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Expertise Me ´ dicale Continue en ne ´ phrologie E ´ quilibre acidobasique : acidoses et alcaloses me ´ taboliques § Acid-base homeostasis: Metabolic acidosis and metabolic alkalosis Bertrand Dussol Centre de ne ´phrologie et de transplantation re ´nale, hoˆpital de la Conception, 147, boulevard Baille, 13385 Marseille cedex 05, France 1. Physiologie de l’e ´ quilibre acide-base 1.1. Rappels sur l’e ´quilibre acide-base chez l’homme Le pH sanguin est maintenu a ` 7,40, ce qui correspond a ` une concentration tre `s basse de 40 nmol/L d’ions H + dans le secteur extracellulaire. Le pH alcalin est maintenu bien que l’organisme produise de grandes quantite ´s d’acide sous deux formes : un acide volatil, l’acide carbonique (H 2 CO 3 ) venant du CO 2 ; des acides non volatils. Ro ˆle du rein dans l’e ´quilibre acidobasique Re ´ absorption des HCO 3 (tube proximal) Excre ´ tion urinaire des H + sous trois formes : acidite ´ titrable : Na 2 HPO 4 + H + ! NaH 2 PO 4 (tube proximal et collecteur) ; ammonium : NH 3 + H + ! NH 4 + (tube proximal et collecteur) ; protons libres (pH urinaire). 1.1.1. Deux types d’acides 1.1.1.1. Acide carbonique (H 2 CO 3 ). Il est constitue ´ a ` partir du CO 2 qui est le produit terminal du me ´ tabolisme oxydatif. Il s’agit d’une source majeure d’acide : 13 000 a ` 20 000 mmol de CO 2 sont forme ´es par jour. Ne ´ phrologie & The ´ rapeutique xxx (2014) xxx–xxx § Cet article est paru initialement dans EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Ne ´ phrologie 18-033-C-10, 2011. Nous remercions la re ´ daction d’EMC-Ne ´ phrologie pour son aimable autorisation de reproduction. Adresse e-mail : [email protected] I N F O A R T I C L E Historique de l’article : Disponible sur Internet le xxx Mots cle ´s : E ´ quilibre acide-base Protons Tampons Bicarbonate Acidite ´ titrable Ions ammoniums Acidose me ´ tabolique Alcalose me ´ tabolique Keywords: Acid-base homeostasis Proton Buffers Bicarbonate Titratable acid Ammonium Metabolic acidosis Metabolic alkalosis R E ´ S U M E ´ L’e ´ quilibre acidobasique est assure ´ par le rein qui maintient en permanence un bilan nul entre la formation de protons issus du me ´ tabolisme cellulaire et leur e ´ limination par excre ´ tion urinaire. Cette exigence est rendue ne ´ cessaire par la capacite ´ des protons a ` se lier aux prote ´ ines, ce qui modifie leur structure et leurs fonctions. Le rein doit aussi re ´ge ´ ne ´ rer les bicarbonates. Cet organe n’est pas seul dans le maintien du pH sanguin dans ses limites tre `s e ´ troites, le poumon assure l’e ´ limination d’une tre `s grande quantite ´ d’acide volatil forme ´ par la respiration cellulaire. ß 2014 Association Socie ´te ´ de ne ´ phrologie. Publie ´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´ serve ´s. A B S T R A C T Acid-base homeostasis ensured by the kidneys, which maintain the equilibrium between proton generation by cellular metabolism and proton excretion in urine. This requirement is lifesaving because of the protons’ ability to bind to anionic proteins in the extracellular space, modifying their structure and functions. The kidneys also regenerate bicarbonates. The kidney is not the sole organ in charge of maintaining blood pH in a very narrow range; lungs are also involved since they allow a large amount of volatile acid generated by cellular respiration to be eliminated. ß 2014 Association Socie ´ te ´ de ne ´ phrologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved. G Model NEPHRO-722; No. of Pages 12 Pour citer cet article : Dussol B. E ´ quilibre acidobasique : acidoses et alcaloses me ´ taboliques. Ne ´ phrol ther (2014), http://dx.doi.org/ 10.1016/j.nephro.2014.05.004 http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2014.05.004 1769-7255/ß 2014 Association Socie ´te ´ de ne ´ phrologie. Publie ´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´ serve ´s.

Équilibre acidobasique : acidoses et alcaloses métaboliques

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Nephrologie & Therapeutique xxx (2014) xxx–xxx

G Model

NEPHRO-722; No. of Pages 12

Expertise Medicale Continue en nephrologie

Equilibre acidobasique : acidoses et alcaloses metaboliques§

Acid-base homeostasis: Metabolic acidosis and metabolic alkalosis

Bertrand Dussol

Centre de nephrologie et de transplantation renale, hopital de la Conception, 147, boulevard Baille, 13385 Marseille cedex 05, France

1. Physiologie de l’equilibre acide-base

1.1. Rappels sur l’equilibre acide-base chez l’homme

Le pH sanguin est maintenu a 7,40, ce qui correspond a uneconcentration tres basse de 40 nmol/L d’ions H+ dans le secteurextracellulaire. Le pH alcalin est maintenu bien que l’organismeproduise de grandes quantites d’acide sous deux formes :

Role du rein dans l’equilibre acidobasique

Re absorption des HCO3� (tube proximal)

Excre tion urinaire des H+ sous trois formes :

� acidite titrable : Na2HPO4 + H+ ! NaH2PO4 (tube

proximal et collecteur) ;

� ammonium : NH3 + H+ ! NH4+ (tube proximal et

collecteur) ;

� protons libres (pH urinaire).

I N F O A R T I C L E

Historique de l’article :

Disponible sur Internet le xxx

Mots cles :

Equilibre acide-base

Protons

Tampons

Bicarbonate

Acidite titrable

Ions ammoniums

Acidose metabolique

Alcalose metabolique

Keywords:

Acid-base homeostasis

Proton

Buffers

Bicarbonate

Titratable acid

Ammonium

Metabolic acidosis

Metabolic alkalosis

R E S U M E

L’equilibre acidobasique est assure par le rein qui maintient en permanence un bilan nul entre la

formation de protons issus du metabolisme cellulaire et leur elimination par excretion urinaire. Cette

exigence est rendue necessaire par la capacite des protons a se lier aux proteines, ce qui modifie leur

structure et leurs fonctions. Le rein doit aussi regenerer les bicarbonates. Cet organe n’est pas seul dans le

maintien du pH sanguin dans ses limites tres etroites, le poumon assure l’elimination d’une tres grande

quantite d’acide volatil forme par la respiration cellulaire.

� 2014 Association Societe de nephrologie. Publie par Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

A B S T R A C T

Acid-base homeostasis ensured by the kidneys, which maintain the equilibrium between proton

generation by cellular metabolism and proton excretion in urine. This requirement is lifesaving because

of the protons’ ability to bind to anionic proteins in the extracellular space, modifying their structure and

functions. The kidneys also regenerate bicarbonates. The kidney is not the sole organ in charge of

maintaining blood pH in a very narrow range; lungs are also involved since they allow a large amount of

volatile acid generated by cellular respiration to be eliminated.

� 2014 Association Societe de nephrologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

� un acide volatil, l’acide carbonique (H2CO3) venant du CO2 ;� des acides non volatils.

§ Cet article est paru initialement dans EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),

Nephrologie 18-033-C-10, 2011. Nous remercions la redaction d’EMC-Nephrologie

pour son aimable autorisation de reproduction.

Adresse e-mail : [email protected]

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses et10.1016/j.nephro.2014.05.004

http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2014.05.004

1769-7255/� 2014 Association Societe de nephrologie. Publie par Elsevier Masson SAS

1.1.1. Deux types d’acides

1.1.1.1. Acide carbonique (H2CO3). Il est constitue a partir duCO2 qui est le produit terminal du metabolisme oxydatif. Il s’agitd’une source majeure d’acide : 13 000 a 20 000 mmol de CO2 sontformees par jour.

alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

. Tous droits reserves.

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Quand le CO2 est metabolise, il fournit un ion H+ par desreactions d’hydratation et d’hydroxylation. Le CO2 est rapidementelimine par le poumon, d’ou la notion d’acide volatil.

1.1.1.2. Acides non volatils. Ils sont produits a partir de l’alimenta-tion et du metabolisme intermediaire. Les sources d’acides nonvolatils sont les proteines alimentaires et le metabolisme desphosphodiesters (cf. infra).

1.1.2. Tamponnement d’une charge acide

Trois lignes de defense contre une agression acide peuvent etredecrites schematiquement [1] :

� la ligne de defense physicochimique, d’action instantanee ;� la ligne de defense respiratoire, d’action rapide ;� la ligne de defense renale, d’action lente.

1.1.2.1. Ligne de defense physicochimique : les systemes tampons. LepH est le logarithme de l’inverse de la concentration en ions H+ :(pH ¼ 1

Hþ½ �).

Un tampon est une substance qui capte les ions H+ dans unesolution pour limiter les variations de pH. Un tampon est constituepar l’association d’un acide faible et de sa base conjuguee :

acidefort þ sel basique $ selneutre þ acide faible:

Dans le cas de l’acide chlorhydrique :

HCl þ NaHCO3 $ NaCl þ H2CO3:

L’equation d’Henderson-Hasselbach s’ecrit :

pH ¼ pK þ logacide½ �base

Pour le tampon HCO3�/H2CO3, la reaction s’ecrit :

pH ¼ pK þ logHCO�3� �

CO2 dissous

pH ¼ 6; 1 þ log 240;03�PaCO2

¼ 6; 1 þ log 240;03�40 (ou PaCO2 est la

pression partielle arterielle de CO2)

pH ¼ 6; 1 þ log24 mnol

1; 2 mnol¼ 6; 1 þ log20 ¼ 7; 4

Si on ajoute 12 mmol de HCl dans 1 litre de liquideextracellulaire, on obtient la reaction :

12 HCl þ 24 NaHCO3 $ 12 NaCl þ 12 NaHCO3þ 12 H2CO3

puis 12 H2CO3 $ 12 CO2þ 12 H2O:

On diminue dans l’equation le numerateur de 12 et onaugmente le denominateur de 12 :

pH ¼ 6; 1 þ log12

1; 2 þ 12¼ 6; 1 þ log

12

13; 2¼ 6; 06

Les tampons n’empechent donc pas la diminution du pH maisminimisent la baisse de celui-ci.

1.1.2.2. Ligne de defense respiratoire. Si dans l’equation precedenteon considere que le systeme tampon est ouvert et que les12 CO2 sont elimines par le poumon, l’equation devient :

pH ¼ 6; 1 þ log12

1; 2¼ 6; 1 þ log 10 ¼ 7; 1

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses e10.1016/j.nephro.2014.05.004

En fait le poumon fait plus car l’acidose provoque unehyperventilation alveolaire, ce qui entraıne une baisse de la PaCO2.

Si la PaCO2 descend jusqu’a 23 mmHg, l’equation devient :

pH ¼ 6; 1 þ log12

0; 03 � 23¼ 7; 34

1.1.2.3. Ligne de defense renale. A ce stade, le pH est presquenormalise, toutefois il reste des ions H+ sous forme d’acides faibleset la concentration plasmatique en HCO3

� est abaissee de12 mmol/L. Le rein intervient alors pour restaurer la concentrationdes HCO3

� et eliminer les H+ restants.

1.1.3. Tampons chez l’homme

Les tampons extracellulaires sont representes essentiellementpar le tampon bicarbonate/acide carbonique [2] :

HCO3�/H2CO3 $ H2O et CO2. Le tampon HCO3

�/H2CO3 est unbon tampon car :

� il appartient a un systeme ouvert en relation avec le poumon quielimine le CO2 et avec le rein qui reabsorbe et regenere lesHCO3

� ;� sa concentration dans le secteur extracellulaire est elevee.

Les tampons intracellulaires sont les proteines : hemoglobinedans les globules rouges, proteines et phosphate dans les autrescellules. Par ailleurs, le squelette est un immense reservoir de selsalcalins. L’os se dissout sous l’effet d’une acidose aigue ouchronique, ce qui libere des tampons phosphate et carbonate.

1.1.4. Tamponnement du CO2 et role du poumon

Le CO2 est tamponne pour 80 % par le tampon bicarbonate dansles hematies tandis qu’une tres faible partie du CO2 est sous formedissoute. Les poumons eliminent le CO2, c’est une des ouverturesdu systeme tampon des bicarbonates [1]. Des chemorecepteurscentraux et peripheriques analysent la PaCO2. La PaCO2 stimule (encas d’elevation) ou inhibe (en cas de diminution) les centresrespiratoires. Si le pH diminue, les chemorecepteurs vont genererune hyperventilation (l’inverse est vrai).

1.2. Quelques principes de physiologie concernant l’equilibre

acide-base

1.2.1. Concentration en proton dans les secteurs liquidiens

Le pH sanguin est maintenu dans une fourchette tres etroite de7,38 a 7,42. Cela correspond a une toute petite quantite d’ions H+

dans le secteur extracellulaire (40 nmol/L) par rapport aux autresions [2]. La concentration en H+ dans le cytosol est de 80 a100 nmol/L, le pH intracellulaire est plus acide que celui du plasmavariant de 6,8 a 7,2 en fonction des tissus.

1.2.2. Sources d’acides et de bases

Les sources d’acides sont les proteines et les phosphodiesters.Sur 20 acides amines, 13 sont neutres, leur metabolisme ne generepas d’ion H+. Cinq acides amines (lysine, arginine, histidine, cystineet methionine) ont un metabolisme qui genere des H+ sous formed’acide chlorhydrique (HCl) ou sulfurique. A l’inverse, le glutamateet l’aspartate sont deux acides amines qui generent des HCO3

�.Les phosphodiesters sont les principaux anions du milieu

intracellulaire (acide ribonucleique [ARN], acide desoxyribonu-cleique [ADN], phospholipides, adenosine triphosphate [ATP], etc.).Les produits de leur metabolisme sont : HPO4

2� et H+. L’anionphosphate divalent (HPO4

2�) est filtre par le rein. Comme le pH dufluide tubulaire tend a s’acidifier et a passer en dessous du pK deHPO4

2�, HPO42� et H+ vont se recombiner pour former H2PO4

�.

t alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

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Fig. 1. Reabsorption des HCO3� dans le tube proximal. Les HCO3

� filtres se

combinent aux H+ qui sortent de la cellule par le contre-transport Na+/H+ et par les

H+ ATPases. L’acide carbonique ainsi forme (H2CO3) est clive dans le fluide tubulaire

en CO2 et H2O par l’anhydrase carbonique. Le CO2 diffuse dans la cellule et est

transforme en HCO3� par l’anhydrase carbonique cytosolique. Le HCO3

� franchit la

membrane basolaterale par un canal specifique avec le Na+. Au total, les HCO3�

initialement presents dans le fluide tubulaire sont passes dans l’interstitium. ATP :

adenosine triphosphate.

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Cela correspond a l’acidite titrable (cf. infra). Ainsi, les phosphatesorganiques generent des H+ mais avec un « partenaire » qui favoriseleur elimination.

Le catabolisme des glucides et des lipides produit des lactates etdes corps cetoniques qui sont en physiologie metabolises, laproduction nette d’ions H+ est donc tres faible. L’excretion urinairedes anions organiques reflete cette source d’H+. La productiond’H+ a partir des glucides ou des lipides peut cependantbeaucoup augmenter dans certaines situations physiologiquesou pathologiques :

� l’exercice musculaire ou l’hypoxie generent de l’acide lactique ;� le diabete desequilibre genere des corps cetoniques.

Les sources de bases sont les proteines et les anionsmetabolisables :

� le catabolisme des proteines fournit des acides aminesanioniques : aspartate et glutamate ;� le catabolisme d’anions organiques metabolisables (citrate,

lactate, gluconate, etc.) fournit des bicarbonates.

Le Tableau 1 resume les sources d’acides et de bases chezl’homme.

1.3. Role du rein dans l’equilibre acide-base

Le role du rein dans l’equilibre acide-base est double :

� reabsorber les HCO3� filtres ;

� regenerer des HCO3� en excretant la charge acide sous forme de

NH4+ et d’acidite titrable [4–6]. Une tres faible quantite d’H+ est

liberee et determine le pH des urines.

1.3.1. Reabsorption des bicarbonates filtres

1.3.1.1. Mecanismes de reabsorption proximale des HCO3� [4–6]. Les

HCO3� sont librement filtres par le glomerule avant d’etre

completement reabsorbes, en particulier dans le tube proximal.Le seuil de reabsorption est a 28 mmol/L. Au-dessus de cettevaleur, les HCO3

� ne sont plus reabsorbes, ce qui constitue uneprotection contre l’alcalose. La reabsorption proximale des HCO3

a deux composantes, l’une liee au Na+, l’autre au H+ (Fig. 1).1.3.1.1.1. Composante liee au Na+. La tres faible concentration enNa+ dans le cytosol de la cellule tubulaire proximale maintenue parl’action des Na+/K+ ATPases basolaterales permet l’entree du Na+

dans la cellule le long de son gradient physicochimique. Le contre-transport Na+/H+ dans la membrane luminale fait sortir le H+ enutilisant l’energie creee par l’entree du Na+ dans le cytosol.1.3.1.1.2. Composante liee au H+. La sortie des ions H+ de la cellule sefait essentiellement par le contre-transport Na+/H+ luminal mais

Tableau 1Sources d’acides et de bases chez l’homme ayant une alimentation standard [2,3].

Nutriments Quantite de H+ ou de HCO3� formee

Proteines : acides amines

generant des H+

210 mmol d’H+

Phosphates organiques 30 mmol d’H+ (et de HPO42�)

Proteines : acides amines

generant des HCO3�

110 mmol de HCO3�

Anions organiques

(citrate, lactate, etc.)

60 mmol de HCO3�

Excretion des phosphates

organiques

30 mmol de HCO3� (sous forme H2PO4

�)

L’excretion nette de H+ sous forme de NH4+ est donc d’environ 40 mmol/j.

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses et10.1016/j.nephro.2014.05.004

aussi sous l’action des H+ ATPases luminales. Le H+ se combineau HCO3

� dans la lumiere tubulaire, ce qui forme H2CO3 puisH2O et CO2 sous l’action de l’anhydrase carbonique de la bordureen brosse. Le CO2 diffuse dans la cellule ou il se recombine a OH�, cequi forme HCO3

� sous l’action de l’anhydrase carboniquecytoplasmique. Sur la membrane basolaterale, un canal permetla sortie du HCO3

� avec le Na+ sous forme anionique(Na(HCO3)3

2�). De 10 % a 15 % des HCO3� filtres seront reabsorbes

en aval du tube contourne proximal.

1.3.1.2. Regulation de la reabsorption proximale des bicarbonates. -

Trois facteurs controlent la reabsorption proximale des HCO3� :

� la charge filtree en HCO3� : en cas d’acidose metabolique, la

quantite filtree de HCO3� diminue. Cela reduit d’autant la

secretion des ions H+, ce qui entretient l’acidose ;� la concentration en H+ dans les cellules tubulaires : lorsque la

concentration intracellulaire de H+ augmente comme dansl’acidose, on constate une augmentation d’activite du contre-transporteur Na+/H+. Ce systeme est cependant peu efficace poureliminer la charge acide car la baisse de la quantite filtree deHCO3

� limite l’augmentation potentielle d’activite du contre-transport Na+/H+ ;� l’avidite des cellules tubulaires proximales a reabsorber le Na+ :

la contraction volemique favorise la reabsorption des HCO3�.

C’est un facteur tres important d’entretien d’une alcalosemetabolique en cas de deshydratation extracellulaire. L’expan-sion volemique a l’effet inverse. En effet, de facon attendue, si lescellules tubulaires reabsorbent moins de Na+, la capacite desecretion des H+ se trouve reduite (acidose de dilution).

L’acidose tubulaire proximale se caracterise par une diminutiondu seuil de reabsorption des HCO3

�. L’acetazolamide, un inhibiteurde l’anhydrase carbonique, entraıne une acidose tubulaireproximale.

1.3.2. Regeneration des HCO3�

Les reins reconstituent le pool des HCO3� par excretion de NH4

+

et d’acidite titrable.Dans les deux cas, le HCO3

� forme dans la cellule tubulairerenale passe dans le sang peritubulaire avec le Na+ qui a ete filtre.

alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

Page 4: Équilibre acidobasique : acidoses et alcaloses métaboliques

Fig. 3. Secretion voltage dependante des H+ dans la cellule principale du tube

collecteur cortical. Le Na+ franchit la membrane apicale par le canal epithelial

sodique sensible a l’amiloride. Cette reabsorption electrogenique genere une

difference de potentiel transluminale lumiere negative. Cela permet la secretion

voltage-dependante des H+ (et des K+) par des canaux specifiques dans la

membrane apicale (aquaporine pour les H+ et ROMK pour les K+). L’aldosterone

active la secretion des deux cations. ROMK : renal outer medullary potassium

channel ; ATP : adenosine triphosphate.

B. Dussol / Nephrologie & Therapeutique xxx (2014) xxx–xxx4

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1.3.2.1. Formation d’acidite titrable.

1.3.2.1.1. Definition. L’acidite titrable represente les protonstamponnes par des sels d’acides faibles urinaires autres que lebicarbonate [6]. Le principal tampon est le phosphate inorganiquedisodique (Na2HPO4). L’acidite titrable apparaıt essentiellementdans le tube proximal et dans le tube collecteur.1.3.2.1.2. Formation de l’acidite titrable. Le point de depart est ladissociation d’une molecule d’eau dans le cytosol. L’OH� secombine avec le CO2 present dans le cytosol sous l’action del’anhydrase carbonique pour former un HCO3

� qui passe dans lesang peritubulaire par un cotransport HCO3

�/Na+. Dans la lumieretubulaire, le proton secrete se combine avec le HPO4

� pour formerle H2PO4

2� qui sera excrete dans l’urine. Le Na+ libere est reabsorbepar la cellule et se combine avec le HCO3

�. Au total, l’excretion d’unH+ favorise l’entree d’un HCO3

� dans la circulation.Le seul facteur influencant la formation d’acidite titrable est la

disponibilite du HPO4� qui depend de l’alimentation et du

catabolisme des anions intracellulaires (cf. supra).Globalement, l’excretion de H+ sous forme d’acidite titrable est

tres peu adaptable et insuffisante quantitativement pour eliminerla charge acide quotidienne.

1.3.2.2. Formation de NH4+. Le NH4

+ est la molecule qui permetl’excretion renale de la charge acide.1.3.2.2.1. Secretion par le nephron distal des protons. Les cellulesintercalaires de type a, situees dans le canal collecteur possedentdes pompes H+ ATPases sur leur membrane luminale (Fig. 2) [4,5].Le NH3 present dans la lumiere tubulaire fixe le H+ pour formerNH4

+. La secretion d’un proton dans la lumiere tubulaires’accompagne de la sortie basolaterale d’un HCO3

� par lecontre-transport HCO3

�/Cl�.A cote de la secretion active des H+ par les cellules intercalaires a,

il existe aussi une secretion de H+ dite voltage-dependante. Lescellules principales du tube collecteur cortical sont impliqueesdans la reabsorption de Na+ et la secretion du K+ (Fig. 3). Lareabsorption electrogenique du Na+ par le canal epithelial sodiquesensible a l’amiloride de la membrane luminale augmente ladifference de potentiel transepitheliale avec lumiere tubulaire plusnegative. Cela favorise la secretion de cations (K+ et H+) par descanaux specifiques situes dans la membrane luminale. Cettesecretion de H+ voltage-dependante est sensible a l’aldosterone.

Fig. 2. Secretion active des H+ dans la cellule intercalaire a. Cette cellule a un cytosol

riche en anhydrase carbonique qui permet l’hydroxylation de CO2. Dans sa

membrane luminale, elle possede des H+ ATPases impliques dans la secretion active

des H+. La dissociation d’une molecule d’H2O permet sous l’action de l’anhydrase

carbonique de former un HCO3� qui franchit la membrane basolaterale par un

contre-transport HCO3�/Cl�. ATP : adenosine triphosphate.

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses e10.1016/j.nephro.2014.05.004

1.3.2.2.2. Localisation tubulaire de la formation de NH4+. Le NH4

+

urinaire provient d’une synthese renale [4]. La formation du NH4+

peut etre schematisee en trois etapes.Premiere etape : premiere formation de NH4

+ dans le tube

proximal. La quasi-totalite du NH4+ present dans l’urine finale est

deja forme dans le tube proximal selon la reaction suivante :

Proteines ! Glutamine ! 2 NH4þ þ a-cetoglutarate

a-cetoglutarate ! glucose þ 2 HCO3�

Le metabolisme de l’a-cetoglutarate se fait dans les mitochon-dries au sein du cycle de Krebs, ce qui fournit de l’ATP. Toutegeneration de NH4

+ s’accompagne donc de celle d’ATP.Au versant luminal, le NH4

+ est secrete dans la lumiere tubulaireen prenant la place d’un H+ sur le contre-transport Na+/H+. Les deuxHCO3

� formes passent dans le fluide peritubulaire a travers lamembrane basolaterale par un cotransport Na+/HCO3

� (Fig. 4).Le fait que la formation de NH4

+ s’accompagne obligatoirementd’une generation d’ATP a deux consequences :

� dans le rein, la demande en ATP est soutenue principalement parla reabsorption du Na+. Au cours de l’insuffisance renalechronique, la quantite filtree de Na+ diminue de meme que lapart reabsorbee. Cela entraıne une diminution des besoins enATP, donc de la production de NH4

+, ce qui explique la diminutionde l’excretion urinaire de NH4

+ et l’acidose ;� la synthese de NH4

+ peut etre limitee si d’autres combustiblessont fournis au cycle de Krebs (corps cetoniques au cours dujeune par exemple ou lors de la nutrition parenterale).

Deux stimuli provoquent l’entree de la glutamine dans lesmitochondries : l’acidose metabolique et l’hypokaliemie. Ces deuxsituations cliniques sont caracterisees par une elevation del’excretion urinaire de NH4

+.Deuxieme etape : gradient interstitiel corticopapillaire du NH4

+/

NH3. Le maintien d’un gradient corticopapillaire en NH3 estnecessaire a l’excretion des H+ sous la forme de NH4

+. Dans labranche descendante de l’anse de Henle, du fait de l’alcalinisation

t alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

Page 5: Équilibre acidobasique : acidoses et alcaloses métaboliques

Fig. 4. Premiere etape de la secretion de la charge acide : secretion des NH4+ par la

cellule tubulaire proximale. Le catabolisme de la glutamine issue des proteines

fournit des NH4+ et des HCO3

�. Les HCO3� franchissent la membrane basolaterale

par un cotransport avec le Na+. Les NH4+ franchissent la membrane apicale par un

contre-transport avec le Na+. La secretion des NH4+ permet dans ce cas l’excretion

de SO42� provenant du catabolisme d’un acide amine soufre. ATP : adenosine

triphosphate.

B. Dussol / Nephrologie & Therapeutique xxx (2014) xxx–xxx 5

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du fluide tubulaire, le NH4+ se transforme en NH3 qui s’accumule

dans la medullaire. Dans la branche ascendante large de Henle, leNH4

+ est reabsorbe en prenant la place du K+ sur le cotransportNa+/K+/2Cl� de la membrane apicale. Apres sa reabsorption, NH4

+

se transforme en NH3 et H+ dans la cellule de la brancheascendante. Le NH3 diffuse hors de la cellule et s’accumule dansla medullaire. Le H+ est secrete et se combine avec le HCO3

present dans la lumiere, ce qui conduit a la formation deH2CO3 puis CO2 et H2O. Le CO2 est alors delivre aux cellulesintercalaires a (Fig. 5).

En cas d’hyperkaliemie, il existe une competition entre NH4+ et

K+ pour la reabsorption ce qui diminue la concentration enNH3 dans l’interstitium et donc l’excretion de NH4

+, ce qui expliqueque l’hyperkaliemie favorise l’acidose.

Troisieme etape : deuxieme formation de NH4+ dans le tube

collecteur. Le CO2 delivre aux cellules intercalaires a est converti en

Fig. 5. Deuxieme et troisieme etapes de la secretion de la charge acide :

accumulation de NH3 dans la medullaire et transfert de NH3 dans le tube collecteur.

Le NH4+ secrete par la cellule tubulaire proximale se transforme en NH3 qui

s’accumule dans la medullaire. Le NH4+ est reabsorbe dans la branche ascendante

large de l’anse de Henle, ce qui libere le H+ qui se combine au HCO3�, ce qui forme du

H2CO3 puis du CO2. Le CO2 est delivre aux cellules intercalaires a ce qui entraıne la

formation de H+ et de HCO3� par l’anhydrase carbonique. Les pompes H+ ATPases

secretent les H+ qui se combinent au NH3 dans la lumiere tubulaire permettant la

reabsorption d’un HCO3�.

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses et10.1016/j.nephro.2014.05.004

H+ et HCO3� par l’anhydrase carbonique. Ces cellules possedent des

H+ ATPases qui secretent des H+ qui transforment NH3 en NH4+ qui

est elimine dans l’urine (Fig. 5).

1.3.2.3. Facteurs regulant l’excretion urinaire de NH4+.

1.3.2.3.1. pH sanguin. L’acidose sanguine provoque une acidosecellulaire, ce qui augmente la production de NH4

+ car l’entree de laglutamine dans la mitochondrie est favorisee [3]. De plus, l’activitedes pompes H+ ATPases du tube collecteur est stimulee. En casd’alcalose, les effets inverses sont constates.1.3.2.3.2. PaCO2. En cas de baisse de la PaCO2, une alcalosemetabolique puis cellulaire apparaıt, ce qui entraıne unediminution de la secretion des H+ dans le tube proximal et letube collecteur. Il s’agit de la compensation metabolique del’hypocapnie. En cas d’augmentation de la PaCO2, le phenomeneinverse est observe (compensation metabolique de l’hypercap-nie).

1.3.2.3.3. Hormones. L’aldosterone favorise la secretion de H+ dansle tube collecteur par l’elevation de la secretion voltage-dependante. Le cortisol stimule le cotransport Na+/H+ du tubeproximal, ce qui eleve la secretion de NH4

+. L’hormone antidiure-tique (ADH) stimule la secretion de H+ dans le tube collecteurcortical d’ou une diminution du pH urinaire.1.3.2.3.4. Potassium. L’hyperkaliemie favorise l’acidose par diminu-tion de l’excretion de NH4

+ (l’inverse est vrai) par deuxmecanismes :

� moindre utilisation de la glutamine ;� competition pour la reabsorption du NH4

+ dans l’anse de Henle.

1.3.2.3.5. Effet des diuretiques. Les diuretiques de l’anse et lesthiazidiques augmentent la quantite delivree de Na+ au tubecollecteur cortical, ce qui favorise la secretion distale voltage-dependante des H+.

Les diuretiques epargneurs de K+ bloquent le canal epithelialsodique du tube collecteur cortical et generent une acidose pardiminution de la secretion voltage-dependante des H+.

Au total, l’excretion nette d’acide est donnee par la formule :

Excre tion ¼ NHþ4� �

þ H2PO�4� �

� HCO�3� �

Chez le sujet a l’etat normal, il n’y a pas de bicarbonate dans lesurines pour un pH urinaire inferieur a 6. L’excretion des H+ se faitun tiers sous forme d’acidite titrable et deux tiers sous forme deNH4

+, sachant qu’en cas d’acidose seule l’excretion de NH4+ peut

s’adapter (jusqu’a etre multipliee par 5) [7].

2. Acidoses metaboliques

Definition et caracterisation d’une acidose metabolique

De finition : pH < 7,37, HCO3� < 24 mmol/L, PaCO2 < 40 mmHg

Caracte risation :

� calcul du trou anionique sanguin : Naþ½ � � Cl�½ �þðHCO�3� �

Þ� verification du caractere purement metabolique de

l’acidose : DPaCO2 ¼ D HCO�3� �

� 1; 25

� calcul de l’excretion urinaire de NH4+ si l’acidose est

hyperchloremique : NHþ4� �

¼ 82 � 0; 8 � Naþ½ �þð Kþ½ � �Cl�½ �Þ

alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

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2.1. Definition et diagnostic

2.1.1. Definition

Une acidose metabolique est definie par l’association d’un pHsanguin acide (inferieur ou egal a 7,37) a une diminution de lareserve alcaline (inferieure ou egale a 24 mmol/L).

2.1.2. Diagnostic

Les signes cliniques sont non specifiques et inconstants. Ilsassocient :

� une polypnee qui temoigne de l’hyperventilation alveolaire. Ils’agit de la compensation respiratoire physiologique qui estinsuffisante pour corriger le pH sanguin. La gazometrie d’uneacidose metabolique est donc :

pH < 7,37, HCO3� < 24 mmol/L, PaCO2< 40 mmHg, PaO2 et

SaO2 normales ;� une hypertension liee a la secretion de catecholamines. En cas

d’acidose grave, une depression myocardique ou un etat de chocpeut s’installer ;� des troubles neuropsychiques : confusion mentale, voire coma

dans les formes graves.

2.2. Exploration d’une acidose metabolique

Devant une acidose metabolique, la conduite diagnostique doitetre stereotypee. Il faut successivement (Fig. 6) :

Fig. 6. Arbre decisionnel. Demarche diagnos

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses e10.1016/j.nephro.2014.05.004

� calculer le trou anionique sanguin ;� verifier le caractere purement metabolique de l’acidose ;� calculer le trou anionique urinaire ou le NH4

+ pour connaıtre lareponse renale a l’acidose.

2.2.1. Trou anionique sanguin

Il se calcule a partir de l’ionogramme :

trou anionique sanguin ¼ Naþ� �

� Cl�½ � þ HCO�3� �� �

La valeur normale est 12 � 2 mmol/L (8 a 16 mmol/L). Le trouanionique sanguin est constitue essentiellement par les anionsproteinates (surtout l’albumine).

Ce simple calcul permet de distinguer les deux grands typesd’acidose metabolique : acidoses avec trou anionique et acidoseshyperchloremiques [8].

Dans les acidoses avec trou anionique, la chloremie restenormale car les HCO3

� consommes sont remplaces par des anionscomme le lactate ou les corps cetoniques (Tableau 2). Dans lesacidoses hyperchloremiques, la chloremie s’eleve car les HCO3

consommes sont remplaces par du Cl� (Tableau 3).Certains facteurs sont susceptibles de modifier, en general

modestement, le trou anionique (Tableau 4).

2.2.2. Valeur attendue de la PaCO2

Il faut s’assurer du caractere purement metabolique d’uneacidose en calculant la valeur attendue de la PaCO2 pour le degred’acidose observe :

tique devant une acidose metabolique.

t alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

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Tableau 2Acidoses metaboliques avec trou anionique (TrA > 16 mmol/L).

Acidoses lactiques

Exces de production d’acide lactique

Etats de choc (cardiogenique, peripherique)

Hypoxie severe (intoxication au CO, methemoglobinemie)

Infarctus du mesentere

Crises convulsives subintrantes, exercice musculaire intense

Cancers evolues, leucemies

Deficits enzymatiques (glucose-6-phosphate deshydrogenase)

Defaut de metabolisation d’acide lactique

Insuffisance hepatocellulaire severe

Insuffisance renale severe

Blocage de la neoglucogenese

Traitement par metformine

Intoxication ethylique severe

Intoxication au methanol

Acidocetose

Diabete

Ethanol

Jeune

Intoxications

Methanol

Salicyles

Ethylene glycol

Paraldehyde

Reduction nephronique severe

Tableau 4Facteurs pouvant modifier le trou anionique sanguin.

Elevation du trou

anionique sanguin

Diminution du trou anionique sanguin

Augmentation des anions Diminution des anions

Alcalose (elevation

du lactate)

Hypoalbuminemie

(une baisse de 10 g/L diminue le

trou anionique de 2,5 mmol)

Traitement par penicilline

et carbenicilline

Alcalinisation par des sels

de Na+ avec anions indoses

(lactate, citrate, acetate)

Diminution des cations Augmentation des cations

HypoCa2+ Intoxications au lithium,

brome

Hypogammaglobulinemie Myelome IgG

HyperCa2+, hyperMg2+

Trou anionique : TrA = [Na+] � ([Cl�] + [HCO3�]). La valeur normale du TrA est

12 � 2 mmol/L (8 a 16 mmol/L). Le trou anionique sanguin est constitue par les anions

proteinates (albumine), les PO42�, les SO4

2� et les anions organiques.

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DPaCO2 ¼ D HCO�3� �

� 1; 25

Par exemple : si la reserve est a 16 mmol/L, la PaCO2 attenduedoit etre de 28 mmHg. Le calcul est le suivant :

� D[HCO3�] = 26 � 16 = 10 ;

� 10 � 1,25 = 12,5 ;� DPaCO2 = 40 � 12,5 = 27,5 mmHg.

Une PaCO2 superieure a 28 mmHg temoigne d’une composanterespiratoire a l’acidose.

2.2.3. Trou anionique urinaire

En cas d’acidose hyperchloremique, il faut determiner le trouanionique urinaire pour savoir si la reponse renale est adaptee oupas. L’excretion de la charge acide se fait essentiellement par leNH4

+, sa valeur est d’environ 40 mmol/j.En cas d’acidose d’origine extrarenale, le rein peut multiplier

par 5 l’excretion des H+ par le NH4+ qui devient superieur a

80 mmol/j. Le NH4+ n’est pas dose couramment par les labora-

toires, mais son excretion renale peut etre determinee indirecte-ment par l’analyse du trou anionique urinaire car ce cation estelimine avec du Cl� dans les urines [9,10].

Normalement dans les urines : ([Na+] + [K+] � [Cl�]) > 0. Eneffet, ce sont surtout des anions qui ne sont pas doses comme lessulfates, les phosphates et les anions organiques.

Tableau 3Acidoses metaboliques hyperchloremiques (TrA < 16 mmol/L).

Acidose de dilution

Pertes de bases

Diarrhee

Fistules digestives

Cholestyramine

Acidoses tubulaires

Reduction nephronique moderee ou moyenne

Nutrition parenterale

Charge acide exogene

NH4Cl, CaCl2, MgSO4, chlorhydrate d’arginine, chlorhydrate de lysine,

sulfate de methionine

TrA : trou anionique

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses et10.1016/j.nephro.2014.05.004

La formule pour determiner la concentration de NH4+ urinaire

est :

½NH4þ� ¼ 82 � 0; 8ð½Naþ� þ ½Kþ� � ½Cl��Þ

En cas d’acidose avec reponse renale adaptee, l’augmentationdu NH4Cl inverse le trou anionique urinaire qui devient negatif.

En cas d’acidose avec reponse renale inadaptee (le rein est toutou partie responsable de l’acidose), le trou anionique urinaire restepositif avec une excretion de NH4Cl inferieure a 80 mmol/j.

2.2.4. pH urinaire

Il a un interet limite en pratique courante dans le bilanetiologique d’une acidose metabolique.

L’interpretation du pH urinaire dans l’exploration d’une acidoseest rendue difficile pour de multiples raisons.

Il faut d’abord s’assurer de l’absence d’infection urinaire a ungerme ureasique (comme Proteus) car le pH devient alcalin sousl’effet de l’ureolyse bacterienne.

L’ADH etant necessaire a l’acidification des urines, le pHurinaire ne peut etre analyse que chez un sujet en position deboutet en relative restriction hydrique.

Le pH urinaire ne peut s’interpreter que si la kaliemie estnormale. En effet, les dyskaliemies modifient la disponibilite renaledu NH3. L’hypokaliemie augmente la disponibilite du NH3, ce quipermet aux H+ d’etre elimines sous la forme de NH4

+, d’ou un pHurinaire « alcalin ». L’hyperkaliemie diminue la disponibilite renaledu NH3, ce qui tend a favoriser l’excretion des H+ sous forme libre,d’ou un pH urinaire « acide ». De meme, un traitement parcorticoıdes augmente la disponibilite renale du NH3.

2.2.5. Influence de l’acidose sur la kaliemie

Dans le bilan d’une acidose, il faut mesurer la kaliemie car cettederniere est influencee par l’equilibre acide-base. En cas d’acidoseaigue minerale (acidoses tubulaires distales), la kaliemie s’elevepar issue de K+ de la cellule. Cet effet n’est pas present en casd’acidose aigue organique (acidose lactique). En revanche, l’acidosechronique est souvent associee a une hypokaliemie par fuite renalede K+ [11].

2.3. Etiologies des acidoses metaboliques

Quatre mecanismes sont en cause dans la survenue d’uneacidose metabolique :

alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

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� surcharge acide ;� defaut d’excretion de la charge acide ;� perte de bases ;� acidose de dilution.

2.3.1. Surcharge acide

La capacite du rein a eliminer une charge acide est limitee endepit de l’augmentation physiologique de l’excretion renale desprotons sous forme de NH4

+.

2.3.1.1. Surcharge acide exogene. Les etiologies sont :

� l’apport de NH4Cl, de chlorhydrate de lysine ou d’arginine, desulfate de methionine. L’acidose est hyperchloremique ;� l’intoxication par le methanol, l’acide acetylsalicylique, l’ethy-

lene glycol et le paraldehyde.

Dans tous les cas, un trou anionique sanguin est present,constitue par l’anion toxique ou ses metabolites.

L’intoxication par l’ethylene glycol associe des troublesneurologiques (pseudoethylisme) a une insuffisance renale aigueavec presence de tres nombreux cristaux d’oxalate de calcium dansles urines et dans le parenchyme renal.

L’intoxication par le methanol associe un pseudoethylisme, desdouleurs abdominales avec vomissements, des troubles de lavision a type d’œdeme retinien et de papillite.

L’intoxication par le paraldehyde est observee chez lesalcooliques et les toxicomanes. Elle associe des douleurs abdomi-nales, des signes neurologiques et une hyperleucocytose. Lediagnostic est fait par exclusion car aucun metabolite ne peutetre dose.

L’intoxication salicylee est associee a une alcalose respiratoirequi genere une acidose lactique. Cela explique plus que la presencede l’anion salicylate le trou anionique observe.

2.3.1.2. Surcharge acide endogene.

2.3.1.2.1. Acidose lactique. Il s’agit de l’accumulation d’acide lactiquedu fait d’un desequilibre entre production et consommation de cetacide.Laproductionsefaitdans les tissus nepossedantpasd’enzymesmitochondriaux du cycle de Krebs ou en cas de metabolismecellulaire en anaerobiose. La consommation se fait dans le cycle deKrebs en aerobiose et par la neoglucogenese hepatique et renale(cycle de Cori). La lactacidemie normale est de 1 mmol/L.

On parle d’acidose lactique si la lactacidemie est superieure a5 mmol/L. En general le dosage n’est pas utile pour le diagnostic quiest facilement fait devant une acidose severe (pH < 7,10 et[HCO3

�] < 10 mmol/L) avec trou anionique dans un contexteclinique evocateur (Tableau 2).

La metformine (Glucophage1, Stagid1) peut generer uneacidose lactique. Ce medicament doit etre arrete :

� en cas d’insuffisance renale, insuffisance hepatocellulaire,insuffisance cardiaque ou respiratoire ;� dans les situations a risque d’insuffisance renale aigue comme

apres injection de produit de contraste iode ou de moleculesnephrotoxiques, etc. ;� dans toutes les situations de « stress » : anesthesie, chirurgie,

deshydratation, infection, etc.

2.3.1.2.2. Acidocetose. Une acidocetose s’observe surtout chez lesujet diabetique de type 1 en carence insulinique. Dans le tissuadipeux, la carence en insuline active la lipase hormonosensible, cequi entraıne la liberationdegrandequantite d’acidesgras.Ces acidesgras sont metabolises dans les mitochondries des hepatocytes en

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cetoacides (acide acetoacetique qui sera metabolise en acetone etacide b-hydroxybutyrique) qui s’accumulent dans le plasma.

Acidocetosediabetique. L’acidocetosediabetiqueassocie des signesneurologiques (confusion, voire coma) a une deshydratation extra-cellulaire (secondaire a l’hyperglycemie avec glycosurie) et a uneodeur acetonique de l’haleine. La biologie revele une hyperglycemieassociee a des corps cetoniques dans le sang (Acetest1 positif dans leserum) et les urines, une acidose severe avec pH < 7,3 et[HCO3

�] < 10 mmol/L avec trou anionique. L’hyperkaliemie detransfert initiale regresse sous l’effet du traitement. Parfois, il n’y apas detrouanionique car lerein eliminetousles corps cetoniques si lacarence en insuline s’installe lentement.

Autres acidocetoses (Tableau 2) :

� acidocetose de jeune : la diminution de l’insuline secondaire aujeune entraıne une acidose moderee ;� acidocetose alcoolique : le jeune associe a l’ingestion massive

d’alcool souvent associe a des troubles digestifs (vomissementset/ou diarrhee) entraıne une lipolyse majeure avec formation decorps cetoniques. La biologie est differente de celle del’acidocetose diabetique car :� il n’y a pas d’hyperglycemie ni de glycosurie,� l’Acetest1 peut etre mis en defaut car il ne reconnaıt que l’acide

acetoacetique. Or, dans l’acidocetose alcoolique, le principalindose anionique est l’acide b-hydroxybutyrique,� la chloremie peut etre basse du fait des vomissements.

2.3.2. Pertes d’alcalins

Certaines secretions digestives sont riches en HCO3�, en

particulier la bile et le suc pancreatique. Les HCO3� sont

normalement reabsorbes dans le colon, ce qui rend negligeablela perte fecale des HCO3

�.Une perte digestive d’alcalins peut s’observer en cas :

� de diarrhee aigue ou chronique ;� de fistule pancreatique et biliaire ;� de traitement par cholestyramine (Questran1), chlorure de

calcium (CaCl2), magnesium sulfate (MgSO4), ces deux derniersmedicaments chelatant directement les HCO3

�.

L’acidose est sans trou anionique sanguin car il existe uneaugmentation de la reabsorption tubulaire de Cl� du fait de ladeshydratation extracellulaire. Le trou anionique urinaire estconstamment negatif. Une hypokaliemie est souvent presente dufait des pertes digestives de K+ mais aussi d’une kaliurese inadaptee.

2.3.3. Defaut d’excretion de la charge acide quotidienne

2.3.3.1. Insuffisance renale. L’insuffisance renale chroniques’accompagne d’une acidose avec trou anionique du fait de laretention des phosphates, des sulfates et d’autres anions organi-ques. L’acidose est liee a la diminution de l’excretion d’H+ sousforme de NH4

+ qui est parallele a la reduction nephronique.

2.3.3.2. Acidoses tubulaires. Il s’agit de dysfonctionnements tubu-laires de cause et de physiopathologie variable avec ou sans deficitde la fonction renale. La biologie montre une acidose hyperchlo-remique et une excretion urinaire de NH4

+ trop basse compte tenude l’acidose (trou anionique urinaire positif).2.3.3.2.1. Acidose tubulaire proximale (ou de type 2). Elle estcaracterisee par un abaissement du seuil de reabsorption desHCO3

� du tube proximal a un niveau variable entre 16 et 20 mmol/L.Une fois le seuil atteint, les HCO3

� sont completement reabsorbeset tout le processus d’acidification des urines se poursuitnormalement.

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Les examens sanguins mettent en evidence une hypokaliemieet des signes d’hemoconcentration. Dans les urines, le pH est enregle adapte, il n’y a pas de HCO3

�. Le NH4+ est en quantite

insuffisante. Le diagnostic est confirme dans des laboratoiresspecialises par la diminution du rapport de la capacite dereabsorption des HCO3

� sur le debit de filtration glomerulaire(TmHCO3

�/DFG) qui est inferieur a 20 mmol/L.Il faut rechercher d’autres signes d’atteinte tubulaire

proximale : glycosurie orthoglycemique, aminoacidurie, elevationdu rapport TmPhosphate/DFG et de la clairance de l’acide urique.

Les etiologies des acidoses tubulaires proximales sontmultiples : maladies de surcharge (cystinose, etc.), maladiesrenales (amylose, maladies auto-immunes, etc.), medicaments(acetazolamide, cisplatine) et toxiques (metaux lourds).2.3.3.2.2. Acidose tubulaire distale (de type 1). Elles sont de deuxtypes : acidose tubulaire distale hypokaliemique et acidosetubulaire distale hyperkaliemique [3]. L’exploration et le bilanetiologique de ces acidoses se fait dans les services specialises.

L’acidose tubulaire distale avec hypokaliemie : la biologierevele une acidose hyperchloremique avec hypokaliemie parhyperaldosteronisme secondaire et une calciurie elevee avecosteopenie. Le pH urinaire est alcalin avec bicarbonaturie,l’excretion de NH4

+ est basse.Les etiologies des acidoses tubulaires distales hypokaliemiques

sont nombreuses (maladies auto-immunes, nephrocalcinose,nephrites interstitielles, medicaments).

Les acidoses tubulaires distales avec hyperkaliemie [12] : labiologie revele une acidose hyperchloremique hyperkaliemique etune excretion basse de NH4

+. Le volume extracellulaire, la renine etl’aldosterone sont variables en fonction de l’etiologie. Les etiologiesdes acidoses tubulaires distales hyperkaliemiques sont multiples(medicaments, insuffisance surrenale, diabete, affections vascu-laires).

2.3.4. Acidose de dilution

Elle est liee a l’administration rapide de liquides depourvus debicarbonate, ce qui entraıne une diminution de la reabsorption desHCO3

�. En fait le bilan d’ions H+ est normal.

2.4. Traitement des acidoses metaboliques

Le traitement d’une acidose metabolique est d’abord letraitement de sa cause. Un traitement symptomatique n’est pastoujours necessaire.

2.4.1. Moyens du traitement

Il existe trois moyens pour corriger une acidose metabolique :l’alcalinisation, l’hyperventilation et l’epuration extrarenale.

2.4.1.1. Alcalinisation. Le NaHCO3 est utilise per os soit enpreparation magistrale (2 a 6 g/j), soit sous forme d’eau de Vichy.L’eau de Vichy Celestins1 apporte par litre 3 g de HCO3

� et 1,2 g deNa+. L’eau de Vichy Saint-Yorre1 apporte par litre 4,3 g de HCO3

� et1,7 g de Na+.

La forme intraveineuse existe en solution a 1,4 % (solutionmolaire apportant 165 mmol/L de Na+ et de HCO3

�) ou a 4,2 %(3 fois molaire). La posologie initiale est de 1 a 2 mmol/kg enperfusion lente, la suite du traitement etant adaptee en fonction dela correction du pH.

Le lactate de Na+ molaire et le tromethamine acetate (THAM) nesont plus employes.

2.4.1.2. Hyperventilation. Ce moyen physiologique de compensa-tion permet une elimination du CO2 et donc une diminution de laconcentration en H+. L’hyperventilation physiologique doit donctoujours etre respectee. En cas d’acidose severe, la ventilation

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses et10.1016/j.nephro.2014.05.004

mecanique peut etre utilisee mais son efficacite n’a jamais eteevaluee.

2.4.1.3. Epuration extrarenale (hemodialyse, hemofiltration). Elle per-met de corriger les acidoses sans risque de surcharge sodee ou desurcompensation. Son utilisation necessite un etat hemodynamiquecorrect et une elimination du CO2 efficace par la ventilation.

2.4.2. Conduite du traitement

2.4.2.1. Acidoses aigues. En cas d’acidose aigue, le risque est celui dela diminution de la contraction myocardique, des arythmiescardiaques et de la vasodilatation pouvant entraıner un etat de choc.Le pronostic depend plus de la cause de l’acidose que du pH sanguin.

Le traitement depend de la valeur du pH. Si le pH est inferieur a7,2, il faut alcaliniser par le NaHCO3 a 1,4 %. La ventilationmecanique associee permet l’elimination du CO2 et la diminutionde la depense energetique donc de la production de H+. L’epurationextrarenale peut etre utilisee en cas de defaillance renale, d’echecde l’alcalinisation et devant certaines intoxications.

Si le pH est superieur a 7,2, l’alcalinisation n’est pasrecommandee, le traitement de la cause est suffisant. Cela estparticulierement vrai pour les acidoses lactiques, les acidocetoseset les intoxications.

2.4.2.2. Acidoses chroniques. En cas d’acidose chronique, le risque along terme est celui de l’osteoporose et de l’augmentation ducatabolisme des proteines. L’alcalinisation par NaHCO3 doit tenircompte de l’apport sode. La tolerance digestive des solutes alcalinsper os n’est en general pas bonne.

Generation et facteurs d’entretien d’une alcalose metabolique

Ge ne ration :

� pertes de protons depuis le tube digestif ou les urines :

vomissements, diuretiques thiazidiques ou de l’anse,

etc. ;

� entree de HCO3� dans le secteur extracellulaire :

syndromes de Conn et de Cushing, etc.

Facteurs d’entretien :

� deshydratation du secteur extracellulaire ! reabsorp-

tion des HCO3� au tube proximal ;

� hypokaliemie ! augmentation de l’excretion urinaire

des H+ par le NH4+ ;

� hypermineralocorticisme ! secretion voltage-depen-

dante des H+ dans le collecteur cortical.

3. Alcaloses metaboliques

3.1. Definition et diagnostic

3.1.1. Definition

Une alcalose metabolique est definie par l’association d’un pHsanguin alcalin (superieur ou egal a 7,43) a une augmentation de lareserve alcaline (superieure ou egale a 28 mmol/L).

L’alcalose metabolique entraıne une augmentation de la PaCO2

(hypoventilation alveolaire de compensation) et une diminution dela PaO2 proportionnelle a l’augmentation de la PaCO2. La chloremie

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est plus basse que ne le voudrait l’augmentation des HCO3� avec un

petit trou anionique lie a une production d’acide lactique [13].

3.1.2. Diagnostic

Les signes cliniques sont non specifiques et inconstants. Ilsassocient :

� des signes neurologiques si le pH est superieur a 7,5 : agitation,confusion, coma, epilepsie ;� des signes neuromusculaires : crampes, myoclonies (secondaire

a la chute du calcium ionise) ;� des signes cardiaques : arythmies.

3.2. Approches cliniques

3.2.1. Generation et maintenance de l’alcalose metabolique

Les deux conditions necessaires pour creer une alcalosemetabolique sont :

� l’entree de HCO3� dans le secteur extracellulaire par perte

d’acide ou gain d’alcalin, ce qui genere l’alcalose ;� une augmentation de la capacite du rein a reabsorber les HCO3

ou a eliminer les H+, ce qui maintient l’alcalose [14].

3.2.1.1. Generation de l’alcalose. L’entree de HCO3� dans le secteur

extracellulaire peut etre renale ou digestive. Une entree d’originerenale des HCO3

� s’observe :

� dans les situations d’hyperaldosteronisme primitif (syndrome deConn par exemple) ;� en cas d’afflux de Na+ dans le nephron distal en presence d’un

hyperaldosteronisme (traitement par diuretiques de l’anse),l’hyperaldosteronisme etant secondaire a la depletion volemique.

Ces deux situations combinent trois facteurs :

� un apport important de Na+ dans le tube collecteur cortical ;� un hypermineralocorticisme, la secretion d’aldosterone deve-

nant independante du volume extracellulaire ;� une hypokaliemie, consequence des deux premiers phenomenes.

L’afflux de Na+ dans le tube collecteur cortical alors quel’aldosterone est elevee augmente la secretion des H+. En effet,l’aldosterone active la Na+/K+ ATPase et favorise l’ouverture ducanal epithelial sodique des cellules principales. En presence deNa+ dans la lumiere tubulaire, le Na+ est echange contre les H+ et lesK+ d’ou alcalose et hypokaliemie. L’hypokaliemie aggrave l’alcalosecar elle augmente la secretion d’acide.

La perte d’acide par le tube digestif a l’occasion de vomisse-ments (riches en HCl) conduit a l’addition de HCO3

� dans le secteurextracellulaire mais il faut, pour maintenir l’alcalose, que lareabsorption renale des HCO3

� soit augmentee [13].

3.2.1.2. Maintenance de l’alcalose. Trois mecanismes rendentcompte du maintien de l’alcalose :

� la deshydratation du secteur extracellulaire. Il s’agit du facteurprincipal ;� l’hypokaliemie ;� un hypermineralocorticisme.

La deshydratation du secteur extracellulaire diminue le DFG,donc la quantite de HCO3

� filtree, ce qui limite leur excretion

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses e10.1016/j.nephro.2014.05.004

renale. De plus, la reabsorption des HCO3� est augmentee dans le

tube proximal.L’hypokaliemie diminue aussi le DFG et stimule la secretion des

H+ sous forme de NH4+.

L’hypermineralocorticisme est un facteur de maintien car ilstimule la secretion des H+ si la delivrance du Na+ est maintenuedans le tube collecteur cortical [13].

3.3. Etiologies

Les etiologies des alcaloses metaboliques se divisent en deuxgroupes :

� les alcaloses associees a une deshydratation extracellulaire ;� les alcaloses associees a une hydratation extracellulaire normale

ou avec hyperhydratation extracellulaire.

3.3.1. Deshydratation extracellulaire

La deshydratation extracellulaire est a l’origine du maintien del’alcalose dans ces etiologies. L’analyse du Na+ et du Cl� urinairepermet en general de distinguer les differentes causes (Fig. 7).

3.3.1.1. Excretion urinaire elevee de Na+ et de Cl�. L’alcalose estinitiee par une perte d’H+ par le rein :

� traitements en cours par diuretiques de l’anse ou thiazidiques ;� syndromes de Bartter et de Gitelman ;� deficit en magnesium : l’alcalose n’est pas systematique et est en

regle generale moderee. Son determinisme est inconnu.

Rarement, l’alcalose est initiee par une entree de HCO3� dans le

secteur extracellulaire d’origine digestive ou osseuse comme dansles hypercalcemies extraparathyroıdiennes :

� syndrome de Burnett survenant chez les malades insuffisantsrenaux consommant de grandes quantites de sels de calciumalcalin (carbonate de calcium) ;� intoxication a la vitamine D, granulomatoses (sarcoıdose) et lyse

osseuse des cancers.

3.3.1.2. Excretion urinaire basse de Cl� et elevee de Na+. L’alcaloseest initiee par une perte d’H+ par le tube digestif :

� vomissements actifs ;� sonde nasogastrique en aspiration.

3.3.1.3. Excretion urinaire basse de Cl� et de Na+. L’alcalose estinitiee soit par une perte d’H+ par le tube digestif en cas devomissements dans un passe recent, soit par le rein en cas detraitement par diuretique dans un passe recent et en casd’alcalose post-hypercapnie. Cette derniere s’explique par l’accu-mulation de HCO3

� alors que le patient etait hypercapnique(compensation metabolique de l’acidose respiratoire). L’accumu-lation des HCO3

� entraıne un deficit en Cl� par chlorurie. Lorsquela ventilation alveolaire est restituee, le rein ne peut excreter tousles HCO3

� accumules du fait du deficit en chlorure de sodium(NaCl).

Ces alcaloses metaboliques doivent etre traitees par du NaCl, cequi permet de restaurer l’hydratation du secteur extracellulaire etainsi l’excretion renale des HCO3

� accumules. La depletion en K+

contribue aussi au maintien de l’alcalose. Elle doit aussi etrecompensee mais c’est l’apport de NaCl qui constitue le traitementde base.

t alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

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Fig. 7. Arbre decisionnel. Demarche diagnostique devant une alcalose metabolique. HTA : hypertension arterielle.

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3.3.2. Hyperhydratation extracellulaire ou hydratation extracellulaire

normale

Ce type d’alcalose est toujours en rapport avec une perte renaled’acide par hyperactivite mineralocorticoıde. L’alcalose est entre-tenue par le maintien de l’activite mineralocorticoıde en depit del’expansion volemique (qui autorise un apport de Na+ dans le tubecollecteur) et par l’hypokaliemie qui stimule l’excretion des H+. Lesdosages de renine et d’aldosterone permettent de differencier troisgroupes d’etiologies (Fig. 7).

3.3.2.1. Hyperaldosteronisme primaire (syndrome de Conn). Dansces situations, la renine est basse et non stimulable et l’aldosteroneelevee :

� maladie de Conn ;� hyperplasie bilaterale des surrenales ;� cancer de la surrenale.

3.3.2.2. Hyperaldosteronismes secondaires. Dans ces situations, larenine et l’aldosterone sont elevees :

� stenose de l’artere renale ;� tumeur secretant de la renine ;� hypertension arterielle acceleree ou maligne.

3.3.2.3. Hypermineralocorticisme sans aldosterone. L’activite mine-ralocorticoıde n’est pas en rapport avec l’aldosterone mais avecd’autres hormones surrenaliennes normalement inactives (corti-sol) ou en quantite habituellement insuffisante pour exercer uneffet mineralocorticoıde.

Dans ces situations, la renine et l’aldosterone sont basses :

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses et10.1016/j.nephro.2014.05.004

� syndrome de Cushing et traitement par corticoıdes ;� inhibition de la 11-b steroıde deshydrogenase par la glycyrrhizine

(reglisse) ;� syndrome de Liddle : il s’agit d’une mutation du canal epithelial

sodique, ce qui augmente son activite de reabsorption de Na+

aboutissant a une hypertension arterielle avec alcalose hypoka-liemique [15].

Toutes ces causes d’alcalose metabolique doivent etre traiteespar du chlorure de potassium (KCl), ce qui permet de restaurerl’excretion renale des HCO3

� accumules.Enfin, l’alcalose des deficits en K+ s’explique par le transfert des

H+ vers le milieu intracellulaire et l’augmentation de l’excretionrenale des H+ sous la forme des NH4

+.L’alcalose de contraction s’observe en cas de traitement par

furosemide (Lasilix1) qui soustrait du liquide dans le secteurextracellulaire alors que le stock des HCO3

� reste constant.

3.4. Traitement

Le traitement d’une alcalose metabolique est d’abord celui deson facteur d’entretien, puis celui de sa cause. Un traitementsymptomatique n’est necessaire que dans de rares circonstances.

3.4.1. Correction du facteur d’entretien

La correction du facteur d’entretien de l’alcalose est primor-diale. Le traitement depend de l’etiologie :

� apport de NaCl dans toutes les situations associees a unedeshydratation extracellulaire. C’est le traitement des alcalosesdes vomissements, des diuretiques, etc. ;� apport de K+ dans toutes les situations associees a une

hyperhydratation extracellulaire. C’est le traitement des alca-loses par hyperaldosteronisme primitif, de la maladie deCushing, etc.

alcaloses metaboliques. Nephrol ther (2014), http://dx.doi.org/

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3.4.2. Traitement etiologique

Chaque cause d’alcalose metabolique a son propre traitement. Ils’agit par exemple :

� d’arreter les diuretiques thiazidiques ou de l’anse ;� de l’ablation d’une sonde gastrique ou de la prescription

d’antisecretoire si le maintien de la sonde est necessaire ;� de la cure chirurgicale d’un adenome de Conn, etc.

3.4.3. Traitement symptomatique

Compte tenu des consequences cliniques de l’alcalose, untraitement symptomatique ne s’impose que chez certains malades :

� malades en detresse respiratoire chez qui la correction del’alcalose peut ameliorer la ventilation alveolaire ;� malades en angor instable ou ayant presente un infarctus

myocardique recent ;� malades presentant des symptomes neurologiques.

Le chlorure d’ammonium (NH4Cl) peut etre utilise per os ou parvoie veineuse. L’acide chlorhydrique (HCl) 0,15 ou 0,25 N peut etreperfuse sur une voie centrale [16]. Ces acides sont contre-indiquesen cas d’insuffisance renale ou hepatique. Le chlorhydrated’arginine a ete abandonne du fait d’hyperkaliemie severe. Lesantialdosterones (spironolactone, Aldactone1) ou les diuretiquesepargneurs de K+ (amiloride, Modamide1) sont de bons traite-ments de l’alcalose en cas d’hyperaldosteronisme.

L’acetazolamide (Diamox1) est peu efficace et peut augmenterla PaCO2 en particulier chez l’insuffisant respiratoire.

Declaration d’interets

L’auteur declare ne pas avoir de conflits d’interets en relationavec cet article.

Pour citer cet article : Dussol B. Equilibre acidobasique : acidoses e10.1016/j.nephro.2014.05.004

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Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

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