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Chirurgie néonatale des fentes labiales : sécurité anesthésique et résultats chirurgicaux

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ANNPLA-948; No. of Pages 6

ARTICLE ORIGINAL

Chirurgie néonatale des fentes labiales : sécuritéanesthésique et résultats chirurgicauxNeonatal cleft lip repair: Perioperative safety and surgical outcomes

N. Calteux a,*, N. Schmid a, J. Hellers a, S. Kumpan b, B. Schmitz b

a Service de chirurgie plastique reconstructrice et esthetique, centre hospitalier de Luxembourg, 4, rue E. Barble,L-1210 Luxembourg, Grand-Duche de Luxembourgb Service d’anesthesie—reanimation, centre hospitalier de Luxembourg, 4, rue E. Barble, L-1210 Luxembourg,Grand-Duche de Luxembourg

Recu le 17 fevrier 2013 ; accepte le 18 mars 2013

MOTS CLÉSAnesthésie néonatale ;Chirurgie néonatale ;Fente labio-palatine ;Fente faciale ;Malformation lèvre

RésuméIntroduction. — Les chronologies opératoires des malformations labio-maxillo-palatines ne fontpas l’objet d’un consensus international. Depuis 20 ans, nous proposons à nos patients une priseen charge précoce que nous argumentons avec une correction chirurgicale plus immédiate de lamalformation de la lèvre qui permet une meilleure intégration du bébé au niveau familial. Derécentes études tendent à remettre en cause cette pratique néonatale.Patients et methode. — Nous avons tenu à vérifier lors d’une étude rétrospective, l’innocuitédes interventions précoces au niveau anesthésique et chirurgical, ainsi que les résultats obtenuspar cette pratique pendant les 20 dernières années pour une série de 42 enfants opérés de lalèvre avant le 28e jour après leur naissance. Tous ont été opérés par le même chirurgien senior.Resultats. — Les bébés sont opérés généralement au cinquième jour de vie. Le temps d’inter-vention chirurgical est de 45 minutes pour les fentes unilatérales et de 70 minutes pour lesatteintes bilatérales. L’alimentation par voie orale est reprise le soir du jour opératoire. Ladurée d’hospitalisation médiane est de quatre jours. Les résultats nous montrent l’absence decomplication anesthésique. Quatre enfants ont bénéficié d’une correction secondaire de lalèvre.Conclusion. — Le risque anesthésique et chirurgical des interventions labiales précoces est trèslimité à condition de pouvoir bénéficier d’un environnement médico-soignant multidisciplinaire,spécialisé dans la prise en charge des enfants opérés en période néonatale et pouvant assurer unesurveillance postopératoire adéquate. Le taux de complications est très faible.# 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Annales de chirurgie plastique esthétique (2013) xxx, xxx—xxx

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (N. Calteux).

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

0294-1260/$ — see front matter # 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Calteux N, et al. Chirurgie néonatale des fentes labiales : sécurité anesthésique et résultats chirurgicaux. Ann ChirPlast Esthet (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2013.03.004

http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2013.03.004

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KEYWORDSCleft lip and palate;Facial cleft;Lip malformation;Neonatal anesthesia;Neonatal surgery

Summary

Introduction. — There is no international consensus on timing for surgical repair of cleft lip andpalate. We argue that neonatal timing for repair of the lip deformity allows a better integrationof the baby in his family and is of major support for the parents. Recent studies tend to challengethis neonatal practice.Patients and methods. — We want to study retrospectively the perioperative safety and thesurgical outcomes of this procedure over the past 20 years in a series of 42 non-selected babieswho had labial repair during the first four weeks of their life. All of them have been operated bythe same senior surgeon.Results. — Median operative time is 45 minutes for unilateral cleft and 70 minutes in case ofbilateral malformation. Oral feeding is initiated at the end of the operative day. Children’shospital stay is four days. The results show no anaesthetic complication. Four children hadsecondary lip correction.Conclusion. — The risk of anaesthetic and surgical interventions limited to the lip before the ageof 28 days is very low in a medical care environment specialized in neonatal surgery andpostoperative care. The over all complication rate is very low.# 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

2 N. Calteux et al.

Introduction

Les nombreux articles de la littérature scientifique montrentqu’il n’y a toujours pas de consensus unanimement acceptésur la chronologie de la réparation des fentes labio-palatines.Les défenseurs de la chirurgie néonatale pour la correctionde la malformation de la lèvre basent leur argumentation surune amélioration de la croissance d’une partie du massiffacial, une adaptation plus rapide à l’allaitement ou à lasuccion, une meilleure intégration socio-familiale del’enfant et le soutien psychologique de la famille. Ils rap-portent un haut degré de sécurité au niveau de l’opération oude l’anesthésie [1—7].

Les opposants mettent en avant une croissance facialealtérée [8—10], le risque anesthésique, ainsi que les diffi-cultés techniques liées à la taille de l’enfant et à la matura-tion des tissus.

Le Grand-Duché de Luxembourg, avec ses 5639 naissancessur 511 840 habitants en 2011 ne présente qu’un nombrelimité d’enfants qui naissent avec une fente labiale ou labio-palatine [11]. La prévalence en Europe selon les donnéesd’EUROCAT, basées sur un registre de 23 pays, serait de8,07 cas par 10 000 naissances pour la période 2006 à 2010[12].

Depuis 1989, nous proposons aux parents une prise encharge précoce de la malformation. Jusqu’aujourd’hui,cette pratique est devenue systématique dans notre ser-vice. L’option pour un programme thérapeutique avec unechronologie déterminée doit être bien argumentée etfondée.

Nous avons analysé une série de cas opérés en périodenéonatale entre 1992 et 2012 afin d’évaluer les résultatsesthétiques et fonctionnels de la chirurgie précoce de lapartie labiale de la malformation et l’innocuité de l’acteanesthésique.

Patients et méthodes

Nous avons examiné rétrospectivement 42 enfants nés entre1992 et 2012 et opérés en période néonatale, avant le26e jour de vie, d’une fente labiale uni- ou bilatérale dans

Pour citer cet article : Calteux N, et al. Chirurgie néonatale des fentesPlast Esthet (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2013.03.004

le cadre d’une malformation par division labiale, labio-alvéolaire ou labio-maxillo-palatine.

Une trentaine de bébés opérés plus tard, soit parce qu’ilssont adressés tardivement, soit parce que les parents ontopté pour une autre chronologie, sont exclus de l’étude.Nous n’avons pas introduit d’autres critères d’exclusion queceux imposés par la sécurité de l’anesthésie générale. Letype de fente n’intervient pas dans le choix de la chronolo-gie. Tous ces enfants, à l’exception d’un seul, sont réguliè-rement suivis dans notre service par un groupemultidisciplinaire.

Protocole de traitement

Lorsque le diagnostic anténatal de fente faciale est posé, lesparents sont généralement adressés à notre service pour unpremier contact avec le chirurgien plasticien.

Une longue entrevue permet de rassurer les parents surl’avenir de leur enfant. Nous expliquons entre autre la priseen charge multidisciplinaire des fentes faciales et les dif-férents protocoles thérapeutiques possibles. Étant donné lelarge éventail de chronologies disponibles, nous détaillons etargumentons notre préférence pour la chronologie de répa-ration précoce pour la lèvre. Le choix définitif est laissé auxparents. Ils sont souvent soulagés de pouvoir quitter lamaternité avec un bébé opéré, mais s’inquiètent parfoisdavantage pour l’anesthésie générale que pour l’opération.

Le jour de la naissance du bébé, soit le chirurgien plasti-cien est prévenu de la présence d’un enfant à prendre encharge dans le service de gynécologie-obstétrique ou bienl’enfant est transféré avec sa mère dans l’unité mère—enfant du service de pédiatrie néonatale.

Le pédiatre évalue l’état général de santé et de maturitéde l’enfant et réalise une mise au point complète compor-tant une échographie abdominale, cardiaque et transfonta-nellaire en vue de la détection d’éventuelles pathologiesassociées [4].

L’anesthésiste spécialisé en anesthésie néonatale estconsulté et l’enfant est alors mis au programme opératoirepour correction de la lèvre, dans les jours qui suivent. Uneplace de surveillance dans le service de réanimation néon-atale pour la nuit postopératoire est réservée.

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Tableau 1 Nombre de cas de malformations associées à lanaissance.

Communication inter-auriculaire transitoire ou non 8Perméation du canal artériel 2Cataracte bilatérale 1Kyste de la glande pinéale 1Malformation rénale unilatérale (ectopie) 1Luxation congénitale du coude 1Hypospade 1

Chirurgie néonatale des fentes labiales 3

L’infirmière spécialisée en allaitement conseille et sou-tient la maman pour l’alimentation de l’enfant. L’allaite-ment maternel est toujours vivement recommandé, mêmeen préopératoire.

L’étude génétique a peu d’intérêt dans la décision enfaveur d’une telle chronologie ou d’une autre.

Prise en charge anesthésique

Le bilan préopératoire est réalisé par le pédiatre etl’anesthésiste. Des examens spécifiques sont demandésselon l’examen clinique et les résultats des échographiesprénatales. Un examen cardiologique est systématique.L’examen complet de la dysmorphie faciale permet dedétecter les risques de difficultés d’intubation endo-tra-chéale et d’obstruction des voies respiratoires.

Un ictère néonatal trop important, une pathologie car-diaque ou respiratoire dominante ou des troubles métabo-liques majeurs peuvent faire différer la date opératoire. Lamaturation respiratoire chez l’enfant prématuré en dessousde 36 semaines de grossesse n’est pas une contre-indicationformelle, mais elle nécessite une surveillance postopéra-toire en réanimation néonatale.

Les parents sont longuement informés sur les risques del’anesthésie et donnent leur accord signé sous forme d’unconsentement éclairé, au moins 24 heures avant l’interven-tion. L’opération est toujours réalisée sous anesthésiegénérale avec intubation endo-trachéale par un anesthésistesenior spécialisé en anesthésie néonatale.

Le bébé n’est pas prémédiqué de façon médicamenteuse.Il reste à jeun pendant un délai de quatre heures pour le laitmaternel et de deux heures pour l’absorption de tout liquideclair.

Après induction inhalatrice avec sevoflurane, le bébéreçoit un opioïde et un curare et l’intubation se fait par voieorotrachéale avec un tube de Woodbridge. Puis, l’anesthésieest maintenue comme anesthésie balancée en utilisant unanesthésique halogéné et du sufentanyl avec une ventilationcontrôlée. Les facteurs surveillés pendant l’anesthésie sontla fréquence cardiaque, la tension artérielle, la tempéra-ture, la saturation sanguine en oxygène et la concentrationde CO2 dans les gaz expiratoires, ainsi que la gestion desfluides.

L’enfant est extubé en salle d’opération et transféré ensalle de réveil pour surveiller sa respiration spontanée et sasaturation en oxygène. On suit les risques d’obstruction desvoies aériennes, la dépression respiratoire et les risqueshémorragiques.

L’analgésie postopératoire en salle de réveil est obtenuepar des dérivés morphiniques puis le relais est pris par duparacétamol dès le retour en unité d’hospitalisation dechirurgie pédiatrique. L’infiltration sous-orbitaire par ropi-vacaïne en début d’intervention permet de diminuer forte-ment les doses de morphiniques.

L’enfant passe sa nuit postopératoire en unité spéciale desurveillance néonatologique.

Protocole chirurgical

Les enfants de cette étude ont tous été opérés par un mêmechirurgien senior. L’opérateur utilise des loupes grossissan-tes quatre fois pendant toute l’intervention.

Pour citer cet article : Calteux N, et al. Chirurgie néonatale des fentes

Plast Esthet (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2013.03.004

Une couverture antibiotique est administrée en doseunique à l’induction.

Nous utilisons une technique de lambeau cutané trian-gulaire selon Randall-Tennisson [13]. La libération du muscleorbiculaire à la base de la columelle et au niveau de lafossette piriforme et la reconstruction de la sangle sontprimordiales. Une fois le muscle bien remis en continuitéavec la partie hétérolatérale, la peau peut être rapprochéegénéralement sans difficulté, même pour des fentes labio-maxillo-palatines très larges. La suture cutanée est réaliséeau fil nylon 6/0 et 8/0.

Nous n’utilisons pas de technique de fixation externe ducartilage alaire. La réfection du seuil narinaire et de l’enrou-lement alaire est très soignée et la dissection peut parfoisêtre étendue. Dans cette série, aucun geste de rhinoplastieprécoce n’a été associé.

Pour les fentes bilatérales, nous utilisons la même tech-nique avec une adaptation à la demande pour le volumemuqueux du prémaxillaire. Aucun appareillage externe n’estutilisé pour préparer l’intervention.

En postopératoire, nous jugeons inutile de porter untuteur endonarinaire car nous pensons que celui-ci ne corri-gera pas la malposition du cartilage alaire et qu’il ne garan-tira pas pour autant à l’enfant de devenir un « respirateurnasal » [8]. La suture est protégée contre la traction par delongues bandelettes adhésives. L’alimentation par voie oraleest reprise le soir même de l’intervention par Soft Cup1 oupar tétine de Haberman, puis on passe à l’allaitementmaternel.

Toutes les recommandations sont données à l’entouragede l’enfant pour éviter l’agitation et les pleurs du bébé.

Résultats

L’âge des enfants au jour de l’opération se situe entre deuxet 25 jours.

Notre étude comporte 31 garçons et 11 filles. La lèvreseule est atteinte dans 13 cas, dont quatre atteintes labialespartielles, deux fentes labiales complètes et sept labio-alvéolaires sans atteinte du palais. Vingt-neuf bébés ontune fente labio-maxillo-palatine ; 19 fois celle-ci esttrouvée à gauche et dix fois à droite. Dans dix cas, il existeune malformation bilatérale dont un cas avec atteintelabiale pure et un garçon avec une fente labiale partielleà droite et une discontinuité labio-maxillo-palatinecomplète à gauche.

Les pathologies associées sont reprises dans le Tableau 1.Elles sont réparties de façon non significative entre lesgarçons et les filles.

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Tableau 2 Jour opératoire, poids, maturité et durées.

Médiane Écarttype

Moyenne

Jour opératoire postnatal (j) 5 5,23 7,7Poids à la naissance (g) 3240 456,04 3217,2Poids du jour opératoire (g) 3200 398,36 3166,67Indice APGAR 9-10-10Âge gestationnel (semaines) 39,5 1,27 39,13Temps chirurgical fente

unilatérale (min)45 11,88 49,96

Temps anesthésique fenteunilatérale (min)

90 17,94 87,69

Temps chirurgical fentebilatérale (min)

70 12,53 67,22

Temps anesthésique fentebilatérale (min)

100 15,61 98,33

Durée totale del’hospitalisation (j)

4 3,62 6,02

4 N. Calteux et al.

Le Tableau 2 indique le jour opératoire, les valeurs depoids à la naissance, le poids du jour opératoire, le degré dematurité du bébé et les durées de l’intervention ainsi que duséjour hospitalier. Les enfants sont le plus souvent opérés lecinquième jour.

Un enfant présentait des difficultés alimentaires parimmaturité et il a dû être alimenté par sonde de gavagedepuis sa naissance et en postopératoire, ce qui a prolongéson séjour à l’hôpital jusqu’à 14 jours.

Dans le but d’évaluer la qualité de la réparation chirurgi-cale précoce, nous avons compté les reprises chirurgicales aucourant des premières années, soit isolées, soit associées àune autre intervention. Dans un cas de fente labio-maxillo-palatine nous avons fait une reprise au 19e mois pour asymé-trie de volume de la lèvre rouge qui a été corrigée uneseconde fois à quatre ans.

Pour la même raison, une fente labiale isolée est rectifiéeaprès trois ans lors d’une intervention pour hernie pariétale.Dans deux cas de fente bilatérale, une reprise est nécessairepour manque de volume muqueux au niveau du bourgeonmédian, l’une à deux ans, l’autre à dix ans avec chaque foisdes lambeaux en V-Y d’avancement. Au total, quatre enfantsont donc bénéficié d’une correction secondaire de la lèvre.

Résultats des données anesthésiques

Au fur et à mesure des années, le protocole d’anesthésie arégulièrement été adapté. Alors qu’au début des années1990, on utilisait encore l’halothan, le succinyl et le fenta-nyl, durant la seconde moitié des années 1990, l’induction sefaisait à l’aide de sevofluran. Le fentanyl fut remplacé parl’alfentanil et plus tard par le sufentanil ou le remifentanil.Les enfants n’ont plus été curarisés par le succinyl mais avecde l’atracurium ou du rocuronium. Chez quelques enfants,l’anesthésie a été renforcée avant l’intubation par du pen-thotal ou du propofol.

Chez un des bébés, l’intubation fut difficile et un autre aété intubé sélectivement mais le problème ventilatoire a étéremarqué et corrigé sans délai.

Trois enfants ont eu un réveil lent et ont été extubés avecun peu de retard. Trois autres bébés ont été transférés en

Pour citer cet article : Calteux N, et al. Chirurgie néonatale des fentesPlast Esthet (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2013.03.004

postopératoire au service de soins intensifs néonataux poursurveillance. Tous les autres ont été surveillés en salle deréveil puis transférés dans le service de néonatologie. Aucunenfant n’a montré une obstruction des voies respiratoires oubien une dépression respiratoire. L’analgésie en salle deréveil est obtenue par du paracétamol ou bien du Dipidolor1

intraveineux à la dose de 0,05 mg/kg.

Suites chirurgicales

Comme unique complication postopératoire, nous retenonsun cas de déhiscence cutanée partielle au niveau du seuilnarinaire qui a cicatrisé de façon secondaire sans nécessitéde réintervention. On n’a pas constaté de déhiscence par-tielle ou complète ayant nécessité une reprise chirurgicaleou bien une correction secondaire. Aucune infection n’estdéplorée. Dans les cas de fente bilatérale, les bourgeonsprémaxillaires n’ont pas montré de signes de souffrance.Aucun enfant n’est décédé par mort subite.

Discussion

Depuis 20 ans, nous privilégions la chronologie précoce defermeture des fentes labiales isolées ou associées, uni- oubilatérales, à la grande satisfaction des parents qui accep-tent mieux la malformation de leur bébé. Leur prise encharge au courant de la grossesse dédramatise la situationgrâce à l’encadrement par une équipe multidisciplinairehabituée à leur problème et à l’assurance de sortir de lamaternité avec un enfant opéré. Encore faut-il, pour justifiernotre pratique, que les résultats esthétiques et fonctionnelssoient comparables, voire meilleurs que ceux obtenus avecune chronologie différente et que le risque soit mesuré.

Dans cette étude rétrospective, nous avons voulu évaluerle risque, la sécurité et la qualité du résultat des interven-tions labiales pratiquées en période néonatale chez les bébésatteints d’une fente labiale, labio-alvéolaire ou labio-maxi-llo-palatine uni- ou bilatérale.

Une étude anglaise rétrospective publiée en 2010 portantsur 89 cas de fente labiale opérés avant le 28e jour après lanaissance montre que le risque anesthésique de ces inter-ventions est très acceptable [1].

L’anesthésie générale conduite par un anesthésistespécialisé ne nous a pas posé de problème particulier etnous ne regrettons finalement aucune complication liée àl’anesthésie. Les bébés ont été opérés généralement lecinquième jour de vie (entre deux et 25 jours). Il s’agitd’enfants nés à terme avec un excellent indice d’APGAR(9-10-10) et un poids de naissance normal (3200 g) et unepesée située entre 2310 et 3910 g le jour de l’opération.

Le taux de malformations associées est de 36 %. En dehorsdes huit cas de communication inter-auriculaire cardiaque, ils’agit donc d’enfants sans critères d’anesthésie à hautrisque. Le temps total d’anesthésie est de 90 minutes pourles cas unilatéraux et de 100 minutes pour les atteintesbilatérales ce qui correspond à une durée bien tolérée pource type de bébé, d’autant plus que l’agression chirurgicaleest très limitée. La plupart des CIA se sont spontanémentfermées lors de la croissance de l’enfant.

La majorité des enfants est restée hospitalisée pendantquatre jours, mais dans quatre cas, l’opération est reportée

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à cause d’un ictère trop important et dans un cas unestreptococcie néonatale a dû être traitée avant l’interven-tion entraînant un séjour prolongé durant 16 jours.

La supériorité de la qualité de la cicatrice précoce estmise en doute par différents auteurs [3,14], mais aucun denos enfants n’a dû être réopéré pour une cicatrice esthéti-quement inacceptable ou hypertrophique.

La qualité de l’aspect des cicatrices avec un recul d’aumoins deux ans a été évaluée par deux examinateursindépendants selon la Vancouver Scar Scale [15]. Ils ontqualifié les cicatrices d’excellentes. Elles sont souventd’aspect légèrement pâle, hypopigmentées, rarement unpeu roses.

La séquelle la plus visible au niveau de la réparationlabiale est souvent une légère asymétrie de volume de lalèvre saine par rapport à la lèvre du côté atteint qui est pluspetite, même si la lèvre latérale a une bonne longueur. Latechnique de Randall répond bien à la nécessité d’allonge-ment de la hauteur de la lèvre blanche et le port de lunettesgrossissantes permet un repérage précis du bord cutanéo-muqueux. Cela est parfois difficile et on doit davantage serapporter à l’aspect granuleux de la peau qu’à la couleur rosede la muqueuse.

Nos quelques reprises chirurgicales secondaires ont portésur le volume de la lèvre rouge. Sa situation est beaucoupplus critique dans le cas de fente bilatérale ou un équilibreparfait entre les trois parties de la lèvre est difficile à obtenird’emblée.

Mcheik rapporte 34 % de retouches pour les fentes labio-palatines unilatérales et 13 % pour les atteintes labialesisolées, pour une série à chronologie précoce et tardivecumulée [3].

Nous insistons sur la réparation fonctionnelle précoce dela sangle labiale afin de permettre la tétée le plus tôtpossible, soit pour l’allaitement maternel, soit, si celan’est pas envisagé, pour une alimentation par tétine dansl’idée d’éviter l’apparition de pratiques compensatoires quipourraient avoir un impact sur l’orthophonie [14].

Les pédopsychiatres ne cessent de rappeler l’impor-tance du contact maternel lors de l’allaitement. En préo-pératoire, l’allaitement est conseillé. Quand cela n’est paspossible, le bébé est nourri par Soft Cup1, une tétineadaptée qui ne nécessite pas la succion du bébé ou biengrâce à une tétine de type Haberman qui est adaptée auxsuccions faibles. Après l’intervention, le jour même, cetype d’alimentation est repris et on passe dès que possibleà l’allaitement ou à la tétine normale. 21 jours aprèsl’intervention, les enfants atteints de fente labiale pureétaient passés à l’allaitement ou à la tétine normale.Skinner et al. rapportent qu’il n’y a pas de différence auniveau cicatrisation si on reprend l’allaitement toute desuite ou de façon plus tardive [16].

Le plus souvent les parents préfèrent une tétine normale« assistée » du type Haberman pour les enfants avec atteintepalatine. La division maxillo-palatine est opérée dans laplupart des cas à dix mois et demi. Nous avons actuellementune tendance à les opérer vers le neuvième mois car ledéveloppement palatin nous semble assez avancé et l’enfantassez mature pour supporter cette intervention plus lourdeque la lèvre.

Nous suivons depuis quelques années les travaux remar-quables de Talmant, qui favorise une chronologie plus

Pour citer cet article : Calteux N, et al. Chirurgie néonatale des fentes

Plast Esthet (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2013.03.004

tardive, voire s’oppose à la fermeture précoce de la lèvre.Il accuse une phonation, une croissance et une dentitionmoins favorables avec des interventions labiales très préco-ces [8]. Il ne retient aucune indication pour les chronologiesnéonatales opposant d’après lui, les intérêts de l’enfant àceux des parents. Nous sommes convaincus du bien-fondé deson concept de « respirateur nasal », un point que noussuivons attentivement chez nos patients et nous attendonsles publications des résultats tardifs des rhinoplastiesprécoces.

Un travail complémentaire devra montrer les résultatstardifs de notre chronologie. Nous avons adapté l’un oul’autre détail de notre façon de faire avec l’évolution despatients au courant des 20 années et il est difficile deproduire une série homogène représentative. Cela n’estpas le but du présent travail. Nous avons voulu détecterdes facteurs de risque opératoire et des complications préco-ces de nos interventions néonatales qui auraient pu nousfaire abandonner cette procédure.

S’il s’avère être prouvé que les fermetures labiales néon-atales entraînent définitivement des effets néfastes sur lesrésultats tardifs dans l’évolution de l’enfant, il faudra alorsmettre dans la balance, l’effet intégrateur familial et socialde l’enfant et l’aspect positif sur l’environnement familial.Ce dernier élément devrait faire l’état d’une étude appro-fondie sur les effets négatifs à long terme de l’inacceptancede l’enfant imparfait par les parents. Tout un travail prépa-ratoire débutant avant la naissance de l’enfant doit alorspréparer les parents et l’entourage afin que le traumatismesoit minimal et ne laisse des traces psychologiques et rela-tionnelles lourdes de conséquences. Il n’est en tout cas pasdéniable que la fermeture labiale en période néonatale esttrès appréciée par les parents et elle facilite le contexteparental et familial dans la période autour de la naissance, auprix d’un risque anesthésique et chirurgical très limité, grâceà un temps opératoire bref de 45 minutes pour les fentesunilatérales et de 70 minutes pour les bilatérales.L’expérience nous montre que pratiquement tous nosenfants avec une atteinte maxillo-palatine engagent unprotocole d’orthodontie.

Conclusion

Notre protocole de réparation précoce des fentes labiales estréalisable grâce à la sécurité apportée par un environnementexpert en pathologie néonatale et à un taux de complicationset de corrections secondaires très faible. L’agression chi-rurgicale est limitée avec un temps opératoire assez bref. Lareprise de l’alimentation orale est rapide.

Cette structure multidisciplinaire est capable d’assurer laprise en charge néonatale charge néonatale des enfants nésavec une fente faciale ou labio-maxillo-faciale.

Une évaluation complémentaire plus étendue est néces-saire car ce travail n’analyse pas l’évolution globale à moyenet à long terme et les conséquences en matière de croissancedu maxillaire, de la dentition et de la déformation nasale.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

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labiales : sécurité anesthésique et résultats chirurgicaux. Ann Chir