La Vie Spirituelle - La Religiosité Allemande

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  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    1/90

    Source gallica.bnf.fr / Les ditions du Cerf

    La Vie spirituelle.

    Supplment

    http://gallica.bnf.fr/http://www.bnf.fr/
  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

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    La Vie spirituelle. Supplment. 1955/02/15.

    1

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    2

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    LE

    SENTIMENT

    RELIGIEUX

    DU

    JEUNE

    GTHE

    L

    ORSQU ON

    veut

    parler

    du

    jeune

    Gthe,

    le

    sujet

    se

    limite

    trs

    exactement.

    La

    coupure,

    toujours

    un

    peu

    factice,

    entre

    les

    priodes

    d une vie,

    entre

    la

    jeu-

    nesse et

    l ge

    mr,

    se

    symbolise ici

    sans

    ambigut

    par

    le

    dpart pour

    Weimar,

    fin

    octobre

    1776.

    Gthe

    a

    vingt-

    sept

    ans

    depuis

    le

    28

    aot

    :

    un

    Gthe

    qui

    se

    dveloppe

    organiquement

    partir

    d lments

    encore

    peu

    percepti-

    bles

    dans

    le

    Gthe

    jeune,

    mais

    qui

    prdomineront

    bien-

    tt.

    Nous

    sommes

    renseigns

    sur

    Gthe

    aussi bien

    qu on

    peut

    l tre

    sur

    un

    grand

    homme.

    Ses

    uvres

    de

    jeunesse,

    lettres,

    journaux,

    relations

    de

    voyage,

    esquisses,

    frag-

    ments,

    pomes

    et

    proses

    dans

    leur

    forme

    originale,

    t-

    moignages

    de

    contemporains, ont

    t

    publis dans

    les

    six

    in-8

    de Max

    Morris Leipzig,

    1909-1919).

    Depuis

    cette

    date,

    quelques indits

    sont

    venus

    s ajouter,

    comme

    les

    prcieuses

    lettres

    Langer

    de

    1768-1769,

    retrouves

    seu-

    lement

    en 1912,

    capitales

    pour

    notre

    propos.

    On

    a

    rpt

    satit

    le

    mot

    de

    Gthe

    dans

    ses

    m-

    moires

    :

    Toutes

    les

    choses

    que

    l on connat

    de

    moi

    ne

    sont

    que

    les fragments

    d une

    grande

    confession1.

    Il

    faut

    pourtant

    le citer

    encore.

    Pas

    d crivain

    chez

    qui

    l uvre

    soit

    plus directement l expression

    de la

    pense

    et

    du

    sentiment

    :

    il

    n est

    que

    de

    comparer

    les

    uvres

    impri-

    mes

    aux

    ouvrages

    qui

    n taient

    pas

    destins la

    publi-

    cation

    pour

    constater

    leur

    intime

    concordance.

    1.

    Dichtung

    und

    Wahrheit, II,

    7

    Jubilums-Ausgabe,

    t.

    23,

    pp.

    82-83).

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    De

    plus, les

    mmoires,Posie

    et

    vrit,

    ont

    t crits

    pour

    relier entre

    eux

    ces

    fragments

    pars. Ils embras-

    sent

    toute

    la priode

    qui

    prcde Weimar.

    Les

    trois

    pre-

    mires

    parties

    furent

    rdiges

    de

    1811

    1813

    Gthe

    avait

    donc

    entre

    soixante-deux

    et

    soixante-quatre

    ans).

    Il

    reprit

    son

    uvre

    en

    1830

    et

    1831.

    On doit

    utiliser

    ce

    document

    avec

    plus

    de

    circonspection:

    non pas

    tant

    parce

    que

    sa

    mmoire

    risque

    de

    le

    trahir

    c est

    un

    phnomne

    connu

    que

    les

    souvenirs

    de

    jeunesse

    prennent

    une

    particulire

    acuit

    dans

    l esprit

    des

    vieillards),

    mais

    pour

    des

    raisons

    plus

    directes

    :

    la

    composition

    l a

    oblig

    des

    anachro-

    nismes,

    il

    a

    parfois projet

    des

    considrations

    actuelles

    sur

    ces

    sentiments

    d autrefois,

    ou

    bien

    il

    a

    dsir

    jeter

    le

    voile

    sur

    certains

    vnements

    de

    sa

    vie, extrieurs

    ou

    int-

    rieurs.

    *

    Par

    tradition

    et

    convenance

    sociale,

    Monsieur

    le Con-

    seiller

    Jean-Gaspard

    Gthe suit

    les

    exercices du

    culte,

    mais

    en

    fervent

    admirateur

    de

    Frdric

    II, il

    est

    port

    au

    rationalisme.

    Madame Gthe

    est

    plus sincrement

    pieuse.

    S il faut

    en

    croire Bettina Brentano

    qui prtend

    rap-

    porter

    ce

    que

    lui

    a

    dit

    la

    mre

    de

    Gthe,

    le

    petit

    Jean-

    Wolfgang

    aurait

    attach

    une

    grande

    importance

    aux

    astres

    qui doivent avoir

    une

    influence favorable

    sur

    sa

    destine2.

    La vracit

    de

    Bettina

    est

    assez

    sujette

    cau-

    tion,

    mais

    voici

    des

    textes

    de

    Gthe

    lui-mme.

    Aprs

    avoir parl

    de

    la

    maison

    paternelle

    et

    du

    milieu

    de Franc-

    fort,

    il

    voque

    le

    tremblement

    de

    terre

    de

    Lisbonne,

    1755:3.

    Il

    a

    six

    ans

    alors, mais

    les

    rpercussions

    en

    sont

    longues.

    Voici

    troubl

    l optimisme

    des

    temps

    modernes:

    tout

    n est

    pas

    aussi

    beau

    qu on

    l avait

    cru

    dans

    le meil-

    leur

    des

    mondes

    et

    la

    nature

    laisse

    elle-mme

    peut

    ap-

    porter

    l homme

    autre

    chose

    que

    des biens. Les

    thories

    de Leibniz

    et

    de

    Rousseau reoivent

    un

    rude

    coup

    :

    Dieu

    qui

    a

    cr

    et

    maintient le

    ciel

    et

    la

    terre,

    que

    l ex-

    plication

    du

    premier article

    du

    Credo

    lui

    reprsentait

    si

    2.

    MORRIS,I,p.92.

    3.

    D.u.W,,I,i,

    Jub.,22,pp.

    31-32.

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    sage

    et

    si

    misricordieux

    ne

    s tait

    nullement

    montr

    paternel

    en

    livrant

    la mme

    destruction les bons

    et

    les

    mchants.

    En

    vain

    le

    jeune

    esprit

    cherchait-il

    se

    re-

    prendre

    contre

    ces

    impressions

    ce

    qui

    d ailleurs

    tait

    d autant

    moins

    possible

    que

    les

    sages

    et

    les

    exgtes

    eux-

    mmes

    ne

    pouvaient

    se

    mettre

    d accord

    sur

    la

    faon

    dont

    il

    fallait

    considrer

    un

    tel

    phnomne4.

    Et

    voici

    encore

    que

    pendant

    l t

    suivant

    un

    phno-

    mne

    naturel

    donne l ide

    du

    Dieu

    courrouc de

    l Ancien

    Testament:

    une

    grle

    accompagne

    d clairs

    et

    de

    ton-

    nerre

    brise

    les

    vitres

    de la

    maison

    paternelle rcemment

    reconstruite

    endommage

    les

    meubles

    neufs

    et

    quelques

    livres

    prcieux

    incident

    d autant plus

    impressionnant

    pour

    les

    enfants

    que

    les

    domestiques

    affols les

    entra-

    nent

    dans

    un

    couloir

    sombre

    et

    genoux

    croient

    par

    des

    pleurs

    et

    des

    cris effrayants

    apaiser la

    divinit

    cour-

    rouce.

    Si

    minime

    que

    le

    fait

    apparaisse

    il

    n en

    a

    pas

    moins

    laiss

    au

    vieillard

    une

    impression

    assez

    forte

    pour

    qu il

    croie

    devoir

    le

    rapporter.

    Selon

    Bettina

    cependant alors

    qu on

    parle de

    tous

    cts

    du

    tremblement

    de

    terre

    de

    Lisbonne

    et

    que

    l on

    ouvre

    la

    Bible

    pour

    trouver

    des

    explications

    le

    petit

    Jean-Wolfgang

    est

    all

    avec

    son

    grand-pre Textor

    couter

    un

    sermon

    o

    la

    sagesse

    du

    Crateur

    a

    t

    en

    quelque

    sorte

    dfendue

    contre

    l humanit

    bouleverse.

    Son

    pre

    lui

    demande

    son

    avis. Il

    rpond:

    A la

    fin

    tout

    doit tre

    encore

    beaucoup

    plus

    simple

    que

    le

    pr-

    dicateur

    ne

    le

    pense

    ;

    Dieu

    doit

    bien

    savoir

    qu aucun

    dom-

    mage

    ne

    peut

    arriver

    l me immortelle

    du

    fait d un

    destin

    dfavorable5.

    La

    Bible

    est

    un

    des

    livres

    avec

    lesquels

    l enfant

    se

    familiarise

    le

    plus

    tt mais

    le

    protestantisme

    teint de

    rationalisme

    n est

    tout

    prendre

    qu une

    sorte

    de

    sche

    morale

    qui

    ne

    peut

    satisfaire

    ni

    l me

    ni

    le

    cur

    .

    D o

    cette

    multiplicit

    de

    sectes

    sparatistes

    pitistes

    Frres

    moraves

    et autres

    croyants

    qui

    ont pour

    tendance

    commune

    de

    chercher

    s approcher davantage

    de la

    divi-

    nit

    par

    le

    Christ.

    L enfant

    entend

    discuter les

    dissidents

    4.

    Ibid.

    p.

    72.

    5-MORRIS

    I

    p.94.

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    de

    la

    religion

    officielle

    qui

    lui

    paraissent les plus intres-

    sants par

    leur originalit leur sincrit

    leur

    indpen-

    dance.

    Il entend

    rapporter

    sur

    eux

    des anecdotes

    di-

    fiantes

    entre autres

    celle

    d un

    ferblantier

    qui

    pensant

    le

    confondre

    on

    a

    demand

    qui

    tait

    son

    confesseur

    et

    il

    a

    rpondu:

    Personne

    de

    moins

    que

    le

    confesseur

    du

    roi

    David.

    Le

    vieux

    Gthe attribue

    l influence

    de

    tels

    croyants

    le

    dsir

    prouv

    par

    le

    jeune

    garon

    d entrer

    en

    rapports

    avec

    le

    Dieu crateur. La

    beaut

    du

    monde

    et

    les

    biens

    multiples

    qui

    sont notre

    part

    lui

    ont fait oublier

    les

    mani-

    festations de

    sa

    colre.

    Selon le premier

    article

    du Credo

    Dieu

    connat

    et

    aime

    la

    nature

    son

    ouvrage

    ;

    il

    peut

    avoir des

    relations directes

    avec

    l homme

    comme

    avec

    le

    reste

    de

    la

    cration

    et

    veille

    sur

    lui

    comme

    sur

    le

    mou-

    vement

    des

    astres

    sur

    les

    plantes

    et

    les animaux

    ainsi

    que

    le

    disent expressment

    certains

    textes

    de

    l vangile.

    Aussi

    ne

    pouvant

    concevoir

    la

    forme

    de

    cet

    tre

    l enfant

    le cherche-t-il

    dans

    ses

    uvres

    et

    dcide-t-il

    de

    lui

    dres-

    ser

    un

    autel

    la

    manire

    de

    l Ancien Testament.

    Des pro-

    duits naturels reprsenteront le

    monde

    ;

    la flamme

    qui

    brlera

    au-dessus

    d eux symbolisera

    l me

    humaine

    qui

    aspire

    son

    Crateur. Sur

    un

    pupitre

    musique

    verni

    rouge avec

    des

    fleurs

    d or

    en

    forme

    de

    pyramide

    de-

    grs il dispose divers objets

    qu il

    a

    trouvs

    dans

    la

    col-

    lection

    d histoire

    naturelle

    de

    son

    pre.

    Nouveau

    prtre

    et

    sacrificateur

    il

    place

    au

    sommet

    de

    petites

    bougies

    aromatiques

    dans

    une soucoupe

    de porcelaine

    puis

    il

    les

    allume

    au moyen

    d une

    lentille

    qui

    capte

    les

    rayons

    du

    soleil.

    Mais voici

    qu un jour

    n ayant

    plus

    la

    soucoupe

    sous

    la

    main

    il

    met

    directement les bougies

    la surface

    suprieure

    du

    pupitre

    et

    les

    allume.

    Elles

    coulent si

    piteu-

    sement

    qu elles

    dtriorent

    le

    beau

    vernis

    et

    les fleurs

    d or

    en

    sorte

    qu il

    n a

    plus

    envie

    de

    recommencer.

    On

    pourrait

    presque

    considrer

    ce

    hasard

    comme un

    signe

    et

    un

    avertissement

    du danger

    qu il

    y

    a en

    gnral

    vouloir s approcher

    de

    Dieu

    par

    de

    telles

    voies

    conclut

    le

    vieux Gthe6.

    Les

    mmoires

    renferment

    un

    trs important

    passage

    sur

    les

    sacrements.

    6.

    D.u.

    W.

    I

    i

    Jub.

    22 pp.

    46-49.

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    7/90

    Le

    culte

    protestant,

    dit

    Gthe,

    ne

    parvient

    pas

    crer

    une

    vritable communaut, et

    si

    les fidles

    s loignent

    de

    Eglise,

    c est

    que

    le culte

    ne

    leur

    offre

    pas

    une

    vie

    sacra-

    mentelle

    suffisante.

    Ils

    ne

    voient

    administrer

    le

    baptme

    qu aux

    autres

    et

    n ont

    donc,

    en

    ralit,

    qu un

    seul

    sacre-

    ment

    qui

    rclame

    leur participation active

    :

    la

    Cne. Or

    c est--dire qu il tait

    le

    dpositaire d une

    vertu

    spirituelle

    dont

    il

    avait

    le

    libre

    usage.

    O

    il

    dit

    Arbre

    ,

    Soleil

    ,

    Espace

    ,

    il

    y

    a

    presque

    un

    arbre,

    il

    y

    a

    un

    soleil,

    u

    y

    a

    un

    espace,

    crs

    l vritablement

    par

    le

    mot

    ;

    puis

    dans

    notre

    souvenir

    il

    y

    a

    plus

    que

    l image

    indcise

    ou

    le

    reflet

    qu y

    aurait

    laiss

    l arbre,

    ou

    le

    soleil,

    ou

    l espace

    reu

    par

    nos

    sens

    et

    accueilli

    par

    nous

    seuls;

    il

    y

    a

    plus

    en

    nous

    que nos

    propres

    souvenirs.

    Telle

    est

    la

    posie-

    Sa

    vrit.

    Ce

    n est

    pas un

    bercement

    de

    nos

    langueurs,

    une

    caresse

    nos

    sentimentalits

    suspectes

    :

    sa

    langue

    est

    une

    langue

    de

    conqute

    qui

    va

    droit

    au

    but,

    comme

    une

    flche

    spirituelle,

    o elle

    vibre,

    une

    fois

    plante,

    en

    har

    monies

    et en

    harmoniques

    qui

    vont

    loin,

    se

    propagent

    plus

    loin

    encore

    ;

    et

    l ternit

    est

    toujours

    prsente.

    Cette

    dynamique puissante (j allais

    presque

    dire

    cette

    dynamite)

    fait

    clater

    les

    images

    et

    ne

    repose

    aucunement

    sur

    d es-

    thtiques

    et

    plus lentes

    beauts

    sur

    lesquelles

    on

    pourrait

    complaisamment

    revenir.

    Ce

    qui

    est

    pour

    tous

    les

    autres

    potes

    de

    l Occident

    une

    fatalit

    suppliciante

    de

    la

    poe-

    sie:

    que

    la

    beaut

    et

    les

    beauts

    s y paississent

    dans

    les

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    29/90

    cpparences

    et

    s y

    prennent, masquant

    soudain

    de

    leur

    opacit, de

    leur

    propre

    vidence

    trop

    souveraine,

    trop

    pr-

    sente,

    la

    vrit

    dont

    elles

    voulaient

    n tre

    que

    la

    pure

    image,

    non

    cela

    n est

    pas

    une

    fatalit

    pour

    le

    seul

    Hl-

    erlin

    chez

    qui,

    au

    plus

    dense de

    l incendie

    et

    au

    plus

    fort

    du

    feu,

    la

    flamme

    la

    plus

    intense

    et

    la

    plus

    fulgurante

    est

    transparente

    encore

    assez

    pour

    laisser

    voir

    une

    autre

    flamme,

    un

    autre

    feu.

    Et

    jamais

    la

    langue,

    pourtant

    char-

    nelle,

    ne

    masque

    de

    sa

    chair,

    l esprit;

    et

    jamais

    le

    nombre,

    Pourtant

    multiple et

    savant

    d harmonies

    parfoismesurables

    et

    parfois

    pas,

    ne

    se

    chiffre,

    dans

    l vidence,

    au

    dtriment

    du

    nombre

    plus

    secret

    qui le

    commande.

    Des

    racines

    pro-

    fondes

    aux

    plus

    lgres

    fleurs envoles, des

    vocations

    accomplies

    aux

    obissances

    majeures,

    des

    htes

    sres

    et

    instantanes

    au

    dploiement

    parfois

    troubl

    des

    richesses,

    des

    russites

    dans

    l expression

    aux

    manquements

    provo-

    cateurs,

    accords

    d accords

    qui

    rpondent

    d autres

    ac-

    cords,

    tout

    le

    dire

    est

    l,

    mais

    en

    image,

    dans

    la

    ralit

    seulement prsente

    d une

    autre

    ralit

    plus prsente

    en-

    core,

    plus

    insistante

    et

    de

    plus

    haut.

    Vivante

    nigme dans

    le

    vivant

    miroir,

    cette

    langue

    abyssale

    dans

    sa

    verticalit

    outenue

    brle

    comme

    une

    foudre

    le

    minutieux

    appareil

    e

    la

    syntaxe

    et

    de

    la

    grammaire

    d un

    monstrueux

    lan-

    gage

    qui

    avait

    oubli,

    lui,

    de

    quoi

    il

    tait

    l image

    et

    de

    QUI

    Il

    tait

    la

    parole.

    Il

    faut

    avoir

    parcouru

    comme

    il

    m

    t

    donn

    de

    le

    faire,

    il

    faut

    avoir

    pu

    mesurer

    les

    latitudes

    intrieures

    des

    pomes

    (ce

    qui,

    pour

    des

    raisons

    eVldentes, ne

    saurait

    tre

    permis

    aux

    autochtones) pour

    savoir

    comme

    je

    le

    sais,

    que

    leur

    centre

    de

    gravit

    n est

    pas

    ,dans

    la

    langue

    o ils

    ont

    parl

    et

    qu ils

    ont

    con-

    trH

    lt

    ou

    dans l art,

    qu ils

    ont

    pulvris,

    ni

    mme

    ans

    le

    cur

    de

    l homme

    qui

    les

    a

    ports,

    mais

    bien

    dans

    l A,ame,de.cet

    homme.

    Et

    que

    l unique

    vertu

    de

    cet

    homme,

    cest-a-dlre

    son

    gnie,

    aura

    t

    outre

    l obissance

    et

    e

    gout

    respect

    de

    la

    perfection

    qui lui

    ont

    fait

    n opposer

    que

    la

    moindre

    rsistance

    aux dons

    qu il

    avait

    reus

    e

    faire

    et

    de

    vouloir

    de

    son

    cur,

    qu il ft

    une

    image

    ussi

    fidle

    et

    aussi

    exacte

    que

    possible

    de

    cette

    me

    qui

    vait

    affaire

    et

    qui

    n avait

    affaire

    qu

    Dieu.

    quarante

    annes

    de folie

    sont

    une

    cellule

    monacale

    il

    faut

    voirla

    chambre

    minuscule

    o

    il

    les

    a

    passes),

    un

    clotre

    plus

    troit

    que

    le

    plus

    clos

    des

    clotres,

    o il

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    30/90

    s est

    fait

    spirituellement quelque

    chose qui

    ne

    peut

    tre,

    comme

    tout

    ce

    qui

    se

    fait

    sur

    terre,

    qu une

    prparation

    ou une

    rparation,

    et

    peut-tre

    l une

    et

    l autre.

    Mais

    je

    regrette

    de

    ne

    pouvoir

    admettre

    que

    la

    quantit

    et

    la

    nature

    de la

    souffrance inimaginable

    qui

    s y

    trouve

    in-

    cluse

    (inimaginable

    pour

    quiconque

    n a

    pas,

    au

    moins,

    pratiqu

    nuit

    et

    jour

    l agonie

    de

    ces

    quarante

    annes)

    soient

    justiciables

    de

    la

    curiosit

    externe

    des

    mdecins,

    pa-

    thographes

    ou

    non. De

    mme

    qu il

    m est

    difficile

    d admet-

    tre,

    non

    pas en

    tant

    que

    pote seulement mais

    en

    tant

    que

    frre

    humain,

    pour

    des

    pomes

    dont il

    m a

    fallu

    moi

    -

    mme

    hanter

    les terribles vertiges,

    ctoyer

    les

    abmes

    et

    connatre

    les

    tnbres

    blanches,

    si

    prilleuses

    que

    n im-

    porte

    quel

    cuistre

    intellectuel

    puisse

    ajuster

    sur

    eux,

    pai-

    siblement,

    de

    derrire

    une

    table,

    sa

    critique

    et

    son

    juge-

    ment

    ;

    cela

    pour

    la

    raison

    trs

    simple

    et

    trs minente

    que

    cette

    critique

    et

    ce

    jugement

    ne

    peuvent

    rien

    pour

    le

    SALUT

    que ces

    pomes

    ont

    mis

    en cause,

    et

    donc

    rien

    en

    faveur

    de

    la

    VRIT,

    qui

    se

    moque

    des

    exactitudes

    comme

    des

    inexactitudes,

    et

    sur

    laquelle

    il faut bondir.

    Question

    d me

    et

    de

    cur,

    avant

    tout.

    La

    Posie

    est

    un

    tre,

    que

    les pauvrets humaines

    les

    plus

    tragiques

    et

    les

    plus

    pitoyables

    ne

    font

    que

    resplendir d autant

    plus;

    ce

    n est

    pas

    un

    Avoir,

    dont

    toutes

    les

    richesses

    accumu-

    les

    ne

    constituent jamais

    que

    le

    convoi funbre.

    Il

    ne

    faut pas confondre

    les

    orfvreries mallarmennes

    et val

    -

    ryques

    avec

    les

    btiments

    un peu

    moins fignols

    peut-

    tre, mais combien

    plus

    ncessaires,

    d un

    Baudelaire

    ou

    d un

    Rimbaud,

    d un

    Verlaine

    ou

    d un Villon,

    qui

    sont

    les

    domiciles

    de

    l me.

    Mais

    le

    lieu

    spirituel o devait

    se

    produire la chose,

    pour

    Hlderlin, tait

    la

    langue allemande.

    Et

    l

    est

    le

    premier

    drame.

    Car

    cette

    langue, matresse

    et

    rgisseuse

    des

    nations

    qui

    devaient

    recevoir,

    pour

    son avnementmme

    (Luther

    n est-il

    pas avec

    Paracelse,

    le

    premier

    cri-

    vain allemand

    ?)

    permission

    de

    rompre

    l unit

    catholique

    du

    monde chrtien, alors

    latine

    et

    romaine,

    et

    d inaugurer

    sur

    lui,

    dans l immdiate

    prolifration

    des

    sectes,

    les

    en-

    treprises

    plurielles

    de

    la

    Rforme

    qui

    prtendirent

    impu-

    ter

    au

    surnaturel

    les

    abus

    tristement

    humains

    et,

    en

    corri-

    geant

    ceux-ci,

    redresser

    celui-l;

    ramenant

    les

    folies

    de la

    Croix

    aux

    limites

    extrieures

    de

    la

    raison

    hu-

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    31/90

    aine;

    amputant les

    saints

    de leur

    saintet

    ;

    discutant

    de

    la

    Grace;

    privant

    l homme, dans

    son

    humilit

    de

    cra-

    ture

    1

    U

    secours

    ncessaire

    des

    sacrements,

    pour

    l instal-

    ler

    en

    niant

    la

    plupart

    des

    mystres,

    dans

    son

    orgueil

    dnientiel

    d individu

    qui

    garde

    Dieu

    sa

    porte

    et

    se

    eserve

    Ie

    ciel

    comme

    une

    rcompense

    morale;

    bref,

    jj

    art

    le

    saint

    mystre

    des

    critures

    la

    journalire

    et

    la

    domestique

    consommation

    des

    foules

    pour

    qui

    ce

    angage,

    Que

    l intelligence

    la plus

    haute

    peut

    peine

    ruter,

    allait

    devenir,

    pris

    dans

    sa forme

    la

    plus

    imm-

    iat

    0

    et

    la

    plus

    apparente,

    une

    sorte

    de

    formulaire

    fami-

    lierr

    o

    c

    h

    acun

    attrape

    ce

    qu il

    peut et

    dont

    chacun

    fait

    Ce

    qu il

    croit

    devoir

    faire

    ;

    cette

    langue

    allemande,

    je

    je

    rpte,

    qui

    porte

    l extrieur

    le

    signe

    peu

    discutable

    de

    son

    criture

    barbele

    qui

    brutalise

    le

    regard

    et

    arrache

    le

    fond

    de

    l il,

    et

    qui

    se

    construit,

    l intrieur,

    l in-

    verse

    de

    l esprit,

    avec

    le

    verbe

    moteur

    et

    tracteurde la

    phrase

    rejet

    derrire

    l inerte

    masse

    du

    vocabulaire

    en-

    as,

    command

    par

    derrire,

    avec encore ses

    genres

    si-

    Catlvement

    invertis

    et

    la

    mthodique

    confusion

    orga-

    que

    de

    sa

    syntaxe

    qui

    opte

    pour

    la

    priorit

    constante

    Ill,e

    satlque

    de

    la

    pense,

    qui

    en

    fait

    une

    matire

    tou-

    ours

    plus

    solide

    qu on

    tisse,

    noue,

    entrelace

    et

    paissit

    sans

    cesse

    selon

    les

    lois

    mcaniques

    qui fabriquent

    plus

    de

    mots

    qu elles

    n inventent

    de choses,

    au

    point mme

    qu il

    est

    souvent

    difficile

    et

    parfois

    impossible

    partir

    de

    l,

    prhr

    de

    cette forme

    plus

    complique

    que

    subtile

    et

    jours

    pesamment

    oriente

    vers

    le

    bas,

    de

    rejoindre

    la

    pense

    qui,

    l origine,

    nanmoins,

    tait

    esprit;

    cette

    la

    l?ue,

    uis-je,

    cette

    langue

    inquitante

    dont

    l instinct

    profond

    est

    de

    se

    constituer

    un

    monde de

    soi,

    hors

    du

    r;tnde,

    -

    dans

    cette

    zone

    du

    vide

    qu il

    faut

    bien appeler

    l

    abtrait

    puisque

    c est

    le

    nom que

    les philosophies

    or-

    uetlleuses

    donnent

    ce

    lotissement

    de

    l enfer

    o elles

    ont

    hte

    de

    construire

    ternellement

    le

    fantme

    de

    Babel

    q

    ,

    l chafaudage

    systmatique

    des ides,

    oui

    cetteangue

    qui

    a

    chang

    de

    SENS

    et

    qui

    pense

    seule

    parce

    u elle

    ne

    rflchit

    plus

    rien,

    est

    une

    sorte

    de

    monstre

    rauque

    et

    indocile

    pour

    l esprit

    qu elle

    n assiste

    plusau

    c)tnbat,

    dont

    elle

    n est

    plus

    une

    arme

    de

    rigueur

    et

    de

    VIgueur;et

    pour

    l intelligence

    qui

    s y

    dbat,

    la malheu-

    reuse

    elle

    est

    un

    pril

    constant,

    n tant

    pour

    elle

    ni

    un

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    32/90

    moyen

    de

    contrle

    efficace

    du

    dedans,

    ni

    une

    mesure

    spirituelle

    exacte

    par

    le

    haut,

    comme

    peut

    l tre

    encore

    la

    langue

    franaise

    la

    plus

    abtardie

    et

    la

    moins

    cons-

    quente.

    Spirituellement

    lche,

    matriellement

    fcal,

    ce

    verbe

    contrefait

    qui n ouvre

    que sur

    des

    horizons

    vagues

    et

    qui

    ne

    sont pas

    sous

    le

    mme ciel

    que

    les

    autres

    (LA

    soleil,

    LE

    lune

    sont

    ses

    astres),

    sera

    comme

    une

    maldic-

    tion

    sur

    le

    pote

    authentique,

    qui

    ne

    peut

    tre

    en

    ralit

    qu un

    contemplatif

    du

    verbe

    ;

    et

    l instrument

    que

    lui

    aura

    livr

    sa

    naissance est,

    en

    vrit, tellement

    tratre,

    qu il

    risque de

    lui

    tre

    mortel. Il

    le

    lui

    a

    t

    bien

    souvent,

    hlas Et

    si

    la

    sagesse

    avait

    le

    pouvoir

    de

    marquer

    la

    vrit

    d une

    croix,

    combien

    de

    croix

    ne

    verrions-nous

    pas

    dans

    les

    cimetires

    et

    sur

    les

    champs

    de

    la

    mort

    :

    Tu

    par

    la

    langue

    allemande?

    La

    rage

    de

    mourir

    et

    la

    rage

    de

    tuer

    sont

    les

    mmes;

    il

    faut bien

    qu elles

    reposent

    quelque

    part,

    quand

    on

    ne se

    contente

    pas

    de

    dsesprer

    du

    genre humain.

    ,

    Quant

    ceux

    des vivants

    que

    cette

    pense

    intimide

    peut-tre

    encore,

    ou

    que

    ce

    petit

    peu

    de

    vhmence

    effraie,

    qu ils

    se

    reportent

    donc

    aux

    quelques

    pages

    que

    consacre

    Hlderlin

    lui-mme

    l Allemagne:

    cette

    dernire lettre

    d Hyprion

    dont

    la

    violence

    imprcatoire

    est

    telle

    que

    tout

    ce

    qu on

    peut

    exprimer

    aprs

    ressem-

    ble

    du

    sirop

    d orgeat.

    Ah

    ne

    prtendez

    pas que

    j exagre

    parce que

    se

    trou-

    vent dranges

    de

    vieilles

    et

    tides

    habitudes

    ou

    l ordre

    apparent

    des

    surfaces,

    votre

    confort

    :

    tous

    les

    potes

    alle-

    mands

    qui

    s y

    sont

    tant

    soit

    peu

    aventurs

    eux-mmes

    nous

    le

    disent

    et

    nous

    l avouent

    obscurment,

    du

    fond

    sans

    esprance

    de

    leur dception,

    quand

    ils

    se

    cherchent

    l un aprs l autre,

    ttons,

    de

    lointaines patries,

    relles

    et

    mythiques,

    quelque

    part

    dans

    l espace

    et

    dans

    le

    temps,

    n importe o,

    mais

    ailleurs

    :

    que

    ce

    soit dans

    le

    moyen

    ge catholique

    et

    latin,

    ou

    l univers

    des contes (Novalis.

    F.

    Schlegel, Wackenroder

    et

    mme

    Tieck,

    pour

    les

    pre-

    miers romantiques,

    les

    uns

    superficiellement,

    les

    autres

    plus

    profondment)

    ;

    que

    ce

    soit

    la

    Grce

    schmatique

    de

    Voss

    ou

    la

    Grce

    rve,

    le

    mythe

    grec

    de

    Hlderlin

    ;

    l Ita-

    lie

    prsente

    ou

    passe

    (Gthe

    mme,

    et

    Hoffmann,

    pour

    ne

    parler

    que

    des plus

    surprenants,

    et

    toute

    l cole

    ro-

    maine

    des peintres),

    le

    XVIe

    sicle

    anglais,

    portugais

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    33/90

    espagnol

    Shakespeare

    est

    littralement

    naturalis

    allemand

    par

    la

    clbre

    traduction

    de

    W.

    Schlegel-Tieck),

    IVonenalisme

    de

    Michaelis,

    l exotisme

    de

    Freiligrath,

    le

    1

    olkslted

    etl Allemagne

    fictive

    du

    pass

    Herder,

    puis

    esfrres

    Grimm,

    entre

    autres)

    ou

    une

    Allemagne

    future

    et

    russlenne,

    et

    rageusement

    ambitieuse

    de

    s imposer

    partout

    par

    la

    force

    pour

    tre

    chez

    elle

    ailleurs,

    avec

    nim

    et

    les

    nationalistes

    qui

    la

    rvent

    et

    avec

    les

    potes

    CUlrass

    qui

    l annoncent

    :

    Arnt,

    Krner,

    Ruckert,

    etc.

    amais

    aucun

    n est

    l aise

    hic

    et

    nunc, dans

    son

    temps

    et

    dins

    son

    lieu;

    jamais

    aucun,

    non

    plus,

    ne

    cherche

    la

    rit

    des

    choses,

    mais

    chacun

    plante

    ici

    ou

    l,

    peu

    im-

    pre,

    o,

    son

    rve

    ncessaire,

    et,

    toujours

    en

    qute

    d une

    vritde

    base

    qui

    lui

    fait

    dfaut, bientt

    devient

    un

    zl

    erviteur,le

    plus

    furieux

    artisan

    du

    Mensonge.

    i

    Cette

    effroyable

    hcatombe

    de

    folie

    et

    de

    mort

    des

    Jeunes

    potes

    allemands

    de

    la

    seule

    re

    de

    posie

    Sturm

    und

    Drang

    et

    Romantisme)

    que

    connurent

    les

    diffrents

    Peuples

    de

    cette

    nation, nous

    le

    crie

    :

    C est

    la

    langue,

    la

    an

    seule

    Puisqu elle

    est leur seul lien,

    qui

    leuraura

    t

    fatale non

    point

    le

    paysage

    ou

    le

    sang,

    si

    diffrents

    de

    l,Ua

    * ,autre>

    potes

    aux

    grandes

    amoureuses);

    st

    elle

    qUI

    aura

    conduit

    l chec

    tant

    de

    tentatives

    si

    souv

    ^1*c^fu^es

    et

    gnreuses;

    c est

    elle

    qui

    les

    a

    prci-

    Pites

    tous

    l abme

    ou

    jets

    dans

    les

    tnbres froides

    et

    dangreuses

    du

    dsespoir.

    9uonm excuse

    si

    j y

    mets

    quelque insistance,

    atterr

    u on

    7e

    soit

    Pas

    plus

    accoutum

    s inquiter

    de

    telles

    h

    r

    )

    reitte

    spirituelles

    pour

    comprendre

    les

    dispositions

    parttcuhres

    d un

    peuple,

    remarquables

    bien

    plus

    dans

    ls

    moiVements

    mmes

    de

    sa

    langue maternelle

    o il

    est

    comme

    un

    enfant

    dans

    le

    ventre

    de

    sa

    mre,

    qu il

    dforme

    en

    S Y

    formant),

    que

    dans

    les

    grands

    faits

    de

    l Histoire,

    o

    11

    est

    assurment

    bien

    plus

    un

    acteur

    remplissant

    un

    oil

    est

    assurmentbien

    plusun-tcteur

    remplissant

    un

    le,

    qu un

    auteur,

    comme

    on

    voudrait

    le

    laisser

    croire,

    ent

    ou

    collectivement.

    Il me

    parat vraiment

    aboltque

    qu on

    ne

    s adresse

    pour

    ainsi

    dire jamais

    cette

    0r.

    Ce

    spirituelle

    et

    qu on

    se

    tienne

    toujours aussi

    obstin^ ment

    dtourn

    du

    sens

    propre

    des

    langages hu-

    TOain

    non

    pas

    de

    ce

    qu ils

    disent,

    mais de

    ce

    qu ils

    Sont

    1

    t,

    -

    ont

    n

    fe n?urement

    et

    uniquement

    :

    une

    mystique

    per-

    etuelle

    qui

    remonte

    des

    choses

    Dieu.

    Ce

    sens

    intrieur

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    34/90

    dtient

    pour nous

    des

    vrits certaines,

    et

    la

    simplicite

    souveraine

    des

    choses

    de

    l'esprit

    lui

    appartient.

    Btardes

    et

    aveugles

    autant

    qu'on

    le

    voudra,

    les

    langues

    humaines

    de

    notre

    monde

    et

    de

    notre

    temps

    n'en

    portent

    pas

    moins

    la

    triple

    torche flamboyante

    de

    leur

    origine,

    puisqu'elle

    sont

    d'abord

    une

    image

    directe

    du

    Verbe crateur,

    ce

    qu'elles

    n'ont

    pas

    pouvoir

    d'oublier

    n'tant

    pas

    libres

    comme

    nous

    le

    sommes;

    et

    puisqu'elles furent ensuite

    b-

    nies)

    et

    confirmes,

    deux

    fois

    marques

    du

    sceau

    divin

    par

    la

    Parole

    vivante

    du

    Christ

    qui

    vint

    y

    prendre

    corps,

    et

    par

    la

    mission

    qu'elles

    reurent

    sous

    les

    langues

    de

    feu

    de

    porter

    cette

    Parole

    aux

    extrmits

    de

    la

    terre.

    Langues

    vivantes

    de vie,

    o

    les

    mystres

    sont

    reus

    et

    ports

    V

    vants,

    sans

    prjudice

    ni

    offense,

    et

    DOIVENT

    l'tre

    essen-

    tiellement,

    donc

    en

    image

    et

    non en

    simulacre,

    irna-

    ginerait-on

    que

    puissent

    leur

    faire dfaut

    les

    vertus

    spif

    tuelles

    qui leur

    sont

    ncessaires

    ?.

    Ah

    certes

    non,

    il

    n'est

    pas

    facile

    de

    prononcer

    qu'une

    langue,

    mme

    mo-

    derne,

    c'est--dire

    au

    plus

    bas

    des

    temps, peut

    avoir

    chang

    de

    race

    ;

    qu'elle

    chemine

    l'inverse

    de

    l'esprit

    et

    de

    son

    esprit,

    qu'elle

    tourne

    le

    dos

    l'esprance

    et

    que

    la

    vitesse

    de

    sa

    vitesse

    et

    le

    poids

    de

    sa

    pesanteur,

    n'tant

    plus

    accords

    au

    vol

    et

    l'envol

    spirituels,

    se

    prcipitent

    au

    contraire dans

    les

    contre-faons tnbreusesdel'ida-

    lisme

    pur

    ettoutes

    les

    fantomatiques

    abstractions

    de

    l'in-

    tellectualit

    dsobissante,

    que

    ne

    contrle

    et

    ne

    mesure

    aucune ralit

    d'en-haut

    ou

    d'en-bas.

    Une langue

    d'ortf-

    bre,

    laquelle des

    hordes sombres

    sont

    soumises.

    Le

    monde

    des

    ides

    est

    un

    spectre

    fatal

    qui

    s'tend

    toujours

    plus,

    courant

    par

    les

    dserts

    qui

    mnent

    au

    Dmon

    ;

    le

    monde

    de

    la

    pense

    est

    un

    jardin toujours

    plus

    simple,

    qui

    mne

    Dieu.

    C'est

    le

    jardin

    de

    notre

    naissance:

    le

    jardin

    de

    la

    pauvret.

    Nous

    le

    reconnatrions

    nous-mmeS

    dans

    les

    feuillages

    de

    la

    langue

    et

    ses

    fleurs

    les

    plus

    sim-

    ples

    si

    nous

    ne

    nous

    faisions

    pas

    toujours

    plus obstins

    ne

    regarder

    que

    les

    choses une

    fois

    tombes,

    ne

    tenir

    que

    les

    fleurs

    coupes

    et

    les

    paroles

    une

    fois

    dites,

    quand

    ce

    qui

    compte

    est

    la

    pense

    qui mne

    ces

    choses

    venir

    et

    ces

    paroles

    parler.

    -

    Car

    pourquoi

    la

    langue

    allemande,

    peu

    prs

    muette

    en

    posie

    au

    long

    des

    sicles,

    s'est-elle

    mise

    parler

    tout

    coup

    si

    fort

    et

    tuer

    tant

    de

    gens?

    Pourquoi

    pas

    de

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    35/90

    iaints

    chezelle,

    quand

    il

    y a

    pourtant

    nombre

    de

    catho-

    US

    en

    renouveau

    et

    de

    fervents

    contemplatifs? Pour-

    uoi

    Pas

    de

    mystique,

    au

    bout

    de

    tant

    de

    mysticit

    ?

    Et

    que

    dirons-nous,

    par

    exemple, de

    l'ironie romantique

    ans

    son

    vritable

    dessein

    spirituel,

    ce

    balancement du

    out

    nsJes

    contradictions

    vengeresses? Quel poids de

    ec

    e

    Iertle

    et

    d'humilit

    grave ne nous

    faudra-t-il

    pas

    econnatre

    dans

    la

    pte

    de

    cette

    langue,

    pour

    laquelle le

    itzSCeSt--dire

    l'esprit

    de

    salon

    sous

    toutes

    ses

    for-

    mes dnissables

    et

    indfinissables)

    aura

    t,

    plusieurs

    Co

    neratlons

    durant,

    considr

    par

    les meilleures ttes

    comme

    le

    ferment

    ncessaire,

    le

    feu

    sacr,

    le

    feu secret

    ?

    h'

    et

    9e

    serait-ce

    pas

    cette

    inexplicable

    absence

    d'une

    lr

    qu

    lnterne,

    naturelle

    et

    surnaturelle, dans la

    langue

    elle

    cette

    profonde

    drision

    de

    ses

    images,

    qui

    cose

    lmplacablement

    les

    philosophies allemandes

    se

    on

    6r

    touJours

    en

    systme?

    s'articuler

    au

    dehors

    -our

    faire

    masse,

    agressivement, contre l'esprance

    qu'elles

    dsavouent

    et

    qu'elles

    n'ont

    pas

    en

    elles-mmes.

    et

    T

    ..e

    demande

    une

    fois

    encore:

    la

    langue

    qu'elle

    parle

    etqui

    l'exprime

    n'est-elle

    pas

    comme

    la

    conscience

    sup-

    ieure

    dune

    nation?

    Et

    n'est-ce

    pas

    en

    remontant

    cette

    rnee

    maternelle,

    en

    appliquant

    sur

    elle

    sa

    pense,

    qu'on

    Verra

    apparatre

    les

    marques

    et

    les

    signes

    spirituels

    capa-

    ls

    de

    nous

    diriger,

    non pour

    rsoudre,

    mais

    pour

    poser

    il

    convient

    le

    problme

    cruel des

    cruauts allemandes,

    -

    dont

    l'actualit

    qui

    n'a

    fait que

    crotre

    avec

    les

    annes

    semble bien

    ne

    pas

    dpendre

    de

    telle

    ou

    telle

    circonstance

    ouomphe(laquelle

    ne

    vient

    gure

    que

    la

    confirmer aprs

    trp),

    et

    dont

    les

    causes

    ne

    paraissent

    gure,

    non

    plus,

    tre

    eXClUsivement

    entreposes

    dans

    ces

    caves

    peine

    biturralnes

    de

    l'instinct

    tout

    animal

    o

    l'on

    a

    pris

    l'ha-

    Ile

    e

    de

    vouloir

    aller

    les chercher. Il

    y

    a

    un

    problme

    liem

    individuel

    autant

    que

    national,

    qui

    met

    en

    ause^' 'ndividuel

    autant

    l'on

    veut,leSALUT;etpuis-

    profonde

    ou,

    si

    cequi

    appartient

    aux Csars,

    aucu

    bien

    que

    celui-ci

    ne

    leur appartient

    pas,

    qu'il n'est

    ou

    ement

    (

    elle

    n en

    reste

    pas

    moins

    habite

    des

    m-

    Ju:c,oses,

    et

    de

    la

    mme

    faon.

    Toujours.

    Absolument.

    la

    fin. Le

    cur

    est

    aussi

    grand,

    qui commence

    s

    i0

    FS

    Sa

    terrible

    agonie

    o le

    silence

    et

    les

    affres

    et

    les

    ffroison

    ne

    connat

    pas

    tiennent

    toute

    la

    place

    et

    font

    out

    le

    travail

    ncessaire,

    tant

    immense

    tait

    la

    vertu

    de

    ie

    dontil

    avait

    t

    dou,

    et

    qui devait

    finir;

    mais

    l iden-

    it

    nr*]fnc^e

    est

    la

    mme.

    Il n y

    a

    pas

    un

    jour

    qui

    ft

    la

    eiUg

    dans

    le

    temps prtendu

    lucide,

    et

    un

    jour

    qui ft

    le

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    50/90

    lendemain,

    dans

    l tat

    de

    folie;

    il

    n y

    a

    vritablement

    qu un

    seul

    combat dont

    nous

    croyons

    apercevoir

    les

    deux

    faces

    :

    il

    y

    a

    tous

    les

    jours d une

    seule

    et

    mme vie,

    qf1

    vont

    temporellement

    sans

    changer

    de

    sens

    de

    la

    naissance

    la

    mort.

    Mais

    sur

    l instant

    peine

    temporel

    d un

    mo-

    ment

    spirituel

    de

    cette

    vie

    qui fut

    son

    comble

    et

    sp

    couronne,

    son

    sommet

    et

    son

    signe

    la foudre

    spiri,

    tuelle

    est

    tombe.

    Noire

    ou

    blanche?

    il

    n y

    a que

    le

    signa

    taire

    qui

    l ait

    appris,

    par

    del

    l agonie,

    quand

    tout

    ce

    gOI

    devait tre

    fait fut

    consomm.

    Il

    le

    sait;

    Dieu

    le

    sait-

    Mais

    nous

    ne

    saurons

    jamais

    si

    cette

    foudre

    instantane

    a

    t, quoi

    que

    nous

    en

    pensions, l clair

    de la

    colre

    oe

    celui de

    la

    piti

    de

    Dieu.

    C est

    partir

    de

    l

    que

    nous

    voyons,

    nous,

    du

    dehors,

    -

    jusqu au

    moment

    d un

    renoncement

    qui

    fut

    peut-tre

    une

    paix

    s efforcer

    pathtiquement

    la

    raison

    d en-bas,

    livre elle

    seule,

    la

    pauvre

    et

    impuissante raison

    ht*

    maine,

    avide

    de

    ressaisir

    ce

    verbe

    qui

    passe

    toujours

    aO

    dessus

    d elle,

    identique

    lui-mme, mais

    qui

    ne

    lu

    appartient

    plus.

    Car

    le

    contact

    d en-haut

    n a jamais

    t

    interrompu

    chez

    Hlderlin

    :

    c est

    le

    contact

    d en-bas

    qui

    a

    t

    coup. Et

    c est aussi

    pourquoi

    nous

    voyons

    son

    langage,

    lentement

    dpouill, n offrir

    bientt

    plus

    qu une

    sorte

    d armature

    cruelle

    dans

    sa

    nudit,

    de

    cette

    logique

    si

    ncessaire

    et

    impossible

    c est

    par

    le

    truchement

    de

    la

    raison

    que

    se

    fait

    l incarnation

    du

    langage

    pour

    la

    pr

    sence,

    en

    nous,

    de

    son

    enseignement),

    et

    n tre

    plOS

    qu un

    squelette

    de

    pourquoi,

    c est

    pourquoi,

    parce

    que,

    donc,

    en

    effet,

    car,

    puisque,

    or,

    si, mais,

    pourtant,

    et

    tou-

    tes

    articulations

    externes

    du

    raisonnement

    qui

    s efforce,

    mais

    ne

    peut

    pas

    prendre.

    Un

    signe,

    dira-t-il

    dans

    Mnmosyne,

    et

    qui

    n a

    pas

    de

    sens,

    voil

    ce

    que

    nous

    sommes;

    et

    presque

    nous

    avons

    perdu

    notre

    langage

    l tranger.

    La

    Grce

    ne

    sera

    plus

    maintenant

    que

    dans

    sa

    mmoire

    :

    c est

    le

    pays

    d a-

    lentour,

    les

    saisons

    et

    l Esprit

    du

    Temps

    qui

    recevront,

    dans

    sa

    folie, le miracle

    du souffle

    vivifiant.

    Et

    tout

    le

    fin

    :

    Avec

    humilit

    signe-t-il,

    Scardanelli

    00

    Skardanelli

    ,

    car

    depuis

    quarante

    ans,

    il

    ne

    veut

    pitt,

    de

    son nom.

    Frdric

    Hlderlin

    est

    mort.

    Une

    sorte

    de

    vrit

    revient,

    plus

    vraie

    en

    lui

    que

    la

    sienne. Et

    qul

    sait

    ?.

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    51/90

    h

    Je

    ne

    connais

    rien,

    quant

    moi, de

    plus

    terriblement

    aaut,

    de

    plus atrocement douloureux,

    humainement

    par-

    ant)

    que

    Ces

    pomes

    du

    pote, rest

    pote,

    aussi

    gnial,

    laSSI

    Inspir,

    mais

    o

    imperceptiblement

    l esprit

    de

    la

    langue

    s carte

    de la

    chair

    du

    langage,

    et

    qu il

    ne

    peut

    plu

    incarner.

    Ce

    ne

    sont

    pas

    des

    tnbres,

    comme on

    l a

    dit

    qii

    font

    l obscurit

    des

    derniers

    pomes, mais

    la

    luIere

    trop

    crue.

    La

    part

    de

    l ombre

    s vapore.

    Aussi

    rnl ,a

    ceux

    qui

    aiment

    le

    mensonge,

    et,

    serviteurs,

    le

    au

    tipiient

    (outre

    la

    prtention

    de

    vouloir expliquer

    leftut

    par

    le

    bas,

    et

    le

    grand

    par

    le

    petit,

    sans

    analogie,

    ft-ce

    avec

    des

    prcisions

    et

    des

    exactitudes

    premptoires

    d i

    l illusion

    de croire

    que ces

    pomes

    de

    la

    folie

    oesent

    l aspect

    chevel

    et

    dcousu

    qui

    convient

    nosidesprconues.

    Les

    pomes

    vrais

    de la

    folie

    sont

    es

    i-uatralns

    d colier

    bien

    sage,

    et

    qui

    riment

    classique-

    men

    Ceux

    qu on

    nous

    a

    prsents

    comme

    tels

    sont

    des

    trae

    et des

    passages,

    saisis

    au

    vif

    de

    l esprit

    dans

    la

    tra

    empoignade,

    avec des

    trous

    que

    la

    raison,

    qui

    C eeal

    y

    revenir,

    n a,

    par

    la suite,

    jamais

    pu

    combler.

    C est

    la

    aussi

    qu il

    faut

    se

    taire.

    Les

    circonstances,

    je

    le

    rpte,

    nous

    ne

    les

    connaissons

    jamais

    ;

    et

    moins

    que

    ja-

    Mais

    Peut-tre

    lorsque

    leur

    vtement

    nous

    est

    familier.

    cher:.lS

    le

    ur

    nous

    a

    appris,

    au-dessus

    d elles,

    que

    le

    chemln

    spirituel

    que

    Hlderlin

    avait

    couru

    tait

    celui

    es

    hauteurs,

    et

    que

    trs

    purement,

    quels

    que

    fussent

    es

    yrtlges

    et

    les

    prils,

    les

    errements

    et

    les

    orages

    -,

    on

    grand

    courage

    s y

    est

    maintenu

    sans

    rechercher

    le

    a

    art

    d un

    abri.

    A

    dfaut

    d une

    autre

    humilit

    qu il

    la

    Plet-etre

    point

    connue parce

    que son

    langage

    a

    failli

    ui

    rvler,

    il

    a

    pratiqu

    celle,

    presque

    aussi

    infini-

    ment

    rare,

    de

    la

    totale

    fidlit. Ah

    certes,

    de

    cet

    humain

    ouslsrne,

    11

    a

    sans

    doute

    acquitt

    le

    terrible

    prix

    que

    0Usait

    Ene

    savons

    pas

    compter

    Mais

    Dieu

    sait

    ce

    qu il

    luiO.

    finr

    ce

    sont

    de

    pitoyables

    prires

    que

    nous

    pouvons

    aunt

    ac^mettreles

    investigations

    policires

    de

    telle

    u

    tell

    me

    tre

    les

    investigations

    po

    lCleres

    de

    telle

    tatisti

    e

    science

    qui

    chafaude

    son

    monument

    sur

    des

    ie

    d

    ques

    et

    des

    rapports

    ,

    alors

    qu il s agit

    de la

    iedeqilelquun,

    c est

    avouer

    une

    absence

    peu

    prs

    enirenSO

    de

    charit

    On devrait

    savoir

    mieux

    se

    sou-

    enir

    parfoIs,

    qu il

    ne

    nous

    est

    pas

    command

    de

    savoir,

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    52/90

    mais

    d aimer

    ;

    et

    sans

    doute

    pourrait-on,

    pour

    le

    salut

    de

    tous

    et de

    soi-mme,

    chapper

    plus

    souvent

    l atroce

    superstition

    contemporaine

    qui

    s attache

    exclusivement

    aux

    faits,

    c est--dire

    aux

    dpouilles

    et

    aux

    dchets

    de

    tout

    ce

    qui

    appartint l esprit,

    pour

    essayer

    de

    lire,

    avec

    lui,l

    travers

    les

    signes qu infatigablement

    il

    nous

    donne.

    Non;

    les

    plus proches de

    ceux

    qui

    sont

    grands

    ne

    sont

    pas

    ceux

    qui

    se

    sont

    trouvs matriellement

    approchs

    d eux

    dans

    le

    temps

    (qui

    n a rien

    voir

    l affaire)

    et

    moins

    encore

    ceux qui

    se

    sont

    arms

    d prouvettes

    et

    d ustensiles;

    mais

    bien

    ceux

    qui

    auront

    grandi

    semblablement

    dans

    la

    granJ

    deur,

    ou ceux

    qui

    se

    seront

    faits

    assez

    humbles

    de

    coeUf

    pour

    la

    deviner. Aux

    deux

    extrmits

    de

    l orgueil

    :

    les

    deux

    faces

    de

    l humilit. Et

    pour

    ceux-l,

    qu ils

    ne

    s arr-

    tent

    plus

    seulement

    aux

    choses

    et

    qu une

    admiration

    ravie

    aux

    pomes

    ne

    les

    tienne

    pas

    quittes

    Les

    grandes

    uvres

    de la

    Posie,

    ce

    sont

    les

    potes

    eux-mmes,

    ces

    pantelants.

    La vie.

    ARMEL

    GUERNE.

    L

    unique

    Q

    U Y

    a-t-il

    qui

    me

    tienne

    A la

    flicit

    ancienne

    de

    ces

    rives

    Attach

    tellement

    que

    je

    les aime

    plus

    uema patrie

    encore

    t

    Car tel

    en

    un

    cleste

    Esclavage

    vendu,

    Je

    suis

    l-bas

    o

    l Apollon

    s est

    avanc

    En

    royal

    apparatEt

    Zeus,

    auprs

    d une

    jeunesse

    immacule

    Daigna

    descendre

    et

    fit

    natre

    des

    fils,

    Gnration

    sacre,

    et

    des filles

    de

    lui

    Parmi

    les

    hommes,

    le

    Suprme.

    I.

    Extrait

    de HLDERLlN,

    traduit

    par

    Armel

    GUERNE,

    Hymnes,

    mgics

    et

    Autres

    pomes

    (Mercure

    de

    France).

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    53/90

    De

    sublimes penses

    acoup

    sont

    en

    effet

    llies

    de

    cette

    tte

    paternelle,

    Et

    des

    mes

    grandioses

    hez

    les

    hommes,

    venues

    de

    lui.

    J ai

    entendu

    parler

    D Elis

    et

    d Olympie,

    me

    suis

    Dress

    au

    sommet

    du

    Parnasse

    Et

    sur

    les

    monts

    de

    l Isthme,

    Et

    de

    l autre

    ct

    aussi

    Vers

    Smyrne

    et

    au-del

    Vers

    Ephse

    je

    suis

    all;

    Jai

    vu

    tant

    de

    beaut

    Et

    mon

    chant

    l a

    chante

    Cette

    image

    du

    dieu, vivante

    11

    milieu

    des

    humains

    ;

    pourtant

    ous,

    dieux

    antiques,

    et

    vous

    tous

    o

    vaillants

    fils

    des dieux,

    Il

    en

    est

    Un

    encor

    je

    l aime

    ntre

    vous

    tous

    que

    je cherche

    l-bas

    u

    vous

    le

    retenez,

    lui

    le

    dernier de

    votre

    race,

    ui

    le

    joyau

    de

    la maison,

    dissimul

    Devant

    moi

    l hte

    tranger.

    M

    A,

    ON

    souverai

    n

    et mon

    seigneur

    0

    toi,

    mon

    Matre

    Quoi

    donc,

    que

    tu

    sois

    demeur

    Ulstance

    ?

    Et

    l

    tandis

    que

    j allais

    j

    nterrogeant

    parmi les

    anciens,

    Les

    hros

    et

    ,

    ie

    dieux,

    pourquoi

    demeurais-tu

    DOl,

    l cart?

    Et maintenant

    comble

    De

    tristesse

    est mon me,

    omme

    si

    vous

    mettiez,

    clestes

    tout

    votre

    zle

    mme

    Pour

    que,

    vouant

    mon

    culte

    l un,

    Me

    fasse

    dfaut

    l autre.

    Le

    le

    sais

    nanmoins,

    c est

    par

    ma

    seule

    ute.

    Car

    je

    le

    suis

    bien

    trop,

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    54/90

    0

    Christ

    attach,

    suspendu

    toi

    Frre

    pourtant

    de

    l Hracls.

    Et

    intrpidement j avoue,

    tu

    es

    Le

    frre

    aussi

    de

    l

    vos,

    celui

    Qui

    attela

    les

    tigres

    son

    char

    Et

    s en

    fut,

    descendant

    Jusqu l Indus

    Ordonnant

    au

    culte

    joyeux

    En

    propageant

    la

    vigne

    Et

    domptant,

    des

    peuples,

    la

    fureur.

    Une

    pudeur

    toutefois

    me

    retient2

    De

    comparer

    toi

    Ces

    hommes

    qui

    sont

    de

    ce

    monde.

    Assurment

    Je sais, celui

    qui

    t engendra,

    ton

    Pre,

    Ce mme

    qui.

    c

    AR

    jamais

    il

    ne

    rgne

    seul.

    Et

    il

    ne

    sait

    pas

    tout.

    Toujours

    se

    lve

    Un

    quelque

    chose

    entre

    les

    hommes

    et

    lui.

    Et c est

    par

    des degrs

    qu il

    descend

    Le

    Cleste

    ici-bas.

    C est

    l Un

    cependant

    qu est

    attach

    L amour.

    Cette

    fois-ci

    le

    Chant

    Du

    profond

    de

    mon

    cur

    Ne

    m est

    que

    trop

    venu,

    Mais

    je la

    veux

    tourner

    En bien,

    ma

    faute, aussitt

    le

    prochain,

    Quand

    encor

    j en

    chanterai

    d autres.

    La

    mesure

    jamais,

    comme

    je

    le voudrais,

    Je

    n y

    atteins.

    Un dieu

    pourtant

    le

    sait

    Quand viendra,

    ce

    que

    tant

    je

    voudrais,

    le

    meilleur.

    Car

    tel le

    Matre fut,

    Cheminant

    sur

    la

    terre,

    2.

    Es hindert aber

    eine

    Scham

    Mich., dit

    le

    texte

    :

    honte

    et

    pudeur

    la fois,

    o

    la

    honte

    gnra-

    lement

    prdomine,

    tant

    plus

    matrielle,

    et

    plus

    spirituelle la pudeur-

    (N.d.T.)

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    55/90

    Un

    aigle

    prisonnier

    s:

    Et

    beaucoup

    qui

    le

    virent

    py

    sont

    pouvants

    Larce

    que

    de

    tout

    son

    pouvoir ultimement

    Le

    Pre

    et

    du

    meilleur

    de

    soi

    n

    gir

    rel

    au

    milieu

    des

    humains;

    Ut

    c

    tait

    pour

    le

    Fils

    n

    grand

    tourment

    aussi

    jusqu

    ce

    moment

    que

    rs

    le

    ciel

    il

    s en

    fut

    emport

    dans

    les

    airs;

    -

    risonniere

    de

    mme

    est

    l me

    des

    hros.

    es

    potes

    il

    leur

    faut

    aussi

    Ces

    hommes

    de

    l esprit

    tre

    des

    hommes

    de

    la

    terre.

    1802.

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    56/90

    NOTES

    SUR

    LA

    RELIGION

    DE

    NOVALIS

    I

    Tous

    nos

    penchants

    paraissent

    n tre

    autre

    chose

    que

    religion

    applique. Le

    cur

    semble

    tre

    en

    quel-

    que

    sorte

    l organe

    religieux.

    Peut-tre

    le

    produit

    le

    plus

    lev

    du cur

    productif

    est-il

    tout

    simplement

    le

    ciel. Lorsque

    le

    cur,

    dtourn

    de

    tout

    objet

    re

    et

    particulier,

    n a

    plus

    quelesentiment

    de

    lui-mme

    et

    se

    devient

    soi-mmeun

    objetidal,

    cet

    instant-

    l

    nat

    la

    Religion.

    Tous

    les

    penchants

    particuliers

    s

    fondent

    en

    un

    seul,

    dont

    l objet

    admirable

    est

    un

    Etre

    suprieur,

    une

    Divinit;

    c est

    pourquoi

    la

    crainte

    sincre

    de

    Dieu

    englobe

    toutes

    les

    sensations

    et

    touS

    les

    penchants.

    Ce Dieu

    naturel

    nous

    mange,

    nous

    enfante, nous parle,

    nous

    duque, nous

    possde

    amou-

    reusement,

    se

    laisse

    consommer,

    engendrer

    et

    enfan-

    ter

    par

    nous;

    en un

    mot,

    il

    est

    la

    matireinfinie

    de

    notre

    activit

    et

    de

    notre

    souffrance. Si

    nous

    faisons

    de

    notre

    bien-aime

    un

    Dieu

    de

    cette

    sorte,

    nous

    ob

    |

    tenons

    de la

    religion applique.

    1

    c

    IE

    fragment

    de

    Novalis,

    que

    la

    traduction

    franaise

    est

    bien

    impuissante

    rendre

    dans

    sa

    densit

    charnelle,

    ,

    - -

    --

    -

    -

    t

    nous

    mne droit

    au

    centre

    du

    difficile problme pos pOl,

    l une

    des

    expriences

    religieuses

    les

    plus

    singulires

    qtl

    soient. cartons

    d emble

    les

    analogies textuelles

    qui

    pourraient

    crer

    une

    confusion

    entre

    cette

    exprience

    e

    celles qui

    dfinissent

    les

    paroles

    de

    saint

    Augustin

    iftW

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    57/90

    r

    intimo

    meo)

    ou

    de

    Pascal (Dieu sensible

    au

    cur)

    1.

    Ch

    2

    Pascal

    comme

    chez saint Augustin, il

    s agit

    d un

    uble

    personnel,

    connu

    d abord

    dans

    sa

    transcendance

    S

    50

    ue,

    et

    qui

    par

    sa

    grce

    se

    rend

    sensible

    une per-

    s06

    dontil

    devient

    le

    cur

    du

    cur.

    La relation s ta-

    blit

    Parce

    que

    Dieu

    la

    veut

    et

    la choisit,

    entre

    Sa

    per-

    vonne

    et

    la

    personne

    de la

    crature.

    Chez Novalis, il

    n en

    va

    auPUnement

    de

    mme:

    on

    forcerait

    peine le

    sens

    OIral,

    du

    texte

    en

    disant qu il

    ne

    tmoigne

    que

    d une

    note,

    celle de la

    crature,

    et

    d un

    mouvement,

    lequel

    non

    Seulement

    va

    de

    l homme

    vers

    Dieu, mais mieux

    enre

    fait

    exister

    le

    ciel

    ,

    la

    religion

    ,

    et

    enfin

    rn

    une

    Il

    divinit,

    un

    Dieu

    naturel

    .

    Jamais les langages

    astiques

    les

    plus

    ambigus

    (Matre Eckart,

    par

    exemple)

    n ont

    aussi

    radicalement

    invers

    le

    rapport

    entre

    Dieu

    et

    a

    ,

    ature.

    Jamais

    non

    plus

    on

    n est

    all

    aussi loin

    dans

    nerltlation

    du

    sentiment religieux

    puisque, ici, Novalis,

    Dgrelarserve

    du vocabulaire, prsente

    l union

    de

    leu

    a

    1

    me

    comme

    une

    treinte

    amoureuse

    suivie

    de

    Ccndit

    double,

    l me

    engendrant

    Dieu qui

    l engendre.

    Cette

    tendance

    confondre l amour

    des

    corps

    et

    l amour

    clivivi11

    est

    constante

    chez Novalis, qui

    put

    y

    tre amen

    a

    fls

    Par

    la

    tradition

    pitiste

    et

    par

    le

    gnie

    propre

    de

    la

    -

    pitiste

    et

    par

    le

    gnie

    propre

    de

    a

    langue

    allemande.

    Mais

    un

    autre

    caractre

    de

    son

    exp-

    vOlnce

    Particulire

    apparat

    dans

    ces

    lignes

    :

    le caractre

    voloaire>

    actif,

    de

    l acte

    religieux

    tel

    qu il

    le

    conoit.

    est

    Par

    l

    qu il

    chappe aux

    influences

    de

    son

    duca-

    tion

    -

    qui

    l et

    naturellement

    inclin

    une

    attitude

    e

    passIvit

    spirituelle

    et

    d motion religieuse

    subie plus

    que

    voulue.

    Par

    l

    aussi

    qu il

    se

    distingue

    de

    tout

    le

    cou-

    ant

    rornantique

    et

    laisse

    entrevoir

    une

    orientation

    propre,

    ernependante

    de

    tout contexte

    d poque,

    explicable

    seu-

    ement

    par

    un

    vcu

    Il

    immdiat

    ou,

    comme

    disent

    les

    S)

    genuine.

    Cette

    originalit apparatra

    claire-

    ment

    SI

    la

    dfinition

    de

    la

    posie

    que

    donnait

    Jean-

    e

    u

    :

    Le

    vritable

    pote

    n est

    que

    l auditeur,

    non pas

    e

    rnaltre

    de

    ses

    personnages

    ,

    nous

    confrontons les d-

    1.

    Cerapproc

    h

    ement

    a

    t fait

    et

    analys

    magistralement

    par

    Char

    l

    es

    u

    Bos

    ra

    ^rOC^Cmenta

    f*1 *-e*

    magistralement

    par

    Charles

    s

    L

    (,(

    Fragments

    sur

    Novalis

    ,

    in

    Le

    Romantisme

    allemand,

    umro

    l

    t es

    Cahiers

    du Sud,

    1937

    et

    1949.

    Sur

    l ensemble

    de la

    ense;

    emeilleur

    essai

    est

    celui de

    Maurice BESSET

    :

    Novalis

    et

    la

    ~ee

    que

    (Aubier,

    1947).

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    58/90

    clarations

    de

    Novalis

    :

    Tous

    les

    hasards

    de

    notre

    vie

    sont

    des

    matriaux dont

    nous

    pouvons

    faire

    ce que

    nous

    vo

    Ions.

    Ou,

    mieux

    encore

    :

    Le

    monde

    doit tre

    tel

    que

    1e:

    le

    veux.

    Le

    monde

    a une

    capacit

    originelle

    d tre

    anime

    par

    moi,

    de

    se

    conformer

    ma

    volont.

    Ordonnateur

    souverain

    de

    sa

    propre

    vie,

    crateur

    absolu

    de

    son

    univers,

    gnrateur

    de

    Dieu

    lui-mme

    l homme,

    ou

    du

    moins

    le

    pote

    et,

    pour

    Novalis,

    i

    n est

    d homme

    accompli

    que

    le

    pote

    dispose

    d un

    pouvoir rellement illimit.

    Sans

    doute

    est-ce

    l

    une

    for

    mule

    extrme d idalisme,

    qui

    n est

    pas

    sans

    chos

    dans

    la

    philosophie

    contemporaine;

    mais

    en y

    annexant

    l objet

    mme

    de

    la

    religion,

    Novalis

    en

    modifie

    la

    porte.

    Beau-

    coup

    plus

    que

    mystique,

    son

    comportement

    spontan

    est

    de

    nature

    magique,

    et

    c est d ailleurs

    ce

    terme

    qu allait

    sa

    prfrence.

    Mais

    il

    importe

    de

    bien

    comprendre

    par

    quelles

    voies il

    a

    pris

    conscience

    de

    sa

    propre

    ambition

    intellectuelle

    et

    spirituelle.

    Ces

    voies

    sont

    doubles

    et

    convergentes

    :

    d une

    part,

    les

    vnements

    de

    sa

    vie per-

    sonnelle,

    et

    les

    surprenantes

    leons

    qu il

    crut

    pouvoir

    en

    tirer;

    d autre

    part,

    le

    non

    moins trange

    encyclopdisme

    auquel

    le

    mena

    le

    dveloppement

    d une

    intelligence

    cu-

    rieuse de

    toutes

    les

    saisies possibles

    du

    rel.

    On

    a

    peine

    imaginer

    Novalis

    autrement

    que sous

    les

    traits

    du

    jeune

    malade

    romantique

    aux

    longues

    boucles,

    aux

    yeux

    de

    rve,

    dont

    on

    nous

    a

    conserv

    l effigie.

    A

    partir

    de

    cette

    image

    de

    convention,

    on

    se

    reprsente

    comme un

    roman

    quelque

    peu

    mivre

    l histoire,

    pourtant

    dpourvue

    de

    toute

    navet,

    de

    ses

    amours

    avec

    Sophie

    von

    Khn.

    Parce

    que

    cette

    jeune

    fille,

    dont

    nous

    pouvons

    lire

    les

    lettres

    sans

    orthographe

    ni

    intelligence, tait

    vrai

    -

    semblablement

    une

    petite

    oie

    blanche,

    les

    biographes

    ont

    donn

    les

    couleurs

    de

    la

    plus plate

    idylle

    l histoire

    de

    leurs

    fianailles

    brutalement

    interrompue

    par

    la

    mort

    de

    Sophie. En

    ralit,

    celle-ci

    compte

    trs

    peu

    dans

    l aven-

    ture;

    et-elle

    vcu

    seulement

    quelques

    mois

    de

    plus,

    il

    est

    probable

    que

    le

    pote

    se

    ft

    dtach

    d elle,

    du

    comme

    il

    commenait

    l tre

    et

    constern

    par

    la

    sentimentalit

    btifiante

    de

    sa

    fiance.

    Mais

    qui

    sait

    s il

    n et

    pas,

    au

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    59/90

    Contraire,per

    sist

    a difier

    autour

    du

    personnage

    rel

    ce

    yt] 6

    dont

    la

    mort

    de

    Sophie

    prcipita le foisonnement

    ?

    lors

    qu'elle

    vivait

    encore,

    il

    avait

    dj

    substitu

    la

    prara

    le

    ralit

    une

    invention

    de

    son

    esprit,

    mettant

    en

    Urlque,

    avant

    de

    le

    prononcer,

    le

    prcepte

    de la

    transfi-

    d'uatlon

    volontaire

    de

    l'existence

    vcue. Malade, pris

    dese

    enfnt

    malade,

    il

    assuma

    moins la

    tragdie

    de

    son

    e

    t-

    qu'il

    n'imagina,

    ds

    les

    premiers

    symptmes

    alar-

    mant

    une

    victoire

    de

    l'esprit

    sur

    la

    banalit

    du

    deuil.

    n

    (

    Irait

    que

    la

    nature,

    en

    lui,

    ne

    cherche pas

    se

    dfen-

    dre

    de

    la

    mortelle

    menace;

    d'emble,

    il bauche

    un

    geste

    e

    ransposltion

    qui te

    l'vnement

    imminent

    sa

    vi

    ru-en

    Ce

    et

    en

    fait

    le

    tremplin

    d'un

    essor

    lyrique.

    Sophie

    est

    reante,

    lorsque

    dj

    il

    crit

    que

    la cendre des

    roses

    terres-

    res

    est

    la

    terre

    natale

    des

    roses

    clestes

    et,

    se

    dtournant

    tir

    etre

    qu'il

    va

    perdre,

    conoit l'avantage spirituel

    qu'il

    e

    1'e*treQu'il

    va

    perdre,conoitl'avantage

    spirituel

    qu'il

    tjreracette

    sparation

    :

    Mon imagination

    sera assez

    ee

    Pour

    nie

    hausser jusqu'aux

    rgions

    o je

    retrouverai

    Ce

    je

    Perds ici.

    Il

    faut

    avouer

    que

    cette

    transfiguration

    profclpee

    de

    la

    souffrance

    laisse quelques

    doutes

    sur

    la

    profondeur

    de

    la

    blessure.

    ur

    de

    la

    blessure.

    Sophie

    morte,

    il

    ne

    s'attarde

    pas

    la

    pleurer.

    Le

    joUn

    i.

    ntime

    qu'il

    rdige

    durant les

    semaines

    suivantes

    a

    bien

    pour

    centre

    un

    lieu

    sacr:

    la tombe de Sophie.

    OlS

    ce

    n'est

    gure d'elle

    qu'il

    s'agit, c'est d'un

    effort

    vointaire,

    qui

    prend

    d'abord

    la

    forme d'une

    dcision

    de

    rulnr

    Pour

    changer

    trs

    vite

    de

    nature

    :

    l'objet

    de

    la

    rs

    Ut)n

    disparat

    bientt,

    et

    seul

    compte

    le

    geste,

    la

    Vol

    nte

    nue

    et

    comme

    sans

    objet

    ou

    prte

    assumer

    n'im-

    cette

    quelle

    fin.

    Quelques

    jours

    aprs

    son

    deuil,

    il

    a

    dj

    cett^rase

    rvlatrice,

    en

    rponse

    l'aveu qu'il

    vient

    de

    faire

    de

    son

    regret:

    Mais je

    saisqu'il

    est

    en

    l'homme

    Uneforce

    qui

    entoure de

    soins

    attentifs,

    peut

    s'panouir

    en

    Une

    trange

    nergie. Qui

    ne

    sentirait l

    autre

    chose

    qUe

    la

    lutte

    avec une

    souffrance

    profonde

    :

    la

    jouissance

    Tn

    Pouvoir

    dont

    la

    souffrance

    va

    rvler

    l'tendue?

    ici

    r

    OIS

    semaines

    plus

    tard,

    alors

    qu'il

    n'espre

    plus

    re-

    oit

    r

    Sophie

    dans

    l'au-del

    par

    un

    simple

    effet

    de

    sa

    fante

    de

    mourir,

    il

    crira

    encore

    :

    Je

    me

    sens

    si libre,

    si

    ()et**-

    le

    vois

    dj clairement

    que

    sa

    mort

    a

    t

    un

    hasard

    divV1

    -

    la

    cl

    de

    toutes

    choses

    une

    tape

    miraculeuse

    p.

    i

    tenvenue.

    N'exagrons rien

    :

    cette

    exaltation

    du

  • 7/26/2019 La Vie Spirituelle - La Religiosit Allemande

    60/90

    vouloir

    ne

    va

    ni

    sans

    rechutes

    dans

    l abattement

    ni

    sans

    mouvements

    contraires

    vers

    une

    acceptation

    passive.

    Tantt

    il

    note

    des

    clairs

    d enthousiasme

    o la

    muIt

    plicit des

    instants

    temporels

    se

    fond

    dans

    une

    conscience

    globale

    et

    comme

    transcendante

    ce

    sont

    les

    moments

    de

    divinisation

    tantt

    au

    contraire

    il

    se

    sent

    irrpa-

    rablement

    prisonnier

    du

    monde

    multiple

    et

    lourd.

    Mais,

    quelles

    que

    soient

    les

    tapes

    de

    cette

    ascse

    sans

    rgle,

    tI

    en

    revient

    toujours

    choisir celles qui

    tmoignent

    d un

    pouvoir

    exerc.

    Tel

    est

    le

    sens,

    souvent

    mal

    compris

    par

    les

    commentateurs,

    de

    ce

    suicide

    auquel

    il croit

    pou-

    voir

    se

    contraindre. Ce

    n est

    pas

    dans le

    Journal,

    mais

    dans des

    notes

    un peu

    postrieures,

    qu il

    en

    dgager

    lui-mme

    l intention

    secrte:

    Le vritable

    acte

    philosophique

    est

    le

    suicide

    ;

    tel

    est

    le

    commencement

    de

    toute

    philosophie,

    le

    but de

    toutes

    les

    aspirations

    du

    disciple

    en

    philosophie,

    cet

    acte

    seul

    rpond

    toutes

    les

    conditions

    et

    tous

    les

    caractres

    de

    l action transcendante.

    J ai

    pour

    Sophie de

    la

    religion

    -

    non

    pas

    de

    l amour.

    Un

    amour

    absolu, indpendant du

    cur,

    fond

    sur

    111

    foi,

    est

    religion,

    L amour

    peut,

    par

    la

    volont absolue,

    se

    muer en

    rell

    gion.

    L troite

    union

    des deux

    mots

    volont

    et

    religion

    dsigne

    assez

    clairement l itinraire

    suivi

    par

    Novalis-

    Ce

    que

    ds

    lors il

    va

    sans cesse nommer

    religion,

    c est

    la

    vie

    mtamorphose

    selon

    un

    plan

    systmatique

    de

    transfiguration

    et

    par

    un

    acte

    de

    volont,

    La

    magie

    de

    Novalis,

    ce

    pouvoir volontaire

    de

    transfiguration

    du

    rel,

    n est

    pas

    seulement

    tire

    de

    5011

    exprience

    personnelle,

    survenue

    du

    fond

    de

    lui-mme

    pour

    apporter

    une

    issue

    une

    situation

    dramatique.

    Le

    jeune

    savant

    tait

    parvenu

    cette

    ambitieuse

    attitude

    spirituelle

    par

    d autres

    voies,

    livresques

    celles-ci,

    Il

    n y

    a

    pas

    de magie

    dans

    un

    univers discontinu,