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Introduction générale : Les relations sociales : définition et perspective d'études 1. Définition des relations sociales La discipline intitulée « relation sociale » renvoie à celle intitulée « relation industrielle » et « relation professionnelle ». Les « relations industrielles » désignent dans le monde du travail, l'ensemble des relations qui s'établissent entre 3 catégories d'acteurs : les pouvoirs publics, les salariés et leur représentants et enfin les employeurs et leurs organisations. L'objet des relations industrielles est l'élaboration des règles qui structurent ces relations. On trouve 2 types de règles : des règles de procédures qui permettent de définir si l'on fonctionne sur la base de négociations, de définir les modalités de représentations des salariés ; des règles de contenu qui fixent les niveaux de salaire, la durée du temps de travail, la modalité de l'emploi, etc etc... Etudier les relations industrielles, c'est avant tout étudier des processus de négociations qui produisent des règles, on est loin d'une perspective de marchandages au coup par coup. Ces processus de négociations se caractérisent par des rapports de pouvoir qui évoluent dans le temps et dans l'espace en fonction des ressources dont disposent les acteurs concernés. Les syndicats de travailleurs n'ont plus les mêmes ressources aujourd'hui qu'il y a 1 siècle, comme le patronat. Quelle que soit la forme de ces relations, ces 3 types d'acteurs sont contraints de coopérer. Les relations industrielles sont issues de l'anglais « industrial relations », expression qui est apparue la première fois aux E.-U. en 1912 et utilisée en 1926 de façon courante. L'expression française de relation professionnelle est plus utilisée par les universitaires français car elle permet de rendre compte des volontés de prendre une attention particulières aux institutions. Elle a dominé en France et est encore utilisée par les universitaires. Elle permet de souligner la place de l'Etat, des organisations syndicales et des organisations d'employeurs dans la régulation du marché du travail en France : le paritarisme. Les universitaires commencent à avoir recours à de nouvelles expressions, car les relations ont évolué. Les Britanniques parlent de « Employment relations ». Elles veulent mettre en valeur l'ensemble des relations qui existent entre les acteurs sociaux du monde du travail, qu'il s'agisse de relations institutionnalisées comme le paritarisme ou plus informelle au sein d'une entreprise ou d'un site. L'expression « relation sociale » est plus fréquemment employée par les acteurs. Pour Michel Allemand, les relations sociales sont les intéractions ou encore l'ensemble des pratiques et des règles d'une entreprise, d'une branche professionnelle, d'une région ou d'un pays qui structurent les rapports entre les salariés et leurs représentants, les employeurs et leurs représentants, l'Etat et les pouvoirs publics et éventuellement des tiers intervenant, les consultants. Ces rapports peuvent être individuels ou collectifs, ils peuvent être par ailleurs soit directement le fait des acteurs, soit s'enraciner dans des coutumes, soit enfin donner lieu à la production de règles. Les principales problématiques On retrouve ces problématiques dans le livre de A. Bevort et A. Jobert Sociologie du travail : les relations professionnelles . 6 problématiques transversales : les premiers travaux de relations industrielles datent de la fin du XIXème siècle. Les tous premiers travaux sont de Webb, le syndicalisme. Les fondements de l'Etat-providence. Les pays capitalistes ont connu des transformations au long du Xxème avec des remises en cause de l'Etat-providence. De manière classique, les chercheurs de relations sociales abordaient 4 grands thèmes : le mouvement syndical, la négociation collective, le rôle de l'Etat et les conflits du travail. Aujourd'hui ces thématiques ont été infléchies dans de « nouveaux » problèmes, ils ont été inventés par les

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Introduction générale :Les relations sociales : définition et perspective d'études

1. Définition des relations sociales

La discipline intitulée « relation sociale » renvoie à celle intitulée « relation industrielle » et « relation professionnelle ».Les « relations industrielles » désignent dans le monde du travail, l'ensemble des relations qui s'établissent entre 3 catégories d'acteurs : les pouvoirs publics, les salariés et leur représentants et enfin les employeurs et leurs organisations. L'objet des relations industrielles est l'élaboration des règles qui structurent ces relations. On trouve 2 types de règles : des règles de procédures qui permettent de définir si l'on fonctionne sur la base de négociations, de définir les modalités de représentations des salariés ; des règles de contenu qui fixent les niveaux de salaire, la durée du temps de travail, la modalité de l'emploi, etc etc...

– Etudier les relations industrielles, c'est avant tout étudier des processus de négociations qui produisent des règles, on est loin d'une perspective de marchandages au coup par coup. Ces processus de négociations se caractérisent par des rapports de pouvoir qui évoluent dans le temps et dans l'espace en fonction des ressources dont disposent les acteurs concernés. Les syndicats de travailleurs n'ont plus les mêmes ressources aujourd'hui qu'il y a 1 siècle, comme le patronat.

– Quelle que soit la forme de ces relations, ces 3 types d'acteurs sont contraints de coopérer.– Les relations industrielles sont issues de l'anglais « industrial relations », expression qui est

apparue la première fois aux E.-U. en 1912 et utilisée en 1926 de façon courante.L'expression française de relation professionnelle est plus utilisée par les universitaires français car elle permet de rendre compte des volontés de prendre une attention particulières aux institutions. Elle a dominé en France et est encore utilisée par les universitaires. Elle permet de souligner la place de l'Etat, des organisations syndicales et des organisations d'employeurs dans la régulation du marché du travail en France : le paritarisme. Les universitaires commencent à avoir recours à de nouvelles expressions, car les relations ont évolué. Les Britanniques parlent de « Employment relations ». Elles veulent mettre en valeur l'ensemble des relations qui existent entre les acteurs sociaux du monde du travail, qu'il s'agisse de relations institutionnalisées comme le paritarisme ou plus informelle au sein d'une entreprise ou d'un site. L'expression « relation sociale » est plus fréquemment employée par les acteurs. Pour Michel Allemand, les relations sociales sont les intéractions ou encore l'ensemble des pratiques et des règles d'une entreprise, d'une branche professionnelle, d'une région ou d'un pays qui structurent les rapports entre les salariés et leurs représentants, les employeurs et leurs représentants, l'Etat et les pouvoirs publics et éventuellement des tiers intervenant, les consultants. Ces rapports peuvent être individuels ou collectifs, ils peuvent être par ailleurs soit directement le fait des acteurs, soit s'enraciner dans des coutumes, soit enfin donner lieu à la production de règles.

Les principales problématiques

On retrouve ces problématiques dans le livre de A. Bevort et A. Jobert Sociologie du travail : les relations professionnelles.6 problématiques transversales :les premiers travaux de relations industrielles datent de la fin du XIXème siècle. Les tous premiers travaux sont de Webb, le syndicalisme. Les fondements de l'Etat-providence. Les pays capitalistes ont connu des transformations au long du Xxème avec des remises en cause de l'Etat-providence. De manière classique, les chercheurs de relations sociales abordaient 4 grands thèmes : le mouvement syndical, la négociation collective, le rôle de l'Etat et les conflits du travail. Aujourd'hui ces thématiques ont été infléchies dans de « nouveaux » problèmes, ils ont été inventés par les

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acteur sociaux.6 thèmes :

1) la crise et la recomposition des relations professionnellesC'est une crise car l'essentiel des modèles de relations professionnelles datent de l'après-guerre et des 30 Glorieuses, période de croissance. Ce contexte a profondément changé et une série d'auteur en concluent que les modèles datant de cette époque sont en crise. La remise en cause du modèle salarié à temps plein et à durée indéterminée en est un exemple. Cela remet en cause toute une série de négociations signées après-guerre. Les politiques publiques de l'emploi, de gestion du chômage et généralement les politiques sociales avec les retraites sont étudiées.

2) La légitimité de l'action syndicaleDepuis les années 80, on assiste très nettement à un affaiblissement du syndicalisme. Dans quelle mesure les règles concernant la représentativité de ces structures permettent-elles encore une bonne gestion des relations professionnelles ?

3) Le renouveau de l'entrepriseDepuis les années 80, l'entreprise tend à s'imposer comme un acteur central des relations professionnelle. L'entreprise était mal vue mais maintenant elle est un lieu de créativité et d'épanouissement. Cette image positive s'est accompagnée concrètement d'une prise de rôle au niveau des relations professionnelles. Il y a un glissement de la négociation collective, des structures paritaires ou des branches professionnelles vers elle-même. Il y a une décentralisation des relations professionnelles. Les 35 heures s'est fait entre représentants des salariés, des patrons et de l'Etat, cette première négociation a fait l'objet d'une loi pour toucher toutes les entreprises. Mais après l'application de cette loi a été modifiée et la mise en place de négociations ont été décentralisées au sein des entreprises. Ces relations ont conduit à de nouvelles notions du type de gouvernance d'entreprises ou encore de responsabilités sociales de l'entreprise ne concernent plus le fonctionnement interne de l'entreprise mais aussi la qualité de vie des travailleurs.

4) Les marchés du travaillaientTraditionnellement, les chercheurs avaient pour objet la segmentation des marchés du travail, avec les limites de la mobilités des travailleurs, la mise en place de règles propre à chaque marché du travail. De nouveau processus sont interrogés : les discriminations, notamment à l'embauche et les politiques d'emplois et de formation. C'est notamment le débat sur la flexisécurité avec la flexibilité de l'emploi tout en assurant la sécurité des employés.

5) L'impact de la mondialisationL'internationalisation de l'économie et le poids grandissant des entreprises multinationales. Quelles sont les impacts de ces transformations sur les modèles nationaux de relations professionnelles ? Ces modèles ont-ils tendance a convergé sous le règne de la mondialisation ? Si oui quel rôle joue les organisations internationales dans ces processus de convergence ? Organisations que sont l'OIT et les structures de représentation des employeurs et des employés à l'échelle européenne et international. Les processus d'internationalisation est considéré comme un processus d'homogénéisation des normes, règles et pratiques de la vie économique et politique. Néanmoins dans le domaine du travail, il est impropre de parler de la mondialisation comme d'un processus unifié et cohérent ayant pour seul conséquence une convergence des marchés du travail. La mondialisation est bien davantage un assemblage de processus qui sont parfois convergents mais souvent chaotiques et source au moins de désynchronisation et souvent de disjonction.

6) Le dialogue socialC'est l'ensemble des dispositifs au sein desquels se confrontent les intérêts des salariés et des employeurs. Dispositifs de concertation, d'information, de concertation ou encore de négociation. Ces dispositifs prennent place au sein des entreprises mais aussi au sein des structures paritaires.

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Hall et Soskice discutent des capitalismes. Ils étudient les firmes, leurs stratégies qui sont caractérisées par des problèmes de coordination avec d'autres acteurs et d'autres organisations. La qualité des relations qu'une firme est capable d'établir à la fois de façon interne avec ses propres employés et de façon externe avec un vaste ensemble d'acteurs qui incluent ses fournisseurs, ses clients, ses collaborateurs, ses actionnaires, les syndicats, les associations patronales et l'Etat. En étudiant ces firmes, ils en viennent à distinguer 2 types de capitalisme : les économies de marché libéral qui se caractérisent par des stratégies relativement libres qui laissent une large place au marché, pour eux l'exemple type est celui des Etats-Unis notamment parce que les relations professionnelles sont peu formalisées. Ce modèle s'exprime par de très grandes *** et des innovations radicales. Il se distingue des économies de marché coordonné qui se base sur la formalisation de règles précises, et qui place l'entreprise au cœur de mécanismes complexes et d'échanges non nécessairement marchands. Le modèle qui illustre le mieux ce type de variété de capitalisme est l'Allemagne, notamment du fait que les entreprises doivent coordonner leurs actions avec d'autres acteurs, les syndicats et les länder.Schmidt étudie des modèles notamment en Europe. Il annonce que les auteurs précédent avaient une vision simpliste car ils partent des entreprises alors que lui part des Etats. Les analyses des précédents ne montrent pas les différents capitalismes. Lui en trouve 3 : le capitalisme de marché qui correspond au premier modèle précédent (E.-U. Et R-U), le capitalisme dirigé représenté par l'Allemagne, l'Autriche, la Suède et les Pays-Bas et enfin le capitalisme d'Etat comme la France et l'Italie qui est maintenant devenu un capitalisme « soutenu » par l'Etat. En France et en Italie, l'Etat a abandonné son leadership passé pour adopter un rôle d'incitateur plus orienté vers le marché. Cet auteur souligne que la spécificité de l'Etat dans ces pays fait que celui-ci continue d'intervenir pour protéger les salariés des entreprises mais a réduit ses parts dans les entreprises et donc son contrôle par des opérations de privatisations et de dérégulation. Les firmes dans ces 2 pays sont donc plus autonomes que dans le passé. Néanmoins dans ce modèle, l'actionnariat est plus concentré, les actionnaires ont moins de poids qu'au Royaume-Uni et aux Etats-Unis.

Mise en perspective historique des relations sociales

Il y a 3 périodes et 3 mouvements fondamentaux dans cette histoire.1884 permet aux acteurs du mouvement ouvrier de se structurer.1945 est la création de la Sécurité sociale et l'apogée de l'Etat-providence1982-83 la rigueur et le tournant néolibéral

1789 à 1884 La domination de la doctrine libérale ou de la doctrine révolutionnaire.De 1884 à 1945 avec une structuration du social, c'est la mise en place d'un modèle républicain pour assurer la cohésion sociale.De 1945 à nos jours, l'Etat-providence et ses remises en cause avec de 1944 à 1968, le compromis fordiste, de 1968 à 1984, les premières failles du rapport salarial, du milieu des années 80 aux années 2000, l'émergence d'un nouveau modèle de relation sociale avec une recomposition du rôle de l'Etat et l'évolution des formes de gouvernement.

1ère période : 1789-1844 : la logique libérale, la doctrine libérale ou la conception révolutionnaire de l'Etat.

Cette longue période est caractérisée par le sacre de la liberté et dans une moindre mesure de l'égalité sans intervention sociale. Le libéralisme apparaît au XIXème siècle, en Allemagne et en Italie et sa terre d'élection devient les Etats-Unis. Le libéralisme est une philosophie globale en voie d'éclatement. Il y a des libéralismes. Le libéralisme politique selon laquelle la société doit être fondée sur la liberté et trouvée sa justification dans la consécration de celle-ci. C'est une philosophie sociale individualiste dans la mesure où elle fait passer l'individu avant les exigences collectives. Au XIXème éclate donc en plusieurs libéralismes distincts :

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– le libéralisme économique qui repose sur la richesse et la propriété, il s'oppose au dirigisme d'Etat.

– Le libéralisme politique qui s'oppose au despotisme et il est donc le fondement doctrinal du gouvernement représentatif et de la démocratie parlementaire.

– Le libéralisme intellectuel se caractérise par un esprit de tolérance et de conciliation.

Le point commun de toutes ces idéologies libérales est qu'elles expriment une méfiance à l'encontre du pouvoir et tout particulièrement à l'encontre de l'Etat. Le libéralisme recouvre des idées nombreuses, variées et éloignées.

La doctrine libérale postule que la société civile est conquise par les mécanismes de marché et donc que la société civile produit un ordre naturel. Les intérêts individuels doivent à tout prix être sauvegardés à l'équilibre. Les interventions sociales de l'État doivent être limitées. La société est fondée avant-tout sur des relations entre individus libres, égaux et responsables. Le mode de régulation qui domine est une régulation contractuelle. L'État ne doit surtout pas perturber ce processus de négociations. Il doit favoriser leur développement et garantir leur existence. L'État va légiférer, les décideurs vont voter la loi Le Chapelier qui va inscrire la liberté de travail dans le droit. Elle va aussi interdire aux individus de se regrouper pour former des coalitions, les corporations. L'État libéral mis en place après la Révolution refuse une société de corps. Il procède à la suppression de tous les corps intermédiaires.En 1898, une loi va reconnaître l'existence des chambres de commerce et entériner la perpétuation de l'existence de ces corporations.Seule la prévoyance individuelle est gage de protection face aux risques sociaux. La solution est l'épargne. Les politiques de bienfaisance sont à l'endroit des individus qui ne peuvent pas travailler comme les handicapés. C'est une transcription de la générosité catholique. Cette conception du rôle de l'État doit orienter l'action des pouvoirs publics jusqu'à l'avènement de la IIIème République.

Le XIXème siècle est parcouru de révoltes. Au milieu de ce siècle, le pouvoir politique prend conscience du fait qu'il n'arrive pas à rassembler la société autour de lui. Cet État libéral ne conduit pas à un équilibre harmonieux. Déclarer les individus libres et égaux n'est pas suffisant. Il se maintient et se développe une aliénation économique de la classe la plus pauvre, le prolétariat. Le point d'orgue de cette prise de conscience est la Révolution de 1848.A partir des années 1850, on se demande comment combler le vide entre État et individus.

2ème période : 1884 – 1945 : l'État assureur et organisateur des relations sociales

Les pouvoirs publics vont tenter de structurer les relations sociales. Le basculement à cette période passe par l'émergence de la notion de solidarité.

a) La solidarité comme nouveau fondement de l'action de l'État

A la fin du XIXème, la notion de solidarité va permettre de légitimer l'intervention de l'État. La France a connu la défaite face à la Prusse et la Commune. Il y a 3 groupes qui se partagent le pouvoir :

– les libéraux et les conservateurs qui veulent tous limiter les interventions de l'État, l'empiètement de l'État sur la société civile. Les libéraux le font au nom de la défense de l'individu, les conservateurs au nom de la conservation des relations traditionnelles

– les marxistes et les socialistes qui sont quant à eux plutôt favorable à l'intervention de l'État. Mais d'une façon jacobine pour imposer un ordre de société

– les républicains émergent et cherchent un nouveau fondement à l'intervention de l'État. Ils vont s'appuyer sur des travaux de sciences sociales de Max Weber et Emile Durkheim.

Ces travaux vont permettre de trouver une réponse et une alternative aux perspectives marxistes et

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libérales. Durkheim étudie les sociétés industrielles naissantes, constatant une densité démographique de plus en plus forte, de ce fait cette société connait une division sociale du travail de plus en plus importante. Cette division oriente et façonne la société. Elle change radicalement les règles de fonctionnement de la société. Il compare la société d'Ancien Régime et la société industrielle. Dans les société d'ancien régime, les liens entre les individus sont le résultat à des institutions telles que la famille, etc etc... C'est la similitude des conditions de vie qui permet de créer du lien social. Sous l'effet de la division du travail, dans la société industrielle, on observe une spécialisation des tâches, les individus sont de plus en plus différenciés. C'est ce qui, à ses yeux, explique que les relations entre les individus se trouvent bouleversées. On passe de solidarités mécaniques à des solidarités organiques ou fonctionnelles. Le lien social n'est pas le contrat passé entre des individus mais l'expression d'un fait social, c'est-à-dire l'expression de la division du travail de plus en plus poussée.Dans cette perspective, le rôle de l'État va être de maintenir les solidarités dans la société. Les républicains ont ainsi un moyen de promouvoir le rôle de l'État mais le limite car l'État ne doit pas perturber la société. Ce principe de solidarité va constituer peu à peu le fondement principal de l'action de l'État. L'État va chercher à structurer le social. Il va paraître inévitable de reconnaître les corps intermédiaires qui représentent le résultats des solidarités organiques.

b) La reconnaissance des corps intermédiaires

La diffusion des travaux d'Emile Durkheim va pousser les politiques à réguler le monde du travail car il craint par dessus tout à la révolte des masses prolétariennes. Ils découvrent les conditions de la classe ouvrière : ils travaillaient dans des manufactures et des fabriques et n'étaient ni sujets ni acteurs de l'ordre économique ou politique. Leur but était la survie. La classe ouvrière est dangereuse. Le mouvement ouvrier s'est organisé et à des capacités de mobilisations importantes grâce à une très bonne organisation des ouvriers car il n'y a plus de divisions entre les ouvriers professionnels et les prolétaires. L'État n'intervient pas sauf par quelques lois qui les protègent de certains abus, pour éviter l'implosion sociale. A chaque entreprise correspond une spécificité sociale et économique. Il y a une différenciation nette entre l'usine et la société. Le droit qui domine est le droit de propriété.A partir de 1870, les choses vont changer, le mouvement ouvrier s'organise et se structure pour devenir un acteur collectif central de la société. Le pouvoir politique ne peut donc plus ignorer cette classe qui l'effraie tant. Il doit prendre des mesures. C'est ce qui le conduit à accepter de reconnaître des structures entre l'État et les individus pour essayer de consolider les liens sociaux. C'est donc le vote de la loi de 1884 pour protéger la classe ouvrière pour reconnaître les syndicats et autoriser les corporations. C'est une loi décisive car elle symbolise la fin du mythe selon lequel la société serait composée d'individus libres et égaux.La loi de 1884 ouvre des perspective importante de changements sous la pression d'un monde ouvrier enfin organisé en association professionnelle. Ce mouvement ouvrier va notamment se battre contre la spécificité de chaque entreprise, donc pour le vote et l'application de lois sociales pour tous. En 1884, le modèle libéral de l'État explose dans toutes ses dimensions. L'État va activement défendre la liberté et l'égalité des citoyens et va tout faire pour que la liberté et l'égalité ne deviennent pas théorique mais effective. C'est à partir de ce moment là qu'il va se porter garant du progrès social. C'est la perspective saint-simonienne de l'État. L'État devient le médiateur et le catalyseur de la communauté nationale. Cette redéfinition du rôle de l'État est due à un contexte particulier, on le doit à des politiques, des penseurs et une évolution technique, la statistique.

c) L'essor de la technique assurantielle

L'État républicain, au nom de la solidarité, étant le champ de ses interventions, notamment dans la société civile. Elle prend la forme d'un vaste mouvement législatif dans des domaines variés, notamment dans la sphère du travail avec les conditions de travail, la protection du travailleur. Ces

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lois servent aussi des sphères hors-travail sur la famille, l'hygiène, la santé, l'éducation. Un nouveau droit né : le droit social. C'est l'application pratique des théories de la solidarité. Ce nouveau droit social s'appuie sur une nouvelle technique, assurantielle, qui va s'infiltrer partout où il existe des failles, des risques, où il y a un flou des responsabilités face à ces risques par rapport à la personne qui doit prendre la responsabilité de ces risques. Les risques en société sont des risques sociaux qui s'imposent et non individuels. Il y a un vaste mouvement de normalisation de règles, dans les domaines de l'hygiène, des conditions de travail et de la sécurité. Cette technique assurantielle s'oppose à la source du pouvoir patronal. Elle va accompagner et favoriser le taylorisme, une rationalité commune à toutes les entreprises. Cette technique va entrainer une focalisation des négociations entre patron et travailleurs sur les salaires. Les ouvriers vont dénoncer la logique de profits des patrons et revendiquer plus de protection des travailleurs en opposition avec la logique de rendement des entreprises. Cette logique d'assurance favorise la plus grande mobilité des travailleurs. Elle va permettre la structuration de 2 acteurs collectifs et leur pérennisation avec d'un côté le mouvement ouvrier et de l'autre le mouvement patronal. Ils sont porteurs de 2 rationalités concurrentes, social pour le premier et économique pour le second. Entre ces 2 acteurs, l'État est finalement chargé d'articuler le social et l'économique et de concilier ces 2 acteurs opposés. L'État va être appelé par toutes les parties en conflit pour jouer le rôle de médiateurLes conventions de Matignon mettent en place la légitimisation des conventions collectives.

3) 1945 – aujourd'hui ? : Apogée de l'État-providence, tournant néo-libéral et recompositions des relations sociales.

En 1945, le keynésianisme permet l'avènement de l'État-providence. C'est le triomphe de l'interventionnisme étatique dans tous les domaines (économique, social et culturel). La période de reconstruction va faire décoller ce système qui va s'épanouir dans une société de croissance et de quasi plein-emploi pendant les 30 Glorieuses.De la Libération à Mai-68, se met en place un compromis fordien. C'est un accord tacite selon lequel en échange d'un salaire relativement élevé est indexé sur la productivité du travail, les salariés sont tenus de se plier aux méthodes de production de masse, créatrice d'efficacité et de biens de productivité. Il y a la généralisation de 2 types de salaires, le salaire direct payé au salarié et un salaire qui ira dans une caisse pour servir lors des aléas de l'existence.Les 30 Glorieuses marquent les années d'épanouissement de l'État-providence avec l'interventionnisme grandissant et l'augmentation des dépenses publiques (26,5% du PIB en 1938 à 50,5% en 1973). L'Etat-providence est associé à la croissance, il est le garant du progrès. C'est l'économie concertée qui tente de concilier marché et intervention de l'État. Ce système atteit ses limites et il est remis en cause. La contestation devient radicale dans les années 70, la crise économique jette l'incertitude, au début des années 80, il y a un grand tournant avec la mise en place d'une politique de rigueur. Le néo-libéral est un changement profond qui dépasse le cadre de la France, on revient à des perspectives plus libérales, ce n'est pas uniquement une adaptation à des contraintes objectives et extérieures. C'est un vrai changement en terme de représentation de l'État, ce ne sont plus les mêmes économistes qui conseillent les gouverneurs. La nature des régulations du travail se transforme en terme de doctrine, c'est à partir des années 80 seulement que l'entreprise devient positive.