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RECHERCHE AGRONOMIQUE SUISSE Mars 2011 | Numéro 3 Agroscope | OFAG | HESA | AGRIDEA | ETH Zürich Environnement Le point sur les plantes envahissantes Page 108 Production végétale Agroforesterie en Suisse Page 128 Production animale Diversité génétique de la race d'Hérens Page 134

Edition 3 mars 2011

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Edition 3 mars 2011

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Page 1: Edition 3 mars 2011

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Environnement Le point sur les plantes envahissantes Page 108

Production végétale Agroforesterie en Suisse Page 128

Production animale Diversité génétique de la race d'Hérens Page 134

Page 2: Edition 3 mars 2011

Berner FachhochschuleHaute école spécialisée bernoiseSchweizerische Hochschulefür Landwirtschaft SHLHaute école suisse d’agronomie HESA

ImpressumRecherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz est une publication des stations de recherche agronomique Agroscope et de leurs partenaires. Cette publication paraît en allemand et en français. Elle s’adresse aux scientifiques, spécialistes de la recherche et de l’industrie, enseignants, organisations de conseil et de vulgarisation, offices cantonaux et fédéraux, praticiens, politiciens et autres personnes intéressées.

EditeurAgroscope

Partenairesb Agroscope (stations de recherche Agroscope Changins-Wädenswil

ACW; Agroscope Liebefeld-Posieux ALP et Haras national suisse HNS; Agroscope Reckenholz-Tänikon ART)

b Office fédéral de l’agriculture OFAG, Berneb Haute école suisse d’agronomie HESA, Zollikofenb Centrales de vulgarisation AGRIDEA, Lausanne et Lindau b Ecole polytechnique fédérale de Zurich ETH Zürich,

Department of agricultural and foodscience

Rédaction Andrea Leuenberger-Minger, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, Case postale 64, 1725 Posieux, Tél. +41 26 407 72 21, Fax +41 26 407 73 00, e-mail: [email protected]

Judith Auer, Recherche Agronomique Suisse / Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, Case postale 1012, 1260 Nyon 1, e-mail: [email protected]

Team de rédaction Président: Jean-Philippe Mayor (Directeur général ACW), Sibylle Willi (ACW), Gerhard Mangold (ALP et HNS), Etel Keller-Doroszlai (ART), Karin Bovigny-Ackermann (OFAG), Beat Huber-Eicher (HESA), Philippe Droz (AGRIDEA), Jörg Beck (ETH Zürich)

AbonnementsTarifsRevue: CHF 61.–*, TVA et frais de port compris(étranger + CHF 20.– frais de port), en ligne: CHF 61.–** Tarifs réduits voir: www.rechercheagronomiquesuisse.ch ou

[email protected]

AdresseNicole Boschung, Recherche Agronomique Suisse/Agrarforschung Schweiz, Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, Case postale 64, 1725 Posieux, tél. +41 26 407 72 21, Fax +41 26 407 73 00, e-mail: [email protected]

Internet www.rechercheagronomiquesuisse.chwww.agrarforschungschweiz.ch

ISSN infosISSN 1663 – 7917 (imprimé)ISSN 1663 – 7925 (en ligne)Titre: Recherche Agronomique SuisseTitre abrégé: Rech. Agron. Suisse

© Copyright Agroscope. Tous droits de reproduction et de traduction réservés. Toute reproduction ou traduction, partielle ou intégrale, doit faire l’objet d’un accord avec la rédaction.

Indexé: Web of Sience, CAB Abstracts, AGRIS

SommaireMars 2011 | Numéro 3

107 Editorial

Environnement

108 Le point sur les plantes envahissantesChristian Bohren

Environnement

114 Concentration et émission d’odeurs des étables de vaches laitières avec aire d’exercice extérieureMargret Keck, Alfons Schmidlin, Kerstin Zeyer,

Lukas Emmenegger et Sabine Schrade

Production végétale

120 Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labourAlexandra Maltas, Raphaël Charles et

Sokrat Sinaj

Production végétale

128 Agroforesterie en SuisseAlexandra Kaeser, Firesenai Sereke, Dunja Dux

et Felix Herzog

Production animale

134 Diversité génétique de la race d'HérensChristine Flury et Stefan Rieder

140 Portrait

141 Actualités

143 Manifestations

Listes variétales

Encart Liste recommandée des variétés de maïs pour la récolte 2011 A. Baux, J.-F. Collaud, L. Deladoey,

J. Hiltbrunner, U. Buchmann et M. Bertossa

Les néophytes envahissantes – en provenance d’autres continents – peuvent s’adapter à un nouveau milieu et bouleverser sensiblement l’équilibre de la biodiversité. La renouée du Japon se propage le long des cours d’eau et peut provoquer l’érosion des berges. (Photo : Carole Parodi, ACW)

Page 3: Edition 3 mars 2011

Editorial

107Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 107, 2011

Valérie Miéville-Ott, Agridea

Chère lectrice, cher lecteur,

Depuis une bonne quinzaine d’années, le contexte dans lequel évolue

l’agriculture suisse est marqué par des changements économiques, politiques

et sociaux importants: concurrence accrue sur les marchés agricoles, baisse

des prix, diminution des exploitations, augmentation de la charge de tra-

vail, nécessité de diversifier les revenus, demandes sociales en matière de

bien-être des animaux et de préservation de l’environnement, etc. Dans ce

contexte extrêmement changeant et incertain, qui comporte des prises de

risque élevées, le maintien d’un tissu agricole dynamique dépend de facteurs

de plus en plus complexes.

De plus, l’exploitation agricole elle-même est un système complexe, où

s’entremêlent relations de travail et relations familiales, outil de production

et patrimoine, échanges basés sur la réciprocité et échanges marchands, maî-

trise technique et aléas des rythmes saisonniers et reproductifs, etc. Ainsi les

objectifs, déclarés ou implicites, de chaque membre de la famille paysanne

relèvent d’une multitude de critères et de valeurs, dépassant largement les

lois de l’Homo oeconomicus. Les performances technico-économiques ne

peuvent à elles seules présumer des perspectives de développement d’une

exploitation. La capacité d’adaptation et de rebond de l’exploitation agri-

cole dépend fortement de facteurs humains. La bonne gestion des relations

familiales et la faculté de créer des réseaux sociaux sources de nouvelles

connaissances et d’entraide sont au cœur de l’avenir de l’agriculture. Le

capital social et humain est aussi important, si ce n’est plus, que le capital

technico-économique. Aucun modèle économétrique, aussi sophistiqué soit-

il, ne permettra jamais de rendre compte de cette complexité des facteurs

entrant en ligne de compte dans la «performance» globale de l’exploitation,

comme ses capacités d’adaptation et d’innovation, voire même de résilience.L’accompagnement des familles paysannes face à ces nombreux défis

demande de nouvelles compétences et de nouvelles approches. Il s’agit de

voir l’agriculteur et l’agricultrice comme des partenaires à part entière, utili-

sateurs des dernières connaissances certes, mais aussi producteurs eux-mêmes

de connaissances originales et adaptées à la pratique. La recherche de solu-

tions innovantes doit donc se faire dans un esprit de dialogue et de partena-

riat entre la recherche, la formation, la vulgarisation et les familles paysannes.

Mais l’avenir de l’agriculture suisse se joue aussi sur un terrain clairement

politique. Face à une pression économique toujours plus forte, les capacités

endogènes d’adaptation des exploitations arrivent à leur limite. De nouveaux

défis sociaux émergent dans les campagnes: transmission familiale incertaine,

surcharge physique et mentale, stress, augmentation des divorces, accidents,

etc. Cette constatation nous amène à nous poser la question de la pertinence

des modèles de développement économique actuels pour l’agriculture.

La durabilité de l’agriculture suisse ne doit pas se jouer sur les seuls axes

économiques et environnementaux. Elle doit clairement intégrer la dimen-

sion sociale afin de défendre non seulement une agriculture viable écono-

miquement, mais aussi vivante, reconnue et vivable, c'est-à-dire supportable

tant sur le plan physique que psychique. En un mot, une agriculture porteuse

de sens et de plaisir pour les familles paysannes.

Pour une approche humaniste de l’exploitation agricole

Page 4: Edition 3 mars 2011

108

Migration des plantes

Les plantes ont de tout temps parcouru des distances

plus ou moins longues, de manière naturelle, malgré

leur enracinement dans le sol. Avec la globalisation à

outrance, l’être humain perturbe cette migration natu-

relle: les plantes sont ainsi déplacées en plus grand

nombre et toujours plus rapidement autour du globe.

Des semences et parties de plantes sont déplacées invo-

lontairement dans les matières brutes et d’autres mar-

chandises; des graines de séneçon du Cap sont ainsi arri-

vées dans notre pays dans des ballots de coton. D’autres

plantes ont été introduites comme plantes d’ornement,

recherchées pour la beauté de leurs feuilles ou de leurs

fleurs. Par exemple, la verge d’or (Solidago spp.) est tou-

jours appréciée dans les bouquets, bien qu’elle figure

dans la liste noire de la Commission suisse pour la conser-

vation des plantes sauvages.

Les néophytesOn entend par néophytes des plantes émergentes origi-

naires d’autres continents. L’ère des néophytes a com-

mencé avec l’arrivée de Christophe Colomb en Amérique.

Des espèces originaires de pays lointains trouvent souvent

chez nous un climat qui leur convient. Si elles ne sont

menacées ni par des prédateurs, ni par des maladies, elles

peuvent se multiplier de façon illimitée. Les zones d’Eu-

rope centrale connaissent à cet égard la «règle décimale»

suivante: sur 1000 espèces végétales introduites inten-

tionnellement ou accidentellement, 100 commenceront à

se développer en pleine nature, 10 survivront à l’hiver et

s’établiront, et une seule parviendra à se multiplier massi-

vement. En raison de ce potentiel de multiplication, une

espèce néophyte peut concurrencer la flore indigène, et à

long terme aussi la faune native, jusqu’à les faire dispa-

raître. En raison de leur comportement envahissant, les

néophytes sont une menace pour la biodiversité. Les

plantes introduites ne sont cependant pas toujours immé-

diatement invasives. Elles peuvent rester longtemps dis-

crètes, jusqu’à ce qu’ elles trouvent des conditions plus

favorables et commencent à proliférer. Cet article a pour

but de montrer qu’il n’existe pas de règles générales pour

lutter contre les plantes émergentes envahissantes.

De l’apparition à l’invasion

Une invasion débute toujours localement, là où l’espèce

a été amenée et où elle peut se multiplier. Le temps

écoulé depuis l’apparition de l’espèce sur le site en ques-

tion ne joue pas de rôle pour la lutte, ni le fait d’être

néophyte ou indigène. L’invasion débute par un épisode

de multiplication disproportionnée. Le type de multipli-

cation influencera les méthodes de lutte: pour contenir

l’ambroisie (Ambrosia artemisiifolia), on peut simple-

ment arracher les plants avant la floraison. Générale-

ment, toutefois, il ne suffit pas de détruire les parties

aériennes de la plante, car un grand nombre d’espèces

envahissantes disposent d’organes de reproduction sou-

terrains. Il est indispensable de rechercher la source de la

contamination, pour la neutraliser et ainsi lutter effica-

cement contre l’invasion. Toutes les invasions ont en

commun le fait de mettre leur environnement dans une

sorte d’état d’urgence.

Christian Bohren, Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, 1260 Nyon 1

Renseignements: Christian Bohren, e-mail: [email protected], tél. + 41 22 363 44 25

Le point sur les plantes envahissantes

E n v i r o n n e m e n t

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 108–113, 2011

Figure 1 | Espèce en progression, le souchet comestible (Cyperus escu-lentus) se propage via les machines agricoles : le niveau d’alerte est au rouge. (Photo: ACW)

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Le point sur les plantes envahissantes | Environnement

109

Rés

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é

Les déplacements de plantes à travers le

monde sont essentiels pour notre existence.

Avec la mondialisation de ses activités, l’être

humain perturbe ces migrations. Des plantes

et d’autres êtres vivants en provenance

d’autres continents peuvent s’adapter à un

nouveau milieu et, n’y trouvant pas d’enne-

mis, perturber sensiblement l’équilibre de la

biodiversité. On parle alors d’espèces

néophytes envahissantes. L’exploitation

intensive des sols par l’être humain accélère

souvent ce phénomène. L’être humain est

confronté aux mauvaises herbes depuis qu’il

cultive la terre. Le paysan doit continuelle-

ment modifier ses méthodes de lutte. Il

faudrait que la société accepte de son côté

l’introduction de méthodes appropriées

pour contrôler les plantes envahissantes. De

petites équipes de spécialistes devraient

pouvoir imposer des mesures de lutte

adaptées aux espèces végétales concernées,

après l’adaptation des conventions exis-

tantes. Les solutions probantes trouvées au

problème de l’ambroisie sont encoura-

geantes pour aborder avec détermination

les problèmes actuels (renouée du Japon) et

futurs (souchet comestible).

L’utilisation des sols pour la construction est catastro-

phique pour la flore locale, car elle la prive de ses res-

sources naturelles. Pendant un chantier, d’énormes

quantités de terre sont déplacées, entraînant la destruc-

tion de surfaces nettement plus grandes que celle cou-

verte par l’édifice lui-même. Toute surface perturbée

par des activités de construction offre aux plantes

migrantes l’occasion de la coloniser. En premier lieu, les

plantes envahissantes trouvent souvent dans les sols

perturbés des conditions favorables à leur développe-

ment; le déplacement de terre accélère encore leur pro-

lifération massive.

Alors que les besoins en sols utilisables s’accroissent,

l’être humain éprouve toujours plus le besoin de préser-

ver les ressources naturelles, avec la nécessité de créer

de plus en plus de réserves naturelles. Mais les réserves

elles-mêmes sont exposées à l’invasion d’espèces végé-

tales. Un ruisseau qui traverse une zone protégée peut

offrir un excellent milieu de vie à la renouée du Japon si

celle-ci ne peut pas être éradiquée efficacement en

amont, dans une zone non protégée. Les rhizomes dés-

tabilisent les berges, sont emportés par le courant et

peuvent s’implanter plus bas dans la réserve. À ce stade,

il n’y a plus moyen de combattre la plante avec efficacité

selon le droit en vigueur, vu l’interdiction générale des

herbicides. Et l’invasion ne pourra jamais être enrayée.

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 108–113, 2011

Figure 2 | Le solidage du Canada (Solidago canadensis) ne présente pas que des inconvénients: il offre une protection à la perdrix grise. (Photo: ACW)

Page 6: Edition 3 mars 2011

Environnement | Le point sur les plantes envahissantes

110

Plantes à problèmes

Il existe partout des plantes mal-aimées qui se propa-

gent avec une rapidité excessive. L’agriculture est

confrontée à des «mauvaises herbes» difficilement

contrôlables comme les chardons, le rumex et le liseron.

Des espèces d’adventices courantes telles que le chien-

dent (Agropyron repens) ou l’agrostide jouet-du-vent

(Apera spica venti) restent discrètes dans des assole-

ments diversifiés, mais peuvent poser de réels problèmes

dans des systèmes d’assolement simplifiés, comme en cas

de spécialisation en production céréalière (Menne et al.

2008). Les problèmes posés par le chiendent et l’agros-

tide ne peuvent souvent pas être résolus, car le contexte

économique favorise les formes de production unilaté-

rales monoculturales (assolements déséquilibrés). L’agri-

culture est sans cesse confrontée à de nouveaux types de

mauvaises herbes, qu’il s’agisse d’espèces indigènes réa-

gissant à des méthodes culturales modifiées, ou de néo-

phytes. Les deux – plantes indigènes et néophytes –

demandent la même vigilance par rapport aux mesures

de lutte et aux mécanismes de multiplication.

Autre exemple: les renouées exotiques (Reynoutria

spp.), notamment la renouée du Japon, introduite il y a

150 – 200 ans comme plante d’ornement, qui a pu se pro-

pager sans entraves dans de nombreux pays d’Europe au

cours des dernières décennies. Depuis, elle a atteint les

sols exploités par l’être humain, devenant un facteur de

coûts. Selon des articles parus dans les journaux, les frais

d’éradication de la renouée du Japon sur les chantiers

des Jeux Olympiques de Londres, en 2012, s’élèveraient

à environ 100 000 £. Les autorités britanniques prépo-

sées à l’environnement (Environment Agency 2010) par-

lent d’une surface infestée de 4 ha sur le futur village

olympique. Le site Internet www.jksl.com fait état d’une

«propagation spectaculaire en Angleterre» de l’espèce.

La lutte aérienne ne suffit pas: il est impossible de

débarrasser le sol des rhizomes avec des moyens raison-

nables, si bien qu’il faut intervenir par la suite avec

diverses mesures. La renouée du Japon pose souvent des

problèmes au bord des espaces aquatiques, car elle peut

déstabiliser les berges déjà réduites à des bandes

étroites. Il est presque impossible de venir à bout de

cette espèce uniquement par voie mécanique, et les

mesures de lutte impliquent d’importants frais de main-

d’oeuvre; les meilleures chances de réussite consistent

en une combinaison de mesures mécaniques et

chimiques.

Introduite il y a à peu près 150 ans, l’ambroisie n’est

en progression chez nous que depuis quelques années

(Delabays et al. 2007). L’arrachage des plants avant la

floraison est dans plupart des cas suffisant, car l’ambroi-

sie ne se multiplie que par les graines.

Un projet pour la conservation de la perdrix grise (Per-

drix perdrix) dans les zones de cultures intensives est en

cours dans le canton de Genève. En 1996, lors d’analyses

de la végétation, Mayor et Lambelet-Haueter avaient

signalé la vergerette du Canada (Conyza canadensis)

comme plante indésirable. De nos jours, les surfaces de

compensation écologique agricoles, en particulier les

jachères florales, constituent d’excellents refuges pour la

perdrix grise, grâce aussi au solidage ou verge d’or, une

plante de taille imposante. Autrefois absente de ces

milieux, cette plante exotique y est devenue fréquente.

Une fois que la perdrix s’est établie, toute intervention

devrait être évitée le plus longtemps possible. C’est

pourquoi pratiquement toute jachère florale est enva-

hie à long terme par le solidage. Selon les directives en

vigueur concernant son rôle de compensation écolo-

gique, la jachère florale perd dès lors sa valeur et devrait

être exclue du système des paiements directs. D’un autre

côté, elle est un précieux élément du projet de conserva-

tion de la perdrix grise. En raison de la présence de cet

oiseau, elle ne devra pas être obligatoirement abandon-

née, quand bien même elle est infestée de solidages.

C’est ainsi que le solidage, plante néophyte dangereuse

car envahissante, est utile à la perdrix grise. Heureuse-

ment, cette plante est très sensible au travail du sol lors

de la remise en culture d’une jachère et ne constitue

donc pas un problème malherbologique dans les par-

celles cultivées.

Le dernier exemple est celui du souchet comestible

(Cyperus esculentus). Cette espèce néophyte envahis-

sante colonise le sol via des tubercules de la grosseur

d’un pois, qui constituent les organes de survie de la

plante. Le souchet comestible est en progression dans

les cultures maraîchères intensives, où il affecte les

récoltes et colonise d’autres parcelles via les machines

agricoles (Total 2008). Il est dès lors facile à imaginer que

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 108–113, 2011

Figure 3 | La renouée du Japon (Reynoutria spp.) est largement répandue et ne peut être combattue qu’à grands frais. Les pro-blèmes liés à cette plante ne vont pas diminuant avec le temps. (Photo: ACW)

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Le point sur les plantes envahissantes | Environnement

111

cides a fait croire qu’un grand pas avait été franchi vers

des cultures exemptes de mauvaises herbes, jusqu’à ce

que l’apparition d’espèces résistantes aux herbicides et

la pollution des eaux ne mettent fin à cette illusion. La

valeur écologique des mauvaises herbes a commencé à

être reconnue. Les méthodes de lutte ont été affinées:

augmentation du sarclage des champs cultivés, réduc-

tion du travail de la terre, utilisation d’engrais verts. La

lutte contre les adventices s’inspire aujourd’hui du prin-

cipe des seuils de tolérance (dommage économique): les

coûts de la lutte ne doivent pas dépasser ceux liés à la

perte de rendement en cas d’absence de lutte. Actuelle-

ment, l’agriculture s’en sort généralement bien en appli-

quant les principes précités de lutte contre les mauvaises

herbes. Il est indéniable que les herbicides sont des

méthodes efficaces permettant d’économiser de nom-

breuses heures de travail manuel. On peut s’interroger

sur le sens des seuils de tolérance dans le cas de la lutte

contre les néophytes envahissantes. En effet, il est inutile

de vouloir leur déclarer la guerre totale – donc l’éradica-

tion - mais on pourrait les endiguer raisonnablement.

L’ambroisie n’est pas nuisible tant que les valeurs seuils

des pollens aériens allergènes ne sont pas dépassées. La

renouée du Japon est bien moins nuisible lorsqu’elle

n’est pas présente le long des voies de circulation et des

cours d’eau.

Nous sommes aujourd’hui à la recherche de mé -

thodes de lutte les plus efficaces possibles. Nous ne vou-

lons pas de peuplements soignés de plantes envahis-

santes dans les lieux où elles créent des problèmes. Les

méthodes doivent être compatibles avec la législation

sur l’environnement. Il y a lieu de se demander, dans ce

contexte, si les lois actuelles sur la protection de l’envi-

ronnement tiennent suffisamment compte de certaines

situations exceptionnelles comme la propagation d’es-

pèces le long des cours d’eau et des rives lacustres.

Perspectives d’avenir et situation actuelle

Il s’agit d’éviter à l’avenir des situations telles que celle

induite par la renouée du Japon. Le danger d’une inva-

sion débutante doit être reconnue à temps, pour pou-

voir combattre avec tous les moyens à disposition l’es-

pèce végétale concernée. C’est la seule façon de prévenir

l’engagement de sommes exorbitantes pour lutter

contre une unique espèce envahissante. La «liste noire»

compte actuellement une vingtaine d’espèces et elle va

encore s’allonger. Concrètement, l’arrivée des plantes

envahissantes met en péril la biodiversité, entraîne des

coûts de lutte élevés et des risques pour la santé de la

population, etc. Ces dommages montrent tout simple-

ment que nous ne sommes pas encore capables de réagir

de manière appropriée aux plantes envahissantes.

cette plante va causer à l’avenir de sérieux problèmes.

La lutte aérienne n’arrive pas à contenir l’invasion. Les

herbicides qui présenteraient une bonne efficacité

contre le souchet comestible ne peuvent pas empêcher

sa multiplication lorsque, en raison de l’intolérance des

cultures, ils doivent être appliqués à un moment où ils

n’ont pas d’impact sur la formation des tubercules.

Tous ces exemples illustrent des problèmes très variés,

difficiles à résoudre, et qui vont rapidement s’aggraver

s’ils ne sont pas combattus assez tôt. Pour un grand

nombre de plantes figurant dans la liste noire (CPS),

nous ne savons pas si et quand elles vont se montrer

envahissantes.

Eradiquer les néophytes envahissantes ou indésirables

La gestion appropriée des mauvaises herbes et de la

flore adventice des parcelles cultivées a toujours été un

aspect important des pratiques agricoles et culturales. La

lutte contre les mauvaises herbes avait naguère pour but

de les neutraliser, ce qui simplifiait et facilitait grande-

ment la production. Cela permettait d’une part d’éviter

les pertes de rendement, et d’autre part d’enrayer la

multiplication des mauvaises herbes pour les années à

venir en empêchant leur propagation par les graines

(Zwerger et Ammon 1999). Le développement des herbi-

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 108–113, 2011

Figure 4 | L’invasion d’ambroisie (Ambrosia artemisiifolia) est en-rayée, mais il ne faut pas baisser la garde. (Photo: ACW)

Page 8: Edition 3 mars 2011

112

Environnement | Le point sur les plantes envahissantes

Créer un nouveau «Club des fous»

Les chemins de fer donnaient autrefois l’image figée, voire

étriquée, d’une institution qui avait de la peine à innover.

Cette attitude était particulièrement utile pour des ques-

tions de sécurité car elle évitait les décisions hâtives pou-

vant entraîner des accidents. Dans les années 1960 déjà,

les Chemins de fer fédéraux suisses ont commencé à réflé-

chir aux moyens de sortir des structures traditionnelles. Ils

ont cherché des réponses au boom de la construction des

autoroutes, pour regagner des passagers et des marchan-

dises. Pour ce faire, l’administration a constitué une petite

équipe d’ingénieurs du rail et des horaires et l’a chargée

de réinventer le système d’exploitation indépendamment

de toutes les structures traditionnelles (Hürlimann 2007).

Ses membres étaient libres de développer les idées les plus

farfelues. L’équipe en question a bientôt reçu le sobriquet

de «Spinnerclub» («club des fous»), d’une part parce qu’on

ne savait jamais trop de quoi ces gens discutaient, et

d’autre part en raison de leurs idées farfelues. C’est ce

«club» qui a développé, avec les Chemins de fer néerlan-

dais, l’idée folle d’un horaire cadencé qui allait être mise

en pratique 20 ans plus tard et qui fait aujourd’hui partie

intégrante de notre système d’exploitation ferroviaire.

S’agissant des plantes introduites, un «think tank»

(«club des fous») pourrait remplir des fonctions très

importantes pour reconnaître précocement les invasions

d’espèces envahissantes et maîtriser leur progression. Des

petits groupes de spécialistes de l’écologie, de la méde-

cine, de l’agronomie, de l’administration et de la politique,

à raison d’un représentant par domaine, devraient se réu-

nir régulièrement et débattre des développements les

plus récents en matière d’introduction d’espèces végé-

tales. Le rayon d’observation de ces équipes serait limité

par les données géographiques et climatiques (régions

biogéographiques), sans tenir compte des frontières can-

tonales et étatiques. Il y aurait ainsi dans notre pays plu-

sieurs «clubs» dont la mission serait de reconnaître assez

tôt la propagation d’espèces végétales et d’éviter les

énormes problèmes de lutte engendrés par les espèces

envahissantes: l’écologue reconnaît à temps les évolutions

indésirables (invasions), le médecin évalue les risques sani-

taires des plantes à problèmes, l’agronome met au point

une stratégie de lutte, le représentant des autorités

reconnaît l’imminence d’une situation exceptionnelle et

peut veiller à ce que les réglementations soient adaptées

en conséquence, et le politicien peut mettre à temps des

fonds à disposition.

Situation actuelle et perspectives d'avenir

L’intensification constante de l’exploitation des sols nous

met de plus en plus en situation conflictuelle avec des

plantes. Avec le bétonnage des surfaces maraîchères

proches des agglomérations, les maraîchers se rabattent

sur les terres assolées: le nombre de parcelles ayant

changé d’affectation augmente. Lors d’utilisation mixte

des mêmes surfaces pour les cultures maraîchères et les

cultures des champs intensives, le souchet comestible

trouve des conditions idéales à sa propagation. Dans les

cultures maraîchères, les tubercules sont rapidement dis-

séminés sur l’ensemble de la parcelle par les travaux du

sol et de récolte répétés au cours de l’année. Les tuber-

cules sont déplacés avec la terre adhérant aux machines

qui ont travaillé auparavant une parcelle infestée. La

formation de tubercules ne peut pas être enrayée avec

des herbicides. Ici, le niveau d’alerte est déjà au rouge.

À l’instigation de plusieurs cantons, un vaste réseau d’es-

sais a été mis en place pour combattre la renouée du

Japon. La durée des essais est choisie en fonction du

nombre requis de périodes de végétation pour l’établis-

sement de la méthode de lutte la plus efficace (au moins

4 ans). Il n’a pas encore été décidé si la méthode la plus

probante peut être appliquée partout.

En Suisse, l’invasion d’ambroisie a été détectée à

temps. L’intégration rapide de cet adventice au poten-

tiel allergène en 2006 dans l’Ordonnance sur la protec-

tion des végétaux (OPV) en tant que mauvaise herbe à

combattre obligatoirement a beaucoup contribué à une

bonne maîtrise de la situation. Il est importe également

que, malgré les résistances politiques, le principe de

lutte obligatoire reste ancré dans l’agriculture, secteur

fortement concerné. Le risque d’invasion n’en est pas

encore banni pour autant, raison pour laquelle il ne faut

pas baisser la garde face à l’ambroisie.

Le séneçon du Cap (Senecio inaequidens) est en forte

progression actuellement, surtout le long des auto-

routes. Il est facilement reconnaissable à sa floraison

jaune clair visible sur les bermes centrales jusqu’à la sur-

venue des premiers froids hivernaux. Nous ne savons pas

si cette espèce pérenne, toxique pour le bétail d’étable,

va prochainement coloniser les surfaces attenantes. Ici

aussi, la vigilance est de mise.

n

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 108–113, 2011

Avis

Un congrès international sur les plantes enva-

hissantes, organisé par la Société européenne

de malherbologie (EWRS) et Agroscope Chan-

gins-Wädenswil ACW, aura lieu à Ascona du

2 au 7 octobre 2011. Les débats porteront sur

les rapports entre la malherbologie et la lutte

contre les mauvaises herbes dans l’agriculture,

ainsi que sur les espèces végétales envahis-

santes: http://invasive.weeds.ascona.ewrs.org

Page 9: Edition 3 mars 2011

113

Le point sur les plantes envahissantes | Environnement

Ria

ssu

nto

Sum

mar

y

Piante invasive – come procedere?

La migrazione delle piante in tutto il

mondo è un importante fattore per la

nostra vita. Con la globalizzazione

delle sue attività l’uomo disturba

questa migrazione. Piante ed altre

forme di vita, provenienti da altri

continenti, sono in grado di adattarsi

al loro nuovo ambiente, ma in assenza

di nemici, come p.es. erbivori, malattie,

ecc., perturbano severamente l’attuale

equilibrio della biodiversità. Tali piante

sono chiamate neofite. L’uso intenso

del terreno accelera, in molti casi, la

loro invasione. Da quando l’uomo

coltiva la terra esistono piante proble-

matiche e l’agricoltore deve costante-

mente adattare il suoi metodi di lotta.

Allo stesso modo la società dovrebbe

accettare i metodi adattati al controllo

di piante invasive. Piccoli gruppi di

esperti dovrebbero poter imporre,

indipendentemente da convenzioni

preesistenti, delle misure di lotta

adatte alla specie. Problemi risolti

(Ambrosia) incoraggiano ad affrontare

con vigore problemi esistenti (Poligono

del Giappone) e futuri (Cipero dolce).

Invasive plants – what else?

The migration of plants around the

globe is essential for our life. Globali-

zation of human activities disturbs

normal plant migration. Plants and

other live forms from other continents

do adapt to their new environments.

If they do not find enemies there, they

might become invasive and disturb the

balance of the biodiversity. Plant

invasions often depend on the inten-

sity of land use. Since men cultivate

land, weeds do exist and control

methods must be adapted to them.

The society should accept the introduc-

tion of appropriate methods to control

the weed. Small specialized groups

could develop adapted control strate-

gies after existing restrictions for

control have been adapted. Solved

problems (ragweed) motivate to

courageously tackle existing problems

(Japanese knotweed) and future

problems (yellow nutsedge).

Key words: invasion, control method,

society, invasive plant.

Bibliographie b Delabays N., Bohren C., Rometsch S., 2008. Les plantes envahissantes : quels enjeux pour l’agriculture ? Revue suisse Agric. 39 (6) 286–290.

b Environment Agency, 2010. Accès: http://www.environment-agency.gov.uk/research/library/publications/103309.aspx [09.12.2010]

b Hürlimann G., 2007. In: Unternehmerische Netzwerke, Berghoff H. & Sy-dow J. (éd.), Verlag Kohlhammer, Stuttgart, 291 p.

b Mayor J.-Ph. & Lambelet-Haueter C., 1996. Evolution comparée de la vé-gétation d’une friche spontanée et d’une jachère florale. Revue suisse Agric. 28 (6), 337–343.

b Menne H. J., Wagner J., Schleich-Saidfar C., Hoppe H. J., Zange B. & Bar-tels M., 2008. Traget-site resistance in black-grass (Alopecurus myosuro-ides Huds.) to ACCase inhibiting herbicides in Northern Germany – Are there correlating factors in the agronomic production systems? Journal of Plant Diseases and Protection, Special Issue XXI, 31–36.

b Total R., 2008. Kulturpflanze oder Problemunkraut? G’plus 14, 14 – 15. b CPS, 2010. Commission suisse pour la conservation des plantes sauva-ges. Accès: www.cps-skew.ch [06.12.2010].

b Zwerger P. & Ammon H. U., 2002. Unkraut – Ökologie und Bekämpfung. Eugen Ulmer, Stuttgart, 419 p.

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 108–113, 2011

Page 10: Edition 3 mars 2011

114

I n t r o d u c t i o n

Dans les régions rurales, les nouvelles habitations se

construisent de plus en plus près - voire trop près - des

exploitations agricoles. Parallèlement, les structures des

villages se modifient. Les résidents perdent le contact

avec l’agriculture, ce qui réduit considérablement leur

compréhension et leur tolérance envers l’élevage des

animaux et les odeurs de la ferme. Les communes, auto-

rités et tribunaux doivent traiter un nombre accru de

plaintes concernant les nuisances olfactives des installa-

tions d’élevage. Au moment de choisir le lieu d’implan-

tation d’une installation d’élevage, les exigences impo-

sées par l’aménagement du territoire pour éviter le

mitage du paysage entrent souvent en contradiction

avec les conditions qui permettraient le développement

ultérieur de l’exploitation. Il est indispensable de mener

ce débat sur des bases objectives, en vue d’éviter les

conflits et de permettre le développement des exploita-

tions dans l’intérêt des éleveurs et des résidents. Il est

dès lors nécessaire d’avoir des données de planification

fondées et actualisées afin de déterminer les distances

minimales séparant les installations d’élevage des zones

d’habitations (Richner et Schmidlin 1995) et de choisir

judicieusement l’endroit réservé aux constructions et

aux agrandissements futurs. Les calculs d’émission

Margret Keck1, Alfons Schmidlin1, Kerstin Zeyer2, Lukas Emmenegger2 et Sabine Schrade1

1Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, 8356 Ettenhausen2Empa Dübendorf, 8600 Dübendorf

Renseignements: Margret Keck, e-mail: [email protected], tél. +41 52 368 31 31

Concentration et émission d’odeurs des étables de vaches laitières avec aire d’exercice extérieure

E n v i r o n n e m e n t

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 114–119, 2011

Figure 1 | Stabulation libre pour vaches laitières – sources planes d’odeurs. (Photo: ART)

Page 11: Edition 3 mars 2011

Concentration et émission d’odeurs des étables de vaches laitières avec aire d’exercice extérieure | Environnement

115

Rés

um

é

Les communes, autorités et tribunaux sont

de plus en plus confrontés à des plaintes

concernant les nuisances olfactives des instal-

lations d’élevage. Les concentrations et

émissions d’odeurs de cinq étables de vaches

laitières, à aération naturelle, ont été

comparées à deux saisons différentes et à

deux moments de la journée. L’étude de ces

étables avec logettes, voies de circulation

non perforées et aire d’exercice extérieure

contiguë a été réalisée avec la nouvelle

méthode «Tracer-Ratio». La concentration en

odeurs provenant de sources planes au sol

(logette, couloir de circulation et aire

d’exercice) et à une hauteur de 3 m a été

déterminée par des testeurs à l’aide d’un

olfactomètre. Les plus fortes concentrations

en odeurs au sol se trouvaient surtout dans

le couloir de circulation, tandis que celles

mesurées à 3 m au-dessus des trois sources

planes étaient comparables. Cela signifie

qu’à cette hauteur déjà, l'air des trois secteur

se mélange fortement. Sur six des sept jours

de mesures, l’émission d’odeurs était de deux

à quatre fois plus élevée l’après-midi que le

matin. Les variations étaient aussi considé-

rables d’une exploitation à l’autre. En

conséquence, une comparaison des systèmes

d’élevage exige des données solidement

étayées en provenance de plusieurs exploita-

tions, ainsi que la prise en compte de toutes

les saisons et une haute résolution tempo-

relle. Afin de trouver des solutions pour

réduire les odeurs, il est nécessaire de détenir

des données de planification fondées et

actualisées sur la détermination des distances

minimales à respecter; ces données serviront

de base à la modélisation de la dispersion et

indiqueront les principales variables d’in-

fluence sur la volatilisation des odeurs.

d’odeurs par animal ou par unité de gros bétail (1 UGB =

500 kg de poids vif) et par unité de temps fournissent

des valeurs appropriées à la comparaison des systèmes

d’élevage ainsi que des données de départ indispen-

sables à une modélisation pertinente de la propagation.

Tandis que dans les années 1980 déjà, Oldenburg

(1989) mesurait les émissions d’odeurs provenant de

17  stabulations libres à logettes pour vaches laitières

sans tenir compte des variations au fil de la journée,

Brose (2000) présentait des données à plus haute résolu-

tion temporelle, mais uniquement pour une exploita-

tion. Selon la Directive allemande sur les immissions

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 114–119, 2011

Figure 2 | Représentation schématique avec plan et coupe d’une stabulation libre à logettes et à double rangée, avec dosage, prélèvement d’échantillons et capteur climatique.

Légende

Dosage des gaz traceurs

Echantillon prélevé à 3 m de hauteur: odeurs, gaz traceurs

Echantillon d’odeurs prélevé au sol

Capteurs climatiques

aire

d’e

xerc

ice

exté

rieur

e

loge

ttes

coul

oir d

e ci

rcul

atio

n

Page 12: Edition 3 mars 2011

Environnement | Concentration et émission d’odeurs des étables de vaches laitières avec aire d’exercice extérieure

116

d’odeurs (Geruchs-Immissions-Richtlinie GIRL 2008), les

étables ouvertes posent un problème lors du calcul de la

propagation, car les émissions dépendent des condi-

tions climatiques, par exemple de la vitesse et de la

direction du vent. Dès lors, les facteurs d’émissions pro-

venant de systèmes à aération naturelle méritent d’être

étudiés avec un soin tout particulier. Cela nécessite une

base de données actuelle et plus large issue de procédés

avérés et d’un nombre suffisant d’exploitations. Il

n’existe actuellement aucune donnée indiquant des

sources d’émission diffuses à proximité du sol provenant

des stabulations libres à logettes avec aire d’exercice

extérieure (fig. 1). Pourtant, ce système de détention est

en pleine expansion en Suisse. Le manque de données

pour les étables à aération naturelle est surtout dû aux

difficultés de déterminer les taux d’échange d’air.

Cette étude avait pour but de comparer les concen-

trations d’odeurs de différentes sources planes et de

quantifier les émissions d’odeurs provenant des stabula-

tions libres à logettes pour vaches laitières avec aire

d’exercice extérieure. Elle devait aussi décrire la varia-

tion entre deux heures du jour différentes, deux saisons

et diverses exploitations.

M a t é r i e l e t m é t h o d e s

Les mesures ont été réalisées dans cinq stabulations libres

à logettes pour vaches laitières (exploitations 2 à 6) avec

voies de circulation non perforées et aire d’exercice exté-

rieure contiguë. Les relevés d’odeurs existants étaient

intégrés dans les recherches de Schrade (2009) «Emissions

d’ammoniac et de PM10 dans les stabulations libres pour

vaches laitières, avec aération naturelle et aire d’exercice

extérieure, à l’aide d’une méthode ‹Tracer-Ratio› réali-

sées dans six exploitations. Les exploitations, les systèmes

de détention et les paramètres liés aux animaux sont

décrits en détail par Schrade (2009). En outre, pour

ca ractériser les conditions particulières au moment des

mesures qui serviront de référence et pour en extraire les

importants variables d’influence sur les émissions, des

données ont aussi été relevées sur le climat, la présence

des animaux dans l’aire d’exercice et la souillure des voies

de circulation. L’exemple d’un plan d’exploitation est

présenté dans la figure 2. Les mesures ont porté sur les

divers secteurs de l’étable, à savoir le couloir de circula-

tion, les logettes et l’aire d’exercice. La comparaison a été

établie au printemps et en été (tabl. 1), tôt le matin

(entre 4h00 et 5h30) et en fin d’après-midi (entre 15h00

et 16h30). L’exploitation 6 est représentée aux deux sai-

sons, tandis que pour l’exploitation 2, les mesures n’ont

été prises qu’en été pendant deux jours.Une hotte de prélèvement d’échantillons ECOMA

(845 mm de diamètre, propre construction) a été déposée

successivement sur diverses sources planes au sol et des

échantillons d’air ont été aspirés pendant 20 secondes

dans un sac en Nalophane (9 litres de volume). Les lieux de

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 114–119, 2011

Figure 3 | Diverses sources planes dans une étable de vaches laitières.

Exploitation 2 3 4 5 6

Superficie [m²], 575 858 412 529 568

dont voies de circulation 440 624 295 377 388

Cheptel [n] 58 94 40 77 90/83

Date des enquêtes août mars avril juilletmai, juin

Température de l'air [°C] 12,6/22,8 5,5/20,5 9,3/7,4 13,1/19,6 9,6/20,6

matin/après-midi 14,0/24,1 13,1/25,5

Tableau 1 | Indications sur les exploitations, avec superficie des étables, cheptel, date des enquêtes et température.

aire d’exercice extérieurelogettes couloir de circulation dans l'aire d'affouragement

Page 13: Edition 3 mars 2011

Concentration et émission d’odeurs des étables de vaches laitières avec aire d’exercice extérieure | Environnement

117

R é s u l t a t s

Diverses sources planes au sol

Lors de la comparaison de la concentration d’odeurs des

trois secteurs de l’étable, les valeurs des couloirs de circu-

lation, avec une médiane de 870 GE/m3, dépassaient lar-

gement celles des logettes qui comptaient moins de

150 GE/m3 ou celles des aires d’exercice qui indiquaient

70 et 435 GE/m3 (fig. 3 et 4a). Cela illustre le fait que les

animaux séjournent plus longtemps dans le couloir de

circulation que dans l’aire d’exercice, ce qui augmente

d’autant les quantités d’excréments et d’urine (Schrade,

2009). Toutefois, les valeurs isolées présentent de fortes

variations. Par exemple, la concentration d’odeurs au sol

affichait jusqu’à 4000 GE/m3 alors que 50 % des valeurs

totales étaient inférieures à 400 GE/m3. Hormis pour l’ex-

ploitation 4, les concentrations d’odeurs étaient généra-

lement plus élevées l’après-midi que le matin. Le résultat

différent de l’exploitation 4 est probablement dû aux

précipitations qui se sont produites le jour du relevé

(3 mm le matin et 12 mm l’après-midi).

Echantillons à 3 m de hauteur

Les échantillons d’air prélevés à 3 m de hauteur se rap-

prochent beaucoup plus de la moyenne dans l’espace

et dans le temps que ceux obtenus sous la hotte de

prélèvement au sol. Tandis qu’au sol, les concentra-

tions d’odeurs les plus élevées se trouvaient principale-

ment dans le couloir de circulation, celles mesurées à

3 m de hauteur étaient semblables pour les deux sai-

sons et les trois secteurs (fig. 4b). La médiane de tous

prélèvement dans le couloir de circulation, les logettes et

l’aire d’exercice extérieure avaient été prédéfinis dans la

grille de saisie afin d’éviter une sélection subjective (fig. 2).

La concentration d’odeurs au niveau du sol a été

comparée avec celle mesurée à 3 m de hauteur (fig. 2). A

cette hauteur, les échantillons ont été prélevés à l’aide

d’un système d’échantillonnage d’air constitué de

tuyaux en téflon munis de capillaires critiques en verre.

Un échantillon représentatif des gaz traceurs et des

odeurs dans des étables de grand périmètre a ainsi été

obtenu. Pour collecter l’air, les échantillons d’odeurs

ont été aspirés toutes les huit minutes dans chaque sac

de prélèvement à l’aide d’une pompe péristaltique.

Quatre personnes ont évalué 81 sacs d’échantillonnage

à l’olfactomètre TO8 (ECOMA) en l’espace de 24 heures,

suivant à la norme DIN EN 13725 (2003). Ces personnes

ont été exposées au n-Butanol (100 ppm) à titre de

contrôle.

Pour déterminer les émissions provenant de l’aéra-

tion naturelle et des sources planes, ART et Empa ont

développé une méthode dite Tracer-Ratio avec deux gaz

traceurs (SF6, SF5CF3). A l’aide d’un système à tube munis

de capillaires, les gaz traceurs dilués ont été constam-

ment soumis à des ajouts dosés directement sur la voie

de circulation émettrice; la source d’émission d’odeurs a

ainsi pu être représentée. L’analyse des deux gaz tra-

ceurs a été réalisée simultanément à l’aide d’une chro-

matographie en phase gazeuse (GC-ECD). L’émission

d’odeurs se détermine en multipliant le rapport entre le

gaz traceur soumis aux ajouts dosés au sol et à 3 m de

haut avec la concentration d’odeurs.

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 114–119, 2011

Figure 4 | Concentration d’odeurs a) au sol et b) à 3 m de hauteur, exprimée en unités d’odeurs par mètre cube d’air [UO/m3], par saison et secteur d’étable (LO : logette, CC: couloir de circulation, AE : aire d’exercice extérieure), avec médiane et valeurs isolées.

Conc

entr

atio

n d‘

odeu

rs [U

O/m

³]

0

20

40

60

80

100

LO CC AE LO CC AE

printemps été

saison, secteur

0

1000

2000

3000

4000

5000

LO CC AE LO CC AE

printemps été

saison, secteur

a) sol b) à 3 m de hauteur

Conc

entr

atio

n d‘

odeu

rs [U

O/m

³]

• valeurs isolées

– médiane

Page 14: Edition 3 mars 2011

118

Environnement | Concentration et émission d’odeurs des étables de vaches laitières avec aire d’exercice extérieure

les secteurs variait entre 25 et 37 GE/m3. Cela signifie

que dans ces secteurs, l’air se mélange considérable-

ment à 3 m de hauteur déjà.

Emission d’odeurs

L’émission d’odeurs le matin et l’après-midi est présen-

tée à la figure 5: sur six des sept jours de mesures, elle est

de deux à quatre fois plus élevée l’après-midi que le

matin. Seule l’exploitation 4 soumise à des précipitations

pendant le relevé n’a pas connu cet effet.

La variation entre les exploitations est aussi très large

avec une médiane de 11 à 30 UO/GB×s. L’exploitation

4 produit l’émission d’odeurs la plus basse le jour des pré-

cipitations. Les valeurs les plus élevées proviennent de

l’exploitation 3 au printemps. Dans les exploitations 2 et 6,

où la température de l’air fut la plus haute en été, les

émissions d’odeurs n’ont pas atteint les valeurs maximales.

D i s c u s s i o n

Les échantillons d’air pour la concentration d'odeur à 3 m

de hauteur permettent d’émettre des conclusions sur

chaque secteur de l’étable, tandis qu’un échantillon pré-

levé avec la hotte au sol ne représente qu’un extrait très

ponctuel. Pour caractériser adéquatement, comme

Schrade (2009), les surfaces souillées de façon très hétéro-

gène dans l’espace, notamment dans l’aire d’exercice, il

faudrait prélever un nombre beaucoup plus grand

d’échantillons avec la hotte.

La grande variation de l’émission d’odeurs au fil du

jour peut être due aux variations de l’activité des ani-

maux, au l'incidence du vent des surfaces souillées, mais

aussi aux différences de température.

Un effet saisonnier marqué a été constaté dans l’émis-

sion d’odeurs, ce qui n’apparaît pas avec les données sur

les émissions d’ammoniac relevées par Schrade (2009)

dans les mêmes exploitations (fig. 5). Dans la présente

étude sur les étables ouvertes, de plus grandes superfi-

cies et avec une aire d’exercice, l’émission d’odeurs était

plus élevée que dans la littérature, qui porte plutôt sur

des étables fermées et une aération entre le bas du pan

et le faîte (Oldenburg 1989, Brose 2000).

C o n c l u s i o n s

La nouvelle méthode «Tracer-Ratio», combinée avec

des  tests olfactifs, permet de quantifier les émissions

d’odeurs dans des étables à aération naturelle. Une

meilleure base de données sur les émissions d’odeurs

provenant de cinq étables à aération naturelle, avec aire

d’exercice extérieure, sert d’outil de planification pour

déterminer les distances minimales à respecter entre les

installations d’élevage et les zones d’habitation; elle est

aussi une base utile à la modélisation de la dispersion. Ce

n’est qu’avec des données largement étayées par un

nombre suffisant d’exploitations, ainsi qu’en tenant

compte de toutes les saisons et de relevés à haute réso-

lution temporelle, qu’il sera possible de comparer les sys-

tèmes d’élevage. Car les processus dynamiques liés à l’ac-

tivité du bétail, l’incidence du vent et l’assèchement sont

à la clé des émissions d’odeurs provenant d’étables à

aération naturelle. Une meilleure connaissance des prin-

cipaux variables d’influence favorisera la recherche de

solutions en vue de réduire ces odeurs. n

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 114–119, 2011

Figure 5 | Emission d’odeurs, exprimée en unité d’odeurs par unité de gros bétail (correspond à 500 kg de poids vif) et par seconde [UO/UGB × s] avec valeurs isolées le matin et l’après-midi, représentée par saison et par exploitation ainsi que médiane de l’exploitation et par saison.

Emis

sion

d‘o

deur

s [U

O/U

GB·

s]

0

10

20

30

40

50

60

70

80

3 4 6 médiane 2 5 6 médiane

printemps été

saison, secteur

médiane totale valeurs isolées le matin valeurs isolées l‘après midi

Page 15: Edition 3 mars 2011

119

Concentration et émission d’odeurs des étables de vaches laitières avec aire d’exercice extérieure | Environnement

Ria

ssu

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Sum

mar

y

Bibliographie b Brose G., 2000. Emissionen von klimarelevanten Gasen, Ammoniak und Geruch aus einem Milchviehstall mit Schwerkraftlüftung. VDI-MEG-Schrift 362, Universität Hohenheim. 136 p.

b DIN EN 13725, 2003. Luftbeschaffenheit – Bestimmung der Geruchsstoff-konzentration mit dynamischer Olfaktometrie. 71 p.

b Geruchsimmissionsrichtlinie GIRL, 2008. Feststellung und Beurteilung von Geruchsimmissionen. Fassung vom 29.2.2008 und Ergänzung vom 10.9.2008. 57 p.

b Oldenburg J., 1989. Geruchs- und Ammoniak-Emissionen aus der Tierhal-tung. KTBL-Schrift 333, Darmstadt. 158 p.

b Richner B. & Schmidlin A., 1995. Distances minimales à observer pour les ins-tallations d'évelage d'animaux – Recommandations pour de nouvelles const-ructions et des exploitations existantes. Rapport FAT No. 476, Tänikon. 16p.

b Schrade S., 2009. Ammoniak- und PM10-Emissionen im Laufstall für Milchvieh mit freier Lüftung und Laufhof anhand einer Tracer-Ratio- Methode. VDI-MEG Schrift 483, Universität Kiel. 131 p.

Odour concentration and emission from dairy

cattle housing with an exercise yard

Local authorities, government agencies and

courts are increasingly faced with complaints

and lawsuits relating to odour annoyance from

livestock housing systems. Odour concentra-

tion and emission from five naturally venti-

lated dairy cattle sheds were compared in two

seasons and at two times of day. A newly

developed tracer ratio method was used for

these cowsheds with cubicles, solid floor

surfaces and an adjacent exercise yard. Test

subjects were used to determine on the

olfactometer the odour concentration from

area sources on the ground (cubicle, traffic

alley and exercise yard) and at a height of 3 m.

Whereas at ground level the highest odour

concentrations occurred mainly in the traffic

alley, the odour concentration at a height of

3 m was comparable over the three area

sources. This would indicate that at a height of

3 m there had already been considerable

intermixture between these areas. On six of

the seven measurement days, odour emission

in the afternoon was two to four times higher

than in the morning. The variation in odour

emission between farms was also high. A

comparative assessment of animal housing

systems therefore requires broadly supported

data on several farms, the inclusion of all

seasons and high time-of-day resolution. In

order to provide solutions for odour reduction,

there is a need for well-founded, up-to-date

planning data to determine minimum dis-

tances; these data will be used as a basis for

dispersion modelling and the most important

variables influencing odour release.

Key words: odour concentration, odour

emission, dairy cattle, loose housing, natural

ventilation.

Concentrazioni ed emissioni di odori nelle

stalle di bestiame lattifero con area d'uscitaSempre più spesso comuni, autorità e tribunali

sono confrontati con ricorsi e cause provocate

dai cattivi odori provenienti dalle strutture di

stabulazione. Durante due stagioni e per due

volte al giorno si sono confrontati la concentra-

zione e le emissioni di odori in cinque stalle per

bestiame lattifero ad aerazione naturale. Per

queste strutture dotate di box di riposo,

superfici di movimento con rivestimento e area

d'uscita limitrofa, è stato impiegato il metodo

«Tracer-Ratio». La concentrazione degli odori

provenienti da fonti al suolo (box di riposo,

superficie di movimento e area d'uscita) è stata

misurata all’altezza di 3 metri attraverso delle

persone munite di olfattometro. Mentre al

suolo le concentrazioni più elevate sono state

rilevate soprattutto sulla superficie di movi-

mento, all’altezza di 3 metri esse erano simili

per tutte i tre settori. Ciò indica che a quell'al-

tezza gli odori di diversa provenienza tendono

fortemente a mescolarsi. 6 giorni su 7 l'emis-

sione di odori nel corso del pomeriggio risultava

da 2 a 4 volte superiore che al mattino. Tra le

aziende coinvolte si sono registrate forti

variazioni di emissioni. Per questo motivo una

valutazione comparativa dei sistemi di stabula-

zione richiede un'estesa base di dati su più

aziende, prendendo in considerazione tutte le

stagioni e una maggiore frequenza di misura-

zione. Per proporre delle soluzioni alla diminu-

zione dei cattivi odori sono necessari dati di

pianificazione consolidati e aggiornati per

determinare le distanze minime; questi dati

serviranno come base per la simulazione della

diffusione e indicheranno i principali parametri,

relativi alla volatilizzazione degli odori.

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 114–119, 2011

Page 16: Edition 3 mars 2011

120 Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 120–127, 2011

I n t r o d u c t i o n

L’agriculture intensive des exploitations sans bétail occa-

sionne une diminution de la matière organique des sols si

aucune mesure palliative n’est prise. En revanche, pour les

exploitations avec bétail, le problème réside davantage

dans la meilleure valorisation possible de l’importante

quantité d’engrais de ferme générée. En Suisse, ces deux

types d’exploitations occupent en général des régions dis-

tinctes, voire éloignées les unes des autres. Le transfert

des engrais de ferme excédentaires vers les exploitations

sans bétail est donc difficile, même si l’application web

HODUFLU développée par l’OFAG en simplifie et en har-

monise la gestion administrative (OFAG 2010).

La réduction du travail du sol et l’apport d’engrais de

ferme sont des techniques connues pour leurs impacts

positifs sur le stockage de la matière organique dans les

sols agricoles (Lal 2009). Cependant, se pose la question

de leur capacité à entretenir la fertilité des sols et à ali-

menter les cultures dans les conditions suisses. Dans un

essai de longue durée, Vullioud et al. (2006) ont étudié

l’impact de différents apports azotés organiques et

minéraux sur l’état de fertilité des sols, les performances

des cultures et les bilans des éléments fertilisants. Toute-

fois, l’impact du travail du sol et la valeur fertilisante des

engrais organiques selon les modalités des apports res-

taient des questions ouvertes.

L’objectif du présent travail est de quantifier l’effet

sur douze années des modalités de travail du sol et d’ap-

ports d’engrais de ferme sur (i) la fertilité du sol, (ii) la

production de matière sèche des cultures et (iii) la

réponse des cultures à la fertilisation azotée.

M a t é r i e l e t m é t h o d e s

Descriptif de l’essai

L’essai a débuté en 1997 à Changins (VD, 430 m). Les

principales caractéristiques physico-chimiques du sol

sont présentées dans le tableau 1.

Les rotations font alterner cultures de printemps et

cultures d’automne. D’une durée de 5 à 6 ans, elles sont

de 60 à 70 % céréalières avec du colza en tête de rota-

tion. Les pailles de céréales sont systématiquement

récoltées alors que celles de maïs (en 2000 et 2005) et de

Travail superficiel du sol avec un cultivateur. (Photo: P. Vullioud)

P r o d u c t i o n v é g é t a l e

Alexandra Maltas, Raphaël Charles et Sokrat Sinaj,

Station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, 1260 Nyon

Renseignements: Alexandra Maltas, e-mail: [email protected], tél. + 41 22 363 47 43

Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labour

Sol

Fumier(kg t-1 de matière fraîche)

Lisier dilué (kg m-3 de matière fraîche)

Type de sol Brun lessivé N 4,59 (3,74) 1,43 (0,74)

Argile (%) 23 N-NH4 0,25 (0,22) 0,83 (0,34)

Sable (%) 36 P 1,33 (1,38) 0,23 (0,16)

pH-H2O 7,9 K 5,83 (5,75) 1,70 (0,61)

MO (%) 2,05 Ca 4,56 (7,38) 0,63 (0,50)

P-AAE (mg kg-1) 132 Mg 0,89 (0,81) 0,22 (0,16)

K-AAE (mg kg-1) 198

Profondeur utile (cm)

70–100

Tableau 1 | Caractéristiques principales physico-chimiques du sol en 1992 et des engrais de ferme (concentrations totales moyennes de 1997 à 2008). Les valeurs entre paranthèse représentent les écart-types

Analyses effectuées selon les méthodes de référence des Stations de recherche Agroscope (Stations de recherche ART & AcW, 2011)

Page 17: Edition 3 mars 2011

Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labour | Production végétale

121

Rés

um

é

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 120–127, 2011

Un essai conduit à Changins de 1997 à 2009 a

étudié les effets combinés de la nature des

engrais (NPK, fumier + NPK et lisier + NPK),

du fractionnement des apports de fumier

(tous les ans ou tous les trois ans) et du

travail du sol (labour ou pseudo-labour)

associés à deux doses d’azote (100 ou 60 %

de la dose optimale) sur la fertilité du sol et

la production de matière sèche des cultures.

Les composantes de la fertilité du sol,

analysées après douze ans d’essai, ne

différent pas entre les sous-procédés de

fertilisation azotée, et seules les teneurs en

matière organique et en azote total du sol

varient significativement entre les procédés.

En conditions de fumure azotée non limi-

tante, les cultures, dans les procédés avec

engrais de ferme, produisent significative-

ment plus de matière sèche que les cultures

du procédé avec engrais minéraux seuls. Une

sous-fertilisation azotée couvrant 60 % des

besoins provoque une baisse de production

de 7 à 13 % selon les procédés. En absence

d’apports d’engrais de ferme, la réduction du

travail du sol permet de maintenir le stock de

matière organique du sol, mais devrait être

accompagnée d’un renforcement de la

fumure azotée. Le fractionnement du fumier

en de faibles doses annuelles n’améliore pas

l’efficience du fumier.

colza (en 1997, 2003 et 2008) sont restituées au sol. Après

la récolte de la culture précédente, un déchaumage

superficiel (10 à 15 cm) est effectué au cultivateur sur

l’ensemble des traitements. Avant le semis, un deuxième

travail du sol est effectué au cultivateur ou à la charrue

selon les procédés (tabl. 2). Enfin, le sol est repris à la

herse rotative pour le semis.Le dispositif expérimental est un split-plot compor-

tant cinq procédés et deux sous-procédés avec quatre

répétitions (tabl. 2). Les 40 parcelles unitaires mesu-

rent chacune 63 m². Les effets directs des engrais de

ferme (Ryser et al. 1987) sont déduits pour déterminer

la quantité de l’azote (N) minéral qu’il reste à apporter

selon les différents traitements (tabl. 3). Les apports

phospho-potassiques totaux (minéraux et organiques)

ne sont pas limitants. La fumure minérale est basée sur

les normes en vigueur, en tenant compte de la valeur

fertilisante des restitutions de pailles, du fumier et du

lisier (Ryser et al. 1987). Les apports moyens en N, P et

K des différents traitements sont présentés dans le

tableau 3.

Mesures et analyses statistiques

Les teneurs totales en N, P, K, Ca et Mg du fumier et du

lisier sont déterminées tous les ans avant leur épandage

(tabl. 1). En 2009, le sol est analysé sur les vingt premiers

centimètres (tabl. 4). La quantité totale de matière sèche

aérienne (MS) des cultures (grains et pailles) est mesurée

chaque année à la récolte. La teneur en N de la MS est

analysée chaque année de 1998 à 2008.

Procédé Sous-procédé

Abréviation Travail du sol Nature des engrais apportésDose et fractionnement des engrais de ferme

Abréviation Fertilisation azotée

EminPLPseudo-labour: cultivateur à 10 – 15 cm

Engrais minéraux NPK Pas d’apportN100 Besoins± en azote

couverts en totalité par les apports orga-niques et/ou miné-raux Fu3PL

Pseudo-labour: cultivateur à 10 – 15 cm

Fumier† de bovins en stabulation libre et engrais minéraux NPK

36 t ha-1 tous les 3 ans (en 1997, 2000, 2003 et 2006)

Fu1PLPseudo-labour: cultivateur à 10 – 15 cm

Fumier† de bovins en stabulation libre et engrais minéraux NPK

12 t ha-1 tous les ans

Fu1La Labour classique à 20 – 25 cmFumier† de bovins en stabulation libre et engrais minéraux NPK

12 t ha-1 tous les ans

Li1PLPseudo-labour: cultivateur à 10 – 15 cm

Lisier‡ de bovins dilué et engrais minéraux NPK

22 m3 ha-1 tous les ans

N60 Besoins± en azote couverts à 60 % par les apports orga-niques et/ou miné-raux

Tableau 2 | Description des procédés et des sous-procédés

†epandu sur sol nu avant la mise en place de la culture.‡epandu sur sol couvert par la culture. Le lisier est dilué avec les eaux de lavage (équivalent à une dilution 1:1).±Déterminés selon la méthode des normes corrigées (Ryser et al. 1987).

Page 18: Edition 3 mars 2011

Production végétale | Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labour

122 Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 120–127, 2011

Procédé Sous-procédéN P K

Chimique† Organique Chimique‡ Organique Chimique‡ Organique

EminPLN100 132 0 26 0 70 0

N60 78 0 26 0 70 0

Fu3PLNN100 108 51 14 13 27 67

N60 63 51 14 13 27 67

Fu1PLNN100 103 59 10 17 22 70

N60 62 59 10 17 22 70

Fu1LaNN100 103 56 9 18 22 73

N60 62 56 9 18 22 73

Li1PLNN100 112 31 26 5 58 37

N60 70 31 26 5 58 37

Tableau 3 | Quantités moyennes (kg ha-1 an-1) d’éléments fertilisants apportés par les engrais chimiques et/ou organiques dans les procédés et les sous-procédés de 1997 à 2008

† Les analyses P total et organique sont réalisées selon la méthode de Saunders et Williams (1955); toutes les autres analyses sont effectuées selon les méthodes de référence des stations de recherche Agroscope (Stations de recherche ART & AcW, 2011).

Les lettres majuscules différentes au sein d’une même ligne indiquent des moyennes significativement différentes au seuil de 5 % selon le test de Fisher, les lettres minuscules différentes au sein d’une même ligne indiquent des moyennes significativement différentes au seuil de 5 % selon le test de Fisher.

Analyse† Sous-procédé N60

Sous-procédé N100

Moyenne EminPL Fu3PL Fu1PL Fu1La Li1PL

Propriétés organiques

MO (%) 2,11 A 2,11 A 2,03 ab 2,28 a 2,13 ab 1,98 b 2,15 ab

N total (%) 0,158 A 0,160 A 0,158 ab 0,170 a 0,160 ab 0,148 b 0,163 ab

Rapport C/N 7,7 A 7,7 A 7,5 a 7,8 a 7,7 a 7,8 a 7,7a

Propriétés chimiques

pH-H2O 7,9 A 7,9 A 8,0 a 8,0 a 7,8 a 7,9 a 7,9 a

CaCO3 total1 (%) 4,7 A 4,7 A 6,0 a 3,5 a 4,3 a 6,3 a 3,5 a

CEC (cmol+ kg-1) 11,2 A 11,3 A 11,1 a 11,4 a 11,3 a 11,0 a 11,7 a

Taux de saturation (%) 94,0 A 94,5 A 96,0 a 94,3 a 91,7 a 95,7 a 94,8 a

Phosphore du sol (mg kg-1)

P total† 955 A 943 A 957 a 979 a 911 a 909 a 960 a

P organique† 286 A 287 A 264 a 285 a 321 a 269 a 299 a

P-AAE 126 A 123 A 120 a 140 a 119 a 105 a 132 a

P-H2O 3,0 A 2,8 A 2,9 a 3,2 a 3,1a 2,1 a 2,7 a

Cations du sol (mg kg-1)

K-AAE 168 A 168 A 160 a 177 a 174 a 155 a 173 a

K-H2O 30 A 29 A 28 a 29 a 31 a 26 a 29 a

Mg-AAE 192 A 196 A 213 a 176 a 185 a 224 a 179 a

Mg-CaCl2 59 A 58 A 64 a 55 a 66 a 51 a 55 a

Ca-AAE 19493 A 19723 A 24659 a 16864 a 15707 a 23986 a 17398 a

Métaux traces (mg kg-1)

Cu+Fe+Mn+Zn-AAE2 754 A 763 A 773 a 763 a 785 a 779 a 713 a

Tableau 4 | Effet des procédés et des sous-procédés sur la fertilité du sol en 2009

†nitrate d'ammoniaque épandu sur culture en deux ou trois apports.‡Superphosphate et sel de potasse épandus en un apport avant semis sur culture d’été et juste avant le premier apport azoté sur les autres cultures.

Page 19: Edition 3 mars 2011

Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labour | Production végétale

123Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 120–127, 2011

tion significative entre procédés et sous-procédés

(tabl. 5). Les réponses à la fertilisation N sont cependant

significativement différentes, selon le test de Fisher,

entre Fu1La et Fu1PL.

Teneur en azote des cultures

Comme précédemment, l’interaction entre procédés et

années est significative pour la teneur en N des cultures

(tabl. 5). En conditions N non-limitantes, la teneur en N

dans Li1PL est significativement supérieure à celles

observées dans Fu1La et Fu3PL (P<0,05, tabl. 5).

La réduction de la fertilisation N (différence entre

N100 et N60) diminue significativement la teneur en N

des cultures dans les cinq procédés (tabl. 5).

D i s c u s s i o n

Effets des engrais de ferme sur la fertilité du sol et la

production des cultures

Sur la durée de l’essai, l’application d’engrais de ferme

affecte peu la fertilité du sol. Seules les teneurs en MO et

en N-total varient avec la nature des engrais appliqués.

Nous n’avons pas observé d’effet de la nature des engrais

sur le pH du sol. Les quantités non négligeables de bases

échangeables (tabl. 1) apportées par les engrais de

ferme peuvent neutraliser l’acidité causée par la nitrifi-

cation du N contenu dans ces engrais et contribuer ainsi

à maintenir le pH du sol (Trans et al. 1996).

Les teneurs en P et K de réserve et en P et K solubles

ne sont également pas affectées par la nature des engrais.

La valeur fertilisante en P et K du fumier et du lisier

Les analyses statistiques sont réalisées en utilisant le

logiciel XLSTAT 2010, Copyright Addinsoft 1995 – 2009.

Compte-tenu de la structure de l’essai et du décalage

possible dans le temps de l’effet des apports organiques,

la mise en valeur globale des résultats est réalisée toutes

cultures confondues, en exprimant les données en pour-

centage du témoin (EminPL N100).

R é s u l t a t s

Fertilité du sol

La teneur en MO et en N-total dans les procédés Fu1La et

EminPL est plus faible que dans les autres procédés (tabl. 4).

Les autres composantes de la fertilité du sol ne sont pas

significativement affectées par les procédés (tabl. 4).

La fertilisation N  ne modifie pas significativement

(P>0,05) les propriétés chimiques et organiques du sol

suivies dans notre essai (tabl. 4).

Quantité totale de matière sèche aérienne

Les procédés et sous-procédés ont un impact significatif

(P<0,001) sur la production de MS, avec cependant une

interaction significative entre l’année et les procédés

(tabl. 5, fig. 1a). En conditions N non-limitantes (sous-

procédés N100), les cultures dans EminPL produisent

significativement moins de MS que dans les autres pro-

cédés (tabl. 5). La réduction de la fertilisation N (diffé-

rence entre N100 et N60) induit une diminution de la

production de MS de respectivement 7, 9, 11, 12 et 13 %

pour Fu1La, EminPL, Fu3PL, Li1PL et Fu1PL (tabl. 5).

L’analyse de variance ne met pas en évidence d’interac-

Qua

ntité

tota

le d

e m

atiè

re s

èche

(% té

moi

n)

60

80

100

120

140

Année

Tene

ur to

tale

en

N d

e la

mat

ière

sèc

he (%

tém

oin)

60

80

100

120

140

EminPL Fu3PL Fu1PL Fu1La Li1PL

a)

b)

1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008

Qua

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EminPL Fu3PL Fu1PL Fu1La Li1PL

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1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008

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EminPL Fu3PL Fu1PL Fu1La Li1PL

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1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008

Figure 1 | Effet des procédés sur l’évolution a) de la quantité totale de matière sèche aérienne et b) de la teneur totale en N des plantes. Les résultats sont exprimés en pourcentage du témoin EminPL N100. Les barres verticales représentent les plus petites différences signifi-catives au seuil de 5 % (PPDS).

Page 20: Edition 3 mars 2011

Production végétale | Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labour

124 Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 120–127, 2011

semble donc être correctement prise en compte dans les

«Données de base pour la fumure» (Sinaj et al. 2009).

Les engrais de ferme apportent également des quantités

non négligeables de Ca et Mg (17 – 85 kg Ca ha-1 an-1 et

5 – 12 kg Mg ha-1 an-1, tabl. 2). Cependant, ces apports

répétés ne se répercutent pas sur les réserves en Ca et

Mg du sol en 2009, ni sur les éléments traces (Cu, Fe, Mn

et Zn). Les parcelles qui reçoivent les engrais de ferme

présentent les meilleurs rendements (tabl. 5). Les quanti-

tés de Ca, Mg et éléments traces apportées par ces

engrais sont donc probablement compensées par des

exportations par la récolte plus importantes.

Par contre, l’apport de MO-fraîche dans les procédés

avec engrais de ferme entraîne des teneurs en N-total et en

MO du sol plus élevées que dans le procédé EminPL. Cepen-

dant, il faut noter qu’en l’absence d’engrais de ferme, le

pseudo-labour (EminPL) permet de conserver la teneur en

MO du sol de départ (2,03 en 2009 contre 2,05 % en 1997).

Les variations des teneurs en MO du sol en fonction de la

nature des engrais appliqués semblent influencer positi-

vement le potentiel de production de matière sèche.

Ladha et al. (2003) ont également noté que l’utilisation

continue d’engrais minéraux seuls provoque une baisse

des rendements, tandis que l’utilisation d’engrais de

ferme combinée à une fertilisation minérale NPK adé-

quate les maintient suite à l’amélioration du stock de C

organique et des propriétés physiques du sol. Les apports

minéraux plus diversifiés des engrais de ferme (N, P, K,

Ca, Mg, éléments traces) ont pu également influencer

positivement le potentiel de production.

Effets comparatifs du fumier et du lisier

Le lisier, facilement dégradable, présente un moindre

effet sur le stockage de MO dans le sol que le fumier

(Triberti et al. 2008). Pourtant, dans notre essai, les

teneurs en MO et en N-total du sol sont comparables

dans Li1PL et Fu1PL. Ceci est d’autant plus surprenant

que les parcelles avec lisier ont reçu moins de N orga-

nique que les parcelles avec fumier (tabl. 3). La moindre

humification du lisier peut-être compensée par de plus

fortes restitutions par les résidus de culture dans Li1PL

en raison d’une production de MS supérieure, et/ou une

vitesse de minéralisation de la MO du sol inférieure. Au

final, dans les conditions de l’essai, l’apport de 12 t ha-1

an-1 de fumier ou de 22 m3 ha-1 an-1 de lisier présente le

même effet sur le stockage de la MO dans le sol.

Intérêts du fumier apporté annuellement en doses ré-

duites

Les apports de fumier en quantité réduite mais à inter-

valles rapprochés augmentent les coûts liés à l’épandage

(temps et carburant) mais se justifieraient par une

meilleure utilisation par les plantes (Sinaj et al. 2009). Les

résultats de l’essai ne mettent pas en évidence d’effet

positif des doses réduites sur la production de MS. Ainsi,

apporter 36 t ha-1 an-1 de fumier tous les 3 ans n’affecte

pas l’efficience du fumier, et est donc plus rentable que

répartir cette dose en apports annuels. Les doses réduites

apportées annuellement n’ont pas d’effet non plus sur

les propriétés du sol.

Intérêts du non-labour

Le non-labour permet de réduire les pertes de MO par

minéralisation et érosion (Lal 2009). Douze années d’es-

Sous-procédé ProcédéQuantité totale

de matière sèche aérienne

Teneur totale en N de la matière

sèche

N100

EminPL 100 b 100 ab

Fu3PL 107 a 97 b

Fu1PL 107 a 99 ab

Fu1La 107 a 98 b

Li1PL 110 a 102 a

N60

EminPL 91 e 89 c

Fu3PL 95 cde 89 c

Fu1PL 93 de 85 d

Fu1La 99 bc 87 cd

Li1PL 97 bcd 88 cd

Résultats de l'analyse de variance selon:

Procédés *** ns

Procédés* sous-procédés

ns *

Procédés* années *** ***

Procédés* sous- procédés* années

ns ns

sous- procédés* *** ***

années *** ***

Sous-procédés* années

*** ***

Tableau 5 | Effet des procédés et des sous-procédés sur la quantité totale de matière sèche aérienne et sur les teneurs en N, P, K, Mg et Ca des plantes. Les valeurs correspondent aux valeurs moyennes sur la période indiquée et sont exprimées en pourcentage du té-moin EminPL N100

* effet significatif au seuil de 5 % ; ** effet significatif au seuil de 1 % ; *** effet significatif au seuil de 0,1 %;ns: non significatif.Des lettres minuscules différentes au sein d’une même colonne indiquent des moyennes significativement différentes au seuil de 5 % selon le test de Fisher.

Page 21: Edition 3 mars 2011

Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labour | Production végétale

125Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 120–127, 2011

fertilisation azotée sur la teneur en MO n’a été constaté;

les sous-procédés de fertilisation azotée étaient toute-

fois moins contrastés que dans l’essai de Vullioud et al.

(2006). De nombreuses études menées aux Etats-Unis et

répertoriées par Khan et al. (2007) montrent également

un faible effet de la fertilisation N sur le stockage du C

dans le sol. Ce résultat peut s’expliquer par une augmen-

tation de l’activité des microorganismes (Khan et al.

2007) et/ou par l’accumulation de formes organiques

plus labiles (Stevens et al. 2005).

Interaction entre procédés et années non négligeable

Les effets du labour sur la production de MS varient

selon le contexte climatique ou cultural (fig. 1a). En 2000,

le labour a été défavorable à la production de MS alors

qu’en 2003 et 2008, l’effet inverse est observé. Le labour

effectué en conditions trop humides en 2000 semble

être la cause de la chute significative de la production

observée dans le procédé Fu1La (fig. 1a). Un lit de

semence plus fin sous labour pourrait, par contre, expli-

quer les meilleurs résultats de cette technique pour le

colza en 2003 et 2008.

Les effets du fractionnement du fumier (Fu1PL et

Fu3PL) sur l’offre en N du sol varient selon le nombre

d’années écoulées depuis le dernier apport de fumier

sous Fu3PL (fig. 1a, b). L’année de l’apport, la teneur en

N des plantes en conditions N non-limitantes (sous-pro-

cédés N100) est plus élevée dans Fu1PL que dans Fu3PL

(tabl. 6). Ceci résulte vraisemblablement d’une meilleure

sai ont permis de confirmer l’effet positif du non-labour

(comparaison des procédés Fu1La et Fu1PL) sur le stoc-

kage de MO et de N-total dans le sol. Parallèlement,

nous observons une réponse des cultures à la fertilisa-

tion N significativement plus faible dans les parcelles

labourées. Ce résultat indique vraisemblablement une

offre en N du sol plus importante dans le procédé avec

labour. En effet, en non-labour la MO est mieux proté-

gée dans les agrégats de sol, ce qui induit une baisse du

pourcentage du N-total minéralisé (Balesdent et al.

2000). Lorsque le sol n’est plus labouré, il est ainsi sou-

vent conseillé de renforcer la fumure azotée pendant les

premières années de transition (Thomas 2007). Dans l’es-

sai d’Oberacker en Suisse (BE), Chervet et al. (2007) pré-

conisent de renforcer la fumure azotée en semis direct

pendant les cinq à sept premières années de la transition.

Nos résultats semblent indiquer que la fumure azotée

doive être renforcée au moins pendant les douze pre-

mières années de transition lorsque le cultivateur rem-

place la charrue.

Effet de la fertilisation N sur la teneur en MO du sol

Vullioud et al. (2006) dans une étude menée sur une par-

celle voisine de cet essai, ont observé un effet positif de

la fertilisation azotée sur la teneur en MO du sol. Il est

généralement admis que la fertilisation azotée contri-

bue à séquestrer du C dans le sol en augmentant la bio-

masse des résidus de culture (Khan et al. 2007; Vullioud

et al. 2006). Dans cet essai, aucun effet significatif de la

Sous-procédéNombre d’années depuis le dernier apport sur Fu3PL

ProcédésQuantité totale de matière

sèche aérienne Teneur totale en N de la

matière sèche

N100

0Fu3PL 106 ab 86 de

Fu1PL 112 a 95 abc

1Fu3PL 107 ab 99 ab

Fu1PL 106 ab 100 ab

2Fu3PL 107 ab 103 a

Fu1PL 101 b 101 ab

N60

0Fu3PL 92 cd 80 e

Fu1PL 98 bcd 82 e

1Fu3PL 92 cd 91 cd

Fu1PL 90 d 88 cd

2Fu3PL 101 bcd 94 bc

Fu1PL 91 d 85 de

Des lettres minuscules différentes au sein d’une même colonne indiquent des moyennes significativement différentes au seuil de 5 % selon le test de Fisher.

Tableau 6 | Effet du fractionnement du fumier sur la quantité totale de matière sèche aérienne et sur la teneur en N en fonction du nombre d’années depuis le dernier apport sur Fu3PL. Les résultats sont exprimés en pourcentage du témoin EminPL N100

Page 22: Edition 3 mars 2011

126

Production végétale | Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labour

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 120–127, 2011

offre en N du sol dans Fu1PL puisque la production de

MS est identique dans les deux procédés (tabl. 6). Par

contre, deux ans après l’apport, l’offre en N du sol

semble plus importante dans Fu3PL. En effet, la réponse

de la MS à la fertilisation N y est plus faible (+6 % contre

+10 % dans Fu1PL, tabl. 6) alors que la production de MS

en conditions N non-limitantes n’est pas affectée. Ces

résultats suggèrent que les effets directs du fumier sont

surestimés et les arrière-effets sous-estimés. Les arrière-

effets intervenant deux ans après l’apport d’engrais de

ferme, bien que connus (Vullioud et al. 2006), ne sont

pas pris en compte dans les recommandations de fumure

N pour des raisons de simplifications (Ryser et al. 1987).

Les résultats de l’essai semblent indiquer qu’ils devraient

être pris en considération dans le calcul des besoins en

engrais N.

C o n c l u s i o n s

•• Dans un sol labouré, l’apport de 12 t ha-1 an-1 de

fumier ne suffit pas à entretenir la teneur en MO du

sol lorsque les pailles des céréales sont exportées.

•• La réduction du travail du sol (charrue remplacée par

un cultivateur) permet d’entretenir la teneur en MO

du sol dans les systèmes sans engrais de ferme.

•• En cas de pseudo-labour, la fertilisation devrait être

renforcée par rapport à celle pratiquée avec un labour,

à court comme à moyen terme (12 ans).

•• Les apports de fumier en petites doses annuelles,

comparés à une dose équivalente apportée tous les

trois ans, ont peu d’effet sur la fertilité du sol et la

production de MS des cultures; ils ne paraissent donc

pas rentables.

•• Une réduction de 40 % de la fertilisation N n’a pas

d’effet sur la fertilité du sol.

•• Les arrière-effets des engrais de ferme intervenant

deux ans après l’apport devraient être pris en compte

dans le calcul des besoins en engrais N. n

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Page 23: Edition 3 mars 2011

127

Fertilité du sol et productivité des cultures: effets des apports organiques et du labour | Production végétale

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Sum

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Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 120–127, 2011

Soil fertility and crop productivity:

medium-term effect of organic inputs

and simplified cultivation techniques

The combined effects of the nature of

fertilizers (NPK, manure + NPK and

liquid manure + NPK), fractionation of

the manure inputs (every year or every

three years) and tillage (plowing and

reduced-tillage) associated with two

nitrogen rates (100 or 60 % of the

optimal dose) on soil fertility and dry

matter production of different crops

have been studied from 1997 to 2009 in

Changins. After twelve years of trial,

different soil analyses show that

nitrogen fertilization had no effect on

soil fertility, only the soil organic matter

and total nitrogen contents differed

significantly between treatments. In

terms of non-limiting nitrogen fertiliza-

tion, crops treated with manure

produced significantly more dry matter

than those treated with only inorganic

fertilizer. A sub-fertilization with only

60 % of the nitrogen fertilizer needs

causes a decrease in production of

7–13 % according to the treatments. In

the absence of the manure input,

reducing tillage keeps the stock of soil

organic matter, but should be accompa-

nied by a strengthening of nitrogen

fertilization. Split manure in annually

low inputs doesn’t increase the manure

efficiency.

Key words: manure, liquid manure,

nitrogen fertilization, tillage, soil

organic matter, dry matter production.

Fertilità del suolo e produttività delle

colture: effetti a medio termine degli

apporti organici e delle tecniche

colturali semplificate

Gli effetti combinati dei vari tipi di

fertilizzanti (NPK, letame più NPK e

liquame più NPK), del frazionamento

dell’apporto di letame (annuale o ogni

terzo anno) e la lavorazione del terreno

(aratura o pseudo-aratura), associate a

due differenti dosaggi di azoto (100 %

oppure 60 % della dose ottimale) sulla

fertilità del suolo e la produzione di

sostanza secca delle colture, sono stati

messi a confronto in una prova a

Changins dal 1997 al 2009. Dopo 12 anni

di prove, le analisi del suolo hanno

evidenziato che la concimazione azotata

non ha avuto effetti sulla fertilità del

suolo, per contro i contenuti di materia

organica e l’azoto totale nel suolo hanno

riscontrato differenze significative tra i

procedimenti. Nella variante di apporto

azotato non limitante, le culture hanno

prodotto un maggiore quantitativo

significativo di sostanza secca, se

accompagnate da fertilizzanti aziendali

rispetto alle varianti con soli fertilizzanti

minerali. Una concimazione di azoto

limitata al 60 % dei bisogni ha provocato

una minore produzione dal 7 al 13 % a

dipendenza della procedura applicata. In

assenza di apporti di fertilizzanti

aziendali, la riduzione della lavorazione

del suolo ha permesso di mantenere il

livello di materia organica del suolo

inalterata, però dovrebbe essere

accompagnata da un incremento della

concimazione azotata. Dividere letame in

basse dosi annuali non ha migliorato

l’efficienza del letame.

Page 24: Edition 3 mars 2011

128 Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 128–133, 2011

I n t r o d u c t i o n

Les arbres appartiennent à notre paysage rural tradi-

tionnel. Ils fournissent du bois, des fruits et d’impor-

tantes prestations écologiques car, en filtrant l’eau, ils

protègent contre l’érosion, emmagasinent le carbone et

procurent un habitat à de nombreux animaux. Nous

entendons par «agroforesterie» l’association d’arbres et

de sous-cultures agricoles ou fourragères (Krummena-

cher et al. 2008).

Une forme traditionnelle d’agroforesterie est la pro-

duction fruitière dans des vergers à haute-tige. Or, des

raisons économiques et opérationnelles, ainsi que les

imposants défrichements opérés au début des années

1960, ont conduit à une réduction massive des arbres

fruitiers à haute-tige qui ont passé de 15 millions en

1905 à 2,9 millions en 2001 (Walter et al. 2010). Malgré

les paiements directs accordés depuis le début des

années 90, le nombre d’arbres fruitiers à haute-tige

diminue encore dans le paysage rural. D’où la perte des

prestations écologiques précitées et un changement

notable de l’aspect du paysage.

Afin que chacun puisse encore bénéficier des prestations

écologiques fournies par les arbres du paysage agricole,

ART cherche des solutions pour que la combinaison

d’arbres avec des sous-cultures soit à nouveau rentable

et donc intéressante pour les agriculteurs. Pour y parve-

nir, les chercheurs d’ART se sont fondés sur les résultats

de pays voisins européens et sur des initiatives d’agricul-

trices et agriculteurs novateurs en Suisse. Dans les sys-

tèmes modernes, les arbres peuvent servir non seule-

ment à la production fruitière, mais aussi à celle de bois

d’œuvre, et ils peuvent être combinés tant avec des

grandes cultures que des herbages pour la production

fourragère (fig. 1).

M a t é r i e l e t m é t h o d e s

La productivité et la rentabilité des systèmes agrofores-

tiers modernes ont été estimées sur une période de

60 ans à l’aide des modèles informatiques YieldSAFE et

FarmSAFE (van der Werf et al. 2007; Graves et al. 2007).

ART s’est fondé sur des expériences faites en France et en

Allemagne, sur un inventaire des systèmes agroforestiers

novateurs en Suisse ainsi que sur des données concer-

nant la rentabilité des sous-cultures et des fruits dans

notre pays. Lors des simulations avec 70 arbres/ha, la

production d’une grande culture entre les rangées

d’arbres n’a été postulée que durant les 10 à 20 pre-

mières années, suivie par la production de fourrage.

Pour l’option avec 40 arbres/ha, la rotation a été pour-

suivie durant 60 ans. Des indications détaillées sur le

calcul de la rentabilité figurent dans Kaeser et al. (2010).

Les prestations écologiques de systèmes agroforestiers

ont été analysées par Palma et al. (2006) dans 42 unités

paysagères sélectionnées de façon aléatoire (statistique-

ment représentatives) en Hollande, en France et en

Espagne. L’érosion a été estimée à l’aide du modèle de

Revised Universal Soil Loss Equation (RUSLE). La lixivia-

tion des nitrates a été calculée comme étant le produit

du bilan des nitrates et de la fréquence d’échange des

eaux du sol, en admettant une fumure azotée calculée

conformément aux besoins. La fixation du carbone a été

déterminée selon Gifford (2000) en ne considérant que

la partie aérienne de la plante.

Alexandra Kaeser, Firesenai Sereke, Dunja Dux et Felix Herzog,

Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, 8046 Zurich

Renseignements: Felix Herzog, e-mail: [email protected], tél. +41 44 377 74 45

Agroforesterie en Suisse

P r o d u c t i o n v é g é t a l e

Figure 1 | Merisiers destinés à la production de bois d’œuvre en France. (Photo: ART)

Page 25: Edition 3 mars 2011

Agroforesterie en Suisse | Production végétale

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Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 128–133, 2011

La disposition des agricultrices et agriculteurs à accepter

l’agroforesterie a été déterminée lors d’un sondage

fondé sur un questionnaire structuré (Atteslander et al.

1995). Cinquante personnes, choisies au hasard en Suisse

romande et en Suisse alémanique, ont été interrogées à

propos de la productivité, de la rentabilité et des presta-

tions écologiques de l’agroforesterie. Elles se sont aussi

exprimées sur l’estime qu’elles portent aux systèmes, aux

arbres et à leurs produits, ainsi que sur les raisons de

planter des arbres à haute-tige.

R é s u l t a t s e t d i s c u s s i o n

Dans les systèmes agroforestiers modernes, les arbres

sont plantés en rangées pour faciliter le labour méca-

nique. La productivité et la rentabilité de tels systèmes

ont été calculées pour 40, voire 70 merisiers et noyers par

hectare (production de fruits et de bois d’œuvre) sur des

terres assolées et dans des herbages.

Meilleure productivité de la surface

Dans un système agroforestier, les arbres et les sous-

cultures se concurrencent dans leur quête de lumière,

d’eau et d’éléments nutritifs. Au fil du temps, le rapport

de force passe des cultures aux arbres. Cela se traduit

aussi par le rendement de la sous-culture, qui diminue

constamment avec la croissance des arbres (fig. 2).

Il ressort des simulations que les systèmes agrofores-

tiers présentent une productivité de la surface dépas-

sant jusqu’à 30% celle de cultures séparées, comme la

production de céréales en monoculture et de bois en

forêt. Le système agroforestier produit plus de biomasse

par surface car il utilise les ressources plus efficacement

Les arbres fournissent d’importantes presta-

tions écologiques. Il n’empêche qu’ils

disparaissent du paysage rural, pour des

raisons économiques et opérationnelles.

Dans les systèmes agroforestiers modernes,

les arbres sont plantés en rangées pour

faciliter le labour mécanique. Le potentiel

économique et écologique des systèmes

agroforestiers modernes en Suisse a été

examiné. La productivité de la surface, la

rentabilité et les prestations écologiques de

l’agroforesterie ont été calculées à l’aide de

modèles informatiques. Les résultats mon-

trent que les systèmes agroforestiers ont une

productivité par unité de surface qui dépasse

jusqu’à 30 % celle des monocultures, et qu’ils

peuvent devenir économiquement compéti-

tifs à long terme. Sur les terres cultivées

fertiles, les systèmes agroforestiers peuvent

diminuer l’érosion du sol jusqu’à 78 %,

réduire la lixiviation des nitrates jusqu’à

46 % et fixer jusqu’à 133 tonnes de carbone

en 60 ans. Des agriculteurs interrogés sur les

avantages et les inconvénients de l’agrofo-

resterie considèrent cette culture comme peu

productive et non rentable, mais lui concè-

dent une certaine utilité pour la biodiversité

et le paysage rural. En partant des expé-

riences d’agriculteurs pionniers en agrofores-

terie, il serait utile de mieux faire connaître

les multiples facettes et le potentiel écono-

mique des systèmes agroforestiers.

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Zeit [Jahre] Durée (années) Rendement de la grande culture avec B 40 merisiers/ha Rendement en bois d’œuvre avec B 40 merisiers/ha

Figure 2 | Evolution du rendement relatif d’une grande culture et du volume ligneux de 40 merisiers/ha destinés à la production de bois d’œuvre (B). Le rendement relatif de la grande culture se rapporte au rendement qu’il est possible d’obtenir sans les arbres. Le rendement d’une grande culture diminue à mesure que les arbres croissent. L’assolement a porté sur le colza, le blé, la prairie temporaire et le blé.

Page 26: Edition 3 mars 2011

Production végétale | Agroforesterie en Suisse

130 Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 128–133, 2011

que la monoculture. Les arbres croissent en hauteur et

bénéficient donc de plus d’espace que les grandes

cultures. Les racines des arbres pénètrent plus profondé-

ment dans le sol et profitent de l’eau et des éléments

nutritifs disponibles en dehors de l’horizon racinaire des

cultures (Dupraz et Liagre 2008; Reeg et al. 2009).

Economiquement compétitif à l’aide de contributions

La rentabilité d’un système agroforestier dépend en pre-

mier lieu des prix des produits, des paiements directs et

des coûts annuels. A cela s’ajoutent les coûts d’investisse-

ment et le taux d’actualisation, qui tient compte du fait

que le montant investi aurait aussi pu être engagé sur le

marché des capitaux. En raison des dépenses occasionnées

par l’entretien et la récolte, les coûts d’aménagement et

d’entretien des arbres destinés à la production fruitière

sont plus élevés que pour le bois d’oeuvre. En effet, ces

derniers ne doivent être ébranchés que durant les 15 pre-

mières années, afin d’obtenir des billes d’environ trois à

six mètres de long et sans noeuds. Ensuite, ils nécessitent

peu de soins. A l’aide de modèles, la rentabilité de divers

systèmes adaptés aux conditions suisses et comportant des

merisiers et des noyers (tabl. 1) a été calculée. Les systèmes

présentant une densité plus élevée (70 arbres/ha) tendent

à être plus rentables. Le noyer destiné à la production de

fruits et de bois d’œuvre semble se prêter particulière-

ment bien à son intégration dans une grande culture.

Dans les herbages, une densité plus faible (40 arbres/ha)

peut déjà apporter une plus-value économique, le merisier

paraissant plus avantageux que le noyer. Les paiements directs de compensation écologique

pour les arbres fruitiers à haute-tige ne dépendent pas

de l’âge des arbres ni du fait qu’ils servent à la produc-

tion fruitière ou pour le bois d’œuvre. La subvention est

de 15 francs par arbre et par an. En outre, on peut faire

valoir un are de surface de compensation écologique par

arbre. Combinée avec les contributions accordées pour

la qualité biologique et la mise en réseau, la somme

allouée peut aller jusqu’à 50 francs par arbre et par an.

Selon les simulations, des prix du marché favorables

pour les produits des arbres, ainsi que des contributions

de 15 francs, peuvent à long terme rendre les systèmes

agroforestiers modernes économiquement compétitifs

(tabl. 1). Si les contributions sont plus élevées, le seuil de

rentabilité est atteint plus tôt et le système agrofores-

tier est économiquement plus compétitif. Les prix sou-

vent bas des produits des arbres ou le manque de

débouchés pour les fruits d’arbres à haute-tige repré-

sentent un risque. Toutefois, les systèmes agroforestiers

sont moins touchés par les fluctuations des recettes des

grandes cultures que par celles des monocultures agri-

coles, grâce à la diversification des produits. Par ailleurs,

la date de la récolte du bois est relativement souple et

peut être reportée aux années où les prix du marché

sont favorables.

Protection du sol, des eaux souterraines et du climatLes arbres fournissent d’importantes prestations écolo-

giques en faveur de la protection du sol, des eaux sou-

terraines et du climat (Kaeser, Palma et al. 2010). En

Suisse, les problèmes liés à l’érosion et aux nitrates se

posent principalement dans les régions du Plateau où

les grandes cultures sont exploitées de façon intensive

(Prasuhn et al. 2007; Muralt et Cornaz 2005). Les ter-

rains en pente y sont particulièrement menacés par

l’érosion, tandis que les vallées sont davantage expo-

sées à la lixiviation des nitrates dans les eaux souter-

raines.

SystèmeB = bois d’œuvre F = fruits40 ou 70 arbres/ha

Valeur en capital (CHF/ha) au bout de … ans Seuil de

rentabilité10 30 60

Grande culture ou zone entre les arbres exploitée sous forme de grande culture

Monoculture 13 533 29 510 41 008 1re année

B 40 merisiers/ha 10 182 24 579 35 763 3e année

B 70 merisiers/ha 11 001 27 328 40 019 3e année

B 40 noyers/ha 11 352 21 298 38 751 2e année

B 70 noyers/ha 13 113 23 487 46 920 2e année

F 40 noyers/ha -1661 23 442 38 049 12e année

F 70 noyers/ha -7089 27 909 48 280 14e année

Herbage ou zone entre les arbres exploitée pour la production fourragère

Monoculture herbages 10 542 23 554 32 469 1re année

B 40 merisiers/ha 7903 23 106 36 629 3e année

B 70 merisiers/ha 8642 26 618 43 435 3e année

B 40 noyers/ha 8051 11 561 26 264 2e année

B 70 noyers/ha 8978 17 271 40 525 3e année

F 40 merisiers/ha -5338 18 914 37 829 17e année

F 70 merisiers/ha -12 242 19 894 46 674 20e année

F 40 noyers/ha -4439 16 322 29 361 15e année

F 70 noyers/ha -10 826 20 941 41 158 16e année

Tableau 1 | Valeur en capital de la production de bois d’œuvre de merisiers et de celle de bois d’œuvre et de fruits de noyers pour 40 ou 70 arbres/ha dans de grandes cultures ou des herbages, en admettant une contribution annuelle de 15 francs par arbre.

Les valeurs proviennent de simulations avec un taux d'actualisation de 3,5 %. Dans les premières années, les recettes se limitent à la sous-culture et le coût des plantes est important. cette perte est compensée à long terme par le revenu supplémen-taire obtenu grâce à la vente des fruits ou au capital d'épargne que représente le bois. Le seuil de rentabilité indique la période à partir de laquelle le système couvre ses coûts de fonctionnement. Assolement: colza, blé, prairie temporaire, blé. Pour obtenir des données détaillées sur le calcul des coûts complets, on se référera à Kaeser et al. (2010).

Page 27: Edition 3 mars 2011

Agroforesterie en Suisse | Production végétale

131Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 128–133, 2011

fixant le carbone, un élément qui peut être emmagasiné

durant plusieurs décennies dans les meubles en bois. Le

bois de feu y contribue également comme substitut des

combustibles fossiles (Briner et al. 2011). Un total de 113

arbres/ha fixe plus de carbone que 50 arbres/ha. Mais dans

la simulation avec 50 arbres, la quantité de carbone fixé par

arbre est plus élevée, car les arbres ont alors une meilleure

croissance (tabl. 2).

Disposition des agriculteurs à accepter l’agroforesterie

Cinquante agriculteurs choisis au hasard en Suisse

romande et en Suisse alémanique ont été interrogés sur

les avantages et les inconvénients des systèmes agrofo-

restiers. Il en résulte que ces personnes ne sont pas

familiarisées avec les systèmes agroforestiers modernes;

elles les estiment peu productifs et non rentables, mais

leur attribuent un avantage pour la biodiversité et le

paysage rural. Les systèmes agroforestiers associés à la

production de fruits dans les herbages sont ceux qui

leur plaisent le mieux. Par contre, les arbres plantés sur

les terres assolées sont très mal acceptés. Parmi les pro-

duits des arbres, ni le bois d’œuvre ni le bois d’énergie

en rotation de courte durée ne les intéresse; seuls les

fruits gagnent leur adhésion, mais là encore, dans une

mesure limitée.

Ces agriculteurs trouvent qu’il y a trop peu d’arbres à

haute-tige dans le paysage rural de leur commune et de

Suisse. 52 % d’entre eux planteraient de nouveau de tels

arbres pour utiliser doublement certaines parts de leur

surface agricole.

Lorsque les agriculteurs plantent des arbres, c’est

d’une part par idéal – par exemple pour favoriser la

biodiversité et maintenir le paysage rural – et d’autre

part par besoin, pour dispenser de l’ombre au bétail

ou pour leur consommation personnelle (fig. 3).

L’image de l’exploitation et la protection contre l’éro-

sion jouent également un rôle. Les subventions ne sont

pas une raison de planter des arbres pour 52 % des

agriculteurs interrogés. 72 % des sondés obtiennent

des subventions pour les arbres à haute-tige (15 francs

par arbre et par an). Ces montants ne sont pas suffi-

sants à leurs yeux pour couvrir le coût du travail. Seuls

26 % des interrogés indiquent recevoir la contribution

maximale qu’il est possible d’obtenir dans leur canton

pour de tels arbres.

L’attitude plutôt sceptique des agriculteurs choisis

au hasard contraste avec l’estimation des participants au

cours Agridea sur l’agroforesterie (2010). La plupart de

ces derniers s’étaient déjà penchés sur ce thème de leur

propre initiative. Certains d’entre eux ont planifié la

mise sur pied de systèmes agroforestiers novateurs ou

en avaient déjà aménagé.

Les arbres plantés en rangées le long des lignes

d’isoaltitude atténuent l’érosion du sol, car leurs racines

fixent solidement la terre à cet endroit et ils améliorent

l’infiltration de l’eau de pluie. D’après les simulations de

Palma et al. (2006), les arbres peuvent réduire jusqu’à

80 % les pertes de sol dans des sites fertiles soumis à une

exploitation intensive (tabl. 2). Le nombre d’arbres (50 et

113/ha) n’a aucune influence notable sur les pertes de sol.

Les arbres protègent les eaux souterraines de la pol-

lution par les nitrates. D’une part, les arbres plantés

dans le champ absorbent les nitrates lessivés dans le sol

supérieur, car ils s’enracinent sous les cultures. D’autre

part, s’ils sont plantés en lignes, cette partie de la sur-

face agricole n’est plus fertilisée. Selon Palma et al.

(2006), la réduction de la lixiviation des nitrates est la

meilleure sur les parcelles fertiles exploitées intensive-

ment et où la densité des arbres est la plus élevée

(tabl. 2). Lorsque la densité d’arbres est élevée, la sous-

culture est plus fortement perturbée et sa culture

s’achève donc plus tôt. En conséquence, on y épandra

moins de fumure azotée. Le potentiel d’absorption de

nitrates par les racines au-dessous des cultures n’a pas

été pris en compte dans les simulations.

Les arbres contribuent à la protection du climat en

SystèmeSite à faible rendement

Site fertile

Perte de sol annuelle moyenne [t/ha] sur des sites très menacés par l’érosion (> 3 t/ha d’érosion par an); exploitation le long des lignes d’isoaltitude (Pourcentage de réduction des pertes de sol entre parenthèses)

Parcelle sans arbres 3,8 (100 %) 4,5 (100 %)

Parcelle avec 50 arbres/ha 1,4 (-63 %) 1,1 (-76 %)

Parcelle avec 113 arbres/ha 1,3 (-66 %) 1,0 (-78 %)

Lixiviation annuelle moyenne des nitratres [kgN/ha] durant 60 ans dans de grandes cultures exploitées intensivement (fumure > 100 kgN/ha)(Pourcentage de réduction de la lixiviation des nitrates entre parenthèses)

Parcelle sans arbres 142 (100 %) 182 (100 %)

Parcelle avec 50 arbres/ha 117 (-18 %) 171 (-6 %)

Parcelle avec 113 arbres/ha 105 (-26 %) 99 (-46 %)

Fixation de carbone dans les arbres du système agroforestier après 60 ans [t/ha]

Parcelle sans arbres 0 0

Parcelle avec 50 arbres/ha 81 106

Parcelle avec 113 arbres/ha 112 133

Tableau 2 | Influence des arbres sur les pertes de sol, la lixiviation des nitrates et la fixation de carbone, selon Palma et al. (2006).

Les valeurs proviennent de simulations pour 42 paysages choisis de façon aléatoire en hollande, en France et en espagne.

Page 28: Edition 3 mars 2011

132

Production végétale | Agroforesterie en Suisse

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 128–133, 2011

C o n c l u s i o n s e t p e r s p e c t i v e s

L’agriculture est confrontée au défi de produire davan-

tage afin de couvrir les besoins de la population crois-

sante tout en ménageant les ressources naturelles et en

améliorant l’état de l’environnement. Les systèmes agro-

forestiers modernes sont plus productifs que les mono-

cultures agricoles et ils fournissent d’importantes presta-

tions écologiques. Ils contribueraient donc à trouver une

solution pour satisfaire ces attentes qui entrent en

contradiction. Les simulations montrent que des sys-

tèmes agroforestiers modernes peuvent déjà être ren-

tables dans les conditions actuelles.

Toutefois, nombre d’agriculteurs sont sceptiques à

l’idée de se remettre à planter plus d’arbres dans le pay-

sage rural. Les possibilités d’aménager des systèmes

agroforestiers et le fait qu’ils peuvent être productifs et

devenir rentables à long terme méritent d’être mieux

perçus. Il faut, par exemple, éveiller d’abord l’intérêt

pour la production de bois d’œuvre – malgré les prix rai-

sonnables du bois de qualité pour la fabrication de

contreplaqué. Car le bois d’œuvre est facile à produire, il

ne nécessite pas de machines spéciales et peut être

planté sur des terres assolées et dans des herbages. Il

peut aussi être associé à la production d’arbres fruitiers.

En Suisse, il serait nécessaire de mieux informer la pra-

tique agricole sur les possibilités que l’agroforesterie lui

offre. En outre, des essais en plein champ doivent encore

être réalisés à ce propos. Il serait donc judicieux d’obser-

ver, en coopération avec les exploitations pionnières,

des systèmes agroforestiers novateurs qui existent déjà.

Devant les difficultés d’écoulement des fruits

d’arbres à haute-tige, les systèmes agroforestiers asso-

ciés à la production de fruits sont actuellement assez

attrayants pour le marché de niche. Ces systèmes sont

économiquement recommandables, notamment s’ils

sont liés à l’octroi de contributions à la qualité biolo-

gique. Planter des arbres signifie un investissement ini-

tial considérable. Les arbres fruitiers n’atteignent leur

plein rendement qu’après plusieurs années et le bois

d’œuvre ne peut être récolté qu’après des décennies. Les

agriculteurs novateurs qui aménagent quand même des

systèmes agroforestiers se distinguent par leur envie de

tenter quelque chose de nouveau et leur plaisir à tra-

vailler avec les arbres. n

2,6 ± 1,3

3,4 ± 1,3

4,2 ± 1,4

3,1 ± 1,4

4,8 ± 1,2

3,0 ± 1,6

4,3 ± 1,2 4,8 ± 1,0

3,6 ± 1,3

3,3 ± 1,2

3,9 ± 1,2

1

2

3

4

5

6

rentab

ilité

contr

ibutio

ns

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itatio

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elle

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valu

atio

n (1

-6)

Figure 3 | Raisons pour lesquelles les agriculteurs plantent des arbres à haute-tige. 50 agricul-teurs de Suisse romande et de Suisse alémanique ont été interrogés; des moyennes ont été établies et les écarts-types ont été calculés. L’échelle d’évaluation va de 1 à 6. Les valeurs dépassant 3,5 reflètent une motivation à planter des arbres à haute-tige.

Page 29: Edition 3 mars 2011

133

Agroforesterie en Suisse | Production végétale

Ria

ssu

nto

Sum

mar

y

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 128–133, 2011

Agrosilvicoltura in Svizzera

Gli alberi nel paesaggio agricolo forniscono

importanti prestazioni ecologiche. Ciò nonostante,

per ragioni di natura economica e tecnico-aziendali,

essi scompaiono dal paesaggio rurale. Questo è il

punto d’inizio di una moderna agrosilvicoltura. Di

norma gli alberi sono piantati su terreni ad uso

agricolo a filare, in modo da non intralciare le

lavorazioni meccaniche. ART ha analizzato il

potenziale economico ed ecologico dei moderni

sistemi di agrosilvicoltura in Svizzera. Attraverso

modelli computerizzati sono stati calcolati la

produttività delle superfici, la redditività e i benefici

ambientali. Dai risultati è emerso che i sistemi di

agrosilvicoltura consentono di accrescere fino al

30 % la produttività delle superfici rispetto alle

monocolture e che a lungo termine possono

diventare economicamente competitivi. Sulle terre

aperte fertili possono ridurre l'erosione del suolo

fino al 78 % e il dilavamento dell'azoto fino al 46 %,

nonché contribuire al sequestro di 133 tonnellate di

carbonio nell'arco di 60 anni. Nell’ambito di

sondaggi svolti gli agricoltori sono stati interpellati

sui vantaggi e gli svantaggi dell'agrosilvicoltura. Da

quanto emerso i sistemi di agrosilvicoltura sono

ritenuti improduttivi e non redditizi, ma gli si

attribuisce una certa utilità per la biodiversità ed il

paesaggio rurale. Partendo dalle esperienze degli

agricoltori pionieri in agrosilvicoltura, sarebbe utile

far meglio conoscere le sfaccettature multiple ed il

potenziale economico dei sistemi di agrosilvicoltura.

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Agroforestry in Switzerland

Trees in agricultural landscapes provide important

benefits for the environment. Nevertheless, they are

disappearing from cultivated land due to economic

and operational reasons. In modern agroforestry

systems, trees are planted in rows on agricultural

land in order to facilitate mechanical operations.

The economic and ecological potential of modern

agroforestry systems in Switzerland was examined.

Productivity per hectare, profitability and environ-

mental benefits were estimated using computer-

aided models. The results show an up to 30 % higher

productivity (per unit area) of agroforestry systems

compared to monocultures. In the long term, agro-

forestry systems can become profitable. On fertile

arable land, they may reduce soil erosion by 78 %

and nitrate leaching by 46 % as well as sequester up

to 133 tons of carbon in 60 years.

In interviews, farmers were questioned about their

perception of benefits and disadvantages of agro-

forestry. Farmers rate agroforestry systems as

non-productive and unprofitable. However, they

admit a benefit for biodiversity and cultural land-

scape. Farmers need to be made aware of the many

agroforestry designs and their economic potential,

based on the experience of pioneer farmers.

Key words: alley cropping, timber and fruit produc-

tion, Prunus avium, Juglans regia, erosion, nitrogen

leaching, carbon sequestration, profitability.

Page 30: Edition 3 mars 2011

134 Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 134–139, 2011

I n t r o d u c t i o n

L’année 2010 a été déclarée Année internationale de la

biodiversité par les Nations Unies. Depuis la Conférence

de Rio de Janeiro en 1992, il est clair que l’agriculture

joue un rôle important pour la biodiversité globale.

Chez les animaux de rente agricole, on distingue

trois niveaux de diversité: entre espèces, entre races et

à  l’intérieur des races. Les produits d’origine animale

ainsi que les autres utilisations du bétail sont diversifiées

et souvent adaptées aux conditions locales. L’existence

de nombreuses races aux caractères distincts permet

d’adapter la production aux modifications de l’environ-

nement et aux exigences du marché. La diversité géné-

tique intra-raciale est nécessaire à la préservation des

races: une perte de diversité conduit à la cumulation de

tares héréditaires ainsi qu’à une diminution de la vitalité

et de la fécondité.

Plus de 90 races des espèces bovine, chevaline, ovine,

caprine et porcine ont été répertoriées en Suisse (BLW

2007), dont 25 seulement sont reconnues comme origi-

nales. La race d’Hérens appartient à ce groupe et les

menaces qui pèsent sur elle sont «à observer» (BLW

2002). Pour empêcher l’effondrement de la diversité

génétique de cette race, il est conseillé de suivre son évo-

lution dans les populations existantes. Si l’on dispose de

l’information du pedigree, le logiciel PopReport (Groe-

neveld et al. 2009) permet d’évaluer périodiquement la

diversité génétique.

La taille effective de la population est une mesure

importante de la diversité génétique. Sved (1971) et Hill

(1981) ont démontré théoriquement qu’il existe une

relation entre le déséquilibre de liaison («linkage dise-

quilibrium» ou LD) de deux loci, leur distance sur le chro-

mosome et la taille effective de la population. Cette

La race d'Hérens est une race bovine originaire de Suisse aux caractéristiques uniques. Une diversité génétique aussi élevée que possible est à la base de sa sauvegarde. (Photo: Eva Moors, Université de Göttingen, Allemagne)

Christine Flury et Stefan Rieder, Haute école suisse d'agriculture HESA, Länggasse 83, 3052 Zollikofen

Renseignements: Christine Flury, e-mail: [email protected], tél. +41 31 910 22 64

Diversité génétique de la race d'Hérens

P r o d u c t i o n a n i m a l e

Page 31: Edition 3 mars 2011

Diversité génétique de la race d'Hérens | Production animale

135

Rés

um

é

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 134–139, 2011

relation a été utilisée par plusieurs auteurs pour estimer

la taille effective de la population au moyen de mar-

queurs génétiques (Hayes et al. 2003; Tenesa et al. 2003).

Depuis fin 2007, la puce ADN Illumina 50k permet le

génotypage commercial des bovins. L’information géné-

tique détaillée obtenue permet une estimation encore

plus précise du LD et de la taille effective de la popula-

tion.

Ce travail analyse la diversité génétique de la popula-

tion suisse de la race d’Hérens. L’analyse se base d’une part

sur l’information du pedigree pour 15 années de réfé-

rence (tous les animaux nés entre 1993 et 2007); et d’autre

part, sur le génotypage de 128 animaux, qui a permis de

déterminer la taille effective de la population. Ces deux

estimations permettent premièrement d’évaluer la diver-

sité génétique actuelle de la population d’Hérens et son

évolution récente et, deuxièmement, de comparer les

estimations de diversité obtenues au moyen de marqueurs

aux estimations obtenues à partir du pedigree.

M a t é r i e l e t m é t h o d e s

Un génotypage au moyen de la puce ADN Illumina 50k

a été effectué pour 120 animaux nés entre 2000 et 2003.

Huit autres animaux nés en 1998 ou 1999 ont été géno-

typés dans le cadre d’une autre étude (Timm et al. 2010).

Après dépouillement des données, l’information de

33‘849 marqueurs génétiques (Single Nucleotid Poly-

morphisms, SNPs), a pu être analysée en détail pour ces

128 animaux.

Les paramètres principaux à déterminer étaient le

coefficient de consanguinité (F), le taux d’accroissement

de consanguinité (ΔF) et la taille effective de la popula-

tion (Ne). Ces paramètres mesurent la diversité géné-

tique de populations d’animaux de rente. Ne est inverse-

ment proportionnel à ΔF: Ne = 1/(2*ΔF).

Pour estimer la taille effective de la population sur la

base des génotypes, on considère le déséquilibre de

liaison entre paires de marqueurs liés. L’estimation a été

effectuée pour les 128 génotypes avec le logiciel Haplo-

view (Barrett et al. 2005). La formule de Sved (1971) ci-

dessous, ainsi que la même formule corrigée par le fac-

teur 1/n selon Hill (1981) étaient utilisées pour

l'estimation de la taille effective de la population.

Le coefficient r2 est une mesure fréquemment utili-

sée pour décrire le LD. E (r2) désigne l’espérance de r2, n

désigne la taille de l’échantillon, et c la distance géné-

tique entre deux marqueurs. La taille effective de la

population a été estimée de quatre façons, en variant la

La race d'Hérens est une race bovine d’ori-

gine suisse. L'évolution de sa diversité

génétique entre 1993 et 2007 a été étudiée

sur la base d'information généalogique. De

plus, 128 animaux ont été génotypés à l’aide

de la technologie Illumina 50k Beadchip, et la

diversité génétique de cette population a été

déterminée à partir des marqueurs géno-

miques obtenus. Les valeurs estimées pour la

taille effective de la population varient entre

53 et 321. Les estimations basées sur les

marqueurs génomiques sont toujours

inférieures à 100, tandis que les estimations

basées sur le pedigree sont toujours supé-

rieures à 100. Cette différence pourrait

s'expliquer par des variations dans la

complétude de l'information du pedigree, qui

était inférieure à 90 % pour les six premières

générations ascendantes de certaines années

de référence. Ce travail propose des mesures

pour préserver la diversité génétique de

cette race unique en Suisse.

E(r²)= +1(1+4Nec)

1n

Page 32: Edition 3 mars 2011

Production animale | Diversité génétique de la race d'Hérens

136 Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 134–139, 2011

manière d’approcher la distance génétique (estimation

à partir de la distance physique ou de la distance géné-

tique estimée en Morgan) ainsi que la prise en compte

de la taille de l’échantillon n (avec ou sans facteur de

correction 1/n). La distance minimale entre loci considé-

rée est de 25 kb. La formule 1/(2*c) a été invoquée selon

Hayes et al. (2003) pour déterminer le nombre de géné-

rations pour lesquelles l’estimation est valable. Des indi-

cations ultérieures sur l’estimation à base de marqueurs

de la taille effective de la population se trouvent dans

Flury et al. (2010a).

Toute l’information généalogique sur la race d’Hé-

rens de 1926 à 2007 a été aimablement mise à disposi-

tion par l’organisation d’élevage de la race d’Hérens.

L’analyse des données généalogiques a porté d’une part

sur le pedigree de tous les animaux nés entre 1993 et

2007 (années de référence), et d’autre part sur le pedi-

gree des 128 animaux génotypés pour les SNP. L’infor-

mation généalogique pour les cohortes de référence

comprend 72 232 animaux, alors que le pedigree des

128 animaux génotypés regroupe 4798 ascendants. L’in-

formation généalogique a été analysée avec des logi-

ciels courants comme CFC (Sargolzaei et al. 2006), Endog

(Gutiérrez et Goyache 2005) et PopReport (Groeneveld

et al. 2009).

R é s u l t a t s e t d i s c u s s i o n

Evolution de la diversité génétique (1993 – 2007)

La complétude de l’information généalogique est impor-

tante pour déterminer la diversité génétique. Plus l’in-

formation est complète, plus les liens de parenté entre

animaux et les paramètres de diversité génétique peu-

vent être estimés précisément. La figure 1 illustre l’évo-

lution de la complétude de l’information généalogique

sur la race d’Hérens pour les 15 années de référence.

Pour les animaux nés en 1993, plus de 90 % des ascen-

dants des six premières générations sont connus. Par la

suite, la complétude a diminué jusqu’en 2001, où elle

était inférieure à 90 % pour les six générations ascen-

dantes considérées. Ceci s’explique par l’ouverture par-

tielle du herd-book pour la race d’Evolène, et une ten-

dance des détenteurs à ne pas enregistrer l’ascendance

des veaux issus de monte naturelle (communication per-

sonnelle de E. Fellay). Depuis 2002, la complétude de

l’information a repris.L’évolution du nombre de naissances enregistrées par

année et du nombre moyen de descendants par taureau

est représentée dans la figure 2. Le nombre de naissances

enregistrées a doublé entre 2002 et aujourd'hui suite à

l’introduction de la Banque de données sur le trafic des

animaux et l’obligation d’enregistrer les veaux mâles et

femelles. Le même effet a été décrit pour d’autres races

(Flury et Bapst 2010). A présent, le nombre d’animaux

enregistrés devrait être proche du nombre réel de veaux

issus d’animaux de herd-book. En 2007, 5721 naissances

enregistrées provenaient de 453 taureaux et 5392 vaches.

Le nombre moyen de descendants par taureau était donc

de 12,3 animaux. Le nombre relativement faible de des-

cendants par taureau n’est pas surprenant vu qu’une

partie importante des fécondations (66 %) s’effectue

encore par monte naturelle (Fédération Suisse d'élevage

de la Race d'Hérens 2009).Le coefficient de consanguinité, le taux d’accroisse-

ment de la consanguinité et la taille effective de la

population sont des paramètres importants pour décrire

la diversité génétique d’une population. La figure 3

montre l’évolution du coefficient de consanguinité

moyen pour tous les animaux de 15 années de référence,

ainsi que pour leurs pères et mères.

Le coefficient de consanguinité moyen a augmenté de

1,76 % à 2,10 % entre 1993 et 2007. Néanmoins, on ne

constate pas d’augmentation entre 1999 et 2004; les coef-

0

20

40

60

80

100

1958 1962 1966 1970 1974 1978 1982 1986 1990 1994 1998 2002 2006

Com

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info

rmat

ion

géné

alog

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%

Année 1. Gen 2. Gen 3. Gen 4. Gen 5. Gen 6. Gen

Figure 1 | Complétude de l'information généalogique pour les six premières générations ascendantes pour les années 1958–2007.

2805 2671 2581 2638 2644 2489 2557 2764

3087

4501

5219 5518 5507

5697 5721

0

5

10

15

0

1000

2000

3000

4000

5000

6000

1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007

Nom

bre

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scen

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Nom

bre

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aiss

ance

s

AnnéeNo de naissances No moyen de descendants par taureau

Figure 2 | Evolution du nombre de naissances enregistrées par année et du nombre moyen de descendants par taureau.

Page 33: Edition 3 mars 2011

Diversité génétique de la race d'Hérens | Production animale

137Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 134–139, 2011

de gènes nouveaux, a également contribué à cette

baisse. De 2002 à 2007, ΔF a de nouveau augmenté. La

baisse de ΔF entre 1996 et 2001 est accompagnée d’une

augmentation de la taille effective de la population

puisque les deux mesures sont inversement proportion-

nelles. Une valeur de Ne particulièrement élevée a été

obtenue pour les animaux nés en 2001. La taille effec-

tive de la population actuelle (année 2007) est de 147.

Estimation de la taille effective de la population à partir

de marqueurs génétiques

L’évolution historique de la taille effective de la popula-

tion, estimée par quatre méthodes à partir des mar-

queurs génétiques, est représentée dans la figure 5. La

distance minimale entre loci considérée est de 25 kb, ce

qui correspond à 2000 générations en raison de la rela-

tion 1/(2×c). La population bovine à laquelle s’appli-

quent les estimations distantes de plus de 100 ans

(20 générations) n’est pas clairement définie. Ces estima-

tions représentent probablement toutes les populations

bovines des Alpes plutôt que la race d’Hérens en particu-

lier (Flury et al. 2010a).

Les estimations de la taille effective de la population

actuelle (aux 100 générations précédentes) sont sem-

blables pour les quatre méthodes (fig. 5). Toutes les

méthodes indiquent que la taille effective de la popula-

tion a diminué dans le passé et récemment (fig. 5; tabl. 1).

Une évolution semblable a été décrite pour d’autres

races (Hayes et al. 2003; The Bovine Hapmap Consortium

2009; Flury et Bapst 2010; Flury et al. 2010b).

Les estimations pour la taille effective de la population

actuelle sont de 53 ou 92, donc inférieures à 100. En

comparaison, les estimations basées sur le pedigree des

128 animaux génotypés varient entre 110 et 321 (Flury et

al. 2010a). Cette différence découle partiellement de la

profondeur limitée de l’information généalogique: le

premier animal inclus dans l’analyse était né en 1926.

ficients des pères ont même baissé pendant cette période.

L’évolution de la taille effective de la population,

estimée sur la base du taux d’accroissement de la consan-

guinité est représentée dans la figure 4. Le taux d’ac-

croissement de la consanguinité (ΔF) décrit le change-

ment du coefficient de consanguinité moyen d’une

année à l’autre et s’obtient donc à partir des résultats

représentés dans la figure 3.

Le taux d’accroissement de la consanguinité (ΔF) a

diminué dès 1996 pour atteindre un minimum en 2001.

Cette baisse est probablement due aux informations

généalogiques incomplètes, de sorte que les «vraies»

valeurs ont été sous-estimées. L’ouverture du herd-book

aux animaux de la race d’Evolène, et donc l’introduction

0,000

0,005

0,010

0,015

0,020

0,025

1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007

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guin

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année

Tous les animaux Pères Mères

Figure 3 | Evolution du coefficient de consanguinité moyen pour tous les animaux nés entre 1993 et 2007, ainsi que pour leurs pères et mères.

122 102 125 116 152 185 250

714

1667

278

625

333 179

250 147

0,0000

0,0010

0,0020

0,0030

0,0040

0,0050

0,0060

0

200

400

600

800

1000

1200

1400

1600

1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007

delta

F

Taill

e ef

fect

ive

de la

pop

ulat

ion

AnnéeTaille effective de la population

delta_F

Figure 4 | Taille effective de la population (échelle à gauche) et taux d'accroissement de consanguinité (échelle à droite) pour les ani-maux des 15 années de référence.

Nombre de générations

Méthode 1,00 2,00 3,34 5,01

Ne_1_approx 53 88 114 134

Ne_1_Morgan 53 93 120 144

Ne_2_approx 92 134 157 171

Ne_2_Morgan 92 147 169 187

Tableau 1 | Taille effective de la population actuelle (de 1 à 5 géné-rations précédentes), estimée par quatre méthodes à partir d'information génomique (Flury et al. 2010b).

Page 34: Edition 3 mars 2011

138

Production animale | Diversité génétique de la race d'Hérens

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 134–139, 2011

L’analyse du pedigree ne tient donc pas compte d’an-

cêtres communs potentiels nés avant cette date, alors

qu’il y avait très probablement déjà des relations de

parenté dans la race d’Hérens avant 1926. Ces liens se

reflètent cependant dans l’information génomique.

Même ainsi, ces différences d’estimation s’expliquent

essentiellement par la baisse récente de la complétude

du pedigree (lacunes documentaires). Il faut considérer

que toutes les estimations basées sur le pedigree suresti-

ment les tailles effectives de la population. L’estimation

basée sur les marqueurs génétiques pourrait en principe

également être faussée, par exemple par le choix acci-

dentel d’animaux apparentés. Pour éviter cela, les

128 animaux ont été choisis de manière à ce qu’il aient

tous des parents différents.

C o n c l u s i o n s

•• La diversité génétique de la race d'Hérens a reculé au

cours des dernières années, mais un peu moins que

pour d'autres populations bovines locales.

•• Les résultats basés sur le pedigree sont probablement

trop optimistes, à cause de la baisse récente de la

complétude du pedigree. Une information aussi comp-

lète que possible est une base importante pour les

programmes de sélection et pour un suivi de la

diversité génétique.

•• La race d'Hérens est une population petite et locale,

avec un taux élevé de reproduction naturelle. Le

programme d’élevage est moins sélectif que pour

d’autres races d’animaux de rente. Ainsi, la pression

sur la diversité génétique devrait être moins forte que

dans d’autres populations bovines.

•• Pour maintenir une diversité génétique aussi élevée

que possible dans cette race unique, quelques mesures

simples peuvent être proposées aux éleveurs: considé-

rer les liens de parenté au moins jusqu'à la troisième

génération ascendante dans les plans

d’accouplement ; enregistrer les généalogies dans le

herd-book; éviter l’emploi de taureaux à parenté

supérieure à la moyenne avec la population féminine,

ainsi que le croisement d’animaux avec un degré de

parenté supérieur à 12 %.

•• Un instrument simple pour les décisions d'accouple-

ment en vue du maintien de la diversité génétique et

des valeurs d'élevage a été proposé pour les chevaux

Franches-Montagnes par Hasler et al. (in press). Cet

instrument pourrait également être appliqué aux

races bovines locales. n

Figure 5 | Evolution de la taille effective de la population estimée par quatre méthodes à partir d'information génomique. Ne_1_ in-dique la formule sans correction pour la taille de l'échantillon n et Ne_2_ la formule avec correction (facteur 1/n). Le suffixe _approx indique que la distance génétique a été dérivée de la distance phy-sique et _Morgan indique qu'elle a été estimée en Morgan (Flury et al. 2010a).

0

250

500

750

1000

1250

1500

1750

2000

2250

0 500 1000 1500 2000

Taill

e ef

fect

ive

de la

pop

ulat

ion

Nombre de générations

Ne_1_approx Ne_2_approx Ne_1_Morgan Ne_2_Morgan

Page 35: Edition 3 mars 2011

139

Diversité génétique de la race d'Hérens | Production animale

Ria

ssu

nto

Sum

mar

y

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 134–139, 2011

Bibliographie b Barrett J.C., Fry B., Maller J. & Daly M. J., 2005. Haploview: analysis and visualization of LD and haplotype maps. Bioinformatics 21, 263–265.

b BLW, 2007. Tiergenetische Ressourcen der Schweiz. Broschüre im Auftrag des Bundesamts für Landwirtschaft im Zusammenhang mit der ersten technischen Konferenz für Tiergenetische Ressourcen, Interlaken, Schweiz. Accès: http://www.blw.admin.ch/themen/00013/00082/00087/index.html?lang=en.

b BLW, 2002. Die Rassenvielfalt der landwirtschaftlichen Nutztieren der Schweiz. Bericht der Schweiz zuhanden der FAO, Rom. Accès: http://www.blw.admin.ch/themen/00013/00082/00087/index.html?lang=de

b Eringerzuchtverband, 2009. Geschäftsbericht 2009. Accès: http://www.ra-ceherens.ch/D/pv.php [27.10.2010].

b Flury C., Tapio M., Sonstegard T., Drögemüller C., Leeb T., Simianer H., Hanotte O. & Rieder S., 2010a. Effective population size of an indigenous Swiss cattle breed estimated from linkage disequilibrium. Journal of Ani-mal Breeding and Genetics 127, 339–347.

b Flury C., Tapio M., Sonstegard T., Drögemüller C., Leeb T., Simianer H., Hanotte O. & Rieder S., 2010b. The use of SNP data for the estimation of effective population size in cattle breeds. Proceedings of the 9th World Congress on Genetics Applied to Livestock Production, August 1 – 6, Leip-zig, Germany.

b Flury C. & Bapst B., 2010. Genetic diversity in the Swiss Original Brown cattle population. Proceedings of the European Brown Swiss Conference, 14 – 16 octobre, Novo Mesto, Slovénie.

b Groeneveld E., Westhuizen B.v.d., Maiwashe A., Voordewind F., Ferraz J.B.S. (2009) POPREP: a generic report for population management. Gene-tics and Molecular Research 8, 1158–1178.

b Gutiérrez J.P., Goyache F. (2005) A note on ENDOG: a computer program for analysing pedigree information. Journal of Animal Breeding and Gene-tics, 122, 172–176.

b Hasler H., Flury C., Menet S., Haase B., Leeb T., Simianer H., Poncet P-A. & Rieder S., Genetic diversity in an indigenous horse breed - implications for mating strategies and the control of future inbreeding. Journal of Animal Breeding and Genetics (in press).

b Hayes B. J., Visscher P. M., McPartlan H. C. & Goddard M. E., 2003. Novel multilocus measure of linkage disequilibrium to estimate past effective po-pulation size. Genome Research 13 (4), 635–643.

b Hill W. G., 1981. Estimation of effective population size from data on linka-ge disequilibrium. Genetical Research 38, 209–216.

b Sargolzaei M., Iwaisaki H., Colleau J. J., 2006. CFC: A tool for monitoring genetic diversity. Proc. 8th World Congr. Genet. Appl. Livest. Prod., CD-ROM Communication 27 – 28. Belo Horizonte, Brésil, 13–18 août 2006.

b Sved J. A., 1971. Linkage disequilibrium and homozygosity of chromosome segments in finite populations. Theoretical Population Biology 2 (2), 125–141.

b Tenesa A., Knott S.A., Ward D., Smith D., Williams J. L. & Visscher P. M., 2003. Estimation of linkage disequilibrium in a sample of the United King-dom dairy cattle population using unphased genotypes. Journal of Animal Science 81, 617–623.

b The Bovine HapMap Consortium, 2009. Genome-wide survey of SNP varia-tion uncovers the genetic structure of cattle breeds. Science 324 (5926), 528–532.

b Timm K., Rüfenacht S., von Tscharner C., Bornand V. F., Doherr M. G., Oevermann A., Flury C., Rieder S., Hirsbrunner G., Drögemüller C. & Roosje P. J., 2010. Alopecia areata in Eringer cows. Veterinary Dermatology 21, 545–553.

Genetic diversity of the Eringer breed

The Eringer cattle breed is a local breed of Swiss

origin. The objective of this study was to analyse

the development of genetic diversity from 1993

to 2007 using pedigree information. In addition,

128 Eringer cows were genotyped for the

Illumina 50k Beadchip method and, using this

genome-wide marker information, the genetic

diversity within the population was assessed.

The current effective population size is estimated

to be between 53 and 321. For all methods

applied, the marker-based estimates were below

100, whereas the pedigree-based estimates were

above 100. One possible reason for this differ-

ence is the degree of pedigree completeness: for

animals born before 2001, the completeness over

six generations of ancestors was found to be

below 90 %, whereas for all other animals the

completeness was found at nearly 100%. In this

study, strategies to maintain the genetic diver-

sity of this unique cattle breed of Switzerland

are presented and discussed.

Key words: local cattle breed, inbreeding,

effective population size, SNPs.

Diversità genetica della razza Hérens

La razza di Hérens è una razza bovina di

origine svizzera. Lo scopo di questo studio

era quello di verificare l’evoluzione della sua

diversità genetica dal 1993 al 2007 basandosi

su informazioni genealogiche. Inoltre, 128 ani-

mali sono stati genotipizzati con l’ausilio della

tecnologia Illumina 50k Beadchip, e la diversità

genetica di questa popolazione è stata

determinata partendo dai marcatori genomici

ottenuti. I valori stimati per la misura effettiva

della popolazione varia tra i 53 ed i 321.

Le stime basate sui marcatori genomici sono

sempre inferiori a 100, mentre le stime basate

sul pedigree sono sempre superiori a 100.

Queste differenze potrebbero essere spiegate

da variazioni nella completezza dell’ informa-

zione sul pedigree che nell’anno 2001 risultava

inferiore al 90 % per le prime sei generazioni di

ascendenti. Questo studio propone misure per

preservare a lungo termine la diversità

genetica di questa razza Svizzera unica.

Page 36: Edition 3 mars 2011

140

P o r t r a i t

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 140, 2011

Martin Lobsiger gère depuis 2003 le réseau Profi-Lait, qui

regroupe des spécialistes de la recherche, de la vulgarisa-

tion agricole, de la formation professionnelle, ainsi que des

associations et des groupes d’intérêts. Profi-Lait a été créé

dans le but de soutenir les producteurs suisses de

lait.  «Grâce à des campagnes comme ‹L’optimisation des

coûts dans la production laitières› ou les ‹Championnats

suisses des foins›, les personnes concernées par une théma-

tique se rencontrent et transmettent leur savoir-faire aux

producteurs pour améliorer leur production et leur rende-

ment. Profi-Lait apporte aux producteurs de lait des com-

pétences et un savoir-faire, et soutient le transfert des

connaissances de la recherche dans la pratique». C’est ainsi

que Martin Lobsiger explique son travail pour Profi-Lait,

intégré dans la Station de recherche Agroscope Liebefeld-

Posieux ALP.

Campagne, ville et agriculture

Né dans la campagne bernoise, Martin Lobsiger a grandi

dans la ferme de ses parents à Uettligen. Il s’est toujours

intéressé de près à l’agriculture et à la production alimen-

taire. Une fois clairement déterminé que ce serait son frère

qui reprendrait l’exploitation agricole, Martin Lobsiger

décide de suivre le gymnase, puis des études en sciences

de l’environnement à l’EPF de Zurich. A cette époque, les

études d’agronomie étaient trop conservatrices à son goût.

La pensée systémique et le principe de la durabilité étaient

déjà des concepts qui lui tenaient à cœur et à cet égard les

études en sciences de l’environnement lui offraient davan-

tage de possibilités. Au terme de ses études, Martin Lobsi-

ger reste à Zurich et travaille à l’EPF pour la chaire de «Pro-

tection de la nature et du paysage», dirige pendant deux

saisons des alpages en Valais et dans l’Oberland bernois et

se forme au Strickhof comme expert en agriculture biolo-

gique. Il s’est forgé en outre une solide expérience lors de

plusieurs séjours dans une grande ferme du Dakota du Sud

aux USA. Ses connaissances des théories sur l’environne-

ment et de la pratique agricole – deux de ses thèmes de

prédilection – sont désormais très vastes.

Du temps pour les amis et les idées

Aujourd’hui, Martin Lobsiger habite à Thoune avec sa

femme et leurs trois enfants. Il consacre tout son temps

libre à sa famille et à son perfectionnement professionnel.

Les longues heures qu’il passe dans la nature avec ses

enfants compensent largement son besoin de sport. «Mal-

heureusement, en raison de douleurs chroniques, je ne

peux plus faire beaucoup de sport. Je passe donc désormais

beaucoup de temps avec mes amis», répond-il à la question

touchant à ses loisirs. Sa personnalité aimable et communi-

cative l’a prédestiné à travailler dans un environnement

professionnel – le transfert des connaissances – caractérisé

par de nombreux contacts. En plus de ses tâches de respon-

sable de Profi-Lait, il travaille à 30 % pour ALP, rédigeant

des articles de vulgarisation destinés à la pratique et orga-

nisant des manifestations.

Actuellement, il est très engagé dans l’organisation de

Nutri 11 (voir encadré) et représente ALP dans le comité

d’organisation. Parfois, il a aussi pour rôle de régler les

malentendus et de calmer les esprits. Les outils pour ces

tâches, il les trouve dans la formation continue qu’il suit

actuellement à Berne pour obtenir un Excecutive Master of

Business Administration EMBA.

«Dans Nutri 11, qui est une manifestation importante

autour de l’alimentation des plantes, des animaux et des

êtres humains, je peux m’investir corps et âme». Globalité

et durabilité dans la production des denrées alimentaires,

qualité des produits et vision à long terme sont et restent

pour Martin Lobsiger des principes importants.

Andrea Leuenberger-Minger, Rédaction Recherche Agronomique

Suisse, 1725 Posieux

Martin Lobsiger dirige la plateforme Profi-Lait

Nutri 11 – La nutrition rassembleQuatre partenaires – l’institut agricole de Grangeneuve IAG,

Vetsuisse-Faculté de l’Université de Berne, la Haute Ecole suisse

d’agronomie HESA et la Station de recherche Agroscope

Liebefeld-Posieux ALP – organisent du 17 au 19 juin 2011 Nutri 11.

Cette manifestation importante se déroulera sur le site de l’IAG

et d’ALP à Posieux et portera sur le thème de la nutrition.

«La nutrition rassemble et nous concerne tous», tel est le titre

de cet événement qui a pour but de présenter à un large public et

de façon attractive des projets de recherche menés en commun.

Page 37: Edition 3 mars 2011

141

Actualités

A c t u a l i t é s

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 141–143, 2011

N o u v e l l e s p u b l i c a t i o n s

ALP actuel

La pratique très répandue de distribuer du petit-lait aux

porcs a une longue tradition. Non seulement c’est un

produit bon marché que les animaux ingèrent volontiers,

mais en plus il est pauvre en graisse. Il influence donc

favorablement la qualité de la graisse des carcasses. Si les

sous-produits laitiers sont des aliments de qualité pour les

animaux, ils ont pourtant leurs revers. Aussi bien les concen-

trations élevées en lactose et en sodium que la grande

variabilité des teneurs en nutriments entre les divers sous-

produits laitiers ou encore leur sensibilité à l’altération

microbienne en font des produits à n’utiliser dans l’alimen-

tation des porcs que de façon ciblée. Pour en faciliter l’em-

ploi, la présente fiche technique traite des points suivants:

•• quantité de petit-lait commercialisée

•• diversité des sous-produits laitiers

•• petit-lait et microbiologie

•• principes de la stabilisation du petit-lait

•• principes à respecter lors de la distribution du petit-lait

aux porcs

•• coût du petit-lait

Peter Stoll, ALP

ALP actuel

Utilisation du petit-lait dans l’alimentation du porc Fiche technique destinée à la pratique

nº 38 | 2010

Auteur

Peter StollStation de rechercheAgroscope Liebefeld-Posieux ALPTioleyre 4, Case postale 64CH-1725 [email protected]

La pratique très répandue de distribuer du petit-lait aux porcs a une longue tradition.Non seulement c’est un produit bon mar-ché que les animaux ingèrent volontiers, mais il est en plus pauvre en graisse. Il infl uence donc favorablement la qualité de la graisse des carcasses.

Si les sous-produits laitiers sont des ali-ments de qualité pour les animaux, ils ont pourtant leurs revers. Aussi bien les con-centrations élevées en lactose et en sodium que la grande variabilité des teneurs en nutriments entre les divers sous-produits laitiers ou encore leur sensi-bilité à l’altération microbienne en font

des produits à n’utiliser dans l’alimentation des porcs que de façon ciblée. Pour en faci-liter l’emploi, la présente fi che technique traite des points suivants:

• quantité de petit-lait commercialisée• diversité des sous-produits laitiers• petit-lait et microbiologie• principes de la stabilisation du petit-lait• principes à respecter lors de la distribution du petit-lait aux porcs• coût du petit-lait

ALP

Impressum

Editeur: Station de rechercheAgroscope Liebefeld-Posieux ALPwww.agroscope.ch

Rédaction:Gerhard Mangold, ALP

Mise en page:RMG Design, Fribourg

Impression:Tanner Druck AG,Langnau im Emmental

Copyright:Reproduction autorisée sous condition d’indication de la source et de l’envoi d’une épreuve à l’éditeur.

ISSN 1660-7589

alp actuel 38_fr.indd 1 17.12.10 09:56

Utilisation du petit-lait dans l’alimen tation du porc

La Suisse n’est pas la seule à vouloir réformer les paie-

ments directs. L’Europe aussi entend réviser la politique

agricole commune (PAC). Dans ce contexte, l’Office fédé-

ral allemand de la protection de la nature a organisé un

workshop à Berlin sur le thème du «Maintien de la bio-

diversité dans les paysages agricoles – Expériences et

perspectives». La biodiversité était au cœur des débats.

Le représentant de la commission européenne (GD Agri-

culture) a déclaré que les objectifs environnementaux de

l’UE et des Etats membres n’avaient pas été atteints,

notamment dans le domaine de la biodiversité, et que la

réforme devait donc avoir pour but de mieux préserver

la biodiversité agricole. Urs Niggli (FiBL) a présenté les

prestations écologiques requises (PER) de la Suisse. Par la

suite, la discussion a fait référence à plusieurs reprises au

«modèle suisse» et une majorité a plaidé pour l’introduc-

tion, dans chaque exploitation agricole, d’environ 10 %

de surfaces destinées à la protection des ressources (dans

l’esprit des surfaces de compensation écologique). Le

représentant de l’UE veut étudier les éléments des PER

qui seraient susceptibles d’être intégrés à la réforme de

la PAC.

Felix Herzog, Paysage agricole et biodiversité,

Station de recherche Agroscope Reckenholz-Tänikon ART, Zurich

Maintien de la biodiversité dans les paysages agricoles – Expériences et perspectives

Page 38: Edition 3 mars 2011

142

M e d i e n m i t t e i l u n g e n

22.09.2010 / ART Im Netz der Pilze Zürich ist zur Pilzhauptstadt der Schweiz avanciert. Heute

wurde am Stadtrand die erste nationale Sammlung

unterirdischer Knäuelpilze eröffnet. Pilzfäden halten das

Leben auf der Erde zusammen. Denn sie liefern Bäumen,

Gräsern und Nutzpflanzen überlebenswichtige Nähr-

stoffe. Wegen ihrer enormen Bedeutung für das Ökosys-

tem eröffnete heute die landwirtschaftliche Forschungs-

anstalt Agroscope Reckenholz-Tänikon ART die erste

nationale Sammlung der so genannten Knäuelpilze, eine

Gruppe der Mykorrhizapilze.

19.09.2010 / SNG Equus helveticus – Ein weiterer Grosserfolg für das Schweizer Pferd Die zweite Ausführung des neuen Pferdefestivals Equus

helveticus zog während vier Tagen (16. – 19. September

2010) 20 000 Personen an und war ein Grosserfolg. Familien,

Reiter und Züchter aus der ganzen Schweiz und dem Aus-

land bewunderten über 1000 Pferde in sämtlichen existie-

renden Pferdesport- und Pferdezuchtdisziplinen. Das Pfer-

defestival Equus helveticus bescherte Avenches ein

einmaliges Wochenende.

16.09.2010 / ART Ammoniak aus Ställen auf der Spur Laufställe sind bedeutende Quellen von Ammoniak. Jetzt

zeigen Messungen, dass Ammoniakemissionen im Sommer

besonders hoch sind. Kühe produzieren eine Menge Kot

und Harn, die oft mehrere Stunden auf den Laufflächen

liegen. Dabei entweicht Ammoniak. Das Problem: Der

Landwirtschaft geht viel wertvoller Stickstoffdünger verlo-

ren, weil er sich buchstäblich in die Luft verflüchtigt.

Ammoniak in der Atmosphäre kommt schliesslich mit dem

Regen auf die Erdoberfläche und belastet dort als

Stickstoff¬dünger empfindliche Ökosysteme.

13.09.2010 / ACWAgroscope ACW bewertet 120 Aprikosensorten, die zwischen Juni und September geerntet wurden Das Aprikosenfest vom 6 bis 8. August 2010 in Saxon hat

viele tausend Menschen angelockt. In diesem Rahmen hat

das kantonale Amt für Obstbau im Wallis in Zusammenar-

beit mit der Forschungsanstalt Agroscope Changins-

Wädenswil ACW einen gemeinsamen Informationstag

organisiert. Anlässlich dieser Veranstaltungen konnten

neben vielen angesprochenen aktuellen Themen auch

zahlreiche Aprikosensorten vorgestellt werden. Agroscope

ACW bewertet an ihrem Standort in Conthey derzeit

120 Aprikosensorten, die in der Zeit von Mitte Juni bis Ende

September geerntet werden können.

09.09.2010 / ART Identitäts-Chip am Ohr

Das Leben eines Schweins könnte in Zukunft von der

Geburt bis zur Schlachtung mittels elektronischen Ohrmar-

ken rückverfolgt werden. Die Technologie dazu muss noch

entwickelt werden.

31.08.2010 / ART Landwirtschaftliche Einkommen sinken 2009 Die wirtschaftliche Situation der landwirtschaftlichen

Betriebe ist 2009 weniger gut als 2008. Sowohl das land-

wirtschaftliche Einkommen je Betrieb als auch der Arbeits-

verdienst je Familienarbeitskraft gehen zurück. Dies zeigen

die definitiven Ergebnisse der Zentralen Auswertung von

Buchhaltungsdaten der Forschungsanstalt Agroscope

Reckenholz-Tänikon ART. 2009 beträgt das landwirtschaft-

liche Einkommen je Betrieb 60 300 Franken gegenüber

64 100 Franken im Vorjahr (-6,0 %). Der durchschnittliche

Arbeitsverdienst je Familienarbeitskraft sinkt im Vergleich

zu 2008 um 1,3 % (von 41 700 Franken auf 41 200 Franken).

www.agroscope.admin.ch/medienmitteilungen

Actualités

C o m m u n i q u é s d e p r e s s e

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 141–143, 2011

08.02.2011 /ALP Le contrôle des aliments pour animaux basé sur les risques conduit à des contestations plus nombreuses La Station de recherche Agroscope Liebefeld-Posieux

ALP est mandatée pour contrôler tous les aliments pour

animaux de rente et de compagnie commercialisés, et

représente ainsi le premier maillon de la sécurité dans la

chaîne alimentaire. Durant l'année écoulée, ALP a pré-

levé et analysé 1430 échantillons. La proportion d'ali-

ments pour animaux de rente non-conformes s'est accrue

par rapport à l'année précédente, tandis que la situation

s'est nettement améliorée en ce qui concerne le petfood.

www.agroscope.admin.ch/communiques

Informations actuelles de la recherche

pour le conseil et la pratique:

Recherche Agronomique Suisse paraît 10 fois

par année et informe sur les avancées en

production végétale, production animale,

économie agraire, techniques agricoles,

denrées alimentaires, environnement et

société. Recherche Agronomique Suisse

est également disponible on-line sous

www.rechercheagronomiquesuisse.ch

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RecheRcheAgRonomiqueSuiSSe

Talon réponse à envoyer à:Rédaction Recherche Agronomique Suisse, Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, Case postale 64, 1725 Posieux, Tél. +41 26 407 72 21, Fax +41 26 407 73 00, e-mail: info@rechercheagronomiquesuisse.chwww.rechercheagronomiquesuisse.ch

NOUVEAU

Nom / Société

Prénom

Rue/N°

Code postal / Ville

Profession

E-Mail

Date

Signature

Recherche Agronomique Suisse/ Agrarforschung Schweiz est une publica-

tion des stations de recherche agronomique

Agroscope et de leurs partenaires. Les parte-

naires sont l’office fédéral de l’agriculture

ofAg, la haute école suisse d’agronomie de

zollikofen heSA, AgRiDeA Lausanne &

Lindau et l’ecole polytechnique fédérale de

zurich eTh zürich, Department of agricultural

and foodscience. Agroscope est l’éditeur.

cette publication paraît en allemand et en

français. elle s’adresse aux scientifiques,

spécialistes de la recherche et de l’industrie,

enseignants, organisations de conseil et de

vulgarisation, offices cantonaux et fédéraux,

praticiens, politiciens et autres personnes

intéressées.

Page 39: Edition 3 mars 2011

143

Informationen: www.agroscope.admin.ch/veranstaltungen

Actualités

Recherche Agronomique Suisse 2 (3): 141–143, 2011

M a n i f e s t a t i o n s

Mars 2011

23. – 24.03.20113. Tänikoner MelktechniktagungAgroscope Reckenholz-Tänikon ARTTänikon

Avril 2011

02.04.2011Journée d'élevage 2011Haras national suisse HNSAvenches

05.04.20116. BioforschungstagungAgroscope und FiBLWädenswil

07.04.2011AGFF-FrühlingstagungART, Inforama, Profi-LaitZollikofen

Mai 2011

05.05.2011Fachtagung: Zukunftsträchtige Futtermittel und Zusatzstoffe Manifestation commune de ETH Zurich, Vetsuisse Berne et Zurich, et d‘Agroscope Liebefeld-Posieux ALPETH Zentrum

11.05.20112nd Swiss FoodTech DaySwiss Food ResearchSisseln

Juin 2011

15. – 16.06.2011Agrartechniktage Tänikon Agroscope Reckenholz-Tänikon ARTTänikon

17. – 19.06.2011Nutri11Manifestation commune de l'Institut agricole de Grangeneuve (IAG), d'Agroscope Liebefeld-Posieux ALP, Vetsuisse Berne et Haute Ecole Suissee d'Agriculture (HESA) Posieux

L i e n s I n t e r n e t

Avril 2011 / Numéro 4

•• Carte du risque d'érosion au raster 2×2 m (CRE2),

S. Gisler et al. Université de Berne et ART

•• Identification des surfaces qui contribuent démesuré-

ment à la pollution des eaux, Martin Frey et al. Eawag

et ART

•• Modification des systèmes de détention et concept de

mesure des émissions d’ammoniac en cas d’aération

naturelle, S. Schrade et al. ART et EMPA

•• Développement des émissions azotées dans

l’agriculture jusqu’en 2020, S. Peter ETH Zürich

•• L’évapotranspiration de référence et son application en

agrométéorologie, P. Calanca et al. ART

•• Formation continue sur la prise en charge des person-

nes: renforcer les compétences pour des prestations

sociales en agriculture, E. Bolliger AGRIDEA

L'érosion fait perdre la précieuse substance

constituant la couche arable et peut causer la

pollution des eaux par de la terre, des élé-

ments nutritifs ou des substances dange-

reuses. De nouvelles cartes à haute définition

du risque d'érosion affectant la surface agri-

cole utile de Suisse mettent en évidence le

risque potentiel sur la base de paramètres lo-

caux (relief, sol et précipitations).

D a n s l e p r o c h a i n n u m é r o

Informations: www.agroscope.admin.ch/manifestations

La Revue suisse de Viticulture, Arboricul-ture, Horticulture

www.revuevitiarbohorti.ch

La Revue suisse de Viticulture, Arboriculture, Horti-

culture s’adresse en premier lieu aux milieux profession-

nels concernés par la production et la transformation des

cultures spéciales. Elle s’adresse également à un plus

large public sensible à la qualité et à la sécurité des ali-

ments, et désireux de connaître les moyens qui permet-

tront de les produire sainement et localement, demain.

La Revue suisse de Viticulture, Arboriculture, Horti-

culture est le seul périodique suisse de langue française

consacré à la recherche en cultures spéciales.

Avec un nouveau design aéré et attractif, elle publie

les résultats d’Agroscope (www.agroscope.ch), l’organe

officiel de la recherche agronomique suisse, et d’autres

instituts partenaires. Elle diffuse également les dernières

nouvelles de la formation (www.eichangins.ch) et de la

vulgarisation agricole. (www.agridea.ch)

Page 40: Edition 3 mars 2011

*Anmeldungen und Infos: / * Inscriptions et renseignements :Tel. 026 676 63 00 Fax: 026 676 63 04

[email protected]

Sechste Jahrestagung NetzwerkPferdeforschung Schweiz

15. April 20119 - 17 Uhr, Théâtre du Château, Avenches

- Öffentliche Tagung mit Vorträgen und Ausstellung- Wissenschaftlicher Austausch und Wissenstransfer zu den

Haltern, Reitern, Fahrern und Züchtern- Themen: Prävention und Krankheiten; Zucht und Genetik;

Wohlbefinden und Haltung; Definition der Bedürfnisse- Tagungsgebühren (inkl. Verpflegung):

Teilnehmer CHF 120.- (90 €)Equigarde®-Teilnehmer CHF 100.- (75 €)Studenten und Doktoranden CHF 40.- (30 €)

- Anmeldung* obligatorisch

6ème réunion annuelle du Réseaude recherche équine en Suisse

15 avril 20119 h - 17 h, Théâtre du Château, Avenches

- Journée ouverte à tout public avec exposés et posters- Echange et transmission d’un savoir scientifique aux dé-

tenteurs, cavaliers, meneurs et éleveurs- Thèmes : Prévention et maladies ; Elevage et génétique ;

Bien-être et détention; Définition des besoins- Prix (y. c. les repas) :

Participants CHF 120.- (90 €)Participants au cycle Equigarde® CHF 100.- (75 €)Etudiants et doctorants CHF 40.- (30 €)

- Inscription* obligatoire

harasnational.ch

Renseignements : / Infos:Tel. 026 676 61 11

[email protected]

Sechster Tag der Pferdezucht2. April 201110 - 17 Uhr, Schweiz. Nationalgestüt, Avenches

- Die Pferdezucht entdecken :25 verschiedene Pferde-Pony-Eselrassen

- Pferdepräsentationen- Das Gestüt im Dienst der Pferdezucht:

Beratung, Ausbildung und Forschung- Vorträge und Podiumsdiskussionen zu brennenden

Themen wie Pferderegistrierung, Raumplanung,Tierschutz, usw.

Eintritt frei, Festwirtschaft

6ème Journée d’élevage2 avril 201110 h - 17 h, Haras national suisse, Avenches

- Découvrez l'élevage :25 races de chevaux, poneys et ânes

- Présentations de chevaux- Le haras au service de l'élevage :

conseils, formation et recherche- Conférences et table-ronde sur les thématiques les plus

actuelles : enregistrement des chevaux, aménagement duterritoire, protection des animaux, etc.

Entrée libre, Cantine