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CAHIER THÉMATIQUE H LE DEVOIR, LES SAMEDI 23 ET DIMANCHE 24 JANVIER 2016 FÉLICITATIONS À FONDACTION qui, depuis 20 ans, fait grandir la ville et le Québec par son action en faveur d’un développement durable et responsable. 2 0 P récurseur de l’investissement sociale- ment responsable et du développement durable, le fonds de travailleurs de la CSN, Fondaction, s’était donné dès le départ comme objectif d'être un fonds pas comme les autres, consacré à l’amélioration des conditions d’existence des hommes et des femmes du Québec. Vingt ans plus tard, si le bilan financier s’avère positif, avec 1,4 milliard d’actifs provenant de l’épargne-retraite de près de 130 000 travailleuses et travailleurs, son impact, en matière de rendement social, ne l’est pas moins. Au fil des ans, Fondaction a fondé, participé à la fondation et soutenu des centaines d’entreprises novatrices au Québec, ce qui a permis de sauvegarder et de créer des dizaines de milliers d’emplois. Tour d’hori- zon d’une institution d’avant-garde dans le do- maine de la finance. ! ans déjà Fondaction PEDRO RUIZ LE DEVOIR

CAHIER THÉMATIQUE H › LE DEVOIR, LES SAMEDI 23 ET …...FONDACTION 20 ANS DÉJÀ! H 2 LE DEVOIR, LES SAMEDI 23 ET DIMANCHE 24 JANVIER 2016 Le président de la CSN, Jacques Létourneau,

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C A H I E R T H É M A T I Q U E H › L E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 J A N V I E R 2 0 1 6

FÉLICITATIONS À FONDACTION qui, depuis 20 ans, fait grandir la ville et le Québec par son action en faveur d’un développement durable et responsable.

20Précurseur de l’investissement sociale-

ment responsable et du développementdurable, le fonds de travailleurs de la CSN,Fondaction, s’était donné dès le dépar tcomme objectif d'être un fonds pas commeles autres, consacré à l’amélioration desconditions d’existence des hommes et desfemmes du Québec. Vingt ans plus tard, si lebilan financier s’avère positif, avec 1,4 milliardd’actifs provenant de l’épargne-retraite de prèsde 130 000 travailleuses et travailleurs, sonimpact, en matière de rendement social, nel’est pas moins. Au fil des ans, Fondaction afondé, participé à la fondation et soutenu descentaines d’entreprises novatrices au Québec,ce qui a permis de sauvegarder et de créerdes dizaines de milliers d’emplois. Tour d’hori-zon d’une institution d’avant-garde dans le do-maine de la finance.

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Fondaction

PEDRO RUIZ LE DEVOIR

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FONDACTION 20 ANS DÉJÀ !L E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 J A N V I E R 2 0 1 6H 2

Le président de la CSN, Jacques Létourneau,est également président du conseil d’adminis-tration de Fondaction. Si les deux organisa-tions partagent les mêmes valeurs, elles fonc-tionnent tout de même de façon indépen-dante. Jacques Létourneau raconte.

M A R T I N E L E T A R T E

O n attrape Jacques Létourneau sur la route,à une semaine de Noël, alors que les an-

nonces d’ententes conclues entre le gouverne-ment et les différents syndicats du secteur pu-blic se multiplient. L’homme est occupé. On lesort de l’actualité brûlante pour discuter deFondaction, le fonds de travailleurs créé par laCSN il y a 20 ans. Depuis qu’il est président duconseil d’administration de Fondaction, il se

rend à sa réunion chaque mois, mais il affirmeque son rôle est clairement défini et qu’il nes’ingère pas du tout, par exemple, dans le choixdes dossiers étudiés en vue des investisse-ments. Les opérations sont sous la responsabi-lité du président-directeur général et non duprésident du conseil d’administration.

«Bien sûr, aux réunions, on pourrait débattrede la pertinence d’un investissement, mais le choixdes dossiers étudiés se fait par l’équipe responsablechez Fondaction, affirme Jacques Létourneau. Jen’ai pas un mot à dire là-dessus. Ce n’est pas le po-litique qui commande les affaires financières.»

Développement économiqueUne grande responsabilité du président du

conseil d’administration de Fondaction est des’assurer que les valeurs et les principes de laCSN sont partagés par Fondaction et se tradui-sent en gestes concrets.

La CSN a décidé de mettre en place Fondac-tion comme un outil pour favoriser le dévelop-pement économique et la création d’emplois.Le tissu économique du Québec est composémajoritairement de PME, alors c’est dans cesentreprises que Fondaction investit.

«C’est très important, depuis le début de Fon-daction, d’investir dans les communautés poursoutenir le développement économique, et nousavons toujours maintenu le cap, expliqueJacques Létourneau. Notre processus d’investis-sement ne doit jamais entrer en contradictionavec nos valeurs. »

D’ailleurs, la création d’un fonds d’investisse-ment avait suscité de vives discus-sions au départ au sein de ce syndi-cat d’origine catholique.

«Nous avions toujours eu tendanceà séparer les affaires syndicales et l’ar-gent, se souvient Jacques Létour-neau. Nous avions une retenue parrapport à l’argent. Par contre, la CSNavait toujours été très active en ma-tière de développement économique etsocial, puis avait bien sûr toujours né-gocié des régimes de retraite pour sestravailleurs. Fondaction a fait partiede la philosophie d’innovation quis’est développée à la CSN avec tout lerenouveau de la pratique syndicale. »

La finance socialementresponsable

Fondaction a aussi été un précur-seur au Québec en matière d’inves-tissement responsable. Sa mission,déjà lors de sa création, s’inscrivaitdans ces grands principes. Avec lacréation d’emplois notamment, unefaçon de redistribuer la richesse et de contri-buer à l’épanouissement des gens.

La qualité des emplois of fer ts par les en-treprises dans lesquelles investit Fondactionest d ’a i l leurs une préoccupation pourJacques Létourneau.

« La majorité des PME au Québec ne sont passyndiquées, alors c’est cer tain qu’on investitdans plusieurs de ces entreprises, explique-t-il.On ne pourrait pas investir chez des employeursqui traitent leur monde comme des travailleursde seconde zone. On regarde les conditions géné-rales de travail. Ce sont vraiment des valeurs

très ancrées chez Fondaction. »Le choix d’une finance socialement responsa-

ble n’est pas sans avoir un pouvoir de séductionchez certains investisseurs.

« C’est le cas par ticulièrement auprès desjeunes générations, préoccupées par exemple parles questions d’environnement et de développe-ment durable, remarque Jacques Létourneau.Nous sommes soucieux de ces questions, mêmes’il y a aussi des limites sur les marchés. »

Plus que le rendementAlors que les régimes complémentaires de

retraite se font de plus en plus rares et de plusen plus chiches chez les em-ployeurs, Fondaction souhaite êtreune voie intéressante pour encoura-ger les travailleurs à épargner.Dans plusieurs entreprises syndi-quées af filiées à la CSN, des mili-tants syndicaux s’impliquent d’ail-leurs pour inciter les gens à investirdans Fondaction.

Toutefois, une critique que l’onentend souvent à l’égard des fondsde travailleurs, c’est qu’ils ne don-nent pas de rendement. Jacques Lé-tourneau remet les pendules àl’heure : « Un redressement a été faitces dernières années. »

Fondaction a eu un rendement de5,57 % en un an, de 3,08 % en troisans, de 2,35 % en cinq ans et de-0,49% en 10 ans.

«Puis il faut ajouter le crédit d’im-pôt pour fonds de travailleurs qui aune portée significative dans la pochedes gens», ajoute M. Létourneau.

Mais l’investissement chez Fon-daction va au-delà du rendement. Le présidentde la CSN raconte une anecdote à ce sujet :« Après une manifestation lors d’une journée degrève du secteur public, nous nous sommes arrê-tés dans une taverne et le serveur m’a reconnu. Ilm’a dit qu’il était bien heureux d’investir dansFondaction puisque cela lui permet d’épargnertout en le faisant participer au développementéconomique du Québec. Les gens sont heureux deprendre part aux affaires économiques d’ici. »

CollaboratriceLe Devoir

CSN

Investir dans le développementéconomique du Québec

RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR

Le président de la CSN, Jacques Létourneau

Q U É B E C

Un nouvel édifice à l’image de FondactionInauguré lors de son 15e anniversaire, en 2010, le nouvel édifice de Fondaction CSN à Québec seveut à l’image de l’engagement de l’organisme à l’égard de l’économie québécoise et du dévelop-pement durable. Plus haut immeuble de bureaux contemporain à structure de bois lamellé-colléen Amérique du Nord, ce bâtiment de six étages comportait plusieurs innovations technologiqueset écologiques. La structure de bois (certifiée FSC) a notamment été fabriquée à partir de têtesd’épinettes noires, parties autrefois laissées sur les parterres de récolte. Ce qui a notamment per-mis de réaliser un bénéfice carbone net de 1350 t de CO2, par rapport à une construction tradi-tionnelle en béton, soit l’équivalent de la consommation de 270 automobiles par an. Cetteconstruction a d’ailleurs valu plusieurs prix à ses concepteurs, l’architecte Gilles Huot, de GHAArchitecture et développement durable, et l’ingénieur Stéphane Rivest, du Bureau d’études spé-cialisées (B.E.S inc.), dont le Prix du public des Mérites d’architecture de la Ville de Québec2010. Les pièces de bois utilisées dans la structure ont été fabriquées par Chantiers Chibougamautandis que Nordic Structures Bois, une société sœur, a contribué à la conception du projet et à lacoordination sur le chantier. En plus de Fondaction, l’édifice abrite notamment les locaux duFonds d’action québécois pour le développement durable, de Filaction, de Bâtirente, de MCEConseils, de Infor inc. et de la Caisse d’économie solidaire Desjardins de Québec.

Le Devoir

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«C’est trèsimportant,depuis le débutde Fondaction,d’investir dansles communautéspour soutenir le développementéconomique, et nous avonstoujoursmaintenu le cap»

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FONDS

BIOMASSEÉ N E R G I E

L’empreinte génétique de Fondaction

P I E R R E V A L L É E

Mais pour bien saisir l’intui-tion de départ, il faut re-

monter encore plus loin dans letemps. «Les premiers balbutie-ments […] remontent aux années1970, raconte Léopold Beaulieu,président et directeur généralde Fondaction. À cette époque, lemouvement syndical se pose unequestion. Doit-il demeurer uni-quement dans l’action syndicale,c’est-à-dire la défense de ses mem-bres syndiqués, ou doit-il plutôtbrasser plus large et contribuer àl’amélioration des conditions devie de l’ensemble des travailleurset de la société québécoise?»

À la CSN, on choisit la se-conde voie. «Cela a mené à lacréation des caisses d’économie,dont la Caisse d’économie soli-daire Desjardins. Avec la créa-tion de ces institutions, on cher-chait à canaliser l’épargne dessalariés et des syndiqués, d’unepart, et d’autre part, à favori-ser la gestion collaborative, endonnant le mandat à la caissed’économie solidaire de soute-nir les coopératives et les orga-nismes à but non lucratif. »

La crise économique des an-nées 1980 ne fait que renfor-cer cette conviction et mène àla création par la CSN de nou-velles institutions, comme Bâ-tirente, dans le domaine del’épargne retraite. Et puis laprotection de l’environnements’invite dans le discours. «C’estalors que l’on réalise qu’au-delàdes questions économiques et deconditions de vie des travail-leurs, le mouvement syndicaldoit agir de manière à être sou-cieux aussi de l’environnement.Je me souviens d’une conférenceà Genève au milieu des années1980 où j’ai eu l’occasion demettre la main sur une versionpréliminaire de ce qui allait de-venir le rappor t Brundtlandsur le développement durable.En le lisant, j’ai réalisé quec’était justement vers cela quenotre réflexion nous avaitconduits. » Et pour illustrer sonpropos, Léopold Beaulieus’inspire du Bourgeois gentil-homme de Molière. « Au fond,tout comme M. Jourdain, nousfaisions de la prose sans le savoir. »

Le développementdurable

À sa création en 1995, Fon-daction a déjà fait du développe-ment durable la clé de voûte deson édifice financier. «Oui, ilfaut que nos investissements

soient rentables, mais il faut allerau-delà du seul rendement pourles actionnaires. La bonne gou-vernance, le souci de l’environne-ment, la reddition de comptes en-tre toutes les parties prenantessont des critères dont nous tenonscompte lorsque Fondaction dé-cide d’investir ou non dans uneentreprise.» Et l’investissement,que ce soit en participation aucapital ou en prêt garanti, esttoujours patient. « Lorsqu’ons’embarque avec une entreprise,on est là pour cinq à sept ans.»

Autre preuve que le dévelop-pement n’est pas un vœupieux : la for te présence descoopératives et des entre-prises d’économie socialedans le portefeuille d’investis-sement en entreprises québé-coises. D’ailleurs, Fondactiona été l’un des premiers à soute-nir la Société de développe-ment Angus et à contribuer àla Fiducie du Chantier de l’éco-nomie sociale.

Au fil des ans, Fondaction amis en place d’autres institu-tions, comme Filaction, qui seconsacre aux investissementslocaux, ainsi qu’une cinquan-taine de fonds spécialisés etde fonds par tenaires. Iciaussi, la philosophie de Fon-daction amène une autre fa-çon de faire. « Ces diverses or-ganisations fonctionnent de fa-çon indépendante. Bien sûr,Fondaction siège au conseild’administration, mais il n’apas la majorité, et les décisionsprises sont celles de l’institu-tion. En agissant ainsi, nousavons voulu éviter une struc-ture hiérarchique, qui a ten-dance à coucher le monde. Unestructure plus égalitaire leurpermet de se relever. »

Mais on peut bien se décla-rer pour le développement du-rable, encore faut-il une reddi-tion de comptes. « C’est la rai-son pour laquelle nous avonsété une des premières institu-tions financières au Canada àadhérer dès 2007 au Global Re-porting Initiative. » Rappelonsque le Global Reporting Initia-tive (GRI) est une organisationinternationale qui a commemission de développer les indi-cateurs de per formance enmatière de développement du-rable. De plus, Fondaction estl’une des premières organisa-tions à publier un rapport dedéveloppement durable.

Pour la suite des chosesDans le monde de la f i -

nance, les institutions finan-

cières qui se font adeptes dudéveloppement durable nepeuvent guère aujourd’huiignorer le concept d’investis-sement responsable, et Fon-daction l’a compris et adhèreaux Principes pour l’investis-sement responsable (PRI) del’ONU, qui enjoignent aux in-vestisseurs de tenir comptedes considérations environ-nementales, sociales et degouver nance dans leurschoix d’investissement. Sil ’ a d h é s i o n a u x P R I n echange rien aux investisse-ments de Fondaction dansles entreprises québécoises,déjà balisés par la philoso-phie interne de Fondaction,cela vient colorer toutefoisses investissements sur lesmarchés, notamment les ac-tions boursières et les titresobligataires.

Léopold Beaulieu espère quele nouveau gouvernement Tru-deau, comme promis en cam-pagne électorale, ramènera à15 % le crédit d’impôt fédéralpour les fonds de travailleurs[mesure annoncée pour le pro-chain budget fédéral au mo-ment d’écrire ces lignes]. «Labaisse du crédit d’impôt n’a pasnui à la participation de nos ac-tionnaires, mais elle nous obli-geait à faire des choix dif ficiles,comme prendre moins derisques avec des entreprises endémarrage, afin de conserver

pour nos actionnaires un rende-ment intéressant.»

Et l ’avenir, maintenant ?« Nous allons poursuivre dansnotre volonté de contribuer à

mettre en place une nouvelleapproche du développementéconomique qui permette de ré-duire les inégalités socio-écono-miques tout en favorisant une

meilleure utilisation des res-sources de notre planète. »

CollaborateurLe Devoir

Vingt ans déjà. À cet âge, Fondaction, le cadet des fonds detravailleurs québécois créé à l’initiative de la CSN, est ma-jeur et vacciné, comme en témoignent son actif net de1,4 milliard de dollars et ses quelque 130 000 actionnaires.Et ce qu’il est devenu aujourd’hui s’inscrit dans la droiteligne de l’intuition première qui le fit naître.

PEDRO RUIZ LE DEVOIR

Léopold Beaulieu espère que le nouveau gouvernement Trudeau, comme promis en campagne électorale, ramènera à 15% le créditd’impôt fédéral pour les fonds de travailleurs.

20 ans

La CSN salue 20 ans d’actions solidaires pour le développement et l’emploi

csn.qc.ca

PEDRO RUIZ LE DEVOIR

Au fil des ans, Fondaction a mis en place d’autres institutions, comme Filaction, qui se consacre auxinvestissements locaux, ainsi qu’une cinquantaine de fonds spécialisés et de fonds partenaires.

Nous allons poursuivre dans notre volonté de contribuer à mettre en place une nouvelle approche du développementéconomique qui permette de réduire les inégalités socio-économiques tout en favorisant une meilleure utilisation des ressources de notre planèteLéopold Beaulieu, président et directeur général de Fondaction

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FONDACTION 20 ANS DÉJÀ !L E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 J A N V I E R 2 0 1 6H 4

Vibrant carrefour d’expertises, Neuvaction accélère la performance globale des organisations pour la création de richesse collective au Québec

Développement organisationnel & Développement durable«Reporting

Fier d’être partenaire de Fondaction qui se démarque comme chef de file en développement durable au Québec depuis 20 ans.

Créé par Fondaction en 2001, Filaction fi-nance des PME impliquées entre autres dansl’économie sociale, le tourisme et la culture.

M A R I E L A M B E R T - C H A N

L a librairie Pantoute, le théâtre de marion-nettes L’Illusion, la fondation Metropolis

bleu, le festival Amnesia Rockfest, la compa-gnie Bec Soda et son cola à l’érable Bec Cola, leCirque Éloize, le Centre d’arts d’Orford, le ci-néma Le Clap, la station CIBL… On ne compteplus le nombre de PME, de coopératives etd’organisations sans but lucratif qui ont bénéfi-cié d’un coup de main de Filaction, un acteurtrop peu connu dans le milieu du financement.

« Souvent, on nous demande si nous faisonsdans le capital de risque. Non, ce n’est pas le cas.Le capital de risque vise à maximiser le rende-ment financier, alors qu’un fonds de développe-ment comme Filaction cherche à maximiser lerendement social tout en s’assurant d’avoir des or-ganisations viables. Cela se reflète dans le choixdes initiatives que nous finançons», déclare le di-recteur général du fonds, Milder Villegas.

Créé en 2001 par Fondaction, Filaction estune entité autonome et indépendante du fondsde travailleurs de la CSN. Il en tire toutefois90% des capitaux qu’il investit dans des PME is-sues des régions ressources (comme la Gaspé-sie, l’Abitibi-Témiscamingue et le Saguenay–Lac-Saint-Jean), ou encore œuvrant dans les do-maines de l’économie sociale, de la culture etdu tourisme. «Ce sont des investissements directsde moins de 500 000$», indique M. Villegas.

Parallèlement, Filaction capitalise 22 fondsqui octroient des prêts de 5000 $ à 250 000 $ àdes entreprises en démarrage ou en crois-sance. Plusieurs de ces fonds soutiennent desclientèles spécifiques voulant se lancer dansl’entrepreneuriat, en particulier les femmes etles communautés culturelles.

«Nous aidons principalement les communautésnoire, maghrébine et latino-américaine, précise ledirecteur général, car plusieurs analyses montrentque ce sont des groupes ayant une forte fibre entre-preneuriale, mais qui présentent un taux de chô-mage élevé. Pourtant, nombre de membres de cescommunautés ont reçu une très bonne formation.»

Répercussions humainesFilaction s’emploie ainsi à appuyer des

groupes, des petites entreprises et des sec-teurs d’activité qui sont désavantagés par lesser vices traditionnels de financement. Cer-tains n’y ont carrément pas accès. « Tout lemonde peut venir cogner à notre porte, assureMilder Villegas. Notre seul critère, c’est la viabi-lité de l’entreprise. »

« Contrairement aux banques, qui analysentla rentabilité des initiatives qu’elles soutien-nent, nous préférons regarder les répercussionsà plus grande échelle, poursuit le directeur gé-néral. Par exemple, un projet de productiond’aluminium au Saguenay semble risqué si onl’évalue strictement d’un point de vue financier.Cependant, il y a des facteurs de réduction durisque à prendre en considération, comme l’ap-port au développement régional, à la créationd’emplois et à la cohésion sociale. C’est là quenous intervenons. »

Jusqu’à présent, Filaction et les fonds qu’ellecapitalise ont financé 851 entreprises, ce qui apermis de créer et de maintenir plus de 6900emplois.

« C’est bien, les chif fres, mais rien ne me rendplus fier que les retombées concrètes d’un projet,affirme M. Villegas. On remplit notre missionquand on voit des PME réussir à l’extérieur desgrands centres ; quand on aide des communau-tés autochtones à développer des commerces deproximité afin de ne plus avoir à franchir 40 à50 kilomètres pour avoir accès à de la nourri-ture ; quand on travaille de concer t avec lescommunautés culturelles et qu’on découvre leurmode de fonctionnement et leurs expertises. »

ÉvolutionSelon Milder Villegas, le rôle de Filaction de-

meure méconnu. C’est que, pendant long-temps, le fonds de développement travaillait

avec un petit nombre de partenaires, dans descréneaux bien spécifiques. «En dehors de ce cer-cle, on ne nous connaissait guère et c’était cor-rect », observe le directeur général.

Néanmoins, depuis quatre ans, l’organisationa changé de cap et s’ouvre à de nouveaux parte-nariats, notamment en s’impliquant directe-ment dans l’aide au développement écono-mique des villes.

«Ce n’est pas parce qu’on manque de travail, aucontraire, signale Milder Villegas en riant. Simple-ment, je pense que c’est important de faire connaî-tre au grand public notre existence. Après tout, lamajorité de l’argent que nous investissons provientdes poches de travailleurs de partout au Québec. Ilfaut qu’ils sachent à quoi ils contribuent.»

L’évolution de Filaction a entraîné une crois-sance de 150 % de son capital disponible aucours des quatre dernières années.

Collaborations à l’internationalFilaction s’ouvre aussi au monde. Il est mem-

bre de plusieurs organisations internationaleset collabore entre autres avec le Mexique et leBrésil.

De plus, Milder Villegas a été élu à la prési-dence de l’INAISE, l’Association internationaledes investisseurs dans l’économie sociale, enmai 2015. Le regroupement tiendra sa confé-rence internationale de la finance sociale et so-lidaire à Montréal du 11 au 13 mai 2016. Évi-demment, Filaction est membre du comité or-ganisateur, avec MCE Conseils, la Caisse d’éco-nomie solidaire Desjardins et le Réseau québé-cois du crédit communautaire. Environ 150participants sont attendus.

CollaboratriceLe Devoir

Filaction cherche à maximiser le rendement social

MARIE-HÉLÈNE TREMBLAY

La station CIBL et le Cirque Éloize (photo ci-dessous) font partie des organisations à but non lucratif qui ont bénéficié d’un coup de main de Filaction.

ESPACE URBAIN

Le directeur général du fonds Filaction, MilderVillegas

PlandactionAutre institution créée par Fondaction,Plandaction est un cabinet-conseil en pla-nification financière et en rentes collec-tives à but non lucratif qui regroupe troisorganisations membres, soit Fondaction,la Caisse d’économie solidaire Desjardinset la Caisse d’économie Desjardins LeChaînon–Honoré-Mercier.Créé en 2008, Plandaction exerce un rôle deconseil auprès de ses clientèles individuelleset collectives pour répondre à leurs besoinsfinanciers liés à la retraite.Plandaction vise notamment à définir desstratégies novatrices et efficaces pour ac-cumuler plus de capital pour la retraite,pour chaque dollar consacré à cet objectif,en conjuguant les avantages de Fondac-tion avec ceux des autres régimes d’accu-mulation pour la retraite accessibles chezles organisations membres ou dans le mi-lieu de travail.

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caissesolidaire.coop

Fondaction a 20 ansLevons notre chapeauà un précieux compliced’une finance qui prend en comptele développement économique, social et environnemental.

C L A U D E L A F L E U R

E n 1995 naissait Fondaction, le fonds de tra-vailleurs créé par la CSN. Ce fonds d’inves-

tissement se veut un acteur clé dans le finance-ment socialement responsable et le développe-ment durable. C’est donc dire que, dans tousles cas, les investissements de Fondaction enentreprise prennent en compte les enjeux envi-ronnementaux, sociaux et de gouvernance(ESG).

C’est ainsi qu’avant d’investir, Fondactionexamine toute entreprise selon l’ensemble desfacteurs ESG, jaugeant de quelle sorte d’entre-prise citoyenne il s’agit, quelles sont ses rela-tions dans son environnement et avec la com-munauté locale, quel mode de gestion est enplace, quelles sont les conditions de travail, sesengagements dans le milieu et, enfin, commentelle se comporte sur le plan environnemental.

À cette fin, Fondaction a créé en l’an 2000Neuvaction, un groupe d’experts-conseils endéveloppement organisationnel. «Nous sommesdes accélérateurs de réussite, lance sa directricegénérale, Marie-Ève Tremblay. C’est vraimentce qui est le plus important pour nous. »

Neuvaction obtient ainsi des mandats deFondaction afin de s’assurer que ses investis-sements seront socialement responsables.« On nous mandate pour réaliser une revue pré-liminaire en ce qui concerne tout ce qui est ex-tra-financier, explique Mme Tremblay. Nousexaminons le développement économique, le dé-veloppement territorial, la gouvernance, lespratiques de gestion sociale et environnemen-tale, la conformité aux lois, etc. Nous menonsdonc notre analyse alors que Fondaction est enphase de préinvestissement. »

Gestion participativeNeuvaction fait également du développement

organisationnel. «Nous faisons beaucoup de pla-nification en organisation stratégique et en ges-tion du changement, ajoute Mme Tremblay. Nousfaisons aussi beaucoup de coaching, du coa-ching de gestion comme d’équipe. »

À cette fin, la mission de Neuvaction vise la«démocratisation des lieux de travail ». «Cela re-vient à donner du sens au travail pour chaqueemployé. On accompagne les employeurs dansune démarche de gestion participative. » Il s’agitde faire en sorte que toute personne au seind’une entreprise se sente concernée par laréussite de celle-ci.

Mme Tremblay emploie à ce sujet la méta-phore des trois maçons. D’abord, il y a celui quine fait que poser des briques, raconte-t-elle. Il ya aussi celui qui considère qu’il construit unmur de briques, alors qu’il y a enfin celui qui sevoit en train de construire une cathédrale ! Or,comme elle le fait remarquer, on est tous plusheureux de participer à la construction d’unecathédrale, puisqu’« on est tous toujours plusfiers de contribuer à quelque chose de plus grandque soi ».

« Nous cherchons donc à faire en sorte qu’ausein d’une entreprise, les employés aient réelle-ment l’impression de construire des cathédrales,c’est-à-dire qu’ils saisissent le sens plus large dece qu’ils font, ce qui diminue de beaucoup la mo-notonie du travail. »

Toute entreprise réussira beaucoup mieux sichacun se sent partie prenante de ce qu’il fait.«C’est ce que nous cherchons à faire et c’est pour-quoi nous nous considérons comme des accéléra-teurs de réussite », dit-elle.

Mais, comme on peut l’imaginer, nombred’employeurs sont au départ plutôt réticents à« démocratiser » le travail. « Mais nous prenons

en compte les réticences de la direction et chaquecas est dif férent, note Mme Tremblay. Nous fai-sons aussi valoir que, par la suite, il est beau-coup plus facile d’implanter des changementslorsque tous se sentent concernés. »

Réussite, respect, reconnaissance et plaisir

Marie-Ève Tremblay cite l’exemple d’unefirme de Québec où l’équipe a implanté la «dé-mocratisation du travail» il y a deux ans. «On ad’abord rencontré les gens sur le plancher del’usine et il s’est avéré que ceux-ci se sentaient

traités comme des numéros… Nous avons ensuiteassis tout le monde ensemble — le président auxcôtés du journalier, tout le monde sur un piedd’égalité ! — afin de déterminer les valeurs del’entreprise. » Il est ressorti de cet exercice qua-tre valeurs, à savoir : la réussite, le respect, la re-connaissance et le plaisir. «À présent, toutes lesdécisions de gestion passent par ce filtre des va-leurs, précise Marie-Ève Tremblay, et ces valeursse retrouvent partout, partout dans l’entreprise.»

Or, un an et demi après l’implantation,lorsque l’équipe de Neuvaction est retournée

dans l’entreprise, le président de celle-ci «étaitabsolument convaincu que c’était là une valeurajoutée », rapporte Mme Tremblay. « On a aussisondé les employés et ceux-ci nous ont dit à quelpoint le climat de travail s’était amélioré et àquel point aussi tous se sentaient reconnus,ajoute-t-elle. C’était très différent de ce que c’étaitavant, nous a-t-on dit. »

Certification GRIDans la mesure du possible, Neuvaction

cherche également à implanter les valeurs dudéveloppement durable et de bonne gouver-

nance au sein des entreprises.À cette fin, elle est la seule en-treprise au Québec à être certi-fiée par le Global Reporting Ini-tiative (GRI), la référence mon-diale en production de rapportsen développement durable.«Nous sommes donc les seuls auQuébec à pouvoir donner desformations certifiées aux entre-pr i ses , indique Marie -Ève

Tremblay. Nous donnons aussi toute l’expertise-conseil en développement durable. »

D’après elle, le fait qu’une entreprise pro-duise un rapport de développement durable se-lon les pratiques et normes du GRI permet àcelle-ci de se comparer à ses concurrents et,surtout, de se faire valoir sur la scène nationaleet internationale. «Et comme tout ce qui se me-sure s’améliore, poursuit-elle, cela vous amène àvous améliorer plus rapidement. »

«Pour produire un rapport GRI, il faut s’analyser,se questionner, voir où sont nos zones d’efficacité et

où on pourrait s’améliorer, explique-t-elle. Cela nousamène aussi à prendre conscience de ce que nouspourrions améliorer, ce qui sera le plus payant…Voilà une bonne façon d’accélérer sa réussite!»

CollaborateurLe Devoir

NEUVACTION

Aider les entreprises à « construire des cathédrales »

TODOR TSVETKOV ISTOCK

Outre son mandat consistant à vérifier que les investissements sont socialement responsables, Neuvaction fait également du développementorganisationnel, comme du coaching de gestion ou d’équipe.

SOURCE MARIE-ÈVE TREMBLAY

La directrice générale de Neuvaction, Marie-ÈveTremblay

«Nous cherchons donc à faire en sorte qu’au sein d’uneentreprise, les employés aient réellement l’impressionde construire des cathédrales, c’est-à-dire qu’ilssaisissent le sens plus large de ce qu’ils font, ce qui diminue de beaucoup la monotonie du travail»

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FONDACTION 20 ANS DÉJÀ !L E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 J A N V I E R 2 0 1 6H 6

Depuis leur création à tous les deux, les des-tinées de Fondaction et de la Société de déve-loppement Angus (SDA) ont été intimementliées. « C’est bien simple, résume ChristianYaccarini, fondateur et président-directeur gé-néral de la SDA, sans lui, nous n’aurions passurvécu. Nous n’aurions pas réussi notrepari. »

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

U n pari, ou plutôt un rêve en 1995, celui d’ac-quérir le terrain des anciennes usines An-

gus, de le développer de manière socialementresponsable et de générer des retombées signi-ficatives pour la communauté locale. Ce qui al-lait devenir, des années plus tard, le Techno-pôle Angus.

«On n’avait pas un sou à l’époque, sesouvient-il. On venait de créer un orga-nisme à but non lucratif. J’étais le seulemployé, payé par une autre organisa-tion, et on avait un conseil d’administra-tion formé de bénévoles. On est par tiscomme ça, on s’est mis à tous travailleret, tranquillement, les choses ont évolué.»

Un CA auquel Fondaction adhère dès le début

« Dès que Fondaction a démarré, j’ai rencon-tré son P.-D.G., Léopold Beaulieu, raconteM. Yaccarini. Je lui ai présenté notre projet.J’avais vu que nous avions des valeurs et desorientations communes et je souhaitais qu’il sejoigne au conseil d’administration que nous met-tions sur pied. Il m’a répondu qu’il n’avait pasun sou, qu’il n’avait pas commencé à lever lesfonds. Mais ce n’était pas de sous que j’avais be-soin à ce stade-là. Je cherchais des gens qui croi-raient au projet et qui auraient à cœur de s’im-pliquer. C’est comme ça que Fondaction est de-venu notre partenaire dès le départ. Ils ont ac-compagné le projet. »

Au tournant de l’an 2000, le fonds fait un pre-mier investissement au profit de la SDA en luiprêtant 400 000 dollars. Pas grand-chose, vul’ampleur du projet, mais une somme straté-gique, car pour la première fois, celui-ci reçoitde l’argent de la part d’une institution privée.En 2004, l’idée d’un partenariat financier à 50-50 germe alors, afin de développer le terrain.

« On avait déjà commencé des collaborationsavec la Caisse d’économie solidaire, rappelle leP.-D.G. de la SDA. Mais voir qu’une institutionfinancière parlait d’environnement et de dévelop-pement durable, de gestion participative, toutesces valeurs qui nous animaient, nous, ça nous aravis. Il restait encore à voir si nous allions réus-sir notre pari. Si, nous, nous allions parvenir àacquérir le terrain et Fondaction, à collecter del’argent. La réponse a été oui pour les deux etc’est ainsi qu’ils ont pu faire ce premier investis-sement chez nous. »

Un partenariat qui va encore plus loin au-jourd’hui. À la faveur du développement duTechnopôle, de plus en plus de gens sollici-taient la SDA pour mettre en œuvre ailleurs desprojets immobiliers basés sur le développe-ment durable. En 2009, le conseil d’administra-tion de la SDA et Fondaction décident de ré-

pondre favorablement à ces sollicita-tions en créant ensemble un fonds d’in-vestissement immobilier distinct d’An-g u s , l a S D A e n é t a n t l e b r a sgestionnaire et Fondaction, le bras fi-nancier. Un premier projet voit le jour àMontréal, le 2-22 au croisement de larue Sainte-Catherine et du boulevardSaint-Laurent, et deux autres sont encours à Montréal et à Québec. Fondac-tion sort l’argent, la SDA achète les pro-priétés et les développe.

« Sur le Technopôle, Fondaction a donc au-jourd’hui investi près de 25 millions de dollars et27 millions sur le fonds d’investissement immobi-lier, révèle Christian Yaccarini. Notre grandefierté, c’est que c’est très profitable pour Fondac-tion. La rentabilité financière avoisine les 10%,ce qui est très bon. Et évidemment, la rentabilitésociale et environnementale est excellente aussi.On se faisait conjointement un devoir de démon-trer qu’on pouvait faire du développement autre-ment tout en étant très rentables. »

Au départ, la Société de développement An-gus avait été créée à la suite de la fermeturedes usines Angus dans le quartier Rosemont àMontréal, alors que les quar tiers adjacentsétaient aux prises avec un taux de chômagetrès élevé.

Pour renverser la vapeur et ramener l’emploiet la richesse sur ce vaste site, la SDA, enétroite collaboration avec la communauté lo-cale, voulait développer un projet mobilisateur.Avec près de la moitié du site développé à ce

jour, le Technopôle accueille une cinquantained’entreprises, institutions et organismes em-ployant plus de 2000 travailleurs dans diverspôles d’activité porteurs.

Pas de doute, donc, pour M. Yaccarini, Fon-daction est un partenaire de rêve. Dans une in-dustrie bancaire encore très traditionnelle,avoir un outil financier comme cette institutiona été une grande chance.

«Nous avions besoin de capitaux qui nous per-mettent de continuer dans notre mission, ex-plique le P.-D.G. On aurait pu aller en chercherailleurs, de l’argent, mais les institutions ban-caires auraient tenté de nous détourner de notremission de développement durable et social. Fon-daction partageait cette vision. C’est la grandedif férence. Aujourd’hui, on a une crédibilité, çava mieux pour aller chercher de l’argent. Mais en2000, on ne l’avait pas. On n’est pas vraiment

allés voir ailleurs, mais on sait que personnen’aurait misé sur nous. Il n’y avait que Fondac-tion pour y croire et nous soutenir. »

Deux autres fonds sont sur le point de voir lejour entre les deux partenaires. L’un sur le dé-veloppement de l’emploi, l’autre, résidentiel,pour favoriser l’accès à la propriété de la classemoyenne. À chaque fois, le leadership est dé-tenu par les deux organismes, mais d’autrespartenaires s’ajouteront à l’équipe.

«La SDA et Fondaction sont capables de déve-lopper ensemble un projet, et après ça seulement,nous allons chercher d’autres par tenaires,conclut M. Yaccarini. C’est notre force d’arriverà travailler de manière si ef ficace main dans lamain. »

CollaboratriceLe Devoir

SOCIÉTÉ DE DÉVELOPPEMENT ANGUS

L’union fait la force

En 1976, une bande de passionnés d’informatique fondent à Montréal une PME de concep-tion de logiciels. L’entreprise, Speedware, connaît un tel succès que, vingt ans plus tard, ellese retrouve cotée à la Bourse de Toronto. Et, comble de succès, elle devient même fort at-trayante aux yeux d’un géant américain du domaine… qui s’en empare. Et c’est alors que lamésaventure commence !

FRESCHE LEGACY

Une mésaventure américainequi se termine bien

SOURCE SDA

Vue aérienne du Technopôle Angus

ChristianYaccarini

C L A U D E L A F L E U R

D urant les années 1980,Speedware développe

des applications permettantaux entreprises d’automatiseret de rationaliser leurs activi-tés liées aux technologies del’information (TI). Au coursdes années 1990, elle devientmême un véritable précur-seur dans le développementd’applications Inter net, leWeb faisant alors son appari-tion dans nos vies. Puis, enl’an 2000, elle crée le premieroutil de développement d’ap-plications sans fil au monde(MobileDev).

« Durant les années 1990,nous avons mis en place unestratégie de croissance par ac-quisitions et, conséquence denos succès, nous sommes appa-rus sur l’écran radar d’une trèsgrande entreprise américaine,raconte Andy Kulakowski, pré-

sident et directeur général deFresche Legacy, la nouvelleidentité de Speedware. Ils nousont fait une offre qu’on ne pou-vait pas refuser ! »

Le cauchemar américain« Une fois notre société ache-

tée, poursuit M. Kulakowski, ilnous est très, très vite apparuque l’entreprise américainen’était absolument pas dési-reuse d’investir ici au Québecni dans ce que nous faisons.Tout ce qu’elle voulait, c’étaits’emparer de nos propriétés in-tellectuelles, de nos technolo-gies, de nos connaissances et denotre façon de faire, mais ellen’était nullement intéressée àl’idée qu’on développe de nou-veaux produits. Or, vous le sa-vez, dans le monde des TI, ilfaut sans cesse innover, c’estune question de survie. »

De fait, l’acquéreur chercheessentiellement à retirer le

maximum de profits de Speed-ware et, une fois le savoir-fairede l ’ équipe montréa la iseépuisé, il la fermerait toutbonnement. « Traire la vachepuis l’envoyer à l’abattoir »,pour employer les mots deStephan Morency, directeurde portefeuille principal chezFondaction.

Mais justement, l’équipe deSpeedware désire passionné-ment continuer de progresseren développant de nouveauxproduits. C’est ainsi qu’au mi-lieu des années 2000, AndyKulakowski et son équipe dedirection ont l’audace de pro-poser à l’entreprise américainede racheter leur société. Maisils butent alors contre un mur :« Impossible de faire une tellechose, se fait-on répondre sèche-ment. Et de toute façon, vousn’en avez pas les moyens, nous

VOIR PAGE H 10 : FRESCHE

SOURCE FRESCHE LEGACY

Grâce à Fondaction, l’entreprise de conception de logiciels Fresche Legacy a pu se racheter à uneentreprise américaine.

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FONDACTION 20 ANS DÉJÀ !L E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 J A N V I E R 2 0 1 6 H 7

QUAND NOTRE PRINCIPAL PARTENAIRE

FINANCIER A 20 ANS, ÇA SE SOULIGNE.

La Société de développement Angus

nomme la première place publique du

Technopôle Angus Place Léopold Beaulieu,

en l’honneur de l’homme visionnaire qui a créé

et dirige toujours Fondaction.

La place Léopold Beaulieu est située sur la rue Molson, au Technopôle Angus. Ph

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CFPP

La coopérative forestière de Petit Paris fêtera ses cinquante ans en 2018.

Dans le mouvement associatif québécois, lescoopératives forestières comptent parmi lesplus anciennes. Au Saguenay, celle de PetitParis est née en 1968. Alain Paradis en estle directeur. Il nous parle du passé, du pré-sent et de l’avenir de l’industrie grâce auxnouveaux débouchés qu’of fre l’exploitationde la biomasse.

M A R I E - H É L È N E A L A R I E

Cette année, à Saint-Ludger-de-Milot, ils ont dûattendre longtemps avant que l’hiver montre

le bout de son nez: «C’est pas facile en forêt, tantqu’il n’y a pas de gel, les chemins sont trop boueuxpour qu’on entre avec la machinerie», expliqueAlain Paradis, directeur général de la coopérativeforestière de Petit Paris et président de la Fédéra-tion québécoise des coopératives forestières. «Pe-tit Paris, c’est le nom de la rivière qui passe près desmunicipalités de Saint-Ludger-de-Milot et de Saint-Augustin. Au départ, elle s’appelait la Petite Péri-bonka, et les vieux la surnommaient la Petite Péri.De là, on en est venus à Petit Paris.»

Les opérations forestières de A à Z« La coopérative va fêter ses cinquante ans

dans deux ans, le compte à rebours a com-mencé », rappelle Alain Paradis. Comme plu-sieurs des plus anciennes coopératives fores-tières du Québec, la coopérative de Petit Pariss’est formée en raison de l’intérêt de regrouperdeux syndicats de chantiers de l’Union catho-lique des cultivateurs (l’ancienne UPA), celuide Saint-Augustin et celui de Saint-Ludger-de-Milot. Elle voit le jour le 6 mai 1968. La décisionde se réunir allait de soi puisque les deux syn-

dicats de chantiers d’antan, d’envergure et devocation similaires, étaient des sous-traitantspour la compagnie Price Brothers Limited. Àl’époque, ils négociaient à l’occasion un contratcommun et, souvent, ils étaient dans le mêmesecteur de coupe. Ils partageaient les coûts dechemin, de jetée, de cuisine, etc., et toutes cesraisons motivèrent le regroupement.

Aujourd’hui, la coopérative em-bauche 325 travailleurs, dont 135 ensont membres. C’est un des grands em-ployeurs de la région. La coopérativeexploite la forêt de manière tradition-nelle : « On fait toutes les opérations fo-restières de A à Z», dit Alain Paradis. Lapremière étape, c’est la planification.«C’est la filiale PPF Synergie qui gère laplanification en association avec legroupe Foresco. Là-bas, des technicienset des ingénieurs déterminent les secteursde coupe. » Viennent ensuite les autres opéra-tions : la construction de chemins, la récolte, letransport jusqu’à l’usine. Quand ces travauxsont exécutés, le service de l’aménagement fo-restier entre en jeu : «C’est ici qu’on fait les tra-vaux sylvicoles. C’est la remise en production duterritoire. On parle de scarifiage, de reboise-ment, tant manuellement qu’avec des ma-chines. » Il faut encore faire de l’éclaircie, cequi consiste à enlever les tiges les plus faiblespour laisser pousser les plus fortes.

En vue de diversifier ses activités et de veillerau développement de l’entreprise, le 15 mai1987 débute la construction d’une nouvelleusine de sciage et de rabotage qui sera inaugu-rée à l’automne de la même année. « L’annéesuivante, on a créé un partenariat avec Produitsforestiers Résolu. On a vendu 50% de nos partspour qu’ils se joignent à nous afin d’exploiter Pro-

duits forestiers Petit Paris, notre filiale de trans-formation», rappelle le directeur.

Un avenir pour la biomasseEn 1977, le gouvernement du Québec se dote

d’une politique de développement des coope ra-tives forestières. En visant la consolidation descooperatives forestières et en favorisant les fu-

sions dans le but de limiter leur nom-bre, le gouvernement reconnaît leur im-portance et leur rôle dans le developpe-ment et la formation d’une main-d’œu-vre sylvicole, ce qui est encore d’actua-lité aujourd’hui.

En 1985, c’est sous la forme d’une coo-pérative que naît la Conference descooperatives forestières du Québec,transformée depuis décembre 2005 enFédération québécoise des coopérativesforestières (FQCF), dont Alain Paradis

est le président : «Je suis dans le réseau des coopsdepuis 1992 et ça va faire 5 ans que je suis auconseil d’administration de la fédération, dont lesdeux dernières années à titre de président.»

Il y a quelques années, la FQCF a organiséune mission en Europe pour découvrir ce qu’onfaisait là-bas avec les résidus forestiers :« C’était notre préoccupation de trouver un dé-bouché à cette matière qu’on manipule, maisqu’on n’exploite pas. Notre mission nous a beau-coup inspirés », explique M. Paradis.

À la FQCF, on a mis sur pied un projet pourdévelopper la filière de la biomasse. Le serviceForêt Énergie a été mis en place pour aider lescoopératives à développer dans leur région dif-férents projets de valorisation de la biomasse.

Depuis cinq ans, Fondaction s’implique au-près de la FQCF dans le projet d’exploitation dela biomasse et de création d’un réseau d’eau

chaude souterrain. C’est dans ce contexte qu’àPetit Paris « on exploite une petite centrale dechauffe. C’est une chaudière alimentée à partirde biomasse, des résidus forestiers avec lesquelson ne peut pas faire de sciage. On chauf fe lachaudière avec un circuit d’eau chaude souter-rain qui va alimenter trois bâtiments du parc in-dustriel de Saint-Ludger-de-Milot : notre garage,le garage d’un entrepreneur et le restaurant d’uncamp forestier. C’est opérationnel depuisquelques années», explique M. Paradis.

Le but était de faire de cette centrale dechauffe une espèce de vitrine technologique.« Des réseaux de chaleur comme celui-là, onavait vu ça en Europe. Au Québec, le nôtre faitpartie des premiers. Il existe beaucoup de chau-dières alimentées à la biomasse qui chauffent desécoles et des hôpitaux, mais chauf fer plusieursbâtiments à la fois, c’est ce qui est propre à notreprojet », ajoute-t-il.

Le 12 mai dernier, Fondaction a lancé leFonds biomasse énergie en collaboration avecle gouvernement du Québec et la FQCF. Lefonds offre du financement et de l’accompagne-ment dans la réalisation de projets de chauffe.C’est le 28 octobre 2015 que le fonds a réaliséun premier investissement dans Nor forceÉnergie, une entreprise de l’Abitibi-Témisca-mingue. Cet investissement permettra d’instal-ler un nouveau système de préchauf fage del’air à la biomasse à la mine Casa Berardi. Ceprojet est une première nord-américaine. Il per-mettra à Hecla Québec, propriétaire de la mine,d’économiser du propane et d’émettre environ2700 tonnes de gaz à effet de serre de moinschaque année.

CollaboratriceLe Devoir

COOPÉRATIVE FORESTIÈRE DE PETIT PARIS

Investir dans la mise en valeur de la biomasse

Alain Paradis

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Les entreprises, peu importe leur taille, onttout intérêt à manifester de la reconnaissanceenvers leurs employés dans l’exercice quoti-dien de leurs fonctions. Fondaction s’est mon-tré intéressé par ce mode de gestion en deve-nant, en 2001, un partenaire financier de Ri-deau solutions de reconnaissance, dont lacroissance ne cesse de s’accentuer depuis cetemps.

R É G I N A L D H A R V E Y

P eter Hart, chef de la direction de Rideau, in-dique de quelle façon ce fonds de travail-

leurs a apporté sa contribution à l’évolution ra-pide de la compagnie : «En mai 2001, il est de-venu notre sixième partenaire à parts égales ; àcette époque, il y avait peut-être une cinquan-taine de personnes qui travaillaient chez nous eton en compte aujourd’hui pas loin de 275.»

En l’espace de 14 ans, la progression s’estavérée spectaculaire : « Fondaction a procédé àplusieurs investissements au sein de l’entre-prise ; je crois qu’ils se situent entre 12 et 13 de-puis le début. Au fur et à mesure que nousavons évolué, son soutien financier s’est mani-festé, de telle sor te que trois des cinq action-naires principaux ont été en mesure de prendreleur retraite en cédant des actions au fil dutemps ; le fonds détient maintenant pas loin de42 % de celles-ci dans la compagnie. »

Il y a plus, selon lui : «Quelque chose d’encoreplus important s’est produit : Fondaction nous aaidés dans notre croissance afin que nous deve-nions un chef de file, non seulement au Canadamais à travers le monde, dans notre domaine quiest celui de la reconnaissance pour améliorer lesrelations internes dans une organisation. » Ilrend à cet égard hommage à Léopold Beaulieuet son équipe : «Ils nous ont accompagnés en touttemps, autant dans les périodes difficiles que danscelles de prospérité ; il m’aurait été impossible detrouver un meilleur partenaire d’affaires.»

Au-delà de la montre en or…« Impliquer les gens pour ce qu’ils sont et leur

témoigner de la reconnaissance pour ce qu’ilsfont », lance Peter Hart, une fois le momentvenu de faire connaître la vision de Rideau surle concept de reconnaissance au travail. Il s’ex-plique : « Il y a beaucoup de monde qui croit quecelle-ci consiste à remettre à un employé unemontre en or après 25 ans de service ; ou encoreà donner à celui-ci quelque chose de tangible.Pour moi, cette reconnaissance, c’est quelquechose qui revêt un caractère plutôt abstrait ; c’estun peu comme l’amour. Avec des mots ou sans re-courir à ceux-ci, la personne se sent appréciée, re-connue et valorisée ou non, ce qui relève d’uneémotion, d’une perception. »

Il importe de former les gestionnaires sur lanécessité de transmettre cette émotion quimontre leur estime à l’endroit de la personne :

« Je dis à mes collègues chez Rideau et à Fondac-tion que notre travail est noble et se répand au-tour de nous, dans le sens que, si quelqu’un estincapable d’exprimer un pareil sentiment de re-connaissance au travail, il y a de fortes chancesqu’il en soit de même à la maison ; en donnantde la formation en entreprise sur celle-ci, de meil-leures relations se tissent en famille etdans la vie personnelle des gens. »

Rideau travaille dans ce domaine etfournit des programmes pour de trèsgrandes organisations : « Au Canada etaux États-Unis, le gâteau c’est la prime,c’est la montre ; la reconnaissance, dansce cas-là, est perçue comme le glaçage surle gâteau. En réalité, c’est le contraire quidoit se passer, et Rideau apparaît commeun chef de file parce qu’il intervient dansce sens-là.»

Il rapporte à quel point des change-ments sont apparus sur ce plan : «Quand on acommencé à œuvrer en partenariat avec Fondac-tion, on se tournait surtout vers la fabrication desécussons, des médailles et de tout ce genre dechoses, mais avec le temps et l’expérience, noussommes possiblement devenus la première entre-prise mondiale qui, dans ce domaine de la recon-

naissance, prône que celle-ci commence par lesmots ; s’il est impossible de l’exprimer autrement,n’importe quel cadeau, que ce soit une montre, uniPad ou autre, ne représente que du glaçage sansle gâteau.»

Les valeurs recherchéesLe chef de la direction de Rideau fait

valoir qu’il est nécessaire pour une en-treprise de posséder une culture « quisoit capable d’attirer, d’embaucher et deretenir du personnel ; la reconnaissanceen fait partie intégrante et c’est un desaspects majeurs de cette culture».

Pour illustrer sa pensée, il recourt àune conférence TED (Technology, En-ter tainment and Design) de RainerStrack, éminent spécialiste allemanddes ressources humaines ; il est au-jourd’hui associé principal et directeur

général au Boston Consulting Group (BCG) etil s’y penche sur la crise de la main-d’œuvreprévue pour 2030 : « Je conseille aux P.-D.G. desgrandes entreprises d’écouter ce “TED TALK”.Beaucoup d’entre eux pensent que c’est l’argentqui est primordial pour attirer du personnel com-pétent, mais c’est faux. »

Il ressort d’une recherche du BCG, auprèsde 200 travailleurs, que les raisons qui les mo-tivent dans leur quête d’un emploi sont d’untout autre ordre, comme le laisse voir PeterHart : « En premier lieu, ils recherchent l’estimepour l ’e f for t fourni en milieu de travail ;deuxièmement, ils souhaitent avoir des rela-tions harmonieuses avec leurs collègues ; troi-sièmement, ils sont en quête de l’équilibre tra-vail-famille ; et quatrièmement, ils veulent s’as-surer de tisser de bonnes relations avec leurs su-périeurs. Dans la liste de leurs priorités, lapaye occupe la huitième place. »

Il tient ce discours au sujet de ces témoi-gnages recueillis : « Je dis souvent que, si vousavez des gestionnaires qui pensent que les genstravaillent seulement pour la paye, vous allezvous retrouver avec des employés mercenairesau lieu d’employés patriotes qui veulent profiterdu leadership et d’une vision vers l’avenir. Ondonne justement des formations aux gestion-naires pour leur montrer comment il est pri-mordial, dans ce sens-là, d’apprécier les gensqui les entourent. »

CollaborateurLe Devoir

Un partenaire d’affaires idéal pour Rideau

VGAJIC ISTOCK

L’entreprise Rideau s’est spécialisée dans le concept de reconnaissance au travail.

Peter Hart

CAISSE D’ÉCONOMIE SOLIDAIRE DESJARDINS

Un outil essentiel et un partenaire naturel

T H I E R R Y H A R O U N

R églons une chose d’entréede jeu : non seulement

Marc Picard dirige la Caisse

d’économie solidaire Desjar-dins (la Caisse), mais il estégalement membre de l’exécu-tif de Fondaction. On auracompris que ces deux orga-

nismes sont de la même farine.« Pour moi, Fondaction c’estd’abord un organisme que jequalifierais d’avant-gardiste enmatière d’action solidaire. Enfait, ce qui est intéressant avecFondaction, c’est qu’on fait par-tie de la même famille. Ce sontdeux outils d’intervention éco-nomique que la CSN a dévelop-pés avec le temps. » Marc Pi-card ajoute que Fondaction in-ter vient dans des secteurs àrisque, tant dans le secteur de« l’économie collective que dansle secteur privé».

L’approche de Fondactionsur le plan du développementéconomique s’appuie sur lesprincipes qui guident le déve-loppement durable, dit-il, « cequi se rapproche de nos valeurs,c’est-à-dire des valeurs qui sontplus inclusives, plus sociale-ment responsables et qui respec-tent l’environnement».

À bien vous entendre, onne pourrait pas se passer deFondaction ? « Non. C’est unoutil fondamental pour notresystème [économique] à nousen qualité d’outil collectif. Il ya peu de gens dans le secteurfinancier qui investissentaussi fermement dans des va-leurs de développement. »

Bien. Mais quand on lui in-dique que la notion de dévelop-

pement durable veut tout direet rien dire à la fois et qu’ellesert aussi à faire du greenwa-shing, et qu’on lui demande àce titre en quoi Fondaction sedémarque dans ce grand fouil-lis, il réplique ainsi : «C’est la co-hérence. On le remarque sou-vent dans certaines institutionsfinancières — sans les nommer— qui vont développer des pro-duits [étiquetés socialementresponsables], et ce, dans unensemble de produits, et qui sontparfois en contradiction avec lesproduits socialement responsa-bles qu’elles offrent. Alors que, àFondaction de même qu’à laCaisse, nous sommes des orga-nismes qui se consacrent exclusi-vement à leur cause. On ne peutpas avoir plus vrai que Fondac-tion et la Caisse. Ça fait partiede notre ADN.»

Hors des sentiers battusChose cer taine, ajoute-t-il,

Fondaction va là où d’autresn’osent pas aller. « Et je vousdirais même que ce qui est in-téressant avec Fondaction,c’est que non seulement cet or-ganisme soutient financière-ment des initiatives, mais il vaaussi aider à créer des initia-tives », fait valoir M. Picard,qui note tout de même au pas-sage que, s’ i l y a des orga-

nismes qui ont sensiblementla même approche, ce sont leFonds de solidarité FTQ ouencore le Mouvement Desjar-

dins, « qui a son propre fondsde capital de risque ».

Pour le directeur général de la Caisse d’économie solidaireDesjardins, Marc Picard, Fondaction est un outil dont notresystème économique ne pourrait pas se passer tellement il ré-pond à un créneau où peu d’institutions osent s’engager.Conversation avec ce dirigeant au discours progressiste.

DENIS GENDRON

Marc Picard souhaite que le monde de la finance emboîte le pas àFondaction et que l’investissement en développement durable quele fonds préconise soit pleinement reconnu.

VOIR PAGE H 11 : OUTIL

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Fièrement appuyée et encouragée par Fondaction Fièrement appuyée et encouragée par Fondaction

Merci d’avoir pris part au développement de la gestion des actions internationales

au Québec.

Joyeux20 ans

Fondaction !

N’eût été Fondaction, le populaire Hôtel deglace de Québec n’aurait probablement ja-mais vu le jour. Car, bien qu’il soit au-jourd’hui considéré comme un succès touris-tique, à l’époque où M. Jean Desbois, son fon-dateur, cherchait désespérément un finance-ment de démarrage, personne n’osait vrai-ment investir dans ce projet emballant, maiséphémère. Croyant fermement au potentiel del’entreprise, le fonds de travailleurs de laCSN, lui, en a eu l’audace.

É M I L I E C O R R I V E A U

E n septembre 2000, M. Desbois et ses as-sociés rencontraient pour la première fois

le président-directeur général de Fondaction,M. Léopold Beaulieu, afin de lui présenterleur projet. À cette période, cela faisait déjàprès de quatre ans qu’i ls essayaient deconvaincre des investisseurs de les appuyer,et ce, sans grand succès.

«Au moment de la rencontre, j’avais déjà an-noncé depuis trois semaines à tous nos parte-naires que je jetais l’éponge, confie M. Desbois.Ça faisait quatre ans que j’essayais. À chaqueéchec, je me questionnais. J’en étais venu à laconclusion qu’il était temps de passer à autrechose. Si j’avais décidé de tout de même rencon-trer M. Beaulieu, c’était surtout parce que plu-sieurs personnes s’étaient impliquées dans le pro-jet, notamment du côté de l’Office du tourisme. Jeme disais que je leur devais de compléter la dé-marche avant de passer à autre chose. Maisj’étais vraiment prêt à tourner la page. »

Pour tan t , M. Desbo is é ta i t tou joursconvaincu de l’énorme potentiel de son idée,car quelques années plus tôt, une expériencepersonnelle lui en avait donné la preuve…

De l’igloo à l’hôtel« C’était en 1996. J’avais pris l’habitude de

construire un igloo dans ma cour. Mes enfants, quiétaient très jeunes à l’époque, adoraient ça. Unsoir où on annonçait une nuit sibérienne, mes gar-çons avaient décidé que c’était le moment d’inau-gurer l’igloo et de dormir dedans. J’ai eu l’idéed’appeler les médias locaux pour leur proposer defaire un reportage sur le sujet», se souvient le pré-sident-directeur général de l’Hôtel de glace.

Quelques heures plus tard, TQS répondait àl’appel. Un des employés du réseau avait décelédans cette invitation inusitée une bien belle fa-çon de conclure le bulletin de nouvelles de finde soirée.

« Une équipe de tournage s’est installée dansma cour pour faire un repor tage, préciseM. Desbois. J’étais content d’avoir réussi à atti-rer l’attention d’un média avec mon idée, mais jepensais que ça s’arrêterait là. Le lendemain ma-t in , c ’ é t a i t L e J o u r n a l d e Q u é b e c qu itéléphonait ! »

S’en est suivie une réaction en chaîne. Pen-dant plus d’une semaine, le téléphone des Des-bois n’a pas dérougi : les radios, les journaux, latélévision… Tout y est passé !

«C’est ce qui m’a fait réaliser que j’avais unebonne idée entre les mains, relate M. Desbois.Sur le plan touristique, je constatais que ça pou-vait être très intéressant de proposer des nuitéesdans des igloos. J’ai donc commencé à monter unprojet d’entreprise pour le faire. »

Cependant, alors qu’il était en pleine élabora-tion de son plan d’affaires, un ami l’a bousculéen lui proposant une lecture tirée d’un Reader’sDigest. Très bref, l’article en question portait

sur un hôtel de glace suédois.« Il voulait me taquiner. Il m’a dit que mon

idée était déjà dépassée. Au lieu de me découra-ger, ça m’a inspiré ! Je me suis dit que ma petiteentreprise d’igloos allait être l’incubateur quime mènerait à la création d’un hôtel de glace »,raconte l’homme.

Financer un capital qui fondMais contrairement à ce qu’espérait

M. Desbois, convaincre des financiers d’in-vestir dans un hôtel qui ouvre ses portes enjanvier et qui fond au printemps ne s’est pasavéré une mince tâche.

«Ce n’est pas parce que nous n’avions pas faitnotre travail : des études de faisabilité avaient étémenées, le plan d’af faires était monté et nousavions trouvé des partenaires qui étaient prêts ànous appuyer. Nous avions conclu une entente deprincipe avec la SEPAQ pour le site de l’hôtel. Cequi restait à boucler, c’était le financement pourle démarrage, mais tout ce que nous pouvions of-frir aux investisseurs, c’était une promessed’achalandage», signale M. Desbois.

Pour la grande majorité, il s’agissait d’un paritrop risqué. Toutefois, les gestionnaires de Fon-

daction ont fait preuve de plus d’audace. « Jepense que, pour eux, c’était un projet qui sortaitde l’ordinaire et qui avait le potentiel de permet-tre au fonds de se démarquer, note le P.-D. G. del’Hôtel de glace. Il faut se rappeler qu’à ce mo-ment-là le fonds n’était pas encore très connu.»

Ainsi, quelques jours à peine après leur ren-contre avec M. Beaulieu, M. Desbois et ses par-tenaires recevaient une lettre d’offre de finan-cement de Fondaction. On leur proposait no-tamment un investissement initial de 250 000 $pour le démarrage et la construction du pre-mier hôtel, en plus de la constitution d’unconseil d’administration auquel siégerait unmembre du fonds.

« Moi qui étais prêt à tout arrêter, j’ai finale-ment décidé de plonger», confie le fondateur del’hôtel.

Un précieux partenariatGrâce à cet appui, l ’Hôtel de glace a pu

commencer ses activités dès janvier 2001.Mais, bien que celui-ci ait connu du succèslors de cette première édition, il aura quandmême fallu quelques années avant qu’i lpuisse jouir d’une notoriété suf fisante pourassurer sa pérennité.

Or, tout au long de ce cheminement, Fondac-tion n’a jamais cessé d’appuyer l’entreprise.D’ailleurs, en une quinzaine d’années de colla-boration, ce dernier a investi près de 2,8 mil-lions de dollars sous diverses formes dansl’Hôtel de glace.

«Aujourd’hui, on se porte très bien, mais il y aeu des années plus difficiles que d’autres. L’entre-prise a nécessité que ses investisseurs soient pa-tients, et le fonds l’a été », signale M. Desbois.

Alors que Fondaction s’apprête à célébrerson 20e anniversaire, le fondateur de l’Hôtel deglace tient aussi à souligner que, sans ce pré-cieux partenaire, nombre d’entreprises commela sienne n’auraient pas pu prospérer.

«C’est un acteur d’importance dans le dévelop-pement socio-économique québécois, relève-t-il.Les valeurs qu’il véhicule, notamment celles desolidarité et de responsabilité sociale, sont remar-quables et dif férentes de celles des investisseurstraditionnels. Nous sommes sincèrement trèsheureux de pouvoir compter parmi les membresde la grande famille de Fondaction. »

CollaboratriceLe Devoir

HÔTEL DE GLACE DE QUÉBEC

L’audace de financer l’éphémère

YAN DOUBLET

Grâce à l’appui de Fondaction, l’Hôtel de glace a pu commencer ses activités dès janvier 2001.

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20 ANS DÉJÀ !L E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 J A N V I E R 2 0 1 6H 10

A R N A U D S T O P A

C onstitué en 2009, ÉcotechQuébec met en relation de

jeunes pousses, des financierset des entreprises utilisatricesde technologies d’innovationsà saveur écologique.

Écotech Québec est unegrappe, c’est-à-dire un rassem-blement de l’écosystème desinnovations écologiques auQuébec. Dans cet écosystèmese retrouvent certes des firmesver tes, mais également desscientifiques, des compagniesde technologies associées àl’environnement et l’énergie,ainsi que des investisseurs.

L’or gan isme cher che àconseiller les décideurs poli-tiques sur les politiques pu-bliques qui rendraient lesconditions plus propices pourle développement des techno-logies propres. Mais sa mis-sion principale est d’accompa-gner les sociétés en démar-rage dans leur progression,afin qu’elles puissent se finan-cer et commercialiser leurs in-novations, tant au Québec qu’àl’international.

« En ce moment, on regardedes façons d’aider les jeunespousses en octroyant un fondsd’amorçage pour les aider àconcrétiser leurs idées, dit De-nis Leclerc, directeur générald’Écotech Québec. On aideaussi les entreprises qui cher-chent des bancs d’essai, des vi-trines pour leurs innovations.Le troisième enjeu, c’est cequ’on appelle la commerciali-sation des innovations : il fautqu’elles soient prêtes à êtreutilisées. On les rapprocheainsi des utilisateurs poten-tiels. De plus, il faut permet-tre à nos entreprises inno-vantes de découvrir de nou-veaux marchés, que cela soitici ou à l’étranger. »

Soutien de FondactionFondaction a joué un rôle

impor tant dans la créationd’Écotech Québec. Membrefondateur en 2009, l ’orga-nisme reste toujours actif enson sein. « L’ADN de Fondac-tion colle très bien avec les ob-jectifs de la grappe, c’est-à-direde développer davantage les in-novations. Oui, réduire l’im-pact sur l’environnement ; oui,réduire les émissions de gaz àef fet de serre ; mais oui aussi,créer de la richesse, créer desconditions pour le développe-ment économique du Québec,tout en étant responsables dupoint de vue environnemental.En plus, Fondaction investitdans des entreprises avec uneoptique de “capital patient” ;ils sont là pour le développe-ment des entreprises. Ils ne

sont pas à la recherche d’un re-tour immédiat, mais ont plutôtune vision à moyen et longterme, alors c’est ce que çanous demande au Québeclorsqu’on veut développer desinnovations. »

Denis Leclerc estime que,plus que Fondaction, c’est sonprésident Léopold Beaulieuqui a animé l’action de son ins-titution au sein de la grappe.« Par sa vision, il a été impor-tant pour nous. Dès le début, ila été — et est toujours — enpremière ligne pour participeractivement aux activités de lagrappe. Tous les membresd’Écotech Québec lui doiventun très grand respect pour l’en-semble de ses ef forts au Québecen matière d’économie verte. »

Maintenir la réputationDe retour de la conférence

des parties de Paris (COP21),qui a vu émerger un accordde limitation de l’augmenta-tion de la température mon-diale « bien en deçà » de 2 de-grés au-dessus du seuil préin-dustriel, Denis Leclerc estimeque le Québec a tenu sonrang de leader dans la luttecontre le réchauf fement cli-matique. « Le Québec, par sesactions, par ses intentions,montre la voie. C’est un exem-ple à suivre, selon Al Gore[vice-président des États-Unisde 1992 à 2000 et Prix Nobelde la paix 2007]. Il désignait leQuébec comme un exemple àsuivre pour d’autres pays, d’au-

tres États fédérés. Après, tousles ef for ts que le premier mi-nistre [du Québec, PhilippeCouillard] et le ministre del’Environnement [David Heur-tel] ont faits à Paris, ça ne faitque bonifier la réputation quele Québec a à l’étranger, maisaussi à l’intérieur du Canada.Il y avait eu des rencontres en-tre les premiers ministres desprovinces et la ministre del’Environnement [Catherine]McKenna, et c’était unanime :l’ensemble des premiers minis-tres des provinces et des terri-toires louangeaient les ef for tset le leadership du Québec. »

Bien que le gouvernementlibéral actuel soit accusé de ti-rer la couette dans les deuxsens — en prônant l’exempla-rité écologique, d’un bord, ensoutenant les projets de pros-pection d’énergies fossiles oude la cimenterie de Port-Da-niel, qui émettra 10 % des GESdu secteur industriel d’ici2020, de l’autre —, celui quiest aussi président de l’Inter-national Cleantech Network,une autre grappe sise à Co-penhague, souhaite relativi-ser : « Personne n’est parfait. Ily a aussi des situations quisont présentes et pour les-quelles des groupes d’intérêtsou même le gouvernement peu-v e n t a v o i r d e s o p i n i o n scontraires. Alors, s’il y a desprojets qui légalement peuventse poursuivre, il faut utiliser leprocessus démocratique, leslois et les règlements qui s’ap-

pliquent ici au Québec. […]Regardez Copenhague. Tout lemonde dit Copenhague, c’est laville la plus verte, c’est fantas-tique. Mais quand tu regardesde plus près, ce qu’ils font, c’estbrûler les sacs-poubelle pourfaire de l’énergie électrique.Alors qu’ici, c’est illégal defaire ça. Tandis qu’au Dane-mark, c’est légal, et c’est l’unede leurs sources d’électricité.Est-ce que ça veut dire que la

réputation de Copenhague estdésastreuse ? Non. Le plus im-portant, c’est la direction verslaquelle on va pour pouvoir at-teindre les objectifs. C’est çaqui fait qu’on est crédible ounon à l’international. »

C’est dans cette dispositionqu’Écotech doit s’intégrer,afin de surveiller l’applicationdans le réel de l’accord de Pa-ris. « On accepte l’accord deParis, maintenant il faut le

mettre en œuvre. Qu’est-cequ’on va faire qui va nous per-mettre d’atteindre les objectifsqu’on s’est donnés ? L’ensemblede ces feuilles de route, inévita-blement, ça va inclure les tech-nologies propres, parce qu’ellessont le pivot des ef forts dans cedomaine-là. C’est une belle op-portunité pour nous. »

CollaborateurLe Devoir

ÉCOTECH

Au centre de l’écosystème des innovations écologiques

dit-on… », raconte le P.-D.G. Kulakowski. Quiplus est, le simple fait de proposer à l’em-ployeur de se racheter revient pratiquement àde l’insubordination !

« Nous avons tenté de négocier durant desannées, mais en vain », relate amèrementM. Kulakowski. C’est alors qu’entre en scèneFondaction.

Le fonds de travailleurs de la CSN agit detrois façons : d’abord comme conseiller straté-gique pour mener à bien l’opération, puiscomme intermédiaire pour effectuer les négo-ciations de rachat et enfin comme soutien finan-cier aux travailleurs de Speedware.

C’est finalement le 16 avril 2010 que l’entre-prise américaine accepte le rachat. Andy Kula-kowski se souvient encore vivement du mo-ment où il a glissé d’un bord à l’autre de la tablele chèque qui scellait la transaction. Et StephanMorency raconte qu’au sortir des bureaux oùs’est faite la transaction, M. Kulakowski s’estsoudainement mis à tituber, comme pris de ver-tige. « You bought back my company », lui a-t-ilmurmuré, presque incrédule : « Vous avez ra-cheté ma société. »

De Speedware à Fresche LegacyL’entreprise a alors pu repartir sur de nou-

velles bases, en se donnant un nouveau nom :Fresche Legacy, soit la combinaison des mots« frais » en vieux français et « héritage » en an-glais, puisque ses services permettent de pré-server l’héritage informatique accumulé par lesentreprises. Cette appellation témoigne enmême temps du caractère bilingue de ces pas-sionnés d’informatique.

«Nous modernisons les anciens systèmes infor-matiques qui fonctionnent avec des langagescomme COBOL et RPG et que les jeunes neconnaissent plus », explique Andy Kulakowski.

Les entreprises modernisées peuvent dès lorsintégrer dans leurs activités les nouvelles tech-nologies telles que les cellulaires, les plate-formes mobiles, les réseaux sociaux, lesnuages, etc. «We’re “freshing up” les anciens sys-tèmes, d’où notre nouveau nom», lance en riantle P.-D.G. de Fresche Legacy.

«Une autre belle facette de notre histoire, pour-suit-il, c’est le fait que nous sommes devenus uneentreprise détenue par ses employés. » Encore là,souligne-t-il avec empressement, Fondaction aaidé la direction à mettre en place une coopéra-tive de travailleurs actionnaires (CTA).

« Nous désirions que nos employés bénéfi-cient eux aussi des succès de l’entreprise, ex-plique le P.-D.G. Nous avons donc mis enplace un régime qui fait en sorte que nos em-ployés aient désormais des parts dans l’entre-prise. » Or, ces cinq dernières années, la va-leur de leurs parts a doublé, précise-t-il. « Etnous avons une vision d’avenir et un tas deprojets… » lance Andy Kulakowski. FrescheSolutions est d’ailleurs reconnue mondiale-ment comme un leader en technologies del’information.

Il insiste aussi beaucoup pour dire que Fon-daction est un véritable partenaire d’af fairespour son entreprise. «Fondaction siège à notreconseil d’administration et agit auprès de nouscomme conseiller stratégique. Leur aide nous estvraiment extraordinairement précieuse ! »

Quant à l’«expérience américaine», Andy Ku-lakowski dit en tirer une vraie leçon. « J’encou-rage maintenant for tement tous les entrepre-neurs québécois à se développer par eux-mêmes,en suivant leur vision, et à utiliser les leviers definancement disponibles au Québec. Vous savez,on a ici tout ce qu’il faut pour faire croître sonentreprise, insiste-t-il. Et tout entrepreneur doitéviter de se faire séduire par une entreprise amé-ricaine qui lui promettra une belle croissance…mais qui va plutôt le tuer ! »

CollaborateurLe Devoir

SUITE DE LA PAGE H 6

FRESCHE

ÉRIC FEFERBERG AGENCE FRANCE-PRESSE

L’installation artistique Ice Watch d’Olafur Eliasson a été entièrement réalisée avec des parties de lacalotte glacière du Groenland et déposée devant le Panthéon lors de la COP21.

SOURCE ÉCOTECH

Denis Leclerc estime qu’Écotech Québec doit beaucoup auprésident de Fondaction, Léopold Beaulieu.

ZORAN ZEREMSKI ISTOCK

Écotech Québec est une grappe, c’est-à-dire un rassemblement de l’écosystème des innovationsécologiques au Québec. Dans cet écosystème se retrouvent certes des firmes vertes, mais égalementdes scientifiques, des compagnies de technologies associées à l’environnement et l’énergie, ainsi quedes investisseurs.

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FONDACTION 20 ANS DÉJÀ !L E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 3 E T D I M A N C H E 2 4 J A N V I E R 2 0 1 6 H 11

Fondé en 2004, Hexavest estune firme de gestion de por-tefeuilles d’actions mondialespour des investisseurs insti-tutionnels. Fondaction lui aconfié la gestion de son porte-feuille d’actions internatio-nales. Mais la relation entreles deux remonte à la créa-tion de Fondaction.

P I E R R E V A L L É E

«E n 1995, raconte Vi-tal Proulx, prési-dent d’Hexavest, je

travaillais pour les Conseillers fi-nanciers du Saint-Laurent oùl’on m’avait confié la gestion dusecteur des actions mondiales. Àsa création, Fondaction a appro-ché les Conseillers du Saint-Lau-rent afin de leur confier la ges-tion de leur portefeuille d’actionsinternationales et j’ai donc hé-rité du dossier. Lorsquej’ai fondé en 2004 Hexa-vest, Fondaction m’afait confiance et j’ai puconserver la gestion deleur por tefeuille d’ac-tions mondiales. Pourune nouvelle entreprisequi démarrait comme lanôtre, c’était un bel en-couragement. On peutdire que ma relationave c Fondac t i on amaintenant vingt ans et ce n’estpas seulement une relation d’af-faires puisqu’il y a aussi une di-mension personnelle.»

Quelle est la nature du por-tefeuille d’actions mondialesde Fondaction ? «C’est un por-tefeuille extrêmement diversifié.Il contient des titres en prove-nance du Canada, des États-Unis, mais aussi de plusieurspays européens et même de paysémergents. »

À propos d’HexavestLes actifs gérés par Hexavest

totalisent 18 milliards de dol-lars, dont 11 milliards sont desactifs hors Canada. «Notre ap-proche est très diversifiée sur lesmarché s é t range r s . Noussommes présents aux États-Unis,en Europe, en Asie et dansquelques pays aux économiesémergentes. Au fond, noussommes présents un peu partoutsur la planète dans la mesure oùnous considérons qu’il s’agit d’unbon endroit où investir. Notredéfi, c’est de gérer à l’interne, iciau Québec, des actifs mon-diaux. » Ces actifs sont essen-tiellement des actions d’entre-prises inscrites en Bourse,Hexavest ne s’intéressant pasaux titres à revenu fixe, tels lestitres obligataires.

La clientèle d’Hexavest estpresque exclusivement celledes investisseurs institution-nels. « On peut dire que 99 %de nos clients sont des investis-seurs institutionnels, parexemple, des fonds de retraiteou des institutions commeFondaction. Par contre, nousn’of frons aucun fonds com-mun de placement aux inves-tisseurs individuels. »

Un processus de sélection différent

Une des responsabil itésd’un gestionnaire de por te-

feuille est de sélectionner lestitres qui composeront leditportefeuille. Chez Hexavest,on a développé à l’interne unmode de sélection propre àl’entreprise et qui se différen-cie du mode de sélection clas-sique. « Je ne dis pas que notremode de sélection est supérieurau mode de sélection tradition-nel. On peut obtenir d’excel-lents rendements avec le modeordinaire. Mais notre mode desélection fonctionne bien pournous et, jusqu’à présent, nousavons toujours obtenu les ren-dements escomptés. »

Règle générale, un ges-t ionnaire de por tefeui l lechoisit d’abord des t itres,c’est-à-dire les actions desentreprises qui, selon lui ,donneront le rendement es-compté. Chez Hexavest, onfonctionne plutôt à l’enverset l ’on nomme ce mode desélect ion « approche top-down » , ou du haut vers le

bas.« Chez Hexavest, on

commence par choisirla région. Quel en-droit sur la planète,croyons-nous, of fre unpotentiel d’investisse-ment ? Une fois la ré-gion choisie , on re -garde quels sont lessecteurs économiquesforts de cette région etlesquels d ’entre eux

présentent un meilleur poten-tiel d ’investissement. » Parexemple, si la région choisieest l ’Allemagne, on exami-nera les dif férents secteurséconomiques qui y sont pré-sents, automobile, secteurmanufacturier, services, etc.

«Une fois que l’on a ciblé lessecteurs et fait nos choix, on re-garde ensuite quelles sont lesentreprises qui composent cesecteur. C’est à ce moment-làque l’on commence à choisir lestitres des entreprises. Par exem-ple, si je choisis le secteur phar-maceutique, et qu’on y trouvehuit entreprises que l’on jugeper formantes, on investiraalors dans cinq de ces huit ti-tres, de manière à nous diversi-fier même à l’intérieur du sec-teur économique. »

Investissementresponsable

En 2012, Hexavest est de-venu signataire des Prin-cipes pour l’investissementresponsable (PRI), ce qui im-plique que les considérationsenvironnementales, socialeset de gouver nance sontprises en compte lorsqu’ondécide de choisir un titre.« C’est une tendance actuelledu marché, mais quand vousavez un par tenaire commeFondaction qui vous poussetoujours à hausser vos exi -gences, ça vous oblige à fairemieux. On aurait sans douteadhéré aux PRI, mais la pré-sence de Fondaction nous aforcés à augmenter la vitesseà laque l l e on e s t devenus signataires. »

Cette exigence de Fondac-tion a même amené Hexavestà développer un nouveau pro-duit financier. « À la demandede Fondaction, nous sommesen train de développer un por-tefeuille d’actions mondiales

ne comprenant aucun titred’entreprises de production etde distribution de combusti-bles fossiles. C’est la premièrefois que nous montons un por-tefeuille où nous pratiquonsl’exclusion. Et, dans le secteurde l’énergie, l ’exclusion descombustibles fossiles élimineprès de 90 % des entreprisesénergétiques. Il ne reste doncque les entreprises œuvrantdans le domaine des énergiesrenouvelables. »

Ce nouveau produit finan-cier, développé à l ’ inter negrâce à la demande de Fon-daction, présente, selon VitalProulx, un bon potentield ’expor tat ion. « Le por te -feuil le que nous préparonspour Fondaction n’est pas en-core complété, mais nous sen-tons un intérêt grandissantpour ce genre de produit d’in-vestissement. Je pense notam-ment aux fondations universi-taires et aux fonds de retraiteuniversitaires, ou tout autreinvestisseur institutionnel quiveut, progressivement maisassurément, se retirer de toutinvestissement lié de près oude loin à toute forme d’éner-gie fossi le . » Comme quoi ,Fondaction n’est pas seule-ment un client, mais bien unpartenaire.

CollaborateurLe Devoir

HEXAVEST

Gérer les actifs mondiaux

Que souhaitez-vous à Fon-daction au cours des vingt pro-chaines années ? « Ouaiiiis…c’est une bonne question », ad-met-il et, après dix secondesde silence, il lance ceci : «Quele développement durable quepréconise Fondaction [au titrede ses engagements sur leplan des investissements] soitreconnu dans l’ensemble dumonde de la finance. Et queFondaction ne soit pas justeperçu comme un organisme no-vateur, mais ait tellement bienfait son travail que d’autres ac-teurs lui emboîteront le pas. »

Les collaborationsSur le plan des liens finan-

ciers, la Caisse et Fondactionsont des partenaires complé-mentaires. La Caisse fait duprêt bancaire traditionnel etFondaction of fre un finance-ment non garanti. Par ailleurs,voici quelques exemples de

projets auxquels ces deux or-ganismes ont contribué pourles mener à bon port au coursdes dernières années, selon ladocumentation qui nous a étéfournie par la Caisse. Ainsi, ilsont investi dans la Société dedéveloppement Angus. Aprèsvingt ans d’existence, la SDAest devenue le plus importantpromoteur immobilier del’économie sociale au Québec.En collaboration avec Fondac-tion, la Caisse a pris part au fi-nancement de son Techno-pôle, un exemple de revitalisa-tion urbaine qui fait école. Ilsont investi aussi dans la CoopCarbone qui accompagne lesentreprises québécoises quiveulent réduire leurs émis-sions de gaz à effet de serre.La Coop s’est aussi donnépour mission de générer desprojets de réduction des gaz àeffet de serre au Québec.

Nor force Énergie est uneautre initiative qui unit lesdeux organismes. C’est unprojet novateur en énergie debiomasse forestière : une tech-nologie de préchauf fage de

l’air visant à répondre aux be-soins énergétiques d’une mined’or souterraine, Éclat Qué-bec. En remplaçant une partiedu préchauf fage, Nor forcecontribue à réduire les émis-sions de gaz à effet de serre.La mine est située à 100km aunord de La Sarre.

À propos de la CaisseLa Caisse est la principale

institution financière spéciali-sée en économie sociale et eninvestissement responsable auQuébec. Elle compte 14 794membres, dont 3040 coopéra-tives, organismes à but non lu-cratif, syndicats et entreprisesprivées socialement engagéesainsi que 11 754 citoyens. Au31 décembre 2014, son actifs’élevait à près de 757,9 mil-lions de dollars, ce qui laclasse parmi les chefs de filedes 360 caisses du Mouve-ment Desjardins, toujours se-lon la documentation qui nousa été fournie.

CollaborateurLe Devoir

SUITE DE LA PAGE H 8

OUTIL

MARIE-PIER FRAPPIER LE DEVOIR

À la demande de Fondaction, Hexavest développe un portefeuille d’actions mondiales ne comprenant aucun titre d’entreprises deproduction et de distribution de combustibles fossiles.

Vital Proulx

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* Crédits d’impôt de 30 % pour les cotisations effectuées avant le 29 février 2016 si utilisées pour l’année d’imposition 2015. Il s’agit d’un placementdont la valeur et le rendement fluctuent; le passé n’est pas indicatif du futur. Ces titres sont placés au moyen d’un prospectus contenant de l’information détaillée importante à leur sujet, notamment sur les frais. Avant d’investir, veuillez consulter le prospectus sur fondaction.com.

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