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Droit des Sûretés 2010 1 DROIT DES SURETES Introduction Mise en situation : lorsqu’un contrat est signé entre un débiteur et un créancier, deux cas de figures sont envisageables : - Soit le contrat fait l’objet d’une exécution immédiate ; pas de problème, ex. qq’un me vend une voiture, je l’achète et il me la livre directement. - Soit les parties conviennent d’une exécution différée dans le temps ; dans ce cas la partie qui autorise que l’exécution soit postposée voudra être rassuré quant à l’exécution, et obtenir des garanties de paiement. Ces garanties, c’est ce qu’on appelle les « sûretés ». Idée : il existe un lien étroit entre la notion de crédit et de sûreté. Rem. Double impératif auquel renvoie le terme de sûreté : D : nécessaires car s’il ne parvient pas à en octroyer, il n’aura probablement pas de crédit. C : le C se sent rassuré d’être payé et c’est pcq il connaît l’échéance de paiement et le paiement effectif qu’il est enclin à faire crédit pour le D. Définition Certains auteurs disent de la notion de sûreté qu’il s’agit d’une notion introuvable, indéfinissable. Difficulté : si on envisageait toutes les garanties existant, on aurait un champ d’investigation très large. Garantie = ensemble des avantages, mécanismes, techniques contractuelles/légales dont peut bénéficier le C (quels que soit leur origine, effet, efficacité), qui favorise sa sécurité. Distinction Sûreté = est une partie seulement des garanties, elle s’applique aux affectations de la valeur d’un bien ou d’un patrimoine à la satisfaction d’un C. Il existe deux (voir trois) grandes catégories de sûretés : 1. Sûretés réelles = affectation d’un bien (//droit des biens) Les sûretés réelles consistent à affecter un bien précis du patrimoine du D à la satisfaction du C. On va alors créer un lien entre le C et le bien qui se trouve dans le patrimoine du D (l’établissement d’un tel lien entre une personne et un bien nous renvoie au droit réel qui crée un lien immédiat entre le bien et le titulaire d’un droit sur ce bien). Ex. le banquier qui a prêté de l’argent à un D dit : je vous prête à condition que l’appartement de votre patrimoine me soit réservé par priorité s’il y a un problème d’exécution. Idée : affecter un bien à la satisfaction des intérêts du C. 2. Sûretés personnelles = affectation d’un patrimoine (//droit des contrats, rglmt particulier) Le mécanisme des sûretés personnelles consistent à adjoindre un 2 ème D aux côté du D principal, de manière à ce que le C voie se multiplier les chances d’être payé au moment où la créance viendra à l’échéance. Ex. prototype = contrat de cautionnement : on demande à une caution de s’engager aux cotés du D principal ; si celui-ci ne s’exécute pas, le C pourra aller frapper à la porte de la caution. Idée : adjoindre un deuxième patrimoine à celui du débiteur principal.

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DROIT DES SURETES Introduction Mise en situation : lorsqu’un contrat est signé entre un débiteur et un créancier, deux cas de figures sont envisageables :

- Soit le contrat fait l’objet d’une exécution immédiate ; pas de problème, ex. qq’un me vend une voiture, je l’achète et il me la livre directement.

- Soit les parties conviennent d’une exécution différée dans le temps ; dans ce cas la partie qui autorise que l’exécution soit postposée voudra être rassuré quant à l’exécution, et obtenir des garanties de paiement.

→ Ces garanties, c’est ce qu’on appelle les « sûretés ». Idée : il existe un lien étroit entre la notion de crédit et de sûreté. Rem. Double impératif auquel renvoie le terme de sûreté :

• D : nécessaires car s’il ne parvient pas à en octroyer, il n’aura probablement pas de crédit.

• C : le C se sent rassuré d’être payé et c’est pcq il connaît l’échéance de paiement et le paiement effectif qu’il est enclin à faire crédit pour le D.

Définition Certains auteurs disent de la notion de sûreté qu’il s’agit d’une notion introuvable, indéfinissable. Difficulté : si on envisageait toutes les garanties existant, on aurait un champ d’investigation très large.

Garantie = ensemble des avantages, mécanismes, techniques contractuelles/légales dont peut bénéficier le C (quels que soit leur origine, effet, efficacité), qui favorise sa sécurité.

Distinction Sûreté = est une partie seulement des garanties, elle s’applique aux affectations de la valeur d’un bien ou d’un patrimoine à la satisfaction d’un C.

Il existe deux (voir trois) grandes catégories de sûretés :

1. Sûretés réelles = affectation d’un bien (//droit des biens) Les sûretés réelles consistent à affecter un bien précis du patrimoine du D à la satisfaction du C. On va alors créer un lien entre le C et le bien qui se trouve dans le patrimoine du D (l’établissement d’un tel lien entre une personne et un bien nous renvoie au droit réel qui crée un lien immédiat entre le bien et le titulaire d’un droit sur ce bien). Ex. le banquier qui a prêté de l’argent à un D dit : je vous prête à condition que l’appartement de votre patrimoine me soit réservé par priorité s’il y a un problème d’exécution.

→ Idée : affecter un bien à la satisfaction des intérêts du C.

2. Sûretés personnelles = affectation d’un patrimoine (//droit des contrats, rglmt particulier) Le mécanisme des sûretés personnelles consistent à adjoindre un 2ème D aux côté du D principal, de manière à ce que le C voie se multiplier les chances d’être payé au moment où la créance viendra à l’échéance. Ex. prototype = contrat de cautionnement : on demande à une caution de s’engager aux cotés du D principal ; si celui-ci ne s’exécute pas, le C pourra aller frapper à la porte de la caution. Idée : adjoindre un deuxième patrimoine à celui du débiteur principal.

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Les parties sont-elles libres de créer des sûretés ? Point de départ : un C et un D (qui possède un patrimoine comprenant une maison, des euros, de l’argent sur un compte, une voiture…). Le D se voit associer à un deuxième D (sûreté personnelle). Si on se place du point de vue des tiers (les autres C du D principal).

- Une sûreté personnelle permet au C principal de se faire octroyer des biens qui sont dans le patrimoine du débiteur adjoint. J’améliore la situation du C principal, sans changer la situation des autres C.

→ En matière de sûreté personnelle, le principe = la liberté des conventions / des parties.

- Une sûreté réelle confère un bien réel par priorité au C en cas d’inexécution du débiteur. Je porte ici atteinte aux intérêts des autres C.

→ En matière de sûreté réelle, le législateur est intervenu pour dire qu’il était le seul à pouvoir créer des sûretés réelles. Ces dernières sont donc en nombre limité. Rem. Le fond du problème = les intérêts des tiers.

3. Cautions réelles = entre les sûretés personnelles et réelles

Idée : dans les sûretés personnelles lorsqu’un D accepte de s’engager au titre de caution, il prend des risques énormes car si le C n’est pas payé à échéance, il peut saisir les biens du patrimoine de la caution. Ainsi des seconds D acceptent de venir au secours du D principal qui a besoin d’une garantie mais ceux-ci subordonnent leur accord à la condition qu’un seul bien de leur patrimoine soit engagé (=système qui paraît un peu hybride). Avantage : limitation des risques pour la caution. La notion d’hybridité est mise en doute par certains auteurs. > En réalité, on serait plus proche d’un système de sûreté réelle que de cautionnement puisque c’est bien un bien du patrimoine au D qui va être affecté par priorité au paiement d’une dette. Aussi, si le bien qui a été réservé par la caution à la satisfaction du C, devait sortir du patrimoine de la caution et être vendu à un 1/3, il y a aura report des droits : le C maintiendra ses droits. < On dit de la caution réelle qu’elle est tenue que sur le bien grevé (propter rem, pas sur tout le patrimoine). Par conséquent, la caution réelle fait naître un droit réel accessoire qui va suivre la chose en quelques mains qu’elle se trouve. Alors pourquoi continuer à parler de notion hybride ? En réalité, la Cass dans un arrêt du 22 décembre 2006 a mis fin à une controverse qui opposait certains auteurs : les règles du cautionnement ne s’appliquent à la caution réelle que dans la mesure où elles sont conciliables avec sa nature.

→ Contrairement à la caution, le tiers qui fournit la sûreté réelle, n’est pas tenu sur la totalité de son patrimoine : les règles en matière de cautionnement ne s’appliquent à la caution réelle que si elles sont conciliables avec sa nature. On a donc un régime particulier : à la fois, un droit réel est créé sur le bien d’un patrimoine d’un tiers mais en même temps, on n’écarte pas complètement les règles du cautionnement.

Sûreté = mécanisme, institution juridique ayant pour effet de fournir au C une garantie de paiement :

- soit dans le patrimoine du D par préférence aux autres C, - soit dans le patrimoine d’1/3 qui sera tenu : * soit sur tous ses biens,

* soit sur un bien individualisé.

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PARTIE 1 : LES PRINCIPES GENERAUX DU DROIT DE L’EXECUTION DES CREANCIERS SUR LES BIENS DU DEBITEUR

NB. Les sûretés sont à la jointure du droit des saisies à certains égards puisque la mise en œuvre des sûretés prend souvent la forme d’une saisie d’un bien dans un patrimoine.

Titre 1 : le principe de la sujétion uniforme des biens du D

CHAPITRE I – LE PRINCIPE Article 7 de la loi hypo. « Quiconque est obligé personnellement est tenu de remplir ses engagements sur tous ses biens mobiliers ou immobiliers, présents ou à venir ».

→ TOUS les biens (meubles ou immeubles) du D sont donc là pour répondre des dettes du débiteur.

→ « Présents et à venir », peu importe le moment où les biens sont rentrés dans le patrimoine du D (même postérieur à la conclusion de l’acte), ce qui nous intéresse c’est son contenu. Quatre précisions : Section 1. Trois quant à l’application du principe quant au sujet (Débiteur)

(1) Toutes les dettes/obligations sont visées (puisque pas de précision quant à la nature contractuelles ou quasi délictuelles des dettes envisagées).

(2) Tous les C bénéficient de la possibilité de saisir les biens du D (…). Le C principal peut saisir tous

les biens du D principal. Exception, art. 1563 CJ : cas où le bien réservé est un immeuble, le C hypo doit d’abord faire saisir le bien qui est grevé de l’hypothèque à son bénéfice et si ce bien seulement ne génère pas une rentrée financière suffisante, il pourra faire saisir n’importe quel autre bien dans le patrimoine de son D. Cet article, ni impérative, ni d’OP, peut être écartée conventionnellement par les parties (en pratique, il l'est d'ailleurs quasiment toujours). Toutefois ces clauses sont inopposables aux tiers à qui elles portent préjudice. Les C-tiers pourraient donc contraindre le C-hyp. à saisir le bien hypothéqué en cas de préjudice pour eux.

(3) « Quiconque est obligé personnellement » : Le D n’est engagé sur tous ses biens que s’il est

obligé personnellement. Celui qui est engagé propter rem n’est pas engagé personnellement sur l’ensemble de son patrimoine, seuls certains biens sont concernés. L’article 7 ne vise pas les cautions réelles qui sont uniquement tenues sur un bien.

Section 2. Une quant à l’application du principe quant à l’objet (les biens)

---------- Observation du précis : le créancier est exposé à tous des aléas pouvant affecter la consistance du patrimoine de son D, ou à la négligence de ce dernier. Lorsqu’il exécutera son droit, le C risque de rencontrer un patrimoine dégarni et se de heurter à l’insolvabilité de son D.

⇒ Le Législateur met à disposition du C différents moyens de défense contre ce type de préjudice. - Des mesures classiques ; action oblique, action paulienne, saisies conservatoires. - Des mesures spécifiques ; apposition de scellés sur les biens dépendant d’une succession (1148

CJ), intervention au partage des biens dont le débiteur est propriétaire indivis (1561, al.2 CJ), droit d‘exiger une garantie de la société débitrice en cas de réduction de capital avec remboursement aux actionnaires (613, al.4 CSoc).

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(4) A partir du moment où le C a une emprise sur tous les bien du patrimoine de son D, le C a intérêt à ce que le patrimoine du D soit le plus rempli possible.

→ Les C ont donc tout intérêt à ce qu’il y a le plus possible de biens qui rentrent dans le patrimoine du D et le moins de biens possible qui puissent en sortir. Le législateur met à disposition des C toute une série d’instruments que les C peuvent utiliser pour faire rentrer des biens dans le patrimoine du D pour éviter qu’il n’en sorte trop.

I. Action oblique (art. 1166 Cc) : action que le C peut mettre en œuvre lorsque le D est

négligent et refuse de poursuivre ses D. Le C peut alors agir à la place du D principal. Conditions : * négligence du D principal,

* intérêt à l’action dans le chef du C, càd un risque sérieux d’insolvabilité dans le chef du D principal,

* créance certaine et exigible.

II. Action paulienne (art. 1167 Cc) : action qui permet au C d’agir lorsque le D principal s’est frauduleusement dépouillé d’un bien de son patrimoine, elle tend à réparer les conséquences de cet appauvrissement frauduleux. La réparation la plus utilisé est l’« inopposabilité de l’acte frauduleux » et quand cette réparation en nature n’est pas possible, des dommages et intérêts peuvent aussi être accordés. Conditions : * le tiers doit être complice, * fraude organisée entre le D principal et le tiers acquéreur.

III. Saisies conservatoires (art. 1413 & s. CJ) : mécanisme juridique qui permet la sauvegarde des biens dans le patrimoine du D, faire saisir un bien dont on craint qu’il sorte du patrimoine du D précisément pour le maintenir dans ce patrimoine en question. Cette saisie a pour effet que les biens saisis deviennent indisponibles.

CHAPITRE II - EXCEPTIONS AU PRINCIPE DE LA SUJETION UNIFORME a) Biens insaisissables (art. 1408 & s. CJ) : ce sont essentiellement des biens de première nécessité

= insaisissable pour des raisons humanitaires ou qui servent à l’exercice de la profession. = insaisissable pour une raison logique, éviter que le D ne puisse plus remplir son patrimoine). = insaisissable par nature, biens qui ont une valeur extrapatrimoniale (Ex. des lettres), ou des droits extrapatrimoniaux (droit d’expression, droit à l’image,…). + biens partiellement saisissables, (ex. les revenus du travail).

b) PM de droit public (art. 1412bis CJ), Idée : ils bénéficient d’une immunité d’exécution pour garantir l’idée de continuité du SP (= exception au principe de la sujétion uniforme).

Exceptions : 1. Les PM de droit public peuvent dresser une liste des biens qu’elles estiment saisissables. 2. On peut toujours saisir les biens manifestement pas utiles à l’exécution de la continuité du SP.

c) UE et Etat étrangers (art. 1er du protocole du 8 avril 1965 sur les privilèges et immunités des communautés européennes) : « les biens et avoirs de la Communauté ne peuvent être l’objet d’aucune mesure de contrainte administrative ou judiciaire sans une autorisation de la cour ».

? Lorsqu’un D est à la tête de deux patrimoines (ex. privé et d’une société), dans ce cas les C qui relèvent du patrimoine n°1 ne pourront prélever les biens que du patrimoine n°1.

Rem. En droit belge, cette situation est très rare car chaque personne n’est titulaire que d’un et d’un seul patrimoine (Théorie unitaire et indivisible). Exception : bénéfice d’inventaire (art. 802 à 810bis Cc).

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Titre 2 : Le principe de l’exécution forcée du D

Article 8 de la loi hyp. : « les biens du D sont le gage commun de ses C ».

NB. Art. 7 : adopte le point de vue du D >< art 8 : adopte le point de vue du C Observations :

(1) Il ne faut pas prendre le mot « gage » dans son sens technique, dans l’art. 8, le législateur veut utiliser le sens de sûreté ou garantie ; les biens du D servent de garantie au C.

(2) Le droit des C à l’exécution forcée va s’exprimer par le recours à la technique des saisies. C’est en faisant saisir un bien dans le patrimoine du D que le C va concrétiser sont droit d’exécution.

- Saisie conservatoire : série de techniques pour maintenir le patrimoine du D en état. - Saisie exécution : grâce à l’intervention d’un huissier, saisir un bien du D, procéder à une vente

publique, et attribuer l’argent aux C. Rem. Il faut tjs que le C bénéficie d’un titre exécutoire pour procéder à une saisie :

(3) Le C peut saisir, à peu près, n’importe quel bien du patrimoine de son D (art. 1563), même un bien

d’une valeur supérieure ou inférieure au montant de sa créance.

→ Tous les éléments du patrimoine du D sont indifféremment affectés à l’exécution de ses obligations.

Tempérament : a) Le C-hypo ne peut commencer les poursuites en expropriation des immeubles qui ne lui sont pas

hypothéqués que dans le cas d’insuffisance des biens qui lui sont hypothéqués (art. 1563, al.1 CJ). b) La part indivise d’un immeuble peut être saisie, mais le C-saisissant ne peut procéder à sa réalisation

forcée (art. 1561 CJ).

NB. Il n’y a pas d’expropriation directe.

Le créancier ne peut se rendre coupable d’abus de droit en saisissant un bien dont la valeur est disproportionnée par rapport au montant de la créance et ayant pour effet de causer un dommage non nécessaire, ou en cas de saisie téméraire et vexatoire, en quels cas le C risque : (I) une condamnation en D&I, (II) voir les actes inutiles et arbitraires annulés.

(4) Quand un C demande à son huissier de pratiquer une saisie, le législateur organise un mécanisme de publicité des saisies (toute saisie donne lieu à une publicité de la mesure, c. art. 1569 CJ).

Idée : lorsqu’un C met en vente un bien, il a intérêt à avertir tous les autres C pour que ceux-ci puissent aussi participer, le cas échéant, à la distribution du produit de réalisation. Le seul cas dans lequel le C saisissant bénéficie d’une priorité, c’est quand une sûreté réelle est conférée sur le bien. Le produit de la vente sera alors réparti entre les créanciers sans qu’une nouvelle mesure d’introduction de saisie soit nécessaire.

(5) L’art. 8 ≠≠≠≠ d’OP, les parties peuvent donc y déroger. Elles peuvent décider que tel bien du patrimoine du D ne peut être saisi. Les clauses d’insaisissabilité sont valables, mais… … elles ne peuvent pas porter préjudice aux autres C du D, … si les parties convenaient d’écarter tous les biens du D, on pourrait qualifier cet engagement du D comme « purement potestatif », ce qui entrainerait sa nullité.

- jugement - acte notarié

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Titre 3 : Le principe de l’égalité des C

CHAPITRE I – LE CONCOURS DES CREANCIERS Section 1. Introduction

1. Principe

Cfr : art. 8, al 2 de la loi hypo. : « le prix s’en distribue entre deux par contribution ». Lorsque les biens du D sont insuffisants pour désintéresser tous ses C, le principe de l’égalité conduit à la répartition au marc le franc du produit de la réalisation desdits biens : situation de concours.

NB. On ne paie pas celui qui frappe en premier lieu à la porte du débiteur de façon plus favorable.

→ Principe de répartition = partage par contribution, càd en proportion du montant des créances. Ex. un débiteur a trois créanciers : - C1 : créance de 300 - C2 : Créance de 200 = Montant total des créances : 600

- C3 : créance de 100 Un bien est saisi, mis en vente et on obtient 120. Une répartition proportionnelle va donner : - C1 : 50% de 120

- C2 : 40 - C3 : 20

NB. Si on répartit le disponible proportionnellement au montant de la créance, cela veut dire que chacun supporte aussi l’insolvabilité de son débiteur à concurrence du montant de sa créance.

2. Situation de concours entre les C

Cette répartition trouve son intérêt lorsqu’un débiteur ne peut faire face à l’ensemble de ses dettes. Dans ce cas, on traite les créanciers en appliquant la règle de la contribution. La mise en œuvre concrète du principe de l’égalité des créanciers prend son sens :

> Lorsqu’il y a donc une situation d’insolvabilité : condition matérielle. > Lorsqu’il y a plusieurs créanciers émettant (à propos d’un même bien ou d’une masse à répartir) des prétentions inconciliables, condition formelle.

→ Situations de concours = rencontre, due à l’insolvabilité du D de pl. créanciers ou à la volonté du Législateur, de prétentions contradictoires des créanciers sur un ou plusieurs biens du débiteur, dont celui-ci a perdu la libre disposition.

3. Egalité entre les C ; réalité plutôt théorique

< L’égalité des créanciers est en réalité très théorique, car si elle est le principe, nombreuses sont les règles qui viennent mettre à mal cette égalité.

> Dans les faits, la situation des C est en règle plutôt inégalitaire. En effet certains C seront plus vigilants et s’attacheront à se prémunir d’armes visant à leur accorder une priorité par rapport aux autres C.

⇒ L’intérêt du droit des sûretés est : - d’identifier les créanciers qui bénéficient d’une sûreté, - à l’intérieur de ceux-ci, opérer des classements et priorités.

? Comment répartir les biens : règle de base = principe de répartition entre créancier

> Les situations de concours sont des situations lors desquelles plusieurs créanciers souhaitent participer à la répartition de la masse des biens du débiteur à répartir. Cette situation n’implique pas en soi une situation d’insolvabilité. Il y a concours lorsque plusieurs C font valoir des prétentions sur la masse des biens à répartir (prétentions qui ne pourront pas toutes être satisfaites).

NB. La saisie en elle-même ne crée pas une situation de concours, il faut pour cela qu’un 2e C se soit joint à la saisie initiée par le premier C.

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Section 2. Principaux types de situation de concours

1. Concours dû à la l’initiative des créanciers : la saisie-exécution

> Ces situations de saisie sont appelées situations de concours limitées. Situation de concours une fois qu’on a deux C qui souhaitent une part du gâteau ; elle est limitée car deux C veulent une part du produit de réalisation d’un seul bien, le bien saisi.

2. Concours dû à l’effet de la loi : les procédures collectives de liquidation

< Situation de concours complet : situation de concours où tous les C du D sont concernés par la liquidation de l’ensemble des biens du D.

⇒ Le droit connaît des procédures de concours bcp plus générales, comme la situation de faillite. Ce type de situation de concours est tout à fait complet et organisé par le Législateur.

A. Situation de faillite, situation de concours :

- complète, parce qu’il va concerner tous les biens et tous les créanciers du débiteur, - organisée, parce qu’il existe une loi sur la faillite, la loi du 8 août 1997 qui organise toute la

procédure de faillite par le législateur.

Lorsqu’un commerçant (la faillite ne concerne qu’eux) est (I) en état de cessation de paiement, et lorsque plus personne ne fait crédit à ce commerçant, ce dernier est dit être en état de faillite. Le commerçant qui est en état de faillite doit faire aveux dans le mois de sa situation, (II) déclaration de faillite. (III) Si les conditions de la faillite sont remplies, le tribunal de commerce prononce la faillite. Le tribunal va alors (IV) nommer un curateur pour liquider ce qu’il reste à liquider, mettre en vente les biens du failli et avec l’argent récolté, (V) le curateur va répartir l’argent entre les différents créanciers qui se seront manifestés. On est dans une situation de concours complet et organisé. Rem. La plupart des faillites sont déficitaires (actif insuffisant pour couvrir le montant des créances). De temps en temps, elles sont bénéficiaires (situations très rares). C’est possible car l’état de cessation de paiement ne veut pas dire état d’insolvabilité. On peut avoir des actifs difficiles à réaliser.

Ex. On est commerçant, on exploite une salle de fête et le seul bien dans notre patrimoine = un château. On ne peut mobiliser celui-ci facilement. Du coup, on peut se trouver dans une situation où on ne peut plus payer alors qu’on a un château dans notre patrimoine !! Ce sont des situations exceptionnelles ! Lire art 2, 6 et 9 de la loi sur les faillites

B. Situation du règlement collectif de dettes : c’est la faillite des non commerçants, le juge va alors désigner un médiateur de dettes.

C. Dissolution et liquidation d’une société commerciale.

D. Concordat judiciaire.

3. Cristallisation des droits des créanciers

« La cristallisation des droits des C », se produit au moment de la naissance du concours, càd : - soit au moment où un seconde créancier se joint à la saisie (concours limité), - soit au moment où la faillite est prononcée par le Trib. de Comm. (concours complet).

Idée : au moment où le concours va naître, on va figer le patrimoine actif et passif du failli (ou du saisi). Pourquoi ? Parce que si les créances continuaient à fluctuer, on ne serait jamais en mesure de dire comment on va pouvoir répartir l’actif.

⇒ Ces biens sont désormais gelés, ils sont exclusivement réservés à la satisfaction des créanciers en concours. Ils échappent à la libre disposition du débiteur et ne peuvent plus être aliénés ou grevés de charges réelles.

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→ Concrètement, on photographie la situation au moment de la naissance du concours. Et sur cette base, on applique les règles du droit des sûretés. Conséquences :

1) Suspension des voies d’exécution individuelles (art. 25 loi des faillites). Une fois que le concours est né, il n’est plus possible qu’il y ait des initiatives individuelles des créanciers.

Comment est ce que cette suspension se traduit concrètement ?

• Situation de saisie : les créanciers supplémentaires pourront se joindre à la saisie, mais ne pourront pas saisir le bien faisant d’hors et déjà l’objet d’une saisie.

• Situation de faillite : le C ne peut procéder à des mesures visant à son seul profit, car cela déséquilibrerait l’ensemble du mécanisme de liquidation collective.

Exception : les créanciers bénéficiant d’une sûreté spéciale continuent à bénéficier d’un droit de poursuite. Ceux-ci ont, dans le patrimoine du débiteur, priorité sur un bien particulier, et ils pourront continuer à saisir le(s) bien(s) qui leurs revenai(en)t (v. art. 26).

Schéma : créanciers chirographaires V Suspension pour les Situation de concours créanciers ayant un privilège général sur meuble (26 L.F.) X Suspension pour les créanciers ayant un privilège spécial sur immeuble (100 L.F.)

2) Les frais de procédure ou d’exécution des biens du débiteur vont être prélevés par priorité sur le

produit de réalisation avant même de satisfaire les créanciers.

Les frais liés à la réalisation sont prélevés avant qu’on fasse la répartition. C’est une manière de faire supporter les frais de réalisation par tout le monde. Le fait de procéder de cette manière = voie idéale pour respecter la situation d’égalité entre les C.

3) Arrêt du cours des intérêts (art. 22 et 23 loi sur les faillites). Il faut arrêter les compteurs et chiffrer

les créances des créanciers. Dès que la faillite est prononcée, toutes les dettes du failli deviennent exigibles, c'est-à-dire que le débiteur perd le bénéfice du terme (si terme il y a, v. art. 1188 Cc). Cela permet aussi au curateur d’arrêter les comptes.

Exception : la règle ne joue pas pour ceux qui bénéficient d’une sûreté réelle spéciale. 4) Clauses pénales. La cristallisation et l’égalité des C supposent qu’à compter de la survenance du

concours, il ne soit plus possible de mettre en œuvre des clauses pénales.

Il faut nuancer cette vision catégorique selon le type de clauses pénales. - X Certaines ne pourront plus jouer parce que leur mise en œuvre romprait l’égalité entre C (si elle stipule que le paiement de la somme intervient du seul fait de la situation de faillite), - V D’autres pourront jouer malgré la survenance de la faillite (cl. pénale classique), càd si elles stipulent qu’en cas de méconnaissance par le D de ses engagements et de responsabilité contractuelle, le D sera redevable envers le créancier de D&I forfaitaires.

Ex. On trouvait ce genre de clauses dans des contrats de sous-traitance. Les entrepreneurs se disent que la faillite peut poser problème : un sous-traitant tombe en faillite et après la faillite, on remarque une irrégularité dans le chantier. Le maître de l’ouvrage se retourne contre l’entrepreneur, mais ce dernier ne peut se retourner contre le failli. Alors certains entrepreneurs vont réclamer une clause pénale pour mettre des sous de côté afin de faire face à ce recours du maître de l’ouvrage. Se réserver de l’argent alors qu’il n’y a pas encore eu défaillance est une situation incompatible avec le principe d’égalité des créanciers, ces clauses pénales ne peuvent être invoquées une fois la faillite survenue. Il faut avoir une lecture très fine de la clause pénale.

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CHAPITRE II : LES EXCEPTIONS AU PRINCIPE DE LA REGLE DE L’EGALITE DES CREANCIERS (PEC) Le principe de l’égalité est consigné dans l’art 8 loi hypo. : « (…) a moins qu’il n’y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence ». Section 1. Les causes de préférence Les causes légitimes de préférence sont des causes que certains créanciers peuvent invoquer pour exiger d’être payé par priorité, elles viennent donc briser le principe d’égalité des créanciers (8, 9 L.Hyp.).

� Les créanciers privilégiés = ceux qui bénéficient d’une sûreté réelle, ceux qui bénéficient d’ne cause légitime de préférence.

� Les créanciers chirographaires = ceux qui n’ont aucune cause légitime de préférence.

Les créanciers titulaires de sûretés sont ainsi soustraits à la règle de l’égalité et aux effets du concours précisément en raison de la préférence qui est attachée à leurs créances. Section 2. Sûretés réelles et sûretés personnelles Article 9 : « Les causes légitimes de préférences sont les privilèges et les hypothèques ».

→ Les créanciers titulaires de sûretés sont ainsi soustraits à la règle de l’égalité et aux effets du concours précisément en raison de la préférence qui est attachée à leurs créances.

• Les privilèges et les hypothèques sont des sûretés réelles, elles grèvent un ou plusieurs biens du D et confèrent à leur titulaire priorité sur le prix de réalisation du ou des biens qui en sont l’assiette, lesquels se trouvent ainsi affectés, par préférence, au règlement de la dette.

• Les sûretés personnelles n’accordent à son titulaire aucune préférence sur un bien du D, elles ne peuvent pas vraiment être présentées comme une exception au principe de l’égalité des créanciers. Les autres C ne voient pas leur “assiette” réduite de par l’existence de la sûreté personnelle.

Section 3. Caractère limitatif des exceptions au principe de l’égalité des créanciers 1. Remarques par rapport à ce schéma général :

1) Le législateur identifie deux causes : les privilèges et les hypothèques, mais le législateur n’a-t-il pas oublié une 3e cause légitime de préférence qui est le gage ? S’il est bien une cause légitime de préférence, il n’est pas un privilège mais il est techniquement assimilé à un privilège.

2) Le PEC ≠≠≠≠ d’OP (les parties peuvent donc bilatéralement renoncer à une cause de préférence dont elles bénéficieraient).

3) La liste des privilèges est une liste très longue. Le nombre de C qui bénéficient de privilèges est impressionnant (vendeur, bailleur, fisc, ONSS….). D’ailleurs les créanciers chirographaires n’ont pratiquement aucun espoir de récupérer qqch. Des règles ont été établies par le législateur pour opérer un classement, on peut se demander si le PEC est encore un principe de notre droit, et si l’application de la règle de contribution ne vient pas comme une exception ?

2. Débat : Autonomie de la volonté vs. Egalité des créanciers

⇒ Divergence en ce qui concerne l’utilisation des potentialités offertes par le droit des obligations.

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2.1. Point de vue doctrinal ;

> Ecole restrictive. Malgré ce tableau inversé par rapport à la philosophie de base, certains auteurs continuent à dire que les règles du droit des sûretés ne se comprennent que si on garde en mémoire cette règle de l’égalité entre créanciers (//règle fondamentale). L’adage « Pas de privilèges sans texte » serait donc encore en vigueur dans notre système juridique.

> Ecole extensive. Seul le législateur peut créer des sûretés réelles, mais rien n’empêche les créanciers d’utiliser le droit des obligations et toutes les potentialités fournies par ce droit à des fins de sûreté (convention-loi, opposabilité des conventions, etc. sont des principes suffisants pour les créanciers afin de tirer toutes les potentialités qu’offre le droit des obligations).

= Débat compliqué qui n’est pas tranché par le législateur. La règle « pas de privilège sans texte » est d’interprétation stricte. Elle ne fait pas obstacle à la mise en œuvre, malgré le concours des C, de certains mécanismes ou institutions tenant au droit des obligations, parfois même d’origine contractuelle, qui, sans véritablement créer une sûreté, ont néanmoins incontestablement pour effet d’avantager un C au détriment des autres :

Ex(1). La technique de la compensation : mode de paiement d’extinction des dettes à concurrence de la plus petite des deux dettes. Si une faillite se produit et qu’un créancier est en faillite, il aura été partiellement payé s’il invoque la compensation, car il est créancier et débiteur. Ex(2). Un vendeur a vendu un bien au débiteur avec une clause de réserve de propriété. C'est un mécanisme du droit des obligations, mais c'est un mécanisme qui va avantager le créancier, le mécanisme aura des effets de sûreté. Si le débiteur tombe en faillite avant d’avoir payé l’intégralité du prix, le créancier va exercer ses droits et revendiquer le bien. Cette clause peut donc rendre de grands services au créancier en cas de survenance d’une situation de concours.

2.2. Position du Législateur et de la Cassation ;

A. La Cour de cassation parfois adhère à l’une1, et puis à l’autre2.

X 1Arrêts Cass. De mai et septembre 2004 : à propos de 1798 Civ. (action directe du sous-traitant). La Cass. a limité l’effet de l’action directe : celle-ci ne peut plus être mise en œuvre quand naît une situation de concours. Une fois que naît la situation de concours par la faillite de l’entrepreneur, le s-t ne peut plus mettre en œuvre l’action directe parce que tous les C doivent être mis sur pied d’égalité et que si soudain, l’un deux pouvait trouver une solution à son problème de paiement en utilisant 1798, il y aurait rupture du PEC. Cass. La faillite rend indisponible la créance que l’entrepreneur a envers le MO. Cette créance est immobilisée à partir de la situation de concours. La Cass. ne paraît pas favorable à des mécanismes tirés su droit des obligations qui auraient pour effet de favoriser certains.

V 2Arrêt Cass. à propos de la compensation : la Cass. a, à plusieurs reprises, admis le jeu de la compensation des créances malgré la survenance du concours.

→ Ces deux arrêts montrent que le Cour de cassation n’a pas adopté de philosophie générale.

B. Le législateur n’a pas envisagé de solution d’ensemble, mais des solutions relativement ponctuelles.

I. La compensation.

Avant d’être une garantie, la compensation est d’abord un mode d’extinction des obligations. L’extinction se fait à concurrence du plus petit des montants.

I.I. Compensation légale

Art. 1289 Cc : « quand deux personnes sont débitrices l’une de l’autre, il s’opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes. L’extinction se fait à concurrence du plus petit des deux montants ». La compensation légale joue de plein droit dès que les conditions sont remplies : dettes fongibles, liquides et exigibles.

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- Avant la survenance d’une situation de concours, pas d’obstacle à ce que joue la compensation. - Après, la compensation est susceptible de créer une situation favorable au C qui en bénéficie.

> De ce fait, la compensation légale ne joue plus après la survenance d’une situation de concours. Le législateur n’a pas exprimé cette règle aussi précisément, mais on déduit cette impossibilité de la lecture de l’art. 1298 Cc ; comme la saisie peut créer une situation de concours, la doctrine en déduit une règle générale : pas de compensation légale après faillite.

Contenu de l’art. 1298 : trois parties sont concernées (un C, un D, un D du D initial).

L’article part de la situation dans laquelle le créancier n’est pas payé par le débiteur principal. Face à cela, le créancier utilise une technique du code judiciaire: saisie-arrêt sur les comptes en banque du débiteur du débiteur. L’article dit que si les règles de compensation entre les deux débiteurs sont remplies avant la saisie, le débiteur du débiteur pourra invoquer cette compensation pour ne pas payer le C qui pratique la saisie ; mais si les conditions sont réunies après la survenance de la saisie, il ne sera lus possible d’invoquer la compensation.

→ Il est communément admis que l’application des règles de la compensation légale n’est pas possible

une fois situations de concours survenue.

Assouplissement. Cette règle a été adoucie par la doctrine et la jurisprudence via une exception : lorsqu’entre les dettes réciproques des parties, il existe un lien de connexité. S’il existe un lien étroit et objectif entre les dettes à compenser, la compensation légale pourra jouer, même après la survenance de la situation de concours. La Cour de cassation admet cette exception.

Rem. Le législateur lui-même, dans certains textes de lois spécifiques, va jusqu’à admettre des dérogations à l’interdiction de base dans des hypothèses que le législateur estime digne d’une protection particulière.

Ex : article 334 de la loi du 27/12/04 qui vise les relations entre le fisc et le contribuable : toute somme à restituer à un contribuable peut être affectée au paiement des impôts, y compris dans des situations de concours.

+ À côté des règles qui s’appliquent à la compensation légale, les parties sont en principe libres de convenir de tout autre type de compensation. Elles peuvent, par ex., prévoir dans leur convention que la compensation pourra jouer malgré qu’une des conditions n’est pas remplie (art. 1289 et s. = supplétifs).

I.II. Compensation conventionnelle

Le sort de la compensation conventionnelle a été aménagé par le législateur par l’adoption d’une loi du 15 décembre 2004 (relatif aux sûretés financières = LSF), transposition d’une Directive EU. Cette réglementation a réellement bouleversé ce qu’était la compensation conventionnelle avant 2004. Le régime de 2004 s’applique dans des hypothèses précises (en dehors de ces hypothèses, on s’en retourne au régime antérieur).

• Régime antérieur (av. ‘05) : subsiste encore quand les conditions de la LSF ne sont pas remplies.

Première règle : la compensation ne joue plus une fois survenue la situation de concours.

Deuxième règle : s’il existe un lien étroit, rapport objectif entre les deux dettes, la compensation pourra jouer, même survenue la situation de concours.

Troisième règle (art. 17,2° loi sur les faillites) Idée : une fois que le commerçant est déclaré en faillite, il perd la maîtrise de son patrimoine, en effet il ne va plus pouvoir gérer lui-même son patrimoine (il est dessaisi de la gestion de son patrimoine), et le curateur doit alors liquider le patrimoine du failli.

Le législateur va jusqu’à remettre en cause certains actes posés par le failli juste avant que la faillite ne soit déclarée : acte posés en période suspecte. Vont être remis en cause, les actes accomplis pour le failli au cours des 6 derniers mois qui ont précédé le jour de la faillite.

L’art 17 dit que « les paiements qui ont eu lieu par voie de compensation conventionnelle pendant la période

suspecte, seront déclarés inopposables au créancier ». Le curateur fera comme s’il n’y avait pas eu de compensation.

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• Régime de la LSF : il règle le sort des clauses de compensation (règlementation propre)

I. Le législateur parle de « convention de netting » pour satisfaire les anglais (v. art. 3, 4°). Les clauses de compensation sont valables et opposables aux tiers malgré la survenance d’une situation de concours, du moment que deux conditions sont remplies (v. art. 14, 15 LSF):

- La convention de netting doit avoir été conclue avant la naissance de la situation de concours. - Les dettes réciproques à compenser doivent être des dettes nées avant la naissance de la

situation de concours (peu importe quand elles seront exigibles).

NB. La loi de 2004 a opéré un renversement par rapport à la philosophie antérieure !

II. L’art. 17, 2° (inopposabilité des compensations survenues en période suspecte) n’est pas applicable en présence d’une convention de netting rentrant dans le champ d’application de la LSF. Il n’est plus possible de venir mettre en péril des compensations survenues lors de la période suspecte.

III. L’art. 1295 est écarté quand on est dans un régime LSF. Cet article dit : « une fois que la cession de créance s’est opérée, le débiteur ne peut plus invoquer une compensation qui surviendrait postérieurement à la cession » = compensation reste possible malgré la cession des droits à un cessionnaire.

→ Avec cet ensemble de règles, la compensation conventionnelle est devenue très avantageuse.

⟩ Les banques ont bien compris l’intérêt de la nouvelle réglementation. Celles-ci sont les mieux placées pour invoquer la compensation et se trouver dans les conditions de la compensation. En effet, si les banques sont C du débiteur failli (parce qu’elles ont fait un prêt…), elles détiennent aussi les avoirs du failli, et peuvent ainsi aisément faire jouer le mécanisme de la compensation.

Toutes les banques ont profité de ce système pour insérer des clauses de compensation conventionnelle. Cette attitude des banques a fait réagir certains acteurs de la vie bancaire, notamment la Cour constitutionnelle.

Réactions. Révolution copernicienne : modification des règles applicables aux compensations par la LSF. La transposition qui a été faite en droit belge de la directe de 2002 est une transposition large : les art. 14 et s. s’appliquent indépendamment de la qualité des parties (même si une partie est non commerçante, les règles des articles 14 et s. vont s’appliquer).

Csq : dès que nait une situation de concours (faillite…), les banques vont presque toujours se trouver en position intéressante/dominante par rapport aux autres C de la personne failli, en situation de cessation de paiement… Les banques ont ceci de particulier qu’elles ont l’avantage de disposer des comptes de la personne en situation de faillite, entre lesquels elles peuvent opérer une compensation. La loi sur les suretés est avantageuse pour les banques.

Cette transposition large a provoqué un certain émoi auprès de certains justiciables (notamment non commerçant). Lorsqu’une personne physique non commerçante se retrouve en état d’insolvabilité/de cessation des paiements, dans ce cas, elle peut demander au tribunal du travail d’être admise au règlement collectif de dettes (= faillite des non commerçants). Ce règlement crée une situation de concours. Grace à la LSF, la naissance d’une situation de concours provoque un appel du banquier au jeu de la compensation. (…) Certains plaideurs ont trouvé choquant qu’on puisse même en présence d’une personne physique se trouver dans ce genre de situation où les banques ont toujours un avantage par rapport aux autres C.

Un juge s’est interrogé sur la question de savoir s’il était normal qu’on applique aussi largement les règles de la compensation (= juge des saisies de Neufchâteau). Une personne disposait de deux comptes en banque auprès de la même banque, l’un ayant un solde positif et l’autre étant négatif. Lors de son admission au bénéfice du règlement collectif de dettes et la banque se prévaut de la clause de compensation, et invoque alors la compensation entre les soldes des deux comptes. Le médiateur de dettes (//curateur) met en doute la constitutionnalité des art. 14 et s. Le juge des saisies est assez sensible à l’argument invoqué par le médiateur à tel point qu’il pose une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle.

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→ La Cour Cllee dans un arrêt du 27/11/08 : en ce qu’ils sont applicables à des personne physiques qui n’ont pas la qualité de commerçants, les art 14 et 15 LSF violent les art 10 et 11 const. Ainsi, la Cour a déclaré partiellement inconstitutionnels les art 14 et 15.

Partant d’un objectif de croissance économique et de stabilité financière, la loi est là pour favoriser le crédit à des personnes qui initient des activités commerciales.

⇒ Csq : on crée une sorte de discrimination entre les C des non commerçants et les C des commerçants puisque selon le cas, on peut bénéficier ou non des articles 14 et 15.

⇒ Csq : pour ce qui concerne les situations de règlement collectif de dettes/situation d’insolvabilité des personne non commerçantes, on applique le régime qui existait antérieurement à 1994.

II. Droit de rétention = Droit pour un des contractants de différer la restitution d’une chose qui est la propriété d’une autre personne (le débiteur) jusqu’à ce que le débiteur s’exécute.

Pas de PG du droit de rétention mais le législateur en a fait de nombreuses applications dans le Cc. Du coup, la doctrine a établi une sorte de théorie du droit de rétention, avec différentes conditions :

I. La dette doit porter sur une somme certaine et exigible.

II. Le bien retenu doit être un bien saisissable.

III. Lien de connexité (matériel, juridique, mixte) entre la créance et la chose retenue par le créancier.

a) Matériel : existe quand la créance s’explique par des opérations matérielles faites sur la chose.

b) Juridique : le lien entre la chose et la créance est le fait d’une relation contractuelle.

c) Mixte : il y a à la fois une relation contractuelle et à la fois des travaux réalisés sur la chose.

Selon la Cour de cassation, arrêt 7 novembre 1935, l’opposabilité du droit de rétention (aux autres C du débiteur) subsiste malgré la survenance d’une situation de concours.

Divergence en doctrine : quant aux effets à rattacher à cette opposabilité. Deux courants en doctrine:

* Idée : le législateur est seul maître de la création de sûretés réelles, mais on peut utiliser les outils du droit des obligations (comme droit des rétentions) pour se créer un avantage, càd donnons au droit des obligations l’étendue des possibilités qu’il offre.

* Idée : le droit des obligations n’est pas là pour aller au delà de ce que décide le législateur en matière de sûreté réelle = principe de légalité : le droit de rétention ne peut servir que de moyen de pression.

NB. Droit de rétention = moyen de pression qui n’a d’utilité que si la chose retenu vaut quelque chose.

III. Clause de réserve de propriété Clause classique : retarder le transfert de propriété jusqu’au jour du paiement complet du prix.

> Jusqu’en 1997, les clauses de réserve de propriété, bien que licites = relativement inefficaces. En effet, la Cour de cassation disait que les clauses n’étaient pas opposables au curateur (donc, une fois née la situation de concours en présence d’un débiteur commerçant, une fois déclarée la faillite, la clause perdait toute utilité parce qu’elle ne pouvait être invoquée).

< En 1997, la loi sur les faillites du 8 août 1997 est adoptée. Cette loi contient un art. 101 qui va à l’encontre de la jurisprudence de la Cassation puisqu’il reconnaît l’opposabilité aux tiers de la clause de

réserve malgré la survenance de la faillite, conditions :

I. La clause de réserve doit être établie par écrit (au plus tard au moment de la livraison du bien). Rem. Arrêt 25/12/06 : cette clause peut être conclue dans des conditions générales de vente.

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II. Les biens (qui ont fait l’objet de la réserve de propriété) doivent se retrouver en nature chez le débiteur (histoire de pouvoir les identifier), et y être identifiables.

Ex. Arrêt 13 février 2006 : livraison de compact disques qui se trouvaient sur des étagères et venaient de différents fournisseurs Impossibilité d’identifier les C avec la clause ; elle sera sans effet.

III. Le C qui souhaite mettre en route sa clause de réserve de propriété doit introduire une action en revendication et il doit le fait avant le premier dépôt du PV de vérification de créances.

Rem. a) Action en revendication = exercer son droit en disant qu’on avait conclu un contrat avec

réserve et qu’on entend exercer le droit contenu dans le contrat (≠nécessairement introduire une action en justice pour récupérer la chose).

b) Revendication ne doit pas être compris dans son sens technique, il ne faut donc pas

forcément dépossession, mais il faut bien être propriétaire (= droit de revendication, ≠ action en revendication).

⇒ L’art. 101 de la loi de 1997 a créé (au bénéfice du vendeur) une véritable sûreté. Dès lors qu’on reconnaît à la clause de réserve de propriété, les effets d’une sûreté, il faudra lui attacher les effets que l’on accroche généralement aux sûretés. Parmi les effets : ceux de la subrogation réelle.

? NB. Le législateur a réglementé la clause de réserve de propriété dans le cas où la situation de concours est une situation de faillite, mais que faire dans les autres situations de concours (règlement collectif de dettes, saisies…) ?

Une bonne majorité des auteurs se sont mis d’accord : le texte est contenu dans une loi particulière et il n’y a pas lieu détendre la réglementation aux autres situations de faillite.

La Cour de cassation a confirmé cette tendance, dans un arrêt du 7 mai 2010 : vente d’une corsa avec clause de réserve de propriété. L’acheteur est admis au règlement collectif de dettes. La voiture n’était pas complètement payée. Opel dépose une requête pour revendiquer le bien. Le juge des saisies de Namur rejette la requête. Liège (en appel) confirme la décision de Namur. La procédure va en cassation. Celle-ci rappelle l’état de la doctrine :

1. Pas de PG de droit d’opposabilité de la clause de réserve de propriété en cas de concours. 2. La clause de réserve de propriété n’est pas opposable au créancier de l’acheteur en cas de

concours avec le vendeur. 3. La décision d’admission au règlement collectif de dette fait naître une situation de concours.

⇒ La Cour de cassation a rejeté le pourvoi introduit par Opel : dans une situation de concours (sauf faillite), c’est l’art. 25 loi hypo. qui détermine les droits du vendeur (qui n’est donc pas entièrement démuni !!).

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PARTIE II : LES SURETES REELLES

Titre 1 : Considérations générales

CHAPITRE 1 : LA NOTION DE SURETE REELLE

La sûreté réelle est un droit reconnu au créancier, accessoirement à sa créance dont il garantit le paiement, qui grève un ou plusieurs biens déterminés (ou un ensemble de biens) du débiteur.

Section 1 : Caractère accessoire Quand on dit que les sûretés réelles sont des « droits accessoires », on entend le concept d’accessoriété dans un double sens :

1. Notion d’utilité juridique

Sûretés = droits réels accessoires car :

• Elles ne confèrent à leur titulaire aucune utilité matérielle sur la chose qui est affectée.

• Elles ne confèrent à leur titulaire une utilité juridique, droit d’être préféré aux autres C quand il s’agira de répartir le produit de réalisation du bien. Le titulaire de la sûreté va :

- Toujours bénéficier d’un droit de préférence lors de la répartition,

- Parfois doublé d’un droit de suite, droit attaché à certaines sûretés, comme l’hypothèque, et qui permet au C se suivre la chose en quelques mains qu’elle se trouve, la saisir et la réaliser. Le droit de suite est utile car grâce à lui, le créancier n’a pas de craintes de laissé la chose affecté de la sûreté chez le débiteur.

Rem. Le législateur n’a accroché au droit de préférence, un droit de suite que dans les hypothèses où il est matériellement possible de savoir où se trouve le bien ; il ne concerne donc que les situations immobilières (il n’y a pas de régime de publicité mobilière).

Néanmoins, on peut suivre facilement la trace de certains meubles, du coup le législateur est revenu sur ses propos pour accorder un droit de suite à certaines sûretés mobilières. ex. un gage conféré sur un fond de commerce, gage sur fond agricole, gage sur bail. Art. 2279 ne s’applique pas ici.

2. Notion de garantie

Sûretés = droits réels accessoires car elles sont toujours l’accessoire d’une dette principale. Il y a nécessairement une dette principale qui existe et qui justifie l’existence de la sûreté. La sûreté réelle est accessoire parce que la notion de garantie n’a de sens que s’il y a une dette à garantir.

NB. Cette notion concerne l’ensemble des sûretés réelles.

3. Réflexion quant à l’accessoriété vis-à-vis du système bancaire La validité du cautionnement pour dettes futur à tjs été admise, mais une controverse subsistait pour les sûretés réelles et plus spécifiquement concernant le gage sur fonds de commerce et l’hypothèque.

(Réf.1) Si on recourt à une interprétation stricte du concept d’accessoriété, on devrait conclure qu’il n’est pas possible d’avoir une sûreté tant qu’existe la dette principale.

> Or la pratique bancaire est une pratique en sens opposé : on observe fréquemment des banques qui requièrent de leur client la constitution d’une sûreté alors que la dette à garantir n’existe pas encore.

Classiquement, l’hypothèque est consentie pour sûreté de toutes dettes actuelles ou futures qui surviendraient ou qui lieraient les parties. La pratique bancaire s’est développée en ce sens que des sûretés sont régulièrement configurées pour garantir le paiement de dette(s) qui n’existe(nt) pas encore ; Est ce que cette pratique est licite ? Juridiquement valable ?

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Arrêt du 28 mars 1974 : « arrêt Arsen Mengal » = commerçant à qui une banque avait consenti un prêt. La Banque a alors demandé à Arsen la constitution d’une sûreté. Arsen accède à cette demande et constitue un gage sur son fond de commerce au profit de la banque pour la rassurer quant au remboursement du crédit ; Ce gage avait été constitué de manière très large. En effet, lors de la constitution du gage, les parties avaient prévu que ce gage était destiné à garantir le remboursement du prêt et le paiement de toutes sommes quelconques dont le créancier pourrait devenir responsable envers la banque. Arsen rembourse son premier prêt (à l’occasion duquel le gage a été constitué) et puis, la banque consent une nouvelle ouverture de crédit ; Dans le cadre de cette deuxième transaction les problèmes surviennent et Arsen ne sait plus rembourser. La banque va alors vouloir faire jouer son gage. Du coup, Arsen soulève argument de l’accessoriété : au moment de la constitution du gage, la dette n’existait pas encore. La question s’est posée de savoir si on pouvait garantir le remboursement d’un ouverture de crédit née postérieurement à la constitution du gage.

⇒ La Cour d’appel de Bruxelles a décidé que la constitution d’une sûreté pour dette future était valable du moment que la dette(s) soit déterminée(s) ou déterminable(s). La Cour fonde sa décision sur l’art 1130 Cc (qui autorise les conventions sur choses futures).

⇒ La Cour de cassation, idem elle adopte le point de vue de la cour d’appel de Bxl (rejet du pourvoi).

? Cela a-t-il encore un sens de dire que les sûretés réelles sont accessoires ? La réponse à cette question

dépend de la signification que l’on donne au mot « accessoriété ».

→ Si on lui donne le sens que lui attribuait DEMOGUE, il y a accessoriété si au moment de son exécution, la dette à garantir existe. Pour vérifier l’accessoriété, il ne faut pas se placer au moment de la constitution de la sûreté mais au moment de l’exécution de la sûreté. Dans l’affaire Arsen, quand la banque a voulu mettre en œuvre sa sûreté, la dette était née… On peut valablement constituer une sûreté avant même que la dette à garantir ne soit née.

Ccl : En droit belge, les sûretés créées pour toutes sommes sont valables (= doctrine de sûreté omnibus). La sûreté consentie en garantie d’une dette future, même éventuelle, est donc incontestablement valable sous réserve que cette dette soit suffisamment précisée.

(Réf.2) En droit des obligations, il existe un PG selon lequel on ne peut être indéfiniment lié à son contractant.

Donc les sûretés constituées à durée illimitée doivent pouvoir être dénoncées par le débiteur, il doit pouvoir se défaire de sa relation contractuelle : moyennant un préavis raisonnable et sans préjudice des droits de son créancier. Au moment de la dénonciation, la sûreté doit servir à couvrir les dettes qui existent (la dénonciation ne vaut que pour l’avenir). Ces deux acquis de la jurisprudence et de la doctrine ont été intégrés par le législateur dans une législation particulière (loi du 4 août 1992 relative au crédit hypothécaire). Le législateur y exprime clairement les deux principes qui ont été dégagé par la jurisprudence et la doctrine. Cf. Art. 51bis :

• « Une hypothèque peut être constituée pour sûreté d’une créance future à condition qu’au moment de la constitution de l’hyp les créances garanties soient déterminés ou déterminables ».

• « Si une hypothèque est constituée pour sûreté de créance future (..), la personne qui bénéficie de l’hypothèse pourra à tout moment la résilier moyennant un préavis d’au moins 3 mois ».

Section 2 : Caractère réel (mécanisme de la subrogation)

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→ Le caractère réel des sûretés découle du fait qu’elles portent sur un élément du patrimoine du D ou sur son ensemble. De ce caractère résultent les effets de la sûreté ; le droit de préférence, le droit de suite, et le fait qu’on leur applique le mécanisme de la subrogation réelle.

Subrogation réelle : mécanisme au terme duquel un bien nouveau prend la place d’un bien disparu

dans le patrimoine du débiteur. Ce nouveau bien va être soumis au même régime que le bien disparu.

Rem. La réunion du droit de préférence et du droit de suite confère à la sûreté toutes les prérogatives d’un droit réel, dans l’acception classique du terme.

Le législateur n’a pas consacré dans un texte à vocation générale, le mécanisme de la subrogation réelle, c’est plus un construit doctrinal.

A) Conditions :

(1) Le bien qui va disparaître doit tout d’abord être soumis à une destination particulière (affecté de manière spécifique à l’acquittement d’une dette). Il s’agit donc d’un bien grevé d’une sûreté réelle.

(2) Le bien qui a disparu du patrimoine doit être remplacé par un autre bien ; et que cet autre bien soit la contre-valeur du bien qui est sorti.

(3) Il faut que le C ait perdu le droit de suite sur le bien disparu. Si le bien qui disparaît est un bien auquel on applique le droit de suite, il n’est pas nécessaire de faire jouer le mécanisme de la subrogation réelle puisque le C pourra toujours faire jouer ses droits sur la chose en la faisant saisir en quelques mains qu’elle se trouve. Pas d’utilité de la subrogation car droit de suite tjs valide…

B) Origine

La subrogation réelle a pour effets d’admettre que le droit réel affectant le bien disparu soit reporté sur le bien nouveau qui vient en remplacement du bien disparu. Ce principe du report n’est pas consacré légalement mais a été élaboré par la doctrine au départ de quelques textes législatifs qui font usage d’une forme de subrogation, notamment=

- Art. 10 de la loi hypo., qui vise le cas d’un bien immeuble grevé d’une hypothèque et qui vient à disparaître (par exemple, par incendie). Toute indemnité due par 1/3 en raison de la perte de l’immeuble hypothéqué sera affecté au paiement de la créance hypothécaire = report de la sûreté sur l’indemnité touchée (= subrogation).

- Art .58 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre, idem.

C) Intérêt de la subrogation :

On soumet le bien de remplacement au même régime que celui du bien disparu. Il y a maintien des droits réels qui existaient sur la chose disparue et report de ces droits sur la chose qui vient en remplacement (report sur la contre-valeur).

Justification : qu’est ce qui justifie que le législateur a pu dire qu’il y avait report de droits réels ?

> Si le principe de la subrogation réelle est admis en cas de disparition de la chose grevée d’une sûreté réelle, c’est pcq dans ces hypothèses, le bénéficiaire de la sûreté n’est pas l’intéressé par le bien lui-même. Ce n’est pas tellement la chose qui intéresse le C, mais sa valeur.

> On trouve aussi application de ce mécanisme en présence de droits réels non-accessoires, comme le droit de propriété : on sait que le droit de propriété en lui même est désormais reconnu par le législateur comme pouvant être utilisé à des fins de sûreté. Dans ce cas le propriétaire lui-même n’a plus l’usage matériel de la chose (qui est souvent dans le patrimoine du débiteur).

Ex. Le bien chez acheteur, acheteur vend à un tiers mais la somme d’argent résultant de la vente peut être affectée des mêmes effets que ceux que l’on avait voulu accorder à la chose réservée en propriété. Donc le vendeur pourra prétendre à l’acquisition de la somme.

⇒ Cette idée ne vaut que si la somme d’argent (venue remplacer le bien disparu) se trouve identifiable et isolable dans le patrimoine de celui qui a vendu la chose. Le créancier a intérêt à intervenir alors que la créance de prix du tiers acquéreur n’a pas encore été payée (pcq alors il est certain de pouvoir individualiser la créance).

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CHAPITRE 2 : LES DIFFERENTS TYPES DE SURETE REELLE Il existe trois types de sûretés réelles: 1. Le Nantissement (Art. 2071 Cc)

Convention par laquelle un débiteur va remettre une chose à son créancier pour sûreté de sa dette (origine conventionnelle) : a) Antichrèse : si la chose est immobilière b) Gage : si la chose est mobilière

= Sûreté conventionnelle qui naît de la remise d’une chose mobilière entre les mains du C, en garantie du paiement de la dette (formes de gage sans dépossession : s/ FDC ou le privilège du prêteur agricole).

2. Le Privilège (Art. 12 loi hypo.)

Droits reconnus par le législateur (uniquement) au bénéfice de certains créanciers (qui sont préférés) qui auront priorité sur les autres (origine légale) : a) privilèges spéciaux : porte sur un bien b) privilèges généraux : porte sur le patrimoine

Le privilège se justifie uniquement par la nature même de la créance qu’il garantit. C’est au C que le privilège profite, car il affranchit du concours, mais en considération de la créance. C’est la créance que le Législateur veut protéger, non le C. Les privilèges échappent complètement à l’autonomie de la volonté : ils ne sauraient être créés par convention.

3. L’Hypothèque

Sûretés immobilières qui n’entrainent pas dépossession du débiteur, et qui sont soumises à publicité et confèrent droit de suite à leur titulaire (origine testamentaire, légale ou conventionnelle). CHAPITRE 3 : LA CLASSIFICATION DES SURETES REELLES 1. En fonction de leur source > Les sûretés légales sont directement créées par la loi, qui les attache de droit à telle ou telle créance. Ce sont les privilèges et les hypothèques légales.

> Les sûretés conventionnelles naissant de la volonté des parties : ce sont les contrats. 2. En fonction de leur assiette > Classification selon la nature de l’assiette de la sûreté (= biens du patrimoine qui servent de garantie). Ces biens peuvent être de nature : * les sûretés mobilières * les sûretés immobilières (V. art. 25 et 26 loi sur les faillites). > Classification selon de l’ampleur de l’assiette de la sûreté (= quantité de biens sur laquelle porte la sûreté réelle), on distingue : * les sûretés spéciales

* les sûretés générales CHAPITRE 4 : LE RANG DES SURETES REELLES (TUYAU) Les situations dans lesquelles un même bien est grevé de différentes sûretés au profit de différents C est une situation relativement fréquente (ex. plusieurs C ont une hypothèque sur un même immeuble).

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Alors, au moment où le bien va être mis en vente, on va se trouver avec plusieurs C qui vont tous prétendre que la chose leur était réservée par priorité. Notre droit comporte cinq règles de base qui servent à établir le rang des créanciers. Etablir les rangs, ce sera le rôle du curateur.

Règle n°1 Le privilège prime sur l’hypothèque (art. 12 loi hypothécaire).

= Les créanciers privilégiés sont payés avant les hypothécaires. Ex. je veux acheter un appartement qui vaut 10 000, je n’ai pas les fonds disponibles. Mon banquier me prête 80000 et me demande une sûreté. Je lui consens une hypothèque sur mon appartement. Je dois encore 20000 au vendeur et je n’ai pas remboursé la banque à temps. Les deux créanciers sont impayés. Le vendeur d’un bien immobilier bénéficie d’un privilège. L’assiette est constituée par l’immeuble vendu. Ils décident de vendre l’appartement en vente publique. L’appartement est vendu à 90000 : mais il faut 20000 pour un et 80000 pour l’autre. Comment faire ? Les privilèges priment, le vendeur va d’abord recevoir ces 20000. Pour qu’il y ait conflit, il faut que les deux personnes aient de prétentions sur la même chose.

Règle n°2 Conflit entre créanciers privilégiés (art. 13 loi hypothécaire)

Comment régler le conflit ? « entre les C privilégiés, la préférence se règle par les différentes qualités des privilèges », celui qui aura le privilège de meilleure qualité sera préféré à l’autre.

Comment savoir ce qu’est la qualité d’un privilège ? Le privilège (sûreté légale) est accordé en fonction de l’intérêt de la créance dans l’esprit du législateur. La qualité de la créance dépend donc des intérêts qui sont les plus marqués. On va comparer les intérêts que le législateur avait en vue, on va donner la préférence à celui qui en a le plus besoin !

Le législateur n’a pas pu résoudre tous les conflits. La jurisprudence doit parfois faire face à un conflit qui ne trouve pas de solution dans la loi. On doit alors utiliser l’art 13 et faire une balance des intérêts protégés par le législateur.

Rgl prcpl : 1) Privilèges généraux sur meubles < Privilèges spéciaux sur meubles (et gages). // Gage sur fonds de commerce et privilège du prêteur agricole > privilèges généraux.

2) Art. 19 établit le rang des privilèges généraux, et les classe par ordre.

3) Les privilèges généraux (art. 19) > privilèges généraux sur meubles reconnus au fisc.

4) Les art. 22 et s. règlent les conflits entre privilèges spéciaux sur meubles.

5) Privilège des frais de justice est tout à fait prioritaire (art. 17 et 21), suivit du privilège de l’assureur (art. 23 al.2 loi 11 juin 1874 et art. 60 al.2 loi 25 juin 1992).

6) Les C privilégiés de même rang seront payés par concurrence (art. 14).

Règle n°3 Conflit entre créanciers hypothécaires (Art. 81 loi hypothécaire)

On va comparer et prendre en considération la date de l’inscription de l’hypothèque dans le registre du conservateur des hypothèques (= mesure de publicité obligatoire lors de la constitution d’une hypothèque). Celui qui a la date antérieure à l’autre l’emporte.

En cas de formalité concomitante, on partage de manière égalitaire entre les deux C.

Règle n°4 Conflits entre titulaires de sûretés soumises à publicité instrumentaire

Chaque fois qu’on a un conflit entre deux C privilégiés requérant publicité, on regarde les dates

d’accomplissement des mesures de publicité (= règle de l’antériorité). Chaque fois qu’il y a conflit entre deux titulaires de sûreté ayant donné lieu à mesure de publicité, on compare les dates de ces mesures.

Rem. Cette règle est écartée chaque fois que le principe de la primauté du privilège sur hypothèque (art. 12) conduit à une solution différente.

Règle n°5 Conflit entre titulaires de sûretés conventionnelles

En cas de concours entre deux sûretés conventionnels ne donnant pas lieu à mesure de publicité, on regarde lors les dates de constitution des deux sûretés conventionnelles : la première constituée donnera priorité à celui qui l’a constitué sur l’autre.

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TITRE 2 : Le nantissement

= Terme générique qui vise tous les contrats par lesquels un débiteur (ou un 1/3) remet une chose à son C (ou à un 1/3) pour sûreté de sa dette. CHAPITRE 1 : LES DIFFERENTES FORMES DE NANTISSEMENT Idée : le débiteur remet une chose au C. Le nantissement est caractérisé par un phénomène de dépossession de la chose. Le débiteur se défait temporairement de la chose puisqu’il la remet au C. Cette remise de la chose constitue la faiblesse du système car si la chose remise est un outil que le débiteur utilise au quotidien, il la perd. En matière immobilière, l’hypothèque = sûreté sans dépossession rend inutile la sûreté avec dépossession (antichrèse = quasiment tombé en désuétude). Gage civil = est visé aux articles 2073 et suivants du Code civil.

Gage commercial = ne sera pas régi par les art. 2271 et s., mais par les art. 1 et s. de la partie du code de commerce réservée au gage (Cfr : loi du 5 mai 1872 régit le gage commercial). La loi de 1872 est lacunaire, elle ne règle que certains aspects du gage commercial (ex : formation du contrat, exécution du gage…). Puisque la loi de 1872 est une loi lacunaire ; pour avoir une vue d’ensemble du régime applicable au gage commercial, on va compléter le régime par les règles du code civil. CHAPITRE 2 : LES GAGES DE DROIT COMMUN (= GAGE CIVIL ET COMMERCIAL) Gage civil = un contrat par lequel le débiteur remet une chose à son C ou à un tiers.

Gage commercial = est donné pour sûreté d’un engagement commercial, on regarde la nature de la dette qui justifie la conclusion du gage, qui justifie la sûreté du débiteur.

NB. Lorsqu’un tiers remet la chose au C, on se trouve dans une situation de cautionnement réel. Section 1. Caractères et conditions de formation entre parties 1) Le gage est un contrat (il doit répondre aux conditions de l’article 1108) :

A. Consentement des parties au contrat de gage (souvent débiteur et créancier = concernés). Si un tiers devait remettre la chose au C (il faut le consentement du tiers, et non pas du débiteur).

B. Capacité : le bien remis par le débiteur au créancier risque de disparaître à tout jamais des yeux du débiteur, par conséquent il faut qu’au moment de la conclusion du contrat, le débiteur ait la

capacité de disposer de sa chose (Rem. gage ≠ contrat translatif de propriété) mais il y a un risque que la chose soit vendue.

C. Objet : bien qui va être remis. Cela doit nécessairement être un meuble dans le commerce (corporel ou incorporel). S’il concerne un meuble incorporel, on se trouve presque toujours dans le champ d’application de législations particulières. Les meubles par anticipation ne peuvent faire l’objet d’un gage, car aucune remise de la chose n’est possible dans ce cas.

En cas de mise en gage d’une somme d’argent, en raison de son caractère fongible, on considérera qu’on effectue un transfert de propriété avec une obligation de restitution. S’il est déposé sur un compte spécial, on peut l’identifier…

D. Cause licite : la sûreté ne saurait porter sur un engagement illicite.

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2) Le contrat de gage est un contrat accessoire

Comme il y a accessoriété, on peut en tirer plusieurs conséquences ; • Si la dette principale s’éteint, le contrat de gage disparaîtra également. • S’il devait y avoir une nullité de l’obligation garantie, le gage s’éteint également. • La qualité civile ou commerciale du gage dépend de la nature de la créance qui a justifié la

constitution du gage.

? Le gage constitué pour sûreté d’une créance future : le caractère accessoire du contrat de gage ne saurait faire obstacle à ce qu’il soit consenti en garantie de toutes sommes dues par le débiteur.

Dans son arrêt Mengal la Cass. a reconnu la licéité d’un gage sur fonds de commerce consenti en garantie de dettes futures, même éventuelles, à condition qu’elle soient suffisamment déterminées ou

déterminables. → il est admis qu’elle peut être appliquée à toutes sûretés conventionnelles. Il faut cependant reconnaître au D la faculté de résilier unilatéralement son engagement, càd de limiter la garantie consentie aux dettes existantes (moyennant préavis raisonnable)! 3) Le gage est un contrat réel Le gage ne sera considéré comme parfait qu’à partir du moment où la chose a été remise par le débiteur au créancier = élément fondamental : tant qu’il n’y a pas remise de la chose, le contrat n’est pas entièrement formé.

---------- Précis : Les termes de l’art. 2076 semblent laisser croire que la mise en possession du C n’est pas requise pour l’existence du contrat, mais est une simple condition d’opposabilité du gage aux 1/3, telle n’est pas la règle…

La mise en possession est bien une condition d’existence du contrat. Tant que la remise de la chose n’est pas réalisée, le gage n’existe pas. Le consentement des parties est impuissant à lui seul à faire naître le contrat : il faut en plus transfert de la chose.

Ratio legis : les sûretés mobilières ne confèrent en principe pas de droit de suite. Mais une sûreté réelle conventionnelle laissée en possession du D ne remplit pas pleinement sa fonction de garantie à moins que le droit de suite ne vienne protéger le C contre la disposition abusive par le débiteur du bien grevé. Le droit de suite n’étant en théorie pas possible, il est nécessaire que le C soit mis en possession du bien grevé, ce qui soustrait la chose à la disposition du D. ----------

Opération de remise = fixe la date du contrat. Il est important de pouvoir déterminer la date de formation du contrat de gage, car pour l’application de certaines règles la date antérieure est prépondérante.

Différence des autres contrats réels (comme le dépôt ou le prêt à usage par exemple) ; ils ne transfèrent au dépositaire ou à l’emprunteur que la détention précaire du bien, le contrat de gage fait naitre, dans le chef de celui reçoit la chose, un véritable droit réel : le créancier gagiste est investi, à l’égard des tiers, de tous les attributs de la possession et, notamment, de la protection de l’article 2279 du Code civil.

Caractéristique de la remise de la chose : elle fait naître un droit réel. Le C qui reçoit la chose se voit conférer un droit réel sur cette chose (le droit réel ainsi conférée va permettre qu’on reconnaisse au C qu’il bénéficie de la protection possessoire).

Csq du caractère réel :

1. Promesse de gage ≠ gage !!

2. Mettre le en C en possession de la chose gagée et faire en sorte que le C gagiste soit en possession de la chose pendant toute la durée du gage (art. 2276 Cc).

Observations : - on décrit l’objet du gage comme ayant été mis et resté en la possession du C ; - la mise en possession n’empêche pas que la chose soit ôtée au C un moment.

3. Pas de gage sur choses futures, la chose doit exister au moment de sa remise. La constitution de sureté pour dette future est valable, mais non la mise en gage de choses futures étant donné

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que la dépossession est alors impossible. Des auteurs veulent montrer que des choses futures peuvent être données en gage (ex. gage sur créance future, arrêt Mengal).

4. Le débiteur doit être propriétaire de la chose. Si le gage doit être exécuté, le créancier va mettre le bien en vente publique et se faire payer sur le prix de réalisation. On ne peut mettre en gage le bien d’un tiers car on pourrait arriver au fait que ce bien soit vendu. Le C gagiste = possesseur, il bénéficie donc de la protection possessoire. Ainsi, pour autant qu’il soit de BF, il pourra bénéficier du régime avantageux de 2279 Civ. (s’applique au possesseur au titre et à titre de propriété). Si le C gagiste a cru de BF que la chose qu’il recevait en gage était la chose de son débiteur, il sera protégé par l’article en question et la conséquence immédiate = que le C gagiste pourra repousser l’action en revendication du vrai propriétaire (verus dominus).

Arrêt du 10 octobre 2007 : la Cass applique ces règles. Il y a un conflit entre ces deux personnes (propriétaire et possesseur). La Cass a dit que le C gagiste dont le gage a pour assiette un bien corporel peut se réclamer de l’article 2279,(…) ok si le C gagiste est de BF, alors il peut opposer son droit réel de possession à tous les tiers. = reconnaissance de la protection possessoire. Nb. Art. 2279 ne s’applique qu’aux meubles corporels.

4) Le contrat de gage est un contrat unilatéral Le contrat se forme par la remise de la chose. La seule obligation qui découle du contrat est l’obligation qu’a le C de restituer la chose pour le cas où il y aurait lieu à restitution (ce n’est pas toujours le cas).

En principe, il n’y a pas d’obligation dans le chef du débiteur, la seule obligation repose sur les épaules du C, d’où la qualification du contrat d’unilatéral

Pendant le contrat, des obligations peuvent naître à charge du débiteur.

Ex. si, pendant le cours du gage, le C doit entretenir la chose (la nourrir, lui porter des soins), le débiteur se verra tenu de rembourser au C les frais d’entretien. Il se peut que des obligations naissent en cours de contrat sur les épaules du débiteur, en quel cas le contrat devient synallagmatique (imparfait car intervient en cours de route).

NB. La doctrine majoritaire tend à reconnaître l’application de 1184 aux contrats synallagmatique imparfaits, mais pas aux contrats unilatéraux.

Section 2. Les conditions de validité à l’égard des tiers

1. Formalité de preuve

En matière de gage civil ; l’art. 2274 Cc stipule : « pour les gages dont la valeur excède 375 euros, l’opposabilité aux tiers requiert la rédaction d’un écrit (signé) ».

? Comment déterminer la valeur du gage? Il faut cumuler la valeur de l’objet avec le montant de la créance garantie.

? Quid si on ne connaît pas ces sommes dues ? La doctrine et la jurisprudence recommandent la mention d’un plafond, qui sera fixé de commun accord entre les parties.

→ L’écrit est l’une des conditions d’opposabilité, il confère date certaine au contrat, et doit être constaté : - soit dans un acte public, - soit dans un acte sous seing privé enregistré. L’écrit doit exister et contenir comme mentions : - la somme due, càd créance garantie, - l’espèce et la nature des choses remises en gage.

NB. Au-deçà de 375 euros, il ne faut pas respecter de formalisme.

En cas de non-respect de ce formalisme de l’écrit, le contrat de gage, qui reste valable entre partie, ne peut être invoquée à l’encontre des tiers et spécialement des autres créanciers du débiteur.

En matière de gage commercial, il n’y a pas de formalisme : la protection des tiers est sacrifiée à la commodité de la vie des affaires.

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2. Formalité spéciale de publicité

Idée : lorsqu’un contrat est conclu entre deux parties, pour qu’il soit opposable aux tiers, une mesure particulière de formalisme s’avère parfois nécessaire.

Il faut distinguer la transcription, l’inscription et l’enregistrement : formalismes publicitaires distincts qui se font au bureau de conservation des hypothèques.

mesure fiscale qui se fait au bureau des enregistrements, impôt lors de la conclusion de certains types d’actes

• Art. 1328 Cc : un acte enregistré a date certaine.

Idée du législateur : éviter la constitution d’une sûreté au moment où les choses commencent à aller mal et où le commerçant aux abois aurait tendance à vouloir favoriser l’un ou l’autre de ses créanciers, en lui accordant une sûreté.

⇒ Grâce à la date certaine, on pourra voir si le gage a été constitué dudant une période suspecte ou non. Section 3. Les effets du contrat de gage 1) Avant l’échéance de la dette garantie

→→→→ Le C-gagiste est détenteur précaire du bien gagé

> A l’égard des tiers, le gage, lorsqu’il porte sur une chose corporelle, confère au créancier la possession de celle-ci. Le gage ne confère pas droit de suite au créancier, la possession de la chose remise en gage lui assure une garantie plus efficace encore : elle lui procure non seulement la maitrise matérielle du bien mais lui reconnait en outre la protection de l’article 2279 Cc.

> A l’égard des parties, de la constitution du gage jusqu’à l’échéance de la dette garantie, le C gagiste n’est qu’un simple détenteur précaire du bien, l’article 2079 Cc l’assimile à un dépositaire, ce qui veut dire sans plus qu’il n’a pas la jouissance de la chose : il ne peut en disposer ni en percevoir les fruits.

I. Art 2082 Cc : « le débiteur ne peut, à moins que le détenteur du gage n’en abuse, en réclamer la restitution ». En matière de droit réel, l’abus = cause de déchéance des droits réels.

II. Art. 2081 Cc : le C gagiste peut, lorsque le bien engagé est une créance, en conserver les intérêts, mais à charge de les imputer sur ce qui lui est dû par le D.

III. Art. 547 Cc : «le propriétaire a droit aux fruits », donc puisque le C gagiste est un détenteur, il ne bénéficiera pas des fruits produits par la chose.

IV. Le C doit conserver la chose en BPF. S’il entretient la chose, s’il apporte des soins, il pourra réclamer une indemnisation auprès du propriétaire de la chose lorsqu’il la restitue.

V. Pendant tout le contrat de gage, le C gagiste va bénéficier d’un droit rétention sur la chose (= un des effets principaux du contrat de gage, cf. art. 2082).

• Le débiteur ne peut réclamer la chose tant que la dette n’est pas venue à échéance (sauf exception

du pt. I. (abus)), le C gagiste a donc le droit de retenir la chose (mais pas de s’en servir → abus).

• En cas de dettes multiples, si postérieurement à la mise en gage, une deuxième dette est contractée entre les mêmes parties. Dans ce cas de figure, le législateur dit que le créancier pourra retenir la chose qu’il a en main, y compris lorsque la deuxième dette n’est pas payée (et aussi longtemps qu’elle n’est pas payée). Le législateur étend la sûreté, confère à la première sûreté un effet un peu plus étendu.

NB. Lorsque le bien est retenu pour non paiement de la deuxième dette, il n’est plus question de gage mais du recours à un moyen de pression (pour tenter d’amener le débiteur au paiement), le C ne peut donc pas mettre la chose en vente.

NB. On considère que ce deuxième alinéa ne s’applique pas au gage commercial.

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2) A l’échéance de la dette garantie

Deux situations peuvent se présenter après l’échéance de la dette garantie ;

� le débiteur paie sa dette : le gage s’éteint, et le créancier restitue la chose,

� le débiteur ne paie pas : - le C peut mettre le gage à exécution (vente publique ou de gré-à-gré), - le C peut attendre que le débiteur trouve une solution à ses problèmes, et exercer son droit de rétention.

⇒ L’exécution du gage

> du Gage civil :

⇒ Voie légale : l’article 2078 propose deux voies d’exécution au C :

i. Vendre le bien en vente publique (inconvénient : intervention nécessaire du juge). ii. Se faire attribuer le bien en pleine propriété (inconvénient : idem).

Inconvénient : on ne pourra passer à la réalisation du gage que moyennant le respect de la voie judiciaire. C’est pour éviter de devoir saisir le juge que certains C préfèrent attendre.

⇒ Voie contractuelle : il est peut être possible de régler cette difficulté avec deux types de clauses :

i. Clause de vente de gré-à-gré, clause de voie parée : le C procède à une vente amiable. ii. Pacte commissoire : les parties conviennent de l’attribution en pleine propriété du bien pour le

créancier en cas d’inexécution à l’échéance du terme.

Néanmoins, l’art. 2078 al. 2 dit que ces deux clauses sont frappées de nullité relative, étant donné qu’elles visent à préserver les intérêts du D.

≠ La clause de voie parée peut être préjudiciable car le créancier pourrait se contenter de trouver un amateur qui ne paie que la valeur de sa créance, il veut juste être remboursé.

≠ Les pactes commissoires peuvent atteindre aux intérêts du D car pour une créance de 1000, on peut donner un tableau qui vaut 5000. Le C va voir tomber dans son escarcelle un bien qui vaut 5000 alors que sa créance ne vaut que 1000.

Csq, 1. C'est une nullité qui ne sera soulevée que par le débiteur. 2. La nullité devra être soulevée dans un délai de 10 an (art. 1304 Cc). 3. Seule la clause se voit frappée de nullité, non le contrat de gage dans son entièreté.

4. Postérieurement à la conclusion du contrat, les parties peuvent convenir d’une clause de voie parée ou d’un pacte commissoire (l’interdiction vaut lors de la conclusion du contrat).

> du Gage commercial :

L’art. 4 loi de 1872 ne prévoit la possibilité pour le créancier de faire vendre le gage (se faire attribuer le bien pleine propriété n’est pas possible en cas de gage comm.).

Au moment où on doit passer au stade de l’exécution du contrat, le recours en justice est nécessaire. Le président du tribunal de commerce peut autoriser la vente du bien, soit autoriser la vente publique, soit autoriser la vente de grés-à-grés.

NB. - L’article 10 dispose des mêmes interdictions et clauses de nullité que l’art. 2078 Cc. - L’art. 26 loi sur faillites joue (suspension des voies d’exécution une fois survenue le concours).

Gage commercial Gage civil

- soit vente publique - soit vente de grés-à-grés

- soit vente publique - soit attribution en pleine propriété

→ Le juge a le choix → Le créancier a le choix

Rem. Le gage étant une sûreté spéciale, la faillite ne suspend pas les droits du créancier… Les voies d’exécution des C-gagistes sont suspendues jusqu’au 1er PV de vérification de créances. Après quoi ils retrouveront une liberté d’exécution. Comme le bien est un bien que le C-gagiste détient, on peut pratiquement tjs se dire que le bien n’est pas utile au fcmt ou à la poursuite des activités du failli, donc pas d’obstacle à ce que le bien fasse l’objet d’une vente dès qu’a été rédigé le PV en question.

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Section 4. Les modes d’extinction du gage § 1 : L’extinction par voie accessoire

Le gage est toujours un contrat accessoire venant garantir le paiement d’une dette principale. Puisque le gage est l’accessoire d’une créance principale, si la créance principale s’éteint le gage disparait.

§ 2 : L’extinction par voie principale

1. Le gage peut s’éteindre lorsque la chose mise en gage est restituée par le créancier au débiteur. 2. Le gage peut s’éteindre lors de la disparition du bien. Si le bien disparait et est remplacé par une

autre valeur, il y aura subrogation réelle et maintient des droits du créancier gagiste. Si pas de subrogation, le gage prendra fin en raison de la disparition.

3. Art. 2082 Cc, si le C utilise la chose, il y a abus et le il pourrait se voir déchu de son droit réel. 4. Le contrat de gage peut se trouver annulé pour des raisons qui lui sont propres. Si les règles de

formation du contrat de gage ne sont pas respectées, il sera annulé. 5. Si le contrat est à durée indéterminée, il faudra bien procéder un jour ou l’autre à la résiliation du

contrat de gage.

Si un

CHAPITRE 3 : LA MISE EN GAGE DE CREANCES

Rem. Le gage sur créance = gage ayant pour objet une créance. Pour garantir le paiement d’une créance, on va mettre une seconde créance en gage.

Il y a donc toujours deux créances : - la créance garantie, ou créance-cause - la créance objet du gage, ou créance-assiette

? Pourquoi le Législateur a-t-il adopté une législation spécifique, ad hoc ? Dans la notion de gage de droit commun, le gage est caractérisé par la remise d’une chose par le

débiteur au créancier.

→ Dès lors, sans texte législatif on ne pourrait pas remettre matériellement la créance-assiette au C, ce qui serait contraire à la notion même de gage... Section unique : Le gage sur créance ordinaire

« Ordinaire » : signifie que la créance n’est pas constatée par facture (≠ appellation contrôlée).

1. La formation du contrat ----------- Précis : Cmt concevoir le transfert matériel de ce qui est par nature immatériel ? En imposant la dépossession de débiteur « dans tous les cas », l’art. 2076 paraît aussi viser le gage sur créances. De même l’art. 1 loi 5 mai 1872 qui précise que « l’objet du gage » doit être remis en possession au créancier, indique qu’il n’est pas fait exception pour les biens incorporels.

Rem. Cette difficulté ne se rencontre pas lorsque le gage a pour objet une créance incorporée dans un titre négociable (obligation ou action de société, etc.). -----------

Cf. art. 2075 Cc : « le créancier est mis en possession de la créance gagée par la conclusion de la convention de gage ».

Deux lectures de la doctrine :

A) Doctrine majoritaire

Le Législateur dit que la mise en possession découlant du caractère réel du gage va se faire par la conclusion de la convention de gage.

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Alors qu’il aurait pu renoncer au caractère réel du gage, le Législateur a voulu maintenir l’idée de mise en possession en recourant à une fiction : « du simple fait de la conclusion, on va fictivement considérer qu’il y a une mise en possession ».

B) Doctrine minoritaire

Ces auteurs s’attachent à la fin de l’article, et soutiennent que : « le gage sur créance n’est plus un contrat réel mais un contrat consensuel, ce qui signifierait que la conclusion du contrat suffirait à la validité de la formation ».

C) Enjeu de cette discussion doctrinale ; discussion inutile entre juristes ?

� Si le contrat reste réel,

� Si le contrat nécessite une mise en possession,

→ Ccl : il n’est pas possible de mettre en gage des choses futures.

NB. Ne pas confondre : - créance future - créance non-exigible

Illustration. Une créance peut exister aujourd’hui mais ne pas être exigible maintenant ; ≠ future.

2. L’opposabilité aux tiers Droit commun : si la chose engagée est autre qu’une créance ou un droit incorporel, la mise en gage est opposable de plein droit aux tiers, sans formalités.

A) Opposabilité à l’égard du D de la créance-assiette

Le Législateur a prévu un formalisme particulier reconnu en faveur du D de la créance-assiette (cf. Art. 2076 al. 2 Cc). Il faut que la mise en gage ait : - été notifiée au D de la créance-assiette (notification), - reconnue par le D en question (reconnaissance).

? Pourquoi un tel formalisme ? Idée : faire savoir au D auprès de qui il doit payer le montant de la créance lorsque celle-ci viendra à échéance.

• Av. la notification/reconnaissance, le D peut payer valablement IeI les mains du D-gagiste

• Apd. de la notification/reconnaissance, le D procède au paiement IeI les mains du C-gagiste

Rem. Le C-gagiste a intérêt à ce que la notification ait lieu, en pratique c’est donc lui qui s’en chargera.

� Certains articles concernant la cession de créance trouvent à s’appliquer :

O Art. 1690, al.3 Cc : si le cédant cède sa créance à pl. cessionnaires successivement, le Législateur va préférer le cessionnaire qui pourra se prévaloir d’une date de notification antérieure aux autres.

O Art. 1690, al.4 Cc : si un C n°3 fait une action directe dans les mains du D et que ce dernier s’exécute en payant une somme x à C3 : - s’il a été fait avant la date de notification, ce paiement = valable

- s’il a été fait après notification (càd erronément et de MF) ≠≠≠≠ libératoire

O Art. 1691 Cc : le D de la créance-assiette peut, de BF, soulever les exceptions qu’il pouvait soulever à l’encontre de son propre créancier.

B) Opposabilité à l’égard de tous les autres C

Le formalisme d’opposabilité du droit commun suffit, cf. Art. 2074 Cc (acte public ou sous seing privé, dûment enregistré, contenant la déclaration de la somme due).

3. Le régime du gage sur créance

A) Au cours de la vie du gage

Tant que la créance-cause ne vient pas à exécution, il n’est pas question d’exécution du gage.

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I. Quid concernant les intérêts

L’article 2081 Cc prévoit un système d’imputation qui autorise le C-gagiste, lorsque le bien engagé est une créance, à en conserver les intérêts, à charge de les imputer sur ce qui lui est dû par le D. Ces sommes que le C-gagiste va recevoir du D vont venir en déduction de la créance-cause.

II. Quid lorsque la créance-assiette vient à échéance avant la dette garantie

> En matière civile. Le tiers D, à qui la mise en gage a été notifiée, ne peut se libérer valablement qu’entre les mains du C-gagiste, lequel n’est cependant pas en droit de disposer de la somme payée (sauf convention contraire des parties prévoyant une forme de remboursement anticipatif).

→ Seule solution, procéder à la consignation sur un compte de la créance échue jusqu’à l’échéance de la créance-cause. Les droits du C-gagiste se reporteront sur le montant consigné par l’effet de la subrogation réelle.

> En matière commerciale. Le système d’imputation est assez souple… Si la créance-assiette est d’un montant suffisant que pour couvrir le montant de la créance-garantie, il suffira au créancier d’attendre l’échéance de la créance-assiette, il touchera le capital qu’il pourra imputer sur la créance-cause et celle-ci sera payée de cette façon si le montant correspond.

Le système d’imputation en gage civil = intérêts (Art. 2081 Cc) Le système d’imputation en gage commercial = intérêts + capital (art. 3 loi 1872)

B) A l’échéance de la créance gagée

A l’échéance de la créance-garantie, l’exécution est automatique. Le créancier impayé peut alors : - soit attendre que la créance-assiette vienne à échéance, - soit il n’attend pas et passe à la réalisation du gage.

C) L’exécution du gage

En l’absence de système d’exécution spécifique au gage sur créance, on se réfère aux règles classiques.

Pour exécuter un gage civil, le C s’adresse au juge soit pour vendre le bien aux enchères, Rem. Le C a le choix entre ces 2 options. soit pour lui attribuer la créance en pleine propriété.

----------- Précis : La difficulté de mettre en vente la créance n’est en réalité que théorique car en général le C se gardera de procéder à l’exécution de la créance. Il conservera la créance-garantie et, à son échéance, il percevra le montant dû (sous réserve de restituer l’excédant éventuel au débiteur). ----------- NB. La clause de voie parée et le pacte commissoire permettant l’attribution en pleine propriété ne

sont pas valables qd elles sont conclues au moment de la conclusion du gage, mais sont valables si elles sont conclues lors de la phase d’exécution ou ultérieurement à la conclusion du contrat.

----------- Précis : Pourquoi ne pas considérer comme valable ces clauses/pactes concomitants à la constitution du gage ? > Certains auteurs estiment que ces textes assurant la protection des D ne se justifient pas ici car le gage sur créance est aisément évaluable, sa valeur nominale étant connue (risque de fraude = inexistant). < Enseignement contesté car il peut y avoir grande diff. entre la valeur réelle et le montant nominal de la créance engagée (date de l’échéance, +/- éloignée, taux des intérêts, solvabilité du D, etc.).

⇒ Si l’objection est pertinente, la protection du D conduit à l’écarter. -----------

4. Cession de créances à titre fiduciaire (cession à titre de garantie) Pourquoi ne pas imaginer un système qui consisterait de faire la cession de créance à titre de sûreté ? « Cédons cette créance assiette au créancier gagiste : donnons-lui la créance assiette », le C-gagiste deviendrait C de cette créance-assiette.

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CHAPITRE 4. La mise en gage d’instruments financiers et d’espèces Section 1 : Le champ d’application de la loi La base légale est la loi sur les suretés financières du 15 décembre 2004 (LSF) : c'est un régime qui se voit simplifié par rapport au régime de droit commun qui vise essentiellement les actions et obligations.

• Instruments financiers (art. 3 LSF) = actions de société et obligations. • Espèces (art. 3 LSF) = les soldes créditeurs de nos comptes en banque, monnaie scripturale. Section 2 : La formation du gage sur instruments financiers

1. La remise de la chose au créancier

a) Le gage portant sur des espèces (art. 4 LSF) : la lecture de cette loi n’est pas unanime…

> Certains auteurs pensent que le dessaisissement n’a plus de raison d’être, et que le gage sur espèces se formerait sur accord des parties.

< D’autres auteurs soutiennent qu’il suffit d’établir la livraison effective, le transfert, la détention, l’enregistrement, ou tout autre traitement conférant au bénéficiaire du gage la possession ou le contrôle des avoirs pour que le gage soit formé.

⇒ De cette lecture découle sans doute la condition minimale que les avoirs puissent être contrôlés par le bénéficiaire du gage.

a) Le gage portant sur des instruments financiers (art. 4 LSF) :

- Le gage d’un instrument matérialisé dans un titre pourra se faire facilement par la remise des actions au porteur de main en main.

- Le gage d’un instrument non-matérialisé dans un titre se réfère aux articles :

o 504 CSoc. : cession de titres nominatifs par une déclaration de transfert dans un registre ad hoc. o 470 CSoc. : les valeurs mobilières dématérialisées sont inscrites sur un compte spécial, et le

dessaisissement se fait par des jeux d’écriture, sauf le cas de traditio.

2. La propriété / titularité des valeurs mises en gage

Prcp du gage de droit commun : on ne peut donner en gage qu’une chose dont on est propriétaire.

Appliquer ce même raisonnement aux instruments financiers était presque impossible car 2279 Cc ne s’applique que lorsque la chose mobilière est corporelle, or les instruments financiers sont la plupart du temps des choses mobilières incorporelles

Le Législateur est venu à la rescousse du C en disant que la validité du gage n’est pas affectée si on doit constater que le propriétaire du gage n’était pas propriétaire. Ce n’est que si le constituant du gage averti le C-gagiste de ce qu’il n’est pas propriétaire que la validité du gage sera subordonnée à l’autorisation du propriétaire.

3. L’opposabilité du gage aux tiers

Le Législateur, en vue de simplifier la chose et de faciliter l’utilisation de ces instruments à titre de gage, a écarté l’article 2074 Cc. Mais 2075 Cc reste d’application. Section 4 : En cours de contrat L’art. 11 prévoit que dans la mesure où les parties en sont convenues, le créancier gagiste peut utiliser, comme s’il était propriétaire, les instruments donnés en gage, à charge pour lui de substituer, au moment de l’échéance, des instruments financiers équivalents.

Rem. Ce droit d’utilisation rend la frontière floue entre les notions de gage et de cession fiduciaire…

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Section 5 : L’échéance de la dette garantie Particularité de ce gage : le droit d’utilisation des instruments financiers en cours d’exercice du contrat de gage par le C (art. 11).

⇒ Compte tenu de cette spécificité, on fait une distinction suivant que :

1. Le créancier n’a pas utilisé les instruments (art. 8 et 9 LSF) :

→ L’article 8 laisse deux possibilités au créancier (idée : faciliter le gage sur instruments financiers).

(a) Réalisation (Art. 8§1) : « sauf stipulation contraire, en cas de défaut d’exécution, le C gagiste est autorisé

à réaliser les instruments financiers » (= objet du gage). Cette possibilité ≠ offerte au C-gagiste de droit commun ! Le législateur va même un peu plus loin, il donne des précisions : le C peut réaliser ces instruments sans mise en demeure, sans décision judiciaire préalable et nonobstant une procédure d’opposabilité et une saisie

> Une fois les instruments réalisés par le C-gagiste, celui-ci obtient une somme (subrogation réelle). > Le contrôle du juge interviendra après réalisation : les contestations interviennent a posteriori (§3).

(b) Appropriation (Art. 8§2) : dans la mesure où les parties en ont convenu, le C gagiste est autorisé à s’approprier les instruments financiers (en principe exclue en droit commun : ce qu’on peut faire en droit commun = demander au juge de faire vendre l’objet gagé).

+ La convention des parties doit préciser les modalités d’évaluation des instruments financiers (critères utilisés pour évaluer les instruments financiers), car le solde éventuel reviendra au D.

⇒ Ces deux systèmes (8 §1&2) : sans mise en demeure, ni autorisation = système confortable.

2. Le C a utilité les instruments financiers conformément à l’article 11 :

→ Dans l’hypothèse où le C a disposé des instruments financiers, deux alternatives :

? Quid si le C ne substitue pas les instruments financiers équivalents à ceux qu’il a utilisé ?

→ L’art. 11§3 précise que lorsque le C n’a pas satisfait à son obligation de substitution, c’est le débiteur qui prendra l’initiative de proposer l’imputation de la valeur sur les montants de la créance.

? Quid lorsque le gage a été donné sur espèce ?

→ Cf. art 9 : à défaut d’exécution de la créance garantie, même si une faillite survient, le C gagiste sera autorisé à réaliser le gage constitué par espèce (on va aboutir à un système de compensation de fond entre la dette garantie et le montant des espèces).

- Soit le C remplace les instruments financiers utilisés par des instruments équivalents

(a) Système de substitution : Les instruments équivalents vont se substituer à

ceux qui ont été utilisés, et le C pourra alors opter pour une des deux voies de l’art. 8 :

appropriation ou réalisation

- Soit le C ne remplace pas les instruments financiers utilisés par des instruments équivalents

(b) Système d’imputation : Le C imputera alors lui-même la valeur des

instruments financiers utilisés sur le montant de la dette (art. 11§2).

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CHAPITRE 5. LE WARRANT

1. Texte applicable et ratio legis (cf. loi du 18 novembre 1862)

Préoccupation à l’époque : le législateur a constaté que dans pas mal de cas, le commerçant qui sollicitait un crédit devait fournir une sûreté pour rassurer son créancier de sa solvabilité, mais la seule chose dont le commerçant disposait était ses marchandises.

→ Le législateur a alors mis au point un système qui permet au commerçant d’utiliser ces biens qui sont à disposition comme base d’un gage.

Le législateur s’est dit qu’il allait tenter de mettre sur pied un système qui permet au commerçant de remettre les marchandises au C comme base de la sûreté, tout en permettant aux commerçants à pouvoir utiliser ces marchandises.

2. Procédure de mise en gage de marchandises

Warrant = titre de commerce qui va représenter les marchandises du commerçant. La création du warrant exige (en théorie, en 1862) le dépôt des marchandises entre les mains d’1/3, entreprise spécialisée disposant d’une importante surface de stockage. Le document est émis par ce dépositaire qui s’oblige à l’égard de tout porteur à assurer la garde et la conservation des biens warrantés, qu’il délivrera le moment voulu contre remise du document.

I. Dessaisissement des marchandises par dépôt de celles-ci chez un dépositaire.

En pratique ce qui se passe c’est que les marchandises ne sont pas acheminées chez le dépositaire, mais elles restent chez le déposant. La dépossession se fait par l’isolement des marchandises dans un endroit qui reste sous la surveillance du dépositaire.

II. Le dépositaire va alors émettre un titre (le warrant) qui va représenter les marchandises (art. 3).

III. Le banquier va octroyer son crédit et recevra le titre représentatif des marchandises (warrant).

IV. Ce titre passe de mains en mains par la technique de l’endossement (endosser = mettre une signature au dos du verso du titre). Au moyen de cette signature, le porteur va transmettre le document à quelqu'un d’autre). Celui qui a en main le document est propriétaire de marchandises.

→ Ce titre représente à la fois

3. Régime du gage sur marchandises

Précisions :

a) Le warrant doit mentionner en principe le montant de la créance (qui a justifié l’émission de la sûreté). En définitive, celui qui a le titre en main pourra réclamer à l’échéance l’exécution de la créance.

b) Les parties peuvent prévoir qu’en réalité, le commerçant pourra encore avoir accès à son stock. On pourra prévoir un roulement des marchandises (d’où l’intérêt à laisser les marchandises chez le commerçant : le roulement sera permanent).

c) Quand la créance vient à échéance, si elle n’est pas remboursée, le porteur du Warrant va s’adresser au président du tribunal de commerce et va lui demander l’autorisation de faire vendre les marchandises en question. Le porteur du titre a une sûreté qui lui permet de faire vendre les marchandises concernées. La vente génère alors un certain bénéfice, le C gagiste se fait payer par préférence sur le produit de réalisation (système de réalisation conforme à système commun de réalisation d’un gage).

Avantage du warrant : il n’y a pas de déplacement physique des marchandises, même s’il y a une dépossession (puisque les marchandises sont en principe remises à un dépositaire).

- l’objet du gage, les marchandises - la créance qui a justifié la création de la sûreté

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CHAPITRE 6. LES GAGES SUR FONDS DE COMMERCE Loi du 25 octobre 1919, idée : en droit commun, le gage nécessite dépossession, OR si un commerçant se défait de son fond commerce, il ne peut plus l’exploiter, il n’aura donc plus de rentrée financière.

→ Le législateur a tenté de mettre sur pied une réglementation permettant un gage sans dépossession. Sans dépossession du débiteur, celui-ci va pouvoir continuer à exploiter son fond de commerce.

• C’est une sûreté spéciale (il porte sur tel bien déterminé, mais l’assiette du fonds de commerce est mouvante parce que les produits sont vendus, transformés et renouvelés, …).

• C’est une sûreté mobilière, le gage sur fonds de commerce a emprunté à l’hypothèque certains procédés techniques (notamment la publicité), et l’opinion dominante offre tout de même un droit

de suite au gage sur fonds de commerce (≠ 46 loi hypo.). Section 1. La constitution d’un gage sur fonds de commerce

1. Les parties au contrat de gage sur fond de commerce Le gage est une sûreté contractuelle, donc il y a deux parties au contrat :

(a) Le créancier gagiste (art. 7), bénéficiaire de la garantie. Le législateur a réservé ce type de sûreté à des établissements de crédit, ou certains établissements financiers agréés (idée : exigence d’un certain professionnalisme du C-gagiste qui ne prêtera pas à la légère).

La qualité du C-gagiste sur fonds de commerce est requise sous peine de nullité du gage, et est d’OP. En effet il n’y a pas de sûreté sans texte, les parties ne sauraient donc créer par leur seule volonté une cause de préférence en dehors du cadre légal.

NB. Cette exigence est requise au moment de la constitution du gage, mais par la suite la banque peut très bien céder sa créance à une personne autre qu’un établissement de crédit.

(b) Le débiteur gagiste, propriétaire du fonds de commerce : celui qui constitue la sûreté doit être le propriétaire du fond de commerce. A défaut, la sûreté serait frappé de nullité relative et le C ne saurait se prévaloir de 2279 Cc car le FDC est une universalité, un bien incorporel, échappant à la protection de cet article.

2. Condition/formalisme de validité

Art. 3 loi de 1919 : « le gage est constitué par acte authentique (acte notarié) ou par acte sous seing

privé », double formalisme qui consiste en une condition de validité, (≠ exigence probatoire, formalisme d’opposabilité aux tiers).

A propos de l’acte sous seing privé, le législateur ne donne pas d’autres précisions. En réalité, on verra que pour des raisons d’opposabilité aux tiers, l’acte sous seing privé devra toujours avoir été enregistré (cf. art. 29 code des droits d’enregistrement).

Le contrat est donc un contrat solennel (et non réel comme le gage classique) car pas de remise de la chose mais une forme à respecter au moment de la constitution du contrat.

→ Une fois que ce formalisme est respecté, le gage s/ FDC est valablement formé.

3. Condition/formalisme d’opposabilité Le législateur prévoit un mécanisme particulier d’opposabilité aux tiers : ainsi, l’acte de gage est rendu public (art. 4) par son inscription dans un registre spécial tenu par le conservateur des hypothèques.

Ce conservateur va faire une mention particulière afin que la constitution de gage soit rendue publique et opposable.

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Quoi ? > Celui qui se rend chez le conservateur prendra : - Une copie de l’acte authentique (expédition) ou un des doubles de l’acte sous seing privé. - Un bordereau, fiche récapitulative mentionnant un tas d’indication ; sorte de résumé des

principaux éléments de l’affaire.

Qui ? > Le C a en général intérêt à ce que la publicité (inscription) soit réalisée. En pratique, c’est souvent de lui que vient l’initiative de l’inscription. Ce peut être aussi le notaire qui se rend à la conservation de l’hypothèque lorsque l’acte constitutif du gage a été établi sous mode notarié.

Où ? L’inscription se fait au conservateur des hypothèques de l’arrondissement dans lequel se trouve le FDC.

Délai ? Il n’y a pas de délai pour procéder à cette mesure de publicité (mais le créancier n’a pas intérêt à traîner). L’opposabilité aux tiers dépendra de la date d’inscription. Observations sur cette inscription :

i. Lorsqu’un même FDC comporte deux points d’exploitation différents, et qu’ils se trouvent dans des arrondissements judiciaires différents, où se fait l’inscription ? Pas de réponse toute faite sur la question de savoir s’il faudra procéder à deux mesures de publicité (ou une seule). En pratique, on procède à la double inscription pour être certain.

ii. La situation dans laquelle un fond se déclinerait en plusieurs points d’exploitation n’est pas une situation très fréquente car en réalité un FDC = ensemble d’éléments qui permettent de rallier une clientèle autour d’un commerçant ou d’une exploitation. Si deux points d’exploitation sont distants l’un de l’autre, ils auront probablement des clientèles différentes (donc deux fonds différents). Pour un même FDC, il faut la même clientèle. En pratique il faut donc se poser la question de savoir s’il n’y a pas plusieurs FDC différents ; en quels cas une inscription pour chacun est préférable.

iii. En cas de déplacement du FDC hors de l’arrondissement judiciaire initial, faut-il une nouvelle inscription ? La doctrine est divisée, mais la tendance majoritaire semble être qu’il n’en faille pas.

iv. En cas de cession de gage ainsi que le changement de titulaire du FDC n’implique pas de nouvelle inscription. Une fois le gage constitué, il peut faire l’objet d’une cession sans qu’une seconde inscription soit nécessaire (regrettable).

Section 2. Assiette du gage sur fond de commerce

A. Caractéristiques particulières :

Le gage a pour assiette « l’ensemble des valeurs qui composent le fonds de commerce » du débiteur (art. 2). L’assiette du gage c'est le FDC (= sûreté spéciale, art. 26 LSF).

C'est une assiette qui présente une particularité : le bien mis en gage est une universalité fluctuante en raison du fait que le FDC continue à être exploité par le commerçant, ensemble hétéroclite de biens.

B. Notion de FDC ; àpd quand existe-t-il ?

Le FDC doit exister pour pouvoir être remis en gage. Dans les mentions du bordereau doivent figurer ses éléments d’identification (art. 4, 3°).

? Àpd de quel moment peut-on dire qu’un FDC existe ? Le gage n’a pas d’assiette tant que le FDC n’est pas exploité : faute de clientèle (au moins potentielle), qui en est l’élément essentiel, il n’y a pas de fonds. On considère que le fonds existe que quand il y a ouverture du fond au public (étant entendu qu’on ne va pas exiger qu’il y ait beaucoup de clients, la potentialité de clientèle suffit). Cela veut dire qu’avant l’ouverture du commerce, il n’est pas possible de constituer un gage s/ FDC.

> En pratique, on convient avec le banque que l’on va constituer ultérieurement un gage sur FDC.

Attention, cette promesse n’équivaut pas à la constitution d’une sûreté (donc la situation de la banque est moins bonne), mais il s’agit d’une technique communément admise.

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C. Composition du FDC :

Le FDC est un ensemble de biens qui forment un tout cohérent, et qui sont rassemblés par un commerçant en vue de s’attacher et de développer une clientèle et de générer un profit financier. C'est une universalité de fait. C'est l’ensemble qui va être donné en gage.

Le législateur n’a pas pris la peine de définir le FDC, ce qui fait qu’on peut parfois hésiter sur la composition exacte de celui-ci. L’art. 2 de la loi de 1919 décrit de façon exemplative les composants du FDC. Le descriptif donné par le législateur donne à penser que l’on va trouver dans l’assiette l’ensemble des éléments qui vont permettre d’attirer la clientèle.

D. Quelques observations sur les éléments du fond :

I. « Le tout sauf stipulation contraire ». Les parties peuvent exclure de la liste / de l’assiette du FDC certains éléments particuliers. Mais il n’est pas possible de réduire le FDC à rien du tout, de manière à ne pas dénaturer la notion de FDC ! Il doit conserver sa vocation à attirer la clientèle.

II. La clientèle : on peut s’en étonner car le FDC est un ensemble d’éléments qui vise à attirer le client. Mais il se fait que la clientèle, une fois constituée, donne sa valeur au fonds. Au plus, elle sera importante, au plus le fonds va avoir de la valeur. La clientèle est à la fois l’objectif du fond de commerce et une de ses composantes, c'est assez incohérent.

III. Les marchandises en stock : les parties qui décident d’introduire les marchandises en stock dans le FDC doivent le mentionner expressément. Elles ne pourront être prises en considération qu’à concurrence de 50% de leur valeur. On vise les produits finis, destinés à être vendus au consommateur, non les matières 1ères.

IV. L’argent en caisse et les créances. En principe, l’argent et les créances ne font pas partie du FDC, sauf clauses contraires (qui sont fréquentes). Les créances doivent avoir un lien avec l’exploitation commerciale.

V. Les immeubles par destination économique, ce sont des meubles par nature qui vont être affectés à l’exploitation d’un fonds (Cass. 26 mai 1972). Les meubles par nature qui deviennent immeubles par destination économique, font partie de l’assiette du gage. La raison d’être du régime des immeubles par destination tient au fait que législateur a trouvé rationnel de soumettre à un régime juridique le meuble et l’immeuble, si l’un est accessoire de l’autre. Il n’est pas possible d’avoir un immeuble par destination économique lorsqu’il n’y a pas équivalence entre le propriétaire du meuble et de l’immeuble (ex. lorsque le commerçant loue l’immeuble dans lequel il exploite son commerce, la notion d’immeuble par destination économique ne trouvera pas à s’appliquer).

→→→→ On ne trouve dans le FDC que des éléments qui appartiennent au commerçant qui doit être le propriétaire de ces différents éléments. S’il y a dans le point d’exploitation des biens qui n’appartiennent pas au commerçant, ces biens n’appartiennent pas au FDC.

Section 3. Les effets du gage sur fond de commerce

1. Avant l’échéance de la dette garantie

1.1. Obligation d’exploitation du fonds

Avant que la créance garantie ne vienne à expiration, le commerçant reste à la tête de son fonds et continue à le faire tourner. Le commerçant est même obligé de le faire tourner car s’il croise les bras et que son commerce périclite, il amoindrit la sûreté conférée à son créancier.

C’est parce que le débiteur peut continuer à exploiter son fonds et à faire tourner son fonds, qu’on dit de l’assiette de la sûreté qu’elle est une assiette mouvante/fluctuante. Elle bouge car des marchandises en stock vont être vendues, qu’on rachète des nouvelles matières premières… séries d’actes normaux qui continuent à se produire.

Si le débiteur vient à diminuer la valeur du FDC, il sera soumis à des sanctions.

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---------- Précis : L’article 8, al.1 exprime assez maladroitement ce devoir du débiteur de s’en tenir à une exploitation rationnelle, compatible avec la sûreté consentie, en faisant le débiteur « gardien des éléments du gage ». ----------

1.2. Sanctions consécutives à une exploitation abusive

Des sanctions peuvent survenir si le commerçant ne se comporte pas comme un commerçant diligent :

a. Sanction pénale (Art. 8) : en cas d’aliénation frauduleuse d’éléments du fonds, le D est passible des peines de détournement.

b. Sanctions civiles :

• Art. 1188 Cc : « le débiteur va perdre le bénéfice du terme (attaché à sa créance) s’il laisse péricliter les sûretés dont il bénéficie », le C peut alors mettre en œuvre les voies d’exécution.

• Art. 11 loi 25 oct. 1919 : le C qui constate que des éléments sont sortis anormalement de son patrimoine (FDC), pourra revendiquer les biens dans un délai de 6 mois auprès des tiers dans les mains desquels le bien se trouverait. Cet article qui offre une (saisie-) revendication présente certaines limites d’une triple nature :

i. La loi ne s’applique qu’en cas de déplacement de matière 1ère, de matériel ou d’outillage. ii. Il y a un délai de 6 mois après le déplacement pour agir. iii. Les tiers acquéreurs de BF peuvent invoquer l’art. 2279 Cc pour faire échec à la

revendication. On veut protéger les acquéreurs de BF, càd les personnes qui ont acquis certains éléments du fond de commerce dans la croyance qu’il s’agissait d’un acte de gestion normale du patrimoine.

NB. La revendication dont on parle ici n’est pas une revendication au sens technique du terme du droit des biens, mais consiste en une forme de saisie (la saisie-revendication, art. 1462 et s. CJ). Cet article 11, 2° qui organise un système de revendication ne peut donc pas être considéré comme octroyant au C un droit de suite au sens stricte car le C peut se voir opposer 2279 Cc.

⇒ Limite : Le mécanisme de l’article 11, 2° ne vise que le déplacement d’objets particuliers, ce sont des éléments précis du FDC. Le législateur n’a pas imaginé un autre cas de figure : Quid lorsque c’est tout le fonds de commerce qui, en une fois, est cédé/vendu ?

Le législateur n’a pas prévu d’hypothèses spécifiques de la cession complète du FDC, mais la jurisprudence a admis que dans cette hypothèse le C puisse aussi bénéficier d’une possibilité de suivre le FDC qui a changé de mains.

→ Un droit de suite in globo a été reconnu par les juges (création prétorienne). Selon les tribunaux, il existe un mécanisme de publicité en matière de prise de gage sur FDC ; un tiers qui acquiert un fonds devrait avoir comme réflexe de vérifier si le fonds n’a pas fait l’objet d’un gage. Si un tiers acquiert un fonds sans s’être inquiété, il courra peut être un risque de voir ce fonds saisi à la requête du créancier qui en bénéficie initialement.

Le tiers acquéreur qui constaterait par la suite que le fonds qu’il a acquis est grevé d’une sûreté ne pourrait faire grand chose si le C venait saisir le fonds pour le mettre en vente, il ne pourra pas se retrancher derrière 2279 (qui ne s’applique pas aux universalités). NB. L’art. 2279 Cc ne vaut pas quand les éléments qui sortent du fonds sont des éléments isolés. Après du droit de suite, les tribunaux ont reconnu ici un droit de suite plus général au C bénéficiaire d’un gage sur FDC qui lui permet de ne pas perdre la main alors même que le fonds aurait changé de patrimoine. 2. Après l’échéance de la dette garantie

o Soit la dette garantie est remboursée, tout va bien. o Soit la dette garantie n’est pas remboursée et le gage s/ FDC va être réalisé.

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L’art. 11,4° dit que c’est le président du tribunal de commerce qui doit autoriser la réalisation du gage. Il faut donc nécessairement recourir à une autorisation judiciaire. Le président pourra autoriser le C :

- soit à vendre le FDC en bloc, - soit autoriser à un démantèlement du FDC (art, 12).

Néanmoins, comme le FDC est demeuré entre les mains du D, le C sera préalablement contraint de saisir les éléments qui le composent. Cette saisie sera pratiquée sans titre exécutoire, ni autorisation du juge.

Rem. La nécessité d’éviter de causer un préjudice irréparable aux autres C pousse à charger un curateur de la charge de la réalisation du gage, dans le souci évident de concilier à la fois les intérêts du poursuivant et de la masse. A défaut, la banque s’en chargera. + Article 26. Section 4. Les conflits relatifs au gage sur fond de commerce A) Conflits : créancier gagiste sur fond de commerce vs créancier gagiste sur fond de commerce

Lorsqu’on a un conflit entre deux créanciers, la première chose à faire est de :

a. les identifier b. se demander quelle est la créance qui est garantie c. se demander s’ils ont chacun une sureté d. décrire ou identifier l’assiette de la sureté de chacun des créanciers.

Ex. un commerçant consent un gage au profit d’une banque (B1) et puis un peu après, ce même commerçant consent un autre gage similaire à une banque (B2) sur le même fonds de commerce. S’il ne rembourse aucun, que sa faillite est prononcée, à qui le produit de réalisation du fonds va t’il échoir ?

⇒ On a ici deux sûretés conventionnelles donnant lieu à un formalisme publicitaire, il nous suffira donc de comparer les dates des mesures de publicité (au registre du conservateur des hypothèques). B) Conflits : créancier gagiste sur fond de commerce vs. créancier gagiste d’une créance

Hypothèse où un premier gage ait été consenti sur l’ensemble du fonds de commerce dans lequel figure une créance. Une de ces créances a fait l’objet d’un gage au profit d’un autre créancier.

Deux créanciers sont ici titulaires d’une sûreté établie par voie conventionnelle. On regarde donc quelles sont les dates de constitution de ces deux sûretés (étant entendu qu’il faut prendre les dates d’opposabilité aux tiers) puisque le conflit oppose des créanciers qui sont des tiers.

⇒ Le gage sur fonds de commerce est rendu public par son inscription, tandis que la mise en gage sur créance est opposable aux tiers du fait de la conclusion du contrat (art. 2275). On compare les deux dates et on donnera préférence à la première des deux. C) Conflits : créancier gagiste sur fond de commerce vs. Porteur/titulaire d’un warrant

D’abord il s’agit de voir s’il est techniquement possible que deux créanciers soient en conflit (assiettes identiques ou se recoupant). Sont-ils potentiellement en conflit sur le produit de la réalisation du même bien ?

> Les marchandises peuvent, jusqu’à une certaine valeur (50%), être l’assiette d’une sûreté s/ FDC. > Le warrant a pour objet les stocks de marchandises.

⇒ Donc, possibilité d’un conflit potentiel… comment le régler ?

Ce sont tout deux des sûretés conventionnelles, donc on s’inquiète de la date de constitution de ces sûretés, et la date antérieure l’emporte sur l’autre. Il faut prendre les dates d’opposabilité aux tiers.

> Le FDC est opposable aux tiers lors de son inscription au registre des conservations des hypothèques. > Le législateur ne requiert pas de formalité particulière que devrait remplir le warrant pour qu’il soit opposable, on regarde dès lors le titre constitutif.

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Nb. Les marchandises sont incorporées dans l’assiette du gage à concurrence de 50%. Le banquier bénéficiant du gage s/ FDC peut demander à son D qu’un warrant soit constitué en sa faveur : il couple ainsi les deux sûretés et a un droit de préférence sur l’ensemble de la valeur des marchandises.

→ De cette manière, il élargit l’assiette de sa sûreté et contourne ainsi le limite de 50% contenue dans la loi de 1919.

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Titre 3. Les privilèges sur meubles et immeubles

Rappel : Le législateur crée les privilèges car il estime certaines créances dignes de protection ; le créancier privilégié sera alors payé par préférence. On peut classer l’ensemble des privilèges en fonction des biens qui constituent l’assiette du privilège :

• Assiette constituée de meubles (= privilège sur meubles) ;

- privilèges généraux sur meubles (assiette = ensemble des meubles)

- privilèges spéciaux sur meubles (assiette = un ou certains meuble(s))

• Assiette composée d'immeubles (= privilèges immobiliers)

Les privilèges sur meubles et immeubles ne sont que deux : 1) Privilège des frais de justice 2) Privilège de l'assureur

… en fonction du cas d'espèce bien précis, ils sont soit mobiliers, soit immobiliers. CHAPITRE 1. LE PRIVILEGE DES FRAIS DE JUSTICE « Les frais de justice », lit-on à l’article 17 loi hypo., « sont privilégiés sur les meubles et immeubles, à l’égard de tous les créanciers dans l’intérêt desquels ils ont été faits ». Section 1. Justification Fondement de ce privilège : il faut soustraire à la loi du concours ceux qui ont consenti des frais dans le

but de conserver ou de liquider, par une procédure judiciaire, tout ou partie du patrimoine du débiteur, qui est le gage commun de l’ensemble des créanciers.

→ Le législateur a voulu favoriser les C qui sont intervenus dans l’intérêt de l’ensemble des C. S’il ne s’était pas soucié du règlement des C étant intervenus pour conserver ou liquider le patrimoine, plus aucun professionnel n’offrirait ses compétences.

Concrètement : Une personne tombe en faillite. Le tribunal de commerce va désigner un curateur pour rassembler les biens qui existent encore dans le patrimoine de cette personne pour les mettre en vente et en récupérer le produit de réalisation de la vente. Le curateur, voilà une personne qui va travailler au bénéfice de toute une série de créanciers et qui a évidemment le droit d'être payé pour ce qu'il fait. Il se verra donc payé par priorité ; s’il ne recevait pas la garantie que sa note d’honoraire serait payée par priorité, plus aucun avocat n’accepterait d’être curateur. Il est normal que celui qui travaille au bénéfice de tous les autres soit payé par priorité.

⇒ Sont visées ici toutes les personnes qui sont sous l'autorité de la justice et qui travaillent dans l'intérêt du patrimoine du débiteur. Section 2. Créance garantie et relativité du privilège

1. Créance garantie Ce privilège est instauré par un texte de loi, la plupart des privilèges se retrouvent dans la loi hypothécaire à l’article 17 (article fondateur). Il faut se demander : - Quelle est la créance garantie (la créance justifiant d’être payée par priorité) ? - Quels sont les biens composant l'assiette ? Les frais de justice sont les frais engagés par un créancier sous l'autorité de la justice, pour la conservation ou la liquidation des biens du débiteur et ce dans l'intérêt de la masse des créanciers ou de certains créanciers.

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⇒ Compte tenu de cette définition, on comprend pourquoi le législateur a entendu y accrocher un privilège. Le créancier a engagé des frais dans l’intérêt de toute une série de personnes et ce privilège est une manière indirecte de faire participer tous les créanciers. On peut ranger les frais de justice en 3 catégories :

• Les frais judiciaires proprement dits (ex. frais d’une saisie : saisie exécution d’un bien)

• Les honoraires et les débours des mandataires de justice (ex. curateur)

• Certains frais extrajudiciaires qui sont liés à des procédures qui sont menées sous le contrôle de la justice (ex. procédure d’apposition de scellés)

Rem. Les honoraires d’avocat ne bénéficient pas du privilège des frais de justice.

2. L’intérêt des créanciers : la double relativité du privilège

→ L’article 17 nous dit que les frais de justice ne sont privilégiés qu’à l’égard des créanciers « dans l’intérêt

desquels ils ont été faits ». Cet intérêt limite donc l’étendue du privilège, d’où :

(1) Relativité quant à l’assiette du privilège. (2) Relativité quant aux personnes auxquelles le privilège peut être opposé.

→ Cette double relativité s’explique par la ratio legis du privilège. La personne intervient pour conserver ou liquider certains biens au bénéfice de certaines personnes. L’assiette sera composée des biens concernés par ces mesures, au profit des personnes intéressées par ces biens.

> Lorsque quelqu’un engage des dépenses dans le but de conserver un bien du patrimoine du débiteur, c’est ce seul bien qui constituera l’assiette du privilège.

> Par contre, si c’est pour tout le patrimoine, le patrimoine entier constituera l’assiette du privilège.

⇒ Il faut vérifier ce qu’il a conservé / liquidé et le privilège ne pourra être opposé qu’aux créanciers qui ont retiré un profit des frais exposés. S’il a agit dans son intérêt exclusif, le privilège sera écarté (car il est le seul à en tirer profit, il en supporte donc seul les frais).

Rem. Sous cette réserve, le privilège des frais de justice est opposable sans publicité aux créanciers. • Les frais de justice ne sont privilégiés que sur les biens, meubles (corporels ou incorporels) ou

immeubles, qu’ils ont permis de conserver ou de réaliser.

Ex(1). Un créancier pratique une saisie sur un bien du débiteur et un autre créancier vient se joindre à la saisie. Naît alors une situation de concours, il y a un créancier qui a engagé des frais et l’autre va bénéficier du produit de la réalisation et n’aura aucun frais puisqu'il vient se joindre à une procédure existante. Ce serait donc injuste de ne pas faire participer le deuxième aux frais.

Ex(2). Un curateur est nommé à la suite d’une faillite, il est chargé de liquider tous les biens et il sera payé par priorité.

• Celui qui a supporté les frais pourra prétendre être payé par priorité et il ne pourra le faire valoir qu’à l’encontre des personnes qui ont bénéficié de son intervention.

Ex(1). Si une personne engage des frais pour saisir conservatoirement un bien, le débiteur ne peut plus s’en défaire et plus tard, un autre créancier vient saisir conservatoirement le même bien, les frais de la deuxième saisie n’ont été bénéfiques pour personne. Les frais liés à la première saisie seront des frais à l’égard de tous les créanciers et les seconds ne seront pas privilégiés car ils ne bénéficient à personne.

Ex(2). Si on procède à une saisie exécution, mais si elle n’arrive jamais à terme, les frais de la saisie exécution n’ont été bénéfiques pour personne si l’opération de saisie ne va pas à son terme. Il faut donc que les frais aient été bénéfiques pour qu’ils puissent être opposés à tout le monde.

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Ex(3). En dehors du cadre des saisies : mécanisme de l’action oblique. Quand elle aboutit à ce que le patrimoine du débiteur se trouve enrichi de biens qui viennent de tiers, ces biens sont bénéfiques. Ce seront donc des frais privilégiés.

Nb. C’est précisément à cause de l’élément assiette qu’on ne sait pas classer les privilèges de frais de justice dans une catégorie bien précise ; tout dépend de ce sur quoi portait l’intervention du C. Section 3. Rang du privilège des frais de justice En présence d’un privilège, on va chaque fois devoir signaler quel est le rang du créancier privilégié ; il y a en effet en permanence des conflits car le Législateur a établit des dizaines de privilèges dont les assiettes ne cessent de se recouvrir.

L’article 21 loi hypo. dit: « Les frais de justice priment toutes les créances dans l’intérêt desquelles ils

ont été faits ». Quand il s’agira de répartir le produit de réalisation des biens, celui-là recevra par priorité les remboursements de ces frais. Il présente la particularité de ne pas devoir faire l’objet de mesure de publicité (cf. art. 29 loi hypo.). CHAPITRE 2. LE PRIVILEGE DE L’ASSUREUR SUR LA CHOSE ASSUREE Section 1. Le texte et sa ration legis

> Le Législateur est seul compétent pour établir des privilèges, et la créance des assureurs est une autre créance que le législateur a trouvé digne d’intérêt (cf. art. 60 loi sur le contrat d’assurance terrestre du 25 juin 1992).

> Quelles sont les assurances concernées ? Cela ne vise que les assurances de choses (≠ responsabilité, vie,…): un assureur vient garantir l’assuré contre la perte totale ou partielle d’un bien. Ex. Si vous êtes proprio, vous avez intérêt à avoir une assurance incendie. Une assurance peut être prise contre des dégâts qui pourraient intervenir lors du transport par bateau.

> Pourquoi a-t-il entendu garantir le privilège de l’assureur ? Ratio Legis : Les assureurs interviennent en vue de la conservation du patrimoine du débiteur.

Parce que l’assureur s’est engagé à conserver le patrimoine, le Législateur a estimé qu’il faut le protéger car il agit en réalité au bénéfice de tous les C.

> Deux lois particulières : lois qui règlementent le contrat d’assurance en droit belge :

• Loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre

• Loi de 1874 sur les assurances maritimes (voir code de commerce) Section 2. La créance garantie et l’assiette du privilège > Quelle est cette créance de l’assureur ? La créance qui se voit privilégie, c’est celle qui attrait au

paiement des primes d’assurance restant impayées. Mais le législateur limite la garantie à deux annuités.

Rem. Le privilège n’est accordé à l’assureur que pour les primes relatives à la période pendant laquelle il a effectivement couvert le risque. Ainsi, les primes échues après que l’assureur ait notifié à l’assuré qu’il suspendait sa garantie ne sont pas privilégiées.

> Quelle est l’assiette de ce privilège ? C’est évidemment le bien conservé qui constitue précisément l’assiette de la sûreté, l’assiette du privilège. Il faut se référer au contrat d’assurance et c’est sur le produit de la réalisation de ces biens-là que l’assurance verra sa créance se répartir.

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Rem. L’assiette du privilège dépendant du type de bien couvert par le contrat, le privilège de l’assureur sera mobilier ou immobilier selon les circonstances.

Section 3. Les conflits Un assureur assure un immeuble dans le cadre d’une assurance incendie. Le débiteur ne paye pas la prime d’assurance, qu’advient-il si le bien devait être saisi ? Le produit de réalisation de cet immeuble sera précisément réparti entre les créanciers et par priorité à l’assureur qui bénéficie d’un privilège. Section 4. Le rang des privilèges de l’assureur Le rang du privilège de l’assureur est très avantageux. Les art. 60 loi de 1992 et 23 loi de 1874 indiquent que ce privilège vient immédiatement après celui des frais de justice. Il ne nécessite pas de mesure de publicité particulière (cf. supra : privilège des frais de justice).

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Titre 4. Les privilèges généraux sur meubles

CHAPITRE 1. CONSIDERATIONS GENERALES Section 1. L’assiette des privilèges généraux sur meuble Le terme « privilèges généraux sur meubles » est trompeur, car en réalité l’assiette des privilèges généraux sur meubles est constituée de : - l’ensemble des meubles du D. - l’ensemble des immeubles du D. En référence à l’art. 19 dernier alinéa, l’assiette des privilèges généraux sur meubles est en fait plus large que le seul patrimoine mobilier du D. Il faudrait donc simplement parler de privilèges généraux.

→ En définitive, le prix de réalisation des immeubles ne reviendra aux créanciers privilégiés généraux qu’après qu’aient été satisfaits les C qui ont un privilège spécial sur immeubles et les C-hypothécaires. Les immeubles ne serviront d’assiette du privilège qu’après apurement des hypothèques et des privilèges spéciaux sur immeuble. S’il subsiste un produit de réalisation, il permettra aussi de satisfaire les C ayant un privilège général sur meuble (= bénéficiaires dans un 2nd temps).

? Comment expliquer cette règle de l’art. 19 ? A une époque, seuls les meubles du D pouvaient être saisis. Il était alors normal de limiter l’assiette des privilégiés aux meubles.

Puis cette limitation est tombée. On s’est trouvé dans une situation où un même bien immeuble peut être l’assiette de trois sûretés différentes : 1. les hypothèques,

2. des privilèges spéciaux sur immeubles, 3. des privilèges généraux sur meuble et immeuble.

Trois types de C pourraient donc entrer en conflit. Le problème est que les deux 1ers privilèges donnent lieu à publicité, tandis que le 3e ne donne pas lieu à publicité. Résultat, un C-spécial sur immeuble ou un C-hypo n’auraient jamais su s’ils se trouvaient en bonne place.

Aussi, le Législateur de 1851 a-t-il voulu, pour éviter l’atteinte aux attentes légitimes de ces C, que les immeubles ne soient affectés au privilège général sur meuble qu’après apurement des hypothèques et privilèges spéciaux. Section 2. Le rang des privilèges généraux sur meubles Dans quel ordre va-t-on classer ces créanciers privilégiés ? On a une masse de C que le Législateur a identifié comme étant des C qui devaient être payés par faveur. Ajd la liste est tellement longue que l’on n’est jamais assuré de toucher qqch. Pourquoi parle-t-on d’intérêt à être placé en haut de la liste ? Pcq tous les C ayant la même assiette, dès qu’il sera procédé à la réalisation de la masse, il va falloir classer les C pour déterminer la part de chacun.

> Dans l’article 19, le législateur propose un classement. Quand il y aura des créanciers qui feront état d’une de ces créances, il suffira de regarder l’article.

> Parfois des C peuvent se trouver au même niveau, prétendant à la même assiette, dans ce cas le paiement de ces C se fera par contribution.

> Mais le législateur a aussi créé des privilèges en dehors de l’art. 19, c’est le cas dans d’autres textes légaux, ex. les codes fiscaux (ex. Code d’impôt sur les revenus, art. 422 : le trésor public a un privilège général sur les biens meubles ; Code des droits de succession, art. 84 : privilège de l’Etat ; Code de la TVA, art. 86 : privilège général sur tous les biens meubles du contribuable).

Comment faire ? La solution de principe se trouve dans l’article 15 loi hypo. : « régler par les lois qui les concernent », ce sont les lois particulières qui doivent régler l’ordre. Et effectivement, le législateur s’est à chaque fois occupé de l’ordre (ex. Code de la TVA, art. 87 : « Le privilège visé à l'art. 86 a le même rang

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que celui visé à l'art. 19ter » ; Code d’impôt sur les revenus, art. 423 : « Le privilège visé à l’art. 422 prend rang immédiatement après celui de l’art. 19, 5° »). CHAPITRE 2. ETUDE DES DIVERS PRIVILEGES GENERAUX SUR MEUBLES Les privilèges généraux sur meubles peuvent se regrouper en qq catégories principales :

1. Les privilèges justifiés par un souci d’humanité

2. Les privilèges justifiés par l’intérêt du travailleur

3. Les privilèges justifiés par l’idée de solidarité

4. Une catégorie fourre-tout

5. Les privilèges du trésor public, créés par les Codes fiscaux Section 1. Privilèges justifiés par un souci d’humanité à l’égard du débiteur Trois privilèges créés par le législateur dans un souci humanitaire : (1) Les frais funéraires (art. 19, 2° loi hypo.)

Il est l’un des rares privilèges qui a été instauré par le législateur dans l’intérêt du débiteur. Au départ, le privilège vise à protéger les intérêts du C, mais le législateur a aussi pensé au D décédé, ce sont des motifs de dignité mais aussi de salubrité publique qui ont amené le législateur à protéger la créance.

Les frais funéraires sont : - soit directement ceux des pompes funèbres, - soit ceux supportés par un des proches du défunt.

? Quand un décès peut-il provoquer une situation de concours ?

- Succession acceptée sous bénéfice d’inventaire : csq, il n’y a pas de mélange entre le patrimoine du défunt et le patrimoine de la personne qui hérite. Il faut liquider le patrimoine du défunt et payer ses créanciers. On va liquider tout l’actif du patrimoine qui va être réparti entre les C (art. 803 Cc).

- Ouverture d’une succession vacante : pas d’héritier ou refuse. Un curateur est désigné et s’il y a un reliquat, c’est l’Etat qui hérite (art. 813 Cc).

(2) Les frais de dernière maladie (art. 19, 3° loi hypo.)

Ce sont les créances des médecins, pharmaciens, hôpitaux, etc. Ils ne nécessitent pas pour être invoqués qu’il y ait eu décès, le D peut tjs être en vie. Cela concerne uniquement les frais qui auraient été supportés avant l’année qui a précédé la situation de concours. (3) Les créances de subsistance (art. 19, 5° loi hypo.)

Ce sont les privilèges des fournitures de subsistance. Ce sont les 6 mois qui ont précédés la situation de concours et qui ont permis la subsistance physique du débiteur et de sa famille qui sont pris en compte. Section 2. Privilèges justifiés par un souci de protection du travail (4) Le privilège des travailleurs (art. 19, 3°bis)

But : protéger les travailleurs se trouvant C, d’un employeur failli, en situation de concours. Les travailleurs sont en bonne position dans l'échelle de la liste et ont donc relativement une bonne chance d'être payés. Cet article prévoit plusieurs privilèges : les créances protégées sont toutes logées sous 3°bis càd qu’elles ont toutes le même rang. Les 2 principales :

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(4.1.) La créance de rémunération : la rémunération est certainement visée par cet article et doit être comprise au sens de la loi de 1965 en son art. 2 (le pécule de vacances n’est pas visé). C’est une rémunération brute (avant imputation des retenues) qu’on prend en considération. Il est difficile d’imaginer qu’il réclame une rémunération brute alors qu’il touche que du net. Le travailleur va réclamer sa rémunération nette en invoquant ce privilège et le solde (la différence), c’est le fisc et l’ONSS qui vont pouvoir le réclamer en invoquant le même privilège (ils sont implicitement visés). La créance privilégiée est plafonnée à 7500 € (le roi peut le modifier par AR, mais jamais fait en pratique). Les intérêts de retard sur cette rémunération ne sont pas visés et le fameux plafond ne s’applique pas aux indemnités de rupture qui sont toujours privilégiées sans plafond.

(4.2.) Les créances du fond d’indemnisation des travailleurs licenciés : quand il y a une fermeture d’entreprise et qu’à la suite des travailleurs sont licenciés, le fond a l’obligation d’indemniser les travailleurs de toutes les sommes qui seraient dues par l’employeur au travailleur. (5) Le privilège du pécule de vacances (art. 19, 4°, al.2)

Le législateur a entendu protéger les travailleurs, créanciers, si l’employeur n’a pas payé la rémunération des derniers mois. Le pécule de vacances est directement payé par l’employeur aux travailleurs employés, mais il ne fait pas partie de la rémunération. Il ne bénéficie donc pas du privilège de l’article 19, 3°bis, et se trouve dès lors dans un rang inférieur à celui de la créance de rémunération. Section 3. Privilèges justifiés par l’idée de solidarité sociale Les privilèges justifiés par un souci de solidarité sociale sont repris dans les art. 19, 4° à 4°nonies. Le Législateur vise différents organismes et accroche aux créances de ceux-ci un privilège qui a pour assiette l’ensemble des meubles et immeubles du D.

- Art. 19, 4° : créances de l’INAMI - Art. 19, 4° bis : créances du fond des assurances du travail - Art. 19, 4°ter : créances du fond des maladies professionnelles - Art. 19, 4°ter : créances des caisses d'assurance sociale pour travailleurs indépendants - Art. 19, 4°ter : créance du CASTI - Art. 19, 4°quater : créance des caisses d’allocations familiales

Privilèges qui sont un peu disparates et on ne sait plus très bien pourquoi le législateur les a introduits dans l’art. 19. Historiquement, on pouvait voir une certaine logique puis de plus en plus disparate (créances pour la santé des animaux, puis protection des végétaux, etc.) ; le législateur s’est emmêlé un peu les pinceaux. Ce sont tous de privilèges généraux sur meubles et immeubles donc ils ont tous la même assiette. Section 4. Autres privilèges On peut y ranger tous les autres C de l’art. 19, on y trouve ; les sociétés d’épuration d’eau, le fonds pour la santé des animaux, le fonds pour la protection des végétaux, etc. le Législateur ne cesse d’ajouter encore et tjs des C à cette liste qui n’en finit plus…avec les inconvénients qui en découlent. Section 5. Les privilèges du fisc Il faut regarder dans chacun des codes fiscaux la place que le législateur leur a donnée. Ces lois particulières déterminent la place de ces privilèges dans l’art. 19. Deux questions particulières sont posées :

? Faut-il appliquer aux privilèges du fisc créés par les codes fiscaux l’art. 19, dernier alinéa ? Cet article dit que l’assiette des créanciers privilégiés englobe les immeubles, mais que les C ayant un privilège général sur meuble n’auront un droit aux immeubles que de manière subsidiaire.

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� Dans un 1er temps (’90), la Cass. suggère qu’il n’y a pas d’application de cet alinéa de l’art. 19 aux privilèges créés par les lois particulières en faveur du Trésor public, car ce prescrit ne se retrouve pas dans ces lois particulières.

� Réaction du Législateur ; pour que le Trésor puisse aussi bénéficier du produit de la réalisation des immeubles, le Législateur mentionne au sein même des lois spécifiques, des codes fiscaux, le fait que l’article 19, dernier alinéa s’appliquera (ex. art. 423 du Code d’impôt sur les revenues ; le Code de la TVA aussi ; mais pas dans le Code des droits de successions).

? Comment le Trésor public va être informé de ce que les biens d’une partie sont mis en liquidation ?

Comment est-ce que le Trésor va pouvoir faire valoir ses droits ?

- Art. 442 et 443 CISR ; un système d’information y est établi. - Art. 433 CIR ; en cas de ventes immobilières c’est le notaire chargé de mettre en vente un bien qui

va devoir informer le fisc que le bien est mis en vente. - Art. 442 CIR ; en matière mobilière, c’est le huissier qui procède à la mise en vente du bien meuble

qui a une obligation d’information. Rem. Les créances du fisc sont garanties par des privilèges généraux sur meubles de même rang, lequel se situe immédiatement après celui des privilèges de l’article 19. Ici encore, on se trouve en présence de privilèges établis non en raison de la qualité de la créance garantie mais de la personne du créancier, par exception au principe général. Section 6. Résolution d’un casus à titre de conclusion Un commerçant fait faillite. Il a des meubles et des immeubles, et le curateur les met en vente. Il obtient 1000. L’employé réclame une créance de 500€ ; les contributions directes se manifestent parce qu’il ne les aurait pas payées (150€) ; l’ONSS réclame 200€, la TVA 200€, le médecin 50€ et le curateur 300€. Si vous additionnez tous ces montants, vous obtenez un montant de 1400€ qui est supérieur à la vente du patrimoine.

Raisonnement :

• L’employé bénéficie d’un privilège en vertu de l’art. 19, 3°bis.

• Les contributions directes (CIR) : il existe un privilège général sur meuble.

• La TVA : le Code de la TVA les met sur le même pied que les privilèges de l’art. 19, 4°ter.

• L’ONSS : c’est dans l’article 19, 4°ter.

• Le médecin : privilège pour les frais de dernière maladie pendant 1 an ; ce n’est pas le cas ici, donc il

ne bénéficie pas du privilège → simple créancier chirographaire.

• Le curateur : tout à fait prioritaire.

On met tout ce beau monde en ordre de bataille : 1) Le curateur (300€) 2) Le travailleur (500€)

3) TVA et ONSS (chacun 200€ = 400€ → partage car reste 200) 4) Les suivants : plus d’argent en caisse

Ce n’est pas très compliqué, le principe est toujours le même.

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Titre 5. Les privilèges spéciaux sur meubles

Introduction.

Les privilèges spéciaux sur meubles sont des privilèges particuliers par lesquels le législateur va favoriser le paiement de certaines créances et dont l’assiette est constituée d’un / plusieurs meubles déterminés. Ils sont pour la plupart institués dans l’art. 20 loi hypo., mais certains privilèges spéciaux sont néanmoins institués dans des lois particulières, ex. - le privilège de l’assureur (cf. supra), - la loi du 2 août 2002 sur les intermédiaires financiers. Observation concernant les principes de règlement de conflit.

Des conflits peuvent survenir entre les privilégiés spéciaux ou entre des privilégiés généraux et spéciaux en raison du fait que les assiettes de ces C peuvent se recouper, voir être identiques.

• Soit conflit entre privilégiés spéciaux et privilégiés généraux ; les privilégiés spéciaux priment les privilégiés généraux (article 25 et 26 loi hypo.).

• Soit conflit entre privilégiés spéciaux :

Rem. Contrairement au prescrit de l’art. 19, l’ordre de l’énumération repris à l’art. 20 n’établit pas leur rang en cas de conflit.

1er réflexe : Se référer aux art. 21 et s. loi hypo. où le législateur règle les conflits les plus fréquents.

X V Le conflit y est repris, le rang fixé, ok. 2nd réflexe : Se référer aux lois spéciales, le législateur a peut être institué un privilège par loi spéciale.

X V Le conflit y est repris, le rang fixé, ok.

3e réflexe : Se référer à l’art. 13 loi hypo. (règles générales de résolution de conflit). Sur base de cet article, le juge est chargé de reconnaître la préférence de tel privilège sur tel autre sur base des qualités du privilège. Cette balance des intérêts n’est pas aisée et la jurisprudence abondante est hésitante… Observation concernant la classification des privilèges.

Le fondement des privilèges spéciaux sur meubles conduit à distinguer deux groupes au sein des privilèges spéciaux instaurés par l’art. 20 :

- Les privilèges spéciaux sur meubles justifiés par une idée de gage. - Les privilèges spéciaux sur meubles justifiés par une idée de plus-value conférée par le C au

patrimoine du D. - Les privilèges spéciaux sur meubles ni justifiés par une idée de gage, ni par une idée de plus-value. CHAPITRE 1. PRIVILEGES JUSTIFIES PAR L’IDEE DE GAGE Avant d’entamer, il faut s’attarder sur deux remarques introductives :

1. Pourquoi le C-gagiste figure-t-il dans la liste de l’art. 20 ?

Dans l’art. 20 consacré aux privilégiés spéciaux sur meubles, le législateur a placé en 3° le créancier gagiste. Cette qualification indirecte du gage en privilège est incorrecte étant donné que le gage n’est pas un privilège au sens technique du terme.

1) Le gage est une sûreté conventionnelle, alors que le privilège est créé directement par la loi. 2) Le gage, qui est un contrat librement conclu entre parties, peut garantir n’importe quelle créance,

alors que le privilège est justifié par la qualité de la créance que le législateur a jugé digne d’une protection particulière.

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En réalité le gage ne crée pas un droit de préférence dans le paiement du produit de réalisation du gage, il a pour effet d’offrir au C un droit de rétention sur la chose (tant que la chose ne fait pas l’objet d’un paiement). Malgré que l’on soit en présence d’une sûreté conventionnelle, le Législateur a voulu conférer au C un droit d’être payé par préférence sur le produit de la réalisation du bien gagé. En raison de ce fait, le gage est donc bien une sûreté conventionnelle, mais étant assimilée à une sûreté légale. Àpd du moment où le gage s’est trouvé assimilé à un privilège spécial, le Législateur a pu se contenter d’évoquer les privilèges à l’art. 9, sans prendre la peine à chaque fois de répéter l’assimilation.

---------- Précis : Le privilège du prêteur agricole fut créé par le Législateur en considération de la créance garantie (contrairement au gage). Mais il ne s’agit pas non plus d’un authentique privilège, car le privilège du prêteur agricole est une sûreté conventionnelle (//gage). Or, le privilège ne saurait par définition naître de la volonté des parties. ----------

2. Pourquoi dit-on que certains sont justifiés par une idée de gage ? En réalité, l’ensemble des privilèges que l’on va examiner dans cette catégorie présentent la particularité suivante : ils peuvent être rattachés à une idée de gage tacite, le C se trouve mis directement ou indirectement en possession de l’assiette du privilège. Au prix d’une part de fiction, on peut admettre que le C est en possession des biens grevés, csq :

- Le C bénéficie de la protection possessoire. - Le privilège disparaitra s’il devait y avoir une dépossession de l’assiette et que le créancier ne serait

plus en possession de celle-ci.

Quels privilèges peut-on ranger ici ?

a. Le privilège du bailleur b. Le privilège du transporteur c. Le privilège du commissionnaire (pour mémoire) d. Le privilège de l’hôtelier (pour mémoire)

Section 1. Le privilège du bailleur d’immeuble

1. Considérations générales ; texte légale et champ d‘application Le bailleur est le propriétaire d’un immeuble et il le donne en location à un locataire. C’est donc bien la C de loyer dont est titulaire le bailleur qui va être assortie d’un privilège par le Législateur.

⇒ L’assiette du privilège du bailleur est constituée de meubles. Le Législateur a voulu ainsi réduire les csq que peut subir le bailleur en cas de non-paiement du loyer par le locataire.

L’art. 20, 1° loi hypo. institue ce privilège (pour le bail à ferme il faut consulter l’article 9 de la loi du 15 avril 1884). Il vise de manière très expresse la location de maisons et de fermes ; en réalité, il vise maintenant toutes les locations immobilières.

2. Les créances garanties Le législateur fait une distinction entre les locations de droit commun (d’immeuble) et le bail à ferme (pas vu). Lorsque le bail est autre qu’un bail à ferme, la créance faisant l’objet d’une garantie est une créance découlant du contrat de bail, et peut être composée de 3 types d’éléments :

1/ Les créances de loyer pour les 2 années échues, et de l’année en cours.

Pour les calculer, il faut se placer à la date anniversaire du bail (ex. (2 sept. 2000 – 1 sept. 2001) + (2 sept. 2001 – 1 sept. 2002) + 365 jours).

Rem. Pour De Page, le législateur a songé à des loyers établis par année. Ceci signifierait que, lorsque les loyers payables par trimestre ou par mois, l’étendue du privilège doit être mesurée aussi

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par trimestre ou par mois. Le privilège serait attaché aux loyers échus des deux derniers termes et du terme en cours, que le terme soit l’année, le trimestre ou le mois.

2/ Les créances de loyer pour l’année qui suit l’année en cours (ex. 2 sept. 2003 – 1 sept. 2003) et pour les années qui suivront.

Pour autant que le bail continue, le privilège garantit, outre le loyer de l’année « qui suit l’année en cours », tous les loyers restant dus jusqu’à son expiration si le bail a date certaine.

En réalité cet article ne s’applique pratiquement plus… Un article 46 loi sur les faillites vise le sort des contrat en cours. Ainsi lorsque survient la faillite ;

- Soit le contrat prévoit explicitement la résolution du contrat au jour de la faillite de l’une des paries. Dans ce cas, il n’y a plus de dette à échoir, et la 2nd composante tombe.

- Soit il n’y a pas de clause particulière, alors :

o Si le contrat est intuitu personae ; il prendra fin au jour de la survenance de la faillite.

o Si le contrat n’est pas intuitu personae ; le curateur va examiner la situation et décider du maintien ou non du contrat en cours.

� X maintien : il n’y aura plus de dette à échoir, la 2nd composante tombe.

� V maintien : l’article 46 prévoit dans ce cas que les loyers qui vont venir à échéance seront qualifiés de dette de la masse, càd que ces dettes contractées par le curateur en vue de l’administration de la faillite (soit il accepte la naissance de nouveaux contrats, soit il contracte lui-même des dettes). Ces dettes sont alors payées par préférence à toutes les autres dettes de la faillite (en vertu de la loi sur les faillites, cf. art. 99), car elles servent à la liquidation de la masse en question.

3/ Les créances d’autres montants dus par le locataire.

Ces « autre charges » sont les réparations locatives et tout ce qui concerne l’exécution du bail, à savoir les intérêts de retard, le précompte immobilier lorsque le contrat oblige le preneur à le rembourser au bailleur, l’indemnité pour dégâts locatifs, l’indemnité de relocation, etc.

3. Assiette du privilège

A) L’assiette du privilège est composée des biens qui sont mis en vente et qui génèrent une certaine

somme qui reviendra en priorité au bailleur. Ces biens sont des meubles sont « tout ce qui garnit » l’immeuble loué, et tout ce qui permettra à l’occupant d’utiliser l’immeuble et d’en avoir la jouissance.

⇒ Il y a une cohérence entre la loi hypothécaire et le Code civil, art. 1752 qui oblige le locataire à garnir l’immeuble de meubles en quantité suffisante (// 2 ou 3 termes de loyer).

B) L’assiette est toutefois limitée par une exigence : les biens constituant l’immeuble doivent garnir l’immeuble, il faut donc qu’il y a ait un lien entre le meuble et l’immeuble, lien avec la destination de l’immeuble. Tout ce qui a un rapport normal avec l’utilisation et la jouissance du lieu. Tout bien qui entre dans les lieux ne constitue donc pas nécessairement l’assiette (ex. bijoux).

C) Le privilège repose sur une idée de gage tacite. Ce que le preneur a introduit dans les lieux loués est supposé donné en nantissement au bailleur qui en a indirectement la « possession » par l’intermédiaire de l’immeuble. Lorsqu’1/3 laisse des biens meubles chez un locataire, il court le risque de voir ses biens saisis par le bailleur et être mis en vente avec réalisation du produit au bénéfice du bailleur. Pour adoucir cette règle, on requerra la bonne foi dans le chef du bailleur1 ; il doit avoir ignoré, lors de l’entrée des biens chez son locataire, que ces derniers appartenaient à 1/3.

1 Précis : NB. La connaissance ultérieurement acquise par le bailleur que ces biens ne sont pas la propriété du preneur est sans influence et ne saurait les soustraire après coup à l’assiette du privilège !

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a) Le 1/3 (ou le locataire) peut donc informer le bailleur de manière à être assuré que ce dernier ait bien connaissance du fait que les biens n’appartiennent pas au locataire.

b) Lorsqu’il est évident que les biens trouvés dans les lieux loués sont des biens qui ne peuvent pas appartenir au locataire, l’information n’est pas nécessaire.

Le fait que les biens d’1/3 puissent faire partie de l’assiette du bailleur est limité par le critère de l’abus de droit. En effet, on considère que si le bailleur dispose d’un vaste choix de biens à saisir, il devra par priorité saisir les biens appartenant effectivement au locataire.

En cas de sous-location, les règles sont identiques. La bonne foi du bailleur est présumée, ce n’est que si le bailleur sait au moment de l’entrée que les biens n’appartiennent pas au locataire, mais au sous-locataire qu’il sera de mauvaise foi.

? Quid de la situation du sous-locataire qui a des meubles ? Si le bailleur n’est pas payé par le locataire

principal, va-t-il pouvoir saisir les biens du sous-locataire ?

Art. 1753 Cc : le sous-locataire n’est tenu envers le propriétaire que jusqu’à concurrence du prix de sa sous-location. L’article 1461 CJ dit que le sous-locataire pourra demander la mainlevée de la saisie en justifiant qu’il n’est pas en arriéré de loyer. S’il n’est plus redevable de rien du tout, il ne verra pas ses biens mis en vente à la requête du propriétaire.

4. Le déplacement des meubles et les mesures conservatoires S’il est normal que certains biens sortent de l’immeuble et que d’autres y entrent, en raison de la nature fluctuante de l’assiette, le déplacement anormal de (tous les) meubles éteint le privilège qui repose sur une idée de gage tacite, et donc de possession dans le chef du C. Le bailleur a donc tout intérêt à ce qu’il y ait le plus de choses possible et à ce que le locataire ne fasse pas sortir les meubles. Ce qui est anormal c’est le locataire qui dégarnit complètement son immeuble. Le bailleur a quelques armes juridiques pour éviter cela :

a) La subrogation réelle ;

- Si un bien vient à sortir de l’assiette, et se trouve remplacé par un bien entrant, il y a report du C sur ce bien pour autant qu’il soit un bien identifiable.

- Si un bien vient à sortir de l’assiette, les droits du bailleur pourront se reporter sur une créance de prix, car s’opèrera une subrogation entre le bien et la créance qui découlerait par ex. de sa vente.

→ Il est nécessaire que le bien (subrogeant) remplaçant le 1er (subrogé), ou que la créance, soient

identifiables sans quoi la subrogation ne saurait jouer… (Somme d’argent ≠ identifiable dans un actif). b) La saisie-gagerie ;

Cette règle est préventive, elle a pour objectif d’éviter que l’assiette du bailleur ne soit réduite à rien. Lorsque le bailleur a des craintes que le locataire dégarnisse le bien loué, le législateur a offert au bailleur, une forme particulière de saisie à titre conservatoire établie à l’art. 1461 CJ.

La saisie gagerie a pour effet d’empêcher le preneur de déplacer les biens saisis et assure ainsi le maintien du privilège du bailleur. Si le locataire venait à se défaire de ces biens, il serait alors passible de sanctions pénales.

Conditions :

x (1) Elle peut être pratiquée sans l’autorisation préalable du juge des saisies (≠ saisie-conservatoire qui requiert une nécessaire autorisation du juge des saisies).

v (2) Elle doit être précédée d’un commandement de payer signifié au preneur un jour au moins avant, ce qui peut nuire à son efficacité (car il pourrait déjà se défaire de qq biens, pas d’effet de surprise).

v (3) Elle est autorisée que dans la mesure où des loyers / fermages sont restés impayés.

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v (4) La saisie doit être mesurée ; il ne s’agit pas de saisir l’ensemble des biens du D, elle doit être mesurée et adaptée en fonction des loyers échus.

v (5) La célérité est requise, le bailleur ne peut donc y recourir que dans l’hypothèse où sa créance est en péril (art. 1413 CJ).

NB. Le bailleur peut très bien, s’il l’estime nécessaire ou mieux adapté, recourir à une saisie-conservatoire qui, malgré la nécessaire autorisation du juge, garantit un réel effet de surprise ! c) Le droit de suite et la saisie-revendication ;

L’art. 20, 1° loi hypo. reconnaît au bailleur un droit de suite limité sur les meubles déplacés sans son consentement. Le Législateur met sur pied un droit pour le bailleur de faire saisir ces biens sortis de l’assiette de sorte qu’il puisse reconstituer l’assiette de son gage. Cette saisie-revendication (art. 1462 à 1466 CJ) pourra avoir lieu entre les mains de 1/32 à qui le preneur aurait confié ou vendu certains meubles. Le bailleur pourra ainsi réintégrer les meubles déplacés dans l’assiette de son privilège, cette action va donc permettre au bailleur de reconstituer son assiette.

Conditions :

1) La revendication des biens sortis de l’assiette doit avoir lieu dans les 15 jours du déplacement (non de la prise de connaissance de ce déplacement !).

2) Le bailleur doit établir que sa situation est mise en péril du fait de ce déplacement. Si le locataire est un locataire qui ne présente pas de problème de solvabilité particulier, on ne va pas s’offusquer parce qu’un meuble sort du patrimoine.

Rem. La saisie-revendication est écartée lorsque le bailleur a donné son accord lorsque les meubles ont été déplacés.

5. Conflits : privilège du bailleur vs. C-gagiste s/ FDC Les assiettes des deux créances peuvent se recouper partiellement ou totalement. Le privilège du C-gagiste s/FDC peut avoir pour assiette : - « le mobilier de magasin et l’outillage » - « les marchandises en stock » (50%). Ces mêmes biens sont aussi grevés le cas échéant du privilège du bailleur… Illustration. Le bailleur a pour assiette de son privilège tout ce qui vient garnir l’immeuble, de même le C-gagiste s/ FDC voit dans son assiette tout ce qui est nécessaire pour faire tourner le FDC, donc ce qui vient garnir l’immeuble en fait partie. Il y a donc au moins recoupement partiel des assiettes.

Résolution du conflit : - Le gage = sûreté conventionnelle - Le privilège du bailleur = sûreté légale

Ce conflit n’est pas réglé par la loi, mais il a été souvent rencontré par la jurisprudence. La Cass. a donc eu l’occasion de trancher la question dans un arrêt du 11 juin 1982 : puisque le privilège du bailleur est justifié par une idée de gage tacite, et que le conflit l’oppose à un C-gagiste, on assimiler ce conflit à un conflit entre deux gagistes ; on recourt donc à la règle de l’antériorité. Les juges du fonds se sont conformés à cette démarche.

Ce principe acquis, il faut déterminer quelle est la date à prendre en considération :

• Pour le gage s/ FDC, c’est logiquement la date de l’inscription.

• Pour le bail, en l’absence de formalisme de publicité, la Cass. a retenu dans le même arrêt la date de l’entrée des meubles dans les lieux. Rem. S’ils sont entrés avant la conclusion du bail, la date sera celle de la conclusion du contrat.

2 Précis : NB. La saisie-revendication peut être pratiquée même à l’encontre de l’acquéreur de bonne foi qui se voit refuser la protection de 2279 Cc face à l’action du bailleur.

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Section 2. Le privilège du transporteur

1. Texte légal, champ d’application et créance garantie L’article 20, 7° parle du « voiturier », mais ce terme doit être pris dans un sens plus large de « transporteur ». Le privilège appartient donc au transporteur de marchandises par terre, eau, air. Le privilège est applicable à tout transport, quel que soit son mode et quel que soit la qualité du transporteur, occasionnel ou professionnel.

NB. Ce privilège est refusé pour les frais de remorquage et de dépannage, quant au déménagement, la jurisprudence est incertaine (Cr d’appel de Bxl, ok pour un déménagement d’un étage à un autre du même immeuble à l’aide d’une grue).

Cet article accroche un privilège : - aux frais de voituriers (frais de transport) = créances garanties - aux dépenses accessoires

2. Assiette du privilège L’assiette du privilège est la chose transportée d’un endroit x à y.

En réalité, la chose transportée sert d’assiette :

- tant que la chose transportée est en possession du transporteur

- durant les 24h de la remise de la chose au contractant.

Ensuite, l’assiette s’évapore… ⇒ On retrouve ici l’idée de gage. La situation du transporteur n’est donc pas très confortable car il perd rapidement tout privilège : une fois qu’il ne dispose plus de l’assiette, son privilège devient inutile et inefficace. Le principe de connexité (IeI créance et chose) permet de remédier à ce problème, car on admet que le transporteur exerce sur la chose un droit de rétention lui permettant de garder l’assiette de sa créance. CHAPITRE 2. PRIVILEGES JUSTIFIES PAR UNE IDEE DE PLUS-VALUE Certains privilèges spéciaux sur meubles sont justifiés par l’idée que le créancier a enrichi le patrimoine du débiteur, gage commun de tous, par l’apport ou la conservation d’un bien sur lequel il est dès lors équitable de lui reconnaitre la préférence.

Ces privilèges n’impliquent aucune possession de la chose par le créancier (≠ idée de gage). En revanche, ils disparaissent dès son aliénation par le débiteur. Section 1. Le privilège du vendeur d’effets mobiliers Le bien qui est vendu au D va enrichir son patrimoine. En accomplissant son obligation de délivrance, il est juste que le vendeur se fasse payer par priorité (art. 20, 5° loi hypo.).

1. La créance garantie v Le privilège du vendeur grève le bien vendu et est attaché à la créance de prix qui découle de la conclusion du contrat de vente, en principal et accessoires (càd prix+ TVA, intérêts conventionnels, etc.).

x Ne font pas partie de la créance privilégiée les sanctions qui viendraient frapper l’acheteur ayant eu un comportement fautif (ex. intérêts de retard, clause pénale, etc.).

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2. L’assiette du privilège L’assiette de la sûreté, c’est la chose vendue, l’objet qui a enrichi par voie de csq le patrimoine du D. L’art. 20, 5° traite des privilèges spéciaux sur meubles, c’est donc bien le vendeur d’effets mobiliers qui est ici concerné.

Q.1? Que se passe-t-il si l’acheteur aliène le bien avant paiement ?

Le libellé de l’article prête à confusion : « les créances privilégiées sur certains meubles sont : le prix d’effets mobiliers non payés, s’ils sont en la possession du D ».

⇒ Il aurait été plus correct de dire « si les biens sont encore la propriété de l’acheteur ».

Donc lorsque l’acheteur a revendu la chose, mais qu’il ne s’en est pas encore défait matériellement, il y a déjà perte de l’assiette du privilège. Il suffit qu’il se soit défait de son titre de propriété.

→ Si l’acheteur vient à vendre le bien, il sortira de son patrimoine, le privilège perd donc toute assiette, il n’a plus d’intérêt. Mais le mécanisme de subrogation réelle peut trouver à s’appliquer sur le prix encore dû par le sous-acquéreur (de manière à ce qu’il soit encore identifiable).

Q.2 ? Que se passe-t-il si le bien est transformé ?

Si le bien est transformé, on considère que puisque l’assiette n’est plus clairement identifiable, ce qui implique la perte de l’assiette du privilège et le vendeur ne peut plus faire valoir aucune prétention particulière.

Ici, la plus-value n’est pas perdue, elle est simplement indiscernable et c’est pourquoi il y a perte de l’assiette du privilège.

⇒ Si cette condition n’est pas expressément formulée par les articles concernant le privilège, elle est reprise comme condition d’application du droit de revendication du vendeur impayé (art. 20, 5°, al.6) et de la clause contractuelle de réserve de propriété en cas de faillite de l’acheteur (art. 101 loi sur les faillites). Elle serait donc applicable par analogie…

Cette assimilation est controversée en raison de la nature différente de ces institutions (mais cette controverse initiée par De PAGE n’a pas eu écho dans la jurisprudence).

< Le droit de revendication et la clause de réserve de propriété poursuivent tout deux un impératif, celui de replacer le titulaire dans sa situation initiale et nécessite une possible identification des éléments concernés.

> Le privilège est un droit de préférence un prix de réalisation destiné à couvrir ce qui lui est dû, et qui ne saurait dès lors lui permettre de s’enrichir. Il se justifie par l’idée de plus-value, ce qui doit être considéré c’est que l’acheteur reste enrichi et son patrimoine demeure valorisé tant que le bien vendu, même transformé, s’y retrouve.

Q.3 ? Que se passe-t-il si le bien est immobilisé ?

L’art. 25, 5° précise que « le privilège cesse d’avoir effet si les objet mobiliers sont devenus immeubles par destination ou incorporation ».

Le privilège reconnu au vendeur est porté sur les meubles, son immobilisation coïncide donc forcément avec la perte pure et simple du privilège (= plus d’assiette). Le bien s’intègre alors dans l’assiette des hypo. (le Législateur a entendu éviter les conflits entre vendeur mobilier et C-hypo. en sacrifiant le 1er).

Exception : prévue par l’article « sauf s’il s’agit de machines, appareils, outillage ou autre matériel d’équipements professionnels employés dans des entreprises industrielles, commerciales ou artisanales » = situation que l’on appelle : privilège industriel (privilège dont bénéficie le C dont le D a immobilisé le meuble consistant en un équipement professionnel).

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Condition : 1) Une copie certifiée conforme de la facture doit être déposée au greffe du trib. comm.

dans les 15 jours de la livraison (≠ mesure de publicité, cdt° d’opposabilité aux 1/3). 2) Le privilège sera maintenu durant 5 ans àpd de la livraison.

Rem. La revente du matériel par l’acheteur fera disparaître le privilège. Et il ne saurait être fait grief au sous-acquéreur d’avoir acheté le bien malgré dépôt de la copie au trib. comm. en raison du fait que ce dépôt ne consiste précisément pas en une mesure destinée à assurer l’efficacité de la sûreté.

3. Autres garanties du vendeur impayé

Le vendeur, C-privilégié, a été choyé par le Législateur (art. 20, 5°) qui lui a donné d’autres armes pour se défendre et à faire valoir dans le cas où il se trouverait dans une situation de non paiement : action en revendication, action en résolution et la clause de réserve de propriété. 3.1. L’action en revendication (al.6)

Cette action va permettre au vendeur de récupérer la chose dans les mains de l’acheteur, dans le cas où malgré que la vente ait été faite sans terme, l’acheteur ne paye pas de suite. Pour éviter la perte du privilège et éviter que l’acheteur ne revende la chose à un tiers, il va récupérer la mainmise sur la chose. Le mot « revendication » ne doit pas être pris dans le sens technique du terme, il reflète :

v La volonté de récupérer la détention matérielle de la chose. x Non la volonté de récupérer la possession en qualité de propriétaire.

La revendication est ainsi une mesure conservatoire destinée à empêcher la revente du bien vendu par l’acheteur. Retrouver la maîtrise matérielle de la chose lui permettra d’exercer son droit de rétention, qui constitue un moyen de pression sur l’acheteur jusqu’au payement.

Cette action en revendication parait être un outil très intéressant dans le chef du vendeur, mais les conditions sont assez strictes : 1) Elle ne peut être exercée que si c’était une vente sans terme.

2) Il faut revendiquer dans les 8 jours de la livraison. 3) Le bien doit être dans le même état, pas aliéné ou transformé.

Vu les conditions, l’action en revendication trouve rarement application.

NB. La revendication = forme de saisie-conservatoire spécialement et expressément ouverte au vendeur, soumise aux art. 1462 et s. CJ). 3.2. La résolution de la vente

La résolution c’est l’anéantissement d’un contrat pour l’inexécution d’une obligation par l’une des parties, sanction prononcée suite à un manquement (ex. une situation de non payement). Cette action trouve son intérêt dès lors que le vendeur préfèrera récupérer son bien plutôt que de le voir vendu à un mauvais prix sur saisie ou après faillite. - la résolution à l’amiable En droit belge, il existe diff. types de résolutions: - la résolution judiciaire - la résolution contractuelle (clause résolutoire)

Nb. La résolution n’est plus possible une fois qu’est survenue la situation de concours, mais si elle a été introduite avant la faillite, elle jouera.

La résolution a pour effet de libérer le vendeur de son obligation de délivrance de la chose.

Pour cette raison, le législateur a apporté quatre précisions :

I. Si l’action en résolution est survenue avant la survenance de la situation de concours, elle sera être admise. Du moment que l’action est intentée avant la survenance du concours, peu importe que le jugement soit rendu après, la résolution est admise. Si le contrat contenait une clause résolutoire expresse, il suffit que le vendeur ait manifesté son intention de faire jouer la clause avant la survenance de la faillite.

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II. Certains auteurs se sont demandés si les résolutions in extremis survenues avant la survenance de la faillite ne devaient pas être considérées au regard de l’art. 17 LF, en vertu duquel un payement suspect est inopposable à la masse. Dès 1982, la Cass. a répondu : la résolution est un mode d’extinction des contrats, et non un mode anormal de payement visé par l’art. 17 LF. La Cour a toutefois ajouté que le juge pouvait interpréter l’acte (la résolution) et le faire tomber sous le coup de l’art. 17 s’il avait l’intime conviction, dans son œuvre d’interprétation, que les parties avaient cherché à avantager un créancier par rapport aux autres.

III. La résolution reste admise malgré la situation de concours lorsque le vendeur demeure en possession du bien. L’idée est de dire que comme le bien n’a pas été livré les autres créanciers n’ont pas pu croire que ce bien faisait partie des biens du failli. Et puisqu’ils n’ont pas pu l’imaginer, il n’y a pas d’obstacle à la résolution du contrat.

IV. « La déchéance de l’action revendicatoire emporte également celle de l’action en résolution » (al.8), la déchéance des deux actions est simultanée. Après la faillite (situation de concours), la résolution n’est plus possible, sauf si l’on se situe encore dans la période des 8 jours consécutive à la livraison. Mais ce délai est tellement court qu’il ne laisse en pratique quasiment pas de possibilité d’agir au vendeur.

Rem. Faute d’une initiative positive avant la faillite ou le concours, le vendeur ne pourrait faire jouer de plein droit sa clause résolutoire expresse dès l’échéance impayée, il doit invoquer la clause de manière non-équivoque ! 3.3. Clause de réserve de propriété

Rem. Clause courante dans les cond° générales de vente reproduites sur facture ou bon de commande.

> La clause de réserve de propriété ne peut être valablement invoquée que dans la stricte mesure où :

i. Elle serait invoquée avant la situation de concours.

ii. Le vendeur serait tjs en possession du bien vendu, malgré concours.

En effet il serait injuste que le C puisse se ménager, en cas de situation de concours, d’une garantie que l’article 20, 5° (dispositions limitatives d’OP) ne prévoit pas…

> Désormais, l’art. 101 LF confère à la clause de réserve de propriété, convenue par écrit, un effet de garantie, dont les effets sont conservés durant la situation de concours sous réserve que :

1) Le vendeur l’ait invoqué avant le 1er PV de vérification des créances.

2) Les biens se trouvent toujours dans le patrimoine de l’acheteur (D).

3) Les biens soient identifiables dans ce patrimoine.

⇒ Si les biens sont revendus au mépris de la clause de réserve de propriété, le tiers acheteur :

… qui n’est pas de BF, ne bénéficiera pas de 2279 Cc et n’aura pas acquis la propriété du bien ; le vendeur pourra faire jouer sa clause.

… sera protégé sur pied de l’art. 2279 Cc s’il est de BF, et sera alors propriétaire. Mais la jurisprudence a tendance à venir en aide a vendeur. Dans son arrêt du 28 nov. 2002 la Cass. considère que le tiers acquéreur professionnel a l’obligation de se renseigner si son propre vendeur est bien propriétaire de la chose vendue.

On pourrait le considérer comme tiers complice, car : - soit non-respect de l’obl° de renseignement. - soit achat au mépris de la clause de réserve.

Dans ce cas, il commet une faute au sens de l’article 1382 Cc, ce qui permettra au vendeur de réclamer réparation pour le préjudice subi (ex. réparation en nature).

4. Les différents conflits Conflits qui peuvent survenir et qui mettent en cause un vendeur. Parmi ces conflits :

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4.1. Conflit : le vendeur vs. le bailleur

On a deux privilèges spéciaux sur meubles… Le législateur a-t-il réglé le conflit lui-même ? Cf. art. 23, al.2 qui règle ce conflit : « le privilège du vendeur ne s’exerce qu’après celui du propriétaire de la maison, à moins que lors du transport des meubles dans les lieux loués, le vendeur n’ait fait connaître au bailleur que le prix n’avait pas encore été payé ».

L’information dont il est question doit être personnalisée et spécifiée. Il faut spécifiquement que le vendeur ait personnellement informé le bailleur de la situation (mode de publicité ciblé).

Rem. La priorité du bailleur s’explique par le fait que celui-ci ait une maitrise indirecte, par le truchement de l’immeuble, sur les meubles garnissant (// idée de gage). 4.2. Conflit : le vendeur vs. le C-gagiste s/ FDC

Conflit assez fréquent. L’assiette du privilège du C-gagiste comprend l’ensemble des biens composant le FDC : cela peut comprendre un bien constituant l’assiette du vendeur.

Le conflit a été réglé par le législateur à l’art. 23 LH : « le C-gagiste est préféré au vendeur, à moins que (art. 23, al. 1, in fine) le C n’ait su en recevant la chose que le prix en était encore dû ».

Rem. Le terme « C-gagiste » est interprété au sens large par la Cass., comme englobant le C-gagiste s/ FDC et le prêteur agricole.

Observation. Les al.s 1 et 2, in fine, de l’art. 23 sont rédigés de différente manière.

� L’alinéa 1, in fine, précise que le créancier doit avoir connu ou aurait du connaitre le non payement du prix pour que le vendeur soit préféré.

� L’alinéa 2, in fine, une information spécifique est par contre ciblée sur le vendeur.

Cette sévérité moindre envers le bailleur s’explique notamment par la considération qu’on est en droit d’attendre plus de diligence d’un C-gagiste s/ FDC (professionnel), que du bailleur souvent « simple particulier ».

Csq : lorsque le vendeur est un vendeur industriel, le dépôt de la facture au greffe du trib. Comm. est suffisant au sens de l’al. 1, mais non au sens de l’al. 2 (le dépôt au greffe n’étant pas une information individualisée). Section 2. Privilèges des frais de conservation

1. Texte légal et champ d’application Le privilège des frais de conservation, réglé par l’art. 20, 4°, parle de frais faits pour la conservation de

la chose. Celui qui par son intervention a contribué à la conservation d’un élément du patrimoine du D (gage commun des C) sera préféré pour le recouvrement des frais consentis dans l’intérêt de tous, sur le bien conservé.

→ Idée de conservation de la valeur d’une chose plus que d’une plus-value apportée au patrimoine.

Ce privilège ne s’applique que lorsque la chose conservée est une chose mobilière, exception faite du cas du privilège industriel dont bénéficie le C dont le D a immobilisé le meuble consistant en un équipement professionnel (//privilège du vendeur).

Condition : 1) Une copie certifiée conforme de la facture doit être déposée au greffe du trib. comm.

dans les 15 jours de la livraison (≠ mesure de publicité, cdt° d’opposabilité aux 1/3).

2) Le privilège sera maintenu durant 5 ans àpd de la livraison.

Rem. Par contre, la chose ne doit pas nécessairement être corporelle.

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2. La créance garantie Les créanciers titulaires d’une créance sont ceux qui ont exposé des frais en vue de la conservation de la chose du débiteur. La difficulté réside dans le fait de savoir en quoi consiste une conservation…

La Cass., dans un arrêt du 9 mars 1972, confère aux frais de conservation une portée relativement large :

= Dépenses sans lesquelles : - la chose aurait péri totalement / partiellement (sens strict). - serait devenue impropre à l’usage auquel elle était destinée.

Dès lors, toute une série d’éléments peut être rangée sous la notion de frais de conservation, ex. frais de réparation, d’entretien d’un véhicule, la fourniture de pièces détachées, la facture d’un vétérinaire ayant soigné le cheval, les honoraires d’avocat ayant procédé à une saisie, la paiement de la TVA par un agent de douane pour son client importateur, car dépense nécessaire, etc.

- les frais d’acquisition de la chose A contrario, ne sont pas des frais de conservation : - les frais de fonctionnement de la chose - frais de transformation, fabrication, amélioration

La limite entre les frais de conservation et de fonctionnement n’est pas toujours évidente. Ex. les frais d’essence sont, en principe, des frais de fonctionnement, mais ils peuvent devenir des frais de conservation lorsque la machine doit tourner pour ne pas se détériorer.

3. Assiette du privilège L’assiette est constituée du bien mobilier conservé, encore faut-il qu’il soit : - déterminé - identifiable 1° La chose doit être déterminée (art. 20, 4°), car ce privilège est spécial, il porte sur un objet déterminé. Un créancier qui aurait sauvegardé l’ensemble du patrimoine du débiteur ne pourrait en bénéficier.

2° La chose doit être identifiable dans le patrimoine du D.

Ex. Un créancier qui livre en vrac de l’huile de graissage, s’il n’arrive pas à établir à quels biens cette huile à servi, ne pourra bénéficier du privilège de conservation (Gand, 22 fév. 1996).

Ex. Des fournisseurs qui diraient qu’ils ont livré à crédit des biens pour maintenir le FDC ne pourraient pas obtenir gain de cause car ne pouvant pas identifier un bien meuble précis.

Ex. Le bien doit se retrouver dans le patrimoine, ainsi si un vété a soigné 20 moutons mais qu’au moment d’invoquer son privilège, il n’y en a plus, il ne pourra être remboursé… Le bien conservé doit être identifiable dans le patrimoine du débiteur. Ex (1). Si un vétérinaire a soigné in extremis 20 chevaux, mais que 19 d’entre eux ont été revendu, l’assiette de son privilège ne sera constituée que du cheval restant. Ex (2). Si un avocat intervient dans le but de recouvrer la créance non payée de son client, une fois que celle-ci est recouvrée, elle disparait du patrimoine du client et, partant, entraine la disparition de l’assiette du privilège de l’avocat.

4. Le rang et le conflit 4.1. Conflit : Conservateur vs. Privilégiés généraux

Le Conservateur prime d’office car son privilège est un privilège spécial (sur meuble) qui prime toujours les privilèges généraux. 4.2. Conflit : Conservateur vs. Privilégiés spéciaux

L’art. 22 « les frais de conservation de la chose priment les privilèges antérieurs ».

a) Le privilège du conservateur l’emporte sur tous les privilèges antérieurs, spéciaux et généraux.

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Les privilèges antérieurs doivent être compris comme étant des créances privilégiées (spéciales ou générales) nées antérieurement aux frais de conservation. Cet article vise à faire primer les frais de conservation.

b) Le privilège du conservateur prime tous les privilèges généraux sur meubles qui lui sont postérieurs, sauf les frais funéraires.

c) Le privilège du conservateur est primé par les privilèges spéciaux sur meubles qui lui sont postérieurs.

d) Le privilège du conservateur est tjs primé par : - le privilège des frais de justice (art. 17). - le privilège de l’assureur (cf. supra).

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Petit casus, un commerçant livre à un autre commerçant des accessoires qui sont légalement requis pour que puisse être utilisé certains outils dans l’entreprise. C’est une entreprise qui loue les locaux dans lesquels elle exerce ces activités. Elle tombe en faillite.

• Le bailleur a pour assiette tout ce qui garnit l’immeuble loué

• La situation du fournisseur est plus compliquée car on peut l’analyser sous deux angles :

� C’est un vendeur, donc on pourrait se dire qu’il peut bénéficier du privilège du vendeur

� C’est un conservateur, il pourrait aussi se prévaloir des frais de conservation, y a-t-il un intérêt pour lui à se fonder sur une base plutôt que sur une autre ?

o Si vendeur : conflit bailleur vs. vendeur (cf. art. 23, al. 2). Le bailleur l’emporte sauf si le vendeur a expressément informé le bailleur que le bien était un bien impayé.

o Si conservateur, : conflit bailleur vs. conservateur (cf. art. 22), la conservation se trouvait déjà dans l’assiette du bailleur, donc c’est le conservateur qui l’emportera car le privilège du bailleur est antérieur.

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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Section 3. Le privilège du sous-traitant

1. Texte et champ d’application Art. 20, 12° ; la créance de l’entrepreneur principal sur le maître de l’ouvrage, relative aux travaux dont il a confié l’exécution à un sous-traitant, est grevée d’un privilège au profit de ce dernier, pour ce qui lui est dû. Ce privilège a une durée de vie limitée, il reste accroché pendant 5 ans.

Sont seuls visés ici les travaux de construction, transformation, réfection ou entretien d’un bâtiment.

On se trouve dans une relation triangulaire. La créance privilégiée est la créance du sous-traitant vis-à-vis de l’entrepreneur, née exclusivement par les travaux en question effectués dans l’immeuble du maître de l’ouvrage. Le Législateur a pris soin de protéger la situation du sous-traitant via divers instruments juridiques. Au-delà du privilège accordé par le 12°, il se trouve l’action directe du sous-traitant envers le maître de l’ouvrage (art. 1798 Cc), lorsqu’il n’est pas payé par l’entrepreneur principal.

Toutefois, selon la Cass. l’action directe perd toute utilité une fois la situation de concours survenue… Le sous-traitant ne dispose donc plus que du privilège de l’art. 20, 12°. Cette perte de l’action directe est due au fait que la faillite de l’entrepreneur rend tous ses biens indisponibles. Dès lors la faillite a pour effet de rendre indisponible la créance de l’entrepreneur dans le chef du maître de l’ouvrage, et bloque ainsi le recours à l’art. 1798.

2. L’assiette du privilège Le privilège concerne les travaux réalisés sur l’immeuble du maitre d’ouvrage. C’est la créance relative à l’accomplissement de ces travaux qui est privilégiées. L’assiette du privilège est la créance qu’a l’entrepreneur vis-à-vis du maitre d’ouvrage. Il est donc bien important de distinguer la créance garantie de la créance assiette.

a) On est dans un contexte immobilier, car le privilège n’existe que pour les travaux d’un bâtiment, mais l’assiette est une créance, et est donc un privilège mobilier.

b) Les deux créances doivent se rapporter aux mêmes travaux.

3. Les conflits 3.1. Conflit : sous-traitant vs. C-gagiste s/ FDC

Ex. Hypothèse où le sous-traitant se trouve en conflit avec une banque ayant octroyé un prêt à l’entrepreneur moyennant la constitution d’un gage s/ FDC. L’assiette de la sûreté de la banque est l’ensemble des éléments composant le fonds de commerce, ainsi que l’ensemble des créances du commerçant si une clause est prévue en ce sens : l’assiette peut donc contenir la créance qu’a l’entrepreneur vis-à-vis du maitre de l’ouvrage.

Aucune règle particulière ne règle le conflit entre une sûreté conventionnelle et une sûreté légale (privilège spécial sur meuble prévu à l’art. 20, 12°).

On utilise donc l’art. 13 LH comme roue de secours : il convient de se référer à la qualité de la créance. Dans un arrêt du 25/03/2005, la Cass. a précisé que, si le législateur avait donné deux armes au sous-traitant (les art. 20, 12° LH et 1798 Cc.), c’était pour lui accorder la préférence. Il convient donc de privilégier la créance du sous-traitant afin de ne pas s’éloigner du but poursuivi par le législateur.

Maître de l’ouvrage Cr. assiette Entrepreneur Sous-traitant

Cr. privilégiée

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3.2. Conflit : sous traitant vs. C-gagiste s/ créance

La fameuse créance-assiette peut très bien avoir été donnée en gage à d’autres C. Ce conflit n’est pas

réglé actuellement ni par la loi, ni par un arrêt de la Cass. → Zone d’incertitude juridique.

- Certains auteurs soutiennent qu’il faut appliquer la jurisprudence de la Cass. en matière de conflit entre sous-traitant et C-gagiste s/ FDC par analogie.

- D’autres auteurs sont plus réservés quant à ce traitement similaire, et considèrent que dans le 1er conflit, le gagiste s/ FDC est une institution bancaire. Donc on peut se dire que quand la Cass. a réglé le 1er conflit, elle a effectué un balance des intérêts. Dans le cas présent, la situation est un peu différente, ce peut être n’importe qui, tous les C peuvent être gagiste s/ créance. Ces auteurs à raison disent qu’il est plus difficile de raisonner de manière abstraite. L’inconvénient de cette solution, c’est que c’est une solution au cas par cas (cf. qualité du C).

Section 4. Résolution d’un petit Casus Une société tombe en faillite et exerçait son activité dans un immeuble pris en location. Dans cet immeuble, il y avait 2 machines servant à l’exploitation du commerce exercé. Ce sont les seuls biens de valeur qui sont vendus par le curateur, lequel récolte 1000€. 6 créanciers se manifestent :

1. Vendeur des machines ; 500€ 2. Trésor public (contributions directes) ; 300€ 3. Société d’entretien des machines ; 100€ 4. Assureur ; 100€ 5. Bailleur ; 200€ 6. Curateur ; 200€

Sûreté Assiette Créance

1. Vendeur Priv. Spéc. (art. 20, 5°) Machines 500€ - 5e

2. Fisc Priv. Gén. s/ meuble et access. Immeubles (art. 19

Tous les meubles 300€ - 6e

3. Société d’entretien Priv. Spéc. (art. 20, 4°) Machines 100€ - 3e

4. Assureur Priv. Spéc. (Loi 25 juin ’92) Machines 100€ - 2nd

5. Bailleur Priv. Spéc. (art. 20, 1°) Machines 200€ - 4e

6. Curateur Priv. Gén. (art. 19, 1° et 21) Tous les meubles 200€ - 1er

(1) Les privilèges spéciaux priment les privilèges généraux. Fisc – servi en dernier.

(2) Le privilège des frais de justice priment sur tous les autres. Curateur = 200€.

(3) Le privilège de l’assureur vient directement après les frais de justice. Assureur = 100€.

(4) Les frais de conservation priment sur les sûretés antérieures, spéciales ou générales. Société d’entretien = 100€.

(5) Le privilège du bailleur prime celui du vendeur dans le cas où le vendeur ne lui a pas fait savoir spécifiquement que les machines n’étaient pas encore payées. Or rien n’indique que le vendeur ait procédé à une telle information. Donc le privilège du bailleur prime celui du vendeur. Bailleur = 200€

(6) Il reste 300€ pour le vendeur qui ne sera donc pas tout à fait désintéressé.

CHAPITRE 3 : LES PRIVILÈGES NON CLASSÉS (PAS VU)

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Titre 6. Les sûretés immobilières

CHAPITRE 1. L’HYPOTHÈQUE Section 1. Définition et caractères

1. Définition

L’hypothèque est un droit réel (portant sur un bien) accessoire (constitué que dans le but de servir de garantie au paiement d’une dette principale) établi par le Législateur venant grever un bien et établissant un lien immédiat entre le bien en question et le titulaire du droit. Concrètement, c’est un droit réel fréquent et emblématique en matière immobilière : ex. si vous n’avez pas les fonds suffisants pour contracter un prêt pour l’acquisition d’un immeuble, vous contracterez un prêt auprès de votre banquier. Si vous n’avez rien dans votre patrimoine qui puisse servir de sûreté, la banque prendra une hypothèque sur l’immeuble en question. La constitution d’une hypothèque demande l’intervention d’un notaire. Quand est elle constitué à des fins privées : loi sur le crédit hypothécaire. Pour le surplus, il faut se référer à la loi hypo, art. 41 et s.

2. Caractéristiques 2.1. L’hypothèque est un droit réel L’hypothèque est un droit réel auquel sont attachées les principales caractéristiques de ces droits. Elle confère ainsi à son bénéficiaire : - un droit de suite : suivre la chose en quelque main qu’elle se trouve,

- un droit de préférence : si l’immeuble vente publique : il serait payé par priorité sur le produit de la vente

2.2. L’hypothèque est un droit réel accessoire

a) Les deux sens de la notion d’accessoriété

Le caractère accessoire de l’hypothèque signifie :

• qu’elle est constituée dans un but de sûreté, dans le but de garantir une dette principale,

• qu’elle ne confère qu’une utilité juridique, et non matérielle, au banquier qui n’ pas l’usage de la chose donnée en hypothèque (le banquier ne peut aliéner le bien grevé d’une hypothèque).

b) Quatre conséquences de ce caractère accessoire de l’hypothèque

1° L’extinction de la créance garantie va entrainer l’extinction de l’hypothèque.

2° L’hypothèque couvre la créance et les intérêts, si la dette garantie est productive d’intérêts.

3° La cession de la créance garantie entraine la cession de l’hypothèque, qui change alors de titulaire.

4° Il n’est pas possible de céder l’hypothèque sans céder la créance garantie. Mais il est possible de céder son rang. Cette nécessaire accessoriété n’est toutefois pas un obstacle à la constitution d’une hypothèque pour une dette future. L’évolution jurisprudentielle qui a admis ce principe a été consacrée dans une loi sur le crédit hypothécaire. C’est au moment où l’hypothèque est concrètement mise en œuvre que la dette doit exister.

c) Cession d’une dette future

Deux parties peuvent décider de constituer une sûreté pour garantir le paiement pour toute somme qui serait due par le D au C. Les banquiers peuvent profiter de l’occasion de l’octroi d’un prêt pour constituer une sûreté plus large, qui viserait le remboursement de toutes les dettes futures.

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Considérant la constitution d’une hypothèque comme couteuse et difficile, le D peut par souci d’économie constituer une sûreté pouvant servir à d’autres fins que le seul remboursement du prêt.

→ La constitution d’une hypothèque conventionnelle pour sûreté de créances futures est autorisée pour autant qu’à la date de constitution les créances soient déterminées ou déterminables. 2.3. L’hypothèque est une sureté mobilière ou immobilière L’hypothèque, bien que l’accessoire d’une créance, est (généralement) un droit immobilier en raison de la nature des biens de son assiette.

L’article 41 donne à penser que l’hypothèque est toujours un droit réel immobilier.

Or, en réalité une législation spécifique réglemente les hypothèques sur les bateaux et navires, l’art. 25 C.comm. Cet article reprend le seul cas où une hypothèque mobilière est envisagée. 2.4. L’hypothèque est un droit indivisible L’hypothèque grève l’immeuble entièrement, dans sa totalité, aussi lgtp que la dette n’aura pas été totalement remboursée (art. 41, al.2). Cela entraine 4 conséquences.

(1) Si l’immeuble est partiellement vendu, l’hypothèque subsiste sur la totalité de l’immeuble.

(2) Si un morceau de l’immeuble vient à disparaitre, l’hypothèque survit sur le morceau restant.

(3) L’hypothèque grève l’ensemble de son assiette jusqu’au paiement intégral de la créance. Si elle porte sur plusieurs immeubles, le remboursement partiel de la garantie ne permettra pas de dire que l’hypothèque ne subsiste que sur certains de ces immeubles. Ce caractère prend tout son sens quand la dette est divisée : ce n’est pas parce que la dette viendrait a être divisée que l’hypothèque le sera aussi.

(4) L’hypothèque subsiste telle qu’elle a été constituée, y compris si la dette a été divisée. C’est une situation fréquente en cas de décès du débiteur : si la dette est divisée entre plusieurs héritiers et que seul l’un d’eux a hérité de l’immeuble hypothéqué, le créancier pourra se retourner contre lui dans l’hypothèse où les autres héritiers n’ont pas remboursé leur dette. Que va-t-il se passer avec le bâtiment qui appartenait au défunt ? Il tombe chez A. A ne doit que 50% mais il détient le bâtiment grevé de la dette. Ce n’est pas parce qu’il détient 50% de la dette du bâtiment que le C de la dette ne pourra pas saisir l’entièreté du bâtiment si B ou C ne paye pas leur part. Section 2. Bien susceptible d’être grevé d’une hypothèque

1. Le constituant doit être propriétaire du bien hypothéqué (art. 73 LH)

Il faut être propriétaire du bien hypothéqué, et avoir la capacité d’aliéner… Est nulle l’hypothèque constituée sur le bien d’autrui.

2. Les biens du domaine public ne peuvent être hypothéqués

Seuls les biens dans le commerce sont susceptibles d’hypothèque. Car l’hypothèque va déboucher sur la mise en vente publique du bien hypothéquer, dès lors il doit être dans le commerce pour que la mise en vente soit possible. Les personnes de droit public peuvent établir une liste de biens auquel sera réservé un sort particulier.

3. L’article 45, al.1 LH

A. Notion et principe

Cet article décrit les biens susceptibles d’hypothèque. « Sont seuls susceptibles d’hypothèque :

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1° les biens immobiliers dans le commerce ; et 2° les droits d’usufruit, d’emphytéose et de superficie. » En réalité, quand l’article 41 vise « l’immeuble », ce sont les droits réels immobiliers qui sont grevés d’hypothèque, et non l’immeuble en question.

Rem. Toute une série d’articles dans la loi confondent le droit et la chose… Ces trois droits réels démembrés : l’usufruit, l’emphytéose et la superficie doivent nécessairement porter sur des immeubles pour faire l’objet d’une hypothèque.

La durée de l’hypothèque est liée à celle du droit réel démembré. Ainsi,

- l’usufruit est un droit viager, - l’emphytéose est un droit dont la durée ne peut excéder 99 ans, - la superficie est un droit d’une durée maximale de 50 ans.

⇒ Une hypothèque peut être constituée à la fois sur un droit réel démembré et sur le droit réel principal qu’est la propriété.

A) Lorsqu’on a un démembrement de propriété, on peut donc constituer une hypothèque sur un morceau et une 2nd hypothèque sur un autre morceau (ex. sur une sur l’usufruit et une sur la nue-propriété).

B) Lorsqu’un bien non-démembré lors de la constitution de l’hypothèque subit un démembrement postérieur, on ne peut pas considérer que les droits du C sont atteints. Le droit de propriété reste grevé dans son entièreté.

C) L’hypothèque prise sur la part indivise de l’immeuble à charge d’un copropriétaire est incontestablement valable (ex. l’hypothèque portant sur un appartement, ne portera pas sur l’ensemble de l’immeuble. ex. en cas d’héritage, l’un des H peut grever d’hypothèque sa part de la maison familiale).

D) Lorsque le droit immobilier sur lequel porte l’hypothèque vient à disparaître du patrimoine du D rétroactivement, l’hypothèque disparaîtra par voie de conséquence. En effet la rétroactivité mène à considérer que le droit en question n’a jamais fait partie du patrimoine du D.

⇒ Hypothèse où le D cède son droit, en quel cas le C peut actionner son droit de suite auprès de l’acquéreur du droit cédé.

Le Législateur a tenté d’établir diff. mécanismes pour mettre à l’abri le C de ce genre de csq fâcheuse :

I. L’obligation pour les parties d’informer le C : le D doit prévenir le C que des procédures judiciaires sont en cours à propos de certains immeubles.

Lorsqu’on achète un immeuble, l’opération va être transcrite en marge du registre. L’art. 3 loi hypo. dit que les demandes tendant à faire prononcer l’annulation ou la révocation d’actes de vente, la demande en justice ne sera reçue qu’après avoir été inscrite en marge de la transcription, de sorte que les 1/3 soient avertis des conflits portants sur le bien en question.

Les tribunaux sont soucieux du respect de cet article, et tant que la mention n’est pas prouvée, le juge ne statuera pas. Une fois que le tribunal aura pris une décision, celle-ci fera également l’objet d’une mention pour avertir les tiers.

II. L’action en résolution de la vente (art. 28) : l’action en résolution de la vente sera inopposable au fameux C-hypo. s’il ne dispose plus du privilège immobilier dont bénéficie le vendeur. Si le vendeur d’un immeuble devait se trouver dans un cas où son privilège serait éteint, l’action en résolution ne pourrait pas lui (C-hypo) porter préjudice.

L’action résolutoire de la vente ne peut pas être exercée au préjudice du C après l’extinction du privilège immobilier dont bénéficie le V.

III. L’action en rescision pour cause de lésion (art. 1681 Cc) : lorsqu’il y a rescision, il y a retour des choses dans leur pristin état. Les tiers qui ne voudraient pas subir cela peuvent payer au

+/-

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vendeur qui a introduit l’action en rescision un supplément de prix plutôt que de voir le bien retourner dans le patrimoine du vendeur.

4. L’article 45 al.2 LH

L’hypothèque acquise s’étend aux accessoires réputés immeubles et aux améliorations apportées à l’immeuble hypothéqué. Cet article montre que lorsqu’on constitue un droit sur un bien immobilisé, l’assiette de l’hypothèque est ce droit qui va se trouver amplifié ou accru à l’occasion de la survenance de plusieurs évènements. 1° La catégorie des accessoires réputés immeubles

Cette règle vaut tant pour les accessoires existant lors de la naissance de l’hypothèque que pour ceux qui s’adjoignent ultérieurement à l’immeuble.

Sont par exemple des accessoires réputés immeubles ; les substances se trouvant dans le sous-sol, les droits attachés à la chose (ex. : servitude), les immeubles par incorporation ou par destination, les fruits avant leur détachement du sol. Les fruits dont il est ici question sont le plus souvent des fruits civils, c.à.d. des loyers. L’art. 1576 CJ précise que les loyers font partie de l’assiette de l’hypothèque à dater de la saisie immobilière. Donc en cas de saisie, naissance d’une situation de concours, les C vont faire valoir leurs différentes sûretés, et l’assiette du C-hypo comptera les loyers. 2° La catégorie des améliorations

Sont visées tant les améliorations matérielles (ex. l’immeuble bâti sur un terrain hypothéqué sera également touché par l’hypothèque, l’agrandissement de la maison) que juridiques (ex. C verra sa situation améliorée en cas de remembrement du droit sur lequel porte l’hypothèque, ex. L’hypothèque grevant un immeuble s’étendra à la servitude ou à l’usufruit ayant pour objet cet immeuble). Rem. Cette règle n’étant pas impérative, elle peut être écartée par les parties.

5. Les droits conditionnels (article 74 LH) Ceux qui n’ont sur l’immeuble qu’un droit suspendu par une condition suspensive ou résolutoire peuvent constituer une hypothèque mais elle sera fragilisée car dépendra de cette fameuse condition. Mais pas d’obstacle à la constitution d’une hypothèque sur des droits immobiliers soit suspendus, soit résoluble.

6. Le principe de la subrogation réelle (article 10 LH) Si un bien hypothéqué vient à disparaître il y aura report du droit du C hypo. sur le bien (argent) qui viendrait remplacer la valeur du bien disparu. Si le bien hypothéqué vient à disparaitre, les droits du créancier seront reportés sur l’indemnité éventuellement due par les tiers. Dans l’hypothèse où le tiers est un assureur, il faut se reporter à la loi sur les assurances terrestres. Section 3. Les espèces d’hypothèque Il existe 3 espèces d’hypothèques (art. 44 loi hypo.) :

- hypothèques conventionnelles

- hypothèques légales

- hypothèques testamentaires (rares)

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1. Hypothèque légale

1.1. Notion et principe Hypothèques résultant de la loi, en raison de la qualité de certains C. Le législateur a estimé qu’il fallait protéger certains C et il a de droit institué une sûreté aux bénéfices de ceux-ci.

Ce qui les caractérise c’est que l’hypothèque précède l’existence de la créance, elles sont latentes.

L’hypothèque existe de par l’effet de la loi, mais n’est efficace que lorsqu’elle fait l’objet d’une mesure de publicité visant à la rendre opposable aux tiers. Cette mesure de publicité va être l’occasion pour celui qui la demande de concrétiser le principe de spécialisation de l’hypothèque.

En réalité une hypothèque est tjs prise : sur un bien, pour un certain montant et pour garantir certaines créances. Or, lorsque le Législateur établi une hypothèque en vertu de la loi, il ne sait déterminer à l’avance la nature de ces éléments. L’inscription sera donc l’occasion de rendre l’hypothèque latente efficace en précisant : - le montant couvert par l’hypothèque,

- l’objet frappé par hypothèque,

- la créance garantie. 1.2. Etude des principales hypothèques légales

a) L’hypothèque légale au profit d’un mineur (art. 49)

Hypothèque au bénéfice du mineur qui va grever les biens du tuteur. Il peut avoir une créance contre son tuteur, c’est donc pour garantir le paiement de cette créance que le Législateur est intervenu.

L’art. 49 précise que c’est le juge de paix qui va fixer la somme pour laquelle il sera pris inscription hypothécaire et également les immeubles sur lesquelles cette inscription devra être prise. C’est le greffier qui prend cette inscription.

b) L’hypothèque légale au profit du receveur des impôts sur les revenus (Art. 425 et s. CIR)

Pas mal d’hypothèque légale sont à l’extérieur des codes : art 425 et s. du CIR.

Les impôts directs et les précomptes sont garantis par une hypothèque légale virtuelle sur tous les biens du contribuable. Pour que l’hypothèque se réalise, le receveur des contributions directes doit la mettre en œuvre, et procéder à cet effet à son inscription (la date fixant le rang de l’hypothécaire).

Cet article déroge notamment à l’art. 19 loi sur les faillites, qui n’est dès lors pas applicable à l’hypothèque légale. Le receveur peut donc prendre inscription quoi que la faillite soit survenue pour se conférer un avantage sur les biens du D.

c) L’hypothèque légale au profit du Trésor pour le recouvrement de la TVA (Code Tva : art 86)

Le trésor public a une hypothèque légale sur les biens du redevables situés en Belgique. Il faut que la dette d’impôt soit exigible.

C’est le ministre des finances ou délégués qui peuvent requérir l’inscription de l’hypothèque. Cette hypothèque prend rang au jour de son inscription. L’art. 88 §3 écarte l’art 19 loi sur les faillites.

d) L’hypothèque légale au profit du receveur des droits de succession (Code dt succ. art 86)

Le receveur doit prendre l’inscription de l’hypothèque, dite occulte, car elle est opposable aux tiers sans inscription pendant un délai de 18 mois à dater du décès (cf. art 86).

Donc quand une inscription est requise par le receveur dans les 18 mois du décès du contribuable, l’hypothèque qui est prise pendant ce délai aura un effet rétroactif quand à son rang au jour du décès

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C’est embêtant pour les héritiers qui vendent la maison 6 mois après le décès et qui voient le Trésor public prendre inscription 10 mois après et faisant jouer l’effet rétroactif de l’inscription. L’acquéreur va dès lors réaliser que l’immeuble qu’il vient d’acheter est en réalité grevé d’une hypothèque.

En pratique l’héritier peut s’adresser auprès de l’administration fiscale pour obtenir une attestation établissant si des droits ont été payés ou si les droits sont dû ou devront être dûs. Ainsi les héritiers sauront à quoi s’en tenir s’ils vendent l’immeuble.

e) L’hypothèque légale de la masse faillie (Loi faillite : article 57 al. 2)

Dans une série d’autres lois particulières, une fois la faillite survenue, le curateur, au nom de la masse des C, va prendre une hypothèque légale sur les immeubles du failli. Les dettes dont il est ici question sont des dettes dont tous les C seraient bénéficiaires.

Une fois que la faillite est survenue, le curateur est tenu de requérir l’inscription des hypothèques sur les immeubles des D du faillit. Aliéna 3 : ils sont tenus de prendre inscription sur les immeubles du faillit au nom de la masse des créanciers.

Le curateur le fait fréquemment car le Trésor public peut prendre inscription sur les immeubles encre après faillite. Le curateur a donc tout intérêt à prendre inscription avant le fisc pour qu’elle soit antérieure et comme ça serait privilégiée la masse des C.

Depuis que les codes fiscaux prévoient cette règle, on constate que les curateurs sont enclins à procéder à cette inscription. (+ cf. feuilles du précis.)

2. Hypothèque conventionnelle Cette hypothèque nait suite à la conclusion d’une convention entre le bénéficiaire de l’hypothèque = le créancier et le constituant de l’hypothèque = le débiteur (ou ca peut être un tiers aussi). 2.1. Conditions de fond L’hypothèque est un contrat, il y a 4 conditions essentielles à la validité de tout contrat (art. 1108 Cc).

a) Le consentement :

Les parties qui doivent consentir sont les parties contractantes. Si c’est un tiers qui est constituant de l’hypothèque, c’est bien le tiers qui doit consentir et non pas le D (ex. cautionnement). On requiert le consentement des parties à l’acte. Il faut évoquer quelques précisions :

- Art. 215 §1 Cc « un époux ne peut sans l’accord de l’autre hypothéquer l’immeuble qui sert au logement principal de la famille ».

- Art. 224 Cc : les actes accomplis en violation de l’art 215 sont annulables à la demande du conjoint.

b) Capacité :

Les parties doivent avoir une capacité de disposer et d’aliéner, car la constitution d’hypothèque pourra aboutir sur une mise en vente du bien il peut disparaître du patrimoine du constituant.

Art. 75 loi hypo., les biens des mineurs ne peuvent être hypothéqués que dans les causes et formes établis par la loi, et l’art 378 CC marque la nécessité de l’autorisation du juge de paix.

c) Objet certain : principe de spécialisation à un triple niveau

L’objet du contrat d’hypothèque est de grever un immeuble d’un droit réel à des fins de sûreté, càd = garantir le remboursement d’une dette dont l’hypothèque sera l’accessoire.

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Pour ne pas mettre en péril le remboursement du D, le principe de spécialisation requiert une triple déclinaison : 1. L’hypothèque vise à garantir des dettes déterminées ou au moins déterminables. 2. Le montant maximum de la créance doit être défini. 3. Identification obligatoire des droits réels immobiliers grevés par l’hypothèque.

Idée : Il faut que le D sache dans quelle mesure il s’engage, il doit savoir à quoi s’en tenir et être conscient de la situation.

d) Cause :

Comme dans tout contrat, la cause doit être licite…

3. Conditions de forme Le L a fait du contrat constitutif d’hypothèque, un contrat solennel L’art. 76 al.1 loi hypo. stipule que l’hypothèque ne peut être consentie que par acte authentique ou par acte sous seing privé reconnu en justice ou devant notaire (exceptionnellement). Le passage par la forme notariée est donc obligatoire.

(A) Conséquence :

• Cette forme authentique est une condition essentielle à la validité de l’acte.

• Le non-respect de cette formalité par les parties implique la nullité absolue de l’hypothèque.

• Cette formalité implique un certain coût, de plus son enregistrement fait de l’hypothèque une opération très coûteuse.

(B) Raisons

Si le L a été soucieux du respect de cette forme, c’est :

• Dans un but de protection du D, ce n’est pas un acte anodin, il faut conscientiser le D et sauvegarder ses droits.

• Pour préserver la sécurité judiciaire du régime hypothécaire, base essentielle du régime de crédit immobilier, l’intervention d’un officier public spécialisé se justifie.

(C) Mandat ; représentation des parties à l’acte

Les procurations qui seraient données par le D à 1/3 à l’effet de constituer une hypothèque (acte authentique) doivent elles aussi être données par la voie notariée (formalités authentiques, art. 76 al.2).

Rem. Procuration ≠ Mandat.

- Mandat : contrat consensuel, sans forme particulière requise pour être valablement constitué. Quand on contracte un contrat de mandat ici, il faudrait rédiger le contrat de mandat, par écrit pour raisons probatoires, et établir à côté une procuration authentique.

- Procuration : document permettant au mandataire de prouver à l’égard des tiers qu’il dispose du pouvoir de conclure l’acte au nom du mandant (pouvoir de représentation). La procuration est un document établi entre le mandant et le notaire (le mandataire n’est donc pas signataire de ce document).

(D) Mentions de l’action authentique

L’hypothèque conventionnelle est spécialisée par les mentions, prescrites à peines de nullité, que doit contenir l’acte constitutif, relatives : - à l’immeuble grevé - au montant à concurrence duquel l’hypothèque est consentie

V L’acte doit indiquer la nature et la situation de chacun des biens immeubles grevés (art. 78, al.1).

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V La somme à concurrence de laquelle est consentie l’hypothèque doit figurer dans l’acte en principal, frais et intérêts (art. 80, al.1). Ce montant est définitif, il fixe les droits du C-hypo. sur l’immeuble à l’encontre des autres C du constituant. Si on ne connaît pas le montant, on fixe un plafond.

X L’indication dans l’acte de la créance garantie n’est pas une condition de sa validité. L’hypothèque est suffisamment spécialisée avec les deux mentions précitées (>< Cass. Fr. qui exige que la cause de la créance soit indiquée dans l’acte, à peine de nullité).

v En raison du caractère accessoire de l’hypothèque, sa validité dépend d’une obligation principale à laquelle elle est attachée. Ainsi, pour des raisons probatoires, il est néanmoins conseillé de mentionner dans l’acte quelles sont les créances garanties. Rien n’empêche que les créances garanties soient désignées globalement (toute somme due). La constitution d’une hypothèque pour garantie d’une dette future est ajd permise par l’art. 51bis loi relative au crédit hypo., à condition qu’un plafond figure dans l’acte.

Il y a une précision à l’article 80 qui instaure le principe de spécialisation du montant de la C garantie. Les parties peuvent convenir de fixer un plafond. Pour la spécialisation de dettes garanties, pas de dispositions spécifiques qui obligeraient les parties à préciser les dettes garanties. Mais portant sur des conditions probatoires, comme l’hypothèque est accessoire, il est conseillé que l’acte constitutif d’hypothèque renferme les obligations précises sur les C garanties. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------ Illustration :

1) Un banquier accorde une ouverture de crédit pour 10 000€. Il obtient une hypothèque plafonnée au montant de 10 000€ sur un bien ayant une valeur + importante. Ouverture de crédit est consentie, le D a une dette de 10000. Ensuite le banquier autorise que le D puisse avoir + et l’ouverture du crédit finalement se solde par un prêt de 15 000€. Donc plafond de 10000 sur un bien de 20000 alors que dette de 15 000. Si jamais vente, la banque n’aurait que 10 000 et si les 5000 restant, la banque serait devenu C chirographaire.

2) Crédit de 10 000 avec hypothèque à 10 000 sur un bien de 15 000. Le commerçant n’utilise que 4000 sur le solde de 10 000 mais par ailleurs, une autre dette nait entre les mêmes parties pour 2000 (qui n’a rien à avoir avec les 10 000 de départ). Donc dette de 6000 au total. Avec les 6000 euros de dette la banque est bien nantie car dette garantie était celle d’origine et pas celle entière (avec les 2000 en plus). Donc ca ne couvre que les 4000 : Pour les 2000 pas de suretés particulières. ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

4. La promesse d’hypothèque 4.1. Caractéristiques de la promesse d’hypothèque

Attention : Promesse d’hypothèque ≠ Hypothèque !!!!

La promesse d’hypothèque est la convention par laquelle le D s’engage envers le C à constituer ultérieurement hypothèque à son profit sur des biens et pour une somme déterminés ou déterminables.

Il y a donc un engagement pris par le D de constituer une hypothèque si le besoin s’en fait sentir.

C’est un contrat unilatéral, car seul le D s’oblige, qui ne requiert aucune condition particulière. 4.2. Pourquoi les parties recourent-elles à cette technique particulière de la promesse plutôt qu’à

l’hypothèque ?

(1) Urgence : Lorsque le D est pressé d’obtenir un prêt sans attendre l’accomplissement des formalités requises pour la constitution de l’hypothèque qui doit en garantir le remboursement.

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(2) Impossibilité temporaire : Il se peut que l’immeuble n’appartienne pas encore au D, or il faut être propriétaire du bien que l’on désire grever d’une hypothèque.

(3) Coût : Le C accepte de ne pas exiger immédiatement constitution de l’hypothèque et se contente d’une simple promesse du D de consentir celle-ci là première demande.

> Le D évite ainsi les formalités et frais de publicité. (> Le C sait qu’à tout moment, il est en droit d’exiger du D l’exécution de sa promesse.)

(4) Discrétion : La constitution d’hypothèque donnant lieux à publicité, le D peut désirer que sa situation reste discrète et donc éviter l’inscription en procédant à une promesse d’hypothèque.

4.3. Exécution de la promesse et sanction en cas d’inexécution

⇒ Mécanismes traditionnels et leurs faiblesses

Exécuter la promesse = Constituer l’hypothèque. A défaut, le C a le choix :

a. Exécution forcée

L’exécution forcée consisterait en le fait d’assigner le D en passation de l’hypothèque (condamnation en nature), assortie d’astreintes.

Mais l’exécution forcée d’une promesse d’hypothèque est en principe impossible car nul ne peut être contraint d’exécuter une obligation de faire, et le jugement éventuel ne saurait être exécuté par contrainte.

De plus, il est impossible pour le C d’obtenir un jugement valant titre d’hypothèque car l’hypothèque est un contrat solennel qui doit dès lors respecter la former authentique.

b. Résolution pour inexécution

Le C peut penser au mécanisme de la responsabilité contractuelle, et recourir à la résolution pour inexécution du contrat. La responsabilité du D est engagée car il n’a pas respecté son engagement.

Cette procédure débouchera sur une condamnation en D&I, ce qui n’intéresse pas me banquier qui voit la dette de son D s’accroître encore …

L’intérêt est que si le comportement fautif est épinglé par le juge, cela pourra déboucher sur une perte du terme liée à la dette principale, la dette deviendra donc immédiatement exigible (art. 1188 Cc).

= Situation source d’insécurité

i. Le D de MF pourrait hypothéquer son bien au profit d’un autre C, au mépris de la promesse initiale.

ii. Le D de MF pourrait aliéner l’immeuble, rendant impossible la constitution d’hypothèque.

iii. Le C n’est pas à l’abri d’une saisie que pratiquerait et transcrirait sur l’immeuble un autre C.

iv. En cas situation de concours (faillite/concordat), la promesse ne saurait plus être exécutée (art. 19 loi sur les faillites), le C bénéficiaire de la promesse restera donc C-chirographaire.

Lorsque l’hypothèque constituée en exécution de la promesse l’a été en période suspecte, le curateur pourra en demander l’annulation (art. 17, 3° loi sur les faillites).

Le Législateur n’admet pas qu’un C-chirographaire améliore sa situation après coup en faisant concéder une sûreté. Or l’hypothèque naît à la passation de l’acte, non à la date de la promesse.

⇒ Mécanisme propre au contrat d’hypothèque

Pour pallier à ces faiblesses que montrent les mécanismes traditionnels d’action des C contre leurs D n’ayant pas exécuté leur promesse, les banquiers ont créé le mandat hypothécaire.

a) Notion

• Le C exigera souvent que le D complète sa promesse par la constitution d’un mandat irrévocable qui confère à 1/3 le soin de passer l’acte à la demande du C.

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• Ce mandat est conféré par le D au banquier lui-même ou à une personne ayant la confiance de celui-ci afin que la constitution de l’hypothèque ait effectivement lieu au moment où le C le jugera opportun.

= C’est une manière de se rassurer contre le comportement éventuellement négligent du D.

• En pratique, les parties utilisent parfois le mandat de manière isolée, on se dispense de la promesse. Le D se contente de conférer à 1/3 ou au banquier le pouvoir de constituer une hypothèque pour le cas où le C viendrait à l’exiger. On y précise le montant et les biens grevés du droit réel.

b) Caractéristiques

- La constitution d’un mandat hypothécaire a un coût nettement inférieur à celui d’une constitution d’hypothèque. Mais si la conversion du mandat hypothécaire en hypothèque a lieu, les coûts sont additionnés.

- Le mandat sera toujours irrévocable, de manière à ce que le D ne puisse s’en départir.

c) Conversion du mandat en hypothèque

La conversion ne se fait parfois qu’après de longues années, voie jamais. Mais il conserve tout son utilité au fil des années.

? Une discussion doctrinale et jurisprudentielle a eu lieu sur la question de savoir si le C devait avertir le D de la conversion imminente du mandat. La Cass., dans un arrêt du 23 mars 2006, a dit : « que le C peut déterminer lui-même quand il souhaite exercer son mandat ». La Cour ne sanctionne pas le comportement du C qui peut convertir le mandat en hypothèque quand bon lui semble. Le D est averti de cette opération par le constat qu’une certaine somme a disparu de son compte et qu’il a été utilisé en vue d’une constitution d’hypothèque. Aucune information expresse n’est requise !

Deux types de contrôles sont exercés a posteriori :

1) Contrôle du respect des conditions contractuelles convenues entre les parties par le juge.

2) L’exercice de ce droit est susceptible d’être l’objet d’un abus de droit, ce qui sera le cas si aucun évènement ne sera venu altérer la confiance existant jusque là entre le C et le D.

Section 4. La publicité de l’hypothèque L’hypothèque doit être portée à la connaissance des tiers, car ce n’est que si les tiers sont informés de l’existence de l’hypothèque qu’elle leur sera opposable. L’inscription n’est pas la seule voie d’information utilisée par le législateur, il existe d’autres techniques.

1. Publicité par l’inscription L’art. 81 loi hypo. précise qu’entre les C, l’hypothèque n’a de rang que du jour de l’inscription prise sur le registre du conservateur (principe d’antériorité).

1.1. Constitution de l’hypothèque

A. Cette inscription n’est jamais qu’une mesure de publicité, mais elle ne garantit pas la qualité de l’hypothèque en elle-même.

B. L’inscription peut être prise à tout moment, aucun délai n’est imposé, mais on réalise que une inscription rapide est à l’avantage du C, il n’a donc aucun intérêt à tarder !

C. Qui va procéder à l’inscription ? Encore une fois, aucune obligation ici, mais le C aura tout intérêt à ce qu’elle ait effectivement lieu, dès lors il procèdera généralement lui-même à l’inscription. Le notaire peut cependant également y procéder (cf. art. 82 loi hypo.).

D. L’inscription doit nécessairement se faire dans l’arrondissement où se trouve l’immeuble hypothéqué.

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E. Le notaire va venir avec une copie de l’acte constitutif de l’hypothèque et avec deux bordereaux (documents synthétiques reprenant les informations essentielles, cf. art. 83, 4°). Ces documents feront l’objet de l’inscription.

F. Ces registres sont tenus par le conservateur et sont publiques. Toute personne désireuse de connaître les hypothèques grevant un bien adressera alors au conservateur une réquisition écrite à laquelle celui-ci réservera suite en délivrant un extrait du registre appelé état des charges (ou s’il n’y a pas d’hypothèque, certificat négatif, cf. art. 127 loi hypo.). On demande ainsi s’il y a des informations concernant tel ou tel immeuble, s’il est grevé de charges ou non.

G. Le coût de la constitution de l’hypothèque tient aussi au fait que l’inscription génère des frais supportés par le D. Quand on additionne les frais de publicité, plus les frais de notaire, on constate que la constitution d’une hypothèque est onéreuse.

1.2. Radiation de l’hypothèque

La radiation de est la suppression l’inscription du registre par le conservateur. Elle s’effectue par annotation en marge de l’inscription.

a. Radiation volontaire

= lorsqu’elle intervient de l’accord du créancier qui donne mainlevée de l’inscription. Elle peut être totale ou partielle.

- Soit totale : l’ensemble de l’inscription est donc supprimée La radiation est

- Soit partielle, le créancier limite la mainlevée :

• soit à une partie de sa créance (le montant de l’inscription est diminué)

• soit à une partie des biens grevés (l’inscription prise pour 2 immeubles n’est maintenue que sur l’un d’eux)

b. Radiation judiciaire

= lorsqu’elle est obtenue en justice par un D, à la suite du refus injustifié du C de consentir mainlevée de l’inscription (ex. après paiement de la dette ou extinction de l’hypothèque pour raisons propres).

2. Publicité par la mention marginale Une fois que l’inscription aura eu lieu, certains évènements vont sûrement survenir, et ceux-ci devront faire l’objet d’une mesure de publicité. Le Législateur considère qu’ils doivent être portés à la connaissance des tiers… Ces évènements sont répertoriés à l’art. 5 loi hypo.

2.1. La cession de créance hypothécaire

Quand il y a cession d’une créance hypothécaire, il faut que cette cession fasse l’objet d’une mention à côté de l’endroit où on avait inscrit l’hypothèque lors de sa constitution. L’hypothèque étant un droit réel immobilier, sa transmission ne sera opposable aux tiers que moyennant une mention en marge de l’inscription initiale.

Rem. La cession doit être faite par acte authentique.

→ Cette mesure vise à informer les tiers (par ex. CA, CB, CC, créanciers de CX) que CX a cédé sa créance hypothécaire à un nouveau CY = mesure d’avertissement destinée à informer tout tiers susceptible d’être concerné, inquiété par cette cession…

≠≠≠≠ Formalité instaurée par 1690 Cc, notification de la cession au D cédé qui prend connaissance que la créance a changé de patrimoine, et que désormais c’est auprès de CY qu’il doit payer.

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2.2. La subrogation légale ou conventionnelle

La subrogation fait qu’1/3 est subrogé dans les droits du C initial. Elle doit alors également faire l’objet d’une mesure d’information par mention marginale, car l’hypothèque change de titulaire. Ceci afin que tout le monde sache que ce n’est plus CX mais qq’un d’autre qui est désormais titulaire de l’hypothèque.

Ex. CX bénéficie d’une hypothèque. Y, qui s’était porté caution pour le D de CX se voit obligé de payer la dette principale du D. Une fois remboursé, CX disparaît, mais Y se trouve alors subrogé dans les droits de CX. Cette subrogation fera l’objet d’une mention dans le registre des inscriptions.

2.3. La mise en gage d’une créance hypothécaire

Hypothèse où le C-hypo. met en gage sa créance hypo. au profit d’un C-gagiste. Cette mise en gage doit faire l’objet d’une mention dans le registre en marge des inscriptions (art. 2274, 2275). Il faut savoir que c’est désormais à ce C-gagiste que le paiement va devoir être effectué.

2.4. La cession du rang hypothécaire

Lorsqu’une hypothèque est constituée, l’inscription est prise et le C prend rang le jour de son inscription. On peut donc avoir un bien grevé d’une hypothèque au profit de deux C différents, chacun ayant un rang propre.

La cession de rang consiste en le fait d’intervertir le rang de ces deux C. Ils sont tous deux titulaires de la même créance, portant sur le même bien, mais leurs classements se trouvent interverti.

Par cette cession de rang, l’un se trouve dans une situation moins confortable, mais il peut se le permettre pcq’il est presque à la fin du remboursement, ou il a d’autres sûretés…

⇒ La cession de rang doit être portée à la connaissance des tiers, faire l’objet d’une information particulière afin d’éviter la survenance d’un certain type de fraude, protéger le cessionnaire.

ex. Deux C en rang 1 et 2 échangent leurs rangs. Après l’échange, le C qui était n°1 cède sa créance à un cessionnaire. Celui-ci consultant le registre croit que son rang est 1er et accepte donc la cession. Ensuite il apprendra à ses dépends que sa position réelle est la 2…car il y avait eu insidieuse cession de rang préalablement !

Rem. La permutation ne concerne que les rangs, non pas les montants garantis qui restent identiques.

Section 5. Les effets de l’hypothèque

1. Avant l’échéance de la créance garantie Le D reste propriétaire de son immeuble et il peut se comporter pratiquement comme tel. Il dispose donc de l’usage, de la jouissance et même de la disposition de son immeuble. Mais le D ne peut faire en sorte de détériorer l’assiette de la garantie de son C, il ne peut donc, par son fait, porter atteinte à la sûreté consentie. 1.1. Que peut encore faire le débiteur ?

a) Aliénation de l’immeuble ?

V Le D peut aliéner son immeuble, le vendre ou le céder à un tiers. En effet la situation du C-hypo. ne se verra pas détériorée du fait de cette aliénation étant donné qu’il bénéficie d’un droit de suite qui lui permet de saisir le bien dans le patrimoine du tiers si nécessaire.

Constitution d’une 2nde hypothèque ?

V Le D peut décider de constituer une 2nde hypothèque sur son immeuble déjà hypothéqué. Il peut continuer à grever son immeuble d’hypothèques car cela ne portera pas préjudice au C-hypo initial qui voit sa créance garantie par son inscription (date antérieure).

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b) Constitution d’un droit réel démembré ?

V Le D peut grever son immeuble d’un droit réel démembré étant donné que la constitution d’un droit réel sur l’immeuble postérieurement à la constitution de l’hypothèque ne sera pas opposable au C.

La Cass. dans un arrêt du 15 juin 2001 dit que la constitution d’un droit démembré dans l’hypothèse d’un droit de superficie ne doit pas porter préjudice aux droits du C-hypo. qui maintiendra ses droits sur l’ensemble de l’immeuble.

c) Perception des fruits ?

V Le D ayant la libre jouissance de son immeuble peut en percevoir les fruits. Cette perception ne saurait porter préjudice au C car ne fait pas perdre de valeur l’immeuble.

d) Perception des produits ?

V Les produis sont générés par la chose de manière non-périodique ou portant atteinte à la chose.

Principe : art. 45, al.3 loi hypo. « le C-hypo. sera tenu de respecter les ventes de coupes ordinaires de taillis et de futaie, fait de BF, d’après l’usage des lieux, sauf à exercer son droit sur le prix non payé ».

⇒ Le Législateur considère que le propriétaire peut continuer à percevoir les produits de son bien.

Limite : il est défendu au D d’entamer la substance du bien par une exploitation intensive… 1. L’exploitation doit être normale d’après l’usage des lieux ; sinon 1188 Cc (perte du bén. du terme) 2. L’exploitation doit avoir débuté avant la constitution de l’hypothèque

« Sauf à exercer son droit sur le prix non payé », signifie que le C peut exercer son droit sur le produit de la vente, mais qu’il doit en imputer le montant sur la créance dont il dispose. Dès l’instant où l’action hypo. est intentée, s’applique la subrogation réelle, et la vente antérieure à la saisie est valable. Mais le prix encore dû se substitue au produit vendu et échappe au D pour être frappé par la saisie ; c’est entre les mains du C que les sommes seront versées.

e) Aliénation des immeubles par destination économique ?

V Les immeubles par destination économique relèvent de l’assiette de l’hypothèque. Pour pouvoir aliéner ces biens, il faut demeurer dans le cadre de l’exploitation normale de l’activité.

L’assiette peut fluctuer en fonction de l’activité économique du D, il n’y a donc aucun problème à ce que le D se défasse de certains biens, du moment qu’il demeure dans les limites d’une gestion rationnelle.

En revanche il est interdit au D de porter atteinte au droit du C par des ventes sans justification économique car cela porterait atteinte à sa sûreté. En effet le C ne saurait exercer son droit de suite sur les biens vendus car du fait de leur aliénation, leur immobilisation cesse et les soustrait dès lors à l’assiette de l’hypothèque. Le C n’aura d’autre choix que d’invoquer 1188 Cc…

f) Conclusion de baux ?

V L’art. 45 dern. al. « les baux contractés de BF après constitution de l’hypothèque seront respectés ». Un immeuble grevé d’un bail est moins facile à vendre que s’il est dépourvu de tout contrat…

Les baux conclus de MF, de manière à embêter le C, ne lui seront pas opposables. De même s’ils sont conclus à des conditions anormalement désavantageuses et qu’ils déprécient le bien.

Les baux établis, de BF ou MF, pour une durée excédant 9 ans seront réductibles à cette durée.

Le D conserve son droit d’administration de l’immeuble hypothéqué, mais il ne peut l’exercer que dans une mesure compatible avec son affectation.

Rem. La question ne se pose pas avant l’hypothèque, car il est normal que le D jouisse de son bien comme il l’entend…

1.2. La perte ou la dégradation de l’immeuble

Quid lorsque l’immeuble hypothéqué vient à périr ? (cf. art. 79 loi hypo.)

⇒ Si l’immeuble disparaît à la suite d’une faute du D : l’art. 79 prévoit une réduction des sûretés et la perte du terme (// art. 1188 Cc).

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Le C peut donc réclamer sur le champ le remboursement de la dette alors qu’il resterait peut être encore un certain temps avant l’échéance.

⇒ Si l’immeuble disparaît à la suite d’un cas fortuit : le D pourra proposer de constituer un supplément d’hypothèque s’il dispose d’autres immeubles et cela pour le cas où le C manifesterait le souhait d’obtenir le remboursement immédiat de la créance faisant l’objet de l’hypothèque (équité).

2. Après l’échéance de la créance garantie ; exercice de l’action hypothécaire A l’échéance de la créance garantie, le C peut : 1) attendre et laisser du temps au D pour le rembourser.

2) exercer l’action hypothécaire. 2.1. Comment, concrètement, les choses vont-elles se passer dans cette 2nde hypothèse ?

i. Le C va faire saisir l’immeuble grevé de l’hypothèque.

ii. L’immeuble saisi va être mis en vente.

iii. Le produit de la réalisation sera versé au C s’il est en rang n°1.

iv. Application des règles de concours entre les différents C.

Le C peut faire saisir l’immeuble que s’il bénéficie d’un titre revêtu de la formule exécutoire. Seuls les jugements et acte notariés peuvent être revêtus de la formule exécutoire.

Nb. La procédure d’exécution aura lieu que le bien se trouve ds le patrimoine du D ou ds celui d’1/3. 2.2. Pourquoi est-ce que le bien peut se trouver dans le patrimoine d’un tiers ?

• Soit pcq le D a vendu ou cédé le bien immeuble à un tiers : droit de suite.

• Soit pcq ce n’est pas le D qui a constitué l’hypothèque, mais dans une hypothèse de cautionnement réel : ce tiers a conféré une garantie au C pour la dette du D principal dont il est caution.

Ce « tiers détenteurs » (en réalité propriétaire du bien) voit alors le bien dans son patrimoine être saisi pour exécuter une garantie donnée en remboursement de la dette principale d’autrui. 2.3. Que peut faire le tiers détenteur qui voit son immeuble saisit ?

Le C impayé va pouvoir saisir l’immeuble dans les mains du tiers détenteur. Ce dernier a plusieurs attitudes possibles à adopter pour essayer de rencontrer ses intérêts avec ceux du C.

• Soit il tient vmt à son immeuble, alors il paie la dette garantie par l’hypothèque qui justifie la saisie (pour ensuite éventuellement se retourner contre le véritable D de la garantie).

• Soit il peut décider d’abandonner l’immeuble. Il sera alors procédé à l’exécution de l’immeuble vacant par le curateur.

Dans un cas ou dans l’autre, la situation du 1/3 est inconfortable, il vaut donc mieux ne pas acheter un immeuble grevé d’une hypothèque. 2.4. Quand une maison grevée d’une hypothèque est mise en vente, que peut faire l’acheteur ?

Si un acheteur veut acheter une maison grevée d’une hypothèque, il est conseillé, non de donner l’argent au propriétaire de la maison, mais au C-hypo. qui acceptera le dégrèvement de l’immeuble. En pratique, lorsqu’une maison ainsi grevée est mise en vente et que le prix de la maison est supérieur au montant dû, il y a un arrangement entre les parties :

• Si le C accepte que le prix soit remboursé anticipativement à l’amiable, les parties pourront trouver une issue à ce cas de figure.

• S’il n’y a pas d’accord amiable : - soit l’acquéreur n’achète pas, - soit l’acquéreur achète quand même et envisage de recourir à la purge hypothécaire.

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2.5. Mécanisme de la purge hypothécaire

Ce mécanisme est une procédure assez complexe et lourde mise ne place par le Législateur, car il tente de satisfaire toutes les parties…

La purge est un mode d’extinction de l’hypothèque qui vient grever un immeuble, pouvant être utilisé par l’acquéreur. Elle a lieu une fois que la translation de l’immeuble a eu lieu, mais avant que le prix ne soit payé (= risque pour l’acheteur : tant que l’extinction de l’hypothèque n’a pas eu lieu, il est propriétaire d’une maison grevée d’hypothèque).

� Dans le chef de l’acheteur : l’acquéreur venant d’acheter un immeuble grevé d’hypothèque s’adresse au C-hypo. et lui signale qu’il vient d’acheter la maison à tel prix et qu’il est prêt à lui payer le prix d’achat de la maison s’il accepte de dégrever complètement l’immeuble.

� Dans le chef du C-hypo. :

� Soit il se satisfait de l’obtention du prix (qui ne couvrira peut-être pas toute la créance, mais qui peut être meilleur que si l’immeuble avait été vendu publiquement). L’argent est versé et l’immeuble dégrevé.

� Soit il trouve le prix trop bas, il devra proposer la vente publique de l’immeuble et devra faire la 1ère enchère devant être équivalente à 105% minimum du prix proposé par l’acheteur.

En pratique, c’est souvent l’accord amiable qui prime, et si un tel accord n’est pas possible l’acquéreur sera moins chaud d’acquérir l’immeuble…

+ (cf. feuilles du précis) Section 6. Extinction de l’hypothèque § 1. L’extinction par voie de conséquence § 2. L’extinction pour cause propre 1° La renonciation 2° La purge de l’hypothèque 3° La résiliation unilatérale 4° L’annulation de la convention constitutive de l’hypothèque 5° La perte du droit hypothécaire 6° La prescription

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Chapitre 2. Les privilèges spéciaux sur immeubles