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Biotope poursuit son développement, grâce au soutien de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie et aux côtés de nombreux autres partenaires. Les protocoles de suivi par radar s’appuient également sur les expériences américaines, canadiennes, suisses, danoises, allemandes et anglaises. Plusieurs équipes utilisent en effet le radar pour suivre la migra- tion. Biotope a opté pour l’adaptation d’un radar de marine offrant à la fois un coût réduit ainsi qu’une maniabilité et une maintenance facilitées. * Nom donné à l'unité mobile de suivi des déplace- ments d'oiseaux Le radar constitue donc une source d'information de première importance pour les projets de parcs éoliens avec de forts enjeux pour l'avifaune. Avec près de 3 millions d’échos radar sur plus de 60 sites en France, la connaissance encore très lacunaire sur les flux migratoires des oiseaux se précise. Ainsi l’analyse des données, permet de comparer quantitativement migration de nuit et migration de jour. Les résultats montrent notamment que : - le flux nocturne représente jusqu’à 70% de l’activité migratoire (carte 1) ; - l’altitude de vol des nocturnes se situe généralement dans une fourchette variant de 200 à 700 mètres en moyenne, ce qui les place bien au-dessus des éoliennes et qui permet de relativiser l’évaluation des risques de collision. Cependant, le radar permet d’étudier les conditions topographiques et météorologiques qui font que certaines nuits les migrateurs passent en dessous du seuil des 150 mètres (graph 1) ; - l’intensité de la migration se situe sur des créneaux horaires assez bien déterminés avec deux périodes creuses entre 4h-8h le matin et entre 14h et 17h l’après-midi (graph 2) ; - la capacité de détection du radar est supérieure de 5 à 10 fois aux observations visuelles de jour. La localisation du radar nécessite la réalisation : - de la carte du relief à partir du MNT en prévision du repérage terrain ; - d’un repérage sur le terrain des secteurs les plus favorables à l’installation du radar ; - la carte de l’occupation du sol afin de déterminer les obstacles visuels supplémentaires au relief pouvant conditionner la détection. Ces étapes permettent de connaître précisément : - les masques de détection (= zones de non-détection car masquées par un obstacle visuel dans le champ du radar) ; - les volumes de détection (= volume d’espace aérien au sein duquel le radar peut récolter des données) ; - les altitudes hors champ de détection (= carte des secteurs en dessous de l’altitude desquelles le radar ne peut pas récolter de données – vallée en arrière d’un relief par ex.). Volume et limite de la hauteur de détection Carte d’explication du positionnement de l’équipement radar Présentation des trajectoires des oiseaux détectées par radar Carte 1 : comparaison des flux de jour et de nuit Migration Trafic Rate (taux de flux migratoire) Graph 2 : modélisation du flux migratoire sur 24 heures Graph 1 : répartition altitudinale des oiseaux en vol Concilier développement des énergies renouvelables et préservation de la biodiversité L'aménagement d'éoliennes de grande taille peut se révéler probléma- tique pour les chauves-souris et les oiseaux. Pour l'avifaune, l'appari- tion dans le paysage de structures verticales de grande hauteur est un élément perturbateur tant en vol qu'au sol. Pour les chauves-souris, Biotope développe le dispositif Chirotech© La mise au point de nouveaux outils permettant de mieux comprendre le phénomène migratoire à grande échelle et de le décrire avec précision sur la zone d’étude est donc nécessaire. Le défi est également de s’affranchir des principales contraintes des ornithologues que sont les conditions d’observation et de visibilité. L’adaptation et la mise au point de radars initialement destinés aux bateaux de pêche, permet aujourd’hui d’observer les déplacements des oiseaux la nuit, par mauvais temps et bien au-delà de la portée de l’œil humain. Plusieurs protocoles de suivi des déplacements d'oiseaux par radar ont ainsi été mis en place et sont utilisés pour de nombreux projets éoliens sur terre et en mer. Couplée à de l’observation ornithologique classique, cette technique objective permet d’ores et déjà de mieux comprendre les phénomènes de migration et les modes d’utilisation de l’espace par les oiseaux dans le temps. Jusqu’à présent, on procédait pour l’avifaune, à des protocoles d’inventaires et de suivi des nicheurs et hivernants ainsi que des principaux axes de déplacements des oiseaux migrateurs. Si des observations détaillées et étalées dans le temps permettent de connaître assez précisément les populations nichant sur place, l’étude visuelle des axes de déplacements se révèle plus délicate et donc moins précise. De plus, la migration nocturne, bien plus importante que les mouvements diurnes, est indécelable par les méthodes classiques d’étude. L’histoire d’Aviscan, le radar dédié aux suivis ornithologiques Le développement d’Aviscan* a commencé en 2002 avec le GREET Ingénierie. Projets éoliens terrestres : optimiser le positionnement du radar ! Afin de couvrir de manière optimale la zone d’implantation des éoliennes, la position du radar est déportée d’une distance d’environ 500 à 600 mètres. Cependant, le positionnement précis du radar sur le site d’étude doit être optimisé de façon à limiter les zones d’ombre et les effets de sol qui provoquent des échos parasites. L’utilisation de l’énergie éolienne offshore reste encore anecdotique (1 GW de capacité installée en offshore contre 70 GW en onshore), cependant, de nombreux projets voient actuellement le jour en France. L’Allemagne compte également installer environ 25 GW à proximité de ses côtes d’ici 2030 afin de couvrir 15% de sa consommation annuelle d’électricité. Projets éoliens offshore : 3 méthodes d’inventaires et de suivi en avion, en bateau et … par radar Pour évaluer l’impact d’un projet offshore sur les populations d’oiseaux nous couplons trois méthodes d’inventaires et de suivi par bateau, par avion et par radar. Avantages et inconvénients des trois volets du protocole : Avantages Inconvénients Suivi par bateau Détermination spécifique Pas d’estimation des hauteurs de vol Détection des zones de stationnement Pas de suivi des déplacements nocturnes Suivi par avion Détermination spécifique Pas d’estimation des hauteurs de vol Détection des zones de stationnement Pas de suivi des déplacements nocturnes Large zone d’étude parcourue rapidement Possibilité de sorties par mer agitée Suivi par radar Suivi des déplacements diurnes et nocturnes Pas de détermination spécifique des déplacements lointains Détermination spécifique des déplacements (> 2 MN, selon les conditions d’observations) côtiers de jour (obs. visuelles) Les zones de stationnements (oiseaux posés ou au ras de l’eau) Détection possible des mouvements sur un large périmètre sont difficilement identifiées Des résultats exploitables à différentes échelles À une large échelle, le radar permet d'aborder les grands axes de migration, l'intensité migratoire ainsi que les vitesses de vol. À une échelle moyenne, il est possible de mettre en évidence le fonctionnement écologique du secteur d'étude (zones de repos ou d'alimentation, mouvements locaux…). Enfin, à une échelle très fine, le radar permet de cartographier très précisément les axes empruntés par les oiseaux, les hauteurs de vol au-dessus du projet éolien et les angles de décollage / atterrissage des oiseaux. Nos efforts portent donc sur l’amélioration : - du logiciel Aviscope© permettant l’automatisation des balayages dans les plans horizontaux et verticaux et la collecte des échos ; - des signatures des trajectoires (modélisation) ; - des protocoles d’identification des oiseaux via l’étude de la fréquence des battements d’ailes. Au-delà, les améliorations technologiques visent aussi à augmenter la portée du radar et à rendre les unités toujours plus mobiles et plus sécurisés pour s’affranchir des contraintes d’accessibilité des sites à étudier (commande à distance). Les perspectives à plus long terme sont de développer de radars destinés à la compréhension des déplacements d'autres groupes faunistiques tels que les grands mammifères et les insectes. Leurs modes de déplacement terrestres soulèvent d'autres défis pour nos équipes. Perspectives d’évolution des radars développés par Biotope L’absence d’automatisation, les possibilités réduites d’identification des oiseaux et la projec- tion des positions en deux dimensions sont autant de limites que nous souhaitons lever au travers des travaux conduits par notre service Recherche & Innovation. L’évaluation objective des impacts du projet est alors rendue possible par l’analyse combinée des résultats des 3 suivis. Auteurs : A. Govaere*, A.L. Ughetto*, H. Lagrange*, C. Poinsot*, C. Elleboode*, S. Devos*, A. Thonnel*/ *Biotope www.biotope.fr - Pôle Recherches et Innovation, 22 bd Maréchal Foch, 34140 Mèze - France. [email protected] Un outil innovant et indispensable, développé par Biotope Le radar, un outil pour renforcer l’expertise sur l’avifaune dans les études environnementales d’implantation des éoliennes recherche et innovation Nouvelles technologies

Le radar, - sifee.org · Biotope poursuit son développement, grâce au soutien de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie et aux côtés de nombreux autres

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Page 1: Le radar, - sifee.org · Biotope poursuit son développement, grâce au soutien de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie et aux côtés de nombreux autres

Biotope poursuit son développement, grâce au soutien de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie et aux côtés de nombreux autres partenaires. Les protocoles de suivi par radar s’appuient également sur les expériences américaines, canadiennes, suisses, danoises, allemandes et anglaises. Plusieurs équipes utilisent en effet le radar pour suivre la migra-tion. Biotope a opté pour l’adaptation d’un radar de marine offrant à la fois un coût réduit ainsi qu’une maniabilité et une maintenance facilitées.

* Nom donné à l'unité mobile de suivi des déplace-ments d'oiseaux

Le radar constitue donc une source d'information de première importance pour les projets de parcs éoliens avec de forts enjeux pour l'avifaune.Avec près de 3 millions d’échos radar sur plus de 60 sites en France, la connaissance encore très lacunaire sur les flux migratoires des oiseaux se précise. Ainsi l’analyse des données, permet de comparer quantitativement migration de nuit et migration de jour. Les résultats montrent notamment que : - le flux nocturne représente jusqu’à 70% de l’activité migratoire (carte 1) ;- l’altitude de vol des nocturnes se situe généralement dans une fourchette variant de 200 à 700 mètres en moyenne, ce qui les place bien au-dessus des éoliennes et qui permet de relativiser l’évaluation des risques de collision. Cependant, le radar permet d’étudier les conditions topographiques et météorologiques qui font que certaines nuits les migrateurs passent en dessous du seuil des 150 mètres (graph 1) ;- l’intensité de la migration se situe sur des créneaux horaires assez bien déterminés avec deux périodes creuses entre 4h-8h le matin et entre 14h et 17h l’après-midi (graph 2) ;- la capacité de détection du radar est supérieure de 5 à 10 fois aux observations visuelles de jour.

La localisation du radar nécessite la réalisation : - de la carte du relief à partir du MNT en prévision du repérage terrain ;- d’un repérage sur le terrain des secteurs les plus favorables à l’installation du radar ; - la carte de l’occupation du sol afin de déterminer les obstacles visuels supplémentaires au relief pouvant conditionner la détection.

Ces étapes permettent de connaître précisément : - les masques de détection (= zones de non-détection car masquées par un obstacle visuel dans le champ du radar) ; - les volumes de détection (= volume d’espace aérien au sein duquel le radar peut récolter des données) ; - les altitudes hors champ de détection (= carte des secteurs en dessous de l’altitude desquelles le radar ne peut pas récolter de données – vallée en arrière d’un relief par ex.).

Volume et limite de la hauteur de détection

Carte d’explication du positionnement de l’équipement radar

Présentation des trajectoires des oiseaux détectées par radar

Carte 1 : comparaison des flux de jour et de nuitMigration Trafic Rate (taux de flux migratoire)

Graph 2 : modélisation du flux migratoire sur 24 heuresGraph 1 : répartition altitudinale des oiseaux en vol

Concilier développement des énergies renouvelables et préservation de la biodiversité L'aménagement d'éoliennes de grande taille peut se révéler probléma-

tique pour les chauves-souris et les oiseaux. Pour l'avifaune, l'appari-tion dans le paysage de structures verticales de grande hauteur est un élément perturbateur tant en vol qu'au sol. Pour les chauves-souris, Biotope développe le dispositif Chirotech©

La mise au point de nouveaux outils permettant de mieux comprendre le phénomène migratoire à grande échelle et de le décrire avec précision sur la zone d’étude est donc nécessaire. Le défi est également de s’affranchir des principales contraintes des ornithologues que sont les conditions d’observation et de visibilité. L’adaptation et la mise au point de radars initialement destinés aux bateaux de pêche, permet aujourd’hui d’observer les déplacements des oiseaux la nuit, par mauvais temps et bien au-delà de la portée de l’œil humain. Plusieurs protocoles de suivi des déplacements d'oiseaux par radar ont ainsi été mis en place et sont utilisés pour de nombreux projets éoliens sur terre et en mer. Couplée à de l’observation ornithologique classique, cette technique objective permet d’ores et déjà de mieux comprendre les phénomènes de migration et les modes d’utilisation de l’espace par les oiseaux dans le temps.

Jusqu’à présent, on procédait pour l’avifaune, à des protocoles d’inventaires et de suivi des nicheurs et hivernants ainsi que des principaux axes de déplacements des oiseaux migrateurs. Si des observations détaillées et étalées dans le temps permettent de connaître assez précisément les populations nichant sur place, l’étude visuelle des axes de déplacements se révèle plus délicate et donc moins précise. De plus, la migration nocturne, bien plus importante que les mouvements diurnes, est indécelable par les méthodes classiques d’étude.

L’histoire d’Aviscan, le radar dédié aux suivis ornithologiquesLe développement d’Aviscan* a commencé en 2002 avec le GREET Ingénierie.

Projets éoliens terrestres : optimiser le positionnement du radar !

Afin de couvrir de manière optimale la zone d’implantation des éoliennes, la position du radar est déportée d’une distance d’environ 500 à 600 mètres. Cependant, le positionnement précis du radar sur le site d’étude doit être optimisé de façon à limiter les zones d’ombre et les effets de sol qui provoquent des échos parasites.

L’utilisation de l’énergie éolienne offshore reste encore anecdotique (1 GW de capacité installée en offshore contre 70 GW en onshore), cependant, de nombreux projets voient actuellement le jour en France. L’Allemagne compte également installer environ 25 GW à proximité de ses côtes d’ici 2030 afin de couvrir 15% de sa consommation annuelle d’électricité.

Projets éoliens offshore : 3 méthodes d’inventaires

et de suivi en avion, en bateau et … par radar

Pour évaluer l’impact d’un projet offshore sur les populations d’oiseaux nous couplons trois méthodes d’inventaires et de suivi par bateau, par avion et par radar. Avantages et inconvénients des trois volets du protocole :

Avantages InconvénientsSuivi par bateau Détermination spécifique Pas d’estimation des hauteurs de vol Détection des zones de stationnement Pas de suivi des déplacements nocturnesSuivi par avion Détermination spécifique Pas d’estimation des hauteurs de vol Détection des zones de stationnement Pas de suivi des déplacements nocturnes Large zone d’étude parcourue rapidement Possibilité de sorties par mer agitéeSuivi par radar Suivi des déplacements diurnes et nocturnes Pas de détermination spécifique des déplacements lointains Détermination spécifique des déplacements (> 2 MN, selon les conditions d’observations) côtiers de jour (obs. visuelles) Les zones de stationnements (oiseaux posés ou au ras de l’eau) Détection possible des mouvements sur un large périmètre sont difficilement identifiées

Des résultats exploitables à différentes échelles À une large échelle, le radar permet d'aborder les grands

axes de migration, l'intensité migratoire ainsi que les vitesses de vol. À une échelle moyenne, il est possible de mettre en évidence le fonctionnement écologique du secteur d'étude (zones de repos ou d'alimentation, mouvements locaux…).Enfin, à une échelle très fine, le radar permet de cartographier très précisément les axes empruntés par les oiseaux, les hauteurs de vol au-dessus du projet éolien et les angles de décollage / atterrissage des oiseaux.

Nos efforts portent donc sur l’amélioration : - du logiciel Aviscope© permettant l’automatisation des balayages dans les plans horizontaux et verticaux et la collecte des échos ;- des signatures des trajectoires (modélisation) ;- des protocoles d’identification des oiseaux via l’étude de la fréquence des battements d’ailes.

Au-delà, les améliorations technologiques visent aussi à augmenter la portée du radar et à rendre les unités toujours plus mobiles et plus sécurisés pour s’affranchir des contraintes d’accessibilité des sites à étudier (commande à distance). Les perspectives à plus long terme sont de développer de radars destinés à la compréhension des déplacements d'autres groupes faunistiques tels que les grands mammifères et les insectes. Leurs modes de déplacement terrestres soulèvent d'autres défis pour nos équipes.

Perspectives d’évolution des radars développés par Biotope

L’absence d’automatisation, les possibilités réduites d’identification des oiseaux et la projec-tion des positions en deux dimensions sont autant de limites que nous souhaitons lever au travers des travaux conduits par notre service Recherche & Innovation.

L’évaluation objective des impacts du projet est alors rendue possible par l’analyse combinée des résultats des 3 suivis.

Auteurs : A. Govaere*, A.L. Ughetto*, H. Lagrange*, C. Poinsot*, C. Elleboode*, S. Devos*, A. Thonnel*/ *Biotopewww.biotope.fr - Pôle Recherches et Innovation, 22 bd Maréchal Foch, 34140 Mèze - France. [email protected]

Concilier développement des énergies renouvelables et préservation de la biodiversité L'aménagement d'éoliennes de grande taille peut se révéler probléma-

tique pour les chauves-souris et les oiseaux. Pour l'avifaune, l'apparition dans le paysage de structures verticales de grande hauteur est un élément perturbateur tant en vol qu'au sol. Pour les chauves-souris, Biotope développe le dispositif Chirotech©

Jusqu’à présent, on procédait pour l’avifaune, à des

Un outil innovant et indispensable, développé par Biotope

Le radar, un outil pour renforcer l’expertise sur l’avifaune dans les études environnementales d’implantation des éoliennesrecherche et

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