers ou de qualité pour mobiliser les professionnels, développer leurs échanges et remettre en cause des pratiques « bien établies ».

[345] Enfin, il doit y avoir pour les directions, un enjeu d’ouverture et de coopération entre établissements pour promouvoir une égalité d’accès, sécurisée et optimisée, aux thérapeutiques dans le cadre de la couverture des besoins sanitaires par territoire de santé : groupements de coopération entre structures de soins, ouverture sur l’hospitalisation à domicile, hébergement des personnes âgées, etc. La mise en place des démarches qualité et de gestion des risques bénéficient également des coopérations en réseau entre établissements de santé.

104 Voir à ce sujet p 66 du rapport IGAS précité « sécurisation du circuit du médicament à l’AP-HP »

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[346] La sécurisation et l’optimisation du circuit du médicament appellent une meilleure organisation des soins de l’hôpital, au service des patients. Parce que le circuit du médicament mobilise largement différentes catégories de professionnels et parce qu’il touche à la fois les fonctions de soins et les fonctions support, un travail d’amélioration sur ce secteur est structurant. C’est un vecteur d’amélioration, au-delà du circuit du médicament, pour l’ensemble de l’organisation de l’hôpital. C’est donc, après la lutte contre les infections nosocomiales, un domaine où les directions hospitalières doivent faire montre de leur capacité à engager puis soutenir un mouvement cohérent alliant actions d’amélioration de la prise en charge et des pratiques, réorganisation des tâches et meilleure utilisation des compétences, ainsi que progrès d’efficience en termes d’économie et de sécurité.

Recommandation n°6 : Mobiliser les directions hospitalières, notamment au travers des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, autour des différents enjeux du médicament à l’hôpital et au-delà de la simple maîtrise des dépenses : qualité de prise en charge, responsabilité juridique et coopération entre établissements. Faire de la sécurisation et de l’optimisation du circuit du médicament un vecteur d’amélioration de l’organisation des soins à l’hôpital.

4.1.3.2. Sécuriser en confortant l’activité clinique de chaque acteur105

Le pharmacien

[347] Le métier de pharmacien, ainsi que développé en première partie de ce rapport, est en pleine mutation, en ville comme à l’hôpital ou en établissement médico-social. Ses compétences propres, longtemps sous-utilisées par manque de visibilité sur les enjeux relatifs aux produits de santé, doivent aujourd’hui être mieux valorisées et mises à disposition des équipes de soins et des patients pour optimiser, en qualité, sécurité et efficience, les ressources thérapeutiques.

[348] Le métier de pharmacien est nécessairement appelé à évoluer vers un exercice beaucoup plus largement intégré au parcours de soins et en collaboration étroite avec les praticiens et les équipes de soins pour une meilleure utilisation des outils thérapeutiques, qui sont générateurs tant d’effets indésirables évitables que de coûts importants. Cette évolution, qu’il importe d’encourager et d’accompagner s’agissant de permettre au pharmacien d’apporter sa plus importante valeur ajoutée au service du patient, est de nature à créer, comme toute pratique clinique, un cercle vertueux : l’analyse pharmaceutique d’un nombre de plus en plus important d’ordonnances permet une plus grande rapidité progressive de l’exercice, aiguise la compétence, le regard clinique et l’esprit critique des pharmaciens.

[349] Avec l’expérience, l’œil pharmaceutique devient plus aiguisé, lui permettant d’identifier rapidement les éventuels problèmes. Une relation de confiance s’instaure : la réalisation régulière d’une analyse pharmaceutique sur les ordonnances est de nature à construire des liens solides entre médecins et pharmaciens. Le système d’information est également un outil important d’échange et de rapprochement des acteurs du circuit du médicament. L’analyse par les pharmaciens des prescriptions leur permet de développer un regard clinique. Les alertes sont ainsi adaptées et limitées, les prescripteurs les regardant avec d’autant plus d’attention. L’information circule plus aisément et le dialogue peut être quasi-quotidien sur les données actualisées relatives aux innovations, la gestion des risques, la qualité ou encore l’efficience de l’usage du produits de santé

105 Pour l’évaluation de l’impact économique de ces recommandations, cf. annexe 16.

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[350] Au-delà de la lecture critique des prescriptions, voire de la participation à la décision thérapeutique, les pharmaciens ayant une pratique clinique pourraient être les acteurs naturels de l’éducation thérapeutique, ou encore exercer une veille sur les états pathologiques pouvant être liés à une prise médicamenteuse (partir d’un effet indésirable pour identifier une cause médicamenteuse) ou à des problèmes d’observance. Son expertise du médicament peut en effet lui conférer une vision particulière, complémentaire de celle du médecin, pouvant le conduire à identifier chez un patient présentant des symptômes tels que des vomissements, des douleurs localisées, des anomalies biologiques (modification de l’INR, évolution des transaminases…), voire électrocardiographiques (cardiopathies caractéristiques de la prise d’amphétaminiques par exemple…) un effet lié à un médicament, auquel le médecin aurait pu, sans pour autant que sa compétence ne soit nullement mise en cause, ne pas penser.

Source : Bedouch P et al. La sécurisation du circuit du médicament dans les établissements de

santé : données actuelles et expérience du CHU de Grenoble. Annales Pharmaceutiques Françaises 2009 ; 67: 3-15.

Recommandation n°7 : Déployer les ressources pharmaceutiques au service des patients, en mettant en œuvre le plus largement possible l’analyse pharmaceutique et en développant les activités de pharmacie clinique dans les établissements. Adapter la formation initiale et continue (développement professionnel continu) à ces évolutions.

[351] La délivrance nominative individualisée doit également faire l’objet d’un développement, mais qui paraît moins prioritaire dès lors que la part globale de la distribution est sécurisée par un système d’information autorisant une délivrance nominative globalisée ou reglobalisée. Le couplage à la présence d’armoires automatisées, connectées au système d’information, dans les services apporte une sécurisation supplémentaire.

[352] Il importe donc de décharger les pharmaciens des tâches pour lesquelles sa compétence n’est pas indispensable et pouvant être transférées ou déléguées à d’autres professionnels, le cas échéant formés spécifiquement dans cet objectif.

Pharmacie centrale 

‐ Centre d’information 

‐ Dispensation  patient ambulatoire 

‐ Gestion des essais cliniques ‐ Suivi pharmacologique 

‐ Comité du médicament … 

Analyse et validation des prescriptions 

médicamenteuses 

Observation pharmaceutique (historique médicamenteux)  

 

Participation aux staffs médicaux et soignants 

 

Education thérapeutique Médicamente

use 

Information personnel soignant 

Gestion des médicaments de l’unité de soins 

 

 

 

Pharmacovigilance / Pharmacologie 

Cliniciens référents gestion des protocoles 

Pharmacien d’officine et médecin traitant 

Analyse des erreurs médicamenteuses CREX 

Rôle du pharmacien clinicien en unité de soins

Bilan  comparatif ordonnance avant et après hospitalisation 

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[353] Sortir le pharmacien de la PUI pour le rapprocher des médecins, infirmiers et patients est ainsi aujourd’hui un impératif, mais nécessite de redéfinir les rôles de chacun, en particulier des préparateurs, cadres et infirmiers, pour que ces mutations sécurisent tant les aspects logistiques que cliniques du circuit du médicament.

[354] Multiplier le nombre de pharmaciens dans les établissements, a l’instar du choix effectué par les USA106, est difficilement envisageable pour nombre d’établissements en France, compte tenu notamment des disponibilités en termes de ressources humaines mais également de contraintes budgétaires. De fait, une grande incertitude réside aujourd’hui en termes de besoins, en particulier compte tenu des évolutions du rôle des pharmaciens. Le déploiement de l’analyse pharmaceutique, le développement de la pharmacie clinique rendent nécessaire une étude des besoins en termes de temps de présence pharmaceutique. Il est également utile de tenir compte du temps de pharmacien qui pourra être libéré soit par la délégation de tâches à des préparateurs ou des infirmiers soit par le transfert de tâches administratives dans le cadre des achats par exemple.

Recommandation n°8 : Évaluer parmi les tâches actuellement assumées par les pharmaciens dans les établissements de santé, celles qui peuvent être déléguées ou transférées afin de dégager du temps pour prioriser les missions à haute valeur ajoutée du pharmacien. Évaluer alors les besoins minimaux en temps pharmaceutique des établissements pour les définir en fonction des caractéristiques des établissements (taille, type d’activité, localisation, organisation, etc.).

Le médecin

[355] La prescription est un acte complexe dont la qualité intrinsèque est améliorée par l’informatisation.

[356] L’informatisation de la prescription facilite les tâches des autres acteurs du circuit du médicament, pharmaciens, préparateurs et infirmiers. Elle est le point de départ de la dématérialisation du circuit du médicament. Il faut lui accorder une attention particulière et faciliter la tâche du prescripteur en veillant au minimum à ce que sa tâche soit facilitée et au mieux que l’investissement en temps qu’il est obligé d’y consacrer soit payé en retour.

[357] Les entretiens avec le laboratoire Evalab107 montrent que l’on peut améliorer les fonctionnalités dans ce domaine en travaillant sur l’ergonomie du logiciel pour que les médecins puissent l’utiliser de façon plus intuitive et en clarifiant les attentes vis-à-vis des éditeurs de logiciel. Pour veiller à concilier ergonomie pour les débutants, ce qui est indispensable pour les nouveaux arrivants, et puissance du logiciel pour l’utilisation des fonctions avancées, on peut par exemple donner l’accès aux fonctions de base directement et masquer l’accès aux fonctions avancées. L’importance de ces questions d’ergonomie pour assurer l’appropriation de l’outil par ses utilisateurs amène à recommander de constituer lors de toute acquisition d’un nouveau système d’information une cellule projet avec un représentant par métier pour vérifier l’adéquation de l’outil à ses besoins, cellule qui doit comporter au moins un médecin.

[358] Dans le même esprit, il serait souhaitable de faire évoluer les exigences en matière de certification des bases de données. La mission de la HAS est de veiller à ce que ces logiciels permettent la prescription directement en Dénomination Commune Internationale (DCI). Cette exigence devrait être complétée par une exigence forte en matière d’ergonomie d’utilisation.

106Preventing medication errors. Institute of Medicine. 2007. Washington, DC : National Academy Press, in rapport « Organisation de la sécurisation de la prise en charge médicamenteuse dans les hôpitaux des Etats-Unis d’Amérique. » Agnès BROUARD, juillet 2010. 107 Laboratoire d’ergonomie dédié à l’analyse et à l’amélioration des situations de travail ou systèmes sociotechniques en santé – Inserm – Université Lille 2.

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[359] La parution, sous l’égide de l’ANAP, d’un cahier des charges de l’informatisation du circuit du médicament est un premier pas dans la recherche de la maturation du marché des éditeurs de logiciel. Il devrait faciliter le travail des établissements de santé dans l’expression de leurs besoins. Il importe de le faire connaître pour permettre aux établissements de santé de l’intégrer dans leur procédure d’achat de systèmes d’information. Il est également nécessaire que la HAS avance sur la question des logiciels d’aide à la prescription, dont aucun n’est actuellement certifié pour l’hôpital afin d’assurer la qualité et la sécurité de ces outils.

[360] Le temps du médecin étant compté, il faut limiter celui qu’il doit consacrer à des taches qui ne sont pas son cœur de métier. A titre d’exemple, l’encadrement des prescriptions hospitalières réalisées en ville génère actuellement des exigences de traçabilité du prescripteur et de connaissance des prix des médicaments en ville. Cela va sans doute conduire à des pratiques de contournement (limitation de la durée de prescription voire absence de prescription et renvoi sur le médecin traitant) avec des risques de rupture de traitement et une absence d’impact positif sur les dépenses mais au prix d’un alourdissement des taches dévolues au médecin.

Recommandation n°9 : Inscrire dans la certification des logiciels de prescription et des banques de données l’exigence d’ergonomie. Intégrer dans toute nouvelle réglementation qui augmente la charge de travail d’un professionnel de santé une évaluation de son impact sur son activité clinique autour du patient.

L’infirmier

[361] Dernier filet de sécurité dans le circuit du médicament, l’acte infirmier doit être facilité. Plusieurs facteurs peuvent être pris en compte : la lisibilité et la clarté de la prescription ; la possibilité d’identifier clairement le médicament à l’unité (nom de spécialité, numéro de lot, date de péremption) et la possibilité d’identifier le patient. L’informatisation de la prescription, avec création d’un plan de soins informatisé, ainsi que le conditionnement unitaire du médicament pour les formes sèches et les bracelets d’identification doivent être favorisés. Dans l’idéal, la traçabilité par code-barres ou par Data Matrix facilitent l’identification tout au long de la chaîne.

[362] Pour les médicaments injectables, qui représentent un risque spécifique, il faut poursuivre les travaux entrepris par l’Afssaps sur le plan d’harmonisation de l’étiquetage, en y associant étroitement les infirmiers.

[363] Par ailleurs, les infirmiers doivent pouvoir transférer un certain nombre de tâches à risque ou pouvoir s’y consacrer en y apportant l’attention nécessaire. Plusieurs possibilités sont envisageables :

[364] centraliser les préparations injectables les plus à risque (sur le modèle de ce qui a déjà été fait pour les poches de chimiothérapie ou les pompes à injection intra-thécale). Pour autant cette centralisation n’a de valeur que si elle peut être réalisée en continu, pour les fins de semaine et nuits compris car, dans le cas contraire, elle fait courir le risque d’une perte de savoir-faire de l’infirmier qui sera d’autant plus en difficulté lorsqu’il sera confronté à un acte exceptionnel ;

[365] libérer du temps infirmier pour la préparation extemporanée des injectables en faisant assurer à des préparateurs la préparation des piluliers ou des chariots de distribution des médicaments et la gestion du stock des armoires à pharmacie des unités de soins (ou mettre en place des armoires automatisées) ;

[366] limiter les interruptions de tâches et auditer les pratiques dans ce domaine.

Recommandation n°10 : Sécuriser le travail infirmier par l’informatisation de la prescription, le conditionnement unitaire du médicament et les procédés d’identitovigilance. Repenser les organisations de ressources humaines au sein des hôpitaux pour permettre, chaque fois que cela est possible, aux préparateurs en pharmacie de préparer les doses à administrer et de gérer les armoires des unités de soins afin de décharger les infirmiers de ces tâches.

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4.1.3.3. Concentrer les efforts des professionnels de santé sur des activités à haut risque pour le patient

[367] Face à la complexité du circuit du médicament, à l’hétérogénéité des organisations et à la diversité de maturation des politiques de qualité et de gestion des risques, la recherche d’une sécurisation optimale de toutes les activités nécessite une approche par étapes. Une volonté de sécurisation absolue peut être contre-productive quand elle mobilise la réflexion et les investissements sur un seul objectif. La mission relève que la mise en place de la distribution nominative en lieu et place de la distribution globale des médicaments mobilise fortement les professionnels. Elle nécessite d’importants moyens humains, matériels et financiers en matière d’automatisation et d’informatisation. Quand elle a été mise en place, elle concerne le plus souvent les formes orales sèches et les services où le rythme de renouvellement des ordonnances est le plus faible (soins de suite ou soins de longue durée). De nombreux professionnels rencontrés par la mission s’interrogent sur sa pertinence alors que le risque maximal pour le patient porte sur les médicaments injectables, le plus souvent utilisés dans les unités de soins de court séjour.

[368] La mission propose donc de procéder par étapes dans la recherche de la sécurité, en privilégiant, dans un premier temps les segments d’activité à haut risque, identifiés sur la base d’une analyse de risques effectuée au niveau de chaque établissement. Cette démarche de priorisation semble rendue d’autant plus indispensable que les moyens à la disposition des centres hospitaliers sont contraints par l’obligation d’équilibre budgétaire.

[369] Ces démarches de priorisation ont déjà démontré leur utilité au niveau national avec une approche « produits ». A titre d’exemple, le travail spécifiquement entrepris sur les antibiotiques a montré son efficacité en matière de maîtrise du risque infectieux.

[370] La mission a pu constater qu’une approche de ce type, adaptée au risque propre de chaque établissement, se développe avec un fort intérêt des équipes qui ont le sentiment de coller à la réalité et non pas de voir s’imposer des priorités nationales.

[371] Certains établissements identifient certains secteurs d’activité comme à risque. Le centre hospitalier de Compiègne porte une attention particulière à la pédiatrie. Les systèmes d’information sont jugés mal adaptés à cette activité : la nécessaire adaptation de la posologie au poids et à l’âge du patient génère un double risque, en raison du calcul de dose, puis de la préparation, et les marges thérapeutiques sont étroites. L’hôpital a mis en place un protocole de sécurisation de la préparation des doses orales en pédiatrie sur 24 heures (cf. annexe 1).

[372] D’autres développent une approche en fonction du risque médicament. Le centre de lutte contre le cancer d’Angers a centré son action sur deux types de médicaments (cf. annexe 6). La chimiothérapie, qui est au centre de son activité, fait l’objet d’une attention particulière en raison du risque pour le patient. La centralisation des préparations, leur contrôle par spectrophotométrie et la traçabilité par code-barres ont été mises en place. L’antibiothérapie a été sécurisée en raison de l’enjeu de santé publique avec la mise en place d’une analyse pharmaceutique et d’une dispensation nominative systématique.

[373] De la même façon, il peut s’agir d’un risque lié au mode d’administration. Il est emblématique à ce titre que le travail entrepris par l’Organisation mondiale de la santé dans le cadre de son projet « High 5s » cible parmi les 5 priorités la question des médicaments concentrés injectables.

Recommandation n°11 : Mettre en place au niveau de chaque établissement de santé un nombre limité d’actions prioritaires pour améliorer la sécurité dans des secteurs identifiés comme à haut risque du circuit du médicament sur le modèle de la démarche initiée par l’OMS au niveau international (l’OMS a choisi 5 actions). Inscrire cet objectif dans le CBU et la certification.

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4.1.4. Développer la démarche qualité et la gestion de risque

4.1.4.1. Clarifier les dispositions issues d’HPST

[374] Si la loi HPST renforce les exigences en matière de qualité et de sécurité, il est difficile d’identifier clairement qui est en charge de cette politique et donc qui a la légitimité et la responsabilité pour l’impulser et organiser sa mise en œuvre. Le souhait de mobiliser transversalement l’ensemble des intervenants sur le sujet multiplie les acteurs au risque de diluer les responsabilités.

[375] Dans un domaine où les questions de gouvernance sont essentielles, il est indispensable de clarifier ces questions en explicitant par une instruction ou une circulaire l’esprit de la loi. Ceci est d’autant plus urgent que les CME semblent avoir développé un certain sentiment de frustration et d’incompréhension, voire de dévalorisation dans la formulation de leurs nouvelles missions. Dépossédées du projet médical sur laquelle elles sont désormais simplement « consultées », elles sont positionnées sur un domaine qui relevait avant tout de la direction qualité et traditionnellement des cadres infirmiers et où elles sont identifiées comme simple « contributeur ». Il faut également noter que la CME ne dispose pas des moyens pour mettre en place effectivement son plan d’actions.

[376] Par ailleurs, paradoxalement, alors que les dispositions d’HPST ont fait disparaître l’obligation pour les CME de mettre en place des commissions spécialisées, qu’elles visent à responsabiliser les établissements et à les inciter à investir la politique de gestion des risques, les textes d’application tendent à encadrer de plus en plus les organisations au sein des établissements.

[377] Le décret n° 2010-1408 du 12 novembre 2010 a créé un coordonnateur de la gestion des risques associés au soin108. Ce coordonnateur doit veiller aux actions de formation et de communication envers les personnels pour développer une culture de sécurité et assurer la cohérence de leur action.

[378] L’arrêté du 6 avril 2011 relatif au management de la qualité de la prise en charge médicamenteuse et aux médicaments dans les établissements de santé prévoit la nomination d’un « responsable du système de management de la qualité de la prise en charge médicamenteuse » qui a « l’autorité nécessaire pour l’exercice de ses missions » vient encore complexifier le paysage.

[379] Entre les différentes instances chargées à des titres divers de qualité et de sécurité, la direction qualité, le coordonnateur de la gestion des risques associés au soin, et le responsable du management de la qualité de la prise en charge médicamenteuse, il est difficile d’identifier le pilote. Une clarification des textes et des objectifs poursuivis est nécessaire.

4.1.4.2. Accompagner leur mise en œuvre

[380] Les établissements de santé doivent être accompagnés dans leur démarche. La mise en œuvre de la politique de sécurité des soins ne pourra pas être imposée par les textes. Il faut que les acteurs du soin se l’approprient dans leur exercice quotidien.

[381] Les hôpitaux sont sensibilisés à la politique de qualité qui renvoie aux démarches d’accréditation et de certification donc à la vérification de conformité à des référentiels et au respect des bonnes pratiques. On sait par les constats sur le terrain des visites de certification qu’ils se sont diversement approprié cette politique et que le médicament reste le domaine où la Haute autorité de santé émet le plus de réserves et de recommandations.

108 Article R. 6111-4 du CSP

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[382] Mais c’est aussi un domaine fortement investi par certains établissements :

des établissements engagent des processus de normalisation : le centre hospitalier de Compiègne a ainsi obtenu la certification ISO de son unité de stérilisation et de son unité de préparation des médicaments du cancer et envisage la certification ISO 9001 de l’ensemble des activités pharmaceutiques à l’horizon 2012. Le SIH de Caudan vient également de recevoir sa certification ISO. Le centre de lutte contre le cancer (CLCC) d’Angers a procédé à une certification HACCP109 de son unité de préparation centralisée ;

d’autres ont mutualisé les savoirs. Les réseaux qualité se sont développés dans plusieurs endroits. Le CLCC d’Angers participe ainsi au réseau qualité du Maine dit AQuaRES et à celui des CLCC.

[383] Des travaux sont en cours au niveau européen. La participation française au programme européen EUNetPaS110 (European Network for Patient Safety), piloté par la HAS, pour promouvoir et développer la collaboration en matière sécurité des soins (intégration de nouvelles connaissances, partage de bonnes pratiques, développement d’outils communs) a sélectionné 7 bonnes pratiques visant la sécurité du médicament :

sur l’administration du médicament au patient (2 bonnes pratiques) où la même personne prépare le médicament, l’administre et trace l’administration ;

sur la préparation des doses à administrer : pour éviter les interruptions dans cette activité, port d’une veste jaune ;

sur la conciliation de la prescription à l’entrée et à la sortie impliquant une équipe de 3 membres (médecin + IDE + pharmacien) ;

sur la prescription de sortie (éducation thérapeutique du patient) avec évaluation de deux bonnes pratiques ;

sur la réduction de prise des somnifères (avec une « sleep card » pour les professionnels de santé impliqués dans la mise en œuvre d’alternatives non médicamenteuses pour corriger les troubles du sommeil).

[384] Des travaux sont également en cours au niveau mondial sous l’égide de l’organisation mondiale de la santé et de son programme « High 5s » avec deux actions qui concernent le médicament :

la conciliation médicamenteuse ;

la préparation des médicaments concentrés injectables.

[385] Dans la continuité de la politique de qualité, les établissements de santé sont incités à entrer dans une démarche de sécurité des soins. La procédure de certification évalue ainsi la démarche de gestion des risques des hôpitaux. Il est intéressant de remarquer qu’après l’organisation du circuit du médicament, c’est le domaine où la HAS a émis le plus d’opinions en 2009 (6,47 %) et 2008 (6,43 %).

109 Hazard Analysis Critical Control Point 110 Ce projet est lui-même synergique du projet de recherche « High 5s » porté par l’OMS précité.

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[386] Une étude portant sur les expériences nationales et internationales pour promouvoir ou améliorer la sécurité des patients111 constate qu’il y a peu de démarches de sécurité propres à l’hôpital. D’une manière générale, le modèle proposé est industriel, visant une réduction de la variété (ne retenons que les meilleures pratiques) et de la variance (ne nous écartons pas des pratiques retenues), dans le but d’aboutir à la fiabilité d’un processus où des acteurs interchangeables coopèrent de manière programmée, en exécutant les procédures prévues, avec le résultat attendu. Ce modèle semble en fort décalage avec le niveau d’imprévisibilité des processus de soins. L’étude conseille donc de valoriser la coopération intra et inter métiers et la performance collective plutôt que la recherche de la standardisation.

[387] Les constats de la mission ont pris en compte la complexité du circuit du médicament et l’hétérogénéité des organisations. La préexistence d’une démarche qualité (qui se réfère à un respect de normes, procédures, référentiels) ne préjuge pas de la capacité à développer la gestion des risques (qui demande à développer des techniques d’analyse de risques). Dans le domaine industriel, où l’activité est normée, cette appropriation a été très longue et est toujours en cours. Dans le domaine de la santé, où la norme a ses limites et doit laisser la place à la nécessaire individualisation du soin, cela constitue un changement encore plus profond qui nécessite du temps (à titre d’exemple, l’expérience du CLCC d’Angers depuis 2005 – cf. annexe 6).

[388] Plusieurs méthodologies sont possibles. Certaines se mettent en place a priori, visant à détecter les points de fragilité du système par la réflexion préalable comme la cartographie des risques. D’autres se mettent en place a posteriori, après la survenue d’EIG comme les revues de morbi-mortalité ou lors d’analyse d’erreurs, que celles-ci aient eu ou non des conséquences, ce sont les comités ou cellules de retour d’expérience. Il faut ensuite apporter des actions correctrices et évaluer celles-ci pour « boucler la boucle ».

[389] Pour faciliter l’amélioration de la qualité et l’appropriation de la gestion du risque, un certain nombre d’outils sont à disposition ou en cours de développement. Certains de ces outils sont d’ordre conceptuel comme le manuel de l’ANAES datant de 2003 sur les « principes méthodologiques pour la gestion des risques en établissement de santé » ou la « revue des erreurs liées aux médicaments et dispositifs associés » dite REMED de la SFPC, datant de 2008 et dont l’évaluation est en cours (étude MERVEIL). Des travaux sont également en cours au niveau régional. L’OMEDIT Languedoc-Roussillon développe ainsi une méthodologie de cartographie des risques.

[390] D’autres outils sont pragmatiques. L’ANAP finalise un outil appelé « Inter Diag Médicaments », qui doit permettre d’apprécier, à l’échelle de l’unité de soins, le niveau de sécurité des étapes du circuit du médicament. Sa mise à disposition est prévue courant 2011. Il explore trois thèmes et sept axes de travail : contexte et politique de sécurisation dans l’unité de soins (axes prévention et pilotage) ; sécurisation de la prise en charge thérapeutique (axes entrée et sortie du patient ; prescription et dispensation ; préparation et administration) ; sécurisation du stock intra-unité (axes organisation et gestion de l’armoire).

[391] En tout état de cause, quelles que soient la qualité et l’ergonomie des outils, informatiques, techniques, logistiques ou organisationnels mis à disposition des établissements de santé, il importe de prévoir d’emblée, de manière indissociable de l’outil lui-même, un dispositif d’accompagnement des équipes à sa mise en œuvre, faute de quoi ces dispositifs conçus pour faciliter et aider à sécuriser le travail de chacun des acteurs du circuit resteront inutilisés et deviendront très rapidement obsolètes. Il est préférable de limiter les outils à ceux qui peuvent faire l’objet d’un accompagnement plutôt que d’accumuler des procédures inopérantes car mal maîtrisées par la chaîne des acteurs nécessaires pour les mettre en œuvre.

111 ROME Fanny, PARIES Jean, NYSSEN Anne-Sophie « Analyse bibliographique portant sur les expériences nationales et internationales pour promouvoir ou améliorer la sécurité des patients » - Étude réalisée par DEDALE pour le Haut Conseil de la santé publique -Commission spécialisée Sécurité des patients - Juin 2010

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Recommandation n°12 : Accompagner concrètement la mise en œuvre de la politique de gestion des risques dans les établissements de santé au plus près des unités de soins. Faciliter son appropriation par les acteurs en privilégiant les outils de terrain sur le modèle de l’outil d’autodiagnostic « Inter diag médicaments » de l’ANAP ou de la liste de contrôle (« check list ») du bloc opératoire de la HAS.

4.1.4.3. Axer les efforts sur les facteurs clés de réussite

[392] Au-delà des questions de gouvernance et d’appropriation de culture déjà évoquées, la mission identifie trois leviers d’amélioration.

Le premier est la mise en place dans les établissements de santé d’un dispositif de signalement des erreurs médicamenteuses.

[393] Qu’ils aient pour nom revue de morbi-mortalité (RMM) ou comité de retour d’expérience (CREX), les signalements pour actions avec rétro-information des déclarants sur les actions correctrices et évaluations de celles-ci sont un outil d’appropriation de la culture du risque par les professionnels. Le parcours dans ce domaine du centre de lutte contre le cancer d’Angers est emblématique. Il s’agit de mettre en place une boucle courte de signalement au sein de l’établissement avec analyse puis mise en œuvre d’actions correctrices qui doivent ensuite être évaluées. Cela nécessite de passer d’une culture du non dit à une culture de transparence au sein de l’établissement.

[394] Il convient d’être prudent sur la façon dont ces signalements pourraient être utilisés hors de l’établissement. Comme pour les infections nosocomiales, les établissements qui ont le plus de signalements ne sont pas ceux qui dysfonctionnent, mais ceux qui sont le plus engagés dans une politique d’amélioration de leurs pratiques, qui détectent le mieux leurs erreurs et mettent en place des actions correctives. Par ailleurs, s’il faut privilégier l’analyse des erreurs conduisant à des EIG, qui demandent une réponse immédiate du fait de leur conséquence pour le patient, il y a un intérêt à avoir un dispositif de recueil beaucoup plus large, jusqu’aux erreurs latentes et potentielles même si l’analyse in fine ne porte que sur un petit nombre d’événements. L’analyse de ces « presqu’erreurs » a vocation à empêcher la survenue d’EIG.

Le second est le passage d’une culture de punition de la faute individuelle à une culture de déclaration permettant de progresser collectivement.

[395] L’implication et la mobilisation des professionnels dans une démarche participative implique d’afficher clairement une approche positive de l’erreur. Celle-ci doit être vécue comme une opportunité d’amélioration du système et non pas comme une faute à sanctionner.

[396] Deux niveaux sont pertinents pour cela. Au niveau disciplinaire, la position du directeur de l’établissement doit être claire sur les conditions dans lesquelles il appliquera ou non une sanction. Au niveau judiciaire, l’administration centrale doit expliciter les notions de « faute intentionnelle » et de « faute détachable du service ».

[397] A cet égard, les appréhensions restant fortes, la mission recommande de privilégier une approche intégrant l’ensemble des erreurs médicamenteuses y compris les erreurs n’ayant pas donné lieu à conséquences pour le patient. Ces dernières sont plus faciles à déclarer car elles ont été arrêtées à temps. Elles vont permettre d’instaurer un climat de confiance propice à la transparence y compris pour des erreurs à conséquence plus grave.

Le troisième est l’interdisciplinarité.

[398] Toutes les approches qui favorisent le rapprochement entre les différents acteurs doivent être favorisées. La création de pharmacies de pôle comme cela est prévu au centre hospitalier de Carcassonne, l’implantation de préparateurs au sein des unités de soins comme cela est déjà le cas au centre hospitalier de Compiègne ou la désignation d’un pharmacien clinicien intervenant dans un certain nombre de services comme au centre hospitalier régional d’Orléans sont des démarches à promouvoir.

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Recommandation n°13 : Mettre en place au sein des établissements un système de signalement des erreurs médicamenteuses à usage interne. Clarifier les questions de responsabilité du déclarant. Favoriser l’interdisciplinarité et en particulier toutes les actions qui facilitent l’implantation de l’équipe pharmaceutique dans l’unité de soins. Inscrire ces objectifs dans le CBU et la certification.

4.2. Optimiser les fonctions achats et logistiques

4.2.1. Renforcer la professionnalisation de la fonction achat

[399] Les achats font partie de ces tâches progressivement attribuées aux PUI, à l’instar de la gestion des dispositifs médicaux non stériles ou le fonctionnement de la stérilisation. Ces tâches de gestion, qui ont trouvé leur justification en leur temps en termes d’efficacité (en particulier s’agissant de la stérilisation), peuvent sécuriser certains pharmaciens traditionnels dans leur PUI, mais elles sont lourdes et, à devoir tout faire, le pharmacien ne peut assurer les fonctions pour lesquelles il dispose d’une plus-value incontestable, notamment pour la pharmacie clinique. La ressource pharmaceutique est relativement rare et se doit d’être principalement consacrée à des missions à forte valeur ajoutée pour l’intérêt des patients.

[400] Pour les achats, la difficulté n’est toutefois pas que culturelle : le pharmacien est un acteur essentiel de leur gestion, son expertise technique est indispensable mais sa place est difficile à circonscrire. Le développement des groupements d’achat peut constituer une solution pour surmonter cette difficulté.

4.2.1.1. Recentrer le pharmacien sur les tâches pour lesquelles il apporte une réelle plus value

[401] Pour illustrer les modalités et la portée du recentrage et de l’allègement du travail de la pharmacie hospitalière, trois éléments d’une étude récente menée par le centre hospitalier Ste Anne peuvent être soulignés. La pharmacie de cet établissement d’environ 800 lits (dont 100 de MCO) s’est efforcée de quantifier la charge afférente à la gestion de sa principale procédure d’achats de médicaments, en l’occurrence un appel d’offres de 697 lots suivi d’un marché négocié pour la cinquantaine de lots déclarés infructueux (cf. annexe 12).

Sans être prédominante, l’intervention des services économiques est importante.

[402] Le temps d’intervention est d’un niveau comparable à celui qui pèse sur la pharmacie (22 semaines de travail soit 780 h) : rédaction du cahier des charges administratif et du règlement de la consultation, publication et chargement sur la plate-forme dématérialisée, réception et conformité juridique des offres, production des rapports de présentation et notification des marchés.

[403] Cette intervention suppose une concertation avec la pharmacie sur de nombreux points et à chaque fois que des difficultés se posent : choix de la procédure la plus adaptée, recours à des critères de choix spécifiques, durée du marché, modalités d’établissement des prix, lieu et délai de livraison, réception des fournitures, vérification et admission, garantie, etc. Afin de mieux sécuriser les procédures, cette intervention doit pouvoir s’étendre à la validation des rapports d’analyse des offres (égalité de traitement, bonne application des critères).

Au sein de la charge de travail pensant sur la pharmacie, le pharmacien, à lui seul, est mobilisé près de 8 semaines.

[404] Il se concentre sur la définition des spécifications techniques, l’analyse et le classement des offres. Il reçoit le concours d’un interne, notamment dans l’analyse des offres. Au total, le pharmacien et l’interne supportent les ¾ de la charge de travail pesant sur la pharmacie, mais un peu moins de 40 % de la charge de gestion totale du marché médicaments.

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[405] Pour être efficace, ce travail dans les procédures d’achats doit s’accompagner en amont d’une concertation étroite avec les prescripteurs que le pharmacien doit s’attacher à approfondir au travers de la COMEDIMS.

[406] Chargée de définir la politique du médicament de l’établissement, cette commission doit en effet fournir, au moyen notamment du livret thérapeutique, un cadre opérationnel de référence aux achats de médicaments : discussion sur l’étendue prévisible des besoins à l’occasion de l’inscription de nouvelles références au livret, création de consensus quant à la maîtrise du nombre de références médicamenteuses permettant un allotissement plus efficace des marchés (retrait de références du livret, définition d’équivalents thérapeutiques substituables).

Enfin, pour un coût modeste, l’informatisation et la dématérialisation des achats ont contribué à réduire significativement la charge pesant sur le pharmacien.

[407] C’est une réalité dans la définition des spécifications et prestations112 mais surtout dans le classement automatique des offres selon les critères posés, que le pharmacien n’a plus alors qu’à vérifier et valider. En revanche, les progrès sont encore limités pour le personnel administratif de la pharmacie qui doit consacrer l’essentiel de cinq semaines de travail à des tâches de saisie : enregistrement des offres qui ne parviennent encore qu’à hauteur de 15 % sous forme dématérialisée, retranscription des offres retenues (dématérialisées ou non) dans le logiciel de gestion faute d’interface avec le logiciel achat.

[408] La réduction de ce travail administratif passe par un développement de la dématérialisation des achats. Solution optionnelle jusqu’au 1er janvier 2010, celle-ci a progressé lentement : l’hétérogénéité des plates-formes de dématérialisation, le délai trop long de téléchargement des fichiers, les risques de leur réception hors délai du fait de difficultés techniques de transmission, le manque de sécurité de la signature électronique ont constitué autant de freins.

[409] Cette situation devrait rapidement évoluer, les établissements ayant depuis le 1er janvier 2010 la possibilité d’imposer aux candidats de répondre par voie électronique (art. 56-II CMP). A compter du 1er janvier 2012, la dématérialisation s’imposera également aux établissements avec l’obligation de réceptionner les réponses des fournisseurs (candidature et offre) émises par voie électronique.

[410] Ce développement programmé de la dématérialisation doit toutefois s’accompagner d’une maîtrise de la multiplication des plates-formes de dématérialisation et de leur ergonomie. Une consultation des représentants des fournisseurs lors de la rédaction par l’établissement (ou le groupement d’achats) du cahier des charges de sa plate-forme de dématérialisation pourrait contribuer à réduire les difficultés de fonctionnement.

Recommandation n°14 : Promouvoir un modèle d’achats pharmaceutiques fondé sur les bases suivantes :

- une gestion des achats pharmaceutiques intégrée dans la politique générale d’achats de l’établissement, conforme à ses modalités de mise en œuvre et de suivi ;

- un processus d’achats qui mobilise les différentes compétences de l’établissement, techniques mais aussi administratives, économiques et commerciales, sur la base de la plus-value apportée, en précisant les responsabilités respectives et en organisant la concertation nécessaire ;

- une intervention du pharmacien recentrée sur son expertise technique : la définition des besoins, les spécifications techniques et l’analyse des offres, en lien étroit avec les instances médicales (caractère substituable des produits, nouvelles indications thérapeutiques, innovations thérapeutiques, conditionnements, etc.)113

112 Par exemple, les libellés sont entrés une fois pour toutes, seules les quantités devant être réévaluées à chaque nouvelle procédure 113 Le pharmacien « s’appuie sur les avis de la Comedims, notamment pour définir le caractère non substituable des produits» ; Guide GEM-PS pré-cité.

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Recommandation n°15 : Réduire l’hétérogénéité et les difficultés de fonctionnement des plates-formes de dématérialisation en consultant les représentants des fournisseurs pour intégrer leurs contraintes dès l’élaboration du cahier des charges de ces plates-formes.

4.2.1.2. Identifier et hiérarchiser les enjeux de la politique d’achats

[411] Le souci d’alléger la gestion des achats de médicaments se traduit par une massification imposant une uniformisation des procédures, des durées de marché et des critères de choix. Trop importante, cette massification devient contre-productive, dès lors qu’elle conduit à faire l’économie d’une analyse des enjeux et de la performance des achats de médicaments.

[412] Cette analyse est nécessaire pour optimiser les marchés de médicaments en centrant les efforts sur les achats les plus lourds financièrement, les plus complexes ou évolutifs techniquement et ceux pour lesquels les enjeux de négociation sont les plus importants.

[413] Ainsi, sortir des grands appels d’offres certaines molécules pour les passer en marchés spécifiques, avec des montant inférieurs au seuil des procédures adaptées, peut être envisagé dès lors que la négociation rendue ainsi possible génère une économie significative, supérieure au coût de gestion des procédures négociées. Ceci suppose toutefois que l’établissement accède à des bases de comparaison avec les autres établissements ainsi qu’à un éclairage des prix de marché, afin de cibler les molécules redevables de marchés spécifiques et de chiffrer l’économie potentielle qu’apporterait leur négociation (cf. infra 4.3.2.2.).

[414] De même, introduire des durées de marché différenciées selon le type de molécules peut avoir un sens, dès lors que cette démarche permet de distinguer114 :

d’une part, des marchés fermes sur 2 ou 3 ans pour les produits peu évolutifs avec peu d’enjeux financiers, cette stabilité des références étant un gage de sécurité dans l’administration des soins, d’allégement des tâches de reconduction annuelle des marchés, voire de gains tarifaires par la garantie de volumes plus substantiels accordée aux fournisseurs ;

d’autre part, des marchés spécifiques annuels pour les produits les plus concurrentiels et les plus évolutifs afin de bénéficier régulièrement des opportunités offertes par le marché ; l’ampleur de ce traitement spécifique doit être apprécié en confrontant les gains économiques aux coûts de la gestion annuelle et au coût du changement (sécurité, tâches administratives) ; à titre indicatif, au SIH de Caudan, les marchés spécifiques annuels représentent le quart des lots de médicaments (mais 85 % des montants).

[415] Un traitement contractuel différencié devrait également être mis en place, pour accroître la réactivité des hôpitaux notamment publics. Ainsi, pour tout ou partie des médicaments de la liste en sus ou rétrocédés, des clauses « régimes de prix » devraient être systématisées afin de permettre une révision des prix en cas de baisse de prix publiée au JO (révision ne pouvant conduire à un prix supérieur au nouveau prix fixé au JO). De même, pour les médicaments dont le brevet tombe ou tombera dans un avenir proche, des clauses de dénonciation du marché avec le fournisseur princeps devraient être introduites115.

[416] Enfin, une réflexion sur la nature des critères de choix et leur pondération peut permettre d’accroître la pertinence et la sécurité de la sélection des fournisseurs. Par exemple, la pondération du critère prix pourrait devenir majoritaire pour les achats de produits basiques et courants alors que les exigences de qualité pourraient être plus discriminantes pour les produits les plus complexes.

114 Le code des marchés publics permet également de prévoir au sein d’une même procédure, des lots de durées différentesdurée différente avec ou sans reconduction. 115 P. PAUBEL, « Achats des produits du domaine pharmaceutique dans les établissements publics de santé », Université de Lille 2 thèse de doctorat en pharmacie, ANRT 2009

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[417] De même, des critères trop sommaires, basés sur le prix et la qualité, pourraient être enrichis pour mieux prendre en compte les aspects logistiques et commerciaux (outil de commande en ligne, encombrement et conditionnement, délai et adressage de livraison, interlocuteur litiges et présence de la force de vente, etc.) au regard des conséquences que ceux-ci peuvent avoir sur la gestion des médicaments dans l’hôpital.

Recommandation n°16 : Mettre en place une gestion différenciée des achats (procédure, durée, critères) pour les produits les plus évolutifs, les plus complexes ou les plus susceptibles de faire l’objet de négociation en analysant les enjeux de qualité et d’économies de la politique d’achats des médicaments.

4.2.1.3. Renforcer la négociation sur les achats de médicaments

[418] Une politique de négociation des achats hospitaliers apparaît nécessaire, même si les marges de manœuvre peuvent paraître réduites, dans les établissements publics comme dans les établissements privés : pour l’achat public, c’est le cahier des charges établi par l’acheteur qui s’impose, alors que pour l’achat privé, le contrat est le résultat d’une négociation entre l’acheteur et le fournisseur. Mais la négociation privée n’en est pas moins fortement encadrée par des normes d’origine européenne, qui sanctionnent lourdement les pratiques anticoncurrentielles (abus de position dominante, ventes liées, pratiques de fidélisation illicites)116.

[419] Même si elle peut s’étendre à des prestations associées et à des aspects logistiques, la négociation se concentre sur les conditions tarifaires : prix mais aussi remises, franco de port, reprises, etc.

[420] Sa mise en œuvre passe de façon privilégiée par un développement des procédures adaptées en dessous du seuil de 206 K€ (ce qui suppose une certaine démassification des procédures) et le recours aux enchères électroniques inversées au-delà de ce seuil (ce qui impose une dématérialisation des achats).

[421] Mais la négociation peut également concerner les appels d’offres, dès lors que les offres dépassent le prix d’objectif prévu pour le marché : les lots déclarés infructueux font alors l’objet d’une négociation avec les fournisseurs qui, dans bien des cas, révisent à la baisse leurs prix initiaux117.

[422] Enfin, les marchés négociés avec des fournisseurs détenant un monopole de production de molécules peuvent également faire l’objet de gains tarifaires. Cette négociation est encouragée par les pouvoirs publics pour les molécules onéreuses remboursées hors GHS, dont le tarif de responsabilité est fixé administrativement après concertation avec les industriels concernés (cf. supra) : lorsque les hôpitaux obtiennent des prix inférieurs à ce tarif de responsabilité, ceux-ci bénéficient d’un sur-remboursement représentant la moitié de la différence entre le prix payé et le tarif réglementaire. Selon la CNAMTS, ces sur-remboursements se sont élevés à 28,5 M€ sur les 10 premiers 2010 et à 49 M€ sur les 10 premiers mois 2009, correspondant à des prix payés inférieurs en moyenne de respectivement 4 % et 7 % au tarif de responsabilité118.

116 Notamment jurisprudence Lilly (Conseil de la Concurrence 5/3/1996 et Cour de Cassation 15/6/1999) : hausse de prix importante sur le Dobutrex mais avec une remise si achat de Vancomycine ; sanction de 30 MF (1,66 % du CA France) 117 A titre d’exemple, dans la campagne d’achat 2008-2009 du RESAH-IdF, 45 des 513 lots ont été déclarés infructueux pour prix trop élevés et ont fait l’objet de marchés négociés : ces lots ont été attribués à un prix inférieurs de 5,4 % au prix initial. 118 Cette performance moyenne peut être nettement plus substantielle pour certains établissements comme le CLCC d’Angers, gros consommateurs de molécules anti-cancer onéreuses : en 2009, celui-ci a bénéficié d’un sur remboursement de 900 K€ (réduit à 473 K€ en 2010), ce qui correspondait à un avantage tarifaire de 1,8 M€, représentant 14 % des dépenses de médicaments de l’année. Par ailleurs, la négociation des établissements publics semble avoir bien davantage de portée sur les quelques molécules en passe d’être génériquées ainsi que sur les molécules concurrencées (EPO notamment) que sur

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[423] La mise en œuvre de cette politique de négociation doit s’inscrire dans le cadre plus large de la réhabilitation de la fonction achats dans les hôpitaux. Cette dernière passe par un effort important de formation des personnels aux techniques de l’achat, public ou privé.

[424] Sauf à vouloir pérenniser la balkanisation de la fonction achats, cette formation d’acheteur doit essentiellement bénéficier à des agents des services économiques.

Recommandation n°17 : Renforcer la négociation sur les achats de médicaments en utilisant davantage les marges existant dans les différentes procédures (procédures adaptées, appel d’offre, marché négocié) et développer les formations d’acheteur au sein des services achats des hôpitaux.

4.2.1.4. Accroître la sécurité en s’appuyant sur le code des marchés publics

[425] Plusieurs éléments du processus d’achats peuvent avoir des conséquences directes sur la sécurisation du circuit du médicament, qu’il s’agisse de la sécurité de dispensation ou de la sécurité d’approvisionnement.

[426] S’agissant de la dispensation, des progrès ont été réalisés en matière de conditionnement unitaire, qui constitue fréquemment une exigence très discriminante dans le choix des offres. Cet accent porté sur le conditionnement unitaire doit cependant être réévalué pour tenir compte des conditions d’un développement de l’automatisation de la dispensation qui requiert du vrac (cf. supra).

[427] Les progrès sont moins nets concernant un allotissement dont l’affinement excessif n’est nullement prescrit par le code des marchés publics. Ainsi, lorsqu’il conduit à mélanger des fournisseurs de produits d’une même gamme pharmacologique avec des présentations différentes, cet allotissement menace la sécurité d’administration et va à l’encontre d’une bonne gestion de la commande publique : l’effet de gamme peut à bon droit dicter un regroupement des lots119.

[428] La sécurité d’approvisionnement constitue une exigence de base, plus difficile à obtenir à mesure de la concentration des achats hospitaliers : les clauses de pénalités atteignent leurs limites lorsque les fournisseurs remportent plusieurs des marchés des grands groupements dont les commandes massives saturent leurs capacités de production.

[429] La première réponse peut passer par un travail plus approfondi au niveau de l’allotissement : lorsque le volume à attribuer paraît trop important au regard des capacités indiquées par les offreurs, un même lot peut ainsi être attribué à plusieurs fournisseurs pour garantir la sécurité des approvisionnements120.

[430] La seconde réponse face aux risques de ruptures d’approvisionnement auxquelles sont confrontés les hôpitaux, passe par la mise en place d’un suivi qualitatif des fournisseurs permettant, entre autres, d’écarter les fournisseurs qui prennent leurs engagements trop à la légère ou prennent trop d'engagements au regard de leurs capacités. Conformément au droit, les défaillances passées d'un candidat dans l'exécution de marchés antérieurs constituent des manquements qu'un acheteur hospitalier doit pouvoir invoquer pour éliminer la candidature de ce fournisseur non fiable121.

les molécules onéreuses en exclusivité : en 2010, 37 % des 522 molécules recensées (représentant 86 % de leur montant) semblent ainsi ne pas avoir fait l’objet de négociation. 119 « L’allotissement tient compte des règles applicables à certaines professions (art.10 du CMP). Ainsi pour les produits pharmaceutiques, la sécurité d’administration (médicaments) et d’utilisation (DMS) par effet de gamme peut dicter l’allotissement » ; Guide de l’achat public « Produits de santé en établissement hospitalier » MINEFE 120 Ainsi le RESAH-IdF divise certains lots en deux secteurs géographiques (est/ouest) : en cas de défaut d’approvisionnement d’un fournisseur d’un secteur, il est possible de se reporter sur le fournisseur de l’autre secteur. 121 Cette faculté d'éliminer des candidats à raison de leurs manquements est de jurisprudence constante (CE, arrêt hôpital départemental d'Esquirol 27 février 1987) et a été récemment réaffirmé (CAA de Lyon, arrêt communauté d'agglomération Loire-Forez, 10 juin 2006) : « en application de ces dispositions [de l'article

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[431] Cette faculté doit contribuer, avec la maîtrise de la massification des achats effectués par les groupements hospitaliers, à une meilleure régulation du marché du médicament. Elle constitue ainsi élément important de sécurisation du circuit amont du médicament.

Recommandation n°18 : Mieux utiliser le code des marchés publics pour renforcer la sécurité des approvisionnements (exclusion des candidats défaillants, scission des lots) et du circuit clinique (regroupement de l’allotissement pour un effet de gamme)

4.2.1.5. Exploiter les potentialités offertes par les coopérations entre établissements

[432] Au regard des difficultés juridiques de mise en œuvre des centrales de référencement et du caractère exceptionnel des centrales d’achats très contraignantes pour les établissements, la principale et la plus dynamique forme de coopération repose sur les groupements d’achats hospitaliers : depuis 2006, plus de 50 groupements d'achats ont ainsi été mis en place, sur des segments d'achat divers (produits de santé, informatique, hôtellerie, assurance,...) à l'échelon le plus souvent régional et avec le soutien financier des ARS.

[433] L’apport le plus immédiat de ces groupements est celui d’un gain tarifaire d’environ 10 % par rapport aux marchés antérieurs de médicaments conclus séparément par les établissements. Cet apport est substantiel mais n’intervient que pour les premiers marchés passés par le groupement : les nouveaux gains obtenus ensuite sur les marchés ultérieurs sont bien plus modestes.

[434] Quoique difficilement valorisable, le principal intérêt des groupements résulte en fait de la concentration du processus achats au sein d’une petite équipe professionnalisée mêlant personnels techniques (pharmacien), administratifs (juriste) et commercial (acheteur)122. Cette équipe décharge d’une bonne partie de la gestion des achats de médicaments et dispositifs médicaux, les pharmacies des établissements adhérents : du temps pharmaceutique peut ainsi être redéployé.

[435] L’importance de ces apports est directement fonction de la qualité de la concertation développée entre pharmaciens pour travailler sur les équivalences thérapeutiques afin de produire un référencement centralisé et un allotissement optimal : le référencement centralisé doit être suffisamment resserré pour permettre de peser sur les prix grâce à des volumes d’achats importants ; mais il ne peut être trop resserré, au risque de contraindre les établissements adhérents à gérer des marchés séparés trop importants, afin de répondre à des besoins spécifiques non pris en compte par le groupement.

[436] Cette exigence de qualité dans la concertation sur les besoins en pharmacie pourrait justifier des aménagements : la réunion d’inter-COMEDIMS sur certaines thématiques et priorités pourrait permettre une réflexion collective au niveau du groupement et non individuelle au niveau de chacune des « COMEDIMS » d’établissement.

Recommandation n°19 : Soutenir les groupements d’achat ayant une politique volontariste de référencement commun afin d’allier gains tarifaires dans les achats, économies de gestion dans les pharmacies d’établissement et sécurisation du parcours du patient entre établissements ; dans cet objectif, définir le périmètre optimal des regroupements (géographique ou par spécialité) et favoriser la réunion « d’inter-COMEDIMS ».

[437] Cette exigence de qualité devrait également intervenir pour mieux fonder la définition du périmètre optimal des groupements d’achat au niveau territorial, départemental, régional ou national.

52], la commission d'appel d'offres peut, pour écarter une candidature, se fonder sur les manquements de l'entreprise concernée dans l'exécution de précédents marchés, à condition de rechercher si d'autres éléments du dossier de cette candidature permettent à ladite entreprise de justifier de telles garanties ». 122 Un ETP gère en moyenne 66 M€ d’achats au RESAH-IdF, 75 M€ à la CéRAP du Centre

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[438] Cette approche permet de rendre opérant les objectifs poursuivis à travers le regroupement des achats hospitaliers de médicaments, à savoir l’égalité territoriale dans l’accès aux traitements médicamenteux, ainsi que la sécurisation du parcours du patient entre structures de soins d’un territoire donné, par homogénéisation des médicaments dispensés. Elle ne condamne pas ipso facto des regroupements nationaux qui ont leur légitimité : ainsi, le niveau national peut apparaitre comme le niveau pertinent pour le regroupement des achats des 20 centres de lutte contre le cancer, dont les besoins spécifiques sont largement satisfaits par leur consortium d’achat (80 % du référencement est centralisé).

[439] L’intérêt des groupements ne se limite pas aux seuls aspects financiers, les adhérents pouvant profiter d’un éclairage sur les conditions du marché, d’échanges sur les pratiques d’achats voire de conseils ou d’appui à la bonne organisation de leurs achats. Vis-à-vis des fournisseurs, les groupements se doivent de mettre en place des relations constructives, voire mutuellement profitables comme dans le cas de la dématérialisation. L’approche doit radicalement se distinguer d’une démarche prédatrice de court terme, à la recherche de simples coups tarifaires, tentants mais sans lendemain.

[440] Dès lors qu’ils présentent une demande plus cohérente (qualité) et plus significative (volume), les groupements d’achat peuvent avoir un impact plus important sur le contenu de l’offre industrielle. Les groupements doivent donc travailler à l’affinement et à l’adaptation de leurs critères de sélection, non seulement pour motiver leur rejet d’offres, mais surtout pour inciter les industriels à l’amélioration de leurs offres futures (étiquetages, conditionnement, logistique, etc.).

[441] A terme, la politique d’achat doit constituer également un vecteur de qualité et de sécurité, comme cela peut l’être dans les structures à achats centralisés : ainsi, au-delà de la seule promotion du conditionnement unitaire, la Générale de Santé a établi un cahier des charges Qualipass pour assurer la prise en compte des critères de qualité et s’est engagée dans une démarche progressive de labellisation de ses fournisseurs ; cette politique a été étendue avec succès aux dispositifs médicaux. Pour le directeur national de la pharmacie du groupe Générale de santé, « la sécurité des DM est passée par les achats ».

Recommandation n°20 : Promouvoir au sein des groupements d’achats l’accompagnement de la fonction « achats » comme le développement des services d’information, de conseil et d’appui aux adhérents et la mise en place de partenariats constructifs avec les industriels du médicament.

4.2.2. Remettre à niveau et mutualiser les activités logistiques

[442] Le processus d’achat des médicaments connait des évolutions qui, même si elles doivent être amplifiées, apparaissent positives qu’il s’agisse d’adaptations réglementaires (nouveau code des marchés publics), de progrès technologiques (dématérialisation), de coopérations institutionnelles (groupements d’achat), voire de réflexions organisationnelles (place de la pharmacie).

[443] Le domaine de la logistique du médicament à l’hôpital, qui lui relève de la pleine responsabilité du pharmacien, apparaît en revanche nettement moins avancé, même si le processus de certification a permis de remédier aux situations les plus inacceptables. Il n’en demeure pas moins que des situations non sécurisées perdurent123, que l’automatisation et la mécanisation des tâches répétitives sont peu développées et que les coopérations et mutualisations entre établissements sont exceptionnelles. Or, ce domaine logistique recèle d’importants gisements de productivité (personnels et locaux) permettant de redéployer les moyens de la pharmacie vers des activités cliniques.

123 Comme cela a pu être constaté dans des rapports antérieurement établis dans l’IGAS

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4.2.2.1. Dématérialiser les commandes

[444] Positionnée en aval de marchés eux mêmes dématérialisés, dont elle peut récupérer les références et données, la dématérialisation de la commande (e-procurement) constitue un gisement d’économie, partagé entre acheteurs hospitaliers et industriels. Elle suppose l’édition de catalogues électroniques par les fournisseurs ainsi que l’exploitation de logiciels communs ou du moins interopérables, permettant à l’industriel de recevoir des commandes avec les bons codes, conditionnement et prix.

[445] Cette dématérialisation constitue un allégement direct des tâches en évitant les redondances de transcription d’informations dans la chaîne achat-approvisionnement. Elle permet également d’alléger la gestion par la réduction des risques d’erreurs et de litiges sur commandes et facturation, en fiabilisant les données relatives aux codes, au conditionnement et aux prix.

Recommandation n°21 : Dans le sillage des consultations mises en œuvre pour la dématérialisation des achats, promouvoir l’exploitation de logiciels communs avec les fournisseurs pour concrétiser les importantes économies de gestion que recèle la dématérialisation des commandes et des facturations

4.2.2.2. Développer les plates-formes médico-logistiques

[446] Au-delà du regroupement des achats déjà bien engagé, les principales marges de performance résident dans la mutualisation ou l’externalisation des fonctions logistiques qui permettent d’agir sur des postes de dépenses coûteux dans l’hôpital, c’est-à-dire les personnels, la logistique interne et la surface des locaux, notamment dans les métropoles.

La sous-traitance

[447] Quelques établissements développent des pratiques d’externalisation des processus et de la logistique pour passer des commandes et stocker les médicaments. Cette externalisation, sans que les choses soient bien claires, se fait semble-t-il par adjonction d’une plate-forme gérée par un prestataire extérieur, sur le même site que celui de la pharmacie hospitalière, au sein de l’établissement de santé, ou en restant proche de celui-ci.

[448] La réglementation ne prévoit pas cette possibilité de sous-traitance. Un amendement parlementaire a été récemment déposé dans ce sens dans le cadre du PLFSS 2011 et a été rejeté. Il introduisait un risque de rupture dans l’unité du circuit pharmaceutique de l’hôpital, voire de contrefaçon et ne permettait pas au pharmacien d’assurer ses missions.

La mutualisation : l’exemple du GCS Audois124

[449] Le GCS Audois de Prestations Mutualisées (GAPM) est un GCS de moyens qui, depuis août 2010, propose à sa dizaine d’adhérents publics et privés, plusieurs prestations médico-logistiques125. En matière pharmaceutique, le GAPM comporte une PUI qui emploie 21 (dont 5,8 pharmaciens) de ses 135 équivalents temps plein et dispose de 3 500 m² (sur les 2 hectares de la plate-forme).

[450] Cette pharmacie offre les prestations suivantes :

passation des marchés dans le cadre de l’ordonnance du 6 juin 2005 sur la base de critères d’attribution faisant intervenir le prix pour 60 % ;

émission des commandes émanant des services des établissements, réception des livraisons des fournisseurs et facturation mensuelle aux établissements ;

124 Le SIH de Caudan peut également être cité en exemple à cet égard, cf. annexe 7. 125 La pharmacie à usage intérieur, le ravitaillement général programmé, la blanchisserie, l’unité centrale de production alimentaire et le transport.

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rangement des livraisons dans les différentes zones de stockage de la PUI et préparation des approvisionnements bihebdomadaires aux unités de soins par un robot qui enregistre toutes les entrées et sorties par établissements ou services ;

dispensation nominative reglobalisée en cas d’analyse pharmaceutique des ordonnances transmises par les services ou dispensation globale dans les autres cas ;

faculté de livraison des approvisionnements dans le cadre d’un ravitaillement général programmé, au moyen de camions disposant de compartiments séparés (médicaments, linge, alimentation).

[451] Même si cette plate-forme pharmaceutique est encore en phase de montée en charge, plusieurs éléments peuvent être soulignés.

[452] La plate-forme constitue un outil de sécurisation : sécurité d’approvisionnement pour les plus petits établissements, possibilité d’analyse pharmaceutique et d’une dispensation nominative, fiabilisation du stockage et de la cueillette grâce au codage, harmonisation des livrets thérapeutiques et convergence vers les 11 500 références du livret du GAPM.

[453] Elle représente également un facteur de performance dans la gestion logistique du médicament :

en dépit d’un montant encore limité d’achats (10 M€), le GAPM a obtenu des prix réduits d’environ 8 % par rapport aux achats antérieurs ; à elle seule, cette marge couvre la redevance demandée aux adhérents soit 7,7 % des produits pharmaceutiques livrés (5 % si l’adhérent vient chercher ses produits) ; les établissements adhérents bénéficient ainsi du temps dégagé par la mutualisation, qu’il s’agisse de temps pharmacien et préparateur ou potentiellement du temps infirmier lorsque la dispensation nominative est également réalisée par le GAPM ;

les investissements consentis, qui dépassent souvent les capacités individuelles de chaque établissement, permettent d’importants gains de productivité ; le robot de stockage (coût d’acquisition de 350 K€) est piloté par un préparateur mais effectue le travail de 4 préparateurs pour la cueillette (heures d’ouverture) et le rangement (en dehors des heures ouvrables) ; l’intégration automatisée des données fournisseurs permet d’alléger considérablement les temps administratifs de saisie de ces données : cet allégement de la saisie (et des risques d’erreurs qui y sont liés) devrait s’accroître avec les progrès de la dématérialisation des offres fournisseurs et la mise en place de commandes et facturations électroniques (e-procurement).

Les précautions à prendre

[454] La mutualisation des activités logistiques impose naturellement une étude préalable permettant de garantir la viabilité du projet, qu’il s’agisse de définition des objectifs à atteindre ou de la fixation de la taille critique de la plate-forme.

[455] La définition des objectifs ne pose normalement pas de problèmes majeurs : centrés sur les moyens, les groupements logistiques présentent de moindres enjeux politiques que les groupements d’achat, notamment en termes de référencement, même si la multiplicité des références est aussi un problème logistique.

[456] En revanche, l’évaluation précise de l’activité attendue et de ses coûts est nécessaire pour adopter un format pertinent, tant en termes budgétaires et de personnels que d’équipements techniques et informatiques. A cet égard, la bonne prise en compte des aspects logistiques apparaît fondamentale : la définition du périmètre d’activité doit être essentiellement technique, fonction des quantités à livrer et des distances à parcourir.

Recommandation n°22 : Développer les groupements de coopération sanitaire ayant la fonction de plates-formes logistiques, sur la base d’une évaluation préalable précise des conditions économiques, techniques et logistiques leur assurant une taille critique suffisante pour garantir leur viabilité.

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4.3. Renforcer le pilotage national et régional

4.3.1. Augmenter les capacités de décision

4.3.1.1. Clarifier le rôle des acteurs

[457] L'action des acteurs nationaux manque de coordination et perd de sa cohérence pour les acteurs de terrain. En administration centrale, la responsabilité et le suivi des questions relatives à la politique du médicament à l'hôpital et au circuit du médicament sont morcelés entre les directions et au sein même de chaque direction. Il en découle l'impression d'une absence de vision globale du sujet. De la même façon, les interventions des autres acteurs nationaux ne sont pas coordonnées alors même qu'elles touchent le même champ (référentiels de prise en charge, organisation et informatisation ...).

Recommandation n°23 : Donner de la lisibilité au pilotage de la politique du médicament à l’hôpital au sein du ministère chargé de la santé et clarifier les rôles de chacune des directions en la matière.

[458] Nombre de professionnels rencontrés par la mission ont souligné la perte de visibilité sur l’organisation régionale et le pilotage de la politique du médicament, en particulier depuis la création des ARS. Les visites d’inspecteurs se font rares, pour de nombreuses ARS, il n’y a plus de structure identifiée au sein de l’agence et la place de l’OMEDIT n’est pas forcément lisible dans certaines régions.

Recommandation n°24 : Clarifier auprès des professionnels de santé de chaque région les interlocuteurs pertinents en matière de médicaments au sein de l’ARS, maintenir les missions d’inspection-contrôle et préciser les missions de l’OMEDIT et son positionnement.

4.3.1.2. Améliorer les connaissances en matière d’EIG médicamenteux en cohérence avec les systèmes de vigilance existants

[459] Un véritable pilotage suppose que les décideurs disposent d’une connaissance suffisante des événements qui surviennent dans le circuit du médicament pour éclairer leurs décisions.

[460] L’acquisition de ces connaissances pose un problème de faisabilité et de coût. L’organisation mondiale de la santé l’a précisé dès 2009, la surveillance des effets indésirables doit être à visée opérationnelle dans un objectif de mise en place d’actions d’amélioration et d’évaluation de ces actions.126

La nécessité d’articuler les signalements avec les dispositifs existants ou à venir

[461] En premier lieu, il s’agit d’articuler et d’assurer une cohérence avec les multiples systèmes déjà mis en œuvre, en particulier le système de pharmacovigilance et le dispositif de déclaration des alertes de santé publique au centre opérationnel de réception et de régulation des urgences sanitaires et sociales du département des urgences sanitaires de la DGS, via les ARS. Ce dernier doit permettre une bonne et rapide information des acteurs nationaux pour la prise de décision dans un cadre de sécurité sanitaire.

126 “Ultimately, it is the action we take in response to reporting – not reporting itself – that leads to change.”in http://www.who.int/patientsafety/events/05/Reporting_Guidelines.pdf

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[462] En deuxième lieu et avant le mois de juillet 2012, la France va devoir transposer les nouvelles dispositions de la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain. Deux dispositions, l’ouverture de la déclaration aux patients127 et l’élargissement de la notion d’effet indésirable aux erreurs médicamenteuses sont particulièrement importantes. Elles devraient conduire à intégrer dans le circuit de pharmacovigilance, la déclaration des erreurs, des abus et mésusages avec, au côté de la déclaration par le professionnel de santé, la déclaration par le patient. Le dispositif de pharmacovigilance qui fait l’objet d’une mission IGAS spécifique couvrira donc la problématique « produit » au sens large du terme.

[463] Toutefois, on ne peut limiter l’erreur médicamenteuse à la seule erreur produit. Au-delà du médicament (pharmacovigilance et erreurs produit), ce sont les erreurs générées tout au long du circuit qui importent, erreurs dites de pratique.

La mise en place d’une « boucle courte » pour action

[464] Il convient de privilégier, dans un premier temps, la mise en place d’un dispositif pour action (la déclaration a vocation à permettre l’évolution des pratiques professionnelles et la mise en place d’actions correctrices) et non pas d’un dispositif de surveillance statistique128. Par ailleurs, pour qu’un système de remontées au niveau national soit efficace, il faut que les acteurs de terrain se soient approprié la culture de la déclaration et qu’ils y trouvent un intérêt. Les dispositions prises dans le cadre de l’arrêté du 6 avril 2011 vont dans ce sens.

[465] Dans ce cadre, c’est la « boucle courte » au sein de l’établissement de santé qui doit être privilégiée (voir paragraphe 4.1.4.3), intégrant la déclaration, non seulement des effets indésirables graves mais aussi, plus largement, celle des erreurs qui permet d’anticiper la survenue des EIG129.

[466] Le coordonnateur de la gestion des risques associés aux soins, tel que défini à l’article R. 6111-4 du CSP, pourrait centraliser l’ensemble des signalements dont ceux en lien avec les EIG tels que définis aux articles R 6111-1 et suivants du code de la santé publique130. Ce guichet unique de déclaration au sein des établissements est un facteur important de simplification de la déclaration par les professionnels de terrain. A charge pour le coordonnateur de la gestion des risques d’être l’interface avec les instances qui sont en charge des vigilances et de la sécurité sanitaire.

[467] Il s’agit ici d’un signalement interne au sein de chaque établissement. Si tous les EIG ont vocation à faire l’objet d’une analyse, l’établissement devra pour les erreurs médicamenteuses faire un choix parmi l’ensemble des signalements qui lui remontent (l’expérience du CLCC d’Angers montre que le rythme d’une analyse par mois permet d’assurer une analyse approfondie, la mise en place d’actions correctrices et leur suivi).

Le signalement des EIG hors des établissements : une impasse dont il faut sortir

[468] Les textes organisent, depuis peu, la lutte contre les EIG au sein des établissements de santé. Ils ne préjugent pas de la déclaration de ces EIG en dehors de l’établissement.

[469] Ce dispositif de déclaration, pourtant voulu par le législateur dès 2002, n’a pas encore trouvé de concrétisation et un certain nombre de questions restent ouvertes après l’expérimentation menée par l’InVS. La mission ne sous-estime pas les difficultés d’une telle mise en place.

127 L’article L5121-20, 13° du CSP prévoit qu'un décret en conseil d'État viendra préciser les modalités de signalement d'effets indésirables effectué directement par les patients ou communiqué par les associations agréées de patients. 128 Sur les limites des systèmes de signalement des erreurs, voir annexe 11. 129 Sur les notions d’EIG, d’erreurs avérées, potentielles ou latentes, voir annexe 11. 130 Décret n° 2010-1408 du 12 novembre 2010 relatif à la lutte contre les événements indésirables associés aux soins dans les établissements de santé

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[470] L’article L. 1413-14, qui l’organise, a été modifié par l’ordonnance du 23 février 2010. « Tout professionnel ou établissement de santé ayant constaté une infection nosocomiale ou tout autre événement indésirable grave lié à des soins réalisés lors d'investigations, de traitements ou d'actions de prévention doit en faire la déclaration au directeur général de l'agence régionale de santé ». Ces dispositions s'entendent sans préjudice de la déclaration à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé des événements indésirables liés à un produit mentionné à l'article L. 5311-1, c’est-à-dire des déclarations relevant de la pharmacovigilance. Depuis 2010, un nouvel acteur, l’agence régionale de santé, a fait irruption dans le paysage. L’ARS est devenue l’administration compétente pour le recueil des EIG. Rien n’est dit sur une éventuelle remontée nationale de ces déclarations.

[471] Les difficultés inhérentes à la mise en place d’un dispositif global amène à recommander la mise en place d’un dispositif spécifique aux EIG médicamenteux, par comparaison avec ce qui a été fait dans le domaine des infections nosocomiales. A vouloir couvrir l’ensemble du champ des EIG, il semble qu’on ait paralysé le système de remontées.

[472] Ce dispositif global pourrait comporter deux types de signalement :

un système pour alerte en définissant précisément la typologie des EIG à remonter. Une réflexion préalable doit impérativement être menée sur la notion de gravité. Dans les systèmes expérimentés jusqu’alors, la notion de gravité est individuelle. L’utilité de remontée de données au niveau national ne peut se comprendre que si la gravité est entendue en termes de santé publique. A titre d’exemple, les remontées pourraient concerner les événements qui ne devraient jamais arriver, que l’on ne veut pas voir se reproduire, les équivalents de « never events » anglo-saxons.

un système de surveillance des EIG médicamenteuses avec des enquêtes de prévalence131 sur une période donnée visant à collecter des données dans des secteurs ciblés, pour évaluer un risque particulier détecté à dire d’experts ou évaluer l’efficacité d’une politique mise en œuvre. La mise en place de telle enquête dans un secteur bien défini devrait permettre d’avoir la puissance statistique pour une analyse fine.

[473] Pour articuler le dispositif de remontées des EIG médicamenteux avec le dispositif existant de pharmacovigilance, la mission recommande que les signalements pour alerte, qu’ils soient liés au produit ou aux pratiques, empruntent le même chemin. L’ouverture à l’Afssaps du guichet erreurs médicamenteuses a montré que ce dispositif pouvait fonctionner. Cela nécessitera le renforcement des moyens de la pharmacovigilance et de ceux du guichet erreurs médicamenteuses, une articulation au niveau régional entre les CRPV et les OMEDIT et au niveau national entre l’Afssaps et la DGOS (avec l’appui de la DSS, de la HAS, l’ANAP, l’InVS) en charge de faire évoluer les pratiques.

Recommandation n°25 : Construire un système de signalement en trois niveaux : au niveau des établissements de santé, privilégier la mise en place d’un système de

signalement pour action avec dans un premier temps une boucle courte avec une déclaration qui concerne aussi bien les EIG que les erreurs médicamenteuses ;

au niveau régional, demander aux établissements de santé de déclarer les EIG auprès d’un guichet unique qui pourrait être la plate-forme de veille et d’alerte ; ces EIG devront faire l’objet d’une expertise par les ARS avec l’appui des OMEDIT et des CRPV ;

au niveau national, définir par un texte réglementaire, la notion d’ « événements indésirables graves » en appréciant la gravité dans une perspective de santé publique et créer un système spécifique de remontée des EIG médicamenteux à l’instar de ce qui a été fait dans le domaine des infections nosocomiales : un système de surveillance mis en place grâce à des enquêtes de prévalence dans des secteurs ciblés sous le pilotage de la DGOS et un système pour alerte des EIG, avec une remontée vers le guichet erreurs

131 Prévalence : nombre d’EIG survenant sur une période et dans une population données

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médicamenteuses de l’Afssaps et une analyse par un comité piloté conjointement par l’agence (pour les problèmes produits) et la DGOS (pour les problèmes de pratiques).

4.3.1.3. Engager des études dans d’autres domaines

[474] La connaissance en matière d’événements indésirables doit être complétée dans d’autres secteurs pour aider le décideur à orienter la politique des établissements dans des domaines spécialisés.

[475] Il existe par exemple un besoin en matière de préparation de chimiothérapies. Les connaissances limitées en matière de stabilité des produits après reconstitution d’une part et les techniques variables de contrôle qualité du produit (poids, analyse spectrophotométrique) posent question ainsi que les approches technologiques diverses en matière de processus de filtration de l’air (poste de sécurité microbiologique au CLCC, isolateur à Compiègne ou Carcassonne) qui impactent la qualité mais également les coûts. Cette évaluation doit être accompagnée dans le cadre de programmes de recherche (comme les PHRC par exemple). La connaissance des stabilités réelles des médicaments132, en particulier des anticancéreux devant être reconstitués, est une nécessité notamment pour optimiser les reconstitutions centralisées de médicaments très onéreux et éviter les gâchis de poches reconstituées non utilisées.

[476] Enfin, les connaissances doivent être suffisantes en matière macro-économique. La structuration des dépenses de médicament à l’hôpital, la connaissance des prix d’achat pratiqués par les hôpitaux et des comportements de prescription, les conséquences de la distorsion induite par la fixation des prix du médicament en ville et la négociation des tarifs à l’hôpital pourraient éclairer utilement le décideur.

[477] Il serait souhaitable de développer des programmes de recherche clinique dans les secteurs du circuit du médicament, très spécialisés ou innovants.

4.3.1.4. Renforcer l’efficacité du CBU

[478] La multiplication des contrats (CBU, contrats de régulation des prescriptions hors GHS, futurs contrats de maîtrise des prescriptions hospitalières exécutées en ville, contrats de performance de l’ANAP…), auxquels s’ajoute le suivi des indicateurs DGOS, ANAP, HAS et le programme de gestion du risque assurance maladie, rend complexe, même avec un système d’information bien conçu, la gestion harmonisée des données, pouvant conduire à des incohérences préjudiciables à la qualité et à l’efficience.

[479] La DGOS fait actuellement évoluer le décret relatif aux CBU, notamment pour :

standardiser le rapport d’étape annuel en intégrant les indicateurs de la HAS ;

harmoniser les périodes de recueil et d’évaluation : CBU – programmes de gestion du risque de l’assurance maladie - HAS ;

accompagner les régions avec des outils d’évaluation harmonisés ;

faire avancer les référentiels relatifs aux dispositifs médicaux implantables.

[480] Un des objectifs des premiers CBU, atteint dans pratiquement tous les établissements, est la tenue régulière de réunions de la COMEDIMS. Il serait dommage que cet objectif disparaisse des futurs CBU, ce qui serait une destruction des avancées obtenues.

[481] Cette structure peut bien sûr en tant que de besoin, pour certaines réunions ou de manière systématique, être réunie avec d’éventuelles autres sous-commissions chargées des infections nosocomiales, de la douleur, etc.

132 qui est bien souvent supérieure à celles annoncées dans les AMM, qui sont les stabilités minimales assurant une sécurité juridique

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Recommandation n°26 : Faire évoluer la prochaine génération des CBU :

- définir au niveau national un socle commun d’engagements (items du contrat, objectifs, indicateurs, modalités d’incitation, d’évaluation, de sanctions éventuelles) sur lequel les ARS avec l’appui des OMEDIT pourront se fonder dans leur déclinaison pour les établissements de leur région ;

- mettre en commun et limiter le nombre d’indicateurs ;

- faire du CBU l’instrument unique de remontée des indicateurs relatifs au circuit du médicament à l’hôpital pour tous les acteurs nationaux ;

- prévoir un retour d’information systématique aux établissements sur le suivi de ces indicateurs ;

- conserver dans les CBU l’exigence d’une concertation régulière des professionnels de santé concernés par le circuit du médicament à l’hôpital.

4.3.2. Sécuriser le cadre juridique

4.3.2.1. Faire évoluer la réglementation

Sur les PUI

[482] Les dispositions réglementaires sur l’implantation des PUI et leurs missions sont complexes et risquent de freiner les évolutions vers des regroupements d’activités spécialisées ou de coopération.

[483] Au moment où se mettent en place les pôles et où l’implantation de pharmacies de pôle parait souhaitable pour favoriser l’implantation de l’équipe pharmaceutique au plus près des unités de soins et au moment où la création de GCS gérant une PUI est possible, la réglementation devrait être assouplie.

Sur les pharmaciens

[484] La notion de gérant de la PUI ne correspond plus aux modes d’organisation et de fonctionnement des établissements de santé.

[485] La responsabilité du gérant est de droit engagée en tant que pharmacien au regard des règles de la profession et en tant que chef de son service. Mais cela n’exonère ni le chef de pôle (si le pharmacien gérant ne l’est pas) ni le directeur, ni d’ailleurs les autres pharmaciens, voire pour leurs actes propres, les personnels de la PUI. Il est toutefois préférable d’éviter le terme de « pharmacien responsable » car à chaque exercice de la pharmacie correspond une appellation précise et celle-ci renvoie aux pharmaciens de l’industrie. Au-delà de la terminologie, le rôle des autres pharmaciens de la PUI devrait être plus explicité et valorisé dans les dispositions réglementaires.

Sur la préparation des médicaments

[486] La préparation des médicaments est soumise au monopole des pharmaciens. Mais il existe un doute lié à une confusion sémantique et à une imprécision des textes sur l’activité de préparation extemporanée et sur l’activité de préparation hospitalière. Le flou existant fragilise les personnels sur le terrain.

Recommandation n°27 : Modifier le code de la santé publique pour :

- assouplir les règles d’implantation des PUI en tenant compte des impératifs de sécurité d’une part et des évolutions en matière de spécialisation d’activités et de coopérations entre établissements d’autre part ;

- porter à un temps plein la durée de présence minimale du pharmacien dans les établissements de santé (pharmacien gérant ou pharmacien gérant +pharmacien adjoint) pour tenir compte de l’évolution de leurs tâches ;

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- réviser l’appellation de « pharmacien gérant », qui ne correspond plus à la réalité de la pratique d’aujourd’hui ;

- définir réglementairement les personnels habilités à effectuer des préparations au sein des établissements de santé.

4.3.2.2. Clarifier les notions ambiguës de la réglementation

[487] Les diverses dispositions du CSP relatives à la dispensation associent à la délivrance du médicament « l'analyse pharmaceutique de l'ordonnance médicale si elle existe ». Il serait utile de préciser le contenu et la temporalité de cette notion qui engage la responsabilité du pharmacien.

[488] L’absence de définition claire de la notion de contrôle effectif du pharmacien sur les actes des PPH, qui est le corollaire du devoir d’exercice personnel du pharmacien et de son obligation de présence génère des inquiétudes et des débats qui sont liés à la possibilité ou non d’effectuer des délégations de taches. La durée du temps de présence du pharmacien gérant, qui peut dans certains établissements n’être que de cinq demi-journées hebdomadaires, ou qui à plein temps dans une PUI desservant plusieurs sites ne peut assurer une présence effective, est source de difficultés.

Recommandation n°28 : Clarifier par circulaire ce que recouvrent les notions :

- d’analyse pharmaceutique, son contenu et la temporalité des modalités de mise en œuvre.

- de contrôle effectif et ouvrir la possibilité de délégation de tâches en prenant en compte l’élévation du niveau de qualification des préparateurs hospitaliers titulaires du diplôme de PPH.

4.3.2.3. Sécuriser et conforter la situation des préparateurs en pharmacie hospitalière

[489] L‘introduction dans le CSP et dans le décret statutaire des PPH de l’exigence d’une qualification supérieure à celle des préparateurs en pharmacie a vocation à se traduire par une élévation de leur compétence. Or, à l’heure actuelle, moins de la moitié des titulaires du corps de PPH de la fonction publique hospitalière ont été formés.

[490] La loi de 2004 a placé dans une situation juridique incertaine les préparateurs non diplômés des établissements publics et les préparateurs des établissements privés. II est indispensable de sécuriser cette situation.

[491] Il faut également prendre en compte l’élévation de compétences des PPH diplômés. Cela devrait permettre de mettre en place des délégations de tâches dans le cadre de la loi HPST, voire à terme des délégations d’actes comme celles dont bénéficient les auxiliaires médicaux. Le CSP distingue trois grandes catégories de professions de santé : les « professions médicales », les «professions de la pharmacie » et les « professions d’auxiliaires médicaux ». Pour ces derniers, des décrets d’actes pris en application de l’article L. 4161-1du CSP leur permettent, par délégation, d’accomplir certains actes soit sous le contrôle direct d’un médecin, soit sur sa prescription et, dans le cas particulier des infirmiers, les actes peuvent être réalisés dans le cadre de leur « rôle propre ». Bien que les PPH ne soient pas des auxiliaires médicaux, il serait possible d’envisager, dans le cadre des professions de la pharmacie, des délégations d’actes réglementées, d’autant plus que les projets actuels de réforme de la formation des préparateurs, notamment pour ceux exerçant dans une PUI, vont dans le sens d'une amélioration de leurs qualifications professionnelles. Toutefois, il est préalablement indispensable de procéder au bilan de la mise en place du diplôme de PPH, en particulier de la capacité des centres de formation à faire face aux demandes de formation.

Recommandation n°29 : Sécuriser et conforter la situation des PPH : - introduire dans le CSP deux dispositions législatives, l’une permettant aux agents

intégrés en 2001 au sein du corps des PPH non encore titulaires du diplôme de PPH de continuer à exercer au sein d’une PUI du secteur public et l’autre clarifiant l’exercice professionnel des préparateurs dans les établissements de santé privés ;

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- évaluer la réforme de la création du diplôme de PPH pour l’ensemble des établissements de santé publics et procéder à un bilan du corps des PPH (nombre de diplômés, évolution des effectifs) en étudiant les causes de l’augmentation de la précarisation du statut des préparateurs ;

- réfléchir à la délégation de tâches dans le cadre des dispositions de la loi HPST et envisager à plus long terme la rédaction d’un décret d’actes pour les PPH.

4.3.2.4. Fournir un éclairage sur les prix pratiqués sur le marché du médicament

[492] Les prix des médicaments sont en France très largement administrés, puisque ce marché de 27,1 Mds€ en 2009 ne connaît une véritable liberté des prix qu’à hauteur de 3,4 Mds € (12,5 %) :

c’est le cas du marché officinal, le plus important (80 % du marché), où seul le prix des spécialités non remboursables (1,6 Mds€ sur 21,4 Mds€) est fixé librement ;

c’est aussi, depuis la création de la liste en sus, le cas pour le marché hospitalier où la liberté des prix se concentre sur les médicaments inclus dans les tarifs de séjour et non rétrocédés (1,8 Mds€ sur 5,5 Mds €).

[493] Il apparaît souhaitable que soient précisés les objectifs poursuivis au travers du maintien de cette liberté des prix sur un petit tiers du marché hospitalier et cela, au regard des coûts de gestion générés par les procédures d’appel à la concurrence.

[494] S’il s’agit de peser sur les prix, il convient ensuite de s’en donner les moyens : au-delà de l’effort de formation à déployer dans les services achats (cf. supra), il est nécessaire de ne pas laisser les acheteurs hospitaliers aux prises avec une opacité tarifaire qui affecte leur performance.

[495] Cet accès à l’information tarifaire peut résulter tout d’abord d’une initiative de l’établissement, au moyen de son adhésion à une société privée de référencement dite « centrale de référencement ». Cette faculté d’adhésion est désormais explicitement prévue pour les établissements publics dans le code des marchés publics 2006, mais elle est, en pratique, très rarement mise en œuvre : si le simple accès à un catalogue personnalisé de fournisseurs potentiels, en contrepartie de frais modestes d’adhésion, ne soulève pas de difficultés, il n’en est pas de même dès lors que l’achat auprès des fournisseurs référencés est envisagée dans le respect des règles de la commande publique (transparence, concurrence)133.

[496] Il peut ensuite y avoir partage de l’information entre établissements de santé, en accompagnement ou complément du regroupement des commandes. Ainsi, depuis 2007, les établissements du Limousin peuvent accéder à une plate-forme électronique d'échange sur les achats hospitaliers, créée à l’initiative et avec le soutien de l’ARH. Cette plate-forme facilite le partage de bonnes pratiques et de cahiers des charges, la comparaison des coûts d'achats et la notation des fournisseurs, en les évaluant sur le respect des délais de livraison ou la qualité du produit. S’agissant des produits pharmaceutiques, le prix est mis en perspective avec le volume acheté et la remise obtenue du fabricant ou du distributeur.

[497] L’accès à l’information tarifaire sur les médicaments peut enfin être directement organisé par l’ARS au travers de son OMEDIT, comme c’est le cas en région Centre. A partir des données sur les prix et quantités achetées que les établissements doivent faire remonter à la DREES, l’OMEDIT Centre réalise un classement régional des prix des produits pharmaceutiques obtenus par les établissements (prix régional minimum, moyen et maximum pour chaque produit). Pouvant être affiné par type d’établissement (CHR, CH de référence, hôpitaux de proximité, hôpitaux privés), ce classement permet aux établissements de situer leur performance d’achat et d’améliorer leur pouvoir de négociation à l’égard des fournisseurs.

133 Or, les centrales de référencement sont bien davantage rémunérées par les fournisseurs (% sur les commandes passées par les adhérents) que parleurs adhérents (frais d’adhésion) ; pour plus de détails, circulaire DHOS/F4/2004/583 du 7 décembre 2004

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Recommandation n°30 : Généraliser la production au niveau régional d’une information sur le prix d’achat des produits pharmaceutiques obtenus par les établissements, afin de permettre à ces derniers de se situer et de mieux négocier avec leurs fournisseurs.

4.3.3. Objectiver les exigences de qualité et de sécurité vis-à-vis des industriels du médicament

4.3.3.1. Réfléchir à l’évolution des conditionnements

Le conditionnement unitaire

[498] Le souhait de disposer de conditionnements unitaires (chaque dose comportant la mention lisible du nom, de la DCI, du numéro de lot et de la date de péremption) pour tous les médicaments utilisés à l’hôpital est une revendication constante des pharmaciens, qui en ont, pour la plupart, fait l’un de leurs principaux critères de choix pour leurs appels d’offres.

[499] Cette demande paraît légitime : identifier une dose depuis la livraison jusqu'à l'administration au patient est effectivement un élément de sécurisation de bon sens. Actuellement, la base Thériaque® recense pour les formes sèches par voie orale 596 spécialités pour lesquelles il existe un conditionnement unitaire et 1756 pour lesquelles il n’en existe pas.

[500] Les entreprises du médicament, selon leur représentant national le LEEM, se disent favorables au développement du conditionnement unitaire « dès lors que la faisabilité technique est validée », mais estiment que « les contraintes liées au matériau et à la stabilité du principe actif nécessitent des adaptations techniques et des investissements du laboratoire fabricant qui ne sont pas toujours pleinement considérés par les acheteurs. L’appréciation par le moins disant est un frein à la valorisation du conditionnement unitaire et une absurdité en termes de sécurité sanitaire et donc de qualité de la dispensation pharmaceutique. » La mission a toutefois pu observer dans les établissements visités la place prépondérante de ce critère dans les appels d’offres.

[501] Compte tenu du caractère européen, voire mondial, des décisions industrielles, la SFPC a été moteur pour l’engagement d’une démarche de normalisation des conditionnements. L’Afssaps a quant à elle réalisé un cahier des charges pour inciter les industriels à développer des conditionnements unitaires et s’apprête à le diffuser.

[502] Toutefois, il semble qu'aujourd'hui, le sujet connaisse une double évolution :

d'une part, certains laboratoires qui proposaient jusqu’à une époque récente du conditionnement unitaire, moyennant surcoûts, paraissent revenir à des blisters classiques sans identification unitaire, voire à du « mini-vrac » (boîtes de 50 ou 100 comprimés en vrac dans un conditionnement primaire) ;

d'autre part, le déploiement d'automates de dispensation nominative de type « reconditionneur » (alternative aux gros automates de sur-conditionnement), tant à l'hôpital qu'en officine (notamment pour les EHPAD) pose la question de la mise à disposition, pour les spécialités à forte rotation, de présentations en vrac, disponibles dans certains pays européens.

[503] Dans ce contexte, la sécurité des activités de déconditionnement et/ou reconditionnement des médicaments fait encore l’objet d’incertitudes en l’absence :

de données validées relatives à la stabilité des médicaments lorsqu’ils sont conservés dans un conditionnement autre que le conditionnement primaire validé par l’AMM ;

de réglementation encadrant ces pratiques. Des textes (projets de décret et d’arrêté fixant des bonnes pratiques) sont finalisés concernant une petite part de ces activités, à savoir celles qui sont réalisées pour des résidents en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) par des pharmaciens d’officine.

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Recommandation n°31 : Établir un corpus réglementaire, en particulier pour rendre opposables des bonnes pratiques de dispensation, permettant de garantir la qualité des activités de déconditionnement et/ou de reconditionnement, qu’elles soient réalisées en ville, à l’hôpital ou en établissement médico-social, par des pharmaciens ou des infirmiers.

[504] La mise sur le marché de spécialités présentées sous un conditionnement vrac faciliterait la réalisation de la dispensation nominative par automate de type « reconditionneur », en supprimant l’étape porteuse de risques et chronophage de déconditionnement, Il n’y a pas d’obstacle réglementaire à cette mise sur le marché, mais pour l’heure, aucune AMM pour ce type de conditionnement n’a été délivrée en France.

Les formes injectables

[505] S’agissant des formes injectables, sources principales d’erreurs ou d’évènements indésirables graves médicamenteux, leur reconstitution ou préparation apparaît constituer une étape d’une extrême sensibilité, rendant hautement souhaitable le développement de formes prêtes à l’emploi.

[506] A défaut, une modalité de sécurisation ayant fait ses preuves, en particulier avec le déploiement prévu par le plan cancer de la centralisation de la préparation des anticancéreux, est de confier la préparation des médicaments à risque, en particulier certains injectables, à l’équipe pharmaceutique. Cette centralisation permet la mise en place en routine de processus d’assurance qualité de type quasi-industriels, améliorant la qualité, la sécurité et la traçabilité des préparations, dès lors que le matériel, les locaux, le personnel et les procédures sont adaptés et que les besoins de l’établissement (ou d’un GCS regroupant plusieurs établissements par exemple) sont suffisamment importants.

Recommandation n°32 : Favoriser la mise à disposition industrielle de formes injectables prêtes à l'emploi et promouvoir la centralisation de la dilution/reconstitution/préparation des médicaments injectables à haut risque (préparations pédiatriques, injections intrathécales, etc.)

La sécurisation de l’administration

[507] Le développement de solutions technologiques de type bracelet d’identification des patients à code-barres, permettant de relier informatiquement l’administration à l’ensemble du circuit de prise en charge thérapeutique, tant logistique (administration du bon produit au bon patient) que clinique (administration du médicament prescrit, validé et dispensé au bon patient), est un objectif important.

[508] La mise en œuvre de ces solutions est toutefois dépendante du déploiement complet du système d’information et en représente un aboutissement. Aussi, ce développement ne peut être escompté pour les prochains mois que dans quelques établissements et les objectifs ne peuvent pour l’heure qu’être très modestes.

[509] Une solution simple à mettre en œuvre dès à présent dans tous les établissements pour sécuriser l’administration, indépendante de la solution choisie en termes de prescription / dispensation / rangement en DCI ou en nom de spécialité, serait de réaliser et d’intégrer dans le système d’information les photos des conditionnements de chaque médicament présent dans l’établissement.

[510] Ainsi, les préparateurs au moment de la dispensation et les infirmiers, le cas échéant pour le rangement, mais surtout au moment de l’administration, peuvent, même en présence d’un code-barres ou Data Matrix adéquat, opérer une vérification visuelle simple d’identité du médicament avec celui qui a été prescrit.

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4.3.3.2. Mieux identifier les produits à risques par leur étiquetage

[511] En matière de sécurisation des étiquetages, en 2007, l’Afssaps a élaboré un plan d’harmonisation des étiquetages des produits injectables pour aider les utilisateurs dans la compréhension des informations et réduire les risques de mauvaise interprétation des mentions relatives à la concentration en principe actif.

[512] Quatre substances à risques particuliers sont actuellement ciblées : Atropine, Ephédrine, Adrénaline et chlorure de potassium (produits souvent utilisés en situation d’urgence, produits à marge thérapeutique étroite, faible taille du conditionnement ce qui est un facteur limitant pour l’apposition de mentions lisibles permettant l’identification du médicament et de la dose).

[513] Le rapport IGAS sur le circuit du médicament à l’AP-HP134 indiquait que l’utilisation de codes couleurs était considérée par l’Afssaps, à juste titre, comme représentant une fausse sécurité, générant des réflexes finissant par remplacer la vérification systématique de l’identité du produit à administrer. Il recommandait toutefois de créer un code couleur général pour une seule catégorie particulière de solutés injectables : ceux ne devant pas être administrés purs. Un premier décret en cours de finalisation devrait prochainement fixer de telles exigences pour l’étiquetage des préparations hospitalières (mention rouge sur fond noir « ne pas administrer pour les solutions hypertoniques »).

Recommandation n°33 : Adopter dans un premier temps sous forme d’une recommandation Afssaps, un étiquetage binaire harmonisé et facilement repérable pour différencier les produits injectables directement de ceux qui nécessitent une préparation (au premier chef la dilution). Porter ce sujet au niveau européen pour inscrire cette exigence dans un texte, dans le respect des règles communautaires.

4.3.3.3. Préserver la transparence des données scientifiques nécessaires aux pharmaciens

[514] Une problématique récente, générant progressivement une perte d’expertise, est la difficulté croissante, depuis une quinzaine d’années, d’accès des médecins et des pharmaciens à certaines données sur les médicaments, telles que la pharmacocinétique, les tests de dissolution, de stabilité, de « palatabilité » (acceptabilité du goût, de la texture), etc. Le secret industriel est de plus en plus évoqué pour refuser l’accès aux éléments du dossier ayant permis d’obtenir l’autorisation de mise sur le marché (AMM, partie 3-2P, Qualité pharmaceutique). Or, la connaissance de ces données est nécessaire pour opérer des choix éclairés, optimiser les stocks et les préparations ou reconstitutions, améliorer la chronologie des traitements, exercer un œil critique sur les informations, etc.

Recommandation n°34 : Clarifier les conditions d’accès des médecins et pharmaciens aux données de l’AMM des médicaments relatives à la qualité pharmaceutique. Œuvrer à la mise en commun des tests de stabilité au sein d’une base de données nationale afin d’optimiser les préparations/reconstitutions de médicaments onéreux.

134 Rapport RM2010-098P précité

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90 IGAS, RAPPORT N°RM2011-063P ¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯

Conclusion

[515] Impliqué de façon transversale dans la plupart des processus et faisant intervenir quasiment tous les acteurs de la chaîne de soins, le circuit du médicament à l’hôpital est une des principales composantes de la sécurité, de la qualité et de l’efficience des soins. Depuis l’achat des médicaments, qui conditionne tant le bon usage au sein de l’établissement que l’optimisation des dépenses, jusqu’à l’administration au patient, étape révélatrice de la qualité de l’ensemble de la chaîne, les connexions entre les circuits logistique et clinique sont autant de points de sécurisation et de maîtrise des coûts, qui peuvent avoir des impacts allant bien au-delà des seules problématiques produits.

[516] Positionner chaque acteur dans les domaines où sa plus value est la plus importante permet d’améliorer la qualité et la sécurité du circuit du médicament. Pour les directions des établissements et les instances de pilotage régionales et nationales, cette démarche devrait constituer un vecteur privilégié de l’amélioration de l’organisation de l’ensemble des soins à l’hôpital. Une meilleure répartition des tâches, centrée sur l’intérêt des patients, est de nature à diminuer les risques, renforcer la confiance et la collaboration entre praticiens médicaux et pharmaceutiques, personnels médico-techniques et infirmiers, fluidifier la circulation des informations et réduire les coûts. Elle permet de mieux maîtriser les étapes pour éviter la survenue d’erreurs et d’effets indésirables graves.

[517] Cette réorganisation des tâches, chacun étant centré sur son cœur de métier, favorise un climat de collaboration et de confiance et constitue un environnement propice à la mise en œuvre d’une gestion des risques efficace. Par l’analyse des erreurs et « presqu’erreurs », cette approche doit permettre d’éviter la survenue des accidents avant qu’ils ne se concrétisent. L’accompagnement régional et national est nécessaire aux mutations qu’exige le passage d’une culture de la qualité à celle de la gestion des risques, d’une culture de la faute à une culture de la déclaration, d’une culture punitive à une culture de la transparence.

[518] Les évolutions préconisées par ce rapport passent en grande partie par la réorganisation et le redéploiement de ressources disponibles au sein des établissements. Certaines recommandations nécessitent toutefois des arbitrages des directions hospitalières avec, le cas échéant, le soutien des instances régionales et nationales. C’est le cas des investissements informatiques et technologiques les plus importants, nécessaires en particulier au développement de la pharmacie clinique.

[519] L’implantation de ces équipements techniques dans les hôpitaux doit être développée pour améliorer la sécurité, la qualité et l’efficience des soins d’autant que les quelques données disponibles font ressortir la rentabilité des solutions proposées. Leur évaluation doit toutefois être renforcée tant pour identifier et prévenir les nouveaux risques qu’ils génèrent, que pour en valider le retour sur investissement.

Marie-Hélène CUBAYNES

Muriel DAHAN Evelyne FALIP Didier NOURY

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IGAS, RAPPORT N°RM2011-063P 91

Listes des recommandations de la mission

N° Recommandations Autorité responsable

Échéance

Améliorer la qualité et la sécurité du soin médicamenteux

11

Mettre en place au niveau de chaque établissement de santé un nombre limité d’actions prioritaires pour améliorer la sécurité dans des secteurs identifiés comme à haut risque du circuit du médicament sur le modèle de la démarche initiée par l’OMS au niveau international (l’OMS a choisi 5 actions). Inscrire cet objectif dans le CBU et la certification

ES135 DGOS / ARS136 et HAS

Court terme

12

Accompagner concrètement la mise en œuvre de la politique de gestion des risques dans les établissements de santé au plus près des unités de soins. Faciliter son appropriation par les acteurs en privilégiant les outils de terrain sur le modèle de l’outil d’autodiagnostic « Inter diag médicaments » de l’ANAP ou de la liste de contrôle (« check list ») du bloc opératoire de la HAS

ARS / OMEDIT ANAP et HAS

Court terme

13

Mettre en place au sein des établissements un système de signalement des erreurs médicamenteuses à usage interne. Clarifier les questions de responsabilité du déclarant. Favoriser l’interdisciplinarité et en particulier toutes les actions qui facilitent l’implantation de l’équipe pharmaceutique dans l’unité de soins.

Inscrire ces objectifs dans le CBU et la certification

ES ARS et HAS

Court terme

135 ES pour établissements de santé 136 En matière de politique du médicament, l’ARS doit s’appuyer sur le travail des OMEDIT

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92 IGAS, RAPPORT N°RM2011-063P ¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯

25

Construire un système de signalement en trois niveaux :

- au niveau des établissements de santé, privilégier la mise en place d’un système de signalement pour action avec dans un premier temps une boucle courte avec une déclaration qui concerne aussi bien les EIG que les erreurs médicamenteuses ;

- au niveau régional, demander aux établissements de santé de déclarer les EIG auprès d’un guichet unique qui pourrait être la plate-forme de veille et d’alerte ; ces EIG devront faire l’objet d’une expertise par les ARS avec l’appui des OMEDIT et des CRPV ;

- au niveau national, définir par un texte réglementaire, la notion d’ « événements indésirables graves » en appréciant la gravité dans une perspective de santé publique et créer un système spécifique de remontée des EIG médicamenteux à l’instar de ce qui a été fait dans le domaine des infections nosocomiales :

o un système de surveillance mis en place grâce à des enquêtes de prévalence dans des secteurs ciblés sous le pilotage de la DGOS ;

o un système pour alerte des EIG, avec une remontée vers le guichet erreurs médicamenteuses de l’Afssaps et une analyse par un comité piloté conjointement par l’agence (pour les problèmes produits) et la DGOS (pour les problèmes de pratiques).

ES ARS DGS / DGOS / Afssaps

Moyen terme

10 Sécuriser le travail infirmier par l’informatisation de la prescription, le conditionnement unitaire du médicament et les procédés d’identitovigilance.

DGS / DGOS / Afssaps

Moyen terme

33

Adopter dans un premier temps sous forme d’une recommandation Afssaps, un étiquetage binaire harmonisé et facilement repérable pour différencier les produits injectables directement de ceux qui nécessitent une préparation (au premier chef la dilution). Porter ce sujet au niveau européen pour inscrire cette exigence dans un texte, dans le respect des règles communautaires.

DGS / Afssaps DGS / DAEI

Court terme Moyen terme

34

Clarifier les conditions d’accès des médecins et pharmaciens aux données de l’AMM des médicaments relatives à la qualité pharmaceutique. Œuvrer à la mise en commun des tests de stabilité au sein d’une base de données nationale afin d’optimiser les préparations/reconstitutions de médicaments onéreux

DGS / Afssaps Moyen terme

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IGAS, RAPPORT N°RM2011-063P 93

32

Favoriser la mise à disposition industrielle de formes injectables prêtes à l'emploi. Promouvoir la centralisation de la dilution/reconstitution/préparation des médicaments injectables à haut risque (préparations pédiatriques, injections intrathécales, etc.)

DGS & Afssaps DGOS / ARS

Moyen terme Immédiat

1

Accélérer la mise en œuvre des dispositions de la loi HPST visant l’amélioration de la « transition thérapeutique », (conciliation médicamenteuse à l’entrée, suivi de l’ordonnance de sortie), le recueil par l’hôpital des coordonnées des professionnels de santé ambulatoires ou médico-sociaux, la désignation du pharmacien correspondant, les coopérations entre professionnels, l’éducation thérapeutique. Finaliser la publication des textes d’application et renforcer progressivement la place de ces dispositions au sein des outils d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins (certification, CBU, formation professionnelle, en particulier).

DGOS Immédiat

2 Déployer le dossier pharmaceutique en établissement de santé et médico-social, en mettant en place les interfaces nécessaires à la communication entre les systèmes d’information afin de faciliter la « transition thérapeutique » et de fluidifier le parcours de soins.

DGOS avec appui ASIP et en lien avec le CNOP

Moyen terme

31 Établir un corpus réglementaire, en particulier pour rendre opposables des bonnes pratiques de dispensation, permettant de garantir la qualité des activités de déconditionnement et/ou de reconditionnement, qu’elles soient réalisées en ville, à l’hôpital ou en établissement médico-social, par des pharmaciens ou des infirmiers.

DGS & DGOS Court terme

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Utiliser au mieux les compétences des professionnels de santé au service du patient

7

Déployer les ressources pharmaceutiques au service des patients, en mettant en œuvre le plus largement possible l’analyse pharmaceutique et en développant les activités de pharmacie clinique dans les établissements. Adapter la formation initiale et continue (développement professionnel continu) à ces évolutions.

DGOS/ARS/CH DGOS et ministère en charge de l’enseignement supérieur

Court terme

8

Évaluer parmi les tâches actuellement assumées par les pharmaciens dans les établissements de santé, celles qui peuvent être déléguées ou transférées afin de dégager du temps pour prioriser les missions à haute valeur ajoutée du pharmacien. Évaluer alors les besoins minimaux en temps pharmaceutique des établissements pour les définir en fonction des caractéristiques des établissements (taille, type d’activité, localisation, organisation, etc.)

HAS DGOS avec appui ANAP et lien avec SFPC

Court terme

10

Repenser les organisations de ressources humaines au sein des hôpitaux pour permettre, chaque fois que cela est possible, aux préparateurs en pharmacie de préparer les doses à administrer et de gérer les armoires des unités de soins afin de décharger les infirmiers de ces tâches. Auditer les pratiques visant à limiter l’interruption de tâches.

ES HAS

Immédiat

9 Inscrire dans la certification des logiciels de prescription et des banques de données l’exigence d’ergonomie. Intégrer dans toute nouvelle réglementation qui augmente la charge de travail d’un professionnel de santé une évaluation de son impact sur son activité clinique autour du patient.

DGOS Immédiat

29

Sécuriser et conforter la situation des préparateurs en pharmacie hospitalière : - introduire dans le CSP deux dispositions législatives, l’une permettant aux agents intégrés en 2001 au sein du corps des PPH non encore titulaires du diplôme de PPH de continuer à exercer au sein d’une PUI du secteur public et l’autre clarifiant l’exercice professionnel des préparateurs dans les établissements de santé privés ; - évaluer la réforme de la création du diplôme de PPH pour l’ensemble des établissements de santé publics et procéder à un bilan du corps des PPH (nombre de diplômés, évolution des effectifs) en étudiant les causes de l’augmentation de la précarisation du statut des préparateurs ; - réfléchir à la délégation de tâches dans le cadre des dispositions de la loi HPST et envisager à plus long terme la rédaction d’un décret d’actes pour les PPH.

DGOS

Immédiat Moyen terme

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IGAS, RAPPORT N°RM2011-063P 95

Dégager des marges de manœuvre pour redéployer des moyens pour la sécurité du patient

4

Soutenir une informatisation performante du circuit du médicament : - développer des « guides utilisateurs » à l’intention des établissements permettant une gestion rigoureuse de la conduite des projets d’informatisation ; - mettre en place, dans le cadre de l’analyse pharmaceutique, un recensement et un suivi des erreurs spécifiques dues aux dysfonctionnements générés par l’informatisation ; - évaluer les solutions informatiques disponibles sur la base d’une cartographie des logiciels mis en place dans les établissements et d’un référentiel qualité (règles d’interopérabilité, fonctionnalités attendues) ; - constituer un dossier d’aptitude à l’utilisation (« utilisabilité ») des logiciels hospitaliers, validé nationalement ; - soutenir financièrement les projets d’informatisation les plus performants.

DGOS avec appui ANAP, HAS et ASIP

Moyen terme

5

Implanter les nouvelles solutions technologiques en fonction des capacités financières des établissements en commençant par les robots les plus abordables et les plus rentables en logistique (stockeurs rotatifs).

Envisager des rapprochements inter-établissements pour les automates les plus complexes et onéreux.

Accompagner cette implantation par des études comparatives et des études médico-économiques en évaluant le retour sur investissement. Encadrer la mise en place par une démarche qualité et par une politique de gestion des risques pour anticiper les nouveaux risques.

ES ARS DGOS avec appui ANAP

Immédiat Moyen terme

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14

Promouvoir un modèle d’achats pharmaceutiques fondé sur les bases suivantes : - une gestion des achats pharmaceutiques intégrée dans la politique générale d’achats de l’établissement, conforme à ses modalités de mise en œuvre et de suivi ; - un processus d’achats qui mobilise les différentes compétences de l’établissement, techniques mais aussi administratives, économiques et commerciales, sur la base de la plus-value apportée, en précisant les responsabilités respectives et en organisant la concertation nécessaire ; - une intervention du pharmacien recentrée sur son expertise technique : la définition des besoins, les spécifications techniques et l’analyse des offres, en lien étroit avec les instances médicales (caractère substituable des produits, nouvelles indications thérapeutiques, innovations thérapeutiques, conditionnements, etc.)

ES Moyen terme

30 Généraliser la production au niveau régional d’une information sur le prix d’achat des produits pharmaceutiques obtenus par les établissements, afin de permettre à ces derniers de se situer et de mieux négocier avec leurs fournisseurs.

ARS Court terme

16 Mettre en place une gestion différenciée des achats (procédure, durée, critères) pour les produits les plus évolutifs, les plus complexes ou les plus susceptibles de faire l’objet de négociation en analysant les enjeux de qualité et d’économies de la politique d’achats des médicaments.

ES Immédiat

18 Mieux utiliser le code des marchés publics pour renforcer la sécurité des approvisionnements (exclusion des candidats défaillants, scission des lots) et du circuit clinique (regroupement de l’allotissement pour un effet de gamme).

ES Immédiat

17 Renforcer la négociation sur les achats de médicaments en utilisant davantage les marges existant dans les différentes procédures (procédures adaptées, appel d’offre, marché négocié). Développer les formations d’acheteur au sein des services achats des hôpitaux.

ES Court terme

19

Soutenir les groupements d’achat ayant une politique volontariste de référencement commun afin d’allier gains tarifaires dans les achats, économies de gestion dans les pharmacies d’établissement et sécurisation du parcours du patient entre établissements ; dans cet objectif, définir le périmètre optimal des regroupements (géographique ou par spécialité) et favoriser la réunion « d’inter-COMEDIMS ».

ARS Court terme

20

Promouvoir au sein des groupements d’achats l’accompagnement de la fonction « achats » comme le développement des services d’information, de conseil et d’appui aux adhérents et la mise en place de partenariats constructifs avec les industriels du médicament.

ARS Court terme

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IGAS, RAPPORT N°RM2011-063P 97

22 Développer les groupements de coopération sanitaire ayant la fonction de plates-formes logistiques, sur la base d’une évaluation préalable précise des conditions économiques, techniques et logistiques leur assurant une taille critique suffisante pour garantir leur viabilité.

ARS Moyen terme

15 Réduire l’hétérogénéité et les difficultés de fonctionnement des plates-formes de dématérialisation en consultant les représentants des fournisseurs pour intégrer leurs contraintes dès l’élaboration du cahier des charges de ces plates-formes

ES Court terme

21 Dans le sillage des consultations mises en œuvre pour la dématérialisation des achats, promouvoir l’exploitation de logiciels communs avec les fournisseurs pour concrétiser les importantes économies de gestion que recèle la dématérialisation des commandes et des facturations.

ES Court terme

Donner de la lisibilité de pilotage au niveau national et régional

23 Donner de la lisibilité au pilotage de la politique du médicament à l’hôpital au sein du ministère chargé de la santé et clarifier les rôles de chacune des directions en la matière.

Ministre Immédiat

24 Clarifier auprès des professionnels de santé de chaque région les interlocuteurs pertinents en matière de médicaments au sein de l’ARS, maintenir les missions d’inspection-contrôle et préciser les missions de l’OMEDIT et son positionnement.

SG & ARS Immédiat

26

Faire évoluer la prochaine génération des CBU : - définir au niveau national un socle commun d’engagements (items du contrat, objectifs, indicateurs, modalités d’incitation, d’évaluation, de sanctions éventuelles) sur lequel les ARS avec l’appui des OMEDIT pourront se fonder dans leur déclinaison pour les établissements de leur région ; - mettre en commun et limiter le nombre d’indicateurs ; - faire du CBU l’instrument unique de remontée des indicateurs relatifs au circuit du médicament à l’hôpital pour tous les acteurs nationaux ; - prévoir un retour d’information systématique aux établissements sur le suivi de ces indicateurs ; - conserver dans les CBU l’exigence d’une concertation régulière des professionnels de santé concernés par le circuit du médicament à l’hôpital.

DGOS ANAP/HAS/UNCAM ARS

Immédiat

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6

Mobiliser les directions hospitalières, notamment au travers des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, autour des différents enjeux du médicament à l’hôpital et au-delà de la simple maîtrise des dépenses : qualité de prise en charge, responsabilité juridique et coopération entre établissements. Faire de la sécurisation et de l’optimisation du circuit du médicament un vecteur d’amélioration de l’organisation des soins à l’hôpital.

ARS Immédiat

27

Modifier le code de la santé publique pour : - assouplir les règles d’implantation des PUI en tenant compte des impératifs de sécurité d’une part et des évolutions en matière de spécialisation d’activités et de coopérations entre établissements d’autre part ; - porter à un temps plein la durée de présence minimale du pharmacien dans les établissements de santé (pharmacien gérant ou pharmacien gérant +pharmacien adjoint) pour tenir compte de l’évolution de leurs tâches ; - réviser l’appellation de « pharmacien gérant », qui ne correspond plus à la réalité de la pratique d’aujourd’hui ; - définir réglementairement les personnels habilités à effectuer des préparations au sein des établissements de santé.

DGOS Moyen terme

28

Clarifier par circulaire ce que recouvrent les notions : - d’analyse pharmaceutique, son contenu et la temporalité des modalités de mise en œuvre. - de contrôle effectif et ouvrir la possibilité de délégation de tâches en prenant en compte l’élévation du niveau de qualification des préparateurs hospitaliers titulaires du diplôme de PPH.

DGOS Immédiat

3

Élargir le champ des interlocuteurs des OMEDIT en incluant au-delà des professionnels hospitaliers, d’une part les professionnels libéraux et les officinaux, d’autre part les praticiens des établissements médico-sociaux (invitation à participer aux réunions et groupes de travail). Rénover le site e-omedit.fr et ses sites régionaux et élargir leur accès à l’ensemble des professionnels de la région pour répondre aux besoins en matière de circulation de l'information.

ARS & DGOS Immédiat

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Liste des personnes rencontrées

1. ENTRETIENS NATIONAUX

1.1. Direction générale de l’organisation des soins

Mme Annie PODEUR, directrice générale

M Yannick LE GUEN, sous-directeur du pilotage de la performance des acteurs de l’offre de soins

Mme Marie Ange DESAILLY CHANSON, conseillère médicale

Mme Valérie SALOMON, chef du bureau qualité et sécurité des soins

Mme Paule KUJAS, adjointe au chef du bureau qualité et sécurité des soins

Mme Julie AZARD, bureau qualité et sécurité des soins

Mme Maud LAMBERT-FENERY, chef du bureau ressources humaines hospitalières

Mme Anne-Laurence ARCHER-TOUVIER mission des systèmes d’information des acteurs de l’offre de soins

1.2. Direction générale de la santé

M Renaud MORIN, adjoint de la sous directrice de la politique des pratiques et des produits de santé

Mme Saliha CHERRAD, adjointe à la chef du bureau du médicament

Mme Isabelle DELOFFRE-MATHIEU, bureau du médicament

Mme Ghislaine PALIX-CANTONE, adjointe au chef de bureau, bureau des infections et autres risques liés aux soins, sous-direction des risques infectieux

M Jean-Luc TERMIGNON, bureau des infections et autres risques liés aux soins, sous-direction des risques infectieux

1.3. Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques

M François GUILLAUMAT-TAILLET, chef du bureau des professions de santé

Mme Céline MOTY-MONNEREAU, chargée de missions à la sous-direction de l’observation de la santé et de l’assurance maladie

1.4. Haute autorité de santé

M Raymond LE MOIGN, directeur de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins

M Vincent MOUNIC, chef de service du développement de la certification

Mme Nafissa ABDELMOUMENE, médecin dans le service du développement de la certification

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1.5. Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé

M Xavier CORNIL, adjoint au directeur chargé des affaires pharmaceutiques et de la biothérapie

Mme Sylvie LEREBOURS

Mme Angélique ARNOUX

Mme Dorothée DURAND

M Philippe CAVALIE

1.6. Institut de veille sanitaire

Mme Françoise WEBER, directrice générale

M Thierry CARDOSO, directeur du département de coordination des alertes et des régions

Mme Céline CASERIO-SCHONEMANN

Mme Nelly FOURNET

1.7. Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux

Mme Béatrice FALISE-MIRAT, directeur associé

M Hervé LABORIE, pharmacien, chargé de projet

1.8. Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés

Mme Agathe DENECHERE, directrice de cabinet du directeur général

Mme Laure PRESTAT, direction déléguée à la gestion et à l'organisation des soins, département en charge des produits de santé

M Michel MARTY, direction déléguée à la gestion et à l'organisation des soins, département en charge de l’hospitalisation

1.9. Ordre national des pharmaciens

Mme Isabelle ADENOT, présidente

M Jean-Yves POURIA, président du conseil central de la Section H ;

M Gérard MONTANE, trésorier de la section H ;

Mme Frédérique POTHIER, directrice de l'exercice professionnel

1.10. Conférence des commissions médicales d’établissement

M le docteur Francis FELLINGER, président

1.11. Société française de Pharmacie clinique

Mme Marie-Claude SAUX, Présidente,

M Rémy COLLOMP

Mme Jacqueline GRASSIN

Mme Armelle DELEVAY

M Philippe BOURGET

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1.12. Syndicat National des Pharmaciens des Établissements Publics de Santé

Mme Mariannick LE BOT, présidente,

M Guy LEBOUVIER

Mme Anne-Marie LIEBBE

Mme Françoise BERTHET

M Bernard DIEU

1.13. Syndicat National des Pharmaciens Praticiens Hospitaliers et Praticiens Hospitaliers Universitaires

M Philippe ARNAUD, président,

M Michel GUIZARD, vice président,

Mme Marie Hélène BERTOCCHIO, trésorière

1.14. Syndicat National des Pharmaciens gérants hospitaliers :

Mme Christine BARLA, présidente

1.15. Générale de santé

M Marc David SELIGMAN, directeur des relations institutionnelles

M Yann LEVY, directeur organisation et projets pharmacie

1.16. Centre hospitalier Sainte-Anne

M Pascal PAUBEL, chef du service de la PUI

Mme Christine RIEU, pharmacien

1.17. Société hospitalière d’assurances mutuelles

M Michel GERMOND, directeur

M David FRITSH, service de gestion des risques

Mme Virginie VION-SIMON, service juridique

1.18. Le Club des Acheteurs de Produits de Santé (CLAPS)

M Jean-Michel DESCOUTURES

1.19. Laboratoire EVALAB – CHRU de Lille

Mme Catherine BEUSCART-ZEPHYR, directrice

Mme Ludivine WATBLED, chef de projet sur le nouveau système d’information adopté par le CHRU

Mme Sylvie PELAYO, ergonome

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2. VISITES SUR LE TERRAIN

2.1. Le centre hospitalier de Compiègne

2.1.1. La direction

Mme Brigitte DUVAL, directrice Mme Christelle BOURSON, chef du pôle stratégie, directrice des affaires générales, qualité/risques, système d’information Mme Françoise BLAIZEAU, directrice adjointe en charge des affaires financières Mme Nathalie BECRET, directrice adjointe en charge des affaires économiques, techniques et biomédicales

2.1.2. Pôle support

Mme Anne-Marie LIEBBE, chef de pôle, chef de service de la pharmacie à usage intérieur Mme Fabienne BUKATO, pharmacien adjoint Mme Isabelle DAGRENAT, pharmacien adjoint, présidente de la COMEDIMS Mme Mélissa BOISGONTIER, pharmacien adjoint Mme Amélie LEPREUX, préparateur

2.1.3. Commission médicale d’établissement

M. le Dr. Yves DOMART, président

2.1.4. Direction des soins

Mme Brigitte GERSTEL, cadre de santé

2.1.5. Service de soins

Pédiatrie Mme le Dr. Christine VERVEL, chef du pôle femme-enfant Mme Valérie MERLIER, cadre de santé Mme Carine THIEUX, infirmière puéricultrice

Oncologie Mme le Dr. Sophie CLUET, chef de service Mme Isabelle ROHMER, cadre de santé

Pneumologie Mme le Dr. Stéphanie DEHETTE, chef de service Mme le Dr. Sandrine LOUTSKI, pneumologue Mme Florence BROZYNA, cadre de santé

2.1.6. L’OMEDIT Picardie

Mme Françoise MILLET, pharmacien, praticien hospitalier

2.2. Centre hospitalier régional d’Orléans

2.2.1. Direction

M. Olivier BOYER, directeur général M. Jean-Robert CHEVALLIER, directeur général-adjoint, M Francis GEST, directeur du système d’information Mme Sandrine DESSI, ingénieur en charge des logiciels métiers médico-techniques

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IGAS, RAPPORT N°RM2011-063P 103

M. Sylvain MARTIN, directeur des achats et de la logistique Mme Virginie BARBIER-SYRACUSE, chef du bureau des marchés publics Mme Claire DOPLAT, responsable du service de distribution

2.2.2. Commission médicale d’établissement :

Dr. Christian FLEURY, président

2.2.3. Pharmacie

Dr Pierre PLOCCO, chef de pôle, chef du service de la pharmacie centrale Dr Isabelle HERMELIN, chef du service de la pharmacie de la Source Dr Isabelle PLOCCO-DESMONTS, chef du service de la pharmacie de la Porte Madeleine Dr Véronique PRIOU, responsable de l’Unité de reconstitution des cytotoxiques Dr Catherine DA VIOLANTE, pharmacien clinicien Mme Michèle JOTHY, cadre préparateur

2.2.4. Direction des soins

Mme Martine MORANCAIS, directrice Mme Martine DE OLIVEIRA, infirmière référente sur le circuit du médicament

2.2.5. Services de soins

Service des maladies infectieuses et tropicales

Mme E. MINEAU, infirmière

Service anesthésie-adulte Dr BONNET, PH anesthésiste-réanimateur, chef de service Mme BELLANGER, infirmière anesthésiste chef Mme PUTTEL, cadre sage-femme

2.2.6. ARS Centre

Dr André OCHMANN, Directeur de l'offre sanitaire et médico-sociale Dr Dominique GLATTARD, Pharmacien inspecteur, responsable unité sécurité sanitaire des activités pharmaceutiques et biologiques Mme Agnès HUBERT-JOUANNEAU, responsable du pôle appui à la performance et gestion des risques

2.2.7. OMEDIT Centre

Dr Annick ROULEAU, coordinatrice de l’OMEDIT Dr Marie-Christine LANOUE, coordinatrice prenant la succession d’A Rouleau Dr Hughes du PORTAL, pharmacien

2.3. L’hôpital intercommunal du haut-limousin

2.3.1. Direction

M. Guy GENTY, directeur

2.3.2. Pharmacie à usage intérieur

M. Jacques DUCHAMBON, pharmacien gérant Mme Dr Béatrice HAMEL, pharmacien Mme Anita PREVOST, préparatrice en pharmacie

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2.3.3. Commission médicale d’établissement

M. le Dr Jacques CHARREYRON, président de la CME

2.3.4. Direction des soins

Mme Brigitte RIBEIRO, cadre de santé

2.3.5. Service de soins

Service de médecine de Bellac Mme Pascale DURAIN, cadre de santé Mme Julie LARRAUD, IDE

USLD Mme Evelyne MAKAROFF, cadre de santé Mme Véronique BROTHIER, IDE

EHPAD (le jardin fleuri) Mme Aurella UBEDA, cadre de santé

2.3.6. L’ARS LIMOUSIN

M Laurent VERIN, directeur général adjoint M Jacky HERBUEL-LEPAGE, directeur de l’offre de soins et de la gestion du risque Mme Françoise LASCAUX, pôle promotion de la qualité et de la bientraitance Mme Dr Dominique Bourgois, direction de la santé publique, pharmacien inspecteur de santé publique

2.3.7. OMEDIT LIMOUSIN

M Vincent HUROT, pharmacien, praticien hospitalier

2.4. Hôpital privé St Martin de Pessac

2.4.1. Direction de la Générale de Santé

M Marc-David SELIGMAN, directeur des relations institutionnelles Dr Yann LEVY, directeur de la pharmacie

2.4.2. Direction de l’hôpital

M Emmanuel BRIQUET, directeur général par intérim M Christophe de BEAUMONT, directeur opérationnel

2.4.3. Commission médicale d’établissement

Dr Édouard DUTHOIT, président

2.4.4. Pharmacie

Dr Françoise AUGUET chef du service de la pharmacie Mme P CHABARD, préparatrice dispensation nominative M JM GAIAUDO, magasinier

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2.4.5. Autres services

Dr. CAMILIERI, consultant Évaluation des pratiques professionnelles Mme Laurence CLAVERIE, responsable Qualité et gestion des risques Mme N. DOUCEL, infirmière référente informatisation

2.4.6. Service de soins

Service des soins de suite et réadaptation

M. le Dr. GARDET, généraliste Mme CHEVALIER, infirmière

Service de gastro-néphrologie

Mme Aude de LA MALIERE, cadre de santé, membre de la COMEDIMS

Service de dialyse Dr D. BERGUA, médecin de dialyse Mme Sylvie GAZENGEL, infirmière de dialyse Mme Brigitte LESPOUX, aide-préparatrice

Service de chirurgie ambulatoire Mme Corinne PUYFAUCON, cadre de santé Mme Magali LAM, infirmière Mme Grace LADEIRA, infirmière

2.4.7. ARS Aquitaine

Mme Nicole KLEIN, directrice générale Mme Fabienne RABAU, directrice de la santé publique et de l’offre médico-sociale (DSPOMS) Mr Patrice RICHARD, directeur de l’offre de soins (DOS) Dr Josette COSTES, médecin Délégation territoriale de la Gironde Dr Véronique MOYSAN, médecin ARS (DOS) Mme Sabine LAFLAQUIERE, responsable Département performance qualité innovation et recherche (DOS) Dr Suzanne MANETTI, médecin responsable Département de sécurité des soins et des produits de santé (DSPOMS) Dr Alexandre COLS, pharmacien ARS (DSPOMS) Dr Marie-Pierre SANCHEZ-LARGEOIS, pharmacien ARS (DOS)

2.4.8. OMEDIT Aquitaine

Dr Bertrice LOULIERE, pharmacien inspecteur général de santé publique, coordonnatrice de l’OMEDIT Dr Antoine BROUILLAUD, PH pharmacien OMEDIT Dr Myriam ROUDAUT, pharmacien épidémiologiste OMEDIT Dr Marie-Pierre BRECHET, pharmacien chef de service au CH de Mont-de-Marsan, contributeur régulier aux travaux de l’OMEDIT Melle Vanessa BAUDE, chargée de mission junior - gestion des risques OMEDIT

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2.5. GCS AUDOIS DE PRESTATIONS MUTUALISEES DANS LES DOMAINES MEDICO-LOGISTIQUES (GAPM)

2.5.1. Le GAPM

2.5.1.1. La direction

M Philippe DELANEF, directeur

2.5.1.2. La PUI

M Jean SENTENAC, pharmacien gérant Mr Alain FIGUET, préparateur hospitalier en pharmacie

2.5.2. Le centre hospitalier de CARCASSONNE

2.5.2.1. La direction

M Bernard NUYTTEN, directeur et administrateur du GCS CAPM M Philippe SIMONET, directeur adjoint en charge du pôle clientèle, politiques médicales, qualité et santé publique M François DURAND-GASSELIN, directeur adjoint en charge du pôle projet de reconstruction M Stéphane HAFFEN, directeur adjoint en charge du pôle médico-économique, des systèmes d’information et du pilotage Mme Marie-Martine LIMONGI, secrétaire générale

2.5.2.2. La commission médicale d’établissement

M Bernard BALZA, président de la CME

2.5.2.3. La direction des soins

Mme Nicole ROYER, directrice de la coordination des soins

2.5.2.4. Les services de soins

Service de pédiatrie M le Dr. Bertrand GROSSET, responsable du pôle mère-enfant M le Dr. Frédéric TRONC, chef du service de pédiatrie M AMEGNRAN, interne en médecine Mme Valérie GREDE, IDE

Service de pneumologie M le Dr. Sylvain CONDOURET, chef du service de pneumologie M Jean-Claude SOULET, cadre supérieur de santé du pôle Mme Marie-Hélène PIERRE, cadre de santé du service

Service d’oncologie M le Dr. Jean-Luc LABOUREY, responsable de l’unité médicale d’activité d’oncologie Mme Catherine ALLIES, cadre de santé Mme Dominique HUILLET, IDE

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2.5.3. Le SSR du Lordat

M Yves BATTIGNES, directeur Mme Nadège NIVAULT, cadre de santé Mme Corinne GIRARD, IDE

2.5.4. L’hôpital local de LIMOUX

Mme Monique FABRE, pharmacien gérant M Laurent TURC, préparateur hospitalier en pharmacie Mme Caroline DOUDIES, préparatrice hospitalière en pharmacie

2.5.5. L’ARS LANGUEDOC ROUSSILLON

Mme Martine AOUSTIN, directrice générale Mme Dominique MARCHAND directrice générale adjointe Mme Marie-Pierre BATTESTI, directrice déléguée de la qualité et de la gestion du risque M Jean-Yves LE QUELLEC, directeur de l’offre de soins et de l’autonomie M Stéphane DELEAU, délégué territorial de l’Aude Mme Marie-Catherine MORAILLON, responsable du pôle de soins hospitaliers Mme Hélène DOUZAL, pharmacien inspecteur de santé publique Mme Bénédicte STEPHAN, pharmacien inspecteur de santé publique

2.5.6. OMEDIT Languedoc-Roussillon

M Jean-Marie KINOWSKI, pharmacien, praticien hospitalier

2.6. Le centre régional de lutte contre le cancer d’Angers

2.6.1. La direction

M le Pr. François-Régis BATAILLE, directeur général, futur directeur général de l’ICO M Yves DUBOURG, directeur général adjoint M Ludovic JACOB, directeur du système d’information du futur Institut de Cancérologie de l’Ouest M Éric CHABEAUTI, responsable de l’unité « informatique et télécommunications », futur directeur délégué du système d’information de l’ICO Mme Sandrine BOYER, responsable des affaires financières, futur directeur des finances de l’ICO M Etienne LE MIERE, responsable de la gestion économique et logistique, futur directeur des achats et de la logistique de l’ICO Mme Frédérique DONEAU, responsable du service qualité, futur responsable adjointe du service qualité de l’ICO Mme Anne BARRAULT, directrice des soins, futur directeur délégué des services de soins et médico-techniques

2.6.2. La pharmacie à usage intérieur

M Pierre LEYNIA DE LA JARRIGE, pharmacien, chef de service de la PUI, futur gérant de la PUI de l’ICO Mme Catherine DEVYS, pharmacien, responsable des vigilances

2.6.3. La communauté médicale

Dr Virginie BERGER, médecin coordonnateur du centre d’évaluation en oncologie Dr Rémy DELVA, chef de département en oncologie médicale Dr Pedro RARO, chirurgien, président de la COMEDIMS Dr Olivier BRENET, anesthésiste-réanimateur, président de la Commission « Antibiotiques »

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2.6.4. Les services de soins

Mme Judith GAUDRET, cadre de santé, hôpital de jour Mme Delphine RAVAGEAU, infirmière

2.6.5. L’ARS Pays de la Loire et le CRMDM

M François GRIMONPREZ, directeur de la qualité et de l’efficience M David JACQ, pharmacien inspecteur de santé publique M Jean-Claude MAUPETIT, pharmacien, coordonnateur du CRMDM M François RONDEAU, pharmacien, CRMDM

2.7. Syndicat Interhospitalier de CAUDAN

2.7.1. Directions

Mme Dolores TRUEBA, Directrice de l’EPSM et secrétaire générale du SIH M Jean-François BLANCHARD, DRH de l’EPSM M Jean-Paul FOUCHARD, Directeur de Port-Louis M Jean-Yves BLANDEL, Directeur de Le Palais

2.7.2. Commissions médicales d’établissement

M Philippe HOUANG, président de la CME de l’EPSM M Rozenn GOANVIC, Président de la CME de Port-Louis

2.7.3. PUI

Dr Jacques TREVIDIC, chef de service Dr Élisabeth LE FLOC’H, pharmacien

2.7.4. Services

Dr Laurence THIBAULT, médecin Dr Marie-Gaït GUEGUEN, médecin Dr Marie FALK, médecin Mme Céline SAUVAGE, Assistante qualité de l’EPSM Mme Régine HUBERT, AAH SIH Mme Anne MAUREL, Assistante qualité du SIH M Sylvain TAVERNE, Informaticien de l’EPSM Mme Colette MUZARD, Cadre Supérieur de santé

2.7.5. L’ARS Bretagne et le CRMDM

M Pierre BERTRAND, directeur général adjoint de l'ARS. Dr Véronique SABLONNIERE, directrice adjointe à la direction de la santé publique Mme Marine CHAUVET, directrice adjointe à la direction de l'offre de soins. Dr Patrick ZAMPARUTTI, PHISP, coordinateur du CRDM Dr Jean-Yves GAUTHIER, PHISP Dr Omar TARSISSI, direction de l'offre de soins ambulatoire Dr Christine BRUNET, en charge du volet cancérologie à l'ARS Mme Anne-Briac BILI, chargée de mission système d'information à l'ARS

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Liste des sigles et acronymes

Afssaps Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ANAP Agence nationale d’appui à la performance AP-HP Assistance publique des hôpitaux de Paris ARH Agence régionale de l’hospitalisation ARS Agence régionale de santé ASIP Agence des systèmes d’information partagés de santé ATC Anatomique thérapeutique chimique ATIH Agence technique de l’information sur l’hospitalisation CAHP Centrale d’achat de l’hospitalisation privée CBU Contrat de bon usage des médicaments, des produits et prestations CH Centre hospitalier CEPS Comité économique des produits de santé CHR Centre hospitalier régional CHU Centre hospitalier local CIP Club inter-pharmaceutique CLCC Centre de lutte contre le cancer CLIN Comité de lutte contre les infections nosocomiales CLUD Comité de lutte contre la douleur CME Commission ou conférence médicale d’établissement CNAMTS Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés CNEH Centre national de l’expertise hospitalière CNIL Commission nationale de l’informatique et des libertés COMEDIMS Commission du médicament et des dispositifs médicaux COMEX Commission exécutive CPOM Contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens CRMDM Comité régional du médicament et des dispositifs médicaux CREX Comité de retour d’expérience CSP Code de la santé publique CSS Code de la sécurité sociale DCI Dénomination commune internationale DDJ Dose définie journalière DGOS Direction générale de l’organisation des soins DGS Direction générale de la santé DHOS Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins DIS Diplômés interuniversitaires de spécialité DM Dispositifs médicaux DMS Dispositifs médicaux stériles DNAC Dispensation nominative automatisée centralisée DRASS Direction régionale des affaires sanitaires et sociales DREES Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques DSS Direction de la sécurité sociale DUC Dose unitaire complète EHPAD Établissement hébergeant des personnes âgées dépendantes EIG Événement indésirable grave EPIC Établissement public industriel et commercial EPP Évaluation des pratiques professionnelles EPRD État prévisionnel de recettes et de dépenses ESPIC Établissement de santé privé d’intérêt collectif ETP Équivalent temps plein

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FINESS Fichier national des établissements sanitaires et sociaux FFI Faisant fonction d’interne GCS Groupement de coopération sanitaire GDR Gestion du risque GHS Groupe homogène de séjour GIE Groupement d’intérêt économique GIP Groupement d’intérêt public HACCP Hazard analysis critical control point HAD Hospitalisation à domicile HAS Haute autorité de santé HIHL Hôpital intercommunal du Haut-Limousin HDJ Hôpital de jour HPST Hôpital patients santé et territoires IDE Infirmier diplômé d’État IGAS Inspection générale des affaires sociales INCa Institut national du cancer InVS Institut de veille sanitaire IRP Inspection régionale de la pharmacie ISO International organization for standardization JOUE Journal officiel de l’Union européenne MCO Médecine, chirurgie, obstétrique M Millions MDMI Médicaments et dispositifs médicaux implantables Mds Milliards MDSH Médicaments dérivés du sang humain MEAH Mission nationale d'expertise et d'audit hospitaliers MIGAC Mission d’intérêt général et d’aide à la contractualisation OCDE Organisation de coopération et de développement économique OMEDIT Observatoire des médicaments, des dispositifs médicaux et des

innovations thérapeutiques OMIT Observatoire des médicaments et des innovations thérapeutiques OMS Organisation mondiale de la santé ORM Observatoire des risques médicaux PMSI Programme de médicalisation des systèmes d’information PPH Préparateur en pharmacie hospitalière PSM Poste de sécurité microbiologique PUI Pharmacie à usage intérieur RBU Référentiel de bon usage RCP Réunion de concertation pluridisciplinaire Resah-IDF Réseau des acheteurs hospitaliers d’Ile de France RMM Revue de morbi-mortalité RPPS Répertoire partagé des professionnels de santé SDIS Service départemental d’incendie et de secours SHAM Société hospitalière d’assurances mutuelles SI Système d’information SIH Système d’information hospitalier SIC Système d’information clinique SLD Soins de longue durée SSR Soins de suite et de réadaptation T2A Tarification à l’activité UCSA Unité de consultations et de soins ambulatoires UniHA Union des hôpitaux pour les achats UPMC Unité de préparation des médicaments du cancer UCSA Unité de consultation et de soins ambulatoires

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Liste des annexes - Tome 2 du rapport

Annexe 1 : Circuit du médicament au centre hospitalier de Compiègne

Annexe 2 : Circuit du médicament au centre hospitalier régional d’Orléans (CHRO)

Annexe 3 : Circuit du médicament à l’hôpital intercommunal du haut-limousin (HIHL)

Annexe 4 : Circuit du médicament à l’hôpital prive Saint Martin de Pessac

Annexe 5 : GCS Audois de prestations mutualisées dans les domaines médico-logistiques (GAPM)

Annexe 6 : Circuit du médicament au centre de lutte contre le cancer Paul Papin

Annexe 7 : Circuit du médicament au syndicat interhospitalier de Caudan

Annexe 8 : Référentiel juridique : politique du médicament dans les établissements de santé et pharmacies à usage intérieur

Annexe 9 : Le circuit clinique du médicament a l’hôpital-environnement juridique

Annexe 10 : Données sur les personnels des pharmacies à usage intérieur (PUI)

Annexe 11 : Les systèmes de signalement des erreurs médicamenteuses en France

Annexe 12 : Evaluation du temps et du cout d’une procédure d’appel d’offre

Annexe 13 : Données sur l'activité pharmacie des établissements de santé

Annexe 14 : Tableau illustrant les différences de tarifs entre la ville et l’hôpital pour les médicaments d’une même classe thérapeutique

Annexe 15 : Exemples de mise en œuvre des interventions pharmaceutiques

Annexe 16 : L’impact économique du développement de la pharmacie clinique