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N° 32 | DU SAMEDI 10 AU VENDREDI 16 JUILLET 2010 | INFORMATIONS, ENQUêTES ET MAUVAIS ESPRIT bakchich bédéreportage Escale à Tanger, porte nord du Maroc afrique du sud Le caricaturiste Zapiro charge la Fifa speakerine Rémy Pflimlin, boss de France Télévisions viiliers-le-bel Le pouvoir truque le procès des émeutiers Total booste le nucléaire birman dossier L’Algérie de Bouteflika nouvel Absurdistan BEL : 2€ CH : 2,90FS Et sur Internet L 13723 - 32 - F: 1,50 le temps des valises PoTs-dE-vin, coRRuPTion, FinAncEMEnT occuLTE…

Bakchich N°32

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Bakchich N°32

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Page 1: Bakchich N°32

N° 32 | du samedI 10 au vendredI 16 JuIllet 2010 | InformatIons, enquêtes et mauvaIs esprIt

bakchich

bédéreportage Escale à Tanger, porte nord du Maroc

afrique du sud

Le caricaturiste Zapiro charge la Fifa

speakerine

Rémy Pflimlin, boss de France Télévisions

viiliers-le-bel

Le pouvoir truque le procès des émeutiers

Total booste le nucléaire birman

dossier

L’Algérie de Bouteflika nouvel Absurdistan

Bel : 2€ CH : 2,90fs

Et sur Internet

L 13723 - 32 - F: 1,50 �pages 5-6-7

le temps des valises

PoTs-dE-vin, coRRuPTion, FinAncEMEnT occuLTE…

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Au rayon des soldes, cette année, il y a l’embarras du choix. D’abord, il y a une équipe de France de foot un peu abîmée, mais qui n’a pas beaucoup couru, ni trempé le maillot. À saisir. L’entraîneur, lui, est invendable. Hélas, il n’était pas impayable. Il y a toujours, rappelons-le, quelques millions de vac-cins contre la grippe du cochon entassés dans les caves de Roselyne Bachelot. De quoi avoir les larmes aux yeux : vous n’avez tout de même pas cru qu’elle

pleurnichait sur l’avenir de la Fifa ?Il y a deux ministres scandaleux, ridi-cules dans leurs œuvres comme dans leurs bidouillages de filous insolents, lourdés par le boss, en attendant la suite. Il se peut que le stock s’enrichisse (lui aussi) de quelques autres spéci-mens en automne. Il y a une octogé-naire bourrée de jonc et pourtant sub-ventionnée par le fisc, alors même que son magot est une offense permanente pour tous ceux qui, comme des blai-reaux, ont la sale habitude de se lever chaque matin pour travailler. Il y a un bouclier fiscal qui ne protège pas vrai-ment des orages, puisque, comme tout le monde peut le voir, le gros problème de Sarkozy, ce ne sont pas ses pauvres, ce sont ses riches : voilà où mène l’as-sistanat. Il y a un trésorier de l’UMP qui

ne voit pas où est le problème et un ministre du Travail qui ne voit pas non plus où est le problème. Et pour cause, c’est le même : achetez le lot !Il y a 100 000 fonctionnaires pas rem-placés, pour économiser dans les hôpi-taux et les écoles ce que nous coûte la baisse de la TVA au resto. Pas grave : on se fait soigner chez Nénesse – ils ont l’appendicite en plat du jour –, et mon fils apprend à lire le menu du terroir. Il y a une Belgique tellement décomposée qu’elle fait désormais partie du Tour de France. On lui a confié le sort de l’Europe pendant six mois : à Noël, on aura peut-être deux Europes, une à Bruxelles, une à Strasbourg. Ah bon, c’est déjà le cas ? Bref, dans les soldes, il n’y a pas que des affaires… ✹� jAcqUES gAILLARD

Mot à Mot

Apéro

PAyS-BAS - ESPAgNE

l'art de retourner la situation

Le jargon de la semaineEn France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées. Et christine Lagarde. joie du buzz, la ministre de l’Économie a innové dans la langue de bois en créant le mot-valise « ri-lance » (sic), composite de « rigueur » et de « relance ». Un mot promis au succès (16 000 occurrences sur google, lundi ; 63 000 mercredi) et destiné à coller un nez de clown sur la face verdâtre de l’austérité. Et si, par un hasard abracadabrantesque, la « ri-lance » fait « pschitt », Lagarde créera la « pschrilance », et tout continuera comme avant.

Le calembour de la semaineLors de la première étape (belge) du Tour de France, le peloton a traversé la localité flamande de Putte. Inspirant l’increvable gérard Holtz, qui a lancé du haut de sa moto – et dans le micro : « Je n’ai jamais vu autant de fils de Putte sur le bord de la route. » Le forum du site Web et le standard de France 2 ont chauffé. Puis gégé s’est excusé : « Je n’ai jamais voulu blesser personne. On a dû mal me comprendre. » « C’est certain, étant donné le niveau de sophistication de la pirouette du journaliste », a répliqué le site de la chaîne belge RTBF.

Le pieu de la semaineyouTube a diffusé les ébats sexuels d’un proche collaborateur du grand aya-tollah Ali al-Sistani, sorte de pape du chiisme irakien. Avec la caméra de son téléphone, Hamdan Naji al-Mousavi a filmé ses performances avec son épouse, et 18 femmes venues solliciter un avis religieux. Des conquêtes aujourd’hui en danger de mort – on ne badine pas avec l’adultère. Lapidère. Le phénomène météo de la semaineLe village de Saint-Pandelon (Landes) a eu les honneurs des médias. Les habitants retrouvaient leurs voitures, leur linge… mouchetés de petites taches brunâtres et puantes. Le maire n’a pas hésité : « Il pleuvait de la merde. » On a accusé les avions. Mais non. Les déjections proviendraient des milliers de martinets qui ont élu domicile dans le coin. Il aura fallu deux mois pour y penser ✹

LES TROPHÉES

soMMaire

apéroLes faits saiLLaNtsde L’actuaLité

P.3 total en Birmanie. Les généraux de la junte rêvent de doter le pays du nucléaire militaire ? Peu regardant, le géant pétrolier français apporte sa généreuse contribution.P.3 Les règles administrativessont compliquées et non respectées. N’est-ce pas, M. Woerth ?P.4 israël. Le Mossad enchaîne les bévues. Empoisonnant.

fiLouteriesNos eNquêteset Nos dossiers

P.5 Procès des émeutiers de Villiers-le-Bel. Bakchich a rencontré le témoin essentiel de l’audience, christopher Bénard. Où l’on apprend comment l’Élysée l’a manipulé pour qu’il témoigne à tout prix.P.6-7 Le dossier de la semaine.Après plus de dix ans de règne de Bouteflika, l’Algérie est en pleine régression. Les bonnes feuilles d’un ouvrage au vitriol.P.8 Les relations courtisanes entrela droite et les époux Bettencourt ne datent pas d’hier.

BazareNViroNNeMeNt, Médias, coNso, sPort, PiPoLes…

P.9 afrique du sud. Entretien avec Zapiro, le caricaturiste vedette que la Fifa – et bien d’autres – insupporte.P.10-11 Visite de tanger en bédéreportage. Suivez le guide.

CuLtureBouquiN, ciNéMa, Musique, Bédé…

P.13 Martha Washington, la bédé culte de Frank Miller et Dave gibbons enfin éditée en France.P.14 Predators, suite de la série débutée avec Schwarzy en 1987, est dans les salles. Saignant !P.16 Le nouveau boss de France Télévisions s’appelle rémy Pflimlin. Présentation du non-choix de Nicolas Sarkozy.

cOUP DE BOULE

B onne nouvelle ! L’inflation repart. Avec l’augmentation

sournoise des tarifs du gaz, de l’électricité et du ticket de métro, nous nous acheminons gaiement vers un petit 2 %. Côté gaz, pas d’inquiétude : son prix sur les marchés internationaux – avec la découverte de nouveaux gise-ments – n’a jamais été aussi bas, mais comme en France on ne fait rien comme tout le monde, son tarif reste indexé sur le prix du pétrole. Comprenne qui pourra. Pas grave, ce sont les plus démunis, en pleine progression (près de 300 000 ménages), qui se voient privés de gaz et d’électri-cité. Z’avaient qu’à payer leurs factures. Avec quoi ? Bof… Si tout cela renchérit notre produc-tion industrielle et pénalise nos exportations, nous gagnerons en contrepartie de nouveaux chô-meurs et notre déficit commercial explosera.Côté bonnes nouvelles, faisons confiance à la sagacité de Claude Guéant et d’Alain Minc, nos vice-ministres des Finances, qui travaillent avec ardeur à une iné-

vitable augmentation des impôts (TVA incluse), qui nous plombera pour les dix ans à venir.

MoutoNsMais tout n’est pas désespéré : le gouvernement va continuer à aider les grandes entreprises en accélérant la planche à billets et les plus malins n’auront, pour se refaire une santé, qu’à spéculer en Bourse – cette fois, à la baisse. À l’heure où les jeux en ligne sont officiellement autorisés, misons nos dernières économies sur les banques d’affaires. Renflouées par l’État, elles se portent bien. Jugez-en : une étude récente a montré que les 15 plus grosses banques européennes (dont la BNP et la Société générale) ont réalisé, en 2009, 95 milliards d’euros de béné-fices dans leurs activités d’inves-tissement contre 25 milliards en 2008, et que leurs résultats sont passés de 25 milliards de pertes en 2008 à 43 milliards de bénéfices en 2009. Ne soyons pas inutilement pessimistes, il y aura toujours des moutons à tondre ✹� ALcESTE

L’ESPOIR FAIT-IL ENcORE VIVRE ?

Michèle Alliot-Marie a l’ambition ridicule. On sent bien qu’elle rêve de la présidence de la République alors que, lorsqu’elle s’agite, on pense à un lapin frappant sur son tambour. Mais ses impairs sont utiles quand, à propos de

la burqa, elle déclare à Libération : « La République se vit à visage découvert. » Parfaite doctrine au moment où, à Villiers-le-Bel, on condamne des prévenus – peut-être coupables – sur les affirmations d’individus sans noms ni visages, témoignant sous X, comme avec Staline ou en Ulster (lire page 5). Merci à MAM, donc, de supprimer aussi ce honteux niqab judiciaire.L’affaire Woerth-Bettencourt prend du corps, ne manque qu’un cadavre exquis pour qu’elle gagne les étagères des scandales Sta-visky ou Ben Barka… Nous n’avançons guère en matière de morale publique : des politiques continuent de copuler avec des collection-neurs de coffres-forts offshore. Mais la honte n’est pas chez ceux qui prennent le thé et les enveloppes chez Liliane Bettencourt. La pourriture est dans la presse, en particulier celle qui s’exprime sur Internet pour être libre. Après que Bakchich a essuyé les plâ-tres, c’est au tour de nos amis de Mediapart d’être traités de « fas-cistes », de « presse des années 30 ». La droite veut tuer l’information sur Internet et le chien Plenel. Xavier Bertrand ne devrait pas réveiller les vieux diables. Les « années 30 » ? C’est remonter à la Cagoule, mouvement fasciste dont la mémoire usée de Liliane Bet-tencourt pourrait encore parler, ce groupe factieux a été financé par son père, Eugène Schueller. Ce fondateur de L’Oréal que le jeune François Mitterrand admirait. Oh, là ! Remettons vite le couvercle sur la marmite ✹� LA RÉDAcTION

“ „François Baroin, à propos de la nomination du président de France Télévisions.

Je l’ai dit à Nicolas Sarkozy : je crois que ça vous reviendra en boomerang.

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pompage En Birmanie, le généraux de la junte n’ont qu’une idée en tête : se doter de l’arme nucléaire. Total, qui exploite un gisement dans le pays, leur donne un sérieux coup de main.

T otal n’a décidément pas de chance. Alors que les malheurs de BP dans le golfe du Mexique ont fait

passer ses propres turpitudes à l’arrière-plan, voilà que surgit un gros pépin : les généraux birmans mettent le paquet pour se doter de l’arme nucléaire. Et Total est leur premier financeur…Les investigations de l’ONG Earth-Rights International (ERI) établis-sent clairement la responsabilité du pétrolier dans l’acquisition en cours de nucléaire militaire par la junte birmane auprès de la Corée du Nord. Depuis des années, ERI enquête sur le soutien multiforme qu’apportent à la junte birmane les multinationales pétrolières Total et Chevron, partenaires, avec le thaïlandais PTT, au sein du consortium Yadana, qui exploite un gisement gazier off-shore en mer d’Andaman, dans les eaux territoriales birmanes.Ce gisement, très rentable, rap-porte des milliards de dollars aux généraux, qui maintien-nent, depuis cinquante ans, les 60 millions de Birmans dans une

forme d’esclavage particulière-ment cruelle. Ces revenus gaziers constituent de loin la première source de devises du régime dic-tatorial. Selon ERI, depuis la mise en service du gazoduc construit par Total en 2000, environ 5 mil-liards de dollars ont été versés sur des comptes offshore, dans deux banques singapouriennes gérées directement par les généraux. Sans passer par la case budget de l’État. Selon des infor-mations obte-nues par Bakchich, la banque française BNP Paribas a été, de 1995 à 2008, l’intermédiaire finan-cier entre Total, chef de file du consortium Yadana, et les géné-raux birmans. Un porte-parole de BNP Paribas interrogé par Bakchich n’a pas souhaité indi-quer les raisons de la cessation de cette fructueuse activité, ni le dispositif qui l’a remplacée. De son côté, Jean-François Las-salle, porte-parole de Total, s’est

refusé à tout commentaire. Dans une récente interview diffusée par Canal +, le même Lassalle a qualifié de « rumeurs sans fonde-ment » les informations sur l’ac-quisition en cours par la junte birmane d’une capacité nucléaire militaire .Toutefois, un faisceau de faits nouveaux sur l’étroite colla-

boration des militaires bir-mans, formés au nucléaire en Russie en compagnie de quantité d’ingé-

nieurs militaires nord-coréens, sur le creusement de gigantes-ques tunnels et sur l’acquisition d’outillages perfectionnés ont fait l’objet de publications qua-lifiées d’« inquiétantes » par les autorités américaines.En particulier, la diffusion par la chaîne Al Jazeera d’un docu-mentaire réalisé par l’organisa-tion Democratic Voice of Burma met en lumière la volonté et les moyens considérables mis en œuvre par le généralissime Than Shwe depuis plus de dix ans pour se doter à tout prix de missiles à capacité nucléaire. Les interviews de plusieurs défecteurs de haut rang, dont le commandant adjoint du bataillon nucléaire de l’armée birmane, amènent un ancien responsable

de l’Agence internationale de l’énergie atomique, Robert Kelley, à prendre tout à fait au sérieux la marche vers le nucléaire militaire des géné-

raux birmans.Le groupe Total, qui vient, sous la pression américaine, de cesser ses opérations avec l’Iran, serait-il un catalyseur de prolifération nucléaire ? ✹ monsieur b.

total finance le nucléaire birman

Vieux pots et bonne soupeLuc Vigneron, le patron de Thales, ne se fait plus d’illusions sur sa popularité au sein du groupe. « Je suis bien placé pour savoir que vous n’êtes pas convaincus par la nouvelle organisation », a-t-il lancé, le 23 juin, aux 400 dirigeants réunis pour un « management briefing ». De ce brainstorming, il est toutefois res-sorti que le vieillissement de la popula-tion occidentale est une chance pour le groupe de défense et de flicage électro-nique. Avec de plus en plus de vieux, « le désir de sécurité augmente », a expliqué Vigneron. Quand la tension monte, c’est toujours bon.

Quant à Monaco…Après l’annonce des fiançailles de s.A.s. le Prince Albert ii de monaco avec Char-lene Wittstock, reste à trouver une date pour célébrer les noces. sur le rocher, on craint le pire ! Le casse-tête est d’ori-gine familiale. stéphanie, très proche de son frère, s’est mis en tête d’assister à la cérémonie aux côtés de son ami, bertrand Cantat, ex-chanteur de noir Désir. La présence, sur la photo de famille, de cet artiste condamné à huit ans de prison ferme pour le meurtre de marie Trintignant n’est pas du goût de tout le monde.

Joue-la comme RaymondQuand Alain minc, le plus petit des grands consultants, veut déjeuner dans un lieu agréable, en ce début d’été, en homme simple, il va chez Laurent, près des Champs-Élysées. est-il à ce point désespéré pour faire ici la retape des patrons du CAC 40 qui aiment bien cette cantine ? minc doit rebondir. Par sa faute, ses poulains restent à l’écurie. Alexandre bompard n’a pas eu France Télévisions, Jacques Veyrat n’a pas décroché France Télécom, etc. mau-vaise passe où Alain a gagné des bleus et un surnom de loser : raymond.

GMB n’aime personneGeorges-marc benamou, dit « Gmb », l’ancien confident de François mit-terrand devenu, en 2007, conseiller de sarkozy, travaille à un nouvel ouvrage : Mes 16 mois à l’Élysée, alors qu’il avait promis de ne rien dire de cette période. il se murmure que le journaliste et ancien bouffon n’épargnera personne. sur-tout pas la cour présidentielle, Guéant, Guaino et Carla bruni-sarkozy.

Castro lider minimoroland Castro, l’architecte passé de mao à Pasqua, va publier ses mémoires. Du sanglant, surtout contre certains diri-geants du Ps. Castro vise en particulier Laurent Fabius et François Hollande. Ce livre doit être la première foulée de sa marche vers les « primaires » socia-listes. solférino tremble.

Delajoux à la fêteLa fête donnée pour les 60 ans du réalisateur Élie Chouraqui a attiré les professionnels du beautiful pipole. Le plus remarqué fut le bon docteur Delajoux, surnommé – surtout par Johnny Hallyday – le « chirurgien des stars ». Élie Chouraqui et le toubib ont des intérêts communs dans un projet hôtelier au Kenya (ouf, ce n’est pas dans une clinique !). Delajoux circu-lait entre les convives avec la chroni-queuse culinaire Julie Andrieu. C’est mieux qu’une casserole.

Droit de réponseGérard Larcher, le colossal président du sénat, n’est pas content après Bakchich. Voici l’objet de son cour-roux : « Le  3 juillet,  vous  avez  diffusé une  information  erronée  concernant l’aménagement,  pour  Gérard  Larcher, d’un appartement de  fonction de  140 mètres  carrés,  rue  Bonaparte.  Ces assertions sont inexactes. Par choix, les jours où il est à Paris, il occupe, depuis son  élection,  l’appartement  situé  au-dessus de son bureau au Petit  Luxem-bourg.  Celui-ci  représente  une  surface de 99 mètres carrés. Les immeubles de la rue Bonaparte (n° 75 et n° 77) sont actuellement  transformés  en  bureaux et salles de réunion » ✹

Patrice devrait passer Maistre en cachetteen Afrique, Patrice de maistre n’a pas fait que fortune. Le gestionnaire du magot de Liliane « Lady Gaga » bettencourt s’est aussi découvert une passion. La chasse au flouze et la pêche au grisbi. Au point d’avoir développé la manie de retirer des grosses sommes en liquide pour les donner, selon la comptable de dame bettencourt citée par Mediapart, aux bonnes œuvres de l’umP.odieuses accusations démenties par Patoche. mais, sorti de l’ombre, le bon-homme aura du mal à retrouver un peu de frais pendant l’été. Déjà questionné par les poulets dans le cadre de l’enquête sur les enregistrements clandestins des conversations de Liliane bettencourt, il devra aussi, sans doute, répondre à leurs questions dans une enquête préliminaire pour blanchiment de fraude fiscale. Voire discutailler le bout de gras avec les limiers du fisc, pour fraude fiscale précisément, et assistance donnée à l’héritière de L’oréal dans ce bel œuvre… Avant toutes ces grandes épreuves, Bakchich ne saurait trop lui conseiller de se ressourcer en ses terres de brinon-sur-sauldre. À l’abri des regards des braconniers de l’information, sa demeure est fort bien gardée. manuel D., son maître de maison, est, depuis 2007, agréé en qualité de garde et garde-chasse particulier, selon un arrêté préfectoral daté du 20 décembre 2007. soit un homme investi des pouvoirs de constater « tout délit et contravention qui porte atteinte aux propriétés de M. Patrice de Maistre »… L’information et les révélations entrent-elles dans ce giron ? ✹

CHeF sCooP

R égalienne, notre haute administration se gère comme au temps de la monarchie. Prenez l’exemple du « pantouflage », avec le plus

spectaculaire du moment, la nomination de Sté-phane Richard, qui passe de conseiller de l’Élysée à France Télécom. Tout comme Éric Woerth, ces élites ignorent les mots « conflit d’intérêts ». Mais, pour les fonctionnaires pas assez « hauts », il existe des règles impitoyables, comme l’article 33, qui régit le statut d’inspecteur des impôts : « Aucun agent ne peut exercer ses fonctions dans une circonscription sous l’autorité directe de son conjoint, de son parent ou de son allié jusqu’au troisième degré inclus. Les agents qui ont leur conjoint, un parent ou un allié

jusqu’au quatrième degré inclus, officier public ou ministériel, marchand de biens, expert-comptable ou avocat ne peuvent exercer leurs fonctions dans la circonscription où réside cet officier public ou minis-tériel, ou le département où ce marchand de biens, expert-comptable ou avocat exerce son activité. Des dispenses expresses (…) peuvent être accordées par le directeur général des impôts, après avis de la commis-sion administrative paritaire compétente. »Ainsi, la petite-cousine d’un expert-comptable ne peut être inspectrice dans la proximité de son loin-tain parent. Mais Florence Woerth peut gérer les sous de Liliane Bettencourt, sans que son mari y trouve malice ✹ J.-m. b.

les exCePtions ConfiRMent la RèGleADminisTrATion

en dix ans, le pétrolier a versé 5 milliards de dollars à la junte birmane.

Du sAmeDi 10 Au VenDreDi 16 JuiLLeT 2010 | bAKCHiCH HebDo n°32 3

Apéro

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Alexandre les grands motsL’info. « Exclusif :  Alexandre Guérini accuse », le Nouvel Observateur du 1er 

au 7 juillet.Le décryptage. Toujours visé par une enquête pour fraude et corruption sur les appels d’offres publics du départe-ment, Alexandre Guérini,  le  frère du président du conseil général des Bou-ches-du-Rhône,  Jean-Noël,  balance dans  l’hebdo de  la  gauche  tarama. « Victime d’un complot », « coupable idéal »,  il attaque Renaud Muselier, qu’il pense derrière les investigations. Pas  très  observateur  pour  le  coup, le  journal  tambourine  « exclusif ». Quand tout ce que dit Alexandre Gué-rini, y compris sa première interview, est depuis novembre dans Bakchich, après  la  révélation par nos soins de l’ouverture  d’une  instruction.  Peut-être le Nouvel Observateur n’a-t-il pas Internet…

PernautgraphieL’info. « Des rumeurs sur Éric Woerth une nouvelle fois lancées par un site Internet »,  Jean-Pierre  Pernaut  au sujet de l’affaire Woerth et Mediapart, journal de 13 heures, 6 juillet.Le décryptage. Jamais avare quand il s’agit de défendre un homme en diffi-culté, surtout quand il est membre du gouvernement, le considérable présen-tateur du 13 heures a mis un soin par-ticulier à minimiser la portée des révé-lations du site Web Mediapart. À croire qu’il  a  fourni  lui-même  les derniers éléments de langage aux caciques de l’UMP. Qu’en pense Laure Debreuil, res-ponsable des informations judiciaires sur TF1, et ex-femme toujours mariée à Me Georges Kiejman, principal avocat de Liliane Bettencourt ?

Perdu de rechercheL’info. « Myriam, 11 ans, a été retrouvée chez son grand-père à Angers », le 19-20, France 3, 4 juillet.Le décryptage. Revenant sur la dispari-tion d’une adolescente près de Nantes, l’édition d’information de France 3 a rassuré les téléspectateurs en indiquant qu’elle avait fugué chez son papy. Las ! Le soir-même, une demi-heure plus tard, le 20 heures de France 2 n’a pas été tenu au parfum par France 3 et explique que « les recherches sont toujours en cours ». C’est peut-être ça, l’identité des chaînes à laquelle Rémy Pflimlin tient tant !

Villiers-le-Bel impairL’info. « Les jeunes impliqués dans la mort de policiers à Villiers-le-Bel en 2007 ont été condamnés à des peines de 3 à 15 ans de prison », 20 minutes, 5 juillet.Le décryptage. Belle erreur en une de l’édition de Paris de 20 minutes, qui condamne les jeunes de Villiers-le-Bel pour les meurtres de policiers – ce qui n’est pas le cas –, comme s’ils n’avaient pas été assez chargés par une justice aux  ordres  (lire page 5).  Ceux-ci  ont en effet été condamnés pour avoir tiré sur les forces de l’ordre. Une nuance de poids. En prison, les jeunes pourront se consoler : beau joueur, le journal gratuit a présenté ses excuses le lendemain, en quatre lignes, page 4. On efface tout et on recommence.

Les bonnes passes de l'ÉquipeL’info. « Il n’y a qu’un seul Van Bommel », l’Équipe, 5 juillet.Le décryptage. Le quotidien du sport et de  l’automobile a  le nez  creux en consacrant une pleine page au portrait du capitaine des Pays-Bas, en finale du Mondial. Signé Régis Testelin, l’article revient  sur  les  zones  d’ombre  de  ce joueur aussi classieux et cultivé hors du terrain qu’insupportable en match. Un bel article largement inspiré… d’un papier de l’Équipe.fr de la veille, signé Vincent  Duluc,  « Peut-on  aimer  Van Bommel ? » Deux  journalistes  d’une même équipe sur un joueur. C’est tou-jours moins de Bleus que sur Zahia ✹

Des tee-shirts à l’effigie du Mossad se vendent comme des petits pains : http://minu.me/1zk6

www.bakchich.info

TOUR DÉFONCE

Qu’ont offert à Rachida Dati les militants UMP de Haute-Garonne ?

A. Un magnum de château-Dati B. Une vuvuzela

C. Être une femme 2010, de Michel SardouD. Un set de boules de pétanque Chanel

Réponse : B. Rachida Dati a promis de s’en servir à l’Assemblée nationale.

Les sÉVices secrets hÉBreux Au PLus mAL

N ouveau coup dur pour le Mossad : le fiasco de son opération « homo »

(vocable des services spéciaux pour désigner l’assassinat), en janvier dernier à Dubaï, contre un haut responsable du Hamas est bien pire qu’on le croyait.Non seulement les agents israé-liens se sont fait démasquer comme des bleus par les caméras de surveillance, mais, en plus, on apprend qu’ils ont fait du zèle… Leur cible, de passage dans l ’émirat , ne devait pas être tuée. Selon des sources améri-caines reprises par un site proche des rensei-gnements israéliens, la mission du commando était d’enlever Mahmoud al-Mabhouh pour l’échanger contre le soldat franco-israélien Gilad Shalit, fait prison-nier le 25 juin 2006 par la branche armée du Hamas, aux abords de la bande de Gaza.D’après ces sources, les kidnap-peurs se sont trompés dans la dose de produit à injecter à leur victime, provoquant sa mort. Selon le projet initial, la drogue devait permettre à Al-Mabhouh de suivre ses agresseurs sans leur résister jusqu’à « un yacht amarré

dans le port de Dubaï » qui devait ensuite le conduire « à bord d’un navire de la marine israélienne dans les eaux internationales de la mer Rouge », direction Eilat. Bref, une grosse bourde de plus pour le Mossad, dans une affaire qui en cumule tant qu’elle est qualifiée de « Dubaïgate ».Très remontés par cette opération vécue comme une déclaration de guerre, les Émirats arabes unis ont annoncé qu’ils allaient lancer

u n m a n d a t d’arrêt contre Meir Dagan, le directeur du Mossad, et saisir Interpol. Le chef de la

police de Dubaï, le lieutenant général Dahi Khalfan Tamim, qui a confirmé les révélations du site israélien, parle d’une nou-velle démonstration de « la totale imbécillité du Mossad » et a exigé la démission de son patron.Ça tombe bien : le mandat de celui qui dirige depuis huit ans les services secrets israéliens arrive à son terme. Et sa demande de prolongation d’une année supplé-mentaire lui a été refusée, malgré le soutien affiché par le gouverne-ment : Dagan incarne les échecs successifs d’un service longtemps considéré par ses pairs comme

l’un des plus « performants ». Et l’abordage sanglant de la flottille de militants pro-palestiniens, briseurs de blocus, le 31 mai der-nier, par un commando israélien n’aura pas rehaussé le prestige du service : des sources militaires israéliennes ont affirmé que le Mossad n’avait pas échangé ses renseignements avec l’armée. Parmi les prétendants au poste figure Haggaï Hadass, un ancien du Mossad, qui dirige aujourd’hui l’équipe chargée de l’affaire… Gilad Shalit.En 1997, Netanyahou, alors aux affaires, avait déjà eu un grave problème avec le Mossad. Des agents en mission à Amman avaient injecté un produit mortel à Khaled Mechaal, aujourd’hui porte-parole du Hamas. Repérées, les barbouzes avaient été faits prisonniers par un chauffeur de taxi jordanien. Netanyahou avait été contraint, par le roi Hussein, d’expédier d’urgence l’antidote du poison… ✹  MARTIN GALE

Le mossad, jadis considéré comme l’élite, passe pour un « total imbécile ».

Barack coupe-circuitUn projet de loi américain soutenu par le sénateur indé-pendant Joe Lieberman vise à offrir à Barack Obama la possibilité de contrôler, voire de fermer, tout ou partie de l’Internet américain en cas d’état d’urgence. Les fournis-seurs d’accès, les moteurs de recherche, les développeurs de logiciels que le gouvernement aura désignés « devront immédiatement se soumettre à toute mesure d’urgence ou à toute action ». Quant aux dégâts incalculables causés par la coupure des services, ce sera cadeau.

même pas bacSur Internet, la consultation des résultats du baccalauréat est plus ou moins confidentielle. La plupart des académies proposent le verdict en libre accès. Paradoxalement, celle de Paris-Créteil-Versailles, qui exige des candidats leur matricule et leur date de naissance, précise d’emblée : « La présente publication de résultats ne présente pas de carac-tère de notification officiel. Les candidats doivent consulter les listes d’affichage officielles. » Sans doute faut-il un bac + 5 pour comprendre le langage administratif…

hip hippisme hourraLe PMU se frotte les sabots : depuis l’autorisation des paris sportifs en ligne, le 9 juin, le site Pmu.fr revendique plus de  9 millions de visiteurs uniques, soit + 64 % par rapport à mai, et quatre fois plus de nouveaux clients qu’auparavant. Avec déjà 4,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires au pre-mier semestre, l’année s’annonce bien. À un contre un.

De hadopi en pisNumerama.com a noté que le boss du studio Paramount, Frederick Huntsberry, ne croit pas à l’efficacité de la riposte graduée pour lutter contre le piratage. Au motif que les nouvelles générations d’internautes iront plus volontiers pomper sur des sites de stockage, qui permettent le télé-chargement direct. L’Hadopi va-t-elle devoir anticiper et, comme Obama, fliquer sans attendre tout l’Internet ? ✹

BAB’ EL WEB

ISRAëL

4 BAKCHICH HEBDO N°32 | DU SAMEDI 10 AU VENDREDI 16 JUILLET 2010

Apéro

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du samedi 10 au vendredi 16 juillet 2010 | Bakchich heBdo n°32 5

Filouteries

justice Bakchich a retrouvé le témoin clé du procès des émeutiers de Villiers-le-Bel, qui s’est clôturé le 4 juillet. En échange de son témoignage, Christopher Bénard avait négocié de l’argent et une protection. Il affirme aujourd’hui avoir été manipulé par le pouvoir politique.

Témoignage sous X. Une pratique à la limite de la porno-graphie judiciaire. Dans le procès dit de Villiers-le-Bel (lire

encadré), les témoins anonymes ont eu la part belle. Leur « utili-sation » a fait couler beaucoup d’encre et nombreuses sont les voix qui se sont élevées pour dénoncer ce qui s’apparente à une grave dérive. Pour une audience à forte connotation politique.Novembre 2007. La ville du Val-d’Oise rejoue la Commune. Heurts avec les forces de l’ordre après qu’une voiture de flic a ren-versé deux jeunes. Deux morts. Dans les banlieues du XXIe siècle, les barricades du XIXe devien-nent des émeutes. Dans la nuit du 25 au 26, quand Villiers-le-Bel s’enflamme, la police se fait tirer dessus. Humiliée.Trouver les coupables permettra de sanctionner les sauvageons. Il revient donc au tribunal de Pon-toise de laver l’honneur de la maison Poulaga et de redonner sa fierté à l’Intérieur, pilier du régime Sarkozy. Les loustics sur le banc des accusés, fran-chement basanés, doivent être condamnés. « Mettez les moyens que vous voulez, (...) ça ne peut pas rester impuni, c’est une prio-rité absolue », lance Nicolas Sarkozy aux policiers, peu après les événements.

Quitte à servir les témoins sur un plateau et à les mettre dans les meilleures dispositions. Par exemple en distribuant, après les émeutes, des tracts appelant à la délation ou promettant une récompense sonnante et trébu-chante pour les bavards. Saine et aveugle justice dans la patrie des droits de l’homme. Las, les velléitaires qui ont répondu à l’appel du drapeau ont été dupés. Bak-chich a retrouvé l’un d’eux. Fran-chement frustré. Il a été un témoin capital lors du procès des émeu-tiers de Villiers-le-Bel. Le 30 juin, Christopher Bénard a parlé à visage décou-vert. Une déposition spontanée, après deux reculades, et sous bonne escorte. Spontanée ? En 2008, Christopher Bénard purge une peine de prison pour avoir renversé une jeune fille à vélo. Morte sur le coup. Il n’a que 19 ans. Il vit une très mau-vaise passe. Trois mois plus tôt, Christopher avait dû décrocher son père, retrouvé pendu chez lui. Un jour de mars 2008, tandis qu’il croupit dans les geôles de la cour d’appel de Versailles, Bénard entend deux hommes palabrer sur les tirs de Villiers-le-Bel. Il raconte : « Un a dit : “Je dirai que j’étais à la mosquée, ça passera comme une lettre à la

poste”, et l’autre : “J’ai tiré, mais ils ne pourront pas le prouver, on va sortir bientôt”. » Accablant pour deux des accusés, Adama Kamara et Maka Kante – dit « Mara » –, que Christopher iden-tifiera lors des audiences.En prison, Bénard est victime de racket, mais l’administration pénitentiaire reste sourde à ses demandes de transfert. Seule solution, dès lors, contacter le

procureur de la République par écrit pour lui faire part de ses révélations à propos de l’enquête sur les jeunes qui

ont tiré sur la police. Avec le fol espoir de voir sa situation s’amé-liorer, le prisonnier déverse une première fois ce qu’il redira à la barre de Pontoise.Ensemble, tout devient pos-sible. Sorti de cabane, le futur repenti est reçu à l’Élysée, en septembre 2008, par deux hauts fonctionnaires. Pas de simples valets. Rien de moins qu’un des conseillers justice de Nicolas Sarkozy et l’un des membres de cabinet de la ministre de l’Inté-rieur de l’époque, Michèle Alliot-Marie.Les deux commis écoutent sa complainte. Bénard accepte de témoigner au procès, mais veut qu’on le paie, qu’on lui assure une protection policière et qu’on lui arrange ses problèmes avec la justice. Si possible obtenir le plus tôt possible une audience de jugement pour son homicide involontaire. « L’un des deux s’est chargé de me donner une date de procès rapide, ça m’a encouragé. » En revanche, pour l’argent, les deux grands serviteurs de l’État se chamaillent. L’un est hostile à toute forme de rémunération malgré les promesses policières, l’autre lui assure un dédomma-gement. Aujourd’hui, l’Élysée dément qu’il y ait eu pareil rendez-vous, au risque de décré-dibiliser un témoin pourtant essentiel du procès.Et qu’elles semblent loin, les pro-messes des deux hauts fonction-naires du Château ! « Je n’ai rien eu de ce qu’on m’avait promis : je n’ai pas reçu de récompense, je n’ai aucune protection et je vis caché, décrit-il à Bakchich. Je suis en route pour l’étranger. Je

n’ai pas le choix. »Le jeune homme de 22 ans, fra-gilisé par la vie, a le net senti-ment d’avoir été manipulé par le pouvoir politique en général, policier en particulier. « Je regrette d’avoir dénoncé ce que j’ai su en prison, l’implication de deux personnes dans les tirs. J’étais totalement affaibli, j’ai vécu plusieurs épisodes doulou-reux à la suite, j’étais agressé en prison, je suis sous anxiolytiques depuis la mort de mon père. Je ne voyais aucune solution pour m’en sortir. »Pourquoi, alors, avoir témoigné ? « J’étais trop impliqué pour reculer, on a fait en sorte que les suspects me voient ! J’ai même été confronté à eux dans le cabinet

du juge alors qu’on ne m’avait pas prévenu ! »Aujourd’hui menacé, contraint de se terrer quelque part en France, Christopher Bénard rumine. « J’en suis à plus de 10 000 euros de frais depuis que je dors de ville en ville, je multiplie les crises d’angoisse. Je ne sais plus quoi faire. Je ne peux plus rester en France. » Mais que fait la police ? ✹

xavier monnier et gari john

Villiers-le-Bel, l’élysée coache le témoin

encouragé par l’Élysée, christophe Bénard témoigne à visage découvert à l’audience. il fut bien seul.

Quand la France a peur (et aime se faire peur) :http://minu.me/2mpb

www.bakchich.info

le 25 novembre 2007, deux adolescents, moushin et lakamy, sont fauchés et tués par une voiture de police. le jour même, des habitants manifestent contre cette injustice. la manif tourne court. le soir et toute la nuit, une centaine de policiers se font canarder par des dizaines de jeunes, à balles parfois réelles. en retour, les jeunes sont matraqués par les forces de l’ordre. on dénombre des blessés graves… des deux côtés. match nul ? Pas vraiment.cinq jeunes (de 23 à 30 ans) ont comparu, du 21 juin au 4 juillet dernier, devant la cour d’assises de Pontoise. ils sont jugés pour « tentative de meurtre » en bande organisée sur des fonctionnaires de police et pour « complicité » des mêmes faits. le parquet réclamait vingt ans de cabane. À la barre, les témoignages fumeux se succèdent. sous x ou aussi spontanés que celui de christopher Bénard, que Bakchich a retrouvé (lire ci-contre). Parmi les quatre témoins anonymes cités à comparaître, deux se désisteront. au final, le dossier d’accusation, seulement fondé sur des dénonciations, est très mince. un témoignage anonyme ne permet pas à lui seul une condamnation. et ce procès ne doit pas être « celui de la banlieue », a insisté l’un des avocats généraux et procureur de Pontoise, marie-thérèse de givry.dans la nuit du 3 au 4 juillet, aucun incendie à villiers-le-Bel. ni heurts. mais un verdict lourd comme la pierre. les peines au kärcher s’étalent de trois à quinze ans pour quatre des cinq prévenus. Ferme. sans preuves ✹ anaëlle verzaux

Un drame et une parodie de procès

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Dix ans de règne, ça se fête. Pour marquer le coup, en avril 2009, Abdelaziz Bouteflika entame un troisième mandat présidentiel. Il modifie, au passage, la Constitution et procède à l’émasculation du pays. Une longue transformation en un Absurdistan

où tout n’est que luxe, calme et avidité. L’Algérie pointe aujourd’hui à la 111e place (sur 180) des pays les plus cor-rompus, selon l’ONG Transparency.Frustré de ne pas avoir accédé au pou-voir dès 1979, quand il s’estimait à même de succéder à Houari Boumédiène, Boutef ’ savoure sa revanche. Contre ces autres généraux d’Alger, putschistes post-coloniaux qui tiennent encore une partie du pouvoir. Contre les Algériens, ce peuple qu’il n’a jamais respecté et qui fuit le pays (lire « les Harragas »). Contre les milieux d’affaires, qu’il a confisqués au profit de ses proches. Même malade, même acculé, ce « civil à l’âme militaire » continue à vouloir tout diriger dans un pays qui ne cesse de reculer. À dessein.

Comme les contre-révolutionnaires qui résumèrent leur programme à une date, 1788, Bouteflika veut revenir à 1988. Avant le soulèvement d’octobre qui brisa l’hégé-monie du parti unique, le FLN, et du parti d’État. Avant que le peuple essaie de se réapproprier le pays, que le pou-voir soit partagé et la liberté de la presse consacrée.Un réquisitoire implacable, Notre ami Bouteflika, de l’État rêvé à l’État scélérat, taillade ce constat. Un ouvrage placé

sous la férule de Mohamed Benchicou, journaliste fort énervé : deux ans de prison, ça agace. Surtout quand le falla-cieux prétexte d’« infraction régissant le contrôle des changes et les mouvements des capitaux » sanctionne la sortie d’un précédent brûlot contre Boutef ’, Une

imposture algérienne (2004). Ceci explique en partie pour-quoi les généraux sont plutôt épargnés par Benchicou (les ennemis de mon ennemi sont mes amis…). Une coquille pas suffisante pour que Bakchich ne consacre un dossier à Notre ami Bouteflika ✹

xavier monnier

6 Bakchich heBdo n°32 | du samedi 10 au vendredi 16 juillet 2010

bonnes feuilles L’ouvrage collectif Notre ami Bouteflika, de l’État rêvé à l’État scélérat, écrit sous la direction du journaliste Mohamed Benchicou, emprisonné pendant deux ans, décrit une Algérie en pleine régression. Où Bouteflika, après plus de dix ans de règne, contrôle tout. Extraits.

frustré de ne pas avoir accédé au pouvoir en 1979, boutef’ savoure sa revanche.

P orté au pouvoir par les militaires en 1999, Bouteflika va

devoir se maintenir malgré eux. Une lutte sourde et profonde qui marque ses dix ans de règne.Aux généraux, il incarnait le par-fait subterfuge pour afficher la « détermination » des militaires à passer le pouvoir aux civils ; se « retirer » de la politique sans s’en retirer. Qui mieux, en effet, que ce Bouteflika, merveilleu-sement bicéphale, civil avec de parfaits états de service d’auxi-liaire militaire, pouvait le mieux

convenir aux généraux pour assurer un faux retrait de la politique ?Il a toujours été l’homme-lige auquel les chefs militaires ont

fréquemment dû avoir recours pour concevoir, puis mener des

putschs, qu’ils soient directs ou maquillés. À deux reprises au moins, en 1962 comme en 1965, quand il fallut arracher au clan le pouvoir par les chars de Bou-mediène, à chaque fois que le sang algérien a coulé, Abdelaziz Bouteflika a tenu un rôle décisif au service des chefs militaires putschistes.

marchand de parolesIls savaient que ce nouveau pré-sident, Bouteflika, alors jeune capitaine, avait orchestré, en décembre 1961, pour le compte de l’état-major général de l’ALN

dirigé par le colonel Houari Boumediène, le putsch contre

le gouvernement légitime, le gouvernement provisoire de Benyoucef Benkhedda

auquel les chefs de l’armée n’entendaient pas céder le

pouvoir. Et ce sera lui qui fomen-tera le renversement de Ben Bella

au profit du colonel Boumediène en 1965. (…)Un militaire civil d’apparence, un civil à l’âme militaire. Un « faux civil » qui disposait du seul pouvoir qu’ils n’avaient pas : le pouvoir des mots. Profil parfait pour l’avocat dont la hiérarchie militaire, accusée de tous les crimes de la terre en cette année 1998, avait un pressant besoin : il avait le talent de communicateur pour plaider leur cause sans être tenté de les trahir en raison, jus-tement, de cette relation intime qui en faisait un « filleul de l’armée » (…) Un marchand de paroles ? Un tartarin ? Et après ? C’est même pour cette insigne qualité qu’il a été choisi par les chefs mili-taires. « Il sait dribbler », aurait dit le général Médiène au docteur Youcef Khatib, candidat à la pré-sidentielle de 1999. (…)

Mais les généraux se sont trompés dans leur choix. Et, très vite, vient le temps des brouilles entre les deux pôles du pouvoir, qui agitent encore le pays…Elles sont exclusivement dues à la tenace volonté du président algé-rien de s’octroyer par la force un pouvoir absolu. (…) Les généraux qui pensaient avoir installé Tal-leyrand découvrent Brutus.«Il n’a jamais caché son intention de doubler les généraux et de se venger d’eux, et je m’étonne qu’ils s’en étonnent, soutient Sid-Ahmed Ghozali. Quand j’étais chef de gouvernement sous Boudiaf, il est venu me voir spécialement pour me dire textuellement : “Je te croyais plus malin que ça. Tu aurais pu profiter de l’occasion historique pour les culbuter. Ce ne sont que des nullards…” » ✹

l’erreur de casting des généraux

avec bouteflika,Pour vivre heureux, vivons cachés. et, si possible, planquons ce grisbi que de vilaines onG ne sauraient voir. l’algérie de Bouteflika a sa recette pour éloigner les malandrins qui veulent fouiller sa rente pétrolière. ne pas leur accorder de droit d’entrée. ainsi, comme le décrivent les auteurs du livre, tim Bittiger, « conseiller politique au sein du nouveau secrétariat international de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (EITI) », s’est vu refuser, en 2008, son visa par l’ambassade d’algérie en allemagne. une simple rebelote après 2006. le président de transparency interna-tional, mark Pyman, n’avait pu honorer l’invitation de l’association algérienne de lutte contre la corruption (aacc) à se rendre à son colloque annuel sur la corruption dans les secteurs de la défense et de l’armement.seuls quelques malins réussissent à passer entre les mailles du filet. en 2005, les experts français avaient pu assister à la conférence de l’aacc sur les marchés publics. « Les investigations de l’association sur ces refus répétés de visas aboutirent à la “police politique” du ministère de l’Intérieur »… Étonnant ✹ x. m.

Corruption sans visa

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Boutef’, l’apprenti dictateur : http://minu.me/2mpl

L e phénomène des harragas, ces jeunes qui, au mépris de leur vie, tentent de rejoindre les côtes espagnoles et italiennes sur des zodiacs, a commencé au Maroc

avant de gagner l’Algérie, au grand dam de nos gouver-nants. Selon une étude réalisée par Hocine Lebdelaoui, professeur à l’université d’Alger, les gardes-côtes algé-riens intercepteront, entre 2005 et 2008, 4 255 émigrants clandestins. Et ce, sans compter ceux qui l’ont été par les marines espagnole et italienne. Selon cette étude, sur la même période, ont été recensés 232 morts côté algérien et 99 disparus. (…)

noyadeHocine Lebdelaoui note que 91 % des harragas ont moins de 35 ans, que 89 % d’entre eux sont célibataires, que 78 % sont des chômeurs et que, majoritairement, ils sont tous instruits. Enfin, que 70 % d’entre eux connaissaient les risques – mort par noyade – encourus avant de prendre la mer. En dépit des mesures prises – renforcement de la sur-veillance et peines de prison –, l’immigration clandestine ne s’est pas tarie. On raconte que l’arrivée d’un harraga en Sicile ou en Espagne est saluée par des youyous dans les quartiers populaires d’Annaba et d’Oran, c’est dire ![Les Autorités] se sont trouvé soudain désarmées devant ce qui n’est que la partie visible de l’échec de leur poli-tique. Alors, elles font mine de ne pas comprendre ce qui

se passe. (…) Et, faute de solution alternative sur fond de désengagement social de l’État, le gouvernement a choisi de criminaliser ce phénomène pour tenter de l’endiguer. En fait, le harraga n’est que l’expression d’une des formes de défiance sociale envers l’État.Et que dire de cette autre forme de défiance sociale généra-lisée que sont ces émeutes qui secouent le pays à l’est, au centre, à l’ouest et au sud ? (…) [Elles] illustrent la défer-lante protestataire qui a soufflé sur le pays en 2009 et au début de 2010. Elle est symptomatique de la dégradation d’une situation sociale que le régime n’est pas parvenu à endiguer. « Les émeutes sont l’œuvre rageuse d’une jeunesse désemparée, lourdement frappée par le chômage, l’exclusion et le désespoir », analyse le sociologue Mohamed Hache-maoui. (…) Plus de 20 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. Qui plus est, le salaire moyen de 20 000 dinars (200 euros) ne permet de tenir qu’une semaine dans un pays où l’inflation a atteint les 6 % à la fin 2009 ! ✹

du samedi 10 au vendredi 16 juillet 2010 | Bakchich heBdo n°32 7

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C orruption, lutte de pouvoir avec les généraux, prévari-cation… Les soubresauts du

joyau national algérien conden-sent les errements du magistère de Bouteflika.Le nerf de la guerre du mandat à vie, comme celui de toutes les guerres, reste l’argent. Et l’ar-gent, c’est Sonatrach, la tirelire du pays, principale source de revenus en devises, la plus grande entreprise algérienne, 120 000 salariés, douzième compagnie au monde avec un chiffre d’af-faires de 80,8 milliards de dollars en 2008, un monopole public qui gère les hydrocarbures et le gaz dans le pays. Sonatrach est, pour les Algériens, le bijou de famille. (…)

poule aux œufs d’orDès son arrivée au pouvoir en 1999, Abdelaziz Bouteflika s’em-pressa de désigner une de ses plus proches relations, Chekib Khelil, à la tête du ministère de l’Énergie, avec pour principale mission de contrôler Sonatrach et de la soustraire aux regards extérieurs. (…) Chargé de la mission de contrôler Sonatrach et de la soustraire aux regards extérieurs, le tout nouveau ministre va immédia-tement entourer de barbelés la poule aux œufs d’or : il ne lais-sera personne s’en approcher. Dans un premier temps, il la coif-fera lui-même, cumulant grossiè-rement sa haute fonction au sein du gouvernement avec celle de directeur général de Sonatrach. (…) Et Sonatrach sera livrée à la prédation. Le Matin en avait

révélé quelques-unes, sans doute parmi les moins scandaleuses, à commencer par le détourne-ment des fonds de sponsoring de la société, un pactole estimé à 730 millions de dollars, destiné à financer des associations de toutes sortes (…). Le magot était confié au fameux Hemche, natif de Hennaya, près de Tlemcen, une bourgade qui élit aux meilleurs destins. C’est le village natal du père de Bouteflika. Hemche était l’homme de confiance du clan présidentiel et sut judi-cieusement répartir l’enveloppe entre les associations qui s’enga-geaient à soutenir la candidature de Bouteflika pour un second mandat. (…) II suffit d’observer le fonctionne-ment de Sonatrach pour relever l’absence totale de contrôle a priori et a posteriori sur les importations en équipements et services pour le seul secteur de l’énergie, estimées à près de 10 milliards de dollars par an ces quatre dernières années. (…) Des investissements de 1,2 mil-liard d’euros ont été engagés à l’étranger sans information adéquate des organes sociaux de Sonatrach et encore moins du Conseil national de l’énergie, en veilleuse depuis dix ans.

scandales répétésSonatrach s’est aussi distin-guée ces dernières années par la signature de plusieurs centaines de contrats de gré à gré dépas-sant les 100 millions de dollars dans plusieurs cas. Le gré à gré, forme de transaction réservée par nature aux situations d’ur-

gence, est devenu courant dans le secteur de l’énergie. (…)En janvier 2010, une enquête du DRS [Département  de  ren-seignement  et  de  sécurité,  ndlr] met Sonatrach au cœur du plus gros scandale de corruption qu’ait connu l’Algérie. Son PDG, Mohamed Meziane (60 ans), et dix cadres dirigeants, dont trois vice-présidents, ont été inculpés par la justice pour diverses affaires pré-sumées de corruption. (…) Tous accusent le ministre de l’Énergie, proche du président Bouteflika. « Contrairement  à  ce  qui  a  été beaucoup écrit ces derniers jours, M. Abdelaziz Bouteflika n’a pas décapité l’état-major de la Sona-trach pour lutter contre la corrup-tion. C’est en réalité une initiative des services de sécurité militaire, avec qui le Président est en lutte ouverte depuis des mois », écrit le Monde diplomatique. Cela devait arriver : le contrôle de la rente pétrolière, au sein même de la kleptocratie au pouvoir, dégénère en lutte de gangs. (…)

guerre ouverteChekib Khelil lâche le mot de trop et confirme. Acculé par les journalistes au sortir de la séance de clôture des travaux du Parlement, il n’a pas trouvé mieux que de parler d’« attaque contre le clan présidentiel », dont il s’autoproclame partie prenante. Un ministre de la République qui reconnaît publiquement l’exis-tence de clans au sein du pouvoir ! La guerre est visible à l’œil nu.

Nouveau rebondissement, en février. Un colonel, Ali Tounsi,

proche de Tewfik Mediene, le patron du DRS, est assassiné. Par un soi-disant fou. Mais les mili-taires soupçonnent Bouteflika d’avoir organisé le meurtre. Et le DRS de relancer l’enquête sur les détournements à la Sonatrach.Le nom du ministre du Pétrole et des Mines, Chakib Khelil, est cité à plusieurs reprises. Ceci tendrait à prouver que le gentle-man’s agreement conclu entre le

clan présidentiel et le dirigeant du renseignement militaire algé-rien serait déjà brisé. (…) Mai 2010. Rebondissement dans l’affaire Sonatrach : le DRS entame une enquête au sujet des sommes faramineuses débour-sées dans le cadre de l’organisa-tion de la 16e conférence interna-tionale du gaz naturel liquéfié qu’a abritée la ville d’Oran en avril dernier ✹

sonatrach confisquée par le clan boutef’

ces harragas qui fuient le pays de désespoir

l’algérie jaune

Notre ami Bouteflika, sous la direction de Mohamed Benchicou,riveneuve éditions, 301 pages, 20 euros.

Page 8: Bakchich N°32

Jean-François Probst vous stimule ? Dégustez ses chroniques Web :http://minu.me/1vbh

www.bakchich.info

Lagarde succède à SéguinLa ministre de l’Économie, Christine Lagarde, va cumuler. Elle vient d’être élue présidente du conseil d’adminis-tration de Sciences-Po Aix. Elle-même diplômée de Sciences-Po, elle succède ainsi à Philippe Séguin, décédé en jan-vier, à la tête de cet organe qui fixe les orientations stratégiques et adopte le budget de l’établissement.

Copé veut la régionSur la route de l’Élysée, où il entend bien être candidat lors de la présidentielle de 2017, Jean-François Copé a choisi une rampe de lancement : ce seront les élections régionales de mars 2014 (avec les nouveaux conseillers territoriaux). Les amis de Copé, maire de Meaux, député de Seine-et-Marne et président du groupe UMP à l’Assemblée, prépa-rent déjà la campagne d’Ile-de-France, région présidée par la gauche et Jean-Paul Huchon depuis 1998.

Jack tire la Lang« Accusés de  faire  le  jeu de  l’extrême droite » par Baroin, le 6 juillet, dans l’af-faire Woerth-Bettencourt, les députés socialistes ont quitté l’hémicycle, sauf un, Jack Lang. Hors champ des caméras, c’est pourtant l’inverse qui se produit. Il est le premier à déserter les réunions de groupe PS depuis trois ans et figure, dans le classement des députés les plus actifs, à la 553e place sur 575.

Borloo et le lapsus

Très beau lapsus du premier- ministrable Jean-Louis Borloo, lundi der-nier, lors d’une conférence de presse. En désignant, au premier rang, Augustin de Romanet, le patron de la Caisse des dépôts, le ministre de l’Écologie l’a appelé « Augustin de Bonrepeaux », confondant ce chiraquien avec l’ex-député socialiste d’Ariège Augustin Bonrepeaux. Terriblement injuste ! Car Romanet était parfaitement éveillé et ne roupillait pas le moins du monde devant Borloo.

Chaises musicales à LevalloisEn vue des élections cantonales de 2011, Isabelle Balkany va quitter la circonscription de Clichy-Levallois pour Levallois centre. Elle prendra la place de l’actuelle conseillère générale Danièle Dussaussois, à qui Nicolas Sarkozy a déjà trouvé un lieu de chute pour compenser la perte de ses revenus : le Conseil économique et social. Les bons comptes font les bons amis ✹

confidencesPIRE qUE LES vUvUzELAS

Excepté avec Mitterrand, les Bettencourt ont toujours navigué à droite.

BEttEnCourt, à droitE toutE

«Q uand il faut avaler des couleuvres, eh bien, je les avale ! » C’était à l’automne 1981, au

temps de François Mitterrand. Qui parle ? André Bettencourt, alors sénateur UDF de Seine-Maritime. Et c’est l’IGF (l’impôt sur les grandes fortunes), instauré par une gauche triomphante, que digère mal le mari de la femme la plus riche de France. « Une catas-trophe », ose-t-il même devant son ami de jeunesse, tout nouveau président de la République. Mais pas d’amitié qui tienne, Mit-terrand refuse de renoncer à l’un de ses enga-gements de cam-pagne. L’homme de droite, tel que se revendiquait Bettencourt, fera donc avec, et vendra une bonne partie des titres de L’Oréal pour s’acquitter de l’IGF. Tout en restant fidèle à son ami socialiste, l’un des rares dans l’entourage de Liliane et d’André Bettencourt.Car c’est à droite que le couple noue ses amitiés, même si, au commencement de sa carrière politique, André Bettencourt fait un petit détour par le cabinet de Pierre Mendès-France, avant de devenir ministre du général de Gaulle, puis de Georges Pompidou jusqu’en 1973. « S’il en est un avec lequel mon entente fut plus évidente et envers lequel ma reconnaissance demeure fervente, c’est bien le président Pompidou », déclarait André Bettencourt lors de son discours d’investiture à l’Institut

de France, en novembre 1988, en présence de Claude Pompidou. La veuve de l’ancien Président, elle, rappelait souvent la sollicitude de Liliane Bettencourt : « Lorsque mon mari a disparu, c’est la seule, confiait-elle, à m’avoir demandé si mon fils et moi avions besoin de quelque chose, et elle nous a prêté sa maison de l’Arcouest. »Les Giscard d’Estaing comptaient également parmi les relations pro-ches du couple. André était même inscrit au parti de VGE, les Répu-blicains indépendants. Étiquette

sous laquelle il siégera pendant près de vingt ans au Sénat. V G E a v a i t même tenté de le convaincre de

racheter le Figaro. En vain.Riches et de droite, les Bettencourt ne pouvaient donc que poursuivre leur connivence avec le pouvoir en s’intéressant aux nouvelles générations, jusqu’à les financer. Habitant Neuilly, ils ont tout de suite été sensibles au dynamisme du jeune maire qui, en 1983, à la barbe du vieux brisquard Pasqua, venait de s’emparer de la ville la plus riche de France. C’est donc tout naturellement que Sarkozy obtint ses entrées chez les Bet-tencourt, comme le raconte leur ex-comptable, Claire Thibout : « Nicolas Sarkozy recevait aussi son enveloppe. ça se passait dans l’un des petits salons, générale-ment après le repas. Tout le monde le savait dans la maison. » Sauf le fisc et la justice ✹� FLoRENCE MURACCIoLE

AMITIÉS

la balle au centre pour 2012Avec les centristes, comme de Gaulle autrefois, Sarkozy ne connaît que des contrariétés. Au Sénat, l’UMP n’a pas de majorité sans eux. À l¹Assemblée, ils sont de plus en plus bougons, et, pour couronner le tout, leurs leaders sont démangés par l’élection présidentielle. Le président du Nouveau centre, Hervé Morin, est bien décidé à aller au bout de sa candidature en 2012. Il l’a dit à Sarkozy, en mai, lors d’une rencontre houleuse : pour pouvoir faire campagne, il quittera le gouvernement lors du prochain remaniement. Au sein du Nouveau centre, certains (comme Maurice Leroy) pré-féreraient une candidature de Jean-Louis Borloo, plus apprécié par l’opinion et davantage susceptible d’aller chercher, au premier tour, chez les jeunes et les écolos, les 8 ou 10 % qui permettraient à Sarkozy de l’emporter au second.Au Sénat, il se murmure que même Jean Arthuis serait tenté par l’aven-ture présidentielle. Sarkozy, lui, ne veut pas en entendre parler. Pas fou, il sait bien qu’il lui faudra une réserve de voix. Et son candidat centriste, il l’a choisi : ce sera François Bayrou (18,6 % en 2007), à condition que, cette fois, le président du Modem se prononce pour le Président sortant entre les deux tours. D’où le rapprochement sensible entre les deux hommes ces derniers temps. Moyennant Matignon pour Bayrou si Sarkozy est réélu ? on n’en est pas encore là ✹ A.S.

8 BAkCHICH HEBDo N°32 | DU SAMEDI 10 AU vENDREDI 16 JUILLET 2010

Filouteries

Sarko Ier ferait mieux de kar-cheriser ses sauvageonnes de l’UMP. Dati, boursouflée d’orgueil dans l’émission de David Abiker, et Morano, aussi convaincante qu’une vendeuse de poissons de Clermont-Ferrand, les baronnes du pouvoir mettent le feu au Château. Et aucun pompier pour éteindre les révélations sur l’af-faire Banier-Bettencourt-Woerth-de Maistre. En attendant les nou-veaux figurants d’un vaudeville à plusieurs milliards d’euros. Les places vont s’arracher !

Ce qu’éructent les politiques me laisse pantois. Si la seule défense de la droite consiste à cracher sur la presse, la salive va vite lui manquer. « Journaux des années 30 », ose même le motard de l’Industrie Estrosi, pour frapper du joug de l’infamie les révélations de Mediapart. Fort subtil, quand la famille de dame Liliane finançait la Cagoule.

Confrères nous étions, col-lègues nous devenons, sur le banc des accusés de populisme, voire de racisme. Du temps où Philippe Val, si droit directeur de France Inter, nous comparait à Je suis partout. Chansonnier devenu transistor sarkozyste, Val n’est pas un dingue de l’écrit… Ce qui importe, ce sont les informations, les révélations. La presse ne crée ni la corruption, ni la débandade,

ni la montée des extrêmes. L’in-curie gouvernementale, si ! Et la chienlit, soixante-dix ans après le 18 Juin, prend le dessus. L’Élysée nomme les patrons de presse, vire les humoristes et rembourse Lady Gaga Bettencourt de 30 millions d’euros ? Pas étonnant que la France fasse une grossesse ner-veuse.

Solution, la dissolution ! Même Mitterrand ou Pompidou savaient renvoyer les députés à leurs chers électeurs. « Oui, mais le FN monte, la gauche risque de prendre le pouvoir », couine la majorité. Mieux vaut la cohabitation que le capharnaüm du pouvoir.

Dans ce joyeux bazar, un peu d’air frais, en forme de soufflet, administré par l’ancien ambas-sadeur Ruffin au Quai d’Orsay, dans une interview au Monde. Expulsé de Dakar avec l’accord de Sarko Ier, Son ex-Excellence ne mâche pas ses mots… Les Affaires étrangères, « ministère sinistré », Kouchner réduit à un rôle de patron d’ONG… Vivement la curée !�✹

Jean-François Probst, ex-conseiller de Jacques Chirac, de Charles Pasqua ou de Jean Tiberi, commente l’actualité.

L’HUMEUR DE PRoBST

LE JoLI BAzAR DU DÉBUT D’ÉTÉ

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du samedi 10 au vendredi 16 juillet 2010 | Bakchich heBdo n°32 9

Bazar

afrique du sud Le dessinateur de presse sud-africain Zapiro est une star dans son pays et au-delà. Il doit sa notoriété à son trait affûté, toujours prompt à critiquer les puissants. Sa victime préférée : le président Jacob Zuma. Et, dernièrement, la Fifa. Entretien.

Se p t c e n t m i l l e l iv r e s s t e rl i n g réclamées (environ 843 000 euros), après un procès à 2 mil-lions de dollars

perdu. Entre le président sud- africain Jacob Zuma et le cari-caturiste star d’Afrique du Sud (et de la presse anglophone en général) Jonathan Shapiro – alias Zapiro –, le désamour se chiffre à plusieurs zéros. En 2006, accusé de viol sur une séropositive (puis blanchi), Zuma se voit mécham-ment croqué par Zapiro. Deux ans plus tard, quand le futur Président passe au travers des gouttes judiciaires, le cartoonist récidive. Et dépeint Zuma sur le point de violer une justice tenue par l’ANC, sa ligue de jeunesse et son syndicat affilié ! Procès. En sorcellerie aussi. Insuffisant pour casser le crayon de Zapiro, 52 ans au compteur, militant anti-apar-theid (il fut enfermé pendant 11 jours) puis adhérent de l’ANC.Un trait toujours aussi affûté et critique que se disputent tous les quotidiens nationaux. Envers le gouvernement, l’opposition ou la Fifa, qui a régenté son pays pen-dant un mois.

Vous avez éreinté les présidents Thabo Mbeki et Jacob Zuma, mais seul ce dernier vous fait un procès. Manquerait-il de sens de l’humour ?(Hésitation) Il y a quelque chose de très étrange chez Jacob Zuma. En tant qu’homme, je pense qu’il a le sens de l’humour. Je l’ai vu rire avec des gens, faire des bla-gues… Il est considéré comme quelqu’un de très sociable, beau-coup plus sociable que Thabo Mbeki par exemple. Mbeki était très susceptible face à la critique, mais il gérait ses relations avec la presse d’une manière plus sub-

tile. Zuma, lui, a fait des procès à beaucoup de journalistes. Il ne pouvait pas réagir de façon plus stupide : ce n’est pas le meilleur moyen de calmer le jeu avec la presse.Votre procès représente-t-il une menace pour la liberté de la presse ?Nous avons une presse écrite très libre. Mais il y a des signaux d’alarme depuis deux ans. Et ces alertes viennent directement du chef de l’État. Que le Président d’une démocratie poursuive un dessinateur et des journalistes est une mauvaise chose. Il pou-vait le faire avant d’arriver à la tête du pays, mais il aurait dû abandonner les poursuites en accédant à ses fonctions. Jay-Z [surnom de Zuma, ndlr] est devenu la personne qui doit promouvoir la Constitution, la liberté d’expression et permettre aux journalistes de faire leur tra-vail correctement.Parlons maintenant de football ! Alors, cette Coupe du monde ?Je suis tiraillé entre la fantas-tique excitation d’accueillir un tel événement, ici, en Afrique du Sud, et le fait de voir débarquer la Fifa. Ce sont des abrutis ! La Fifa est une mafia. Elle contrôle tout, nous avons tout abandonné pour elle. La Fifa a colonisé le pays, se permet de nous dire ce qu’il faut faire, quels vêtements il faut porter, ce qu’il faut boire, comment nous devons nous comporter, ce que nous pouvons vendre aux abords des stades. Surtout, la Fifa avait fait des pro-messes pour le développement des communautés locales, des promesses qu’elle n’a pas tenues. Elle a fait construire des stades, et c’est tout. Et l’on connaît tous ses problèmes de corruption.Comment expliquer qu’une nation comme l’Afrique du Sud et qu’un

parti comme l’ANC, qui se sont tant battus, acceptent les diktats de la Fifa ?Quand la Fifa est venue en Afrique du Sud, au début des années 2000, nous tentions d’obtenir l’organi-sation de la Coupe du monde. Tout le monde, des structures locales au gouvernement, voulait que la Fifa nous aime, nous dise : « Vous pouvez le faire, vous êtes un super pays ! » On aurait fait n’importe quoi pour accueillir la compéti-tion. Par exemple, au Cap, nous avons construit un stade juste en face de Table Mountain, à un endroit où nous n’en avions absolument pas besoin. Et pour-quoi ça ? Parce que Sepp Blatter [le président de la Fifa, ndlr] est monté dans son hélicoptère et a décrété : « Je veux mon stade ici ! » Et, au final, les politiciens, même si certains n’étaient pas d’accord au départ, se sont tous inclinés. Alors, certes, c’est un beau stade, mais il aurait certainement dû être construit ailleurs.Et que pensez-vous des tribunaux spéciaux mis en place le temps de la compétition ? Trois ans de prison pour un vol de portable…(Consterné) Pour moi, c’est la chose la plus incroyable de cette Coupe du monde. Il y a des gens libres qui marchent dans les rues alors qu’ils ont commis des actes terribles : des politiciens, des businessmen qui ont volé

tous nos articles sur la Fifa, la seule et unique championne du monde : http://minu.me/21dq

www.bakchich.info

il n’aura pas fallu longtemps pour que le railleur esprit sud-africain supplée la latence du pouvoir envers la Fifa. agacé, voire révolté par les méthodes du grand prêtre du foot, un artiste vivant au cap a dégainé un tee-shirt au slogan évocateur : « Fick Fufa ».Popularisée par le Mail and Guardian, la formule prospère depuis plus d’un mois sur les forums internet, dans la rue ou dans les échoppes. Prudent, l’artiste qui en est à l’origine a pris soin de demander l’anonymat aux nombreux journalistes qui l’ont ren-contré. sait-on jamais, la Fédération internationale, fort susceptible dès lors qu’on utilise son slogan, pour-rait lui chercher querelle. comme elle l’a déjà fait à la marque de bière Bavaria, à de nombreux bars qui affichaient un ballon ressem-blant vaguement au ballon officiel sur leurs vitrines, au site voyagiste kulula, ou au site satirique hayibo, qui ont osé se moquer d’elle. voire, sacrilège, détourné ses slogans. même le monde politique com-mence à s’agacer de l’arrogance de la Fifa. toujours selon le Mail and Guardian, la patronne de la pro-vince du cap, helene Zille, a confié que « la  Fifa  aurait  voulu  que  je m’agenouille devant ses demandes, mais ce n’est pas une puissance colo-niale ». Pas si sûr ✹ X.m.

« Fick Fufa » partoutdes millions… Et, pourtant, on condamne des petites gens pour l’exemple. C’est comme ça que fonctionne la Fifa. Je trouve que c’est incroyable qu’elle ait pu nous imposer ça si vite. Cela res-semble à des tribunaux spéciaux de la pire espèce. C’est révélateur de la mentalité de la Fédération : elle s’attaque à des gens insigni-fiants qu’elle peut facilement atteindre au lieu de s’occuper des véritables problèmes. C’est la même chose avec la ges-tion de l’ambush marketing [litté-ralement « marketing en embus-cade », technique utilisée par une marque ou une entreprise pour être visible lors d’un événement sans payer le moindre centime, ndlr]. La Fifa s’occupe seule-ment des petites fraudes. Prenez l’exemple de Nike, qui fait de l’am-bush marketing en permanence : la Fifa ne dit rien car elle sait qu’ils ont plus d’argent qu’elle. C’est typique de cette organisa-tion, à laquelle le gouvernement a tout cédé pour organiser cette Coupe du monde ✹ recueilli Par X.m. avec élodie Bui

« La FIFA est une MAFIA »

a « N’oubliez pas, les gars, il n’y a rien de tel que de jouer à domicile ! »

a De g. à dr. : « L’Empire romain », « L’empire de Gengis Khan », « L’Empire britannique », Sepp Blatter (patron de la Fifa) : « Amateurs ! » Sur la feuille : « 2010. Médias muselés, contrôle de la marque, courbettes protocolaires. » 

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10 Bakchich heBdo N°32 | du samedi 10 au veNdredi 16 juillet 2010

maroc Notre dessinateur Khalid Gueddar nous fait entrer au royaume de Mohammed VI par la porte nord du pays. Autrefois ville de poètes, de peintres et de hippies, Tanger se modernise à tout-va. Avec un horizon, derrière les barbelés, l’Europe…

escale tangéroise

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du samedi 10 au vendredi 16 juillet 2010 | Bakchich heBdo n°32 11

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12 Bakchich heBdo N°32 | du samedi 10 au veNdredi 16 juillet 2010

Bazar

eNseigNemeNt

du favoritisme ordinaire

L e monde de la recherche cache bien des abus. Comme au musée du quai Branly, où

les affaires se font, comme il se doit, en famille et entre amis.Philippe Descola a un joli CV de directeur du laboratoire d’an-thropologie sociale et de titulaire de la chaire d’anthropologie de la nature au Collège de France. Il est également proche de la ministre de la Recherche, Valérie Pécresse, de qui il a accepté quelques res-ponsabilités honorifiques. Une belle carrière auréolée d’une Légion d’hon-neur…En ces temps où dégoter une bourse d’études post-doctorales est une épreuve ardue, certains étudiants de Descola profitent de ses effi-caces recommandations. Il faut dire que les règles pour obtenir ce type de bourses sont des plus rigoureuses : pour l’année 2009-2010, le postulant « doit impérati-vement soutenir sa thèse avant la fin de l’année 2009. Aucun report ne  sera  accepté », martèle le mémorandum du Quai-Branly. Et pour cause : le précieux viatique est à la hauteur de la rigueur de l’« examen » : 20 040 euros !

Un étudiant bien aimé de Philippe Descola a pourtant eu la chance de remporter la mise avant même d’avoir soutenu sa thèse. Hélas pour ses camarades, tous n’ont pas connu le même bonheur : 38 ont été éconduits. Et parmi les cinq heureux boursiers, quatre étaient déjà docteurs… Cherchez l’erreur !Le secret de M. Descola ? Son épouse, peut-être. Anne-Christine Taylor dirige le département de la recherche et de l’enseignement du musée du quai Branly. Et siège

au comité d’éva-luation scienti-fique, ce qui lui confère le droit de se prononcer, avec dix autres personnes, sur

l’attribution des bourses post-doctorales. Une chance inespérée pour au moins un étudiant…Pendant que madame dirige, monsieur organise – en tant que commissaire – la troisième grande exposition d’anthropo-logie au musée du quai Branly. Une coïncidence, sans aucun doute, à moins qu’il ne s’agisse tout simplement d’une autre pré-rogative du plus puissant anthro-pologue de France ✹� kalila wa dimNa et a. v.

bruits de la ville

eh, thierry, t’as pas l’heure ?À peine rentré d’Afrique du Sud, le 23 juin, Thierry Henry était reçu à l’Élysée. L’attaquant tricolore en a profité pour faire un tour dans le quartier. Plus précisément chez Cartier, où son célèbre poignet s’est alourdi d’une Rolex à 20 000 euros. Au moins sera-t-il à l’heure aux entraînements.

faites entrer le chansonnierTout à sa passion nouvelle pour la chanson, Christophe Hondelatte avait annoncé, en février dernier, au micro d’Europe 1 (dans le Grand Direct des médias), qu’il pensait arrêter son (excellente) émission Faites entrer l’accusé. Finalement, Christophe songe à remettre le couvert à la rentrée. Son programme à succès lui assure de 200 000 à 250 000 euros par an de revenus. Pas sûr que ses futurs cachets de chanteur atteignent ces sommets… De la dure vie d’intermittent.

Joute de belles pour achouiEn attendant son procès en appel pour complicité dans l’évasion de Nino Ferrara, l’avocat Karim Achoui continue de parader. À grands frais et dans des joutes risquées. Le 30 juin, en plein dîner galant, la plaidoirie de Me Achoui s’est transformée en vaudeville quand une cliente du resto s’est mise à injurier sa moitié. Les débats ont viré au pugilat, à coups de talons aiguilles. Si les dames se chamaillent pour les hommes en robes… ✹

S ouvenez-vous, il y a deux mois, les apéros géants organisés via un

certain réseau social faisaient les gros titres des journaux et mettaient nos dirigeants en émoi. car si l’on peut craindre des comas éthyliques en pagaille, du vomi sur les trottoirs et des nuisances sonores à des heures indues, entre-choquer des gobelets, par ces temps de scandales politico-financiers où l’on serre les ceintures, où l’on écourte les retraites, permet aussi de discuter, de se solidariser, en trois mots : organiser la résistance. c’est ainsi que, dans un élan

républicain, notre ministre de l’intérieur a été dépêché pour déconseiller, pour interdire au besoin, ces manifestations qui menacent de tenir plus de la tradi-

tion révolutionnaire que de la beuverie organisée.c’était sans compter une

bande de « désobéissants », qui a appelé à participer, toujours via le même réseau social, au dernier apéro géant autorisé, en haut lieu, le 14 juillet, dans les jardins de l’Élysée. les impudents promettaient néanmoins à sarko ier

de s’essuyer les pieds avant d’entrer et de ne pas se servir de petits-fours avec

les doigts. devant l’ampleur que présa-geait cette auto-invitation d’une popu-lace désireuse de goûter les canapés au caviar payés par ses impôts, le Pré-sident a annulé la garden-party de cette année, sous prétexte qu’il faut faire des économies. Qu’à cela ne tienne, les jeunes assoiffés, résolus à prouver au chef de l’État que l’on peut boire un pot avec le peuple sans dépenser des cen-taines de milliers d’euros, maintiennent l’appel au rendez-vous sur les pelouses de l’Élysée, où ils entendent bien saluer les dictateurs des pays françafricains reçus en grande pompe ce jour-là ✹

circulez, y a rieN à Boire

Résistance

les Petites faBles d’aNgeliNa

dégoter une bourse est ardu, mais pas pour tous les étudiants-chercheurs.

D ément. sublime. les mots sont pauvres, et trop souvent lus, hélas.

dément. sublime. j’ai devant les yeux la photo d’une foule de paysans haï-tiens, chapeau de paille sur la tête et chemise rouge au torse, réunis à l’appel du mouvman Peyizan Papay (mPP). le mouvement des paysans de Papaye, en créole de l’île.combien sont-ils sur cette place de hinche, dans la région du plateau central d’haïti ? des milliers. et que veulent-ils, eux, les gueux absolus de notre planète malade ? ils ne veulent rien. ils refusent, sans discuter, sans transiger, comme on jette un crachat à qui vient de vous insulter. ils refusent, ils refusent un « don » de la trans-nationale monsanto, celle de l’« agent orange » dispersé sur le vietnam des années 60, celle de toutes les manœu-vres en coulisse, celle des ogm et des contrats léonins imposés aux paysans de la terre entière.on ne sait pas toute la vérité sur cette offrande « philanthropique ». un point semble acquis : c’est en janvier dernier, au forum mondial de davos – juste après le tremblement de terre qui a tué 250 000 personnes –, que la décision aurait été prise. le patron de monsanto, hugh grant, et son vice-président, jerry steiner, auraient eu l’idée d’une aide « désintéressée » de 475 tonnes de

semences destinées aux paysans. ogm ou non ? monsanto jure que non. le ministère haïtien de l’agriculture assure de son côté avoir bloqué un envoi de semences génétiquement modifiées. mais le sens profond de cette histoire est, de toute façon, ailleurs.les paysans si pauvres de hinche ont brûlé en place publique des semences monsanto parce qu’elles étaient des hybrides. ce qui signifie qu’elles per-dent d’une année sur l’autre une bonne part de leurs qualités. il faut donc en racheter, sans fin. Que les semences américaines aient été ogm ou non est,

dans ces conditions, secon-daire. monsanto, comme elle le fait partout où elle le peut,

a tenté, par le biais humanitaire, de s’implanter dans un pays dévasté, qui compte à ce jour 1,3 million de sans-abri solide. ceux de hinche ont simple-ment compris la loi réelle qui régit les hommes, et envoyé se faire foutre la surpuissante compagnie du Nord.cessons d’avoir peur du moindre mot. se faire foutre, oui. Notre occident, gavé d’objets matériels, ivre de technologie, sourd aux craquements de la crise éco-logique, semble désormais incapable de la moindre rupture. Nous pérorons, nous mimons des scènes 1 000 fois jouées. sarkozy, dsk, aubry, Bayrou ? ceux de hinche se battent ✹

Crachat

chaPeau de Paille et chemise rouge

Écolo façoN NicoliNo

Auteur, entre autres, d’un ouvrage sur les pesticides, Fabrice Nicolino tient un blog sans concessions sur l’environnement, Planète sans visa.

bakchichc’est aussisur internet !

informations, enquêtes et mauvais esprit

bakchich info

Page 13: Bakchich N°32

«Caroline demeu-rait cependant notre propriété privée, notre “Sam suffit”. Qu’elle nous

ait snobé n’avait pas une impor-tance excessive. Nous essaierions de l’oublier, de noyer notre cha-grin. Les couvertures de Match rouvriraient les cicatrices. À la longue, nous ne penserions plus à tout cela. Que faire ? Nous déci-dâmes d’écrire des livres. » Le nous de noblesse qu’Éric Neuhoff s’ap-plique indique le désarroi d’un jeune homme amoureux de la fille de Rainier, et bien meurtri à l’an-nonce de ses noces avec un vieil imbécile. Plutôt que de continuer à rêver d’une princesse, Neuhoff s’est mis à écrire, ce qui donne, là aussi, des sujets, mais, en plus, des lecteurs.Les éditeurs devraient s’équiper de 4x4 : ils patinent. Comme ils font du surplace, ils rééditent de vieux livres. Tant mieux, quand, en 1984, on a loupé le premier, on a ainsi droit à un deuxième essai du prince Éric : Un triomphe. Un livre qui, à propos d’Adjani, écrit ce qui va suivre mérite de faire tourner les rotatives comme des moulins à prière. Neuhoff s’adresse à Isabelle : « Scott Fitzgerald parle quelque part de votre regard bleu, mais je n’ai pas réussi à retrouver le passage. Dans Gatsby aussi, il est question de vous, de votre “voix que l’oreille suit dans ses modulations comme si chaque phrase était un arrangement de notes qui ne doit plus jamais être répété” »… Ne fichez pas les pieds dans l’existence, elle vous boufferait. » Outre Caroline de

Monac’ et Adjani, Neuhoff aime aussi les « hussards », des écri-vains garantis pleins d’humour et d’alcool, un groupe constitué en BD, en « bande désespérée », dont Nimier et Blondin sont les rieuses têtes de mort.

photo oubliéeUn triomphe parle de littérature, donc d’air du temps. L’un des petits textes dit le plus grand bien de Bernard Frank, ami de Sagan et plus discret des « hus-sards ». Auteur de sublimes criti-ques dans le Matin puis le Nouvel Observateur, cet estimable maga-zine qui s’est privé d’Angelo Rinaldi pour, sous l’autorité du petit jardinier Garcin, mettre sa culture en jachère. Frank est sur-tout l’auteur d’un roman, les Rats, un livre trop moderne pour qu’un écrivain en imagine encore de semblables. Vieux de vingt-cinq

ans, ce petit bouquin est comme une photo oubliée, marque-page d’une époque où le temps avait de l’avenir ✹� jacques-marie bourget

Un triomphe,par éric Neuhoff, éd. bernard pascuito,

215 pages, 17,95 euros.

L a France est en guerre ; nos armées ne sont-elles pas engagées en Afghanistan ?

Une bataille sans répit, même en période de plage et de « guerre de kilos ». Quelles sont nos chances de « gagner » ? Statistiquement, quasi nulles, les armées occiden-tales n’ont jamais brillé dans ce genre de conflit, dit « contre-insur-rectionnel » ou « asymétrique ». Les militaires n’ont vaincu que trois fois dans ces circonstances, en Malaisie (1898-1954), aux Phi-lippines (1948-1960), et enfin en

neuhoff, la mélancolie ricanantelittéRAtuRe Un triomphe, d’éric Neuhoff, est réédité plus de vingt-cinq ans après sa parution. Les années 70 et 80 défilent sous un flot d’alcool dans cet autoportrait narquois. De son côté, l’armée réfléchit autant que faire se peut sur les moyens de vaincre en territoire hostile…

Un peu de culture

du samedi 10 au vendredi 16 juillet 2010 | bakchich hebdo n°32 13

accro à la super-héroïne

M ieux vaut tard que

jamais. vingt ans après sa sortie aux États-unis, l’album des romulus et rémus de la bd américaine finit son chemin un peu avant rome, en France. l’œuvre est celle du scénariste de Sin City et de 300, Frank miller, et du dessinateur des Watchmen, dave gibbons. Martha Washington est un bouquin beau comme un orage d’été, né de la rencontre de couleurs chaudes et de l’air froid et saisissant de l’écriture. cette fureur des éléments remue quelque peu la terre du récit, celle des racines de l’amérique. ici, tout n’est que fiction et anticipation. le théâtre est celui d’une guerre fratricide qui a lieu dans le courant des années 90 entre l’armée, les natifs américains, des nazis homos et des illuminés qui n’ont pour seul hochet que la bombe a. de ce fatras d’andouilles émerge une jeune femme noire, (fraîcheur) martha, issue des bas-fonds et dont l’ambition est de tout posséder. soit devenir un super-héros baraqué type obama, avec des chemises brunes à nettoyer en guise de marée noire. un sacré boulot, sur trois tomes, dans le pur style des comics américains, pour empêcher que le monde ne s’autodétruise. bien loin des mauvais blockbusters, cet album vous électrocute à la gégène du génie. À l’humanité qui ne survit que par la moyenne, elle ne vit dans cette bd que pour ses excès. baroque’n’roll ! ✹� louis cabanes

Martha Washington, tome 1, le Rêve américain,par Franck Miller et Dave Gibbons, éd. Delcourt, 273 pages, 19,90 euros.

Bédé

Irlande du Nord (1967-2007). Les chefs bidasses sont conscients de leur faiblesse et réfléchissent aux conditions d’une victoire ! Les Américains, sans doute lassés de tirer leur philosophie du film la Bataille d’Alger, ont donc publié un document, le Field Manuel 3-34

L a Princesse de. a toutes les composantes du roman que pourrait adapter l’un

ou l’autre des deux David les plus trash du cinéma : Lynch et Cronenberg. Le dernier livre d’Emmanuelle Bayamack-Tam ne triche pas : abandon du père, enfance anorexique sous le prisme de l’adoption, fascination fétichiste, traves-tissement, univers carcéral et, ça ne mange pas de pain, héroï-

nomanie. Une certaine image du bonheur… Pour-tant, malgré ces thématiques volontairement cho-quantes, brutales, voire traumatisantes, il ne faut pas se tromper : l’auteur n’use de ces facéties qu’à seule fin de nous conduire à une réflexion plus haute, celle sur l’identité. Daniel est un enfant adopté dont le père ne se soucie guère, alors que sa mère le fas-cine. De cette mère, il épousera l’aptitude aux vices

et à la séduction libidinale. Au point de se sentir définitivement femme, comme si cette voie seule lui permettait d’être quelqu’un, usant du désir et du maquillage afin de dissimuler des blessures trop profondes. À 25 ans, le héros (l’héroïne ?…) du livre ne se sera rien épargné, happé par les lumières qui brûlent et marquent. Une quête de la transgression, mais qui vise au dépassement de soi. Ici, le fil du funambule ne cesse de prendre de l’altitude, et l’on comprend que ce n’est pas si anormal pour Daniel, dont la naissance fut synonyme de déséquilibre… Malgré la distance qui nous sépare de cet anti-héros, on arrive à comprendre en quoi notre propre société semble si bancale. Il y a du Pierre Louÿs chez Baya-mack-Tam, comme du Genet, mais il y a en plus une subtile vision de l’humain, dans une époque de plus en plus transgenre. Du très bon ✹� renaud santa maria

La Princesse de., par emmanuelle bayamack-tam,éd. p.o.l, 267 pages, 18,50 euros.

l’étrange bricolage des vicesbouquin

– Counterinsurgency. Topo qui structure leur réflexion en « sept principes, cinq impératifs, et plu-sieurs paradoxes à connaître pour mener une telle guerre ».

eNNeMi MARGiNAliséL’armée française n’est pas en reste. Elle réfléchit (eh oui) à partir de sa propre histoire. Ainsi, les Principes de contre-insurrection viennent d’être publiés par trois colonels trico-lores. Ces 15 barrettes dégagent trois axes « pour gagner ce type de guerre » : la légitimité de l’action, l’adaptation au contexte local en portant l’effort principal sur la population et, enfin, un principe purement militaire : la margina-lisation de l’ennemi. Alors ? Faut-il dire adieu à Clemenceau et à sa sentence « La guerre est une chose trop sérieuse pour être confiée à des militaires » ? ✹� bertrand rothÉ

Principes de contre-insurrection, par h. de Courreges, e. Germain, N. le Nen,

éd. economica, 128 pages, 19 euros.

Page 14: Bakchich N°32

L es gens de télé, nos amis qui ont eu l’idée de recruter des « consul-

tants » pour se pencher sur le chevet des Bleus, sont des génies. Voir les gueules de ces vieux crampons est très instructif. Pas pour les platitudes qu’ils débitent et qui devraient leur valoir l’attribution de la carte de presse sans réunir la commission. Non, revoir Bar-thez ou Leboeuf dix ans plus tard nous donne le bonheur de l’évi-dence, celle de constater qu’ils sont restés ce qu’ils ont toujours été : des pieds. Barthez, passe encore, ce gardien sans tête a eu quelques bons réflexes. Mais présenter Leboeuf comme « ancien champion du monde », c’est vendre l’œuf de lompe pour du beluga. Leboeuf n’a joué que lorsque les autres étaient malades, et

surtout pour distribuer des coups dans les tibias des adversaires, ce type n’a jamais eu de licence mais un permis de détruire. Quant à Dugarry, il n’a été sélectionné qu’en raison de son amitié pour Zidane. À l’infirmerie, les consultants !Le seul qui a toujours de l’âme, douze ans après le temps du « Black, Blanc, Beur », c’est Emmanuel Petit.

Un exemple : un reporter s’amuse que, « grâce  au foot », un village du fin fond

de l’Afrique découvre la télé. Une ONG va retransmettre un match sur la place du village. Manu Petit enchaîne : « Et demain, tous ces gens vont se réveiller. Ils n’auront toujours ni eau, ni électri-cité… » Pas mal ! une pensée non égo-ïste, et sûrement non orpheline, dans

la tête d’un « champion du monde ». Manu, demande vite sa capuche à Anelka, pour que tes idées restent au chaud. Et Zidane, direz-vous ? Ce type a une qualité, se taire, puisqu’il n’a rien à dire. Alors, en silence, il continue de faire du fric avec de la pub pour Gene-rali, un trust de l’assurance qui aime le ballon, Adidas ou dirigeable. « Si l’argent ne fait pas le bonheur, rendez-le ! » disait Jules Renard. Il doit être heureux, Zizou.Et Woerth ? Il n’a rien touché puisqu’il n’a pas l’air heureux, notre Don qui compte ? Pourtant, il y a des types prêts à se faire tuer pour passer, comme lui, dans le journal de 20 heures et en profiter pour faire coucou à leurs amis. Peut-être qu’Éric n’a pas d’amis ? Ou qu’il refuse la camaraderie du déli-cieux Xavier Bertrand, qui parle à mots pesés « des méthodes fascistes » de nos confrères, les journalistes exemplaires de Mediapart. Sur BFM, j’ai entendu aussi les injures lancées à notre presse libre par le Napoléon Morin, prêtre du Nouveau centre. Hervé ? Un homme utile. N’est-il pas expert en girouettes, donc du vent ?✹

ciné Sur une mystérieuse planète, baston géante entre une bande de tueurs et des aliens rastas. Robert Rodriguez organise le massacre et compte les points.

C ’est l’histoire d’une longue dégringolade. Et d’une renaissance. En 1987, John McTiernan

goupille Predator, une série B de commando qui se métamorphose au bout d’une heure en film de SF avec gros monstre baveux. Avec Schwarzenegger en vedette, Pre-dator est une tuerie supérieure-ment mise en scène, ponctuée de répliques hilarantes et de séquences anthologiques. Mis en chantier deux ans plus tard, Predator 2 est un naufrage, tout comme les nanars de 2004 et de 2007, où des producteurs futés ont couplé le Predator à un autre E.T. pas gentil, Mr Alien himself. Histoire de relancer la franchise, le bébé est refilé en 2009 à Robert Rodriguez. Capable du meilleur (Sin City) comme du pire (Spy Kids), Rodriguez s’occupe de la production, tourne dans ses stu-dios texans et engage le cinéaste Nimród Antal, auteur de Blindés. Néanmoins, Pre-dators porte la griffe Rodriguez : un scénario bor-délique (pondu par Rodriguez il y a une quinzaine d’années) mais shooté à l’action, des emprunts multiples (à l’ori-ginal de McTiernan, à la série Lost…), un casting de seconds couteaux, une image crade.À l’arrivée, Predators cogne fort.

Très fort. Rodriguez est un ama-teur de BD et son film fonce comme un comics outrancier et teigneux. Le pitch est simplis-sime : une bande de tueurs et

de mercenaires est parachutée sur une mysté-rieuse planète pour une partie de chasse orga-nisée par les

Predators. Il y a le colosse russe, le psychopathe, le rebelle de Sierra Leone, le trafiquant mexi-cain vérolé et Adrien Brody dans le treillis de Schwarzy. Cherchez l’erreur !Rodriguez aime la SF, le gore, la

baston, le rock’n’roll, et signe un film de fan pour les fans, pas un de ces trucs tièdes conçus sur ordinateur par des spécialistes du marketing. Plus fort, il refuse le tout-numérique et fait réaliser les effets spéciaux sur le tour-nage. Les extraterrestres rastas sont donc des cascadeurs en com-binaison en plastoc (conçues par KNB), d’où un surplus de chair et de réalisme lors des affronte-ments titanesques. À quand le prochain épisode, les gars ? ✹ MARC GODIN

Predators, de nimród Antal, avec Adrien Brody, Alice Braga…

En salles le 14 juillet.

Un peu de culture

14 BAkCHICH HEBDO N°32 | DU SAMEDI 10 AU VENDREDI 16 JUILLEt 2010

LA ZAPPEttE DE BOURGEt

LE BONHEUR DE L’ÉVIDENCE

Dour FestivalFestival

Dour, c’est du lourd. Dans tous les sens du terme. Chaque été depuis vingt-deux ans, ce festival international aussi pointu que mainstream rassemble des dizaines de milliers de fans de rock plus ou moins dur, de chanson française, de hip-hop et d’électro qui tabasse (ou pas) en pleine campagne wallonne. Quelques chiffres, d’abord : quatre jours de musique à 70 kilomètres de Lille, 200 artistes, huit scènes, 2 000 hectolitres de binouze et les quelques tonnes de frites qui vont avec. S’y produiront, notamment et sous le soleil, Faith No More, le groupe de metal-fusion californien culte de Mike Patton fraîchement reformé, les rappeurs new-yorkais à la cool De la Soul, le groove à guitare de leurs concitoyens Fun Lovin Criminals et, côté français, les Blaireaux (euh pardon, les Blérots) de R.A.V.E.L, ainsi que les rockeux d’Eiffel. Une fois la nuit tombée, la fosse se métamorphosera en dancefloor, sous la houlette magique d’une pléiade d’hommes-machines entraînés pour tuer les jambes des clubbers. En vrac ? L’électro synthétique des Britons Simian Mobile Disco, l’esprit frappeur de la french touch Étienne de Crécy, l’afro-rave des Portugais Buraka Som Sistema, l’électro-émotionnelle du Brésilien Gui Boratto, ou la techno du pionnier de Detroit Carl Craig. On avait dit du lourd, mais bon esprit.Du 15 au 18 juillet.Tarifs : 45 euros la journée,55 euros avec le camping.

into the Great WiDe YonDertrentemoller

La musique de trentemoller évoque un road-movie mental, quelque part entre le désert (les guitares wah-wah), l’atmosphère (les synthés planants) et l’enfer (les rythmiques ténébreuses). Quatre ans après The Last Resort – petit trésor électronique serti de cold-wave et d’ambient – le producteur danois revient livrer un grand disque schizophrène. Into The Great Wide Yonder rend tantôt hommage à la dream-pop de ses idoles Mazzy Star, quand il ne sombre pas dans d’inquiétantes digressions noisy ou fait des clins d’œil à Ennio Morricone. Et c’est encore plus beau les yeux fermés.

aphroDiteKylie Minogue

C’est agaçant. Vraiment. Sous prétexte que kylie Minogue a survécu à un cancer, tout le monde s’excite sur son nouvel album. La pochette d’Aphrodite n’y est sans doute pas pour rien. À 48 ans, plus sublime que jamais, la chanteuse australienne se la joue déesse post-romaine. Or, derrière ce miroir aux alouettes, le contenu laisse à désirer : de la pop FM bodybuildée par des synthés ringards et des rythmiques dance, idéale pour une soirée tee-shirt mouillé après la plage. Il est bien loin le temps où kylie chantait avec Nick Cave (Where The Wild Roses Grow) et reprenait New Order (Blue Monday)…✹� ÉLÉONORE COLIN

Musique

Directeur de la publication : Xavier Monnier • Directeur de la rédaction : Nicolas Beau • conseiller éditorial : Jacques-Marie Bourget • Rédacteurs en chef : Pierre-Georges Grunenwald (édition), Cyril Da (Web) • chro-niqueurs : Alceste, Daniel Carton, Jacques Gaillard, Marc Godin, Doug Ireland, Éric Lau-rent, Patrice Lestrohan, Fabrice Nicolino, Jean-François Probst, Alain Riou • Maquette : Émilie Parrod, Victor Buchotte, Marjorie Guigue • Secrétaires de rédaction : Élodie Bui, Marie-Claire Vierling • Rédaction : Monsieur B, Sacha Bignon, Émile Borne, Louis Cabanes, Renaud Chenu, Éric de Saint-Léger, Lucie Delaporte, Anthony Lesme, Laurent Macabies, François Nénin, Simon Piel, Bertrand Rothé, Grégory Salomonovitch, Anaëlle Ver-zaux • Dessina-teurs : Avoine, Bar, Baroug, Bauer, Essi, Giemsi, Goubelle, Ray Clid, khalid, klub, Lacan, Large, Ludo, Magnat, Mor, Morvandiau, Nardo, Noël, Oliv’, Pakman, PieR Gajewski, Revenu, Roy, Soul-cié, thiriet •Groupe Bakchich, SAS au capital de 56 980 euros • Siège social : 121, rue de Charonne 75011 Paris • télé-phone : 01.40.09.13.25

CPPAP : 1114 C 90017 • ISSN : 2104-7979 • Dépôt légal : à parution • Impression : Print France OffsetDirection des ventes : thierry Maniguet/[email protected]/01.70.39.71.05Publicité : [email protected]

tous les textes et dessins sont © Bakchich et/ou leurs auteurs respectifs.

lA BAkchich TEAM

Infirmerie

en sallestoY storY 3de lee unkrich

tous les étés, Pixar revient avec un nouveau film et, quasiment à chaque fois, nous file une claque en images de synthèse. Quinze ans après l’original, voici les nouvelles aventures de Buzz et de Woody, écrites par le scénariste de Little Miss Sunshine. C’est visuellement splendide, drôle et incroyablement mélancolique. Le meilleur épisode de la série ?

taMara DreWede stephen Frears

Avec son humour vachard, Stephen Frears adapte la BD de Posy Simmonds publiée en Angleterre dans le Guardian et par Denoël en France. C’est hilarant, frais, champêtre. Avec l’excellente Gemma Arterton (allez voir la Disparition d’Alice Creed), le bonheur est vraiment dans le pré.

l’autre MonDede Gilles Marchand

Présenté à Cannes, l’Autre Monde est l’un des plus beaux nanars de l’été, crétin et prétentieux. Derrière la caméra, Gilles Marchand, réalisateur de Qui a tué Bambi ? C’est tout dire… Ici, il s’attaque à la réalité virtuelle et raconte l’histoire d’un ado marseillais plein d’hormones, entre ses séances de drague sur la plage et un jeu en réseau, le Black Hole (ouh là…), où il fait la connaissance d’une femme à la recherche d’un partenaire pour mourir. Sur fond de thriller, Marchand nous assène son message important – Internet, c’est dangereux – et filme sous toutes les coutures la pas très convaincante Louise Bourgoin. À fuir.

repo Mende Miguel sapochnik

Forest Whitaker et Jude Law récupèrent des organes dans le corps de mauvais payeurs. Même en DivX, impossible de regarder en entier cette bêtise gore régressive ✹ M. G.

Predators cogne fort. Un film de fan pour les fans, shooté à l’action.

Predators chasse à l’homme

Page 15: Bakchich N°32

Q uelque discutables que puissent être les personnalités des époux Woerth, du procureur Courroye,

des conseillers de l’Élysée et des porte-parole de l’UMP, la vraie star de l’af-faire Bettencourt, c’est François-Marie Banier. La littérature française est riche de coureurs de dots et, de Julien Sorel à Rastignac, en passant par le Chéri de Colette et les héros du Sexe faible, où de beaux messieurs séduisent des dames fortunées, aucune créature de fiction n’approche le talent de ce photographe bien réel qui a re-hissé l’art du gigolo à des hauteurs oubliées depuis Boni de Castellane, qui disait de vilaine femme : « Elle est belle vue de dot. » Or, en ces temps de crise, le problème n’est pas d’admirer béatement, mais de rattraper un peu de ce que ces ronds de jambes ont coûté au Trésor public, et il n’y a aucun espoir de voir la justice récu-pérer par des commandements l’argent donné au bel enjôleur.Si le fisc veut retrouver un peu de son manque à gagner, il doit compter non sur les armes, mais sur le charme, et traiter Banier comme Banier lui-même a traité Liliane Bettencourt, c’est-à-

dire séduire le séducteur. Certes, une personne proche du pouvoir paraît posséder tous les atouts pour mener à bien cette patriotique mission d’envoû-tement, comme elle en a réussi bien d’autres, je veux évidemment parler de notre première dame, Carla Bruni-Sarkozy, à qui peu d’hommes peuvent se vanter d’avoir su dire non. Mais le principe de responsabilité, essentiel en République, voudrait plutôt que ce soit

Florence Woerth, par qui le scandale est arrivé, qui paie de sa personne auprès de

M. Banier pour renflouer les caisses. Certes, sa séduction semble plus céré-brale que celle de Carlita. Mais je suis certain que, si elle s’implique vraiment, une femme de tête comme elle, versée dans l’art de faire fructifier les place-ments, peut trouver les mots (et les chiffres) qui réveilleront la conscience de l’enchanteur cupide, et l’entraîneront dans la voie du remboursement.P.S. : Au moment où je termine cette chronique, on m’informe que François-Marie serait insensible au charme féminin, et que seul un homme… Désolé, Éric, ça met ta femme hors du coup. Il va falloir que tu t’y colles ✹

Le BILLeT D’ALAIn RIOU

BAnIeR OU L’ART DU gIgOLO

Journaliste au Nouvel Obs et invité du Masque et la plume, Alain Riou fait aussi du cinéma. Son cinéma.

Séduction

avignon sur le pont

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Du 7 au 27 juillet se tient la 64e édition du festival d’Avignon. Entretien avec Vincent Baudriller, son programmateur et codirecteur, avec Hortense Archam-baud, depuis 2003.

Comment se porte Avignon ?Avec Hortense Archambaud, lorsque nous sommes arrivés à la tête du festival, en 2003, nous avons décidé d’associer chaque année un ou deux artistes à nos décisions, afin de replacer les créateurs au cœur du projet. Mais si nos specta-cles donnés dans la Cour d’honneur restent au centre, il y a plusieurs façons d’aborder le festival. Je pense aux lectures gratuites, aux rencontres quotidiennes avec les artistes, à l’école d’art, aux spec-tacles incongrus de Sujets à vif ou de la Vingt-cinquième heure, aux débats avec des intellectuels au Théâtre des idées.Je pense aussi aux programmations croisées avec le cycle de musiques sacrées de la Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon, à France Culture et à son festival gratuit, Contre-courant. Enfin, avec le cinéma Utopia, nous diffuserons des œuvres de Godard et de Pedro Costa.Au programme…Christophe Marthaler et Olivier Cadiot, nos deux artistes associés cette année, ne sont pas directe-ment issus du théâtre. L’un est musicien, l’autre vient de la littérature. Pour eux, le théâtre est un endroit d’expérience où la création résulte entièrement du travail d’équipe. Pour le spectacle Papperlapapp, la plasticienne Anna Viebrock a créé un espace à habiter que Christophe Mar-thaler investit sans en avoir pris connaissance auparavant. Il choisit des interprètes, surtout des voix. Puis il les réunit en ce lieu pour y passer du temps, chanter, échanger des partitions. Enfin, petit à petit, un auteur va apporter ses textes. En cinq semaines, un spectacle va alors s’inventer.

Nos fils rouges sont la musique, le lien entre théâtre et littérature et le rapport entre Histoire et présent. Avec la Tragédie du roi Richard II, une création d’Anne Teresa De Keersmaeker, et Pap-perlapapp, deux pièces qui évoquent la période tourmentée des papes en Avignon, nous serons dans l’Histoire.Il sera aussi question d’inquiétude, avec de grands auteurs modernes, tels que Musil, Kafka et Brecht, qui côtoieront la toute la jeune généra-tion d’artistes invités.Quel regard portez-vous sur la politique cultu-relle actuelle ?Jean Vilar défendait l’idée d’un service public de la culture, au même titre que pour la santé et l’éducation. Cinquante ans plus tard, la diminu-tion des budgets publics et la réforme des collec-tivités territoriales menacent la création artis-tique. En jouant à guichets fermés depuis quatre ans, le festival d’Avignon démontre que l’art n’est pas une affaire de spécialistes ✹� enTReTIen eT DeSSIn PAR MARInA DAMeSTOy

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a Un nid pour quoi faire, spectacle écrit par Olivier Cadiot et mis en scène par Ludovic Lagarde, sera créé le 8 juillet au gymnase Gérard-Philippe.

« Les créateurs sont au cœur du projet »

DU SAMeDI 10 AU VenDReDI 16 JUILLeT 2010 | BAKCHICH HeBDO n°32 15

Un peu de culture

Page 16: Bakchich N°32

Rémy pflimlin c’est non-choixaudiovisuel Contre son gré, Sarkozy a propulsé Rémy Pflimlin à la tête de France Télévisions. Un homme consensuel qui évite les conflits. Monsieur va être servi…

«C ette nomination fait beaucoup de déçus dans Paris », ironise une huile de France Télévisions. « Beaucoup de producteurs avaient parié sur

Alexandre Bompard et commencé à lui donner des gages avec le secret espoir de faire partie de l’aventure. » Raté ! Le scénario élyséen a fait long feu. Et Rémy Pflimlin, qui n’en demandait pas tant (la pré-sidence d’Arte lui aurait suffi), peut remercier Éric Woerth, expert en mélange des genres, d’avoir affaibli la présidence. Mais aussi Alain Minc, dont les indiscrétions ont scotché Bompard, le candidat préféré de Sarkozy, à son siège de prési-dent d’Europe 1 (voir Bakchich Hebdo du 17 avril 2010).Pflimlin devient donc, de fait, le « choix de l’Élysée », comme le titre aimablement un tract du syndicat des journalistes maison. Et, en matière de soupçon, Jean-Luc Hees sait de quoi il retourne, depuis sa nomination à la tête de Radio France…

rond, jovialSuccéder à Patrick de Carolis ne sera pas chose aisée. À France Télé, notamment dans l’équipe sor-tante, on raille « l’homme du passé » en soulignant que « Pflimlin est un gestionnaire, pas un homme de programme ». Et Plus belle la vie, qu’il aurait contribué à lancer ? « C’est surtout à mettre à l’actif de Vincent Meslet [patron de la fiction à France Télé-visions, ndlr] », nous répond-on. Au moins a-t-il lancé l’émission C’est mon choix. Catherine Trautmann,

ancienne ministre socialiste de la Culture, dans une solidarité toute alsacienne, nous assure : « C’est quel-qu’un de jovial, rond, qui sait ce qu’il veut et qui a le talent diplomatique pour résister aux pressions. » La preuve ? « Le fait qu’il soit là », lâche un ministre.

Jean-Marie Bockel se souvient de l’année 1983, quand Pfli-mlin était son adversaire lors des municipales à Mulhouse. Un souvenir amusé. Pflimlin, ayant mis de côté la politique, deviendra patron de l’Alsace, tandis que Bockel s’installera à la mairie. « Des rapports sains, jamais dans la connivence, tou-jours dans le dialogue. C’est aussi un fin stratège, il aurait fait un très bon joueur de go », explique le secrétaire d’État à la Justice. On jugera sur pièces.

calme plat « Lui qui n’aime pas les conflits va être servi avec Sarkozy, qui est toujours dans le rapport de force », prévient un proche. Son bilan chez Presstalis (ex-NMPP), où il a su négocier avec

les ouvriers du livre plaide pour lui. L’entreprise, tou-tefois, a frôlé le dépôt de bilan. « Avec Pflimlin, France Télévisions ne sera plus un problème pour Sarkozy. Il ne s’y passera pas grand-chose. Ni en bien, ni en mal », prédit un député UMP. Et si c’était le but ? ✹� simon piel

Zèle de Guéantplus que jamais super-premier ministre, Claude Guéant, l’indispensable secré-taire général de l’Élysée, vole, sur quatre pages du Figaro-Magazine (3 juillet), au secours du fragilisé Éric Woerth. mais peut-être pas seule-ment d’Éric Woerth. l’hebdo l’inter-roge par exemple sur cet îlot des sey-chelles dont Bettencourt n’aurait pas déclaré au fisc la propriété. Guéant : « Je ne connais pas le dossier fiscal de Mme Bettencourt. (...) Mais, visible-ment, la question de savoir qui est le propriétaire de cette île n’est pas tran-chée. En tout état de cause, Mme Bet-tencourt a fait savoir par son avocat qu’elle allait régulariser sa situation. » et, « visiblement », notre bon préfet se satisfait d’une déclaration d’intention. on n’est pas trop rapace avec les petits contribuables, ces temps-ci, dans la très haute administration.

Ça Suisse son coursla grande mansuétude de m. le secré-taire général a une explication toute bête, qu’on trouvait deux jours plus tôt dans le Figaro. Recevant les députés Ump pour « un buffet light » à l’Élysée, le débonnaire percepteur sarko s’est montré très explicite sur le cas de l’éprouvée milliardaire : « Liliane Bet-tencourt est la femme la plus riche de France et elle est restée en France. Est-ce qu’on aurait préféré qu’elle parte en Suisse ? Si elle avait tout lâché, L’Oréal serait suisse. » seychellois aurait été plus original…

Maboul à KaboulC’est quand même un drôle de pis-tolet, ce général mcChrystal, à qui obama vient de retirer le comman-dement des forces de l’otan en Afghanistan. Courrier  international (1er juillet) reproduit l’article du magazine Rolling Stone qui a révélé, notamment, sa grande désinvolture à l’égard de la maison Blanche. en avril dernier, l’excellent « Stanley » était à paris, officiellement pour convaincre le gouvernement français de ne pas, comme son homologue néerlandais, retirer ses troupes de là-bas. le haut galonné, qui ignore quasiment le nom du ministre qu’il doit rencon-trer : « “Je préférerais me faire botter le cul par tout un régiment plutôt que d’aller à ce foutu dîner.” “C’est lié à votre fonction”, lui fait remarquer un collaborateur. McChrystal  se  tourne brusquement vers  lui : “Hé, Charlie, ça aussi, c’est lié à la fonction ?”, dit-il en lui faisant un doigt d’honneur. » les grands soudards yankees ont la plus haute considération pour l’apport des troupes françaises en Afghanistan.

Coûts de fusilla suppression des chasses présiden-tielles amène le Journal du dimanche (4 juillet) à évoquer les invités qui y participaient au temps de mitterrand. Quelques ministres : Defferre, Hernu, Charasse, mais aussi, et c’est plus ins-tructif, « de grands industriels comme Serge Dassault, Roland Peugeot et tout une série de ministres africains et du Moyen-Orient. On croise le prince du Maroc ou le frère du président syrien Rifat-al-Assad ». lequel, en 1982, a réprimé avec la plus atroce férocité (plus de 30 000 morts) le complot, peut-être surestimé, d’une confrérie islamiste. on comprend tout, il s’agis-sait d’un spécialiste du gros gibier.

Au Giscard de tourTant d’années et de désillusions après, l’idéal giscardien vit encore. Du moins, le fidèle disciple de VGe, l’ancien pre-mier ministre Raffarin, se propose de le faire revivre (le Figaro du 5 juillet) : « Avec les parlementaires de Dialogue et Initiative [son club politique, ndlr], nous formulerons au Président pour 2012  des  propositions  capables  de rassembler deux Français sur trois pour éviter un pays ingouvernable. » « Deux Français sur trois », c’est le titre d’un bouquin que Giscard avait publié, avec un succès relatif, en 1984. Aujourd’hui, la question se pose d’autant plus que « deux Français sur trois », c’est peut-être la proportion d’électeurs que sarko aura bientôt contre lui…

Bompard, pas bon portCe n’est pas un mauvais résumé du fré-nétique activisme de notre président que propose à Libération (6 juin) « un député », de la majorité semble-t-il, prudemment anonyme : « Un  DRH catastrophique. Toutes ses initiatives finissent  par  foirer.  Il  veut  nommer Bompard à France Télévisions,  il est obligé de nommer Pflimlin ; il promet le château de Versailles à Darcos, il est obligé de confirmer Aillagon. » et l’on pourrait ajouter : il monte un coup avec orange pour racheter le Monde, et ce sont les concurrents qui l’em-portent ; il crée le bouclier fiscal pour protéger les très riches, et le bouclier fiscal de la plus riche contribuable de France lui revient en pleine poire, etc. À ce stade, ça tourne au grand art…

« Commis » voyageursLe Journal du dimanche (4 juillet) en fait une page. Titre et sous-titre : « les affaires ramènent les hauts fonction-naires au ps. Déstabilisés par les scan-dales, les commis de l’État redécouvrent la gauche. » Des gens « plutôt à droite, mais choqués par ce qu’ils voient vien-nent nous dire : “Je n’ai pas fait l’enA pour ça” », en rajoute, dans l’article, le député Christian paul, actuellement « patron du laboratoire des  idées du PS ». il faut comprendre la douleur de ces égarés désintéressés. les turpitudes du Crédit lyonnais, les embrouilles de la mairie de paris et tant d’autres affaires l’ont prouvé : il ferait beau voir un énarque mêlé à un « scandale » ! ✹ pATRiCe lesTRoHAn

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