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LES ANNONCES DE LA SEINE J OURNAL OFFICIEL DʼANNONCES LÉGALES - I NFORMATIONS GÉNÉRALES, J UDICIAIRES ET TECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected] FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE P our la dernière fois en sa qualité de Chef de juridiction, Jean- Maurice Beaufrère, a présidé l’Audience Solennelle de Rentrée Judiciaire du Tribunal de Grande Instance de Nantes ce 29 janvier 2015 ; en effet il fera valoir prochainement ses droits à la retraite, le Conseil Supérieur de la Magistrature devrait restituer sa proposition, pour pourvoir à son remplacement, dans quelques jours afin d’éviter une vacance de poste. Cette cérémonie réunissait de prestigieuses personnalités au premier rang desquelles Jean-Marc Ayrault ancien Premier Ministre et ancien Maire de Nantes ainsi que Dominique Raimbourg, Vice-Président de la Commission des Lois à l’Assemblée Nationale. Déclarant que « comme tous les tribunaux de France, le Tribunal de Grande Instance de Nantes est à la fois autorité de l’État et service public, Jean-Maurice Beaufrère a souhaité placer son propos « sous l’angle du service public ». Évoquant successivement le volet pénal puis le volet civil de la Justice, il a appelé de ses vœux que « soient associés des non- professionnels, choisis et formés à l’œuvre de justice pour des missions spécifiques de la justice courante », afin que la justice rendue au nom du peuple français soit « plus proche, plus efficace et plus protectrice pour reprendre les orientations de la Garde des Sceaux Christiane Taubira ». Quant à Madame le Procureur de la République Brigitte Lamy, elle a salué l’investissement de tous les magistrats qui ont contribué à une mise en œuvre rapide et efficace des réformes législatives de 2014. Soucieuse du juste équilibre entre prévention et répression, elle s’est engagée à ce que l’action du Parquet continue à s’inscrire dans le maintien d’une action publique de qualité. Jean-René Tancrède Jeudi 12 mars 2015 - Numéro 9 - 1,15 Euro - 96 e année Tribunal de Grande Instance de Nantes Nantes, 29 janvier 2015 Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35 Henri-Michel Comet, Philippe Jeannin, Véronique Malbec, Jean-Marc Ayrault, Jean-Maurice Beaufrère, Brigitte Lamy, Jean Danet et Dominique Raimbourg AUDIENCE SOLENNELLE l Tribunal de Grande Instance de Nantes - L’efficacité de la Justice par Jean-Maurice Beaufrère ............................................................................... 2 - Maintenir une action publique de qualité par Brigitte Lamy ................................................................... 5 l Cour d’appel de Rennes - La justice, une ambition patriotique par Philippe Jeannin ...................................................................... 8 - Rendre la justice meilleure en luttant contre la délinquance par Véronique Malbec ...................... 11 l Cour d’appel de Dijon - La sanction de l’office du Juge par Henry Robert ................................................................................... 15 - La sécurité publique par Jean-Jacques Bosc ........................................................................................... 17 AU FIL DES PAGES l Chronique impertinente du monde judiciaire ........................................................................................ 14 VEILLE LÉGISLATIVE l Université Paris Panthéon-Assas - Les professions juridiques. Service public et déréglementation ? par Philippe Théry, Pierre, Michel Grimaldi et Laurent Leveneur........................................................... 18 - Les réformes des professions juridiques réglementées et la Constitution par Yves Gaudemet ....................................................................................................................................... 22 l Université de Tours - La réforme des professions juridiques réglementées : péril ou renouveau ? .................................... 25 ANNONCES LÉGALES ........................................................................................................... 26 PALMARÈS l Université Paris 2 Panthéon-Assas - Diplôme d’Université « La médiation » Promotion 2014 Federico Mayor Zaragoza ......................... 30 CULTURE l Langue française et Francophonie - Enrichir la langue française par Fleur Pellerin .............................................................................. 31 l Palais Littéraire et Musical du Barreau de Paris - L’honneur de se souvenir par Christian Charrière-Bournazel ............................................................... 32

Edition Du Jeudi 12 Mars 2015

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Les Annonces de la Seine

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Page 1: Edition Du Jeudi 12 Mars 2015

LES ANNONCES DE LA SEINE

JOURNAL OFFICIEL DʼANNONCES LÉGALES - INFORMATIONS GÉNÉRALES, JUDICIAIRES ET TECHNIQUESbi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected]

FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE

Pour la dernière fois en sa qualité de Chef de juridiction, Jean-Maurice Beaufrère, a présidé l’Audience Solennelle de

Rentrée Judiciaire du Tribunal de Grande Instance de Nantes ce 29 janvier 2015 ; en eff et il fera valoir prochainement ses droits à la retraite, le Conseil Supérieur de la Magistrature devrait restituer sa proposition, pour pourvoir à son remplacement, dans quelques jours afi n d’éviter une vacance de poste. Cette cérémonie réunissait de prestigieuses personnalités au premier rang desquelles Jean-Marc Ayrault ancien Premier Ministre et ancien Maire de Nantes ainsi que Dominique Raimbourg, Vice-Président de la Commission des Lois à l’Assemblée Nationale. Déclarant que « comme tous les tribunaux de France, le Tribunal de Grande Instance de Nantes est à la fois autorité de l’État et service public, Jean-Maurice Beaufrère

a souhaité placer son propos «  sous l’angle du service  public  ». Évoquant successivement le volet pénal puis le volet civil de la Justice, il a appelé de ses vœux que « soient associés des non-professionnels, choisis et formés à l’œuvre de justice pour des missions spécifi ques de la justice courante », afi n que la justice rendue au nom du peuple français soit « plus proche, plus effi cace et plus protectrice pour reprendre les orientations de la Garde des Sceaux Christiane Taubira ».Quant à Madame le Procureur de la République Brigitte Lamy, elle a salué l’investissement de tous les magistrats qui ont contribué à une mise en œuvre rapide et effi cace des réformes législatives de 2014. Soucieuse du juste équilibre entre prévention et répression, elle s’est engagée à ce que l’action du Parquet continue à s’inscrire dans le maintien d’une action publique de qualité. Jean-René Tancrède

Jeudi 12 mars 2015 - Numéro 9 - 1,15 Euro - 96e année

Tribunal de Grande Instance de NantesNantes, 29 janvier 2015

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Henri-Michel Comet, Philippe Jeannin, Véronique Malbec, Jean-Marc Ayrault, Jean-Maurice Beaufrère, Brigitte Lamy, Jean Danet et Dominique Raimbourg

AUDIENCE SOLENNELLEl Tribunal de Grande Instance de Nantes- L’effi cacité de la Justice par Jean-Maurice Beaufrère ............................................................................... 2- Maintenir une action publique de qualité par Brigitte Lamy ................................................................... 5l Cour d’appel de Rennes- La justice, une ambition patriotique par Philippe Jeannin ...................................................................... 8- Rendre la justice meilleure en luttant contre la délinquance par Véronique Malbec ......................  11l Cour d’appel de Dijon- La sanction de l’offi ce du Juge par Henry Robert ...................................................................................  15- La sécurité publique par Jean-Jacques Bosc ...........................................................................................  17

AU FIL DES PAGESl Chronique impertinente du monde judiciaire ........................................................................................  14

VEILLE LÉGISLATIVEl Université Paris Panthéon-Assas - Les professions juridiques. Service public et déréglementation ? par Philippe Théry, Pierre, Michel Grimaldi et Laurent Leveneur ...........................................................  18- Les réformes des professions juridiques réglementées et la Constitution par Yves Gaudemet .......................................................................................................................................  22l Université de Tours- La réforme des professions juridiques réglementées : péril ou renouveau ? ....................................  25

ANNONCES LÉGALES ...........................................................................................................  26

PALMARÈSl Université Paris 2 Panthéon-Assas- Diplôme d’Université « La médiation » Promotion 2014 Federico Mayor Zaragoza .........................  30

CULTUREl Langue française et Francophonie - Enrichir la langue française par Fleur Pellerin .............................................................................. 31l Palais Littéraire et Musical du Barreau de Paris- L’honneur de se souvenir par Christian Charrière-Bournazel ............................................................... 32

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2 Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9

Audience solennelle

L’effi cacité de la Justicepar Jean-Maurice Beaufrère

Monsieur le Premier Ministre,C’est un grand honneur pour ce Tribunal que vous assistiez à cette audience solennelle. Nous

savons que vous avez du aménager votre emploi du temps pour y participer. Quand bien même vous n’en êtes plus le maire, vous êtes toujours le député d’une circonscription qui ne vous jamais mesuré sa confi ance. Et vous avez occupé, dans des temps diffi ciles, où beaucoup était à créer, l’une des fonctions essentielles et les plus prestigieuses de la République. C’est avec plaisir que nous vous voyons revenir dans ce palais de justice où, je crois, vous êtes venu pour la dernière fois pour y célébrer l’inauguration du Mémorial de l’Abolition de l’Esclavage, en présence de Madame Taubira. Soyez sincèrement remercié pour votre présence, qui manifeste votre intérêt constant pour la justice des citoyens et votre investissement personnel pour en améliorer le fonctionnement. (...)Ce palais de justice comprend officiellement deux tribunaux : un Tribunal de Grande Instance et un Tribunal d’Instance, tous deux logés dans le même bâtiment. En réalité, il en compte encore plus, qui sont cachés dans ce grand vaisseau, toujours atteint de quelques voies d’eau, que nous sommes enfi n en train de colmater.On croit connaître ces juridictions. On en ignore, en fait, les missions et le fonctionnement, même parfois ceux qui le fréquenter quotidiennement. Car au-delà d’être massif et impressionnant, Ce Tribunal est avant tout divers.Comme tous les Tribunaux de France, le Tribunal de Grande Instance de Nantes est à la fois une autorité de l’État et un service public. C’est sous l’angle du service public que je me placerai aujourd’hui, plus que sous celui de l’autorité constitutionnelle de l’État.Ces deux notions sont évidemment étroitement liées. Elles ne se confondent pas pour autant : la vision du citoyen n’est pas nécessairement la même que celle des autorités de l’État.Du point de vue du citoyen, la partie la plus visible de la juridiction est son aspect pénal. C’est de lui qu’on parle dans les médias, puisque ce sont les faits divers qui, quoi qu’on s’en défende, nous intéressent aussi, en bonne place, dans l’actualité quotidienne.

I. LA JUSTICE PÉNALE Cette justice pénale est avant tout articulée autour du Tribunal correctionnel d’abord, celui qui concerne le plus grand nombre de personnes. Il Juge, comme vous le savez, les délits – les vols, les violences, les escroqueries. La plupart du temps, c’est sur des poursuites du Procureur de la République et de son parquet, après des enquêtes de police ou de gendarmerie.En 2014, sous diff érentes formes de poursuites, le Tribunal correctionnel de Nantes a rendu près de 8 000 jugements, au cours de plus de 500 audiences.Autour d’une équipe de 4  Présidents, animée par le Premier Vice-Président Bruno Sansen, les audiences correctionnelles mobilisent l’ensemble des Magistrats de la juridiction, y compris les Juges d’instance et les Juges de proximité. Ces Magistrats sont assistés de 10 greffi ers et fonctionnaires de greff e, 6 autres préparant les dossiers à Juger, faisant en sorte que les obligations de procédure soient respectées.Avec des délais à présent revenus dans des durées raisonnables, le Tribunal correctionnel fait face à sa mission de sanctionner les auteurs d’infractions. Cette part de l’activité judiciaire, la plus discutée,  parfois jusqu’à la polémique, est aussi, paradoxalement, en partie méconnue.Quiconque a assisté à une audience correctionnelle sait la difficulté que représente la nécessaire individualisation des peines. S’il existe une politique pénale générale, qui entend mettre l’accent sur la répression de tel ou tel type d’infractions, le Jugement d’une aff aire particulière révèle quasiment toujours une complexité inattendue et pose des questions imprévues. Cette nécessaire individualisation des peines est une obligation légale. Elle impose que chacun soit jugé pour ce qu’il a fait, pour ce qu’il est et pour ce qu’il peut devenir. Elle oblige à des choix, qui sont le propre du Juge. En un mot, il faut trancher.Mais trancher à l’égard de qui ? Trancher sur quoi ?On le sait depuis longtemps, et on le vérifi e chaque jour dans ces lieux, les prévenus du Tribunal correctionnel sont aussi ceux qui sont à la marge de la société. Bien souvent, ce sont des personnalités déstructurées, fruits d’enfances, d’adolescences ou d’aléas chaotiques de la vie, qui font face au tribunal.La situation sociale n’est certes pas une excuse en elle-même. Dans des situations proches, voire

LES ANNONCES DE LA SEINESiège social :

12, rue Notre-Dame des Victoires 75002 PARISR.C.S. PARIS B 339 349 888

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Etablissements secondaires :l 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUSTTéléphone : 01 34 87 33 15l 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNETéléphone : 01 42 60 84 40l 7, place du 11 novembre 1918, 93000 BOBIGNYTéléphone : 01 42 60 84 41l 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROITéléphone : 01 45 97 42 05

Directeur de la publication et de la rédaction :Jean-René Tancrède

Comité de rédaction :

Thierry Bernard, Avocat à la Cour, Cabinet BernardsFrançois-Henri Briard, Avocat au Conseil d’ÉtatAgnès Bricard, Présidente de la Fédération des Femmes AdministrateursAntoine Bullier, Professeur à l’Université Paris I Panthéon SorbonneMarie-Jeanne Campana, Professeur agrégé des Universités de droitAndré Damien, Membre de l’InstitutPhilippe Delebecque, Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon SorbonneBertrand Favreau, Président de l’Institut des Droits de l’Homme des Avocats Européens, ancien Bâtonnier de BordeauxDominique de La Garanderie, Avocate à la Cour, ancien Bâtonnier de ParisBrigitte Gizardin, Magistrat honoraireRégis de Gouttes, Premier avocat général honoraire à la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit à l’Université Paris II Panthéon-AssasGérard Haas, Avocat à la Cour, Président de GesicaFrançoise Kamara, Conseiller à la première Chambre de la Cour de cassationMaurice-Antoine Lafortune, Avocat général honoraire à la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat à la Cour, Maître de conférence à H.E.C. - EntrepreneursJean Lamarque, Professeur de droit à l’Université Paris II Panthéon-AssasChristian Lefebvre, Président Honoraire de la Chambre des Notaires de ParisDominique Lencou, Président d’Honneur du Conseil National des Compagnies d’Experts de JusticeNoëlle Lenoir, Avocate à la Cour, ancienne MinistrePhilippe Malaurie, Professeur émérite à l’Université Paris II Panthéon-AssasJean-François Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptesGérard Pluyette, Conseiller doyen à la première Chambre civile de la Cour de cassationJacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate à la Cour, Présidente d’honneur de l’UNAPLYves Repiquet, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de ParisRené Ricol, Ancien Président de l’IFACFrancis Teitgen, Avocat à la Cour, ancien Bâtonnier de ParisCarol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International

Publicité légale et judiciaire : Didier Chotard

Commission paritaire : n° 0718 I 83461I.S.S.N. : 0994-3587Tirage : 13 576 exemplairesPériodicité : bi-hebdomadaireImpression : M.I.P.3, rue de lʼAtlas - 75019 PARIS

Copyright 2015Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus. Sauf dans les cas où elle est autorisée expressément par la loi et les conventions internationales, toute reproduction,totale ou partielle du présent numéro est interdite et constituerait unecontrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal.

Le journal « Les Annonces de la Seine » a été désigné comme publicateur offi ciel pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2015, par arrêtés de Messieurs les Préfets : de Paris, du 18 décembre 2014 ; des Yvelines, du 16 décembre 2014 ; des Hauts-de-Seine, du 16 décembre 2014 ; de la Seine-Saint-Denis, du 16 décembre 2014 ; du Val-de-Marne, du 18 décembre 2014 ; de toutes annonces judiciaires et légales prescrites par le Code Civil, les Codes de Procédure Civile et de Procédure Pénale et de Commerce et les Lois spéciales pour la publicité et la validité des actes de procédure ou des contrats et des décisions de Justice pour les départements de Paris, des Yvelines, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne ; et des Hauts-de-Seine.N.B. : L’administration décline toute responsabilité quant à la teneur des annonces légales.

- Tarifs hors taxes des publicités à la ligneA) Légales :Paris : 5,49 € Seine-Saint-Denis : 5,49 € Yvelines : 5,24 € Hauts-de-Seine : 5,49 €Val-de-Marne : 5,49 € B) Avis divers : 9,76 € C) Avis fi nanciers : 10,86 €D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,83 € Hauts-de-Seine : 3,83 €Seine-Saint Denis : 3,83 € Yvelines : 5,23 € Val-de-Marne : 3,83 € - Vente au numéro : 1,15 €- Abonnement annuel : 15 € simple35 € avec suppléments culturels95 € avec suppléments judiciaires et culturels

COMPOSITION DES ANNONCES LÉGALESNORMES TYPOGRAPHIQUES

Surfaces consacrées aux titres, sous-titres, fi lets, paragraphes, alinéas

Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de lʼannonce sera composée en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera lʼéquivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi à 4,5 mm. Les blancs dʼinterlignes séparant les lignes de titres nʼexcéderont pas lʼéquivalent dʼune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de lʼannonce sera composée en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera lʼéquivalent dʼune ligne de corps 9 points Didot soit arrondi à 3,40 mm. Les blancs dʼinterlignes séparant les différentes lignes du sous-titre seront équivalents à 4 points soit 1,50 mm.Filets : chaque annonce est séparée de la précédente et de la suivante par un fi let 1/4 gras. Lʼespace blanc compris entre le fi let et le début de lʼannonce sera lʼéquivalent dʼune ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le même principe régira le blanc situé entre la dernière ligne de lʼannonce et le fi let séparatif. Lʼensemble du sous-titre est séparé du titre et du corps de lʼannonce par des fi lets maigres centrés. Le blanc placé avant et après le fi let sera égal à une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Paragraphes et Alinéas : le blanc séparatif nécessaire afi n de marquer le début dʼun paragraphe où dʼun alinéa sera lʼéquivalent dʼune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces défi nitions typographiques ont été calculées pour une composition effectuée en corps 6 points Didot. Dans lʼéventualité où lʼéditeur retiendrait un corps supérieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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Audience solennelle

semblables, certaines personnes franchiront, parfois gravement, la limite de la loi, tandis que d’autres s’y tiendront.Le Tribunal correctionnel n’est pas seulement chargé de déclarer les culpabilités et d’appliquer les peines. Il doit aussi, et cette obligation est maintenant renforcée, décider d’une sanction qui évitera, autant que possible, la récidive.Monsieur le professeur Danet, vous qui, après avoir été avocat, avez étudié en détail la pratique de ce Tribunal sur plusieurs années et dans de nombreux dossiers, vous savez quel défi cela représente.À cet égard, et quand bien même l’idée n’est pas dénuée d’inconvénients, on peut se demander si l’autorisation, assortie de garanties, de retransmettre ou de diffuser dans leur continuité et dans leur vécu certains procès correctionnels ne serait pas, aussi, une forme d’éducation civique, à la mesure des moyens techniques et de la culture d’aujourd’hui.Les exemples en sont nombreux. La retransmission récente d’un procès d’assises réel, filmé en continu dans une affaire de meurtre par une femme battue, dans le nord de la France - procès dont il a été tiré un film actuellement sur les écrans - montre à la fois la puissance du drame et l’inévitable complexité humaine de toute affaire pénale.Si tous les métiers de justice sont par nature difficiles, celui des Juges d’application des peines est certainement l’un des plus compliqués actuellement.Les 5 Juges d’application des peines de ce tribunal, et les 7 greffiers et fonctionnaires du service, ont eu la lourde responsabilité d’aménager les peines et d’assurer le suivi, en milieu ouvert, dans une perspective de réinsertion sociale, de près de 4 000 condamnés en 2014. Ils font l’objet d’un sursis avec mise l’épreuve, d’un travail d’intérêt général.Les Juges de l’application des peines statuent également sur les aménagements de peine de près de 1 400 détenus, ayant à prendre de délicates décisions de libération conditionnelles ou de placement sous surveillance électronique.En appliquant tout simplement la loi votée par les parlementaires, les Juges de l’application des peines se trouvent nécessairement dans un domaine où le risque zéro n’existe pas. La criminologie ne peut être

considérée comme une science exacte, d’où l’on pourrait tirer une prévisibilité des comportements.Autre Magistrat pénaliste, le Juge d’instruction c’est d’abord celui qui va chercher une vérité, avec l’aide des enquêteurs de police ou de gendarmerie, appartenant la plupart du temps à des services spécialisée.Le mis en examen attend de « son » Juge, comme dirait Georges Simenon, qu’il prenne les bonnes décisions juridictionnelles et qu’il instruise un dossier complet pour la juridiction de Jugement.Car la pression de l’actualité médiatique comporte un malentendu : le Juge d’instruction, et il s’agit d’une mission fondamentale pour la justice, est seulement un préparateur d’audience. Il est Juge pour les décisions d’enquête. Il n’est pas le Juge qui déclare coupable, celui qui condamne. Il n’est plus celui qui emprisonne. Il lui appartient seulement de faire en sorte que la personne qui sera jugée le soit dans les meilleures conditions possibles d’équité et de transparence.L’aspect caché ou en tout cas moins connu, du Juge d’instruction, c’est qu’il est aussi le Juge auquel les victimes vont remettre une partie de leur destin. Mission gratifiante lorsqu’il s’agit de préparer la réparation judiciaire d’une personne qui a été victime d’un viol ou qui a subi le meurtre d’un proche. Mission oh ! combien difficile, lorsqu’il s’agit d’expliquer à celle victime que la recherche de la vérité, aussi bien conduite soit-elle, se heurte parfois des limites infranchissables et que le dommage qu’elle a subi ne pourra pas être réparé en justice. Parce que l’auteur n’a pas pu être découvert ou parce qu’il était atteint de folie telle, qu’on ne peut le rendre responsable des actes qu’il a commis.C’est dans le secret du Cabinet du Juge, en présence, avec l’assistance et sous le contrôle des avocats, qu’on doit parfois annoncer à la victime qu’il n’y aura pas lieu à Jugement, faute de preuves suffisantes. Le Tribunal de Nantes en possède, malheureusement, quelques exemples connus.Je voudrais évoquer en quelques mots la difficile mission des Juges des enfants, de leurs greffiers, mais également des services éducatifs, qu’ils appartiennent à la protection judiciaire de la

jeunesse, à l’aide sociale à l’enfance ou au secteur éducatif habilité. Tous ces professionnels s’efforcent de donner un nouvel équilibre, individuel ou familial, à des mineurs que la plupart des autres institutions, dont ce n’est évidemment pas le métier principal, ont été contraintes de délaisser ou de rejeter.Le Tribunal pour enfants de Nantes, ses six Magistrats et ses 10 greffiers et fonctionnaires de greffe, suivent 4 000 jeunes par an.Si la protection de la société doit être évidemment assurée par l’application ferme de la loi, lorsque c’est nécessaire, l’irritation, la colère même qu’on peut ressentir devant des comportements répétés de provocation et d’incivilités, le sentiment d’insécurité qui en découle parfois, les Juges des enfants les ignorent d’autant moins qu’ils sont leur quotidien.S’occuper des mineurs délinquants ou en danger, d’un point de vue judiciaire, c’est un métier de passion, mais également de raison. Au Tribunal pour enfants, plus qu’ailleurs, si les lignes doivent être claires, le sang-froid et la patience sont indispensables. On ne guérit pas de la délinquance ou de la destruction familiale en un instant. C’est le résultat d’un travail obstiné, conduit avec rigueur, mais aussi avec conviction.

II. LA JUSTICE CIVILE Complexité de la justice également en matière civile.Elle est d’un autre ordre, elle n’a pas le goût lointain de la prison. C’est la justice des drames intimes. Elle n’est pas moins importante pour les justiciables.Je commencerai par la justice des affaires familiales, parce que c’est celle qui touche le plus grand nombre de nos concitoyens. Je suis bien certain que dans cette salle, un certain nombre d’entre vous savent d’expérience de quoi je parle.Elle représente 40 % du total des affaires dont est saisi le Tribunal de Grande Instance en un an. Ce sont près de 4 500 affaires que les 6 Juges des affaires familiales et les 8 greffiers et fonctionnaires de greffe ont à Juger chaque année. Autrement dit, ce secteur de la justice concerne chaque année, dans le ressort du Tribunal de Grande Instance de Nantes, plus de 9 000 personnes, et très

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largement au-delà de 10 000 si l’on y inclut les enfants et les proches concernés par ces diff érends. C’est comme si, chaque année, toute la population de Pornic ou de Chateaubriant avait à faire au Juge des aff aires familiales.Les Magistrats et fonctionnaires de ce service traitent ces aff aires avec une grande attention et avec toute l’humanité requise. Mais là non plus, il n’existe pas de solution magique et le palais de justice n’est pas le théâtre des miracles. Il est le lieu d’un travail sérieux.Cette justice là concerne les divorces, avec leurs conséquences humaines également patrimoniales, les problèmes d’autorité parentale, de droits de visite et d’hébergement, de pensions alimentaires ou d’adoption, de délégation d’autorité parentale.Mais dans cette justice cachée ou méconnue dont je parlais tout à l’heure, il y a aussi, dans la compétence du Juge aux aff aires familiales le suivi des mineurs sous protection de justice, mineurs orphelins de père ou de mère, ou des deux.Qui sait qu’ils sont 2 200 dans ce seul tribunal, dont la défense des intérêts repose sur la vigilance d’un Juge aux aff aires familiales et d’une greffi ère ?Des intérêts pécuniaires, mais également humains, par voie de conséquence, importants sont en jeu, dans cette justice du quotidien, qui n’est pas publique et qui a tellement d’importance pour les intéressés.Il faut lire le courrier des personnes adressés au service des aff aires familiales en matière de tutelle des mineurs et, surtout, les lettres des mineurs ou des anciens mineurs protégés, qui parfois, et à juste titre, demandent des comptes sur la manière dont l’État a assuré, en ce qui les concerne, le service public qui leur était dû.On y comprend pourquoi c’est un Juge qui est chargé de cela. Car il s’agit de défendre les droits d’une personne vulnérable qui, nous l’avons évoqué récemment avec le Bâtonnier Calvart à la maison de l’avocat, ne bénéfi cient que très exceptionnellement de l’assistance d’un conseil.Dans le même ordre d’idées, la justice de l’état des personnes et de l’état civil de ce Tribunal est également méconnue. A tort.

Certes, quelques spécialistes en ont entendu parler. On sait parfois que le Tribunal de Nantes, et sa première Chambre en particulier, ont une compétence spécifique dans ces matières, compétence nationale et régionale, selon les matières.Il s’agit de matières complexes, qui mettent en jeu des questions de droit international privé. Chaque année ce sont plus de 1500 aff aires qui sont traitées par les 4 Magistrats et les 3 greffi ers de la première Chambre, en liaison étroite avec un service du parquet, qui n’a pas d’équivalent en France dans ce domaine.Derrière les chiffres, au-delà du maquis des conventions internationales, de leur interprétation et de leur application, se trouvent aussi des situations humaines parfois dramatiques et la plupart du temps douloureuses.Des familles sont séparées, des états civils sont incertains, voire inexistants, de sorte que certaines personnes n’ont plus véritablement d’existence légale. C’est dans ce cadre que le Tribunal a eu à statuer sur la question de l’état civil des enfants nés à l’étranger, de mères porteuses.Cette juridiction est non seulement celle du droit de l’état civil, elle est aussi celle des confl its de fi liation. Je rappellerai seulement ici le Jugement, puis l’arrêt de la Cour d’appel de Rennes, qui ont été rendus dans l’aff aire de cet enfant dont la mère a accouché sous X, qui était placé en vue de son adoption, alors que son père biologique, qui l’avait reconnu, l’ignorait.A qui « rendre » l’enfant ? Une aff aire à dimension de mythe, qui s’apparente à un Jugement de Salomon.Toutes les affaires de cette nature ne sont pas d’une telle intensité humaine. Mais elles entraînent toutes des conséquences profondes, individuelles ou familiales, sous la technique du droit.Les Juges de la première Chambre civile, ceux de la Chambre de la propriété et de la construction savent y faire face avec compétence, ainsi que les greffi ers et fonctionnaires de greff e qui les assistentOn peut seulement regretter que les Chambres civiles de ce tribunal, comme celles de la majorité des

juridictions en France à présent, deviennent l’une des variables d’ajustement des charges de travail. Quand on ne peut plus tout faire, ce sont trop souvent les Magistrats des Chambres civiles qu’on met à contribution, alors que le travail qu’ils font est important pour les justiciables. En disant cela, je plaide d’une certaine manière coupable, puisque je pratique également, et à regret, ces choix qu’on devrait éviter.Pour être sinon complet, du moins pour dresser un panorama suffi sant de la justice nantaise, je devrais parler également de bien d’autres formations de Jugement. Elles ont toutes leur nécessité, elles ont toutes leurs compétences, elles répondent toutes à des attentes réelles des justiciables.Ce sont ces attentes qui rendent diffi cile d’engager une véritable déjudiciarisation. On s’est essayé à de nombreuses reprises à l’exercice, et encore récemment dans la préparation, d’une qualité généralement remarquable, aux débats de la justice du XXIème siècle initiés par la Garde des Sceaux.Dans le domaine civil, je devrais parler ainsi des décisions du Juge de l’exécution. C’est le Magistrat qui a, notamment, le pouvoir de statuer sur la validité des saisies, de comptes ou de biens, d’accorder éventuellement des délais de paiement et de conduire les procédure de saisies immobilières. Est-il besoin de dire ce que représente, pour les débiteurs, pour leur famille, la saisie d’un bien immobilier, dont on n’a pas pu assurer le paiement ?Plus d’une centaine de ces procédures sont engagées chaque année devant le Tribunal de Grande Instance de Nantes, tandis que le Juge de l’exécution est appelé à rendre près de 500 Jugements par an sur les questions d’exécution des décisions de justice ou des actes authentiques ayant valeur exécutoire.Je ne ferai qu’évoquer ici le nom du Tribunal d’Instance – que les Magistrats et fonctionnaires de cette juridiction m’en excusent - qui mériterait, à lui seul, qu’on en rappelle les nombreuses compétences, souvent exclusives, de cette juridiction  ; qu’il s’agisse du droit des baux

Au premier rang, Jacques Lapalus, Jean-Michel Calvar et Bernard Morand

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Maintenir une action publique de qualitépar Brigitte Lamy

C(...)e début d’année nous a tragiquement rappelé que nous devons, en priorité,rester attentifs à la défense

de toutes nos valeurs démocratiques, de toutes nos libertés qui doivent pouvoir s’exercer dans le respect dû à chacun.L’audience de rentrée peut paraître comme un rituel mais c’est surtout un moment privilégié pour vous exposer nos activités, vous faire part de nos constats, nos projets,nos diffi cultés également. Elle est là pour rappeler que la justice est rendue au nom du peuple français dont vous êtes ici les représentants.

I. ACTIVITÉS ET CONSTATS (...) l Nous devons faire face à une criminalité organisée, touchant notamment au trafic de stupéfiants, qui alimente la Juridiction interrégionale spécialisée de Rennes.l Nous devons faire face à des épisodes de violences plus ou moins explicables dans les quartiers sensibles de l’agglomération.l Nous devons faire face à une délinquance très mobile, à l’origine de multiples cambriolages touchant notamment Nantes et ses communes avoisinantes(17 % d’augmentation) et ce malgré la détermination des enquêteurs et les résultats obtenus qui ont permis de démanteler plusieurs équipes.l Nous devons faire face à une violence inadmissible manifestée lors d’expression collective de revendications, cette violence étant particulièrement dirigée envers les forces de l’Ordrel Nous devons également faire face à la délinquance quotidienne faire de vols, violences ou liées à la circulation routière.Nous y avons fait face avec vous, Mesdames et Messieurs les policiers et gendarmes. La lutte contre la criminalité est le fruit d’un travail collectif,d’un travail de synergie, et je rends hommage au vôtre qui garantit notre sécurité avec une pensée particulière pour votre institution qui a payé encore récemment un si lourd tribu à une folle violence.Les Magistrats du Parquet ont apporté une réponse dans 95 % des cas à ces infractions lorsque celles-ci étaient poursuivables et ils l’ont fait avec discernement. Plus de La moitié de ces réponses consiste en une alternative aux poursuites.45 % des aff aires qui sont poursuivies en correctionnel le sont par la voie de l’ordonnance pénale,10 % par la voie de la comparution préalable de culpabilité,

ce qui traduit une augmentation de 44 % de ce type de poursuite en 2014. Seules les aff aires nécessitant une réponse très ferme ou un débat sont orientées vers une audience publique.Grâce à cette politique et à une gestion rigoureuse de l’audiencement, nous pouvons aujourd’hui Juger des dossiers d’instruction renvoyés devant le Tribunal depuis moins d’un an. L‘ancienneté de ce type de dossiers était encore de 18 mois fi n 2013.En dépit des difficultés la juridiction et le Parquet de Nantes ont su évoluer :l dans le domaine de la dématérialisation, preuve de la modernisation de l’institution judiciaire et notamment l l’expérimentation du portail chorus pro au sein de la Cour d’appel qui permet un traitement dématérialisé des mémoires des frais de justice.l L’extension aux services de police des échanges inter applicatifs, système permettant l’échange de données entre nos différents programmes informatiques et qui était déjà une réalité avec les services de gendarmerie l L’expérimentation d’un envoi dématérialisé des fi ches de casier judiciaire entre le Parquet de Nantes et le casier judiciaire national l Évolution dans le domaine de l’aide aux victimes. L’association d’aide aux victimes est devenue un partenaire incontournable. Elle est systématiquement requise par les services de la permanence dans les affaires de comparution immédiate en présence de victimes. Dans les

affaires ne donnant pas lieu à déferrement les coordonnées des victimes lui sont transmises pour prise de contact. C’est ainsi que l’Association Départementale d’Aide aux Victimes d’Infractions (ADAVI a apporté en 2014 son aide à 668 victimes dans le cadre d’une réquisition du Parquet (soit une augmentation de 21,45 % par rapport à 2013).Le 25 février 2014 a été signée une convention entre la juridiction, le Barreau et l’association d’aide aux victimes qui a pour fi nalité de proposer aux victimes un accompagnement tout au long de la procédure de la phase d’enquête à celle de l’exécution de la décision rendue. Un rendez vous est désormais fi xé aux victimes le jour même de l’audience afi n de faire le point sur l’exécution du Jugement et constituer, dans la plupart des cas un dossier Sarvi ;l Évolution dans le domaine de l’organisation de la permanence par la création d’un bureau de suivi des enquêtes en septembre 2014.l Deux Magistrats sont affectés à ce nouveau service qui a pour vocation de suivre les enquêtes préliminaires nécessitant plusieurs prises de contact avec le Parquet dans les aff aires criminelles et les aff aires délictuelles graves, notamment celles liées à la criminalité organisée.Le Magistrat informé dès le début de la procédure a vocation à la suivre jusqu’à la prise de décision. L’enquêteur a donc un interlocuteur unique, ce qui évite une perte de temps ; Le Magistrat assure un suivi qui lui apporte une bonne connaissance de l’aff aire, ce qui facilite une prise de décision adaptée.

d’habitation, du droit de la consommation, du crédit, du surendettement des ménages, du départage prud’homale ou des mesures de tutelle et de protection des majeurs (près de 9 000 en cours à Nantes), toutes ces procédures sont, au premier chef, la justice de proximité et celle du quotidien. Cette juridiction mérite certainement une attention et des moyens supérieurs à ceux dont elle dispose actuellement.Enfi n, pour ne pas vous froisser, Monsieur le Premier Président, et vous éviter de commencer l’année par l’exposé d’une catastrophe judiciaire annoncée, je n’évoquerai que pour mémoire le nombre de 5 000 procédures en attente de Jugement, vers lequel le Tribunal départemental des aff aires de

sécurité sociale de la Loire Atlantique se dirige inexorablement, dans les conditions que vous connaissez.La justice de l’État, dite curieusement « régalienne » dans un pays si profondément attaché à la République et à la démocratie, comme Il vient de le rappeler avec éclat dans des circonstances dramatiques, doit devenir, véritablement, celle des citoyens, c’est-à-dire une justice plus proche, une justice plus effi cace, une justice plus protectrice, pour reprendre les orientations de la Garde des Sceaux.On connaît le courant, malheureusement très minoritaire, auquel j’appartiens, qui considère comme une nécessité, à bien des égards, d’associer

plus largement, dans un vaste programme, des non professionnels, choisis et formés, à l’œuvre de justice, pour des missions spécifiques de la justice courante. L’efficacité est à ce prix.En attendant, à l’instar des 5  000 scolaires ou étudiants qui, chaque année viennent au palais de justice se rendre compte, sous l’égide du Conseil Conseil Départemental de l’Accès au Droit (CDAD), de ce qu’est la justice qui est rendue dans ce palais, en leur nom comme au nom de l’ensemble du peuple français, je ne peux que vous inviter à en pousser plus souvent les portes pour vous rendre compte, par vous-même, de ce qu’elle est vraiment, cette justice nantaise. (...)

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La spécialisation des Magistrats leur permet de mieux appréhender les phénomènes de délinquance du ressort, Malgré tout je rappelle que le Magistrat du Parquet a pour rôle de donner une suite à l’enquête et il n’a pas vocation à devenir un directeur d’enquête, fonction qui doit être assurée par les personnels d’encadrement des services de police et de gendarmerie L’année 2014 a été jalonnée par la mise en œuvre de réformes importantesEn premier lieu la loi du 27 mai 2014 qui a transposé les directives européennes sur le droit à l’information dans les procédures pénales et l’accès à l’avocat. Les mesures concernant l’accès à l’avocat sont applicables depuis le 1er janvier 2015. Elles permettent que la personne entendue dans le cadre de l’audition libre soit assistée par un avocat dans des conditions similaires à celles applicables dans le cadre d’une garde à vue. Cette réforme va imposer au Barreau des charges nouvelles qu’il est diffi cile d’évaluer.Ces mesures sont aussi sources de charges nouvelles pour les services d’enquête. Le formalisme des enquêtes est de plus en plus lourd. Le rapport déposé par la mission conduite par Monsieur Beaume, Procureur général, chargée de réfléchir sur la transposition des directives européennes sur l’introduction du contradictoire dans les enquêtes pose à ce sujet une question essentielle: faut il garder le même formalisme dans toutes les enquêtes: celles sur les vols simples ne pourraient elles pas être simplifi ées en comparaison de celles portant sur des crimes ?La loi du 4 aout 2014 sur l’égalité réelle entre les hommes et les femmes Ce texte pose en principe l’éloignement du conjoint violent du logement du couple et consacre le dispositif du téléphone de très grand danger.Si notre département n’est pas encore doté de ce téléphone,l’esprit de cette loi guidait déjà l’action du Parquet de Nantes et je veux ici remercier,non seulement Madame Gazzera, substitut, qui s’implique beaucoup et avec compétence dans cette lutte contre les violences familiales, mais aussi, Madame Prouteau, déléguée au droit des femmes, l’association d’action éducative, les différentes associations avec lesquelles nous pratiquons un partenariat de grande qualité.

L’éloignement du conjoint violent, les stages de responsabilisation sont déjà une réalité. En 2014, nous avons signé avec les services de la préfecture, de police et de gendarmerie un protocole visant à améliorer l’accueil de la victime, sa prise de plainte et sa prise en charge par les services d’aide aux victimes- la loi du 15 aout 2014 sur la prévention de la récidive et l’individualisation des peines qui vise à- poursuivre dans la recherche d’une meilleure individualisation des peines même si je dois souligner qu’à Nantes la politique d’aménagement des peines est déjà dynamique (70 % des peines fermes sont aménagées avant toute exécution et 50 % sont aménagées en cours d’exécution))Cette loi vise aussi àl renforcer les droits des victimes ;l élargir la palette des sanctions en créant une nouvelle peine: la contrainte pénale ;l éviter les sorties de prison sans contrôle. S’il est légitime d’éviter au maximum les sorties « dite sèches » cette réforme alourdit la charge des Juges d’application des peines et des parquets à moyens

constants. Elle nécessite la création d’audiences supplémentaires en commission d’application des peines ou avec débats contradictoires afi n que les situations pénales soient examinées au 2/3 de la peine comme le veut dorénavant la loi ;Mais on ne peut pas supprimer la prison alors, n’en faisons pas des pourrissoirs  : que l’offre d’enseignement y soit suffi sante, que le travail y soit off ert en priorité : c’est un moyen de réparation envers les victimes et aussi de préparation à la sortie. L’exemple est donné par le centre de détention où l’off re de formation professionnelle est développée -  enfin la loi du 13 novembre 2014 qui a renforcé les dispositions en matière de lutte contre le terrorisme et qui veille à davantage organiser la circulation de l’information. Nul besoin malheureusement d’insister aujourd’hui sur l’importance de cet échange d’informationToutes ces lois ont bien sur fait l’objet de nombreuses circulaires qu’il a fallu étudier, analyser,digérer, expliquer, mettre en œuvre. Il a fallu tenir des réunions, créer et diff user de nouveaux imprimés. Je tiens à saluer l’investissement de tous, Magistrats, avocats, enquêteurs,agents de l’administration pénitentiaire qui ont contribué à une mise en œuvre rapide et effi cace de ces textes nouveaux. (...)

II. PERSPECTIVES ET ATTENTES l L’année 2015 marquera le 70ème anniversaire de l’ordonnance du 2 février 1945 dont de nombreux articles ont été plusieurs fois remaniés.Ces multiples réformes ont conduit à rendre peu lisibles les procédures. Il faut être un spécialiste pour s’y retrouver.La délinquance des mineurs donne lieu à des prises de position très radicales. Alors que certains qualifi ent les autres d’angéliques, les seconds voient dans les premiers des vilains répressifs.Espérons que les différents points de vue trouveront à se concilier afin d’aboutir à un texte visant à mieux accompagner le mineur délinquant en tenant compte de tous les intérêts en présence.Et surtout, faisons confi ance à l’expérience de nos Juges pour enfants qui savent que, ni une totale compassion envers le mineur, ni une réponse uniquement répressive ne sont des solutions adaptées à la réalité de ce type de délinquance très particulier dont les causes sont multiples.Ph

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Nous pouvons espérer que l’année 2015 soit celle où l’on pourra enfin dépasser le stade de la réflexion en matière de déjudiciarisation. Depuis des années nous sommes destinataires d’études ou de rapports sur le sujet car il est clair que l’institution judiciaire ne peut pas prendre tout en charge mais ceux ci ne sont pas suivis de véritables projets de réforme. Une seule question doit se poser : l’intervention d’un Magistrat est elle nécessaire pour répondre à telle ou telle situation, pour traiter tel ou tel problème. Ne peut on pas recentrer l’activité des Magistrats sur des contentieux dont la technicité et les enjeux légitiment qu’ils lui soient soumis.Régulièrement des décisions de la Cour de cassation ou du conseil constitutionnel viennent ternir le moral du Ministère public car limitant son pouvoir dans le cadre de l’enquête.Après la décision de la Cour de cassation concernant la géolocalisation fi n 2013, le conseil constitutionnel a, en avril 2014,déclaré contraire à la constitution l’alinéa de l’article 41-4 du code de procédure pénale qui donnait pouvoir au Procureur de la République d’ordonner sous certaines conditions la destruction des biens meubles saisis. On ne peut s’empêcher de penser que nos juridictions internes vont,dans certains domaines,plus loin que la Cour Européenne des Droits de l’Homme (qui a par exemple jugé que la géolocalisation ne devait pas nécessairement être eff ectuée sous le contrôle d’un Juge alors que la Cour de cassation a dit le contraire fi n 2013). Et qu’elles lui prêtent des exigences qui ne sont pas les siennes.Cette surenchère doit prendre fi n au risque de rendre les fonctions de Magistrat du Ministère public beaucoup moins attractives Reste que la Cour Européenne des Droits  de  l’Homme vient de rappeler sa jurisprudence en matière de garde à vue, dans

l’affaire du Ponant, insistant sur le manque d’indépendance du parquet.Les Magistrats du Parquet attendent toujours la réforme constitutionnelle promise de leur statut, réforme qui doit affirmer avec force leur indépendance et l’autorité indiscutable de leurs décisions.Lorsque j’ai travaillé sur ce discours la semaine dernière, mes propos trahissaient mon pessimisme sur la question J’avais écrit :« Plus les années passent plus cette réforme semble s’éloigner, malgré le consensus sur sa nécessité et malgré la détermination de Madame le Garde des Sceaux ».Mais les propos tenus le 20 janvier dernier par Monsieur le Président de la République lors de ses vœux aux corps constitués m’ont redonné espoir. Il a exprimé le souhait que Madame la Garde  des  Sceaux reprenne le projet de loi constitutionnelle visant à garantir l’indépendance du Parquet qui nous mettrait à l’abri de certaines décisions de la Cour Européenne des Droits  de  l’Homme. Il estime que ce texte devrait aujourd’hui réunir une large majorité de parlementaires. (...)L’année 2015 sera consacrée à la consolidation des acquis en gardant à l’esprit que le Magistrat du Parquet doit d’abord se consacrer à la défense des plus fragiles et au respect des libertés individuellesC’est dans ce cadre que sera mené le combat contre le racisme, la xénophobie, l’homophobie et l’antisémitisme et qu’une attention soutenue continuera à être portée à la situation des victimes. Notre Pays devra, en la matière, transposer avant le 16 novembre la directive européenne adoptée le 25 octobre 2012. Cette directive garantit que les victimes soient reconnues et traitées avec respect,qu’elles reçoivent une protection

et un soutien adéquats. Elle renforce le droit à l’information à destination des victimes et des membres de leurs familles ainsi que leurs droits procéduraux.Dans un juste équilibre entre prévention et répression l’action du Parquet continuera à être orientée versl la défense des femmes et enfants victimes de violencel la lutte contre la délinquance routière car si 2014 a vu une petite diminution du nombre de tués sur nos routes, nous comptons plus de cent blessés supplémentaires. Toutes ces vies abîmées, parfois détruites par un non respect des limitations qu’elles touchent à l’alcool ou à la vitesse.Une réponse particulièrement ferme sera apportéel à tout acte de violences contre les forces de l’Ordre et personnes exerçant une mission de service publicl à tout acte commis dans le cadre d’un réseau organisé notamment en matière de cambriolages.L’action du Parquet continuera à s’inscrire dans le cadre du partenariat. La conduite de l’action publique n’est pas une course en solitaire. Elle doit au contraire se faire en maintenant des contacts réguliers avec le préfet du département et les élus dans un cadre respectueux des prérogatives, attributions et spécificités de chacun.La participation du Parquet aux différentes instances de prévention de la délinquance mises en place par les collectivités locales est indispensable à une parfaite connaissance des diffi cultés et des attentes des habitants.Elle lui permet également d’expliquer, de défendre les orientations de son action, voire de dissiper certaines incompréhensions.La poursuite de ce partenariat assurera le maintien d’une action publique de qualité. (...) 2015-108

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Philippe Jeannin, Jean-Maurice Beaufrère, Brigitte Lamy et Véronique Malbec

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Audience solennelle

La justice, une ambition patriotiquepar Philippe Jeannin

L(...)es enjeux nationaux étaient trop forts ces derniers jours pour que notre audience solennelle ne soit retardée de quelques

jours pour faire place à cet instant de communion très fort et de deuil national. Veuillez nous excuser des inconvénients occasionnés par ce report qui nous privent en raison de nombreuses obligations, ce jour, d’une partie importante de ceux qui avaient répondu à notre invitation.En quelques jours nous avons vécu la mort de nos concitoyens, journalistes et collaborateurs de « Charlie Hebdo », policiers, défenseurs des libertés que l’extrémisme le plus aveugle veut détruire, et aussi la mort de personnes sans défense tuées au hasard d’une prise d’otage, dans un lieu choisi pour exprimer l’antisémitisme le plus abject. Nous avons vécu aussi le courage de ceux qui ont fait front pour protéger les personnes et nos valeurs républicaines. Nous avons grandi aussi dans l’expression solidaire du pays pour la défense de ces mêmes valeurs. Alors que le deuil est encore présent comment ne pas faire apparaître nos problèmes quotidiens comme dérisoires à côté des enjeux liés à ces événements. Depuis quelques années, je commence toujours ce discours en cherchant quelque interprétation ou symbole dans le choix graphique de la couverture du document qui vous est remis pour vous dire en quelques chiff res notre activité, et qui avait été préparé bien avant ces jours tragiques. Car si le fond est sombre, de couleur noire, ce n’est que pour faire mieux ressortir, la lumière du message et des mots que nous avons voulu y inscrire et qui rappellent avec obstination les valeurs que nous portons au service de la justice. Ce service d’une justice soumise aux lois d’un état démocratique, que nous voulons impartiale, ouverte aux hommes de toute conditions, aux droits de la défense et qui place l’homme au centre de ses valeurs, n’a jamais été aussi exigeant.

C’est pourquoi je salue en ce début d’année la détermination, l’action et l’engagement quotidiens des Magistrats, fonctionnaires, avocats, membres des professions judiciaires et juridiques, médiateurs et conciliateurs et de tous ceux qui œuvrent pour la justice. Je pense tout spécialement en ce début d’année aux policiers et gendarmes qui ont encore payé un lourd tribut à la défense des libertés et à la protection de nos concitoyens. Je souligne tout particulièrement le travail inlassable, diffi cile, complexe, des personnels de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse. Je pense au concours important du secteur associatif à ses missions pour l’application de mesures pré ou post-sentencielles ainsi que dans le domaine de l’aide aux victimes et de l’accès au droit. C’est donc par des remerciements à tous ceux que je viens de citer, à tous ceux que j’ai pu oublier que je voulais ouvrir ce propos.Car comme je l’annonçais en 2014, nous avons du batailler au cours de cette année, dans un contexte de très fortes contraintes des moyens. Mais partout où je me suis déplacé à la rencontre des juridictions

du ressort, j’ai trouvé certes, parfois une certaine lassitude mais aussi, combien d’eff orts accomplis pour faire vivre un travail collectif et reculer les individualismes. J’ai rencontré une mobilisation partout très solidaire pour répondre à la demande toujours plus forte de justice émanant de nos concitoyens. Il n’est pas de démocratie sans justice capable de faire face, tant au regard des évènements que nous venons de vivre pour être au centre du combat pour la protection de nos valeurs républicaines que comme élément d’équilibre dans les relations entre les hommes dans une société où justement les difficultés économiques pèsent également, créent des inégalités et rendent donc ces relations plus fragiles.Et nous tenons chacun notre part de responsabilité dans ce combat parce que nous avons choisi non pas seulement un métier mais un engagement pour la justice.Il est vrai que les diffi cultés ne sont pas minces. A tel point que la conférence nationale des premiers Présidents de cours d’appel a encore, le 16 décembre dernier, « appelé l’attention des

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Philippe Jeannin

Cour d’appel de RennesRennes, 13 janvier 2015

Le Premier Président Philippe Jeannin a choisi de consacrer son intervention, pour l’Audience Solennelle du 13 janvier 2015, à la mise en œuvre des «mesures Justice du 21ème siècle ». Après avoir réaffi rmé avec force que la défaillance des moyens fi nanciers associée à des facteurs conjoncturels pesait sur l’activité de la Cour d’appel de Rennes et sur celle des juridictions du ressort, il a salué les décisions prises par la Ministre de la Justice Christiane Taubira qui « a tranché afi n d’avancer dans le consensus en déterminant 15 axes de progression comportant une série d’expérimentations ».Le Chef de la Cour rennoise croit fermement à «une évolution de la justice qui s’appuiera sur des pôles de proximité et d’accès au droit » . Pour lui, « les pratiques innovantes développées en matière de médiation sont des facteurs de progrès pour la Justice ». Pour conclure, il a rappelé sa volonté d’agir face aux défi s lancés à l’Institution judiciaire. Quant à Madame le Procureur Général Véronique Malbec, après avoir déploré que la « Maison Justice » soit entravée par un manque de ressources humaines, des restrictions budgétaires et une informatique vétuste, elle a centré son propos, qu’elle a voulu « optimiste et volontariste », sur l’amélioration du fonctionnement de la justice. La lutte contre la délinquance quotidienne fut au cœur de son discours dans lequel elle a appelé de ses vœux que « les magistrats s’inscrivent dans une action déterminée, innovante et moderne afi n de rendre au quotidien, pour nos concitoyens, une Justice qui soit la meilleure possible ». Jean-René Tancrède

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Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9 9

Audience solennelle

autorités de l’État sur la situation critique des juridictions de première instance et d’appel, qui ne sont plus en mesure de faire face dans des conditions satisfaisantes au traitement des contentieux qui leur sont soumis »…. et dans un contexte où …. « la situation est aggravée par l’extension constante du champ d’intervention du Juge »… «  a appelé de ses vœux une mobilisation en urgence de moyens humains et matériels à la hauteur des attentes des justiciables et à des réformes d’envergure qui recentrent le Juge sur ses missions essentielles »

Des difficultés structurelles touchent désormais de façon importante les juridictions de notre cour.a) Il s’agit d’abord des ressources humaines. Au-delà de quelques créations liées directement à des modifications en matière d’organisation judiciaire (exemple  : le Parquet financier de Paris) ou de réajustement de la carte judiciaire (réouverture de Tribunaux de Grande Instance et création de Chambre détachées) la direction des service judiciaires constate au plan national un déficit moyen sur l’année pleine de 450 postes budgétaires pourtant existants qui ne peuvent être pourvus nonobstant les recrutements importants d’auditeurs de justice intégrant l’École Nationale de la Magistrature dont l’arrivée en juridiction doit tenir compte des délais liés au temps de scolarité. En outre, il n’est pas certain que le délai de comblement de ce déficit, malgré les efforts de recrutement n’ait pas été sous estimé alors que les départs à la retraite anticipés s’accélèrent dans les générations qui avaient, il y a 35 à 40 ans constitué parmi les plus importantes promotions sorties de l’École Nationale de la Magistrature. Ainsi, en 2014, c’est une moyenne de 15 postes de Magistrats du Siège qui sont vacants, ce qui a affecté la performance des neuf Tribunaux de Grande Instance du ressort. (...)

b) Par ailleurs les années 2014 comme 2015 portent la marque d’un cadre budgétaire de plus en plus contraint uniquement sauvegardé par la précision des travaux d’évaluation, la recherche d’économies, et par les propositions d’orientation et de gestion très précises et avisées proposées au choix des Chefs de Cour par notre service d’administration régionaleAu contexte particulièrement difficile des ressources humaines s’ajoute aujourd’hui

des difficultés matérielles liées au contexte budgétaire. Si pendant plusieurs, exercices notre Cour a bénéficié de crédits fléchés s’appliquant aux charges de restructuration liées à la carte judiciaire, mesure qui permettait de compenser particulièrement les réductions de crédits affectant nos budgets de fonctionnement, cet avantage a disparu en 2014 alors que nous avons subi entre 2012 et 2013 une diminution des dotations d’environ 7 % au titre du fonctionnement courant puis une réduction identique en 2014 par rapport à 2013. C’est une diminution supplémentaire de 11 % qui a été officialisée par la notification des crédits de fonctionnement 2015. (...)

c) 2014 comme 2015 constatent aussi de nouvelles augmentations des charges d’intervention judiciaires et juridictionnelles nouvelles à moyens constants susceptibles de peser encore sur l’activité. l Il convient d’abord de rappeler que depuis 2010 de nombreuses réformes ont été entreprises sans augmentation de moyens : réforme du périmètre de compétence du Juge aux affaires familiales, réforme du surendettement, réforme des procédure couvrant le statut des incapables majeurs qui a contraint parfois à mobiliser toute l’activité de certains Tribunaux d’instance sur la révision de la totalité du stock des mesures de tutelles pendant toute l’année 2013. l Puis ce fut à partir de 2011-2012, dans le contexte général lié au développement de la question prioritaire de constitutionnalité et à la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), sans aucune réorganisation structurelle de la fonction du Juge des libertés et de la détention dont on voudrait aujourd’hui peut-être faire un poste statutaire du corps judiciaire, outre une augmentation importante des interventions de ce Magistrat dans le cadre des enquêtes pénales, le contrôle à bref délai des soins sous contrainte. Une modification de ce dernier texte qui a reçu sa pleine application en 2014, a réduit le délai d’intervention du Juge tout en posant le principe de l’intervention du Magistrat au lieu d’hospitalisation. Les juridictions ont toutes répondu avec beaucoup de réactivité pour organiser dans le cadre de conventions précises et en relation avec les agences régionales hospitalières, les audiences en milieu hospitalier. Il ressort néanmoins des premières évaluations que la contrainte du délai d’intervention qui parfois

oblige à un déplacement pour une seule affaire devient chronophage et réduit les possibilités d’emploi des Magistrats affectés à ces tâches sur d’autres segments de l’activité des juridictions, services annexes qui étaient jusqu’alors totalement intégrés et indispensables au résultat global des juridictions. En tout cas, il apparaît que malgré la préparation minutieuse de la mise en œuvre de ce texte dans le ressort de la cour, l’évaluation exacte de la tâche en « temps passé » avait été sous-estimée.l Les orientations de la loi du 15 août 2014 relatives à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales est entrée en vigueur le 1er septembre 2014 pour les dispositions créant une nouvelle peine, la contrainte pénale qui permet, sans référence directe à l’emprisonnement d’imposer à un condamné des mesures sur une très large palette entre surveillance et contrôle, sanction alternative à l’emprisonnement, réparation du dommage, réinsertion par le soin, mesures qui en cas d’inobservation peut être révoquée, et se transformer en emprisonnement. Si la montée en puissance de cette nouvelle peine sera progressive, elle implique à terme pour le Juge de l’application des peines et pour les personnels des services pénitentiaires d’insertion de probation une capacité supplémentaire de suivi des condamnés en milieu ouvert. l Deux autres « mesures phare » de cette réforme sont entres en vigueur le 1er janvier 2015 qui sur le fond ne peuvent qu’être approuvées. Elles répondent en effet à la réalité d’une situation qui tient au dépassement de notre capacité carcérale malgré des places nouvelles en construction et des rénovations indispensables d’établissements qui absorbent d’ailleurs toutes les marges de progression du budget de la justice. Elles renouent avec les fondamentaux de notre système pénal qui, à jute titre, est fondé sur le constat que pour la majeure partie des condamnés l’emprisonnement porte beaucoup d’effets négatifs sur la récidive en petite et moyenne délinquance s’il ne débouche pas sur des mesures post-pénales de suivi et d’accompagnement. Par ailleurs, les dispositifs d’aménagement de peines, malgré les efforts entrepris, notamment dans notre inter région pénitentiaire où il connaît l’un des plus fort taux (28 % des situations applicables), restent insuffisants pour éviter nombre d’incarcérations suivies de « sorties sèches ».

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Une telle réforme aura certainement un impact considérable sur le segment exécution – application des peines.Pour simplifier, il s’agit d’abord de l’examen de situation par le Juge de l’application des peines après avis de la commission d’application des peines, de tous les condamnés mineurs ou majeurs, récidivistes ou non, exécutant une ou plusieurs peines privatives de liberté d’une durée totale inférieure ou égale à cinq ans, n’ayant pas bénéficié d’un aménagement de peine et ayant accompli les deux tiers de la durée de peine à exécuter, afin qu’il soit statué sur la possibilité de mise en œuvre d’une libération sous contrainte, mesure assortie d’obligations et interdictions propres au régime d’exécution de la contrainte pénale mais pouvant en outre s’exécuter suivant plusieurs modalités (placement sous surveillance électronique, semi-liberté placement à l’extérieur, libération conditionnelle). A défaut de décision du Juge de l’application des peines dans les deux mois de la date à laquelle les conditions permettant de bénéficier de la mesure sont réunies, le Président de la Chambre de l’application des peines peut être directement saisi par le Procureur de la République ou par le condamné.Il s’agit ensuite de l’examen lui aussi systématique par le Juge de l’application des peines, dans le cadre d’un débat contradictoire, de la situation pénale de toute personne exécutant une ou plusieurs peines d’emprisonnement dont le total est égal ou supérieur à cinq ans et qui, ayant exécuté les deux tiers de ces peines, n’aura pas bénéficié d’un aménagement de celle-ci, pour statuer sur le fait de savoir s’il y a lieu ou non alors d’ordonner une libération conditionnelle. Comme dans le cas précédent, le défaut d’examen dans les quatre mois du jour où les conditions sont réunies autorise cette fois à saisir directement la Chambre de l’application des peines. Sans entrer dans le détail de la procédure, les charges pesant sur les services pénitentiaires d’insertion et de probation, sur les Juges et les Chambres de l’application des peines sont susceptibles d’augmenter considérablement d’autant que l’entrée en vigueur de la loi va révéler un nombre de détenus assez important immédiatement éligibles à ces

mesures dès lors qu’elles s’appliquent également aux très courtes peines dans le cas de la libération sous contrainte. En outre, ce sont deux types de charges qui sont induites : celles relevant de l’organisation des procédures, celles relevant du suivi des condamnés, pour ceux qui bénéficieront de ces mesures. Nous avons, en plein accord avec Madame le Procureur général, décidé de suivre non seulement les conséquences statistiques de cette importante réforme mais également d’analyser au fond l’impact général dans le cadre des procédures et du suivi post- sentenciel impliquant de réunir plus fréquemment tous les acteurs de l’exécution et de l’application des peines. Ici encore, si 1 000 conseillers d’insertion doivent être recrutés sur trois ans au niveau national, les enjeux, quant à l’importance des moyens nécessaires pour faire vivre une réforme de cette ampleur doivent être mesurés. Pour ma part, je me borne en l’état à constater qu’au-delà d’un poste de Juge de l’application des peines à Nantes créé sur nos propres ressources par redéploiement en 2011 lequel était considéré alors comme non justifié, trois autres ont été créés en 2013 à Lorient, Saint Nazaire et Renne sur la base de besoins évalués avant cette réforme. Cette prévision éclairée doit être à présent suivie de nominations devenues prioritaires.

d) Évaluer l’activité de l’année 2014, déterminer les orientations pour 2015, c’est aussi mesurer l’impact de la défaillance des moyens associé à des facteurs conjoncturels qui pèsent eux aussi sur le volume global de traitement des affaires au sein de la cour, juridiction d’appel.Les Chambres civiles, commerciale et sociales de notre Cour ont rendu 9 747 arrêts en 2014 soit environ 700 de moins que les deux années précédentes. J’avais indiqué l’an dernier, qu’après réorganisation des services en 2011 et 2012 notre capacité maximale de Jugement à plein effectif se situait entre 10.000 et 10.500 affaires ce qui correspondait aux données enregistrées en 2012 et 2013 en progression importante par rapport aux années antérieures mais ne pouvant guère être dépassée alors que la charge de travail par Magistrat

apparaissait supérieure à la moyenne observée dans les juridictions du même groupe. (...)Malgré des normes d’activité par Magistrat supérieures à la moyenne de son groupe la Cour d’appel de Rennes n’a malheureusement aucune chance de voir un renfort lui être octroyée. Le besoin n’est pas reconnu par la direction des services judiciaires qui, en réalité, compte tenu d’autres besoins tous autant prioritaires, n’a pas les moyens d’une création de poste dans une juridiction de second degré.Il y a donc beaucoup de raisons de penser que les moyens de la Cour puissent être renforcés à court terme en Magistrats même si nous poursuivrons inlassablement nos efforts en ce sens lors du prochain dialogue de gestion.Mais notre Cour n’en a pas moins intégré son action dans une stratégie collective et solidaire. (...)

e) Les difficultés de l’année 2014 n’en ont pas moins enfin empêché une véritable mobilisation dans les juridictions du ressort et dans le contexte de mise en œuvre des mesures « justice du XXIème siècle ».Chacune des juridictions du ressort présentera dans les jours à venir l’évolution de la situation et son action au cours des différentes audiences solennelles.Je voudrais néanmoins souligner que beaucoup d’actions ont été menées et que l’ensemble des juridictions a recherché, à la mesure de ses moyens, à équilibrer action civile et action pénale pour parvenir aux meilleurs résultats possibles en matière de délais et de flux comme en matière de gestion des stocks.Globalement, la situation est la suivante : la gestion des affaires pénales reste très satisfaisante dans l’ensemble des ressorts. Les affaires commerciales sont tenues malgré la pression des procédures collectives  ; les conseils de Prud’hommes dont certains ont adopté des chartes de procédure contractualisées avec les Barreaux couvrent, avec des variantes d’un conseil à l’autre, le périmètre des litiges qui leur sont soumis. Les situations sont beaucoup plus inégales en matière civile d’un ressort à l’autre.

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Les difficultés les plus importantes résident en matière civile dans plusieurs Tribunaux de Grande Instance et dans quelques Tribunaux d’instance lorsque ont coexisté vacances importantes de postes, renvois nombreux d’aff aires en fi n d’année, et augmentation du nombre des aff aires nouvelles, notamment dans les services dédiés aux aff aires familiales. (...)L’intensité des débats auxquels a donné lieu en début d’année la phase conclusive de la réflexion engagée sur la justice du XXIème siècle m’avait convaincu : l convaincu de son utilité par la richesse et le nombre des idées qui s’en étaient dégagées ; l convaincu par le sens des orientations, même perçues par certains comme n’allant pas assez loin, données notamment dans le rapport de la commission pour la refondation du Ministère public présidée par le Procureur général Jean-louis Nadal à laquelle j’avais eu l’honneur de participer ; l convaincu de longue date et enthousiaste de constater que l’accès au droit dans la proximité redevenait un enjeu majeur de politique judiciaire.l convaincu avec la majorité des premiers Présidents que la notion de Tribunal de première instance construite progressivement tout en opérant dans le même temps un recentrage de l’activité du Juge sur ses missions essentielles constituait une démarche d’avenir ; l convaincu par cette confrontation d’idées et d’expériences entre tous les intervenants judiciaires.J’ai cependant ressenti avec regret une sorte de repli lorsque le débat est revenu dans nos juridictions. Sans doute avons-nous tous été prudents, trop prudents, voire timorés. Les élans des débats, la générosité des idées ont cédé parfois la place à la défense des prés carrés, des pratiques habituelles ou d’intérêts parfois tout à fait défendables, parfois plus corporatistes. Et ne croyez pas madame et messieurs que je veuille jeter l’anathème sur quiconque puisque les Magistrats dont je suis y ont eu leur part.

Je voudrais vous dire que je crois fermement à une évolution de la justice civile qui tout en opérant des regroupements de nos disciplines sur des pôles spécialisés en matière civile, commerciale et sociale, ce qui ne veut pas dire comme certains le pensent, jeter aux orties le maillage territorial de nos actuels Tribunaux d’instance, s’appuiera également sur des pôles de proximité et d’accès au droit qui deviendront aussi des portes d’entrée permettant aux justiciables et à tous les acteurs, d’échanger en proximité avec un réseau judiciaire communicant et interactif. Je crois tout autant à l’instar de la réfl exion issue du rapport « Nadal » que dans un contexte de défi cit en ressources humaines, l’effi cacité des parquets dans le processus pénal, et les évolutions nécessaires de la lutte contre la grande criminalité, la place exacte que le Juge d’instruction doit occuper alors que nous traînons depuis huit ans une réforme en suspens qui ne règle pas la question de l’effi cience de la fonction dans le long terme, la structuration nécessaire de l’activité pénale du Juge des libertés, vont dans le sens d’une moindre atomisation de l’activité juridictionnelle pénale. Sans donner lieu à une départementalisation systématique (par exemple il est évident que deux parquets doivent être maintenus dans une département comme le Finistère et donc, deux pôles pénaux distincts), l’effi cacité implique une plus grande concentration, ce qui n’empêcherait nullement, ni le maintien d’antennes locales, ni la prise en charge des victimes d’être assurée tout à fait effi cacement dans le maillage territorial de proximité dont le développement doit continuer à être encouragé.. En tout état de cause Madame la Garde des Sceaux a tranché en optant pour apaiser les inquiétudes, mais aussi avancer dans le consensus en déterminant quinze axes de progression comportant une série d’expérimentations.Dans bien des domaines, nos juridictions participent activement à ces initiatives. (...)

Des progrès peuvent et doivent encore être réalisées en matière de communication électronique en matière civile dans les Tribunaux de Grande Instance du ressort. Au-delà de la signature et mises à jours de conventions, la généralisation n’est pas encore partout acquise. La multiplication des normes de traitement à l’intérieur de juridictions de taille moyenne n’est pas favorable à la valorisation des avantages tirés de l’utilisation de ces technologies mais au contraire source de complications pour les greff es. L’objectif de généralisation est donc une priorité. Des pratiques innovantes ont été développées en matière de médiation, parfois avec le concours et l’expérience de Magistrats réservistes. Les Barreaux ont également développé des initiatives intéressantes en la matière. Les conciliateurs restent très actifs sur l’entier ressort. Les éléments statistiques dont nous disposons pour ceux adhérents de l’association régionale soit 70 % des conciliateurs, montrent que saisis de 9832 litiges, 4 525 soit 55  % des dossiers ont permis d’aboutir à un accord, 661 aff aires trouvant leur solution dans le cadre d’une délégation judiciaire. (...)Ainsi malgré les diffi cultés, l’action est partout témoignage d’un engagement intact au cœur de chacun, à chaque niveau de compétence et de responsabilité. Puissions nous donc vivre de la conviction que, pour nos concitoyens, pour le progrès de la justice « tout ce qui est utile doit être encouragé, tout ce qui est nuisible doit être vaincu, tout ce qui est inerte doit être secoué » L’homme qui a prononcé cette phrase se trouvait alors dans une situation bien précaire, seul alors avec quelques uns, encore loin du but, en Afrique. Mais il se faisait appeler Leclerc et il avait une ambition au cœur, celle de sa patrie.Ayons en nous pour 2015 dans l’action pour la justice cette ambition solidaire et fraternelle.

Rendre la justice meilleure en luttant contre la délinquancepar Véronique Malbec

L(...)’institution judiciaire est entravée par plusieurs freins que l’on peut regrouper en trois grandes catégories :

l un frein lié aux ressources humaines d’abord. L’on compte ainsi 420 postes vacants au plan national dans la Magistrature. A cet égard, je ne peux passer sous silence l’évolution des eff ectifs du Parquet général. D’une situation saine il y a quelques mois, le Parquet général va se voir privé, à la fi n du mois de janvier, de 25 % de ses eff ectifs puisque, outre deux départs non remplacés d’un avocat général et d’un substitut général, je suis toujours dans l’attente du renfort de trois Magistrats placés sur les huit normalement prévus, les cinq autres étant aujourd’hui présents à mes côtés, ce qui peut donner l’illusion trompeuse d’un Parquet général fort bien doté,l un frein lié aux restrictions budgétaires ensuite. Si chacun est parfaitement conscient des diffi cultés auxquelles est confronté notre pays, il est clair, Monsieur le Premier Président, que nous aurons à gérer avec parcimonie les crédits qui viennent de nous être octroyés par l’administration centrale

et qui représentent, pour le BOP dépendant de notre Cour d’appel, 58,68 % du montant de notre demande. J’indique ici que nos demandes n’étaient pas somptuaires mais visaient seulement à nous permettre de payer nos factures impayées de l’année 2014 et de faire face aux dépenses de fonctionnement courant et de frais de justice. Ne pas renouveler le matériel et ne pas assurer

l’entretien de nos bâtiments aura hélas, à terme, un eff et retard, bien plus coûteux qu’un entretien raisonnable de l’un et de l’autre. Quant aux dépenses liées aux frais de justice, tout a été écrit sur le sujet que ce soient par les parlementaires ou les services d’inspection. La conclusion est unanime : ce poste est sous-budgétisé mais des économies restent à réaliser,

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tout en convenant volontiers qu’un certain nombre d’expertises, notamment dans le domaine médical, sont sous-payées ! Vous m’accorderez que tout cela est assez diffi cile à concilier. Je crains de ne pas avoir de solution, les enquêteurs, les Procureurs du ressort, et je les en remercie, sont particulièrement sensibilisés au sujet, mais la justice a un coût et il doit nous être donné les moyens financiers de contribuer, par ce biais, à la résolution des enquêtes,l un frein, corollaire du précédent, lié aux diffi cultés informatiques. Le matériel de dotation, assez vétuste dans son ensemble, ne répond qu’imparfaitement aux besoins d’un Parquet moderne. Aujourd’hui, le Magistrat du Parquet qui est à la permanence se sert autant du téléphone que de l’informatique et de la messagerie électronique pour diriger l’action publique. A cet égard, je constate, depuis mon arrivée au sein de ce Parquet général, que les avaries succèdent aux blocages et les blocages aux avaries. Le Procureur de la République de Lorient ne me contredira pas sur ce sujet, lui qui a été confronté, durant la fi n de semaine passée, et d’après les termes mêmes des spécialistes informatiques, à, je cite, « un eff et collatéral d’un comportement erratique de l’antivirus de l’un des serveurs frontaux permettant l’accès des clients aux serveurs de messagerie électronique centralisés  » qui a provoqué de sérieuses diffi cultés de connexion. Chacun a, je suis sûre, parfaitement saisi quelle était l’origine du problème mais comprendra surtout que ne plus avoir de messagerie électronique, pendant plusieurs heures, un samedi ou un dimanche, alors que l’on doit faire face à de nombreuses gardes à vue et à une procédure criminelle, cela n’est pas simple à gérer.Si j’évoque ici ces difficultés, ça n’est pas pour exprimer une énième complainte.Si j’évoque ici ces difficultés, ça n’est pas non plus pour susciter la compassion de l’auditoire.Si j’évoque ici ces difficultés, c’est au contraire pour mieux les conjurer, pour mieux les surpasser, pour mieux les surmonter.L’institution judiciaire est le ciment indispensable de nos sociétés démocratiques  : il faut donc être, à son égard, à la fois lucide sur ses forces et ses faiblesses, et d’une extrême exigence. Cette exigence que j’appelle de mes vœux doit nous conduire à un état d’insatisfaction permanente qui, loin d’inhiber, constitue au contraire le moteur de notre action. Cette exigence implique aussi une volonté constante d’améliorer notre organisation, les moyens de notre action et notre fonctionnement quotidien, dans un seul et unique objectif : rendre la meilleure justice possible dans l’intérêt de nos concitoyens.Mon discours sera donc volontairement optimiste et volontariste.

I. AMÉLIORATION DES FONCTIONNEMENTS DE LA JUSTICE La volonté d’améliorer le fonctionnement de notre institution judiciaire est perceptible à plusieurs niveaux :a) Au plan national d’abord avec les propositions issues des réfl exions de la commission présidée par le Procureur général honoraire de la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal. Le rapport remis en novembre 2013 au Garde des Sceaux et intitulé « Refonder le Ministère public », contenait soixante-sept propositions. J’appelais de mes vœux, l’an passé dans cette même enceinte, une volonté ferme de les mettre en œuvre.

Nous attendons toujours une réforme constitutionnelle garantissant notre indépendance, qui, je le crains Mesdames et Messieurs les parlementaires, ne viendra pas alors même que, et j’ai eu l’occasion de m’en entretenir avec certains d’entre vous, le sujet pourrait à première vue paraître assez consensuel. La Garde des Sceaux nous a récemment dit qu’elle ne s’avouait pas encore vaincue. Je souhaite sincèrement que cette réforme, permettant d’asseoir notre indépendance et notre légitimité, puisse voir le jour dans les meilleurs délais tant elle est attendue par l’ensemble des Magistrats du Ministère public.Mais il faut évoquer le chantier ambitieux de la justice du 21ème siècle lancé par la Garde des Sceaux afi n de moderniser la justice et de l’adapter aux transformations de la société. Ce travail a abouti à plusieurs propositions parmi lesquelles :l le service d’accueil unique du justiciable, que va évoquer le Premier Président, et qui sera expérimenté à Brest,l le greffi er assistant du Magistrat qui, au sein de la Cour d’appel de Rennes, va être expérimenté dans les Tribunaux de Grande Instance de Rennes et Saint-Malo. Les deux parquets de ces juridictions ont en effet été retenus pour expérimenter, à partir du début de l’année, la mise en place d’une assistance des Magistrats du Ministère public. Très concrètement, cette assistance, confi ée à des greffi ers des services judiciaires, volontaires, trois pour le Parquet de Rennes, un pour celui de Saint-Malo, consistera en une mission de soutien aux Magistrats en prenant en charge diff érents types de tâches, seront riches et diversifiées  : assistance des Magistrats du Parquet dans le cadre du traitement en temps réel des procédures, réalisation de recherches jurisprudentielles ou doctrinales, aide à la décision ou à la rédaction par exemple. Ce projet d’assistance aux Magistrats est un projet ambitieux qui fera l’objet d’un suivi attentif de l’administration centrale pour pouvoir en faire une évaluation objective, et je l’espère positive, permettant de le décliner dans les autres parquets mais aussi auprès des Magistrats du Siège. (...)

b) L’éloge de l’action que j’évoquais plus haut trouve aussi des manifestations concrètes quotidiennes au plan local.Manifestations concrètes dans l’activité quotidienne de la Cour d’appel d’abord. Malgré

les turbulences qui ont pu aff ecter la Cour d’appel en 2014, l’objectif de maîtrise du stock est resté une priorité et des eff orts signifi catifs ont pu être accomplis. (...)Manifestations concrètes dans la lutte quotidienne contre la délinquance ensuite.Un constat d’abord : le taux de criminalité pour 1 000 habitants reste, dans le ressort de notre Cour d’appel, très largement inférieur au taux moyen national plaçant ainsi respectivement le département des Côtes d’Armor au 96ème rang des départements, le Morbihan au 83ème, le Finistère au 69ème et l’Ille-et-Vilaine au 58ème.Seule la Loire-Atlantique fait exception et enregistre quant à elle un taux de 62/1000 la plaçant ainsi au 19ème rang des départements en matière de criminalité. D’une manière plus générale, le récent rapport annuel du Service d’Information, de Renseignement et d’Analyse Stratégique sur la Criminalité Organisée (SIRASCO) révèle que les trafi cs de stupéfi ants et la délinquance connexe qui s’y rapporte (règlements de comptes, séquestration, délinquance d’appropriation pour fi nancer l’achat de produits) dominent la criminalité organisée dans le grand ouest. On constate également la présence d’organisations criminelles d’origine étrangère, structurées et particulièrement actives, impliquées dans des séries de cambriolages dans des résidences principales, mais aussi dans des vols plus ciblés de moteurs de bateaux, de matériels d’optique, de pots catalytiques ou, plus récemment, d’ensembles routiers ou de tracteurs agricoles. Cette délinquance de proximité sérielle se caractérise par des équipes de malfaiteurs, très mobiles, qui commettent en peu de temps de nombreux délits et réalisent ainsi des profits substantiels.Pour lutter plus efficacement contre cette délinquance organisée, la loi du 9 mars 2004 a créé les juridictions interrégionales spécialisées (JIRS). Dix ans après cet acte fondateur, ces juridictions ont trouvé leur place dans le paysage judiciaire national et international et ont démontré, à travers le résultat de leur action, qu’elles constituaient l’élément indispensable d’une réponse judiciaire adaptée pour traiter des aff aires de criminalité de grande complexité. A ce titre, la JIRS de Rennes est devenue incontournable puisqu’elle a fait, en 2014, l’objet de 40 saisines, contre 34 en 2013, soit une

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augmentation de presque 18 %, et ce alors même que ses effectifs sont toujours constants avec trois Magistrats au Parquet et trois à l’instruction. (...)Mais vous l’avez compris la délinquance organisée n’est pas la seule contre laquelle nous devons lutter, car la délinquance quotidienne n’épargne pas l’ensemble de nos départements. Ceux-ci connaissent en effet, dans de grandes proportions, des cambriolages de locaux industriels ou d’habitations, des vols à main armée au préjudice de petits commerces, souvent pour des montants dérisoires, mais aussi, en nombre toujours croissants, une délinquance liée aux stupéfiants ou à des violences souvent au préjudice de personnes vulnérables. Là encore, seule une action conjuguée entre les forces de l’Ordre et les parquets est susceptible d’apporter une réponse à cette délinquance de tous les jours. Je me félicite à cet égard des excellentes relations qui existent entre les Procureurs du ressort et les Chefs de service de la police et de la gendarmerie. (...)

II. AGIR Les difficultés que j’évoquais au début de mon propos sont donc une incitation à l’action. Elles sont aussi une incitation à la prise d’initiatives.C’est dans cette optique que le Parquet général a mis en place, en 2014, de multiples partenariats.Nous nous sommes en premier lieu rapprochés des juridictions financières à l’occasion de deux journées de travail avec les Chambres régionales des comptes de Bretagne et des Pays-de-la-Loire. Les juridictions financières qui sont chargés de contrôler la régularité, la sincérité des comptes, mais également la qualité de la gestion des fonds publics jouent un rôle essentiel dans la détection des fraudes et des atteintes à la probité. L’étendue et la nature de leurs contrôles en font des partenaires privilégiées de l’autorité judiciaire dans la lutte contre la délinquance économique et financière.Mieux se connaître, faciliter l’échange et le retour d’information, apporter un appui technique réciproque, tels sont les principales avancées de ces rapprochements.Le Parquet général et les parquets du ressort se sont également rapprochés des Directions Régionales des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi (DIRECCTE) de Bretagne et des Pays-de-la-Loire, ainsi que des organismes professionnels de prévention du bâtiment et des travaux publics de ces deux régions à l’occasion de la signature d’une convention visant à développer l’organisation de stages, à titre de mesures alternatives aux poursuites, en matière de droit pénal du travail.Une convention a par ailleurs été signée entre mon Parquet général, l’ensemble des Procureurs du ressort et la direction interrégionale de la mer nord-Atlantique Manche ouest afin de mettre en cohérence les dispositifs de sanctions administratives et pénales dans le domaine des pêches maritimes. Cette convention prévoit notamment la spécialisation des ports de Douarnenez et de Lorient, et donc des parquets de Quimper et de Lorient, s’agissant du déroutement des navires de pêche étrangers. (...)Dans une démarche volontariste, notre Cour d’appel a également souhaité participer, en lien avec la direction des services judiciaires, à l’expérimentation du portail Chorus pro qui permet, depuis le mois d’avril 2014, la dématérialisation complète des mémoires de frais de justice. Je remercie tous les acteurs,

experts, enquêteurs, Magistrats et fonctionnaires pour leur implication dans ce projet d’ampleur avec une mention toute particulière pour notre service administratif régional qui, sous la direction de Pascal Morère, et avec l’aide efficace de Stéphanie Layec, en a été la cheville ouvrière.Au-delà du Parquet général, je veux aussi saluer les nombreuses initiatives prises en 2014 par les Procureurs de la République de mon ressort. Je ne peux pas toutes les énumérer ici, mais je retiendrai :l les réunions récemment organisées par le Procureur de Brest avec la police et la gendarmerie afin d’améliorer les échanges inter-applicatifs et la transmission des procédures dématérialisées,l le stage de sécurité routière destiné aux seniors mis en place par le Parquet de Lorient dans le cadre de compositions pénales,l la création d’un bureau des enquêtes au Parquet de Nantes,l la communication électronique pénale expérimentée à Saint-Malo, ou encore le projet plus récent de transmission dématérialisée de certaines procédures pénales qui aboutissent à une Convocation par Officier de Police Judiciaire (COPJ) ou une Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité (CRPC.)Responsabilité, action, initiative : ces impératifs devront de nouveau guider notre action durant l’année qui s’ouvre afin que nous puissions être au rendez-vous de 2015.Animée par cet impératif d’action, je souhaite organiser, au cours du premier semestre de l’année, un séminaire de l’ensemble des Magistrats du Ministère public du ressort de la cour. Apprendre à mieux se connaître serait déjà en soi suffisant, mais l’objectif, plus ambitieux, est, en cohérence avec l’ensemble des éléments que j’ai exposé aujourd’hui : travailler à l’amélioration du fonctionnement de nos parquets. L’organisation du traitement en temps réel des procédures a fait l’objet en juin 2014 d’un rapport de l’Inspection générale des services judiciaires, qui a permis de dégager trente propositions d’amélioration de son fonctionnement. Il m’apparaît important d’y réfléchir ensemble pour pouvoir, sans attendre, mettre en place dans le ressort celles qui sont les plus pertinentes. Comment améliorer également le travail avec les services d’enquêtes ? La direction, le contrôle et la surveillance des Officiers de Police Judiciaire (OPJ) nous obligent, mais il arrive souvent que le quotidien nous empêche de conceptualiser les axes de progrès, nous nous y emploierons. Enfin, et ce n’est pas le sujet le plus simple, quels sont les moyens matériels dont nous avons besoin a minima, qu’ils soient mobiliers, informatiques, téléphoniques, sans oublier les outils de gestion qui pourraient faciliter le quotidien des uns et des autres ?Je compte sur la mobilisation de tous pour rendre ce séminaire productif. Je sais déjà que les Procureurs du ressort seront forces de proposition à la hauteur des grandes qualités qui sont les leurs. En cette année 2015, l’efficacité de notre institution judiciaire sera aussi appréciée en fonction du traitement dont feront l’objet plusieurs procès importants.Le premier de ceux-ci se tiendra à compter du 16 mars 2015 devant le Tribunal correctionnel du Tribunal de Grande Instance de Rennes. Il fait suite à la mort par électrocution de deux adolescents survenue le 27 octobre 2005 à Clichy-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis. Pour cette affaire,

qui a été à l’origine des violences urbaines de 2005, le Tribunal correctionnel de Rennes a été désigné par la Chambre criminelle de la Cour de cassation.C’est la même Chambre criminelle qui a désigné cette fois la Cour d’assises d’Ille-et-Vilaine pour connaître, à partir du 18 mai 2015, du procès contre Daniel Legrand fils, dernier volet du dossier dit d’Outreau, pour lequel l’accusé était mineur au moment des faits.Enfin, il nous faudra reprendre, à une date non encore déterminée, le procès criminel en appel de Tony Meilhon renvoyé à la demande des avocats pour cause de mouvement de grève. Le Parquet général de Rennes a, en son temps, par la bouche de l’avocat général qui tenait le Siège du Ministère public, dit ce qu’il pensait de ce renvoi qui, non seulement a coûté cher au contribuable, mais a désorganisé considérablement le rôle des sessions d’assises de la cour, nous obligeant ainsi à faire prendre du retard à d’autres dossiers. Du retard qui pénalise en premier lieu les victimes.Qu’il me soit permis d’évoquer à cet instant le mécontentement des professions judiciaires, je viens de parler des avocats, mais il y a eu aussi, en fin d’année, les Juges consulaires, les notaires, les huissiers, les greffiers de commerce, les administrateurs judiciaires et les mandataires. Nous vous avons reçu avec le Premier Président, ce qui vous a permis de nous faire part précisément des doléances qui sont les vôtres. Je souhaite dire aux représentants de ces professions qui sont présents aujourd’hui que je souhaite sincèrement que 2015 puisse vous apporter des solutions dans l’intérêt de tous et au bénéfice d’un fonctionnement amélioré de notre institution. Nos relations professionnelles sont empreintes de loyauté mais aussi de cordialité, nous savons pouvoir compter sur vous et vous trouverez toujours auprès du Parquet général une écoute attentive.

II. RELEVER LES DÉFIS En 2015, l’action de mon Parquet général et l’efficacité de sa politique pénale seront également appréciées à l’aune de notre capacité à faire face aux défis de notre temps.La situation actuelle de notre pays m’amène en tout premier lieu à rappeler notre vigilance à l’encontre de toutes les formes de violences en rapport avec une idéologie dans un contexte de radicalisation. Les événements tragiques de la semaine passée, avec l’attentat effroyable visant la rédaction de Charlie Hebdo, l’assassinat en pleine rue d’une policière et la prise d’otage sanglante au sein d’un supermarché casher, soulignent toute l’urgence qu’il y a à lutter, de nos jours, contre toutes les formes de terrorisme. Pour ce faire, le texte récent du 13 novembre 2014 permet de mieux prévenir et réprimer ces comportements. Même si la compétence concurrente avec le Parquet spécialisé de Paris nous permet de traiter ces affaires, il s’agit plus pour nous de faciliter l’échange et le partage de l’information en prenant en compte le contexte terroriste de certains agissements. De la qualité et de la rapidité de la circulation de l’information dépend l’efficacité du dispositif de lutte antiterroriste. Dans ce domaine également, Monsieur le préfet de région, les Procureurs et les préfets devront travailler en parfaite complémentarité.Il s’agira aussi de mettre en œuvre avec implication et détermination l’ensemble des textes législatifs votés en 2014. Je n’en retiendrai que deux :

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Audience solennelle

l la loi du 27 mai 2014 portant transposition d’une directive du Parlement européen et du Conseil qui a créé, au profi t de la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction, un régime juridique autonome, « l’audition libre », dont les droits qui lui sont reconnus sont en grande partie calqués sur ceux existant dans le régime de la garde à vue. De fait, cette personne peut, depuis le 1er janvier dernier, bénéficier également de la présence d’un avocat. En outre, l’assistance d’un avocat est également prévue au bénéfi ce de la victime lors des confrontations,l la loi du 15 août 2014 fera certainement date dans l’arsenal répressif que nous connaissons. Pour n’en reprendre que l’essentiel, elle défi nit pour la première fois les fonctions de la peine, sanctionner mais aussi favoriser l’amendement, l’insertion ou la réinsertion, et réaffi rme expressément sa nécessaire individualisation. Elle créé une nouvelle peine, la contrainte pénale, qui se distingue des autres peines eff ectuées en milieu ouvert par l’importance de l’évaluation et l’intensité du suivi ; celle-ci apparait adaptée lorsqu’une prise en charge individualisée du condamné semble nécessaire. Peu prononcée encore dans le ressort de notre cour, il sera intéressant, l’an prochain, d’en dresser un premier bilan.l J’évoquais tout à l’heure la lutte contre la délinquance organisée et l’importance de la JIRS :- j’entends d’abord renouveler en 2015 la réunion, riche et utile, organisée ici même en juin dernier en présence des trois Procureurs généraux de Poitiers, Angers et Caen, des vingt-trois Procureurs de la République qui dépendent du ressort de notre JIRS, ainsi que de l’ensemble des services d’enquêtes compétents,- je souhaite ensuite que 2015 nous donne l’occasion de concentrer une partie de nos forces sur la saisie du patrimoine des délinquants. Moins de quatre ans après sa création, l’Agence de Gestion et de Recouvrement des Avoirs Saisis et Confi squés (AGRASC), en charge de la centralisation de toutes les saisies au plan national, peut affi cher une valorisation d’1,2 milliard d’euros au 31 décembre 2013 si l’on additionne l’ensemble des numéraires saisis, des comptes bancaires, des véhicules, des biens mobiliers mais aussi des saisies immobilières. Pour la Cour d’appel de

Rennes, nous avons les chiff res des saisies réalisées par les Groupes d’Interventions Régionaux (GIR), soit 3,4 millions d’euros pour le seul département de la Loire-Atlantique et la même somme pour la région Bretagne au cours de l’année  2014, « toutes causes confondues », auxquelles il faut ajouter les saisies réalisées par les autres services qu’ils relèvent de la police ou de la gendarmerie. Ces montants signifi catifs illustrent la maîtrise par les services de police, de gendarmerie, des douanes, mais aussi par les Magistrats du parquet, de l’instruction et des juridictions de Jugement, de cette nouvelle approche patrimoniale dans la lutte contre la criminalité organisée. Mais il ne faut pas s’arrêter là et nous avons souhaité, avec le Premier Président, que soient créées dans l’ensemble des procédures des côtes patrimoniales pour sensibiliser, plus encore, les Magistrats et notamment les juridictions de Jugement à la nécessité de prononcer la confiscation des biens saisis. Ce mouvement devra être accentué durant l’année à venir.l Une attention particulière devra en outre être portée à la délinquance routière puisque notre région n’est pas épargnée par l’augmentation générale constatée au niveau national. Au 30 octobre 2014, le nombre d’accidents sur le ressort de la Cour avait augmenté par rapport à l’année précédente de 4  %, mais surtout le nombre de décès était en augmentation de pratiquement 15 %, passant de 170 à 199 sur le ressort, augmentation qui, sur le seul département de l’Ille-et-Vilaine, atteint les 40 %, bien loin des chiffres nationaux qui prévoient une hausse d’environ 5 % de la mortalité routière. Ce bilan n’est pas acceptable. Derrière ces chiff res, il y a des vies et des familles brisées. Si les infractions relatives à la vitesse sont significativement à la baisse, celles relatives à l’alcoolémie sont par contre en augmentation très nette de plus de 10 %. Plus grave encore, les infractions délictuelles de conduite sous l’empire d’un état alcoolique, c’est à dire celles dont le taux d’alcoolémie relevé est le plus important, sont en augmentation de presque 20 %. En ce début d’année, la vigilance de tous est nécessaire et je sais, Monsieur le préfet de région,

que cette mobilisation nous est commune. Nous pouvons, si vous le souhaitez, envisager un travail conjoint de nos services dans les plus brefs délais.l Les violences conjugales, priorité toujours d’actualité de la politique pénale, nécessiteront cette année encore que nous fournissions des eff orts signifi catifs afi n de progresser dans leur détection, dans les conditions d’accueil des victimes et dans le traitement pénal de cette délinquance particulièrement sournoise et destructrice. Je rappelle ici que, d’après les derniers chiff res disponibles, les violences conjugales ont fait 146 morts en 2013 en France, parmi lesquels 121  femmes. Bien qu’en baisse par rapport à l’année 2012, ce chiff re représente près de 20 % des homicides de toute nature répertoriés au cours de l’année 2013. C’est dire si notre implication doit être, encore et toujours, renforcée.A cet égard, la généralisation des bureaux d’aide aux victimes dans nos Tribunaux et les circulaires relatives à l’amélioration de la prise des dépôts de plaintes ne pourront qu’améliorer les choses.Je veux aussi préciser que les violences conjugales incluent pleinement les violences psychologiques, typologie émergente, plus diffi cile à caractériser. Un récent colloque sur le sujet intitulé «  Violences psychologiques, violences invisibles » participera, j’en suis sûre, à la sensibilisation et à la prise en compte par tous de cette réalité.Vous l’aurez compris, au-delà des diffi cultés, bien réelles, auxquelles notre institution est confrontée, il est une nécessité, un impératif moral, qui doit nous animer  : nous devons continuellement nous inscrire dans une action déterminée, innovante et moderne, afin de rendre au quotidien, pour nos concitoyens, une justice qui soit la meilleure possible.« La responsabilité est le prix de la grandeur » disait Winston Churchill. Nous œuvrons eff ectivement tous, Magistrats, fonctionnaires et agents contractuels, au service d’une institution grande et noble qui exige que nous assumions pleinement et entièrement nos responsabilités. Tel est le sens de notre engagement professionnel. (...)

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Au fi l des pages

Chronique impertinente du monde judiciaire

Juriste de formation et haut fonctionnaire à la retraite ayant pratiqué les institutions nationales et européennes, l auteur, à qui l on doit déjà une étude sur l état des lieux dans

les prisons françaises, pose ici un regard acéré et impertinent qui tranche avec la dictature du politiquement correct sur le monde judiciaire et ses dérives. Son préfacier, Maître François Wagner, écrit : « Refermant le livre, de justiciable vous serez devenu philosophe et vous remercierez Custos de

vous avoir ainsi promené dans le temps et l espace. » Tant il est vrai qu une chronique judiciaire participe largement de la comédie humaine. Dans tous ses aspects. Dans un monde devenu fou, comme enivré de sang et de fureur. Au regard des récentes tragédies qui ont frappé et endeuillé notre pays, ces réfl exions sans complaisance sur la vie judiciaire en France et sur la situation internationale, sont chargées d une brûlante et inquiétante actualité.Éditions Atelier Fol’Fer, 215 pages - 21 euros 2015-110

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Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9 15

Audience solennelle

Cour d’appel de DijonDijon, 9 janvier 2015

La sanction de l’offi ce du Jugepar Henry Robert

L(...)‘année 2014 aura été pour la Cour d’appel de Dijon une année riche en changements, en réfl exion et en projets. (...)

2014 a donné à la Cour l’occasion d’engager une réfl exion sur ses pratiques et son organisation grâce au contrôle de fonctionnement dont elle a fait l’objet de la part de l’inspection générale des services judiciaires, le premier depuis plus d’une décennie. Vécue dans le passé comme une épreuve redoutable pour les responsables de la juridiction, l’inspection, si elle nécessite toujours une lourde préparation, est aujourd’hui conduite sur le mode de l’analyse bienveillante et contradictoire, destinée en priorité à fournir à la juridiction des références pour l’appréciation de son fonctionnement de sa performance et des outils pour améliorer son effi cience.L’inspection générale, qui a relevé 33 points positifs dans l’organisation de la Cour et 21 points de vigilance, a ainsi émis 23 recommandations : la plupart d’entre elles a pu être mise en œuvre pour le 30 septembre 2014, première échéance de suivi, et la quasi-totalité pour la fin de l’année à l’exception de celle afférente à la numérisation des procédures pénales qui mérite encore des efforts. Il s’agira donc là d’une action prioritaire pour 2015.Parmi les suggestions de l’inspection générale auxquelles les Chefs de Cour adhèrent pleinement, figure l’exercice de leur propre mission d’inspection des juridictions de première instance, prévu par l’article R.312-68 du code de l’organisation judiciaire. Après le Conseil de Prud’hommes de Chaumont en 2013, le Tribunal de commerce de Mâcon a été inspecté en 2014, ce qui a permis de constater son fonctionnement efficace et la déontologie sans faille des Juges consulaires. Le Tribunal de Grande Instance de Chaumont puis le Tribunal de commerce de Dijon seront inspectés en 2015  ; que ces juridictions sachent que nous agirons dans le même esprit que l’inspection générale, animés de la seule volonté de les aider à atteindre une meilleure effi cacité au service des justiciables. Avec Monsieur le Procureur général, nous nous félicitons que les Chefs des Tribunaux de Grande

Instance aient eux-mêmes conduit des inspections des Tribunaux d’Instance et de leurs Ministères publics, qui ont d’ailleurs révélé le caractère très sain de leur situation. Nous les encourageons vivement à poursuivre cette mission d’audit.Ces inspections s’inscrivent dans une politique générale de renforcement du lien avec les juridictions de première instance y compris celles où œuvrent des Magistrats non professionnels ; à ce propos, je me réjouis du caractère fructueux des échanges intervenus au cours des réunions récentes avec les Présidents et Greffiers des Tribunaux de commerce et avec les directeurs de greffe des conseils de Prud’hommes; je les remercie d’avoir accepté, par l’envoi de tableaux de bord mensuels, de fournir à la Cour une meilleure information sur l’évolution de contentieux dont une part se retrouve quelques mois plus tard devant elle. Il me semble également très positif que les Juges consulaires et la Chambre commerciale renforcent leurs échanges par la présence des premiers à des audiences de la cour. (...)Pour favoriser la diff usion de l’information juridique et faciliter les démarches auprès des juridictions, la Cour a adopté un projet de service visant à la généralisation des guichets uniques de greff e dans un premier temps sur les sites de la cité judiciaire de Dijon et des palais de justice de Chalon-sur-Saône et Chaumont.L’institution de telles structures a d’abord pour

but d’améliorer l’accueil sur le plan qualitatif en le personnalisant et en élargissant le champ des informations juridiques et procédurales disponibles en un point d’accès unique ; ensuite, en interne, il s’agit d’une part de soulager les greff es des tâches perturbatrices de renseignement du public et de réception de certaines formalités pour les recentrer sur leurs attributions essentielles, au bénéfi ce des justiciables, et d’autre part de développer les synergies entre les greff es des Tribunaux de Grande Instance et d’instance et des conseils de Prud’hommes.S’inscrivant dans la logique de la création de services d’accueil unifi és des justiciables récemment institués à titre expérimental par le Ministère de la justice, ce projet a déjà progressé concrètement dans les juridictions, où il s’agit de définir quelles tâches seront déléguées au GUG et quels moyens lui seront apportés par chacune. (...)D’autres réformes ont également impacté le fonctionnement des juridictions judiciaires ou vont le faire en 2015 :l je pense d’abord à la loi du 27 septembre 2013 et au décret du 15 août 2014 relatifs au droit et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques contraints qui ont notamment prévu:l la réduction de 15 à 12 jours du délai donné au Juge pour statuer sur la nécessité du maintien d’une mesure de soins sans consentement,l la tenue obligatoire de l’audience au sein de l’établissement de santé sous réserve que celui-ci dispose d’une salle adaptéel l’assistance systématique d’un avocat au bénéfi ce du patient hospitalisé. (...)l Je citerai ensuite le décret du 8 décembre 2014 relatif à l’organisation et au fonctionnement des juridictions de l’Ordre judiciaire qui a créé dans les cours et Tribunaux de Grande Instance un comité de gestion composé des Chefs de juridiction et du directeur de greff e - mais la structure existait souvent de fait, comme ici - et une formation de Chambres réunies pour statuer sur les aff aires d’une particulière complexité ou susceptibles de recevoir des solutions divergentes devant les formations ordinaires.Un arrêté du même jour a par ailleurs institué dans chaque Cour d’appel une commission permanente d’étude de service déconcentré, chargée de donner un avis sur les structures judiciaires et les conditions de fonctionnement et d’équipement des juridictions; composée des Chefs de Cour et des représentants des organisations syndicales de Magistrats et fonctionnaires, cette structure de

Henry Robert, Premier Président, s’est félicité que 2014 ait donné à la Cour d’appel de Dijon l’occasion d’engager une réfl exion sur ses pratiques suite au contrôle exercé par l’Inspection Générale des Services Judiciaires (IGSJ) qui a émis 23 recommandations. Dans son discours de rentrée judiciaire, ce 9 janvier 2015, il a déploré l’augmentation du stock des aff aires en cours ce qui l’a conduit à s’interroger, face à la pénurie des ressources humaines, sur « le rôle de la juridiction d’appel » : faut-il abandonner « l’appel voie d’achèvement » et favoriser « le retour à la tradition française de l’appel réformation » ? Cette suggestion vise à « recentrer le Juge sur ses missions principales en éloignant les ajouts successifs qui n’en relèvent pas mais compromettent la qualité de la justice ».Quant au Procureur Général Jean-Jacques Bosc, il a mis en avant la promulgation, en 2014, de trois lois importantes : 17 mars (action de groupe en matière civile), 27 mai (assistance de l’avocat pendant l’audition libre) et 15 août (contrainte pénale et libération sous contrainte), puis a rappelé, après avoir dressé le traditionnel bilan d’activité pénale de la Cour d’appel de Dijon, sa volonté d’agir pour favoriser la sécurité publique. Jean-René Tancrède

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dialogue social permet l’expression des syndicats de Magistrats, non représentés dans les comités techniques locaux.Je me félicite de la création de ce nouveau dispositif qui contribuera sans nul doute à mieux organiser le recueil des avis des Magistrats et fonctionnaires sur les projets de réforme : le mouvement qui a parcouru les greffes au printemps lors des consultations sur le projet ministériel de réforme Justice du XXIème siècle a montré le besoin d’approfondissement des échanges sur les évolutions institutionnelles. (...)Le constat inquiétant de la situation des Chambres civiles commerciales et sociales conduit à une réaction immédiate et à une interrogation de fond.La première s’est imposée en observant la vanité des alarmes formulées mais aussi des espoirs suscités lors des dialogues de gestion 2013 avec le Ministère de la justice : la promesse formelle de créer un emploi de conseiller, dont je m’étais imprudemment réjoui ici même l’an dernier, n’a pas été tenue, la Ministre ayant choisi de réserver aux juridictions de première instance les rares créations d’emplois obtenues en 2014. (...)L’interrogation de fond que j’évoquais est suscitée par le fait qu’à quelques nuances près, toutes les cours d’appel souffrent d’une augmentation de leur stock comparable à celle de Dijon et de délais de fixation des affaires qui, comme ici, méconnaissent trop souvent l’exigence du délai raisonnable.En considérant qu’à moyen terme, les ressources affectées à la justice d’appel n’augmenteront pas significativement, la nécessité de questionner le rôle de la juridiction d’appel est réapparue avec force depuis peu. C’est ainsi qu’en 2013, la conférence des premiers Présidents a préconisé l’abandon de l’appel voie d’achèvement et le retour à la tradition française de l’appel réformation. Cette suggestion s’inscrivait dans une réflexion pragmatique plus large visant à recentrer le Juge sur ses missions principales en élaguant les ajouts successifs qui n’en relèvent pas mais compromettent la qualité de la justice.L’institut des hautes études sur la justice a également préconisé de redéfinir l’appel pour, selon ses termes, mettre fin à une dérive de la voie d’appel, utilisée de façon extensive, en ramenant l’objet de l’appel à une critique du Jugement de première instance et le rôle de la Cour au contrôle de la bonne exécution de son office par le Premier Juge. Dans son rapport sur le Juge du XXIème siècle, Pierre Delmas-Goyon proposait dans le même esprit de faire à nouveau pencher le balancier du côté de l’appel réformation non pas tant pour des questions de principe que pour favoriser la qualité et l’efficacité de la justice d’appel en l’état de la dégradation de la situation des cours.Et aujourd’hui, sur la base de ces rapports et de nombreuses études doctrinales sur le sujet, un groupe de travail réfléchit au sein de la direction des affaires civiles et du sceau sur une nouvelle réforme de l’appel civil : pourtant, celui-ci a été largement amendé par le décret du 9 décembre 2009, en vigueur depuis le 1er janvier 2011, inspiré du rapport déposé en mai 2008 par Jean-Claude  Magendie, alors Premier Président de la Cour d’appel de Paris ; la procédure d’appel a aussi subi l’incidence de la suppression des avoués, intervenue un an plus tard, le 1er janvier 2012. Alors, quel est aujourd’hui l’enjeu d’une nouvelle réforme et quelle est la portée de l’opposition entre les deux conceptions de l’appel, l’appel voie de réformation et l’appel voie d’achèvement ? (...)La finalité de l’appel civil paraît évidente : il s’agit d’une voie de réformation par laquelle un plaideur insatisfait de la solution apportée par le Premier

Juge à un litige, dévolue l’affaire à la cour, juridiction hiérarchiquement supérieure pour qu’elle la Juge à nouveau en fait et en droit ; je laisserai de côté un aspect accessoire du rôle de l’appel, celui de l’annulation, puisque sauf si la juridiction de première instance n’a pas été valablement saisie, l’effet dévolutif de l’appel impose à la Cour de statuer sur le fond même si elle annule le Jugement.Mais en matière civile, où la notion d’ordre public est moins présente et où les parties définissent librement l’objet du litige, il faut tenir compte de l’influence du temps sur la matière à Juger et sur la manière de Juger ; en effet la Cour d’appel statue des mois après le Jugement et dans l’intervalle des situations ont pu évoluer (par exemple,le débiteur de pension alimentaire s’est trouvé au chômage, les désordres de construction se sont aggravés ou l’entreprise a été placée en redressement judiciaire) et les parties elles-mêmes ont pu vouloir tirer les conséquences du Jugement, en réorientant leur argumentation le cas échéant avec l’assistance d’un nouveau conseil.Dans de telles hypothèses qui ne seraient rares que si la vie était immobile, il importe de pouvoir soumettre au Juge d’appel les nouveaux éléments de fait ou de droit permettant d’apporter au litige une solution globale et définitive c’est-à-dire d’atteindre à une vérité judiciaire aussi proche que possible de la réalité vécue par les plaideurs à l’instant de la décision. C’est en ce sens que l’appel est aussi une voie d’achèvement.C’est la conception retenue par les rédacteurs de l’actuel code de procédure civile en 1971, qui ont estimé conforme à l’efficacité de la justice de charger la Cour d’appel non seulement de contrôler le travail des premiers Juges mais aussi de le compléter, notamment pour éviter aux parties d’engager un second procès pour faire statuer sur leurs prétentions nouvelles. Les rédacteurs de ce code ont toutefois retenu une solution équilibrée en prévoyant pour l’essentiel que :l les parties peuvent invoquer un fondement juridique nouveau et produire des nouvelles pièces ou de nouvelles preuves à l’appui de leurs prétentions (articles 563 et 565),l ces mêmes parties ne peuvent en revanche soumettre à la Cour de nouvelles prétentions à l’exception des demandes constituant l’accessoire, la conséquence ou le complément de celles émises en première instance (article 566).La possibilité ainsi offerte aux plaideurs de parachever en appel leur argumentation juridique est particulièrement précieuse depuis deux arrêts de principe de la Cour de cassation :

1. La jurisprudence dite Césareo résultant d’un arrêt de l’assemblée plénière du 7 juillet 2006. L’affaire était la suivante : Monsieur Césareo, qui prétendait avoir travaillé pour son père sans aucune rémunération, avait sollicité lors du règlement de la succession de celui-ci une créance de salaire différé ; le Tribunal le lui avait refusé, une des conditions prévues par le code rural n’étant pas remplie  ; il a alors assigné son cohéritier en paiement de la même somme sur un autre fondement, celui de l’enrichissement sans cause; mais la Cour de cassation a approuvé la Cour d’appel d’avoir rejeté cette seconde demande au motif qu’y faisait obstacle l’autorité de la chose jugée attachée au premier Jugement ; dans un attendu de principe, elle affirme en effet qu’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens de nature à fonder celle-ci. Ainsi, un plaideur qui a omis d’invoquer le fondement juridique adapté ne pourra pas se rattraper en saisissant à nouveau le Juge après l’avoir trouvé : c’est dire que son unique chance de corriger efficacement un premier tir mal ajusté se situe en cause d’appel. 2. L’arrêt du 21 décembre 2007 par lequel la Cour de cassation affirme que si l’article 12 du code de procédure civile oblige le Juge à donner ou à restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux invoqués par les parties, il ne lui fait pas obligation, sauf règle particulière, de changer la dénomination ou le fondement juridique de leur demande : autrement dit, le plaideur et son conseil ne peuvent en général se reposer sur le Juge pour substituer la règle de droit pertinente à celle, inadéquate, qu’il lui aurait présentée.Mais les tenants de la conception étroite de l’appel réformation, qui observent que lors de son introduction dans le système judiciaire de l’ancienne France au XIIIème siècle, l’appellation reprise du droit romain impérial déférait la même cause au Juge d’appel, font ainsi du principe de l’immutabilité du litige, même assoupli au cours du XIXème siècle, un élément de la tradition juridique française.Ils considèrent qu’en admettant en appel tous les éléments d’évolution du litige, le code actuel tend à bouleverser la répartition du travail entre les Juges du premier et du second degré, ces derniers ayant à se prononcer sur une autre affaire, ce qui prive paradoxalement les plaideurs de tout droit d’appel sur ces éléments nouveaux. Ils ajoutent :l d’une part que la réalité du gain d’efficacité et de rapidité qui justifie l’appel voie d’achèvement est démentie par le fonctionnement actuel des

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Audience solennelle

juridictions d’appel, encombrées de litiges qui se complexifi ent à mesure que s’y développent de nouveaux moyens juridiques et que se complètent les prétentions initiales,l d’autre part que trop souvent le justiciable utilise la première instance comme un galop d’essai, réservant au second degré son argumentation juridique et ses moyens de preuves les plus pertinents, ce qui dévaloriserait les juridictions du premier degré, multiplierait les appels et serait contraire à l’impératif de loyauté procédurale (qui implique d’informer dès l’abord son adversaire et le Juge des moyens de fait et de droit qu’on entend invoquer) ; et, de fait, la Chambre sociale souff re particulièrement des ajouts successifs de nouveaux fondements ou griefs comme par exemple le désormais incontournable harcèlement moral.Ils proposent donc de revenir à un appel qui soit seulement la sanction de la première sentence en cas de mal jugé ou plus précisément la sanction de l’offi ce du Juge : la Cour d’appel n’aurait plus alors à reprendre l’ensemble du litige, mais, sur la base d’une critique ciblée du Jugement par l’appelant, à rechercher les vices que recèle ce Jugement : erreur de droit, appréciation manifestement erronée des faits, méconnaissance des règles de procédure ou de la déontologie. Ils relèvent qu’un tel système, connu de plusieurs autres pays européens ne serait pas contraire aux normes constitutionnelles et conventionnelles en vigueur, qui n’imposent pas un appel civil aussi largement ouvert que le nôtre.Ainsi, la préoccupation théorique, restaurer l’autorité de la justice de première instance en ramenant le rôle de la Cour à celui de contrôleur de la qualité de la première décision, rejoint le souci gestionnaire de la conférence des premiers Présidents qui, elle, envisage de limiter la vocation

de l’appel pour endiguer le fl ot des recours.De son côté, dans le rapport déjà cité, Pierre Delmas-Goyon, qui propose lui aussi de redonner à l’appel civil sa fonction première portant sur la critique du Jugement, suggère des tempéraments pour prendre en compte l’évolution du litige pendant l’instance d’appel et régler le cas des appelants qui n’ont pas comparu en première instance. Le système imaginé, celui de l’institution au sein de la Cour d’une Chambre collégiale des recours qui autoriserait les prétentions, mises en cause, moyens et documents nouveaux, apparaît d’une exquise complexité : elle serait de nature à faire perdre aux cours d’appel tout le bénéfi ce attendu d’un recentrage de l’appel.Il me semble qu’en fait il n’existe guère de certitude quant à l’allègement de la tâche des cours d’appel en cas d’instauration d’un appel réformation strict : à cet égard, les propositions de l’Institut des Hautes Études pour la Justice (IHEJ), séduisantes sur le plan théorique, ne seraient pas simples à mettre en œuvre, si l’on veut préserver l’effectivité des droits des justiciables tout au long du procès, comme le montre la tentative du rapport Delmas-Goyon.Et de nombreux Magistrats des cours d’appel estiment que l’évolution du litige au cours de la phase d’appel constitue en réalité un facteur minime parmi les causes de l’encombrement des cours : celle-ci, qui tient d’abord au choix politique d’une réduction de leurs eff ectifs depuis cinq ans, résulte aussi :l des effets de la réforme Magendie, dont l’application, fort rude pour les conseils des parties, a suscité de nombreuses incertitudes génératrices d’incidents contentieux de procédure, favorisés aussi par l’allongement de l’instance d’appel,l de la suppression des avoués, les spécificités voire les chausse-trappes de la procédure d’appel

requérant une spécialisation dont ne peuvent évidemment disposer tous les Cabinets d’avocats,l de la complexification des procédures et du manque de concision voire de rigueur des écritures développées par les parties en appel : ce dernier facteur, essentiel, conduit à souhaiter comme la mission Magendie la mise en place d’une structuration simplifi catrice des conclusions d’appel, ainsi que cela a été fait dans d’autres pays européens ; la conférence des premiers Présidents appelle de ses vœux l’instauration d’une obligation de structurer les écritures d’appel, qui soit sanctionnée d’irrecevabilité, et elle relève que la numérotation des prétentions et des moyens et pièces permettrait à tous les acteurs du procès de circonscrire plus aisément le périmètre du litige et de fi abiliser le processus judiciaire.Mais il est vrai que l’on ne peut tout réglementer et certainement pas le style des avocats : néanmoins, sans doute parviendra-t-on par le dialogue à leur faire prendre conscience de l’intérêt qui s’attache pour la justice et pour eux-mêmes qui doivent répondre à leurs confrères, à une présentation claire, synthétique et utile de leur argumentation. C’est l’objet du groupe de travail mis en place avec au dernier trimestre 2014 avec les représentants des diff érents Barreaux du ressort.Je considère pour ma part que ce type de recherche d’amélioration modeste mais concrète, doit précéder toute remise en cause de l’équilibre trouvé par les auteurs du code de procédure civile qui ne peut s’envisager qu’avec la plus grande prudence ; ceci d’autant que les outils mis à la disposition du Juge d’appel par ce code - je pense aux pouvoirs de gestion procédurale du conseiller de la mise en état - ne sont pas utilisés à plein, faute de temps disponible.

La sécurité publiquepar Jean-Jacques Bosc

C’est chaque année un plaisir renouvelé que d’accueillir à la Cour d’appel, à l’occasion de l’audience solennelle de rentrée, les hautes personnalités, les autorités et

l’ensemble des personnes qui manifestent ainsi leur intérêt pour le fonctionnement de la justice. Dès lors, Mesdames, Messieurs, je vous remercie de votre présence et vous adresse les vœux du Ministère public pour cette année 2015. (...)Au-delà des chiffres et pour être complet, je voulais évoquer quelques autres sujets.1. La livraison du palais de justice de Chalon-sur-Saône. Une autre réalisation importante doit être signalée dans le département de la Haute-Marne. 2. La création de la maison de justice et du droit de Saint-Dizier qui sera opérationnelle le 1er  mars 2015. Cette structure complète notre réseau de justice de proximité et dote le département de la Haute-Marne qui était le seul à ne pas en être pourvu d’une maison de justice et du droit. La ville de Saint-Dizier, qui est la plus peuplée de ce département, est celle qui connaît les actes de délinquance les plus nombreux de l’arrondissement judiciaire de Chaumont. Cette structure qui permettra de rapprocher le droit des habitants, dans laquelle le Procureur de la République mettra en œuvre les mesures alternatives aux poursuites, sera un instrument de prévention de la délinquance et complétera

opportunément le dispositif de la zone de sécurité prioritaire qui a été mise en place.3. L’année 2014 a vu la promulgation de lois importantes. J’en retiendrai trois :l la loi du 17 mars 2014 qui a instauré l’action de groupe en matière civile. Cette loi, si les associations de consommateurs se l’approprient, permettra aux plus faibles de mieux résister à certains abus de groupes importants et constitueraient ainsi une réforme d’importance ;l la loi du 27 mai 2014 qui a organisé l’assistance de l’avocat pendant l’audition libre, qui de ce point

de vue est alignée sur le régime de la garde à vue et qui permet à la victime d’être assistée d’un avocat lorsqu’elle est confrontée au mis en cause ;l la loi du 15 août 2014 relative à la réforme pénale, qui organise une nouvelle peine  : la contrainte pénale et met en place la libération sous contrainte.Je terminerai en évoquant la situation de tristesse et d’inquiétude dans laquelle nous nous trouvons. Les attentats criminels survenus à Paris mercredi et jeudi ont profondément marqué la Nation. Nous avons rendu hommage aux victimes hier à la Cour d’appel, comme dans tous les Tribunaux du ressort. Cette émotion est d’autant plus forte à Dijon que la ville a été marquée pendant les fêtes de fi n d’année, le 21 décembre puis le 2 janvier, par des agressions violentes de passants.Il convient de garder son sang froid à la suite de ces actes criminels graves. D’abord parce qu’il n’existe pas de liens entre eux, ensuite parce que les faits commis à Dijon qui résultent de comportements individuels ne s’inscrivent pas dans des actions terroristes, enfi n parce que les auteurs ont été arrêtés et écroués et que les poursuites les plus fermes pour tentative d’assassinat sont exercées à leur encontre. Enfi n, je tiens à rendre hommage au courage et au sang froid des policiers qui ont interpellé ces deux criminels sur la voie publique, sans exercer aucune violence à leur encontre. Les images qui nous sont parvenues de Paris nous rappellent combien notre dette est grande à l’égard des forces de l’Ordre qui assurent notre sécurité au péril de leur vie. 2015-111

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Veille législative

Introductionpar Philippe Théry*

Que les professions réglementées assurent des missions de service public n’est pas contesté. Il suffit de se reporter au

rapport de la mission d’information établi par Madame Untermaier pour s’en convaincre : « Il importe en eff et que les usagers du droit puissent bénéfi cier des prestations nécessaires à la bonne marche de la vie en société dans des conditions de parfaite régularité que seul un statut permettant le contrôle de la puissance publique peut assurer. Aussi les titulaires du statut d’offi cier public ou ministériel «  reçoivent-ils une investiture officielle, sont-ils soumis à des règles impératives et leur activité est-elle conditionnée par les critères de continuité, d’égalité des usagers et d’adaptation aux circonstances nouvelles caractérisant le service public »(4).Délégataires d’une parcelle de l’autorité publique, les offi ciers publics et/ou ministériels ont un statut qui, à certains égards, se rapproche de celui des fonctionnaires. D’ailleurs, «  les offices, d’abord temporaires, révocables et incessibles, ont été à l’origine de la fonction publique […]. L’officier du roi, fonctionnaire public, n’exerçait qu’à titre précaire un pouvoir qui lui avait été délégué, mais non aliéné »(5). La Constituante a d’ailleurs conféré le statut de fonctionnaires à un certain nombre de professionnels (dont les notaires), jadis « propriétaires » de charges auxquelles avait été reconnu un caractère patrimonial. Plus récemment, en 1965, les greff es des juridictions civiles et pénales, jadis constitutifs d’offi ces publics et ministériels, ont été fonctionnarisés(6). À titre de comparaison, on notera qu’en Allemagne, dans le Land de Bade-Wurtemberg, les notaires peuvent exercer avec le statut de fonctionnaire (« Beamtennotar »).Aujourd’hui encore, le statut d’offi cier public ou ministériel est marqué par les caractères exorbitants du droit commun qui sont attachés au pouvoir d’apposer sur des actes le sceau de l’État : nomination par les pouvoirs publics, exercice de missions sous la surveillance des Parquets, compétence pour l’exécution des décisions des autorités judiciaires

ou d’actes à caractère public auxquels est conférée l’authenticité, régime disciplinaire autonome  » (Rapport, première partie, I, 1).Chacune des professions représentées aujourd’hui vous présentera son activité et donc sa mission de service public. Aussi mon propos sera-t-il plus général et plus limité à la fois : si toutes ces professions concourent à un service public, de quel service public s’agit-il ?L’opinion la plus répandue est qu’il s’agit du service public de la justice. Pour la plupart des professions, cette réponse relève de l’évidence  : il s’agit de représenter et d’assister les parties, d’assurer le bon fonctionnement des juridictions et d’exécuter leurs décisions. Et, si la mission du notariat nous paraît éloignée de cette activité juridictionnelle, son rattachement au service public de la justice est pourtant traditionnel, d’abord pour des raisons historiques. Le notariat est en eff et rattaché à une notion de « juridiction gracieuse » diff érente de celle que nous connaissons aujourd’hui mais qui établit un lien avec les tribunaux. Si ces raisons historiques nous paraissent vieillies, on peut en trouver d’autres. Les conditions dans lesquelles sont établis les actes notariés préviennent les contestations, partant les procès, et la formule

exécutoire dont ils sont généralement assortis permet au créancier – dans un premier temps au moins – de faire l’économie d’un procès. L’exemple le plus significatif est celui des prêts immobiliers qui sont établis par acte notarié en raison des sûretés qui les garantissent. Il en résulte que la grande majorité des saisies immobilières sont mises en œuvre sur le fondement d’actes notariés. On pourrait donc leur appliquer la formule parfois utilisée à propos des transactions : qu’ils sont, à certains égards, des équivalents processuels, ce que la Cour de Strasbourg a reconnu en plaçant l’exécution des actes notariés sous la bannière du procès équitable dans l’arrêt Estima Jorge du 21 avril 1998. Toutefois, cette vision centrée sur le procès – comment le prévenir, comment le mener, comment l’administrer, comment exécuter les décisions – nous paraît trop restrictive. Alors que l’idée est répandue que le droit est plus que jamais dans la main du Juge, la remarque semblera paradoxale. Mais, pour justifiée que soit cette impression, il demeure vrai que le contentieux n’épuise pas le droit ; surtout, ce que l’on peut approuver ou critiquer, le droit a (re)trouvé une place centrale dans les rapports sociaux. Aussi, sans méconnaître ces liens avec le service public de la justice, on doit se demander s’il n’est pas aujourd’hui partie d’un service public plus vaste qui est le service public du droit dont on découvre des linéaments dans le droit positif.L’apparition d’un monopole du droit avec la loi du 31 décembre 1990 (art. 54 L. du 31 décembre 1971) en est la manifestation la plus nette. L’article 56 de la loi de 1971 y fait entrer toutes les professions représentées aujourd’hui à l’exception il est vrai des greffiers des Tribunaux de commerce, ce qui ne suffit pas à les faire sortir du monde du droit auquel ils se rattachent aussi bien par leur participation au fonctionnement des Tribunaux de commerce (service public de la justice) que par leur rôle dans la vie des entreprises (service public du droit). L’accès au droit est un volet de l’aide juridique à côté de la traditionnelle aide juridictionnelle. La jurisprudence adopte à propos de la responsabilité des professionnels du droit des solutions convergentes(2). Enfin, il est notable que les sociétés professionnelles – dont le développement

À l’occasion de l’ouverture de la discussion à l’Assemblée Nationale du projet de loi présenté au nom du Premier Ministre par le Ministre de l’Économie, Monsieur Emmanuel Macron, l’Université Panthéon-Assas (Paris 2) a organisé le 14 janvier 2015 un colloque sur « Les professions juridiques. Service public et déréglementation ? ». Ce colloque a associé des universitaires et des représentants des diff érentes professions réglementées : Philippe Bobet (Conseil National des Greffi ers des Tribunaux de Commerce), Agnès Carlier (Chambre Nationale des Commissaires-Priseurs Judiciaires), Didier Coiff ard et Jean-Marie Ohnet (Conseil Supérieur du Notariat), Hélène Farge et Didier Le Prado (Ordre des Avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation), Philippe Jeannerot (Conseil National des Administrateurs Judiciaires et des mandataires judiciaires) et Patrick Safar (Chambre Nationale des Huissiers de Justice). Après une brève synthèse du colloque insérée dans Les Annonces de la Seine du 22 janvier 2015 page 23, nous publions ci-dessous les interventions de orateurs qui se sont succédés à la tribune. Jean-René Tancrède

Université Paris Panthéon-AssasLes professions juridiques. Service public et déréglementation ?

Première table ronde : des missions de service public

Colloque du 14 janvier 2015 à Paris

Philippe Théry

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Veille législative

SynthèsePar Pierre Crocq*

1. Les représentants des diff érentes professions réglementées participant à cette première table ronde viennent chacun de remercier l’Université et, tout particulièrement son Président, Guillaume  Leyte, d’avoir pris l’initiative du colloque qui nous réunit aujourd’hui. Qu’il me soit permis, à mon tour, de les remercier vivement d’avoir immédiatement répondu à l’invitation qui leur a été lancée par l’Université et d’être venus enrichir notre réfl exion quant au devenir de leurs professions.

2. Les débats de cette première table ronde ont eu lieu en pleine actualité. En eff et, c’est au cours de cette même matinée du 14 janvier 2015 qu’a commencé, au sein de la Commission spéciale de l’Assemblée nationale chargée d’examiner le projet de loi n°  2447 pour la croissance et l’activité, la discussion de la partie de ce projet qui est consacrée aux professions juridiques réglementées et il faut d’emblée souligner ici quelques curiosités quant à la méthode législative employée. Sans même s’attacher à la précipitation (la discussion parlementaire se faisant dans l’urgence) et à l’absence d’une réfl exion préalable approfondie (soulignée par le Conseil d’État), lesquelles sont malheureusement devenues aujourd’hui coutumières, n’est-il pas étonnant, tout d’abord, qu’au sein d’un même projet de loi, la réforme des professions juridiques cohabite avec celle des activités ferroviaires, de celle des taxis ou des grands stades, ou encore du repos dominical ? N’est-il pas étonnant que la défense de ce fourre-tout législatif devant l’Assemblée nationale ne soit assurée que par le seul Ministre de l’Économie et que la Garde des Sceaux ait été exclue de la discussion alors qu’elle est pourtant chargée de la gestion des offi ciers ministériels ou publics, ce qui a, d’ailleurs, été souligné au sein même de la Commission spéciale de l’Assemblée nationale  ? N’est-il pas étonnant également que ce projet de loi soumette à l’avis de l’Autorité de la concurrence, laquelle voudrait aller encore plus loin dans le sens de la libéralisation, certaines des plus importantes règles applicables aux professions réglementées, telles que la réglementation de la création des offi ces (art. 17 du projet) ou la détermination des tarifs (art. 12 du projet) ? N’est-il pas étonnant, enfi n, qu’il soit prévu désormais de réglementer lesdits tarifs au sein du Code de commerce ? À n’en pas douter, tout ceci est la marque d’une évolution des mentalités au sein du Gouvernement qui tend à assimiler le droit à une marchandise intellectuelle comme une autre pour laquelle les professions juridiques, et notamment les professions réglementées, ne seraient que de simples prestataires de service.

3.  Or, s’il est bien une chose que nos débats viennent de montrer, c’est que les membres des professions réglementées ici réunies ne sont pas seulement des prestataires de service au profi t de clients. Ils sont également, et bien davantage, les vecteurs de la sécurité juridique qui est due par l’État

à ses citoyens ou, pour reprendre le terme générique employé dans son introduction par Philippe Th éry, les acteurs d’un service public du droit.

4.- Cette mission de service public résulte, tout d’abord, du concours que les professions juridiques réglementées apportent en matière d’accès au droit. Il est souvent affirmé que la sécurité juridique suppose que la norme soit compréhensible par tous, mais le foisonnement des textes et leur complexité sans cesse croissante font qu’un tel accès demeurerait souvent théorique si les professions réglementées ne prêtaient pas leur concours à tous les justiciables. Nos débats en ont fourni bien des exemples. C’est le cas des avocats aux conseils qui tous sans exception, Madame la Présidente Hélène Farge l’a rappelé, traitent les dossiers bénéfi ciant de l’aide juridictionnelle ou assurent une permanence gratuite pour les aff aires jugées en référés par le Conseil d’État. C’est également le cas des notaires ou des huissiers, qui ont une obligation d’instrumenter, ou encore celui des administrateurs judiciaires, à propos desquels Maître Philippe Jeannerot a souligné, à juste titre, qu’ils ne peuvent choisir les entreprises en difficulté pour lesquelles ils interviennent et qu’ils n’ont pas, de ce fait, de clientèle. Il est ainsi bien apparu que les professions réglementées assurent la continuité du service public du droit et qu’elles traitent à égalité tous les usagers de ce service, quelle que soit leur fortune ou l’importance de l’acte à accomplir (il a d’ailleurs été ici rappelé tout l’intérêt du caractère redistributif du tarif, lequel permet au professionnel d’instrumenter « à perte « dans le cas des petites aff aires). En outre, la plupart des professions juridiques réglementées ici présentes n’exercent pas une activité concurrentielle, ainsi que l’a notamment rappelé Madame la Présidente Agnès Carlier à propos des commissaires-priseurs judiciaires, laquelle a souligné le fait que le transfert d’une partie de leurs activités à la concurrence (en l’occurrence les ventes aux enchères volontaires) avait eu pour conséquence une concentration des professionnels (les dix plus grandes maisons de vente réalisant aujourd’hui 57 % du marché

des ventes aux enchères volontaires) et une augmentation des tarifs pratiqués (les frais payés par l’acheteur dans une vente aux enchères volontaires oscillant entre 20 et 25 % alors que le tarif réglementé des commissaires-priseurs judiciaires est en la matière de 14,40 %), ce qui n’est pas sans rappeler le piètre bilan de la suppression des avoués d’appel par une loi du 25 janvier 2011, laquelle n’a entraîné aucune diminution des frais exposés par les justiciables.

5. Vecteurs de l’accès au droit, les professions réglementées sont aussi les instruments d’un accès eff ectif au Juge. À ce titre, leur mission de service public est de concourir au bon fonctionnement de la justice, et cela avant l’instance, pendant l’instance comme après l’instance.l Avant l’instance, tout d’abord, car le bon fonctionnement de la justice suppose que celle-ci ne soit pas engorgée et les professions réglementées assument ici une mission de prévention du contentieux. C’est le cas des notaires qui, tels une forme de justice amiable préventive, limitent le contentieux en contrôlant scrupuleusement la légalité de leurs actes et en veillant à leur effi cacité, le tout en faisant preuve d’objectivité, de neutralité et d’impartialité, car si le notaire est l’homme du contrat, il n’est pas l’homme des parties, ainsi que nous l’a montré Maître Didier Coiff ard. C’est le cas, plus généralement, des rédacteurs de titres exécutoires (notaires, bien sûr, mais aussi huissiers s’agissant du contentieux né de l’émission des chèques sans provision) qui, ce faisant, dispensent le créancier de devoir recourir au Juge pour faire constater son droit en préalable à une exécution forcée. C’est le cas, également, des avocats aux conseils qui, bien souvent, déconseillent les pourvois et dont le rôle en matière de limitation du contentieux a été bien mis en évidence lorsqu’un décret du 20 août 2004 a rendu obligatoire le recours à un avocat aux conseils devant la Chambre sociale de la Cour de cassation.l Les professions réglementées concourent également au bon fonctionnement de la justice pendant l’instance. On pense tout de suite ici au service des cours et Tribunaux assuré par les huissiers ou au fonctionnement de la justice commerciale qui repose pour une large part sur ses greffiers (lesquels mettent en forme, authentifi ent et archivent les décisions des Juges) ainsi que, dans le cas des procédures collectives, sur les administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires, experts du droit et du chiff re au rôle primordial en matière de sauvetage des entreprises en diffi cultés. Mais il a été également rappelé lors de nos débats que les professions réglementées ont joué et jouent encore un rôle particulièrement important en matière de dématérialisation des procédures, et ce aussi bien au sein des juridictions du fond que des cours suprêmes.l À l’issue de l’instance, enfi n, le droit au Juge ne serait qu’un mot si n’étaient assurés en pratique aussi bien la possibilité d’exercer un recours que le respect de la décision de justice lorsque celle-ci est exécutoire. En la matière, on le sait, les huissiers de justice jouent un rôle essentiel,

pourrait laisser penser que l’activité juridique est une activité économique comme une autre – dérogent sur plusieurs points aux règles communes pour prendre en compte la spécificité de cette activité(3).

Au fond, la question peut être résumée ainsi : le service juridique est-il un service ordinaire ? Si l’on tient que le droit est un bien commun n’appartenant à personne mais établi pour chacun, on peut affirmer l’existence

d’un service public du droit qui, parce qu’il va au-delà du service public de la justice, mérite que nous en approfondissions les exigences.*Professeur à l’Université Panthéon-Assas

Pierre Crocq

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non seulement en raison de la sécurité juridique résultant des modalités de la signification (les huissiers de justice assumant une responsabilité professionnelle illimitée en ce domaine), mais aussi parce qu’il leur incombe de choisir et de mettre en œuvre des mesures d’exécution à la fois effi caces et proportionnées. Maître Patrick Safar a bien souligné ici le fait qu’aujourd’hui le modèle français d’exécution forcée par l’intermédiaire d’un huissier de justice constitue un exemple souvent copié par de nombreux autres pays.

6. Si les professions réglementées exercent ainsi une mission de service public en permettant le bon fonctionnement de la justice, elles assurent également la protection des droits en conférant une force particulière, une foi publique, aux actes qu’elles accomplissent et, ce faisant, elles répondent, là encore, à un besoin de sécurité juridique et participent au service public du droit. C’est ainsi que nos débats ont rappelé l’importance, aussi bien en matière familiale que dans le domaine économique, de la force probante spécifi que attachée aux actes authentiques rédigés par les notaires et conservés, y compris sous forme dématérialisée, pendant une durée pouvant aller

de soixante-quinze ans à cent ans selon les cas. De même, a été soulignée la valeur probatoire des constats d’huissiers, renforcée par une loi du 22 décembre 2010 en raison de la confi ance que l’État accorde à ces professionnels, confi ance qui se manifeste aussi dans le fait que l’État leur confi e, à titre de monopole, la vérifi cation des comptes de tutelles. De même encore a été rappelée l’importance des activités des commissaires-priseurs judiciaires, experts de la prisée et donc de la détermination du juste prix, lorsqu’il s’agit d’estimer la valeur des actifs mobiliers d’une entreprise en diffi culté, de ceux qui sont compris dans une succession ou encore de biens faisant l’objet de ventes judiciaires forcées à la suite d’une confi scation. Enfi n, si l’on passe du terrain probatoire à celui de l’opposabilité des actes et de la sécurité des tiers, on ne peut que souligner l’importance du rôle joué en matière commerciale par les greffi ers des Tribunaux de commerce. En eff et, la fi abilité du registre du commerce est largement tributaire de la rapidité de la publication et le Président Philippe Bobet nous a bien montré que la réactivité des greff es des Tribunaux de commerce n’est pas du tout la même selon que

la mission est assumée par un offi cier public et ministériel (ce qui est le cas en métropole où l’on immatricule une société en 24h) ou par un fonctionnaire (ce qui est le cas outremer où la même immatriculation n’a parfois lieu qu’au bout de six mois), tout en soulignant également le fait que l’informatisation des greff es des Tribunaux de commerce, particulièrement performante aujourd’hui (20 000 requêtes étant présentées à Infogreff e chaque jour) et la dématérialisation de la justice commerciale n’ont pas coûté un seul centime à l’État.En assurant l’accès au droit et le bon fonctionnement de la justice, en conférant une foi publique aux actes et aux faits qu’ils constatent, en assurant la sécurité des tiers par la tenue de registres fiables, les professions juridiques réglementées assument donc, sans conteste, des missions de service public. Ce service public du droit justifi e, ainsi que cela a d’ailleurs été souligné dans le rapport Untermaier-Houillon sur le projet de loi actuellement examiné par l’Assemblée nationale, que ces professionnels soient régis par des statuts spécifi ques, ce qui va être l’objet, à présent, de notre seconde table ronde.*Professeur à l’Université Panthéon-Assas

IntroductionPar Michel Grimaldi*

Après les missions, le statut. Cet ordre chronologique est aussi un ordre logique. Ce sont, en eff et, les missions de chaque

profession réglementée qui expliquent son statut et permettent de le comprendre. S’il n’est pas inutile de le rappeler, c’est que souvent les éloges vont à la mission et les critiques au statut, comme si l’on pouvait défaire celui-ci sans remettre en cause celle-là.Prenons, par exemple, le notaire et l’Europe. L’acte authentique est plutôt bien reçu en droit européen. Il a reçu, avec la jurisprudence Unibank, reprise dans plusieurs règlements une défi nition européenne. Sa force probante est reconnue par le règlement successions, qui énonce que « les actes authentiques établis dans un Etat membre ont la même force probante dans un autre Etat membre que dans l’État membre d’origine ou y produisent les effets les plus comparables, sous réserve que ceci ne soit pas manifestement contraire a l’ordre public de l’État membre concerné » (art. 59.1). Sa force exécutoire a été consacrée par le règlement portant création d’un titre exécutoire européen pour les créances incontestées  : reconnaissance dont on rapprochera la jurisprudence de la

CEDH, qui - assimilant l’acte notarié doté de la force exécutoire à une décision de justice au regard de l’article 6, § 1, de la Convention européenne et considérant que le droit à un procès équitable garanti par ce texte inclut un droit à l’exécution du Jugement dans un délai raisonnable - accorde réparation au créancier qui ne peut obtenir dans un tel délai l’exécution

forcée de la copie exécutoire d’un acte notarié. Or le statut du notaire est régulièrement attaqué à Bruxelles, où l’on y voit des entraves à la liberté d’installation ou à la libre circulation des services.Le même phénomène se constate aujourd’hui en France. On ne critique pas les professions réglementées pour ce qu’elles font, mais pour ce qu’elles sont, sans se demander si, cessant d’être ce qu’elles sont, elles pourraient continuer à faire ce qu’elles font. Par exemple, supprimer, directement ou indirectement, le tarif, n’est-ce pas mettre à bas le service public de l’authenticité (où, soit-dit en passant, l’identité du prix assure la concurrence en ce qu’elle conduit à choisir, non pas le moins cher, mais le meilleur).Toutes les professions réglementées n’ont pas le même statut. Les traits caractéristiques de leur statut sont variés. On en retiendra quatre, qui feront l’objet des débats qui vont suivre :l les conditions de nomination, par l’État, qui veille à un maillage du territoire et assure ainsi la continuité du service public ;l l’existence d’un droit de présentation, dont il faut se demander s’il est lié à la nomination par l’État ;l l’existence d’un tarif, déjà évoquée ;l l’existence d’une garantie collective, fi nancée par la profession.*Professeur à l’Université Panthéon-Assas

SynthèsePar Laurent Leveneur*

Comme l’a bien mis en lumière la mission d’information chargée par l’Assemblée Nationale d’évaluer la nécessité d’une

réforme annoncée des professions juridiques réglementées, ces professions ont « un statut justifié par les missions de service public  »

dont elles sont chargées. Et dans ses propos de présentation de cette table ronde, Michel Grimaldi a justement souligné l’ambiguïté d’une réforme qui entend s’attaquer au statut sans toucher aux missions, alors que les missions ne peuvent être maintenues intactes si l’on touche à des aspects essentiels qui font le statut et qui portent sur l’installation (avec l’instauration d’une liberté), le tarif, le contrôle, l’ouverture à des capitaux extérieurs.

Evidemment, les missions des chacune des professions juridiques réglementées n’étant pas exactement les mêmes, certaines différences peuvent apparaître dans leur statut respectif. D’ailleurs ces professionnels n’ont même pas tous la qualité d’offi cier public et/ou ministériel, puisque les administrateurs et mandataires judiciaires ne l’ont pas –mais ils sont tout de même qualifiés par la jurisprudence de collaborateurs du service public de la justice-. Les

Deuxième table ronde : des statuts de service public

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autres sont tous des offi ciers ministériels : offi ciers, car ils sont titulaires d’un offi ce, ministériels, car ils sont nommés dans cet offi ce par le Ministère de la Justice. Les notaires, huissiers de justice, commissaires-priseurs judiciaires et greffiers des Tribunaux de commerce sont en outre des offi ciers publics, parce qu’une part de l’autorité publique leur est confi ée et qu’ils ont le pouvoir de dresser des actes authentiques ; tandis que les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation sont seulement des offi ciers ministériels.Du moins un point leur est commun, qui tient au contrôle qu’exerce sur ces professions l’autorité publique. Ce contrôle se manifeste lors de l’installation (I), puis au cours de l’exercice professionnel (II).

I. LE CONTRÔLE DE L’AUTORITÉ PUBLIQUE LORS DE L’INSTALLATION Puisque ces professionnels exercent des missions de service public, le service public de la justice ou du droit, il est logique que l’État se préoccupe de leur installation. Le contrôle actuellement exercé avant la nomination par l’autorité publique dans un offi ce vise avant tout à s’assurer que le candidat aura bien l’aptitude à exercer les missions qui lui seront confi ées, ainsi que l’a bien exposé le représentant des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation. Il vise aussi à permettre un bon maillage du territoire, pour que partout en France les citoyens aient un égal accès au service public - un service de qualité-, rendu par ces professions, ce qui suppose que les lieux d’établissement soient maîtrisés par l’autorité publique. Le représentant du notariat a justement insisté sur ce point, et montré les graves inconvénients qu’aurait à cet égard la liberté d’installation envisagée par le projet de loi pour cette profession (comme pour celle d’huissier et de commissaire-priseur judiciaire) : au maillage territorial risquent de succéder des déserts juridiques, comme on a vu se créer dans la France contemporaine des déserts médicaux. Le représentant des huissiers de justice a abondé dans ce sens, et celui des commissaires-priseurs judiciaires a pu faire part de son expérience, alors que cette profession a vécu il y a moins de quinze ans une libéralisation totale d’une partie de son activité, la vente volontaire aux enchères ; or que s’est-il passé  ? La liberté d’installation et de concurrence entre opérateurs de ventes volontaires de meubles a vite donné lieu à une forte concentration, au point de constater maintenant une réduction du nombre de ces opérateurs  ! Précédent édifiant que le législateur devrait méditer.Les débats ont également porté sur le droit de présentation, un droit de présentation qui vient de franchir avec succès le contrôle de constitutionnalité à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité posée au sujet de celui des notaires et alors que d’autres questions du même type sont pendantes à propos de certaines autres professions réglementées comme cela a été signalé. Ce droit, prévu depuis longtemps par la loi, permet au titulaire d’un offi ce de présenter un successeur à l’agrément du Garde des Sceaux. On peut remarquer qu’il représente un certain avantage pour le Ministre, qui n’a pas besoin de chercher lui-même des successeurs pour les professionnels désireux d’arrêter leur activité ou décédés, et qui n’a pas à départager plusieurs candidats potentiels  : si des concours sont

organisés par l’autorité publique, c’est seulement pour pourvoir à la nomination dans les offi ces nouvellement créés ou exceptionnellement vacants. A l’occasion de l’exercice de ce droit de présentation, une somme d’argent est en pratique perçue par le titulaire sortant de la part de son successeur. Le montant de cette somme est négocié entre eux, comme un élément du traité de cession, mais sous le contrôle du Ministère de la Justice, qui impose des limites, tirées de coeffi cients appliqués aux recettes et aux bénéfi ces dégagés par l’offi ce, afi n, tout particulièrement, que le prix demandé au successeur –qui concrètement va contracter un emprunt pour le fi nancer- ne soit pas trop élevé. S’agissant de l’office ministériel d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, le représentant du Conseil de l’Ordre a développé une explication de ce versement pécuniaire à l’occasion de l’installation d’un successeur : il s’agit tout simplement du prix de cession d’un fonds libéral, comme la cession d’autres fonds libéraux y donne habituellement lieu, avec ici un contrôle du Garde des Sceaux sur le montant de ce prix puisque la profession est réglementée. Cette explication, en tout cas pour cette profession, a la force de conviction de la simplicité. Si le droit de présentation n’est pas directement remis en cause par le projet de loi, la liberté d’installation dans le lieu de son choix par toute personne remplissant les conditions d’aptitude, telle qu’elle est envisagée, serait évidemment de nature à l’aff ecter. Pour que l’État ne supporte pas lui-même l’indemnisation de la perte patrimoniale que subiraient les titulaires actuels d’offices, le projet de loi a imaginé de mettre à la charge des nouveaux installés le dédommagement des anciens. Les intervenants de la table ronde ont montré combien ce mécanisme, avec intervention du Juge en cas de désaccord, serait contradictoire avec le principe proclamé de liberté d’installation. Le plus sage, pour faire une place plus importante aux jeunes diplômés désireux d’entrer dans ces professions, serait assurément d’augmenter progressivement le nombre d’offi ces en en créant de nouveaux là où l’autorité publique en identifi e le besoin.Quant aux perspectives d’entrée de capitaux extérieurs dans les sociétés d’exercice professionnel que le Gouvernement serait habilité à ouvrir ou étendre par voie d’ordonnance, elles ont suscité de sérieuses réserves au regard de l’exigence d’indépendance et de la nécessité d’éviter les confl its d’intérêts. Les greffi ers auprès des Tribunaux de commerce ont ajouté que cela

leur paraissait de surcroît inconciliable avec la volonté, affi chée dans le projet de loi, d’organiser des concours de recrutement en ce qui les concerne.Enfi n l’idée d’une profession unique de commissaire de justice regroupant les professions d’huissier, de mandataire judiciaire et de commissaire-priseur judiciaire, qu’une ordonnance créerait, a donné lieu à des avis plus contrastés. Y sont hostiles les commissaires-priseurs judiciaires et les mandataires judiciaires (qui font valoir qu’ils n’ont rien à voir avec l’exécution forcée), tandis que les huissiers sont plus favorables, dès lors du moins qu’une spécialisation resterait possible au sein de la profession multifonctionnelle.

II. LE CONTRÔLE DE L’AUTORITÉ PUBLIQUE AU COURS DE L’EXERCICE PROFESSIONNEL Le contrôle de l’autorité publique tout au long de l’exercice de ces professions se manifeste de plusieurs manières. Ce sont en particulier les inspections et vérifi cations régulières diligentées par les Chambres de discipline (qui sont des établissements publics) et la surveillance du Procureur de la République sur le fonctionnement des études d’huissiers, de notaires, de commissaires-priseurs judiciaires ; le contrôle approfondi exercé périodiquement sur l’activité des administrateurs et mandataires judiciaires; les inspections régulières des diff érents greff es menées, sous l’autorité du parquet, par le Conseil national des greffi ers des Tribunaux de commerce et les contrôles l’Inspection Générale des Services Judiciaires. C’est aussi la tarification par décret de la rémunération, selon les missions, des commissaires-priseurs judiciaires, huissiers, notaires, greffi ers des Tribunaux de commerce, administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires. Les intervenants ont tous souligné l’un des grands mérites du système actuel, celui de réaliser une certaine compensation  : les actes ou prestations portant sur des enjeux plus importants assurent une rémunération qui permet de compenser l’insuffi sance de celle qui est perçue dans de petits dossiers, ce qui favorise l’accès de tous, y compris des plus modestes, au service public  ; ou encore les activités plus rémunératrices des greffi ers leur permettent de faire face à d’autres qui ne le sont guère, comme la tenue du Tribunal de commerce lui-même.Le projet de loi envisage une profonde modification, consistant non pas il est vrai à supprimer purement et simplement ces tarifs réglementaires, mais à prévoir que le tarif de chaque prestation serait arrêté, par le Ministre de la Justice et celui de l’économie, sous la forme d’une fourchette comportant un maximum et un minimum : bref, ce qui a été appelé un « corridor tarifaire » au sein duquel une marge de négociation existerait donc dans chaque cas. A cet égard la table ronde a bien montré la contradiction apportée par cette marge de négociation avec la nature des prestations qu’il s’agit de rémunérer : ce sont des missions de service public et l’égal accès de tous au service public se trouverait méconnu, si le prix à payer pour une même prestation n’était plus le même ici et là. Après tout si tel ou tel tarif actuellement fi xé par l’État n’apparaît pas satisfaisant, qu’il le modifi e, mais qu’il continue à en avoir la maîtrise.La place des dispositions envisagées pour réformer la tarification de ces professions

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Synthèse généralePar Yves Gaudemet**

Contrairement à ce qu’indique notre programme, il n’y a pas lieu, à ce moment de la journée, à une synthèse générale.

D’une part des synthèses intermédiaires ont déjà été présentées, tirant les enseignements des deux tables rondes qui se sont succédées, d’autre part, nos interventions ont le devoir de se dérouler si je puis dire « en temps réel » puisque le texte qui nous mobilise est en cours de discussion au Parlement.Il s’agit donc bien davantage, dans les quelques minutes qu’il nous reste, de dégager ici, du strict point de vue du droit constitutionnel et conventionnel, les diff érentes objections qui pourraient être faites, à ce stade des débats ou encore ensuite lors du contrôle de constitutionnalité de la loi, au texte tel qu’il a été fi nalement déposé devant le Parlement.Un mot d’abord, très rapide, pour restituer le contexte dans lequel cette discussion se poursuit.L’esprit général de la réforme, qui a été conçue au sein du Ministère des Finances, plus précisément de l’Inspection générale des fi nances et de l’Autorité de la concurrence, est empreint d’une idéologie « libérale » telle qu’on la comprend aujourd’hui sur le plan juridique  ; c’est-à-dire l’ouverture à la concurrence d’un «  marché  » qui serait actuellement paralysé et artifi ciellement confi squé par une réglementation dont bénéficient les professionnels, assurés ainsi du bénéfi ce de ce que la réforme appelle « des rentes de situation ». Il s’agit ainsi de substituer la régulation de ces marchés à l’actuelle réglementation, cette régulation étant elle-même tout naturellement confi ée à titre principal à l’Autorité de la concurrence. Dans cette logique, on comprend que le principe soit posé - au code de commerce ! - d’un alignement des tarifs sur les coûts, d’une libre installation des professionnels et, qu’à tous les stades de la mise en œuvre d’un tel processus, on rencontre l’autorité régulatrice qu’est l’Autorité de la concurrence en lieu et place du Ministère de la Justice. La régulation, par voie d’avis ou de recommandations, bref de « droit souple » - la pire des choses - est ainsi substituée à l’actuelle réglementation des professions organisées, comme on l’a très bien dit, en service public ou en gestionnaires de prérogatives de puissance publique. On voit que, ainsi, la réforme comporte également un aspect institutionnel : ses promoteurs relayant et remplaçant - jusque et y compris lors du débat parlementaire - les autorités de référence et de contrôle habituelles des professions juridiques réglementées. C’est qu’il n’y a pas de distinction véritable dans l’esprit des promoteurs de la réforme - et l’étendue

des matières abordées par la loi Macron en porte la marque - du «  marché  » des professions et des activités juridiques et tout autre marché de fourniture de services.Beaucoup a été dit sur le caractère fallacieux et en même temps dangereux, y compris du point de vue économique et pour les usagers de ces professions, de cette ignorance de la spécifi cité des prestations de services juridiques, tout spécialement celles qui sont placées entre les mains de professions réglementées. Et on a le sentiment que les Pouvoirs publics commencent à le découvrir. Mais, pour nous et à ce stade, la question qui se pose et à laquelle sont consacrées les réfl exions qui suivent est plus strictement juridique  : le changement de perspective politique que porte la loi ne se heurte-t-il pas à des obstacles constitutionnels ou encore d’ordre conventionnel ?Cette discussion au demeurant n’est pas entière. L’avant-projet de loi, soumis au conseil d’État, a fait l’objet de sa part d’un avis rendu public qui a mis en avant l’importance de ces objections constitutionnelles. Le projet de loi, tel qu’il a été déposé, ne pouvait pas ne pas en tenir compte, mais mon sentiment est qu’il l’a fait a minima et que ces critiques, pour l’essentiel, demeurent. Pour en rendre compte, je suivrai l’ordre du projet de loi tel qu’il a été déposé, examinant d’abord la question des tarifs (I), celle de la liberté d’installation et du droit de présentation (II), celle ensuite de l’indemnisation des offi ces existants (III), et enfi n des renvois prévus par la loi à des ordonnances de l’article 38 de la Constitution (IV).

I. LES TARIFS Le projet de loi pour la croissance et l’activité instaure en son article 1er de nouveaux principes d’orientation vers les coûts pour la fi xation et la révision des tarifs auxquels sont soumis les commissaires-priseurs judiciaires, les greffi ers de Tribunal de commerce, les huissiers de justice, les administrateurs judiciaires, les mandataires judiciaires et les notaires. Le principe est posé à l’article L 444-2 qui serait ajouté au code de commerce que « les tarifs réglementés… prennent en compte les coûts du service rendu ainsi qu’une rémunération raisonnable définie sur la base de critères objectifs ».La mise en œuvre de ces principes nouveaux est renvoyée un décret en conseil d’État, après avis de l’Autorité de la concurrence, laquelle peut au demeurant toujours être consultée par le Gouvernement sur cette politique tarifaire ou s’autosaisir. Sur ces bases, ce sont des arrêtés conjoints du Ministre de la Justice et du Ministre de l’Économie qui « arrêtent le tarif de chaque prestation, sous la forme d’une fourchette comportant un maximum et un minimum », dans la limite d’un ratio fi xé en deçà du double par le décret tarifaire. C’est le système dit du « corridor tarifaire » présenté dans le dossier de presse qui accompagne la loi comme comportant un plafond avec la possibilité de « réductions négociées dans la limite d’un plancher pour éviter le dumping ».Que faut-il en penser ? Que c’est là une présentation radicalement nouvelle, procédant d’une démarche abstraite et théorique de la formation des prix sur un marché, et qui, surtout, ignore ce qui justifi e à la fois le principe d’un tarif des professions juridiques réglementées, son unicité et son caractère non négociable ainsi que la fonction qu’il remplit.

a) Sur le principe et l’unicité du tarifLa question qui se pose en droit est en eff et d’abord celle du principe d’un tarif, le même pour tous et déterminé par catégorie d’actes, assurant l’égalité des usagers dans l’accès à la prestation en cause ; tarif au demeurant fixé, aménagé et librement modifi é par les pouvoirs publics dans le respect du principe d’unicité et d’égalité des usagers.A cet égard il faut remarquer que le tarif, lorsqu’il existe, ne couvre pas l’intégralité des prestations des professions concernées ; ce que néglige de faire le projet de loi pour la croissance et l’activité.Ces professionnels sont en eff et à la fois et selon les moments offi cier public et professionnel libéral ; ainsi, pour le notaire, rédacteur d’actes qu’il reçoit et auxquels, délégataire de la puissance publique, il confère un caractère exécutoire, et Conseil de ses clients comme le sont d’autres professionnels du droit. Or le tarif ne concerne que les actes reçus

juridiques réglementées a également été soulignée, car elle n’est pas anodine : il s’agit du Code de commerce. En outre ces dispositions projettent de conférer un rôle d’avis important à l’Autorité de la concurrence sur ces tarifs réglementés. Tout ceci est très révélateur d’un bouleversement : insidieusement, on ne veut plus voir dans ces professions le service public dont

elles sont chargées ; le droit, au service duquel elles œuvrent, n’est considéré que comme une marchandise, à soumettre aux lois du marché et de la concurrence, ce qui est pourtant très contestable et contesté(15).Enfi n il convient d’observer que ces professions ont toutes une caractéristique commune. Elles exercent leurs activités sans coûter un sou à l’État,

car ce sont des professions libérales. A un moment où le grand défi que doit aff ronter la France est celui de la réduction des défi cits publics, le statut des professions juridiques réglementées, qui permet d’assurer des missions de service public sans dépense publique, mérite d’être sauvegardé plutôt que menacé et déstabilisé !*Professeur à l’Université Panthéon-Assas

Les réformes des professions juridiques réglementées et la Constitution

Yves Gaudemet

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par des officiers publics, investis de prérogatives de puissance publique, et pour conférer à ces actes un brevet de légalité et les rendre exécutoires ; ce qui est le cas, si l’on prend encore l’exemple des notaires, des actes authentiques, auxquels précisément ce caractère authentique et la force exécutoire qui en découle sont conférés par l’intervention du notaire, délégataire du sceau de l’État qui exerce ainsi - comme vient encore de le rappeler le conseil constitutionnel (Déc. 2014-429 QPC, 21 novembre 2014) - une prérogative de puissance publique ; et cela que l’authentification soit requise par la loi ou simplement souhaitée par les parties, c’est-à-dire pour tous les actes « auxquels les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d’authenticité », pour reprendre l’expression de l’article  1er de l’ordonnance du 2 novembre 1945.Dans ce domaine réservé, l’office du notaire est un office de juridiction, la juridiction de l’authenticité, juridiction amiable et préventive, exercée au nom de l’État. La formule de Réal dans l’exposé des motifs de la loi du 25 ventôse An XI est toujours actuelle : « l’attribut le plus essentiel du notariat pour toutes les classes de citoyens, c’est d’authentiquer (sic) les conventions, d’en certifier la date et de leur donner, en les recevant, le caractère et la force de l’exécution parée. Le notaire exerce ici une partie de l’autorité de la justice ; ce qu’il écrit fait la loi des parties ».La force exécutoire qui s’attache aux actes de ces professionnels investis de prérogatives de puissance publique est en effet un monopole de l’État qui se rattache au privilège du préalable : la présomption de légalité de l’acte dont ils vérifient et attestent la légalité et qu’ils signent avec les parties permet de lui reconnaître un caractère exécutoire, de lui reconnaître l’ensemble des effets de droit qu’il comporte. C’est en cela que la force exécutoire est liée à la juridiction, parce que celle-ci comporte une vérification préalable de la légalité de l’acte. Le conseil constitutionnel, par une formule de principe, a rappelé dès 1998 que « toute décision de justice a force exécutoire » (Dec. 98-403 DC, 29 juillet 1998, Rec. p. 276) ; à ne pas confondre, évidemment, avec l’autorité de chose jugée qui, au demeurant, n’est pas réservée à la justice étatiqueOr pas davantage que l’accès à la juridiction contentieuse, l’accès à la juridiction amiable ni même à la prérogative du caractère exécutoire n’est susceptible de relever d’une onérosité négociée qui permettrait de distinguer entre les juridictions ou entre les requérants. C’est en effet le principe d’accès au Juge, plus largement au service public de la justice qui est ici en cause. Et si l’accès au Juge peut n’être pas gratuit, il est gouverné par un principe d’égalité qui interdit de traiter différemment les requérants selon la façon dont ils exercent leur droit au Juge. Admettrait-on que les frais de timbres, l’aide juridictionnelle ou encore le droit de postulation puissent être négociés par ceux qui en sont les porteurs et dont l’office conditionne l’accès au Juge ? Ainsi, à propos de l’aide juridictionnelle, le conseil constitutionnel vérifie l’existence d’un tarif et le respect, dans le mode d’établissement de celui-ci, de l’égalité des usagers devant le tarif (c. consti. Déc. 2011-198 QPC, 25 novembre 2011, Rec. p. 553).Qu’il s’agisse de prestations auxiliaires liées à l’accès au Juge ou de l’exécution de ses décisions ou, plus évidemment encore, de l’accès directement à l’office du Juge comme c’est le cas des notaires dans l’exercice de la juridiction amiable, le principe constitutionnel d’égalité dans l’exercice du droit au Juge s’impose et veut lui-même l’unicité du tarif, sans possibilité de rabais négociés.

Ajoutons que le fait que le tarif s’impose au professionnel lui-même rejoint le principe d’indépendance et d’impartialité des juridictions, lui aussi principe de caractère constitutionnel (par ex. c. consti. Déc 2012-250 QPC, 8 juin 2012, Rec. p. 281). L’impossibilité pour le professionnel de négocier la rémunération attachée à l’acte avec le demandeur d’authenticité ou d’exécution garantit une complète indépendance du premier par rapport aux parties à l’acte qu’il reçoit ou établit. Il reçoit ou établit l’acte et lui confère force exécutoire à des conditions tarifaires qui résultent mécaniquement de l’application du tarif arrêté par la puissance publique ; ainsi s’explique et se justifie, en particulier, l’interdiction faite aux notaires de renoncer à l’application du tarif.Le principe d’égalité dans l’accès au Juge s’impose ainsi, principe qui veut l’application d’un tarif arrêté par la puissance publique et impératif tant pour le Juge ou les officiers publics associés à la juridiction ou exerçant la juridiction amiable que pour la généralité des usagers (v. par ex. c. consti. Déc. 2013-679 DC, 4 décembre 2013). Cet égal accès au service public de la justice peut passer, soit par la gratuité, soit par un tarif ou des droits à la condition que ceux-ci soient établis de façon objective et pour la généralité des usagers. Il est incompatible avec la formule de rabais négociés, telle que prévue par le projet de loi sur la croissance et l’activité. Et le conseil constitutionnel, par des décisions répétées, a reconnu le caractère constitutionnel du droit au recours, élément nécessaire de la garantie des droits (voir par exemple, c. consti. Déc. 96 373, 9 avril 1996 DC, Rec. p. 43 ; Déc. 2011-129 QPC, 13 mai 2011, Rec. p. 239 ; Déc. 2011-138 QPC, 17 juin 2011, Rec. p. 281 ; Déc. 2012-283 QPC, 23 novembre 2012, Rec. p. 605 ; Déc. 2013-338/339 QPC, 13 septembre 2013Cette objection de constitutionnalité n’a apparemment pas été relevée par le conseil d’État lorsqu’il a examiné l’avant-projet de loi. Cela n’interdit nullement de la faire valoir lors de l’examen parlementaire de celui-ci ou devant le conseil constitutionnel s’il doit être saisi de l’ensemble de la loi votée avant sa promulgation.

b) Sur la fonction du tarifLe tarif des professionnels concernés par le projet de loi n’a pas à ce jour d’abord pour fonction de rémunérer à leur juste coût les prestations correspondantes. Bien sur, il comporte cet élément mais, au-delà, il s’agit, par la détermination d’un tarif qui est le fait de la puissance publique, d’assurer à la fois une forme de péréquation interne tenant compte des actes – nombreux - établis à perte et aussi d’assurer le financement d’un véritable service public de la sécurité juridique confié à ces professionnels : conservation des actes ; institutions d’intérêt collectif comme le fichier des dernières volontés pour le Notariat ; perception de droits et taxes ; collecte de renseignements administratifs ; alimentation du fichier immobilier, de différents registres, conservations des actes ; recouvrement ; significations ; etc.Le tarif n’est pas déterminé en fonction du coût de chaque prestation - comme l’on voudrait qu’il en soit demain – mais bien fixé unilatéralement par la puissance publique et appliqué par le professionnel qui ne peut en disposer. Et dans la fixation et la révision de ce tarif, la puissance publique veille à ce que, au bénéfice de compensations internes, le financement des activités d’intérêt général, de service public et de puissance publique confiées à ces professionnels soit assuré ainsi que le maillage géographique des offices, condition là encore de l’égal accès au service public.

Ce n’est pas sans raison que les notaires notamment dénoncent aujourd’hui le risque, avec le nouveau texte, d’un « désert juridique » auquel conduirait la liberté tarifaire ; surtout conjuguée avec la liberté d’installation, on va y venir.On retiendra de ceci que le financement par les coûts unitaires des différents actes reçus ou établis par ces professionnels est radicalement incompatible avec la dévolution par la loi à ceux-ci du service public de la justice amiable ainsi que d’autres activités de service public ou de puissance publique  ; et que, sur ce terrain encore, une discussion de constitutionnalité peut être ouverte.

II. LA LIBERTÉ D’INSTALLATION ET LE DROIT DE PRÉSENTATION Le droit de présentation, un moment contesté et à propos précisément du droit de présentation des notaires, a été reconnu non contraire à la Constitution, en l’espèce l’article 6 de la Déclaration des droits de 1789, par la décision du conseil constitutionnel du 21 novembre 2014 (n. 2014-429 QPC). Il est jugé que : « s’ils participent à l’exercice de l’autorité publique et ont ainsi la qualité d’officier public nommé par le Garde des Sceaux, les notaires titulaires d’un office n’occupent pas des « dignités, places et emplois publics » au sens de l’article 6 de la Déclaration des droits de 1789 ; que, par suite, le grief tiré de ce que le droit reconnu au notaire de présenter son successeur à l’agrément du Garde des Sceaux méconnaîtrait le principe d’égal accès aux dignités, places et emplois publics est inopérant ».Ce brevet de constitutionnalité, en l’espèce de la loi du 28 avril 1816 instituant le droit de présentation pour différentes professions juridiques et judiciaires laisse entière la compétence du législateur pour l’organiser, le réglementer, voire le supprimer. Et c’est d’ailleurs apparemment ce que la loi pour la croissance et l’activité voudrait faire pour le droit de présentation des avocats au conseil d’État et à la Cour de cassation.Elle procède différemment pour les autres professions concernées. Le projet de loi déposé énonce un principe de la liberté d’installation (c’est le titre de cette section de la loi) : « toute personne répondant à des conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience et d’assurance est titularisée en qualité de …. dans le lieu d’établissement de son choix ». La réserve du droit de présentation – réserve qui figurait dans l’avant-projet de loi en ces termes : « cette titularisation est effectuée par le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice sans préjudice du droit de présentation » - disparaît ou du moins n’est plus explicite dans le projet de loi déposé au Parlement. Il était encore indiqué dans l’avant projet de loi que l’installation des offices s’inscrit dans le cadre de recommandations émises par l’Autorité de la concurrence pour l’installation de ceux-ci et peut-être refusée « pour des raisons tenant au nombre et aux caractéristiques des offices déjà installés sur le territoire où se situe le lieu d’implantation choisi ». Dans le projet de loi déposé, ceci est remplacé par une « cartographie », établie sur proposition de l’Autorité de la concurrence, des zones où l’implantation de nouveaux offices est libre. Un appel à manifestation d’intérêt est organisé sur la base duquel intervient la décision de titularisation. Les décisions refusant la titularisation doivent être motivées. Cette procédure, au demeurant fort complexe, doit être précisée par décret en conseil d’État.On lit dans ces changements de rédaction entre l’avant-projet de loi et le projet déposé au Parlement la prise en compte - mais est-elle suffisante ? - des réserves de constitutionnalité faites par le conseil d’État lorsqu’il a examiné l’avant-projet de loi ; en un mot, s’il est confirmé que la loi peut disposer du droit

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de présentation, elle ne peut le faire que dans des conditions respectueuses du droit de propriété, du principe d’égalité devant les charges publiques et de la garantie des droits, consacrés respectivement par les articles 17, 6 et 13 de la Déclaration des droits de 1789.

a) Le droit de présentation, un statut législatifRappelons que la suppression du droit de présentation a fait l’objet historiquement de nombreux projets et propositions de loi donc aucun n’a abouti, butant en particulier sur la question dite du « rachat des charges», c’est-à-dire de l’indemnisation des titulaires d’office en place privés de la valorisation de leur office que permettait la présentation de leur successeur à la nomination du Garde des Sceaux.Pour s’en tenir à l’essentiel et parce que ceci semble avoir été absolument ignoré des rédacteurs de l’actuel projet de loi pour la croissance et l’activité, on rappellera que, sur la base d’une doctrine qui avait élaboré la théorie juridique de l’office ministériel analysé comme une propriété incorporelle, le droit de présentation fut menacé à plusieurs reprises par des initiatives parlementaires. La proposition de loi Fournière, du 12 janvier 1899, visait à la suppression du droit de présentation, présentée comme l’équivalent de l’abolition de tous les offices. C’était là son unique article, le texte renvoyant l’indemnisation des titulaires d’office à des lois de finances ultérieures et l’organisation des professions concernées à un règlement d’administration publique à venir. Tout aussi générale puisqu’elle visait pareillement tous les offices, la proposition Clémenceau du 23 octobre 1902 était plus complète en ce qu’elle réglait les conséquences de la suppression du droit de présentation. Les notaires devenaient des fonctionnaires de l’Ordre judiciaire, nommés et rétribués par l’État. L’indemnisation était prévue sur la base du prix d’achat des études. Une semblable fonctionnarisation était inscrite dans la proposition de loi Gruet du 9 juillet 1919, moyennant le rachat préalable de tous les offices. Ce même parlementaire reprit son projet, sans plus de succès, en mars 1933. A la différence des initiatives précédentes, la proposition de loi Saget, du 8 novembre 1920, concernait le seul notariat par la suppression du droit de présentation perçu, cette fois encore, comme une abolition de la finance. En conséquence un remboursement de la valeur des offices était prévu. Les notaires en exercice pouvaient, à leur demande, conserver leurs fonctions à titre personnel et viager tandis que les futurs notaires devaient être recrutés au concours. Aucun de ces textes ne fut voté par les Assemblées. Leur rappel n’en est pas moins fort instructif car il s’en dégage notamment les observations suivantes. La suppression du droit de présentation est assimilée par tous à l’abolition de la vénalité des offices, voire des offices eux-mêmes. Dans la quasi totalité de ces projets, les notaires sont fonctionnarisés, au titre des prérogatives de puissance publique qu’ils exercent. Enfin toutes ces réformes, présentées comme des expropriations, comportent ou prévoient un train de mesures d’indemnisation.Au début de la Vème République, le rapport Rueff-Armand ne préconisait pas, loin s’en faut, des mesures aussi radicales. Il se bornait à proposer la création de nouvelles études dans les cités et les régions en expansion ainsi qu’un abaissement du tarif pour les actes importants et pour les actes répétitifs.Quelques années plus tard, des sorts inverses étaient réservés à des offices ministériels autres que les offices notariaux. Tandis que la loi du 30 novembre 1965 fonctionnarisait les greffes des juridictions civiles et pénales, celle du

31 décembre 1971 supprimait les offices d’avoués près les Tribunaux de Grande Instance et ouvrait aux anciens avoués les portes de la nouvelle profession d’avocat. Dans le premier cas l’office ministériel était absorbé dans la fonction publique, dans le second, il rejoignait une profession libérale. Mais dans l’un et l’autre cas, une compensation pécuniaire égale à la valeur des offices supprimés était attribuée par l’État aux titulaires privés de leur charge et du droit de présentation correspondant.Le rapport Attali en 2008 préconisait la suppression du numerus clausus pour un certain nombre de professions judiciaires dont les mandataires de procédure collective et les avocats aux conseils. S’agissant des notaires, il n’envisageait que « l’ouverture des activités de notaire à de nouveaux professionnels… afin de répondre à l’augmentation des besoins de service juridique personnel, et cela notamment au moment où il est envisagé de confier aux notaires des compétences très étendues en matière de divorce par consentement mutuel » (Décision 216). Ce même rapport Attali invitait en revanche à la suppression des avoués près des cours d’appel pour les intégrer dans la profession d’avocat. Ce qui fut fait par la loi du 25 janvier 2011. A cette occasion, le conseil constitutionnel, saisi de la loi au titre du contrôle préventif, a rendu une décision importante sur l’indemnisation des avoués (Déc. n. 2010-624 DC du 20 janvier 2011, Rec. p. 67).Ainsi le législateur dispose du droit de présentation ; et il l’a déjà fait pour différents offices ou charges. Reste qu’il ne peut le faire que dans des conditions respectueuses du droit de propriété et de la garantie des droits, principes eux-mêmes reconnus et consacrés tant par la Constitution que par le protocole numéro 1 relatif au droit aux biens annexé à la Convention européenne des Droits de l’Homme. Ce qui se traduit par la nécessité de prévoir un mécanisme d’indemnisation approprié et non spoliatif.

b) La suppression de droit de présentation et le respect du droit de propriété, de l’égalité devant les charges publiques et de la garantie des droitsQuel est le mécanisme d’indemnisation prévu par le projet de loi pour la croissance et l’activité ? Le projet de loi se borne à mettre en place une procédure d’indemnisation pour les hypothèses où cette installation hors présentation causerait à un titulaire d’office en place un préjudice répondant aux conditions d’indemnisation de la loi  ; cette indemnisation serait alors à la charge du notaire nouvellement installé. Il n’y a pas en effet suppression du droit de présentation mais dévalorisation de celui-ci du fait de l’ouverture de la Profession à la libre installation hors droit de présentation.De la sorte est contournée l’objection d’une indemnisation générale par l’État des professionnels en place, puisque ceux-ci conservent leur droit de présentation et que, lorsque ce dernier est dévalorisé du fait de l’ouverture de la profession, une compensation indemnitaire est versée, curieusement mise à la charge du notaire nouvellement installé et non de l’État. Cette façon de faire a été critiquée des points de vue constitutionnel et conventionnel par le conseil d’État dans l’avis donné sur l’avant-projet de loi. Que dit en effet l’avis du conseil d’État ? Il admet que le projet de loi puisse poursuivre un objectif d’intérêt général en ouvrant les professions pour « susciter une offre plus dense, plus diversifiée et plus ouverte des services fournis par les offices et aménager un débouché aux professionnels salariés ». Mais cela ne peut se faire, sauf à méconnaître les exigences constitutionnelles, en posant tout uniment un

principe selon lequel toute personne présentant les qualités suffisantes peut, sur la base d’une manifestation d’intérêt, « être titularisée dans le lieu d’établissement de son choix ». Plus précisément, l’objectif d’ouverture de la profession qui est, en lui-même, légitime de la part du législateur ne peut pas passer par un principe de libre établissement tel que prévu par le projet de loi. S’y opposent le principe d’égalité devant les charges publiques et la garantie des droits, consacrés respectivement par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de 1789.En effet ce dernier principe, celui de la garantie des droits, est interprété par le conseil constitutionnel depuis 2007 comme interdisant, sauf motif d’intérêt général suffisant, de porter atteinte aux situations légalement acquises ou de remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations (c. consti., 27 février 2007, Déc. n. 2007-350 DC - 19 décembre 2013, Déc. n. 2013-682 DC). On sait que cette jurisprudence du conseil constitutionnel n’est pas étrangère à la consécration par la Cour Européenne des Droits de l’Homme du principe de confiance légitime qui protège comme un bien l’espérance légitime et raisonnable d’obtenir la jouissance effective d’un élément du droit de propriété En l’espèce, en termes de proportionnalité, le motif d’intérêt général d’ouverture de la profession n’est pas jugé suffisant pour porter une atteinte de cette gravité à la garantie des droits des professionnels en place. Le préjudice ainsi causé aux professionnels en place serait, en l’absence d’un dédommagement adéquat, « trop grave pour ne pas méconnaître ces garanties constitutionnelles »  ; serait en effet substantiellement réduite la valeur patrimoniale des offices existants, ladite valeur résultant du droit de présentation et des dispositions légales actuelles subordonnant la création de nouveaux offices à une procédure de concertation avec la profession et à une indemnisation des titulaires des offices concernés.Pour tenir compte de ces critiques, des modifications - que l’on peut Juger largement rédactionnelles - ont été apportées à l’avant-projet et est ainsi apparue, dans le projet de loi déposé, la distinction, qui devrait se faire sur la base des recommandations de l’Autorité de la concurrence, de « zones où l’implantation d’offices est libre » et de « zones où l’implantation d’offices supplémentaires serait de nature à porter atteinte à la continuité de l’exploitation des offices existants ou à compromettre la qualité du service rendu » ; le nombre des zones où l’implantation d’offices est libre devant être progressivement augmenté.Il s’agit en réalité de nouvelles modalités du même parti de substitution au maillage géographique administré actuel d’un principe de libre installation, laquelle, même si elle est annoncée comme devant se faire progressivement, ne met pas, selon moi, la réforme à l’abri des critiques de constitutionnalité qu’appelle le principe même d’une libre installation, telles que ses critiques ont été formulées dans l’avis du conseil d’État. À quoi s’ajoute que l’ouverture de la profession se ferait au rythme et sur la base des recommandations de l’Autorité de la concurrence dont ce n’est ni la mission ni le domaine de compétence.

III. L’INDEMNISATION PAR LE NOUVEL ARRIVANT On s’intéressera encore aux dispositions du projet de loi prévoyant que l’indemnisation éventuelle des offices en place lésés par l’installation « libre » d’un nouvel office serait à la charge de ce dernier :

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lorsqu’il y a lieu à indemnisation du fait d’une installation dans une zone déjà « desservie », le projet de loi met en place un curieux mécanisme d’expropriation pour cause d’utilité privée qui désigne le notaire qui s’installe comme débiteur de l’indemnité d’expropriation.Ceci mérite d’être discuté, du seul point de vue du droit. C’est en effet la responsabilité de l’État qui, en réalité, est ici en cause, responsabilité sans faute du fait du dispositif de la loi nouvelle, responsabilité dont le transfert au nouveau professionnel qui s’installe comporte une rupture de l’égalité devant les charges publiques et méconnaîtrait ainsi l’article 6 de la Déclaration des droits de 1789.En outre les mesures prévues par le projet de loi paraissent insuffisantes ou inappropriées, en ce qu’elles ne prévoient une indemnisation qu’à des conditions très restrictives et en ce qu’elles confèrent à l’Autorité de la concurrence, dit le conseil d’État, « des prérogatives étrangères à sa mission fondamentale et contradictoires entre elles : en la conduisant à statuer sur un préjudice qu’elle aurait contribué à causer, elles placeraient en effet l’Autorité dans une situation peu propice à l’accomplissement serein de ses nouvelles fonctions ».

IV. LES RENVOIS A DES ORDONNANCES DE L’ARTICLE 38 DE LA CONSTITUTION Le projet de loi actuellement débattu comporte, dans ses articles 20, 21 et 22, le renvoi à des ordonnances de l’article 38 de la Constitution pour fixer, par voie réglementaire, des aspects importants de la réforme des professions réglementées en cause. Il s’agit - pour faire bref - : de la création d’une profession unique regroupant les huissiers de justice, les mandataires judiciaires et les commissaires-priseurs judiciaires ; du recrutement par concours des greffiers des Tribunaux de commerce ; de la création de sociétés d’exercice commun à plusieurs professions juridiques et judiciaires et d’expertise comptable ; de l’ouverture du capital des professions juridiques et judiciaires ; enfin de la création des sociétés d’exercice libéral. Ces habilitations figuraient déjà, dans des termes

un peu différents, dans l’avant-projet de loi tel qu’il a été examiné par le conseil d’État. La technique des ordonnances de l’article 38 de la Constitution, déjà très – trop - pratiquée depuis longtemps, a été annoncée récemment comme devant être systématique aujourd’hui pour des raisons d’accélération des procédures et d’encombrement du Parlement. Il faut bien comprendre que, pour être inscrite dans la Constitution (ce qui ne s’est d’ailleurs pas fait sans hésitation en 1958), elle constitue une forme de défausse du pouvoir législatif sur l’autorité réglementaire et que, à ce titre, elle est naturellement contrôlée par le conseil constitutionnel et par le conseil d’État. Le conseil constitutionnel vérifie que les termes de la loi d’habitation, en l’espèce les articles que j’ai rappelés du projet de loi Macron, ne comportent aucune inconstitutionnalité et sont suffisamment précis pour encadrer l’intervention de l’autorité réglementaire ; le conseil d’État vérifie, tant que l’ordonnance n’a pas été ratifiée, que celle-ci respecte l’ensemble des règles constitutionnelles et, tout spécialement, les termes de la loi d’habitation ; enfin, depuis la réforme constitutionnelle de 2008, les ordonnances sont nécessairement soumises au Parlement pour ratification et, à l’occasion de la loi de ratification, le contrôle du conseil constitutionnel peut à nouveau s’exercer.Dans le cas présent, des réserves ont été faites par le conseil d’État à l’occasion de l’examen de l’avant-projet de loi, portant notamment sur la possibilité de créer une profession unique regroupant les huissiers de justice, les mandataires judiciaires et les commissaires-priseurs judiciaires. Dans le débat parlementaire actuel, il est donc légitime de s’interroger à nouveau sur la portée de ces habilitations et sur la nécessité, pour le législateur, d’encadrer strictement le pouvoir réglementaire ; ce qui pourrait contraindre ce dernier à s’écarter de projets d’ordonnance qui – a-t-on dit - sont déjà pratiquement rédigés.

CONCLUSIONEt maintenant je me tais. Il faudra suivre les travaux d’examen du projet de loi pour voir comment ces textes évolueront ; et, éventuellement, contribuer

à alimenter la discussion parlementaire. Reste que, dans les limites de cette réflexion d’étape, on a des raisons de penser que la réforme, telle qu’elle est engagée, demeure exposée aux critiques de constitutionnalité portant sur le principe même d’un dispositif consistant à organiser sur un modèle de libre installation et de libre concurrence des professions réglementées d’officiers publics investis de prérogatives de puissance publique et de juridiction et délégataires du service public de la sécurité juridique. 2015-112

**Professeur à l’Université Panthéon-AssasMembre de l’Institut

1. V. sur ce point L’authenticité, La documentation française 2013, sous la direction de L. Aynès, sp. n° 16 et s.2. v. notamment les développements de Madame. Cassuto-Teytaud dans le rapport de la Cour de cassation pour 2002.3. De lege ferenda, la question de l’exercice de la profession d’avocat en entreprise, avec les conséquences qui s’y rattachent (secret professionnel notamment) en est une autre illustration. En liant le secret professionnel à la seule activité de défense en justice (cons. n°42), l’arrêt rendu par la Cour de justice le14 septembre 2010 (C 550/07P, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals Ltd) est à cet égard anachronique (RTDCiv.2010, 814). 4. Dans son avis n° 389.494 sur le projet de loi pour la croissance et l’activité, rendu le 8 décembre 2014, le Conseil d’État affirme qu’il « n’a pu que déplorer, à la date de sa saisine du projet de loi, le caractère lacunaire et les graves insuffisances de l’étude d’impact sur nombre de dispositions du projet ».5. V. par exemple l’intervention de Monsieur Marc Dolez, dès le début des débats, lors de la séance ayant eu lieu le lundi 12 janvier 2015 à 16 h : « Si je me félicite de la participation de Monsieur Emmanuel Macron à l’intégralité de nos travaux, je regrette que le Gouvernement n’ait pas autorisé d’autres Ministres à le rejoindre, alors que c’est sur la base du texte qui sera adopté en commission que les débats s’engageront dans l’hémicycle. Il est en particulier dommage que madame la Garde des Sceaux ne soit pas présente lors du débat sur la réforme des professions juridiques réglementées ».6. V. l’avis n° 15-A-02 du 9 janvier 2015 relatif aux questions de concurrence concernant certaines professions juridiques réglementées.7. V. le rapport d’information n° 580, présenté le 4 juin 2014 par Monsieur Patrice Gélard au nom de la Commission des lois du Sénat, énonçant que « La suppression de la profession d’avoués était aussi motivée par la volonté de soumettre à la concurrence cette activité, ce qui impliquait la disparition du tarif acquitté par les appelants. Une baisse du coût de cette procédure d’appel pour le justiciable en était attendue. Cette espérance semble encore loin d’être satisfaite. En effet, la taxe d’appel de 150 euros renchérit durablement le coût de l’appel pour les parties, et compte tenu des surcoûts de la réforme, il est peu probable qu’elle diminue ou disparaisse prochainement. S’ajoute à cela, pour le justiciable, les honoraires que les avocats ont substitué au tarif anciennement payé aux avoués ».8. Selon le rapport de la Cour de cassation pour l’année 2006, cette réforme a entraîné une diminution de 33% des pourvois formés en matière sociale. En même temps, les pourvois formés sont devenus plus efficaces puisque le taux de cassation devant la Chambre sociale est passé de 6 % en 2004 à près de 30 % en 2014.9. CJCE, 17 juin 1999, Unibank, Defrénois 1999. 1315, note R. Crône ; Europe 1999. comm. 317, obs. L. Idot ; Rev. crit. DIP 2000. 245, note G. A. L. Droz ; JDI 2000. 539, obs. A. Huet.10. Règlement du 21 avril 200411. C.E.D.H., 19 mars 1997, Horsby c/ Grèce.12. C.E.D.H., 21 avril 1998, Estima Jorge c/ Portugal.13.  C. Untermaier et Ph. Houillon, Rapport au nom de la mission d’information sur les professions juridiques réglementées, A.N. déc. 2014, p. 10.14. C. constit, décision n° 2014-429 QPC du 21 novembre 2014.15. Cf. « La prestation juridique n’est pas une marchandise  : le rôle des professions réglementées du droit », colloque du Haut conseil des professions du droit, dir. D. Le Prado, Cour de cassation, 15 octobre 2014.

Plusieurs questions préparées par les étudiants du Master 2 ont été posées aux intervenants : 1) Dans quelle mesure la simplification

des conditions d’installation et la modification

de la tarification portent-elles atteinte ou améliorent-elles les conditions d’exercice des professions de notaire et d’huissier de justice ? 2) Quelles sont les incidences de l’élargissement de la postulation au ressort de la Cour d’appel et

êtes-vous satisfaits du retrait du statut d’avocat d’entreprise du projet de loi ? 3) À plus large spectre, quels sont les impacts de cette réforme sur notre modèle de justice ? Les représentants des différentes professions

Université de ToursLa réforme des professions juridiques réglementées : péril ou renouveau ?

Colloque du 26 janvier 2015 à Tours

Le Master 2 Conseil et Contentieux de la Faculté de droit, d’économie et de sciences sociales de Tours a organisé le 26 janvier 2015 une table ronde sur « La réforme des professions juridiques réglementées : péril ou renouveau ? », à laquelle participaient Philippe Baron, Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Tours, Lionel Cadière, Président de la Chambre départementale des huissiers de justice d’Indre-et-Loire, Carole Coulon, Présidente de la Chambre départementale des notaires d’Indre-et-Loire, Alexis Brunelle, rapporteur à l’Autorité de la concurrence et Olivia Sabard, Professeur de droit privé à l’Université de Tours. Jean-René Tancrède

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26 Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9

Veille législative

PARISCONSTITUTION

MANEXELSociété par Actions Simplifiée

à capital variableau capital de 500 Euros

Siège social :3, rue Troyon75017 PARIS

Aux termes dʼun acte sous seing privéen date à Paris du 5 mars 2015, il a étéconstitué une société présentant lescaractéristiques suivantes : Dénomination sociale :

MANEXEL Siège social : 3, rue Troyon 75017 PARIS Forme : Société par ActionsSimplifiée à capital variable. Capital dʼorigine : 500 Euros, diviséen 50 actions de 10 Euros chacune. Capital minimum : 500 Euros. Capital maximum : 5 000 Euros. Objet social : consultant en sécurité,organisation, assistance à la gestiondʼentreprises. Prestations de services,formation, management. Durée : 99 ans. Présidente : Madame LindseyPICARD de MULLER demeurant 5, rueHenri Potet 60350 VIEUX MOULIN. Admission aux Assemblées : chaqueActionnaire a le droit de participer auxdécisions collectives par lui-même oupar son mandataire. Exercice du droit de vote : chaqueaction donne droit à une voix. Agrément : à la majorité simple, libreentre ascendants et descendants. Immatriculation : au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.540 Pour avis

LES JURISTES ASSOCIESDU CENTRE

Société dʼAvocats57, rue du Clos Notre-Dame

CS 7991363057 CLERMONT-FERRAND

CEDEX 1

KORTALYSSociété par Actions Simplifiée

au capital de 6 667 EurosSiège social :

336, rue Saint Honoré75001 PARIS

Aux termes dʼun acte sous seing privéen date à Clermont-Ferrand du 9 mars2015, il a été constitué une sociétéprésentant les caractéristiques suivantes : Dénomination sociale :

KORTALYS Siège social : 336, rue Saint Honoré 75001 PARIS Forme : Société par ActionsSimplifiée. Capital social : 6 667 Euros. Apports en numéraire : 6 667 Euros. Objet : prises de participations danstoutes sociétés de quelles que formes quece soit et quels que soient leurs objets ;gestion directe ou indirecte de cesparticipations ainsi que de tousportefeuilles dʼactions, de parts oudʼobligations ; participations dans toutessociétés immobilières, quelle quʼen soitla forme et quel quʼen soit leur objet ;acquisition, dépôt, propriété, gestion,exploitation, concession, cession detoutes marques et brevets ; signature decontrats de prestations de services avecdes sociétés dans lesquelles elledétiendrait des participations en vue deprendre en charge dans les sociétés, lagestion administrative, commerciale,financière et comptable, la mise enoeuvre de la publicité des sociétés, lacréation et le développement des offres,des infrastructures, la recherche,lʼinnovation et le développement des

solutions et des services. Et généralement, toutes opérationscommerciales, financières, industrielles,mobilières et immobilières pouvant serattacher directement ou indirectement àlʼobjet social, ou susceptibles dʼenfavoriser lʼextension et ledéveloppement. Durée : 99 ans. Président : Monsieur LaurentCAREDDA demeurant 9, route de SaintAmant (Chaynat) 63320 LUDESSE. Commissaires aux Comptes : Titulaire : la société EXCO sise14, avenue Marx Dormoy63000 CLERMONT-FERRAND,R.C.S. B 873 200 182 CLERMONT-FERRAND. Suppléant : la société A.A.ARVERNE AUDIT sise 40, boulevardPochet Lagaye 63000 CLERMONT-FERRAND, RC.S. B 383 330 883CLERMONT-FERRAND. Cessions : toute cession à un tiers ouau profit dʼun Associé est soumise à uneprocédure dʼagrément selon les règlesstatutaires. Accès aux Assemblées et droit devote : tout Associé peut participer auxAssemblées et chaque action donne droità une voix. Immatriculation : au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.

Pour avis552 Le Président

MODIFICATION

FINANCIERE DE LESQUINSociété par Actions Simplifiéeau capital de 3 035 144 Euros

Siège social :31, rue de Châteaudun

75009 PARIS494 579 527 R.C.S. PARIS

Aux termes du procès-verbaldʼAssemblée Générale Mixte des

Associés en date du 2 mars 2015, il a étédécidé de désigner en qualité deDirecteur Général de la société àcompter du même jour et pour une duréeillimitée, Monsieur Sylvain DUPONT,de nationalité française, né le2 mars 1980 au Blanc Mesnil(Seine-Saint-Denis) demeurant 19, ruede Conflans 94220 CHARENTON LEPONT. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.538 Pour avis

SOFGESTSociété Civile

au capital de 152,45 EurosSiège social :

4, rue Paul Gervais75013 PARIS

343 797 650 R.C.S. PARIS LʼAssemblée Générale Ordinaire du30 janvier 2015, a maintenu MadameJackie ROUTIER demeurant6, rue Mirabeau 75016 PARIS en qualitéde Gérante à compter du même jour pourune durée illimitée suite à la démissionde Monsieur Gabriel BERNIER. LʼAssemblée Générale Extraordinairedu 2 février 2015 a décidé de transférerle siège social du : 4, rue Paul Gervais 75013 PARIS au : 6, rue Mirabeau 75016 PARIS à compter du même jour. et de prolonger la durée de la sociétépour une période de 10 ans, soit jusquʼau20 décembre 2032. Les statuts ont été modifiés enconséquence. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.544 Pour avis

Les Annonces de la Seine du jeudi 12 mars 2015 - numéro 9 1

ont regretté la méthode législative employée par le Ministère de l’Économie qui ne s’est pas appuyé sur des études d’impact suffisantes. Ils ont également fait part de leurs craintes quant à l’évolution de leurs professions et plus généralement de notre système juridique  : perte de qualité de la prestation juridique fournie, détérioration du maillage territorial en raison de la fermeture d’études de notaires et d’huissiers de justice et de Cabinets d’avocats, atteinte portée à l’accès au droit et à la justice. Ces craintes sont partagées par Olivia Sabard, qui soulève par ailleurs la contrariété de certaines dispositions à la Convention européenne de sauvegarde des Droits  de  l’Homme et des libertés fondamentales (droit au respect des biens) et aux exigences constitutionnelles (principe d’égalité devant les charges publiques et principe de garantie des droits). Monsieur Brunelle, attaché quant à lui à une analyse des professions juridiques réglementées sous le prisme de la concurrence, a insisté sur le besoin de faciliter la liberté d’installation et de rapprocher les tarifs des coûts réels. Deux logiques qui conduisent à des réponses radicalement opposées quant à la question de savoir si la prestation juridique est une prestation comme les autres à laquelle le marché doit donner un prix. 2015-113

Nathalie Albert, Doyen de la Faculté, Philippe Baron, Carole Coulon, Olivia Sabard, Alexis Brunelle et Lionel Cadière.

D.R

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Annonces judiciaires et légales

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Annonces judiciaires et légales

Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9

SIPHINVESTSociété à Responsabilité Limitée

au capital de 10 000 EurosSiège social :

17, rue Vernet75008 PARIS

791 470 834 R.C.S. PARIS Par délibération du 19 février 2015,lʼAssemblée Générale Extraordinairestatuant en application de lʼarticleL.223-42 du Code de Commerce, adécidé quʼil nʼy avait pas lieu àdissolution anticipée malgré un actif netinférieur à la moitié du capital social. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.545 Pour avis

COVEASociété de Groupe dʼAssurance Mutuelle

régie par le Code des AssurancesSiège social :

7, place des Cinq Martyrsdu Lycée Buffon

75015 PARIS450 527 916 R.C.S. PARIS

Par lettre datée du 25 novembre 2014,Monsieur Jean-Philippe GAUDUCHONa démissionné de ses fonctionsdʼAdministrateur à effet immédiat. Aux termes du ConseildʼAdministration en date du18 décembre 2014, il a été pris acte desa démission. Madame Monique BERGERdemeurant 330, chemin de la Colle83330 EVENOS a été nommée enqualité dʼAdministrateur pour la duréerestant à courir du mandat de sonprédécesseur, à savoir jusquʼà lʼissue delʼAssemblée Générale qui se tiendradans lʼannée 2017 pour statuer sur lescomptes clos le 31 décembre 2016. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.553 Pour avis

REMIX LINESociété à Responsabilité Limitée

au capital de 7 500 EurosSiège social :

34, rue Montorgueil75001 PARIS

479 005 811 R.C.S. PARIS Aux termes du procès-verbal delʼAssemblée Générale Extraordinaire du5 janvier 2015, il résulte que le siègesocial a été transféré du : 34, rue Montorgueil 75001 PARIS au : 81, rue Rambuteau 75001 PARIS à compter du 5 janvier 2015. Lʼarticle 4 des statuts a été modifié enconséquence. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.555 Pour avis

LOUIS VUITTON EDITEURSociété par Actions Simplifiée

au capital de 40 000 EurosSiège social :

2, rue du Pont Neuf75001 PARIS

514 035 633 R.C.S. PARIS Le 24 février 2015, lʼAssocié Uniquea décidé de nommer Monsieur MichaëlBURKE, de nationalité française, né le20 février 1957 à Annemasse(Haute Savoie) demeurant 2, rue du PontNeuf 75001 PARIS, en qualité denouveau Président, à compter du mêmejour, pour une période dʼune année, soitjusquʼà lʼissue des décisions delʼAssocié Unique devant statuer surlʼapprobation des comptes de lʼexerciceclos le 31 décembre 2015, enremplacement de Monsieur FrédéricWINCKLER. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.527 Pour avis

HARMONIE ET SENTEURDE FRANCE

Société à Responsabilité Limitéeau capital de 20 000 Euros

Siège social :12-14, Rond-Point

des Champs-Elysées75008 PARIS

799 853 155 R.C.S. PARIS Aux termes des délibérations en datedu 31 décembre 2014, lʼAssembléeGénérale Ordinaire de la société a prisacte de la démission de MonsieurEugeniusz SABIK en qualité deCo-Gérant avec effet au 31 décembre2014. La société est gérée depuis cette datepar Monsieur Boguslaw Jerzy HASS,seul Gérant. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.530 Pour avis

SCI HELANCLAIRSociété Civile Immobilière

au capital de 980 EurosSiège social :

21, rue de Saintonge75003 PARIS

809 562 994 R.C.S. PARIS Aux termes de lʼAssemblée GénéraleOrdinaire en date du 14 février 2015, il aété décidé de nommer en qualité deCo-Gérante à compter du même jourpour une durée indéterminée, MadameMarianne LASSNER demeurant21, rue de Saintonge 75003 PARIS. La société est désormais dirigée parMesdames Hélène BEJAT et MarianneLASSNER, Co-Gérantes. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.532 Pour avis

PLUME ARCHITECTESSociété à Responsabilité LimitéeUnipersonnelle dʼArchitecture

au capital de 3 000 EurosSiège social :

55, rue de Paradis75010 PARIS

795 279 108 R.C.S. PARIS En date du 2 janvier 2015, lʼAssociéeUnique a décidé de transférer le siègesocial de la société du : 55, rue de Paradis 75010 PARIS au : 50, rue de La Bruyère 75009 PARIS à compter du 2 janvier 2015. Les statuts ont été modifiés enconséquence. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.533 Pour avis

MELISHOPSociété à Responsabilité Limitée

au capital de 60 000 EurosSiège social :

Le Bourg36500 CHEZELLES

514 965 375 R.C.S. CHATEAUROUX LʼAssemblée Générale Extraordinairedu 13 février 2015 a décidé de transférerle siège social de : Le Bourg 36500 CHEZELLES au : 55, avenue Marceau 75116 PARIS avec effet au 1er mars 2015 et amodifié lʼarticle 4 des statuts enconséquence. Suite à ce transfert, il est rappelé lescaractéristiques suivantes : Objet : la vente de produitsalimentaires et notamment de produitsapicoles et dérivés. Durée : 99 années à compter de sonimmatriculation au Registre duCommerce et des Sociétés en date du24 septembre 2009.

Gérance : Madame Elise IWEINS-HERNAEZ demeurant 100, avenue duSalève 01220 DIVONNE LES BAINS. La société sera immatriculée auRegistre du Commerce et des Sociétés deParis et radiée de celui de Châteauroux.549 Pour avis

NYCO Société par Actions Simplifiée

à Directoire et Conseil de Surveillanceau capital de 5 943 817,422 Euros

Siège social :66, avenue des Champs Elysées

75008 PARIS582 103 610 R.C.S. PARIS

Aux termes de lʼAssemblée GénéraleExtraordinaire du 12 février 2015,enregistrée au Service des Impôts desEntreprises de Paris 8ème "Europe Rome"le 3 mars 2015, bordereau 2015/658,case 46, il a été décidé dʼaugmenter lecapital social de 122 449,09 Euros, pourle porter de 5 943 817,422 Euros à6 066 266,512 Euros par incorporationde la somme de 122 449,09 Eurosprélevée sur le compte"Report à nouveau" de la société. Cette augmentation de capital a étéréalisée par élévation du montantnominal des actions de 59,7687 Eurosà 61 Euros. Corrélativement lʼarticle 6 des statutsa été modifié. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.524 Pour avis

SAS MAISONPHILIPPERON BRENEOLSociété par Actions Simplifiée

au capital de 5 000 EurosSiège social :5, rue Vavin

75006 PARIS805 402 781 R.C.S. PARIS

Aux termes de lʼAssemblée Généraledes Associés en date du 2 mars 2015, il aété : - pris acte de la démission deMonsieur Pascal PHILIPPERON de sonmandat de Président à compter du mêmejour, - décidé de nommer, MadameEmmanuelle BRENEOL, épouseBOLELLI, de nationalité française,demeurant 99, rue Voltaire92800 PUTEAUX en qualité dePrésidente pour une durée illimitée. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Paris.557 Pour avis

CLÔTURE DE LIQUIDATION

PHARMACIE DE LA PORTEDE SAINT OUEN

CIRIMELE & DROGOULSociété dʼExercice Libéralà Responsabilité Limitée

en liquidationau capital de 150 000 Euros

Siège social :133, avenue de Saint Ouen

75017 PARIS484 021 464 R.C.S. PARIS

Aux termes du procès verbal en datedu 2 mars 2015, la collectivité desAssociés, a : - approuvé les comptes définitifs deliquidation, - donné quitus au Liquidateur de sagestion et décharge de son mandat, - prononcé la clôture de liquidation dela société, à compter du 2 mars 2015. Les comptes de liquidation serontdéposés au Greffe du Tribunal deCommerce de Paris en annexe duRegistre du Commerce et des Sociétésduquel la société sera radiée.

Pour avis525 Le Liquidateur

CONVOCATION

LE SECOURS CATHOLIQUEAssociation reconnue dʼutilité publique

Siège social :106, rue du Bac

75341 PARIS CEDEX 07

Les Membres de lʼAssociationLE SECOURS CATHOLIQUE sontconvoqués en Assemblée GénéraleOrdinaire le :

Jeudi 2 avril 2015 à 13 heures au :

106, rue du Bac Salle Jean Rhodain 75007 PARIS

afin de délibérer sur lʼordre du joursuivant : 1) ratification de résolutionsimmobilières, 2) questions diverses.539 Pour avis

YVELINESCONSTITUTION

Aux termes dʼun acte sous seing privéen date à Croissy sur Seine du 4 mars2015, il a été constitué une sociétéprésentant les caractéristiques suivantes : Dénomination sociale :

FSDC & ASSOCIÉS Siège social : 1, avenue du Maréchal Foch 78290 CROISSY SUR SEINE Forme : Société à ResponsabilitéLimitée. Capital : 7 0000 Euros Objet social : bureau dʼétudes,ingénierie et design ; la participation dela société par tous moyens, directementou indirectement dans toutes opérationspouvant se rattacher à son objet par voiede créations de sociétés nouvelles,dʼapports, de souscriptions ou dʼachatsde titres ou droits sociaux, de fusion ouautrement, de création, dʼacquisition, delocation, de prise en location-gérance oude tous fonds de commerce. Gérance : Monsieur StéphaneFRENOIS demeurant 1, avenue duMaréchal Foch 78290 CROISSY SURSEINE. Durée : 99 ans. Cession de parts : les parts sontlibrement cessibles entre Associés. Ellesne peuvent être cédées, à titre onéreux ougratuit, à des tiers non Associés quʼavecle consentement de la majorité desAssociés représentant au moins la moitiédes parts sociales. Immatriculation : la société seraimmatriculée au Registre du Commerceet des Sociétés de Versailles.548 Pour avis

MODIFICATION

EVERDATASociété par Actions Simplifiée

au capital de 10 000 EurosSiège social :

10, boulevard dʼAlembert78180 MONTIGNYLE BRETONNEUX

800 071 599 R.C.S. VERSAILLES En date et à effet du 24 octobre 2014,lʼAssemblée Générale Extraordinaire adécidé : - dʼaugmenter le capital pour le porterà 50 000 Euros par incorporation de

Les Annonces de la Seine du jeudi 12 mars 2015 - numéro 92

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28 Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9

Annonces judiciaires et légales

réserves à hauteur de 40 000 Euros, avecémission de 4 000 actions nouvelles,émises au pair, de 10 Euros de valeurnominale unitaire, - de transférer le siège social du : 10, boulevard dʼAlembert 78180 MONTIGNY LE BRETONNEUX au : 1, place Charles de Gaulle 78180 MONTIGNY LE BRETONNEUX - de modifier consécutivement lesstatuts. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Versailles.528 Pour avis

SCI NOUS TROISSociété Civile Immobilièreau capital de 160 100 Euros

Siège social :18, Grande Rue

78550 BAZAINVILLE507 579 241 R.C.S. VERSAILLES

Aux termes dʼune délibérationdʼAssemblée Générale Extraordinairedes Associés en date du 30 janvier 2015,il a été décidé de transférer le siègesocial à compter du même jour du : 18, Grande Rue 78550 BAZAINVILLE au : 7, Ferme de Baillé 53420 CHAILLAND Les statuts ont été modifiés enconséquence. La société sera immatriculée auRegistre du Commerce et des Sociétés deLaval et radiée de celui de Versailles.556 Pour avis

DISSOLUTION

S.M.C.Société à Responsabilité Limitée

au capital de 7 622,45 EurosSiège social :

55 bis, avenue Marcel Hirbec78390 BOIS DʼARCY

348 172 750 R.C.S. VERSAILLES LʼAssemblée Générale Extraordinairedu 31 décembre 2014 a décidé ladissolution anticipée de ladite société àcompter du 31 décembre 2014. Monsieur Antonio DA COSTAdemeurant 55 bis, avenue Marcel Hirbec78390 BOIS DʼARCY a été nomméLiquidateur. Le siège de liquidation a été fixé ausiège social, adresse à laquelle toutescorrespondances ainsi que tous actes etdocuments relatifs à la liquidationdevront être notifiés. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Versailles.542 Pour avis, le Liquidateur

CLÔTURE DE LIQUIDATION

BRASILIA EUROPESociété à Responsabilité Limitée

en liquidationau capital de 822 245,09 Euros

Siège social :67, rue des Courcieux

78570 ANDRESY348 079 583 R.C.S. VERSAILLES

En date et avec effet du 18 septembre2012, lʼAssemblée GénéraleExtraordinaire des Associés, a : - approuvé les comptes définitifs deliquidation à compter du même jour, - procédé aux opérations de clôture deliquidation avec apurement complet de lasituation tant active que passive, - approuvé lesdites opérations et ledécompte définitif, - donné au Liquidateur quitus delʼexécution de son mandat et déclarédéfinitivement closes les opérations de lasociété, qui se trouve ne plus avoirdʼexistence à compter du 18 septembre

2012, date de clôture de la liquidation. Les comptes de liquidation ont étédéposés au Greffe du Tribunal deCommerce de Versailles en annexe auRegistre du Commerce et des Sociétésduquel la société sera radiée.

Pour avis550 Le Liquidateur

A3W-RESOURCESSociété à Responsabilité Limitée

au capital de 7 622 EurosSiège social :

8, rue des Frères Caudron78140 VELIZY VILLACOUBLAY

424 089 20 R.C.S. VERSAILLES LʼAssemblée Générale Extraordinaireréunie le 6 mars 2015, a : - approuvé les comptes définitifs deliquidation, - déchargé Monsieur Henri WEIGELde son mandat de Liquidateur et donné àce dernier quitus de sa gestion, - prononcé la clôture de la liquidationà compter du même jour. Les comptes de liquidation serontdéposés au Greffe du Tribunal deCommerce de Versailles, en annexe auRegistre du Commerce et des Sociétésduquel la société sera radiée.

Pour avis537 Le Liquidateur

HAUTS DE SEINECONSTITUTION

Suivant acte sous seing privé en date àClichy du 20 février 2015, il a étéconstitué une société présentant lescaractéristiques suivantes : Dénomination sociale :

S.E.J. TOURFEH Siège social : 77, boulevard du Général Leclerc 92110 CLICHY Forme : Société à ResponsabilitéLimitée. Capital social : 10 000 Euros. Objet : - restauration traditionnelle avec unservice à la table, - service de traiteur, fourniture deservices de restauration et de préparationde repas pour particuliers ou entreprises, - importation, exportation, achat,vente de tous produits alimentaires. Durée : 99 années à compter de la datedʼimmatriculation au Registre duCommerce et des Sociétés. Gérante : Madame Majeda TURFEH,épouse JABALI demeurant112, boulevard Victor Hugo92110 CLICHY. Immatriculation : au Registre duCommerce et des Sociétés de Nanterre.529 Pour avis

MODIFICATION

MILES FASHIONGROUP FRANCE

Société à Responsabilité Limitéeà Associé Unique

au capital de 10 000 EurosSiège social :

115-123, avenue Charles de Gaulle92200 NEUILLY-SUR- SEINE478 867 526 R.C.S. NANTERRE

LʼAssemblée Générale Ordinaire delʼAssocié Unique en date du 18 février2015 a décidé de nommer : - Monsieur Ulf StefanBRETTSCHNEIDER, né le10 novembre 1964 à Moelin(99142 ALLEMAGNE) de nationalitéallemande, demeurant 35, Shelgate RoadLONDRES SW11 1 BA

(99132 GRANDE BRETAGNE) et, - Monsieur Nicholas AndrewCOTTRELL, né le 23 janvier 1960 àYork (99132 GRANDE BRETAGNE)de nationalité anglaise, demeurantApartment 153, NV Building, 98 theQuays, SALFORD M50 3BD(99132 GRANDE BRETAGNE) en qualité de Co-Gérants de la société,à compter du même jour et sanslimitation de durée, qui exerceront leurfonctions conjointement ou séparémentavec Monsieur Christopher CONZEN etMonsieur Dirk PUPKE, actuelsCo-Gérants. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Nanterre.563 Pour avis

LES CROISSANTS VOLANTSSociété à Responsabilité Limitée

au capital de 10 000 ESiège social :

15, rue Parmentier92800 PUTEAUX

409 457 587 R.C.S. NANTERRE Suivant lʼAssemblée Générale Mixtedu 20 février 2015, les Associés de lasociété ont décidé dʼaugmenter le capitalde 100 000 Euros pour le porter de10 000 Euros à 110 000 Euros parélévation de la valeur nominale des500 parts sociales qui est passée de20 Euros à 220 Euros, par prélèvementsur le compte de "Report à nouveau" àhauteur de la totalité de lʼaugmentationde capital. Les articles 6 et 7 des statuts ont étémodifiés en conséquence. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Nanterre.536 Pour avis

POMPES FUNEBRESDE VILLENEUVE LA GARENNE

Société à Responsabilité Limitéeau capital de 121 900 Euros

Siège social :52, avenue du Maréchal Leclerc

92390 VILLENEUVE LA GARENNE508 498 771 R.C.S. NANTERRE

Suivant lʼAssemblée GénéraleOrdinaire en date du 2 mars 2015, lesAssociés ont nommé MonsieurJean-Louis SANTILLI demeurant10, rue des Pommiers 93500 PANTIN enqualité de Gérant de la société à compterdu même jour pour une durée illimitée,en remplacement de Monsieur BaptisteSANTILLI, démissionnaire. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Nanterre.

Pour avis551 La Gérance

DIALOGIC SARLSociété à Responsabilité Limitée

Unipersonnelleau capital de 15 244,90 Euros

Siège social :1 et 3, rue Eugène Varlin

92240 MALAKOFF384 737 912 R.C.S. NANTERRE

Par Assemblée GénéraleExtraordinaire du 31 décembre 2014,lʼAssocié Unique a décidé, à compter dumême jour, de transférer le siège socialdu : 1 et 3, rue Eugène Varlin 92240 MALAKOFF au : 52, avenue Paul Vaillant Couturier 92240 MALAKOFF Les statuts ont été modifiés enconséquence. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Nanterre.554 Pour avis

PROMOCEAN FRANCE Société par Actions Simplifiéeau capital de 4 030 303 Euros

Siège social :115-123, avenue Charles de Gaulle

92200 NEUILLY SUR SEINE572 148 625 R.C.S. NANTERRE

LʼAssemblée Générale Ordinaire endate du 18 février 2015 a décidé denommer en qualité de deuxièmeDirecteur Général de la société, àcompter du même jour et pour une duréeillimitée, Monsieur Nicholas AndrewCOTTRELL, né le 23 janvier 1960 àYork (99132 GRANDE BRETAGNE)de nationalité anglaise, demeurantApartment 153, NV Building,98 the Quays, SALFORD M 50 3 BD(99132 GRANDE BRETAGNE). Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Nanterre.562 Pour avis

DISSOLUTION

SARL SPIMESociété à Responsabilité Limitée

au capital de 7 622,45 EurosSiège social :

16, rue Kléber92130 ISSY LES MOULINEAUX403 933 666 R.C.S. NANTERRE

SIRET : 403 933 666 00014 Aux termes du procès-verbal delʼAssemblée Générale Extraordinaire endate du 27 février 2015, il a été décidé deprononcer la dissolution anticipée de lasociété à compter du 28 février 2015. Monsieur Paul MARENCOdemeurant rue de Bourgogne, CitéCharles de Gaulle, Bâtiment A71120 CHAROLLES a été nommé enqualité de Liquidateur. Le siège de liquidation a été fixé ausiège social, adresse à laquelle toutescorrespondances ainsi que tous actes etdocuments devront être notifiés. Le dépôt légal sera effectué au Greffedu Tribunal de Commerce de Nanterreen annexe au Registre du Commerce etdes Sociétés.

Pour avis558 Le Liquidateur

CLÔTURE DE LIQUIDATION

MONTENOSociété à Responsabilité Limitée

au capital de 600 EurosSiège social :

102, rue Hoche92700 COLOMBES

490 898 319 R.C.S. NANTERRE LʼAssemblée Générale Extraordinaireréunie le 7 mars 2015, a : - approuvé les comptes définitifs deliquidation, - déchargé Madame CatherineBARBANDIERE de son mandat deLiquidatrice et donné à cette dernièrequitus de sa gestion, - prononcé la clôture de la liquidationà compter du même jour. Les comptes de liquidation serontdéposés au Greffe du Tribunal deCommerce de Nanterre en annexe auRegistre du Commerce et des Sociétésduquel la société sera radiée.

Pour avis543 La Liquidatrice

Les Annonces de la Seine du jeudi 12 mars 2015 - numéro 9 3

Page 29: Edition Du Jeudi 12 Mars 2015

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Annonces judiciaires et légales

Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9

SEINE-ST-DENISMODIFICATION

SPRINGWAYSociété Anonyme

au capital de 344 715 EurosSiège social :

3, rue Henri PoincaréZone dʼActivités Irène Joliot Curie

Quartier des Beaudottes93270 SEVRAN

582 013 876 R.C.S. BOBIGNY Aux termes des délibérations delʼAssemblée Générale Ordinaireannuelle en date du 30 juin 2014, il a étépris acte de la démission de MadameSolange MENDELSBERG de sesfonctions dʼAdministrateur et décidé denommer, en remplacement, MadameJacqueline GLAUBERG, née GUEZ,le 6 octobre 1953 à Hammam Lif(99351 TUNISIE) de nationalitéfrançaise, demeurant 38, rue du DocteurCalmette 93100 MONTREUIL pour unedurée de six années. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Bobigny.526 Pour avis

BGL HOLDINGSociété à Responsabilité Limitée

au capital de 1 000 000 EurosSiège social :

127, avenue Victor Hugo93300 AUBERVILLIERS

428 685 937 R.C.S. BOBIGNY Aux termes dʼune délibération delʼAssemblée Générale Ordinaire en datedu 5 mars 2015, il a été décidé denommer en qualité de Co-Gérante àcompter du même jour pour une durée dequatre années qui prendra fin à lʼissue dela réunion de lʼAssemblée GénéraleOrdinaire des Associés appelée àstatuer sur les comptes de lʼexerciceclos le 31 décembre 2018, MadameDelphine LASSUS demeurant101, rue des Cerisiers92700 COLOMBES. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Bobigny.531 Pour avis

EUROPE ENERGIEDISTRIBUTION FRANCE

Société à Responsabilité Limitéeà capital variable

au capital souscrit de 4 000 EurosSiège social :

67, boulevard Alsace Lorraine93110 ROSNY SOUS BOIS

799 410 378 R.C.S. BOBIGNY Aux termes des délibérations en datedu 4 septembre 2014, lʼAssembléeGénérale Extraordinaire des Associés dela société EUROPE ENERGIEDISTRIBUTION FRANCE, a décidé : - dʼétendre lʼobjet social à denouvelles activités et de modifier enconséquence le début de lʼarticle 2 desstatuts, qui sera désormais rédigé commesuit : "La vente directe et/ou indirecte detous produits énergétiques : combustiblesliquides, solides ou gazeux, carburantsliquides ou gazeux, tous autres produitsdans le domaine de lʼénergie, ainsi quetous produits issus du sol sous formebrute ou transformée. Lʼachat, la vente et la gestion detoutes actions liées à lʼefficacitéénergétique. La gestion des services liés à la ventede produits énergétiques pour le comptede ses Associés, et qui pourront êtreétendus à des adhérents FEDIE(Fédération Française des DistributeursIndépendants dʼEnergies) qui lesouhaiteraient. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Bobigny.

Pour avis534 La Gérance

SOCIETE D’EXPLOITATIONDE RESTAURATION

ET TRAITEUR SERVICESigle :

SERT SERVICESociété à Responsabilité Limitée

au capital de 7 622,45 EurosSiège social :

27, rue Godillot93400 SAINT OUEN

430 428 995 R.C.S. BOBIGNY Par délibération du 17 octobre 2014,lʼAssemblée Générale Extraordinairestatuant dans le cadre des dispositions delʼarticle L223-42 du nouveau Code deCommerce a décidé de ne pas prononcerla dissolution anticipée de la société bienque lʼactif net soit devenu inférieur à lamoitié du capital social. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Bobigny.541 Pour avis

TRANSFORMATION

EUROPE ENERGIEDISTRIBUTION FRANCE

Société à Responsabilité Limitéeà capital variableTransformée en :

Société par Actions Simplifiéeà capital variable

au capital souscrit de 4 000 Eurosporté à 2 000 500 Euros

Siège social :67, boulevard Alsace Lorraine

93110 ROSNY SOUS BOIS799 410 378 R.C.S. BOBIGNY

Aux termes dʼune délibération en datedu 4 septembre 2014, lʼAssembléeGénérale Extraordinaire des Associés,statuant dans les conditions prévues parlʼarticle L. 227-3 du Code de Commerce,a décidé la transformation de la sociétéen Société par Actions Simplifiée àcapital variable, à compter du mêmejour, sans création dʼun être moralnouveau et a adopté le texte des statutsqui régiront désormais la société. La dénomination de la société, sonobjet, son siège, son capital, sa durée etles dates dʼouverture et de clôture de sonexercice social demeurent inchangées. Suite à cette transformation, il estrappelé les caractéristiques suivantes : Admission aux Assemblées et droit devote : tout Associé peut participer auxAssemblées sur justification de sonidentité et de lʼinscription en compte deses actions. Chaque Associé a autant de voix quʼilpossède ou représente dʼactions. Transmission des actions : la cessiondʼactions au profit dʼAssociés ou de tiersdoit être autorisée par la société. Inaliénabilité des actions : pendantune durée de 4 ans. Monsieur Olivier COUTURAUD etMonsieur Philippe FALAIZE-JUANE,Co-Gérants, ont cessé leurs fonctions dufait de la transformation de la société. Sous sa nouvelle forme de société paractions simplifiée, la société est dirigéepar : Président : Monsieur OlivierCOUTURAUD demeurant 4, rue duRagard 88500 VOMECOURT SURMADON. Directeurs Généraux : MonsieurPhilippe FALAIZE-JUANE demeurantChemin de la Malissonne83740 LA CADIERE DʼAZUR etMonsieur Jean Louis POPIHNdemeurant 45, rue du Moulin de Pierre92140 CLAMART. Puis, lʼAssemblée GénéraleExtraordinaire réunie en date du4 septembre 2014 a décidé et réalisé uneaugmentation du capital social autoriséde 1 996 500 Euros par apports ennuméraire, et modifié les limites devariabilité du capital, ce qui rend

nécessaire la publication des mentionssuivantes : Anciennes mentions : capital socialsouscrit : 4 000 Euros. Montant en dessous duquel le capitalne peut être réduit : 2 000 Euros. Nouvelles mentions : capital socialsouscrit : 2 000 500 Euros. Montant en dessous duquel le capitalne peut être réduit : 2 000 500 Euros. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Bobigny.

Pour avis535 Le Président

VAL DE MARNECONSTITUTION

Sylvain GUILLAUD-BATAILLENotaire

6, rue Riboutté75009 PARIS

Téléphone : 01.53.24.90.90.Télécopie : 01.53.24.90.99.

Suivant acte sous seing privé en date àSaint Maur des Fossés, Quartier de LaVarenne Saint Hilaire (Val-de-Marne) du27 février 2015, il a été constitué unesociété présentant les caractéristiquessuivantes : Dénomination sociale :

SCI SAINT LEONARD 94 Siège social : 40, rue Saint Léonard Quartier de La Varenne Saint Hilaire 94100 SAINT MAUR DES FOSSES Forme : Société Civile. Capital : 1 000 Euros divisé en1 000 parts dʼun Euro chacune. Apports : apports en numéraire de1 000 Euros. Objet : lʼacquisition, la construction,la détention, la propriété,lʼadministration, la gestion et la mise àdisposition gratuite au profit dʼun ouplusieurs Associés, par tous moyensdirects ou indirects, de tous droits etbiens immobiliers. Durée : 99 ans à compter de sonimmatriculation au Registre duCommerce et des Sociétés. Co-Gérantes et seules Associées :Madame Marie-Françoise GAYRIN,veuve MOLLIER demeurant 40, rueSaint Léonard, Quartier de La VarenneSaint Hilaire 94100 SAINT MAUR DESFOSSES et Madame Hélène MOLLIER,épouse MARTIN-VIVIER demeurant13, rue Froissart 75003 PARIS. Agrément : toutes les cessions sontsoumises à lʼagrément préalable àlʼunanimité des Associés, à lʼexceptiondes mutations entre vifs intervenant entreAssociés ou au profit dʼun descendantdʼun Associé et des mutations par décèsau profit dʼun héritier déjà Associé oudʼun descendant du défunt. Immatriculation : au Registre duCommerce et des Sociétés de Créteil.522 Pour avis

MULTIFORM@Société par Actions Simplifiée

au capital de 2 000 EurosSiège social :

23, boulevard Léon Révillon94470 BOISSY SAINT LEGER

Aux termes dʼun acte sous seing privéen date à Boissy Saint Léger du15 décembre 2014, il a été constitué unesociété présentant les caractéristiquessuivantes : Dénomination sociale :

MULTIFORM@ Siège social : 23, boulevard Léon Révillon 94470 BOISSY SAINT LEGER Forme : Société par ActionsSimplifiée. Capital : 2 000 Euros, divisé en

100 parts de 20 Euros chacune. Objet social : lʼenseignement, laformation professionnelle sous toutes sesformes et sur tous supports à destinationde tous publics. Durée : 50 ans à compter de sonimmatriculation de la société au Registredu Commerce et des Sociétés. Président : Madame ElsaGLOMBARD demeurant 23, boulevardRévillon 94470 BOISSY SAINTLEGER. Admission aux Assemblées : chaqueActionnaire a le droit de participer auxdécisions collectives par lui-même oupar son mandataire. Exercice du droit de vote : chaqueaction donne droit à une voix. Le droitde vote attaché aux actions estproportionnel au capital quʼellesreprésentent. Transmission des actions : les actionsne peuvent être transférées entreActionnaires quʼavec lʼagrémentpréalable du Président de la société,lequel doit apprécier si le transfertenvisagé est conforme à lʼintérêt social. Immatriculation : au Registre duCommerce et de Créteil.523 Pour avis

Rectificatif à lʼinsertion 402 du23 février 2015 pour REGI TP, lire,Esref AYTAC, Président et non Gérant, et additif, lire : Directeur Général : Monsieur MesutPASIN, né le 11 novembre 1984 à Afsin(99208 TURQUIE) demeurant10, square Savorgnan de Brazza94310 ORLY , marié, de nationalitéTurque.

Pour avis547 Le Représentant Légal

MODIFICATION

SAINT-DENIS DISTRIBUTIONSociété par Actions Simplifiée

Unipersonnelleau capital de 10 000 Euros

Siège social :7, avenue de Sébastopol94210 LA VARENNE

SAINT HILAIRE800 766 248 R.C.S. CRETEIL

Par décisions en date du 3 mars 2015,lʼActionnaire Unique a décidé, à compterdu même jour, de : - modifier lʼobjet social, comme suit : La société a pour objet en France et àlʼEtranger : . audit, activité de conseil en gestion etautres conseils aux entreprises,formations professionnelles, . organisation et animation de stagesde formation pour tous publics, . organisation de séminaires et decongrès professionnels, . expertise dans les domaines de laformation, du recrutement et de lacommunication, . la participation de la société, par tousmoyens, à toutes entreprises ou sociétéscréées ou à créer, pouvant se rattacher àlʼobjet social, notamment par voie decréation de sociétés nouvelles, dʼapport,de commandite, de souscription oude rachat de titres ou droits sociaux, defusion, dʼalliance ou dʼassociation enparticipation ou groupement dʼintérêtéconomique ou de location-gérance. Et plus généralement, toutesopérations industrielles, commerciales etfinancières, mobilières et immobilièrespouvant se rattacher directement ouindirectement à lʼobjet social et à tousobjets similaires ou connexes pouvantfavoriser son extension ou sondéveloppement. - modifier la dénomination sociale,laquelle devient :

ECPE Les articles 2 et 3 des statuts ont étémodifiés en conséquence. Mention en sera faite au Registre duCommerce et des Sociétés de Créteil.

Pour avis546 La Présidence

Les Annonces de la Seine du jeudi 12 mars 2015 - numéro 94

Page 30: Edition Du Jeudi 12 Mars 2015

30 Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9

Palmarès

Université Paris 2 Panthéon-AssasPromotion 2014 Federico Mayor Zaragoza

Diplôme d’Université « La médiation » - Paris, 9 mars 2015

Les lauréats du Diplôme d’Université « La médiation » furent à nouveau réunis par Michèle Guillaume-Hofnung dans l’appartement Décanal de la Place du Panthéon à Paris ce 9 mars 2015.Elle les a accueillis en sa qualité de directrice et de créatrice de ce diplôme en 2000. Après Boutros Boutros Ghali et Jean-Paul Delevoye, cette année le parrain de la promotion est Federico Mayor Zaragoza. Ce diplomate espagnol est aussi poète et scientifique, il fut Directeur Général de l’UNESCO de 1987 à 1999 puis créa en 2000 la Fondation pour la Culture de la Paix qui a pour objet de promouvoir la transition d’une culture de la violence et de la force à celle de la tolérance et de la paix. Il a honoré de sa présence la cérémonie à laquelle ont également et notamment assisté Anna-Isabel Prera, ancienne Ambassadrice du Guatemala, actuellement Conseiller spécial auprès de l’UNESCO pour la Culture de la Paix ainsi que Pierre Crocq Directeur de l’Institut d’Études Judiciaires de Paris 2. Nous adressons nos félicitations aux jeunes diplômés : Frédérique Arque Fontaine, Hakim Berai, Alexandre Biosse Duplan, Martine Coussau, Annie Bourla, Kerstin Brenner, Vincent Canet, Armelle Pietrucci, Serge de Souza, Magali Lartigue, Sylvie Courty, Assly Edouard Assly, Patrick Guillot Patrick, Muriel Hascour Lemaitre, Nicolas Hassine, Caroline Gauer, Rosario Jimenez Nunez, Martine Jos, Daniel Julliard, Brigitte Le Blay, Geneviève Lasselin, Sophie Malys, Antonino Mercuri, Candy Nguyen-Viet, Adrienne Parker, Marie-Pierre Poisson, Thierry Prieur, Anne-Sophie Strohmann, Florence Vansteeger. Jean-René Tancrède

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Federico Mayor Zaragoza (1), Michèle Guillaume-Hofnung (2) Pierre Crocq (3) et la Promotion 2014

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Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9 31

Culture

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Enrichir la langue françaisepar Fleur Pellerin

A(...)la suite du Comité interministériel Égal i té et Citoyenneté du 6  mars  dernier, nous avons pris

un certain nombre de mesures concrètes pour encourager la maîtrise de la langue qui est constitutive de notre culture commune et lutter contre la première des inégalités : celle de l’accès à la langue de la République.Concernant plus spécifiquement l’accès à la culture des plus jeunes, j’ai fi xé le 11 février dernier, avec la Ministre de l’Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, de nouvelles priorités relatives à la politique en faveur de l’éducation artistique et culturelle qui mettent l’accent sur la langue. Nous avons privilégié quatre axes :les pratiques artistiques de l’oralité, les projets où la langue est objet de création, les projets ouvrant sur d’autres langues et ceux où la langue renouvelle la médiation des œuvres. Car si la maîtrise de la langue favorise l’accès à la culture, les pratiques culturelles et artistiques permettent en retour de renforcer la familiarité avec la langue et les compétences langagières de nos jeunes concitoyens.La langue donne vie aux liens de solidarité : partagée par plus de 220 millions de locuteurs dans le monde, la langue française est la langue de la liberté, de la diversité culturelle et de la culture comme bien public accessible à tous.C’est par la langue que passe, ainsi que l’écrivait Senghor « cet humanisme intégral qui se tisse autour de la terre, cette symbiose des énergies dormantes de tous les continents, de toutes les races qui se réveillent à leur chaleur complémentaire » : la Francophonie.Un humanisme francophone dont le Président de la République a rappelé, lors du dernier

Sommet de la Francophonie, qu’il devait relever de nombreux défis, démocratiques, sociaux, éducatifs, économiques et environnementaux, pour réaliser la belle ambition de tous les francophones : « changer le monde en français ».Cette année, c’est la capacité de notre langue française à accueillir des mots nouveaux ou étrangers qui est à l’honneur de la Semaine de la langue française et de la Francophonie.Comme le disait Victor Hugo, « la langue française n’est pas fi xée » comme la mer, elle oscille sans cesse, quittant un rivage de la pensée pour en envahir un autre.Une langue ne se construit pas en dehors des liens que nouent leurs locuteurs.Les échanges économiques, culturels, scientifiques, touristiques ont une grande infl uence sur notre langue, qui s’est toujours enrichie d’apports divers issus du grec, de l’italien, de l’arabe, de l’espagnol, de l’allemand ou de l’anglais.Comme l’esprit humain, une langue est toujours en mouvement : le développement des réseaux numériques et la place considérable prise par les technologies qui leur sont liées ont conduit à installer dans notre lexique un grand nombre de termes nouveaux.Il faut tout faire pour maintenir la capacité du français à exprimer les réalités contemporaines et à rester compétitive dans tous les champs de la connaissance : c’est en ce sens que nous devons moderniser le dispositif d’enrichissement de la langue française.Je tiens à remercier tous ceux qui œuvrent depuis 20 ans à faire de la Semaine de la langue française et de la Francophonie un très beau succès et je salue nos partenaires institutionnels et médias ainsi que les éditeurs qui ont accepté de doter les nombreux concours. (...)

Cette semaine, j’ai aussi voulu ouvrir les portes du Ministère et de la rue de Valois à tous ceux qui font vivre la langue française et qui l’aiment, tous ceux qui permettent à nos concitoyens de mieux la maîtriser mais surtout de se l’approprier et d’en découvrir la puissance évocatrice, la force subversive ou la formidable inventivité.Durant trois jours ce salon va devenir celui de la langue française et de toutes ses métamorphoses autour d’un Immortel, Dany Laferrière, que je remercie pour sa présence parmi nous et qui partagera sa bibliothèque idéale installé dans l’endroit qu’il préfère pour lire, à savoir sa baignoire. Je n’oublie pas bien sûr Nicolas Rey et Mathieu Saïkaly qui nous feront découvrir leurs collections de textes et disques préférés. Quant aux plus jeunes élèves, ils témoigneront de leur amour des mots à travers un match d’improvisation rendu possible grâce au soutien de la Compagnie Déclic Th éâtre et la Fondation Culture et Diversité et la fi nale du concours d’orthographe « j’épelle », projet porté par plusieurs villes du Val-de-Marne.Pour conclure, je voudrais évoquer les dix mots choisis comme fi l conducteur de cette semaine. Parmi eux, il y en a un qui me semble illustrer particulièrement bien ce qui nous réunit aujourd’hui : sérendipité.Éminemment poétique, ce mot, emprunté à un conte persan, renvoie à une découverte heureuse et inattendue qui n’est pas sans rappeler le hasard objectif des surréalistes, les expérimentations des oulipiens et toute expression artistique à travers le jaillissement de la création ou le surgissement de l’imaginaire.Ce mot, à l’image de notre langue et de cette Semaine qui lui est consacrée, favorise les rencontres et développe en chacun « cette soif d’errer à la rencontre de tout», si chère à André Breton. (...) 2015-115

Langue française et Francophonie20ème édition - Paris, Ministère de la Culture, 11 mars 2015

Mathieu Saïkaly, Fleur Pellerin et Dany Laferrière

Page 32: Edition Du Jeudi 12 Mars 2015

32 Les Annonces de la Seine - Jeudi 12 mars 2015 - numéro 9

Culture

Palais Littéraire et Musical du Barreau de ParisConférence du 13 février 2015 à la Cour d’appel de Paris

L’honneur de se souvenirPar Christian Charrière-Bournazel

Des dizaines d’Avocats avaient été radiés du Barreau parce que juifs, sans état d’âme.Il a souhaité que cette évocation ait lieu

le 13 février, jour anniversaire des arrêts de la Cour d’appel de Paris validant les décisions du Conseil de l’Ordre dans la salle de la Première Chambre de la Cour où furent plus tard jugés Pierre Laval et le maréchal Pétain.Ce rappel d’une période indigne de notre Barreau présente à mes yeux une nécessité impérieuse.

C’est aussi ce qui m’avait déterminé comme Bâtonnier à faire sculpter le visage de Pierre Masse dans un médaillon en bronze apposé dans la galerie de la Première Chambre de la Cour.Je n’aime pas l’expression « devoir de mémoire ».En revanche, l’histoire est une liberté publique dont personne ne doit se trouver privé. Se souvenir n’est pas de l’Ordre de l’abaissement. C’est au contraire l’honneur des êtres libres : les peuples dont on réécrit l’histoire sont des peuples tyrannisés. Ceux qui l’oublient volontairement se déshonorent. Né en 1946, je ne me sens d’aucune manière coupable de ce que les aînés de mes compatriotes ou des membres de mon Ordre ont pu tolérer ou commettre. Au demeurant, le Barreau de Paris a

compté, en même temps que des avocats qui le déshonoraient jusque dans les fonctions offi cielles qu’ils remplissaient, des victimes et des résistants.Comme Bâtonnier de l’Ordre, parce que j’avais reçu comme dans une succession un actif et un passif, j’ai estimé indispensable de ne pas oublier ce qui fut de l’Ordre de l’indignité de quelques-uns comme de l’héroïsme et du martyre des autres.Le souvenir de ce qui fut misérable et de ce qui fut grand fonde, non pas le remords de ceux qui ne sont pas coupables, mais l’espérance des vivants et de leur descendance.Voilà pourquoi je remercie de tout cœur Robert Badinter d’avoir contribué, à nouveau, sans haine et sans crainte, à raviver la fl amme du souvenir. 2015-116

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Robert Badinter et Christian Charrière-Bournazel

Robert Badinter a accepté d’évoquer à nouveau, dans le cadre du Palais Littéraire et Musical, le comportement du Conseil de l’Ordre de Paris à l’égard des avocats juifs de 1940 à 1944.