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N° 6 – mai 2011 Regroupement du 13 avril Ce fut un moment d’échanges très courts car cette matinée fut essentiellement consacrée à l’enterrement des 37 postes de Rased supprimés dans le département. (Manifestation relatée sur le site Rased en lutte) Nous avons pu nous rendre compte que ces suppressions ne concernent pas seulement des postes vacants et des départs à la retraite, mais aussi des postes bien occupés par du personnel formé et sommé de retourner en classe ! Nous sommes atterrés de la manière dont les enseignants spécialisés concernés, ont été informés de leur suppression. Certains ont appris l’information très tardivement, à quelques jours de l’ouverture du mouvement. D’autres l’ont appris de manière globale sur une circonscription, sans désignation de poste particulier. Pour d’autres encore, ce fut le communiqué des syndicats qui leur ont donné l’information ! Le temps du mouvement a été un moment de questionnement et de doute quant au projet professionnel de chacun d’entre eux. Peu de postes spécialisés sont disponibles et il leur a fallu dans l’urgence répondre à une injonction de changement de fonction, sans réflexion préalable. Cette réalité nous fait peur quant à l’avenir des personnels enseignants. Conférence de Corinne Moy Le 4 mai, nous recevions Corinne Moy, rééducatrice, chargée de la formation des rééducateurs à Paris. Je vous propose quelques pistes de réflexion amenées par cette conférence. Corinne Moy a tenu à apporter des précisions sur le contenu du titre de la conférence. « Pourquoi l’apprentissage de la lecture est – il parfois empêché ? » L’acte de lire est complexe. On a affaire à quelque chose de vivant et de pas mécanique. Au lieu d s’intéresser au pourquoi qui renvoie à la question de la cause, il convient plutôt de poser la question du comment : Comment s’y prennent ils pour ne pas apprendre à lire ? La question de la perte en lecture : En quoi la perte est particulièrement sensible dans la lecture ? Il faut s’intéresser à la lettre. On ne peut pas garder le support de la phonétique de l’écrit. La lettre est le produit de 2 effacements : - l’image (versant visuel) - l’idée quelle représente un son (versant audible) Dans l’acte de lire, ces 2 versants ne sont pas dans le même espace. Pour lire, il faut avoir vu , ne pas s’arrêter, continuer pour entendre quelque chose. C’est un enchaînement temporel et non linéaire. ALRAL info Association Laïque des Rééducateurs de l’Académie de Lille

Alral info n° 6 mai 2011

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N° 6 – mai 2011

Regroupement du 13 avril Ce fut un moment d’échanges très courts car cette matinée fut essentiellement consacrée à l’enterrement des 37 postes de Rased supprimés dans le département. (Manifestation relatée sur le site Rased en lutte) Nous avons pu nous rendre compte que ces suppressions ne concernent pas seulement des postes vacants et des départs à la retraite, mais aussi des postes bien occupés par du personnel formé et sommé de retourner en classe ! Nous sommes atterrés de la manière dont les enseignants spécialisés concernés, ont été informés de leur suppression. Certains ont appris l’information très tardivement, à quelques jours de l’ouverture du mouvement. D’autres l’ont appris de manière globale sur une circonscription, sans désignation de poste particulier. Pour d’autres encore, ce fut le communiqué des syndicats qui leur ont donné l’information ! Le temps du mouvement a été un moment de questionnement et de doute quant au projet professionnel de chacun d’entre eux. Peu de postes spécialisés sont disponibles et il leur a fallu dans l’urgence répondre à une injonction de changement de fonction, sans réflexion préalable. Cette réalité nous fait peur quant à l’avenir des personnels enseignants.

Conférence de Corinne Moy Le 4 mai, nous recevions Corinne Moy, rééducatrice, chargée de la formation des rééducateurs à Paris. Je vous propose quelques pistes de réflexion amenées par cette conférence. Corinne Moy a tenu à apporter des précisions sur le contenu du titre de la conférence. « Pourquoi l’apprentissage de la lecture est – il parfois empêché ? » L’acte de lire est complexe. On a affaire à quelque chose de vivant et de pas mécanique. Au lieu d s’intéresser au pourquoi qui renvoie à la question de la cause, il convient plutôt de poser la question du comment : Comment s’y prennent ils pour ne pas apprendre à lire ? La question de la perte en lecture : En quoi la perte est particulièrement sensible dans la lecture ? Il faut s’intéresser à la lettre. On ne peut pas garder le support de la phonétique de l’écrit. La lettre est le produit de 2 effacements : - l’image (versant visuel)

- l’idée quelle représente un son (versant audible) Dans l’acte de lire, ces 2 versants ne sont pas dans le même espace. Pour lire, il faut avoir vu, ne pas s’arrêter, continuer pour entendre quelque chose. C’est un enchaînement temporel et non linéaire.

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La lettre ne doit plus rien représenter de figuratif pour devenir un simple trait d’un système symbolique. La lecture est le produit de l’effacement du figuratif. Et là il y a de la perte. La saisie de l’objet est impossible dans le système de l’écrit. On ne peut pas retrouver l’objet (la lettre) Exemple d’Adama qui traitait la lettre comme une image toujours prête à surgir. (S lettre du serpent). L’image fait appel à l’imaginaire qui devient un écran pour un système symbolique. Dans ce cas Adama ne pouvait pas former une syllabe, le 2ème son était altéré. Qu’est ce qui permet aux enfants de quitter le figuratif ? C’est quand ils vont phonétiser le langage qu’ils s’éloigneront du figuratif. D’ailleurs les enfants qui déchiffrent le font avec une voix différente, très articulatoire. C’est la voix qui introduit le langage, qui parle la langue partagée, parlée de tous, qui intervient dans la construction du sens. Cette voix va détacher la lettre de l’image. Elle devient le support de ce qui s’entend et non plus le support de ce qui se voit. Quand le langage fait sens, on passe à une autre représentation. On se retrouve à partager, à faire du sens. L’enfant qui a du mal à entrer dans cette construction de sens, de ce qui s’entend est sourd de quelque chose de son savoir, de sa culture. La lettre (entendue) représente cette mise en représentation sociale de cette perte (lettre objet). Elle a un statut social, c’est une perte partagée avec les autres. Il est important de voir que les autres aussi ont réglé cette perte. S’approprier un moyen de communication c’est aussi le rapport social du sujet au manque. La question de l’écart en lecture : l’anticipation d’un gain. Quand on introduit la parole en lecture, il y a un écart entre ce qui se voit et ce qui s’entend. La lecture nous oblige à voir dans la perspective de ce qui pourrait s’entendre. Quand un bébé babille, il existe dans ce babil une amplitude de sons qui va se réduire au fur et à mesure que le langage sensé se construit. Il faut perdre quelque chose pour gagner en sens. Dans la lecture, c’est l’oreille qui commande le regard, alors qu’elle intervient après. Pour entendre, il faut avoir vu et quand on voit, il faut anticiper ce qu’on entend. C’est important d’accepter cet écart là. Ce qui est vu, est saisi dans une anticipation d’un sens à venir. On est toujours dans un processus temporel : il y a rétroaction sur ce qui est réellement écrit. C’est un point qui fait problème avec les enfants qui n’entrent pas dans la lecture. C’est important de voir les façons de faire des élèves et de leur apporter cette notion d’anticipation d’un gain. Aider l’enfant à : - anticiper que le texte à lire fait sens avec quelque chose de soi - anticiper qu’on va pouvoir entendre quelque chose de soi dans le texte d’un autre. - anticiper qu’on va se sentir concerné par le texte donné. Il y a dans les classes un impératif à lire donné par l’enseignant, mais il y a exclusion du sujet. Il est important que cet impératif soit modulé par la personne qui donne à lire le texte. « Tu vas me lire ce texte » Dans cette invitation, l’enfant est éjecté de la demande. Dans l’impératif, le langage est univoque et les enfants en difficulté ont bien souvent qu’une réponse univoque. La question en lecture du lien avec les autres : L’enfant qui lit quitte un monde. C’est un vrai passage. La lecture est un seuil entre deux univers.

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La lecture confronte l’enfant à la solitude. Au moment de l’apprentissage, ça peut être insupportable. Celui qui a écrit n’est pas là. Pour lire, on ne peut plus être dans une relation étroite. C’est une autre séparation. En même temps la lecture permet le lien avec les autres. En quoi le lien aux autres peut être un étayage ? La relation aux autres promeut le pluriel, la multiplicité d’identifications. La lecture desserre les liens familiaux et installe un lien social. Importance de lier sa propre représentation à celle des autres. Quand un texte est lu (en classe aussi), il faut qu’il y ait plusieurs lectures possibles. Il y aura une appropriation de chacun et moins d’univoque. Le langage devient polysémique. Les détours permettent d’expérimenter différents points de vue et de changer de place. Il est essentiel de penser la lecture comme un lien social. Les enfants en difficulté ont des possibilités différentes : - certains vont pouvoir parler de leur difficulté de lecture. Ils sont dans un discours pédagogique et l’aide sera pédagogique ; - D’autres vont s’échapper. Ce ne sera pas une aide pédagogique. Ils ont besoin d’un détour parce qu’il y a trop d’angoisses. Parmi eux certains ont un savoir de cette difficulté, d’autres n’en sont pas conscients et ce sera plus difficile et plus long de travailler avec eux. - certains enfants mettent tout en œuvre pour faire venir leurs parents à l’école. C’est un appel à se sentir autorisé à apprendre. Il y a un impératif pour la famille c’est celui d’inscrire l’enfant et de le mener à l’école. Il y a un impératif pour l’école c’est celui d’accueillir tout enfant. Maintenant il s’agit de voir comment on accueille chacun avec ses difficultés et ses besoins particuliers.

thème possible du prochain regroupement

Quelles pratiques d’accompagnement avec la famille?

Mercredi 25 mai 2011

Regroupement pour tous, de 9h30 à 12h30, à Wizernes Salle du Foyer près de la Mairie

Par la A 26, prendre la sortie 3 -Saint-Omer- tourner à gauche direction Boulogne. Au rond point, prendre la direction : Setques, Esquerdes, Hallines, Wizernes.

A Wizernes, direction centre-ville, avant la place (mairie), tourner à droite, puis prendre la 1ère à droite et la 1ère à gauche.

NB : Il sera possible de prendre le repas ensemble

Ordre du jour :

- Pratiques en rééducation : Le thème choisi sera celui proposé le 13 avril : « quelles pratiques d’accompagnement auprès de l’enfant, avec la famille en entretien, avec les enseignants ? »

Bien sûr, tout autre thème pourra être abordé - Echanges à propos de la conférence de C. Moy - Motion d’actualité : proposition pour le Congrès de Lorient. - Vie de l’Alral : Infos diverses et pratiques. - Infos de la Fnaren.

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