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Institut d’Études politiques d’Aix-en-Provence – Certificat d’études politiques – François Parchemin – La France dans le monde Séance 6 – La France et la construction européenne

Diapo séance 6

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Institut d’Études politiques d’Aix-en-Provence – Certificat d’études politiques – François Parchemin – La France dans le monde

Séance 6 – La France et la construction européenne

I – La France à l’initiative du projet européen

A – Penser l’Europe dans l’Entre-deux guerres

Carte de Clive Morrisson-Bellreprésentant les tarifs douaniers en Europe en 1920

Extrait du discours d’Aristide Briandà la SDN, le 5 septembre 1929

Je pense qu’entre des peuples qui sont géographiquement groupés, comme les peuples d’Europe, il doit exister une sorte de lien fédéral. Ces peuples doivent avoir à tout instant la possibilité d’entrer en contact, de discuter de leurs intérêts communs, de prendre des résolutions communes. Ils doivent, en un mot, établir entre eux un lien de solidarité qui leur permette de faire face, au moment voulu, à des circonstances graves si elles venaient à naître.C’est ce lien, messieurs, que je voudrais m’efforcer de créer.Évidemment, l’association agira surtout dans le domaine économique : c’est la nécessité la plus pressante. Je crois qu’on peut en ce domaine, obtenir des succès. Mais je suis sûr aussi qu’au point de vue politique ou au point de vue social, le lien fédéral, sans toucher à la souveraineté d’aucune des nations qui pourraient faire partie d’une telle association, peut être bienfaisant. Et je me propose, pendant la durée de cette session, de prier ceux de mes collègues qui représentent ici les nations européennes de vouloir bien, officieusement, envisager cette suggestion et la proposer à l’étude de leurs gouvernements, pour dégager plus tard, pendant la prochaine assemblée peut-être, les possibilités de réalisation que je crois discerner.

Extrait du discours de Gustav Stresemannà la SDN, 9 septembre 1929

En me plaçant du point de vue économique, je tiens à souligner que, si l’on a créé un grand nombre d’États nouveaux, on a entièrement négligé de les intégrer dans la structure économique de l’Europe.Quelle est la conséquence de ce péché d’omission ? Vous le voyez : de nouvelles frontières, de nouvelles monnaies, de nouvelles mesures, de nouveaux poids, de nouvelles usances, un arrêt constant du trafic et des échanges. Il est grotesque de constater que l’on s’attache à réduire la durée du voyage entre l’Allemagne du Sud et Tokyo, mais que, par contre, lorsqu’on traverse l’Europe en chemin de fer, on se trouve arrêté en un endroit quelconque pendant une heure, parce qu’il y a là une nouvelle frontière et des formalités de douane à remplir. Dans l’économie mondiale, l’Europe donne l’impression de ne savoir pratiquer que le petit commerce de détail. Pour augmenter leur prestige, les nouveaux Etats s’efforcent de créer de nouvelles industries à l’intérieur de leurs frontières. Ces industries doivent être protégées, elles doivent se chercher de nouveaux débouchés et il leur arrive souvent de ne pas pouvoir écouler leurs produits sur leur propre territoire à des prix rémunérateurs.Où sont la monnaie européenne, le timbre-poste européen qu’il nous faudrait ?

Caricature de Derso et Kelen, dans Le rire,

septembre 1931

Aristide Briand en pèlerin de la Paix, guidant les

délégués de la SDN vers la terre promisse : les « États-

Unis d’Europe »

Monument situé quai d’Orsay, à Paris

B – Les Français de l’Europe d’Hitler à l’Europe atlantique

Affiche vantant le plan Marshall (European Recovery Program)

C – Les débuts de la construction européenne

Congrès de la Haye, 7 mai 1948

Déclaration du 9 mai 1950lancée par Robert Schuman, ministre français des Affaires étrangères

L’Europe ne se fera pas d'un coup, ni dans une construction d'ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait. Le rassemblement des nations européennes exige que l’opposition séculaire de la France et de l'Allemagne soit éliminée. [...]

Le gouvernement français propose de placer l'ensemble de la production franco-allemande de charbon et d'acier sous une Haute Autorité commune, dans une organisation ouverte à la participation des autres pays d'Europe. La mise en commun des productions de charbon et d’acier assurera immédiatement l’établissement de bases communes de développement économique, première étape de la Fédération européenne, et changera le destin de ces régions longtemps vouées à la fabrication des armes de guerre dont elles ont été les plus constantes victimes.

La solidarité de production qui sera ainsi nouée manifestera que toute guerre entre la France et l’Allemagne devient non seulement impensable, mais matériellement impossible. L’établissement de cette unité puissante de production ouverte à tous les pays qui voudront y participer, aboutissant à fournir à tous les pays qu'elle rassemblera les éléments fondamentaux de la production industrielle aux mêmes conditions, jettera les fondements réels de leur unification économique. […]

Affiche en faveur et contre la Communauté européenne de défense

Le marché commun (CEE 1957)

Pour créer un « marché commun », des conditions de concurrence doivent être arrêtées. Elles supposent, pour être communes, une harmonisation des législations nationales, des réglementations ainsi que la définition des normes européennes. La réalisation de ce marché concurrentiel repose sur une liberté de circulation des marchandises, des personnes et des capitaux. [...] L’objectif n’est pas de réaliser une zone de libre-échange mais un marché intérieur commun conçu comme une zone de prospérité et de solidarité. La réalisation d’une union douanière suppose un système de protection à l’égard des pays tiers : c’est le tarif extérieur commun (TEC) qui organise une unification en matière de commerce extérieur et permet la mise en place d’une politique commerciale commune fondée sur des droits de douane (produits industriels) ou sur un système plus protecteur, celui des prélèvements à l’importation et des restitutions à l’exportation (un grand nombre de produits agricoles).

G. Noël, Penser et construire l’Europe, Atlande, 2008, page 148

II – La France dans la construction d’une puissance économique européenne

A – L’Europe européenne du général de Gaulle

B – La France et l’élargissement des communautés européennes

CECA en 1951CEE en 1957

CEE en 1973

CEE en 1981

CEE en 1986

En 1993, les institutions européennes annoncent que pour intégrer l’UE, il faut respecter les critères de Copenhague :

- institutions stables, démocratie, respect des droits de l'Homme et des minorités (= un critère politique)

- économie de marché viable (= un critère économique)

- respect de l'acquis communautaire c'est-à-dire transposer toutes les règles précédemment mis en place dans la CEE (= un critère législatif)

UE en 1995

UE en 2004

UE en 2007

UE en 2013

C – La France et l’approfondissement des communautés européennes

Des conceptions différentes de l’Europe

« L’Europe « idéale » de la France est d’abord un projet de puissance, où l’Europe devrait, grâce à ses initiatives diplomatiques et à sa monnaie, reprendre autant d’influence qu’autrefois. L’Europe rêvée à Paris reste une Europe des États nationaux : le Parlement européen y est moins crucial que les parlements nationaux. L’Europe « idéale » de l’Allemagne est d’abord une union économique, animée par une économie libérale - et sociale - de marché. Dans l’idéal, l’Europe est un État fédéral, et non une fédération d’États, avec une forte décentralisation et un système de péréquation financière qui assure un rééquilibrage entre les différentes régions européennes ».

M. Faucher, La République européenne, Belin, 2000

« La Grande-Bretagne conçoit une Europe conforme à ses intérêts nationaux, solidaire de Washington, ouverte à la mondialisation libérale, c’est-à-dire une simple zone de libre-échange, sans politiques communes, une Europe des nations méfiante à l’égard de tout fédéralisme et de toute tentation supranationale, et enfin une Europe qui lui réserve un traitement spécifique, distinct de celui des autres États ».

J.-M. Gaillard, A. Rowley, Histoire du continent européen 1850-2000, Seuil, 2001

Trois principales conceptions de l’Europe :

● L’Europe fédérale - gouvernement européen unique - logique supranationale - décisions prises à la majorité.

● L’Europe des Nations - un instrument pour retrouver sa grandeur passée

- chaque État préserve sa souveraineté (transferts de compétences limités)

- logique intergouvernementale (décisions à l’unanimité)

● L’Europe du libre-échange - simple zone de libre échange (sans contrainte) - pas de politiques communes - chaque État reste maître de sa politique.

Une union à géométrie variable (ou union « à la carte »)

L’Espace économique européen (EEE = UE + Islande, Norvège)

Ces pays pratiquent la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux. C’est le projet initial de la construction européenne (marché commun).

L’Union économique et monétaire

- 18 pays sont membres dela zone euro (+ Lituanie en 2015)- 9 pays de l’UE sont hors zone euro

- 4 pays hors-UE l’utilisent avec accordsdes pays membres- 2 pays hors-UE l’utilisent de facto

III – La France dans l’Union européenne

A – Le traité de Maastricht ou le retour à l’ambition d’une Europe politique

B – La France face à la crise européenne

C – L’opinion française face à l’UE : entre adhésion déçue et euroscepticisme

Quel futur pour la construction européenne ?

Les enquêtes d’opinion publique européennes, les Eurobaromètres, montraient en 2003 que 68 % des personnes interrogées dans les pays de l’Union européenne, avant son élargissement de 15 à 25 membres pensaient que l’histoire et la géographie justifiaient cette ouverture aux nouveaux membres et 82 % pensaient qu’il s’agissait d’un enrichissement culturel ; 54 % disaient même être ouverts à l’acceptation d’autres États ; mais cette option était toutefois minoritaire dans plusieurs pays, dont la France (49 %), et 76 % des Européens enquêtés pensaient qu’une telle option devait impliquer un accord préalable sur une frontière définitive de l’Union.

Mais en même temps, on voit se développer un désenchantement des citoyens européens envers l’idée européenne. [...] L’idéal européen semble s’être dilué dans les élargissements successifs. Les institutions communautaires apparaissent aux yeux des citoyens comme lointaines. Elles sont entachées d’un déficit de contrôle démocratique, jugées bureaucratiques, incapables de résoudre les problèmes au quotidien, induits par les conséquences de la mondialisation et les incertitudes qu’elles charrient, le détricotage du cadre social, les concurrences exacerbées dans le cadre d’États moins interventionnistes. [...] La tentation est dès lors très grande de recourir à des réponses simplistes de repli sur soi, sur des valeurs nationales, sur l’idée que la construction européenne a mis à mal une sécurité d’existence passée.

Christian Vandermotten et Bernard Dézert, L’identité de l’Europe, Armand Colin, 2008, pages 281-282