7

Click here to load reader

Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

  • Upload
    g

  • View
    213

  • Download
    1

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

2S29

Ann. Endocrinol., 2005; 66, 2, Cahier 3: 2S29-2S35© Masson, Paris, 2005

Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

C. Simon (1), G. Chabrier (2)

(1) EA 1801, Faculté de Médecine, 4 rue Kirschleger, F 67085 Strasbourg Cedex.(2) Centre d’Endocrinologie et Maladies Métaboliques. 1, rue du Dôme, F-67000 Strasbourg.

Correspondance : Pr Chantal [email protected]

ATELIERS

How to prescribe physical activity in clinical practice?

C. Simon, G. Chabrier

Ann. Endocrinol., 2005; 66, 2, Cahier 3: 2S29-2S35

Accumulating scientific evidence indicates that regular physical activity conferssignificant health benefits. Besides its preventive interest, its promotion is an effectiveapproach of several health problems, including obesity and type 2 diabetes. Itsclinical prescription is based on two complementary approaches aimed to decreasesedentary behaviours and/or to promote an active lifestyle with long-term objectives.Physicians can play a key role in motivating patients by advising them regarding theirphysical limitations, their goals, their concerns, and the barriers to exercise.Assessment of the patient's attitudes and motivation towards physical activity is akey element for the success. Objectives, clearly defined, should be evaluated andadapted on a regular basis, with the patient and taking into account the familial andsocial environment.

Key-words: evaluation, motivation, physical activity, prescription.

Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

De nombreuses données indiquent que l’activité physique est un facteur déterminantde l’état de santé des individus. À côté de son intérêt préventif, sa promotion estreconnue comme une approche thérapeutique efficace dans de nombreusespathologies, au premier rang desquelles l’obésité et le diabète de type 2. Saprescription clinique repose sur deux approches complémentaires, la lutte contrela sédentarité et/ou la promotion d’une vie active, avec des objectifs à longterme. Les médecins peuvent jouer un rôle de motivation important grâce à desconseils adaptés et progressifs prenant en compte les capacités physiques deleurs patients, leurs objectifs, leurs croyances et les barrières à la pratique d’uneactivité physique régulière. L’évaluation de la motivation du patient à changerson comportement d’activité physique est une étape essentielle. Les objectifs,définis de façon claire et précise, doivent être réévalués et adaptés régulièrementavec le patient en tenant compte de son environnement social et familial.

Mots-clés : activité physique, évaluation, motivation, prescription.

INTRODUCTION

Les bénéfices en terme de santéd’une activité physique régulièresont étayés par de nombreux argu-ments épidémiologiques et expéri-mentaux. Elle est associée à uneréduction de la mortalité totale et dela morbi-mortalité cardio-vasculaire,à une diminution du risque de diabètede type 2, d’hypertension artérielle, decertains cancers ainsi qu’à une amé-lioration de l’état psychologique [1,2]. À l’inverse la généralisation d’unmode de vie sédentaire dans les paysindustrialisés est associée à une aug-mentation de la prévalence de l’obé-sité, du diabète de type 2 et du risquecardiovasculaire en général.

Si l’accord apparaît général sur l’in-térêt de l’activité physique en préven-tion et dans la prise en charge denombreuses pathologies, l’utilisationde cet outil thérapeutique en pra-tique médicale quotidienne n’est passans poser quelques problèmescomme en témoignent les résultatsd’un petit sondage réalisé auprès de68 endocrinologues français en pré-ambule à la tenue de l’atelier consa-cré à cette thématique lors des JAIRO2005. Si 97 % d’entre eux vont déli-vrer, au terme d’une consultation, desconseils ou consignes spécifiques enmatière d’activité physique, les moyensutilisés apparaissent disparates : pour

C. Simon G. Chabrier

Page 2: Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

l’évaluation de l’activité physique,73 % ont recours au simple interro-gatoire, 15 % à des carnets ou ques-tionnaires d’activité physique, 10 % àdes podomètres ou compteurs demouvement et 1,2 % à aucune éva-luation. Quant aux conseils, ils pren-nent la forme de consignes orales(56 %), de prescriptions personnali-sées (26 %), de documents types(14 %). 52 % des prescripteurs ontrecours à des structures ou parte-naires contre 48 % qui ne le font pas,essentiellement en raison d’uneméconnaissance de ces structures(73 %) ou de leur absence (20 %). Encas de recours, il s’agit de kinésithéra-peutes (39 %), de clubs de sport (30%), de groupe de patients (4,7 %), deréseaux (12,5 %), de services hospita-liers de rééducation (11 %)… Lemanque de temps est parfois mis enavant et tous réclament des outilssimples qui pourraient leur permettreune évaluation et une prescriptionpersonnalisée.

Les questions principales sont cellesdes modalités de l’activité physique àpromouvoir, mais aussi des outils etmoyens susceptibles d’être utilisés afinde motiver les patients à bouger et deles amener à pratiquer une activité phy-sique adaptée quotidienne, dans unenvironnement qui favorise au contraireles comportements sédentaires.

RECOMMANDATIONSACTUELLES

Alors que les recommandations éla-borées à la fin des années 80 dansune perspective d’amélioration de lacapacité cardiorespiratoire (modèle detype entraînement physique) préconi-saient la pratique d’activités intensessous forme de séances de 20 à 60minutes minimum, 3 à 5 fois par semai-ne, une évolution majeure des conceptsa eu lieu depuis 10 ans. Les recomman-dations actuelles [3], établies dans uneperspective de santé publique et pluspragmatiques, reposent sur le niveau

d’activité physique associée à unediminution du risque de pathologiechronique en général et cardiovascu-laire en particulier. Dans ce domaine,différentes études expérimentales etépidémiologiques ont contribué àfaire progresser nos connaissances:

Il existe une relation dose-réponseinverse [2, 3] entre le volume d’activitéphysique et le risque d’un grandnombre de pathologies, au premierrang desquelles les maladies cardio-vasculaires et métaboliques (fig. 1).Toute activité physique supplémentaireentraîne un bénéfice supplémentairepour la santé. La conséquence directeest que, chez le sujet sédentaire,même la pratique d’une quantitémodérée d’activité physique s’ac-compagne déjà d’un bénéfice sub-stantiel en terme de santé. C’estd’ailleurs chez ce dernier et chez lespersonnes modérément actives quele bénéfice est le plus grand. Enrevanche au fur et à mesure quel’activité physique augmente, lebénéfice supplémentaire pour sasanté que le sportif entraîné peut

2S30

C. Simon, G. Chabrier Ann. Endocrinol.

attendre de sa pratique va ens’amoindrissant.

La dépense énergétique totaleinduite par l’exercice per se, est undes éléments déterminants deseffets de l’activité physique et l’acti-vité physique n’a pas besoin d’êtreintense pour s’accompagner d’ef-fets favorables sur la santé. Enrevanche la régularité est probable-ment importante. Ces différentesdonnées mettent en exergue l’inté-rêt des activités de loisir modéréestelles que la marche ou le vélo-bala-de, mais aussi celui des activités dela vie courante.

L’activité physique peut être frac-tionnée au cours de la journée (parex. 3 sessions de 10 minutes d’acti-vité plutôt que 30 minutes en uneseule session) pour un bénéficesimilaire, ce qui favorise son inclu-sion dans la vie de tous les jours.

Ces données, notamment leconcept d’accumulation d’activitéphysique au cours de la journée,sont d’un intérêt pratique évident etdevraient permettre à un plus grand

Figure 1 : Courbe dose-réponse entre le niveau habituel d’activité physique et l’état de santé[d’après Réf. 3]

Page 3: Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

2S31

Vol. 66, 2, Cahier 3, 2005 Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

nombre de sujets d’atteindre leniveau des recommandations lesplus récentes qui stipulent que leshommes et femmes de tout âgedevraient pratiquer une activitéphysique [3-5] :

- d’intensité modérée (équivalente àla marche rapide),

- au moins 30 minutes,

- si possible tous les jours de lasemaine,

- en une ou plusieurs fois au coursde la journée,

- au cours des loisirs ou lors des gestesde la vie courante.

Des activités d’intensité supérieurepeuvent bien entendu être réalisées surune base individuelle en fonction desgoûts et des capacités de chacun. Danscette perspective, il faut rappeler qu’unbénéfice supplémentaire peut êtreobtenu chez les sujets qui atteignentdéjà les objectifs initiaux en augmen-tant l’intensité ou la durée des activitéspratiquées : “30 minutes c’est bien,plus c’est encore mieux” [5]. À l’inversechez les sujets qui ne peuvent effectuer30 minutes, il convient de se souvenirque toute activité est bonne pour lasanté : “un peu c’est déjà mieux querien du tout”. Les recommandations enmatière d’activité physique peuvent êtreschématisées sous la forme d’une pyra-mide [6] correspondant à ces différentsniveaux (fig. 2).

LA PRESCRIPTION DEL’ACTIVITÉ PHYSIQUE :3 ÉTAPES ESSENTIELLES

La prescriptiond’une activitép h y s i q u erepose sur 3é t a p e se s s e n -tielles :

- Évaluation des différentes compo-santes de l’activité physique actuelle

- Définition des objectifs prioritaireset prescription adaptée

- Suivi et prévention des rechutes

ÉVALUATION DES DIFFÉRENTES COMPOSANTES DE L’ACTIVITÉPHYSIQUE

L’évaluation de l’activité physique,qui ne se limite pas à l’évaluation duniveau de pratique habituel, est unpréalable indispensable à la défini-tion d’une stratégie cohérente et deconseils adaptés à chaque patient.Concrètement, face au patient etavant toute prescription, il est pri-mordial de se poser 3 questions :

- Quel est son niveau de pratiquehabituel ?

- Qu’est-il physiquement capablede faire et quels sont les obstacles à

la pratique d’une activité physiquerégulière ?

- Qu’est-il prêt psychologiquementà faire et quels sont ses objectifs ?

Activité physique habituelle

L’évaluation de l’activité physiquehabituelle est à la fois quantitative etqualitative. De la calorimétrie indirecteà la mesure de la fréquence cardiaqueen passant par des questionnairesplus au moins sophistiqués, il existede nombreuses méthodes de mesurede l’activité physique habituelle [7, 8].

En pratique médicale courante, desquestions simples (tableau I), déri-vées des principaux questionnairesdisponibles permettent d’évaluer, enquelques minutes, l’activité physiquehabituelle des patients en fonction ducontexte : professionnel, cadredomestique et vie courante (en parti-culier les trajets) ou loisirs (incluant lesactivités sportives, mais pas unique-ment). L’intensité, la durée et la fré-quence des activités seront préciséespour une évaluation quantitative. Letemps passé devant un écran (télévi-sion, vidéo, ordinateur, jeux vidéo) ouassis est, quant à lui, un bon indica-teur de sédentarité. Il est maintenantreconnu que l’activité physique et lasédentarité sont deux dimensions dif-férentes du comportement de mou-vement, associées indépendamment

l’une de l’autre à l’état de santé.Cette évaluation est également

l’occasion de préciser de façonplus globale le mode de vie du

sujet, de repérer les oppor-tunités d’activité physique

ou au contraire les obs-tacles. Si nécessaire

ces questions peu-vent être complé-

tées par uneenquête pros-

pective de3 à 7

jour s ,

Figure 2 : Pyramide d’activité physique (AP) [d’après Réf. 6]

APsupplémentaire

Endurance3 x / sem

20 - 60 min

MusculationSouplesse2 x / sem

30 min / j d'AP d'intensité modérée en moyenne. Activités de la vie de tous les jours

ou sous forme de sport

Lutter contre la sédentaritéEncourager au mouvement

Page 4: Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

à l’aide d’un carnet d’activité phy-sique analogue au carnet d’enquêtealimentaire.

La marche étant l’activité physiquede la vie quotidienne la plus fréquente,le podomètre, qui mesure le nombrede pas effectués, est un outil complé-mentaire d’autant plus utile que lesactivités de la vie quotidienne sontsouvent difficiles à quantifier. Leséquivalences proposées récemment[9] permettent de traduire le nombre depas en durée quotidienne d’activités(tableau II). En permettant au patientd’auto-évaluer le nombre de paseffectués quotidiennement, le podo-mètre peut de plus l’aider à fixer desobjectifs réalistes et constituer un élé-ment de motivation. Une augmenta-tion par étapes de l’ordre de 500pas/jour peut être proposée [9].

Obstacles à la pratique d’activité physique

L’évaluation des obstacles à la pra-tique d’une activité physique est ladeuxième étape incontournable [7].Nombreux, ceux-ci sont d’ordre phy-sique et fonctionnel, mais aussi psy-chologiques et socio-environnemen-taux. Les obstacles physiquescorrespondent à la faible capacité phy-sique des sujets et aux comorbididtés(en particulier rhumatologiques etcardiovasculaires). Les obstacles indi-viduels (expériences antérieures néga-tives en matière d’exercice, gêne vis-à-vis de son corps, manque deconfiance en soi, sentiment d’incapa-cité physique) ou sociaux ne doiventpas être négligés. Parmi ces derniers,citons le manque de temps, la diffi-

2S32

C. Simon, G. Chabrier Ann. Endocrinol.

culté d’accès à des équipements, l’ab-sence de soutien par l’entourage,auxquels il faudra, avec le patient,essayer de trouver des éléments deréponse concrets.

Motivation et objectifs

Évaluer la motivation du patient àchanger son comportement d’activitéphysique est essentiel. Tout change-ment significatif de comportementrésulte d’une responsabilisation del’individu et d’une prise en chargepersonnelle. Le changement d’attitu-de et de motivation interne sontnécessaires à des changementsdurables. La classification des stadesde changements, initialement élabo-rée par Prochaska et Di Clementepour l’étude des dépendances, peut

Tableau I : Questionnaire simplifié d’activité physique

Niveau d’activité - Objectif Nombre de pas/jour Min/jour d’activité modérée

Inactivité importante < 3 000 0

Activité faible 3 000 – 6 000 15

Recommandations d’activité physique pour la population générale ≥ 10 000 30

Tableau II : Équivalence indicative entre le nombre de pas/jour et la durée quotidienne (en minutes) des activités [d’après Réf. 9].

Type d’activité Caractéristiques

ProfessionnelleProfession principale Intensité (faible, modérée, élevée) et durée

DomestiqueActivités à domicile Intensité approximative et durée

Loisirs et sportsActivités au cours des loisirs sans oublier la marche Pour chaque activité : intensité, durée et fréquence

des sessions (sur un an par exemple)

Transports, trajetsMode de trajets habituels Durée (h/jour)

Occupations sédentairesTemps passé devant un écran Durée (h/jour)Temps passé en position assise Durée (h/jour)

Page 5: Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

2S33

Vol. 66, 2, Cahier 3, 2005 Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

être utilisée dans le domaine del’activité physique [9] à partir dequelques questions simples (tableauIII).

Cette classification, qui prend encompte les émotions, les comporte-ments, les connaissances et lescroyances du patient, permetd’adapter les conseils et les straté-gies thérapeutiques [10]. La mesuredes progrès de chaque individu sefait alors non seulement sur lamodification des comportements,mais aussi sur l'évolution de sesmotivations internes. Des étudesont montré que la détermination dustade du patient pour adapter lesconseils s’accompagnait demeilleurs résultats.

DÉFINITION DES OBJECTIFSET PRESCRIPTION ADAPTÉE

Bien entendu, la prescription etles objectifs doivent être en accordavec les différents éléments del’évaluation. Un patient visant laparticipation à un semi-marathonalors qu’il n’est prêt à consacrer que10 minutes par jour à une activitéphysique d’intensité très modéréeet qu’il présente une arthrose dugenou invalidante a peu de chanced’atteindre son objectif. Le rôle dusoignant sera soit de l’amener àchanger d’objectif, soit de changerce qu’il est d’accord de faire, soitencore de l’aider à progresser physi-

quement pour atteindre ce but. Ilconvient d’amener le patient à avoirdes objectifs suffisants mais réa-listes, en procédant par petitesétapes afin d’augmenter leschances de succès. Comme pourl’alimentation, il n’existe pas derecettes toutes faites ni de traite-ment standard. Les conseils visent àlimiter l’inactivité et promouvoir l’acti-vité physique. Schématiquement onpeut distinguer trois situations, cor-respondant aux trois premiersniveaux de la pyramide d’activitéphysique (le dernier niveau, qui cor-respond au sportif entraîné et à lacompétition ne sera pas abordé).

Sujets sédentaires,pré-contemplatifs

Lorsqu’il existe une diminution dela capacité physique ou que lepatient n’a aucune intention dechanger, l’objectif initial est d’aiderle patient à “sortir du fauteuil”. Lebut de l’intervention est d’augmen-ter la prise de conscience dupatient. L’information et l’éducation(bénéfices attendus en terme desanté et de qualité de vie, différentstypes d’activité physique) sont prio-ritaires. Le repérage des obstaclespeut aider à modifier la balancebénéfices/obstacles.

Dans cette situation les conseilsd’activité physique sont le plus sou-vent inadaptés. Différentes études,réalisées notamment chez lesenfants obèses, ont montré qu’une

intervention visant à limiter l’inacti-vité pouvait être plus efficace quedes conseils portant uniquement surl’augmentation de l’activité phy-sique. Des conseils simples pourlimiter l’inactivité physique etencourager une activité minimaleont été proposés [5, 11]. Lesconseils sont essentiellement cen-trés sur les activités banales de la viequotidienne. Dans certaines situa-tions, une “mise à l’étrier” à l’aided’un psychomotricien, d’un kinési-thérapeute ou d’un éducateur spor-tif ayant l’habitude de ces patients,peut aider à changer l’estime queles patients ont en leur capacité etleur motivation.

Promotion d’une activité physique modérée (sujets

contemplatifs)

À ce stade les conseils doiventêtre précis et individualisés, entenant compte des capacités et desintérêts du sujet, de sa motivationet des obstacles. Ils aideront lepatient à repérer les bénéficespotentiels, à trouver les activitésréalisables et les structures adap-tées, à contourner les difficultés.L’objectif est de l’aider à faire le pre-mier pas puis progressivement d’at-teindre les recommandations pourla population générale (niveau 2 dela pyramide). L’activité physiquesera débutée de façon progressive,en commençant si nécessaire pardes activités d’intensité faible à

Stades de changement

Je ne suis pas physiquement actif, et je n’ai pas l’intention Pré-contemplatifde commencer dans les 6 prochains mois.

Je ne suis pas régulièrement actif, mais j’ai l’intention Contemplatifde devenir plus actif dans les 6 prochains mois.

Je suis régulièrement actif actuellement Actifet l’ai été les trois derniers mois.

Tableau III : Évaluation de la motivation : stades de changement (d’après Prochaska et Di Clemente).

Page 6: Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

modérée lors des tâches de la viecourante ou de certaines activitésde loisir, telles que la marche. Avecle temps, la quantité et l’intensitédes activités seront augmentéespour accumuler 30 minutes d’activitéphysique d’intensité modérée sipossible tous les jours.

Que faut-il entendre par activitéphysique d’intensité modérée ? Lamarche rapide est l’activité de réfé-rence dans les recommandations.Une activité d’intensité modéréepeut également être définie commeune activité qui s’accompagned’une accélération de la respiration(à la limite de l’essoufflement) sansque l’individu ne transpire obligatoi-rement ou de façon subjective (acti-vité moyennement difficile surl’échelle de Borg). Ces repères sontprobablement plus adéquats que laréférence à une vitesse (4 à 6 km/h,en terrain plat) ou à la dépenseénergétique liée à l’activité phy-sique (3 à 6 fois la dépense derepos) : de telles activités peuventen effet être modérées pour cer-tains individus mais très intensespour d’autres, chez l’obèse parexemple! En pratique, les activitésrecommandées sont la marche, levélo, la natation et le ski, parexemple. Dans une perspective demaintien à long terme, différentesétudes ont souligné l’intérêt desactivités domestiques (jardinage,travaux ménagers…) et des activitésintégrées dans la vie de tous lesjours (transports…). L'activité phy-sique peut être fractionnée (2 fois15 minutes ou 3 fois 10 minutes).Néanmoins il est souhaitable que lessessions ne soient pas inférieures à10 minutes. La régularité apparaîtpar ailleurs essentielle.

Chez les sujets déjà actifs

Chez les personnes déjà activessur le plan physique et qui respec-tent les recommandations de base,l’objectif est double :

Avant tout éviter l’abandon, viser

le maintien et aider “à garder lacadence”. Un suivi régulier est unatout important et permettrad’adapter l’activité physique enfonction de la motivation et de lacapacité physique. Il est essentiel derepérer les obstacles pouvant inter-rompre la pratique d’activité phy-sique et d’aider le patient à perce-voir les bénéfices de cette dernière.

Un bénéfice supplémentaire peutcependant être obtenu en augmen-tant la fréquence et la durée desactivités, en améliorant l’endurancepar le biais de séances hebdoma-daires d’entraînement et en variantles activités pratiquées. Concrètement,il s’agit de favoriser non seulementl’endurance, mais aussi la force etla souplesse (sous forme de gym-nastique ou de stretching parexemple).

Idéalement, l'entraînement inclura2 à 3 séances hebdomadaires de 20à 60 minutes. Les sports appropriéssont ceux qui font travailler lesgrands groupes musculaires : courseà pied, cyclisme, VTT, ski de fond,natation, mais aussi entraînementspécifique avec des engins adaptés.L'intensité recommandée est uneintensité correspondant à une VO2

de 40 à 50 % de la capacité cardio-respiratoire maximale (VO2max). Elleest atteinte si, tout en transpirantun peu et en étant légèrementessoufflée, la personne est encorecapable de parler. Elle peut égale-ment être estimée à partir de la fré-quence cardiaque (FC). L'utilisationde la FC pour déterminer l'intensitérelative de l'exercice est basée sur lefait que le pourcentage de la VO2 etle pourcentage de la FC maximalesont liés mathématiquement. Grâceà cette proportionnalité, il suffit desuivre l'évolution de la FC pourconnaître, de manière assez précise,la VO2 d'une personne. On éviterad’utiliser une FC cible basée sur laFC maximale théorique pour l’âge(220 - âge) qui ne tient pas comptede la capacité physique des sujets.On lui préférera une FC obtenue à

2S34

C. Simon, G. Chabrier Ann. Endocrinol.

partir de la formule de Karvonen,qui fait appel à la FC de repos(témoin indirect de la capacité car-diorespiratoire du sujet) et de la FCthéorique maximale. Karvonen pro-pose de déterminer la FC cible àpartir de la formule suivante : FCcible = FC repos + % (FC maximalethéorique - FC repos).

Un individu de 40 ans ayant uneFC de repos de 96 cycles/min, uneFC maximale de 180 cycles/min(220-40) et souhaitant s'entraîner àune intensité modérée (50 % deson maximum) courra donc à uneFC cible = 96 + 50 % (180-96) =138 cycles/minutes.

À ce stade, un bilan cardiovascu-laire doit être discuté, en particulierchez les sujets de plus de 40 ans.L’intégration dans des structuresadaptées (association ou club spor-tifs) peut favoriser le maintien, touten assurant une progression phy-sique adaptée et encadrée.

SUIVI ET PRÉVENTION DESRECHUTES

Le suivi est dans tous les casessentiel. La réévaluation régulière,mensuelle puis trimestrielle, duniveau d’activité physique (carnet,podomètre) et de ses composantesdoit être associée à une évaluationplus globale, médicale, nutritionnelleet psychosociale, visant à préciserl’état de santé du patient mais aussila qualité de vie. Les objectifs et lesconseils seront modulés en fonctiondes résultats et des difficultés. Lebut est d'aider les patients à adap-ter les activités selon les priorités dumoment mais aussi selon l’évolutionde leurs capacités fonctionnelles.Encourager à varier les activités,mettre en avant les aspects plaisir,rencontre et bien-être, sont autantd’éléments susceptibles de garderles patients motivés.

La rechute n’est pas l’arrêt de telleou telle activité mais le retour à la

Page 7: Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

2S35

Vol. 66, 2, Cahier 3, 2005 Comment prescrire l’activité physique en pratique médicale ?

sédentarité. C’est celle-ci qu’il fautéviter en s’appuyant sur les expé-riences antérieures (le patient a-t-ildéjà été actif ; si oui dans quellescirconstances a-t-il arrêté ?). La miseen place d'objectifs à court, moyenet long terme permet de garder laconcentration et d'éviter la monoto-

nie. Le cadre des activités et lesmoyens utilisés pour pratiquer l'ac-tivité physique sont importants.Certains individus ont besoin d'unencadrement pour être motivés,d’autres souhaiteront évoluer engroupe, d'autres préféreront les acti-vités extérieures…

EN CONCLUSION

C'est en étant à l’écoute despatients, en leur donnant les moyensd’apprendre par leurs expériences, quele médecin aidera le patient à progres-ser et puis à maintenir les objectifs.

RÉFÉRENCES

1. Simon C. Activité physique, bilan énergétique et profil métabolique. Cah Nutr Diet 2000 ; 35 : 311-5.2. U.S. Department of Health and human Services. – A Report of the Surgeon General. Atlanta, GA: U.S. Department of Health and Human

Services, Centres for Disease Control and Prevention, National Centre for Chronic Disease Prevention and Health Promotion, 1996.3. Pate RR, Pratt M, Blair SN, et al. Physical activity and public health. A recommendation from the Centers for Disease Control and

Prevention and the American College of Sports Medicine. JAMA 1995 ; 273 : 402-7.4. Programme National Nutrition-Santé (PNNS) 2001-2005. Ministère de l’Emploi et de la Solidarité, Direction Générale de la Santé. Paris.

2001, 29 pages.5. Programme National Nutrition-Santé (PNNS) 2004. La santé vient en bougeant. Guide nutrition pour tous 2004.6. Martin BW, Marti B. Exercise and sports: an undervalued health resource. Ther Umsch 1998 : 4 : 221-8.7. Oppert JM, Dalarun P. Activité physique et traitement de l’obésité. In : Médecine de l’Obésité, A Basdevant, B Guy-Grand, eds, Paris : Flammarion

Médecine-Sciences, 2004, pp. 222-227.8. Simon C. Comment évaluer l’activité physique. Cah Nutr Diet 2002 ; 37 : 241-3.9. Leermakers EA, Dunn AL, Blair SN. Exercise management of obesity. Med Clin North Am 2000 ; 84 : 419-40.

10. Amati F., Patella M., Golay A. Comment prescrire en pratique médicale l'exercice physique? Med Hyg 2002 ; 60 : 1119-22.11. AFERO, ALFEDIAM, SNDLF. Recommandations pour le diagnostic, la prévention et le traitement de l’obésité. Diabetes Metab 1998 ; 24

(Suppl. 2) : 1-48.