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Actualités pharmaceutiques n° 531 décembre 2013 11 questions de comptoir © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2013.10.001 On vous demande, sachez répondre C ette rubrique, “questions de comptoir”, est conçue pour vous apporter des éléments de réponse éclairée face aux multiples questions que vous posent quotidiennement vos patients au comptoir de l’officine, dans le vaste domaine de la santé. Mon enfant a tendance à faire souvent des otites. Pourrais-je avoir des gouttes auriculaires comme Otipax® pour traiter la douleur ? F La réponse du pharmacien L’otite moyenne aiguë est une infection très fréquente chez l’enfant, qui se caractérise par une inflammation de l’oreille moyenne avec un épanchement, extériorisé ou non. Elle peut être soulagée par la prise d’un antalgique comme le paracétamol. En revanche, toute auto- médication par voie auriculaire doit être proscrite en cas d’otalgie. Quelques traitements locaux peuvent être utilisés dans le traitement symptomatique de certains états doulou- reux de l’oreille moyenne à tympan fermé mais ils sont contre-indiqués en cas de perforation tympanique d’ori- gine infectieuse ou traumatique. La plupart des gouttes auriculaires sont dangereuses en cas de perforation du tympan car toxiques pour l’oreille interne. Seules Oflocet ® et Otofa ® peuvent être instillées dans ce contexte. Devant une otalgie, un examen médical est donc indispensable pour éliminer une perforation tympanique. Le plus souvent, un tympan percé se mani- feste par une douleur vive, avec un écoulement de liquide accompagné d’une perte d’équilibre en cas d’atteinte de l’oreille interne. Mais il peut arriver que la douleur ne soit pas très importante. Toute pénétration d’eau dans l’oreille doit être proscrite. L’utilisation de bouchons d’oreilles lors de la douche ou du bain pourra être conseillée. Le cas échéant, il faudra suspendre l’utilisation de solution auriculaire le temps du traitement et ne la reprendre qu’une fois l’otite guérie. Prise en charge d’une otite Jérémy VONO Pharmacien Adresse e-mail : [email protected] (J. Vono). 3 rue Jean-Giraudoux, 19290 Sornac, France Est-ce normal d’avoir souvent des mycoses vaginales après une antibiothérapie assez longue ? F La réponse du pharmacien De la même façon que les antibiotiques provoquent des troubles du transit en détruisant la flore intestinale, ils peuvent aussi être responsables d’un déséquilibre de la flore vaginale et favoriser le développement de germes pathogènes. Ainsi, 85 à 90 % des candidoses vulvo-vaginales sont dues à Candida albicans, une levure vivant naturellement dans les muqueuses de l’être humain. La flore vaginale est essentiellement constituée de lactobacilles qui empêchent, lorsqu’ils sont en nombre suffisant, l’invasion des germes nocifs. En temps normal, ces lactobacilles, notamment Lacto- bacillus jensenii, L. crispatus et L. gasseri, transforment le glycogène sécrété par la muqueuse vaginale en acide lactique, ce qui contribue à maintenir un pH optimal dans le vagin et inhibe la prolifération des germes patho- gènes. La destruction de la flore vaginale par des anti- biotiques, le plus souvent à large spectre, permet donc la croissance des Candida, insensibles aux anti- biotiques. Les mycoses peuvent être prévenues par l’emploi de gélules contenant des bacilles de Döderlein visant à rééquilibrer l’équilibre de la flore vagi- nale. Une administration intravaginale de Lactobacillus en capsule, avec ou sans probiotiques oraux, permet aussi de restaurer le pH vaginal et d’activer la croissance nor- male de la flore bactérienne. En cas de récurrence de ce problème, des ovules anti- fongiques peuvent aussi être délivrés en fin de traite- ment antibiotique afin d’anticiper l’apparition des mycoses. Impact de l’antibiothérapie sur la flore vaginale © DR © DR R © Fotolia.com © Fotolia.com

On vous demande, sachez répondre

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Actualités pharmaceutiques

• n° 531 • décembre 2013 • 11

questions de comptoir

© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2013.10.001

On vous demande, sachez répondre

C ette rubrique, “questions de comptoir”, est conçue pour vous apporter des éléments de réponse éclairée face aux multiples questions

que vous posent quotidiennement vos patients au comptoir de l’officine, dans le vaste domaine de la santé.

Mon enfant a tendance à faire souvent des otites. Pourrais-je avoir des gouttes auriculaires comme Otipax® pour traiter la douleur ?

F La réponse du pharmacien

L’otite moyenne aiguë est une infection très

fréquente chez l’enfant, qui se caractérise par une

inflammation de l’oreille moyenne avec un épanchement,

extériorisé ou non. Elle peut être soulagée par la prise d’un

antalgique comme le paracétamol. En revanche, toute auto-

médication par voie auriculaire doit être proscrite en cas

d’otalgie. Quelques traitements locaux peuvent être utilisés

dans le traitement symptomatique de certains états doulou-

reux de l’oreille moyenne à tympan fermé mais ils sont

contre-indiqués en cas de perforation tympanique d’ori-

gine infectieuse ou traumatique. La plupart des gouttes

auriculaires sont dangereuses en cas de

perforation du tympan car toxiques pour

l’oreille interne. Seules Oflocet® et Otofa®

peuvent être instillées dans ce contexte.

Devant une otalgie, un examen médical est

donc indispensable pour éliminer une perforation

tympanique. Le plus souvent, un tympan percé se mani-

feste par une douleur vive, avec un écoulement de liquide

accompagné d’une perte d’équilibre en cas d’atteinte de

l’oreille interne. Mais il peut arriver que la douleur ne soit

pas très importante. Toute pénétration d’eau dans l’oreille

doit être proscrite. L’utilisation de bouchons d’oreilles lors

de la douche ou du bain pourra être conseillée. Le cas

échéant, il faudra suspendre l’utilisation de solution

auriculaire le temps du traitement et ne la reprendre

qu’une fois l’otite guérie.

Prise en charge d’une otite

Jérémy VONOPharmacien

Adresse e-mail : [email protected] (J. Vono).

3 rue Jean-Giraudoux, 19290 Sornac, France

Est-ce normal d’avoir souvent des mycoses vaginales après une antibiothérapie assez longue ?

F La réponse du pharmacien

De la même façon que les antibiotiques provoquent des

troubles du transit en détruisant la flore intestinale, ils

peuvent aussi être responsables d’un déséquilibre de

la flore vaginale et favoriser le développement de

germes pathogènes. Ainsi, 85 à 90 % des candidoses

vulvo-vaginales sont dues à Candida albicans, une

levure vivant naturellement dans les muqueuses de

l’être humain. La flore vaginale est essentiellement

constituée de lactobacilles qui empêchent, lorsqu’ils

sont en nombre suffisant, l’invasion des germes nocifs.

En temps normal, ces lactobacilles, notamment Lacto-

bacillus jensenii, L. crispatus et L. gasseri, transforment

le glycogène sécrété par la muqueuse vaginale en acide

lactique, ce qui contribue à maintenir un pH optimal

dans le vagin et inhibe la prolifération des germes patho-

gènes. La destruction de la flore vaginale par des anti-

biotiques, le plus souvent à large spectre, permet donc

la croissance des Candida, insensibles aux anti-

biotiques. Les mycoses peuvent être prévenues par

l’emploi de gélules contenant des bacilles de Döderlein

visant à rééquilibrer l’équilibre de la flore vagi-

nale. Une administration intravaginale de

Lactobacillus en capsule, avec

ou sans probiotiques oraux,

permet aussi de restaurer le pH

vaginal et d’activer la croissance nor-

male de la flore bactérienne. En cas de

récurrence de ce problème, des ovules anti-

fongiques peuvent aussi être délivrés en fin de traite-

ment antibiotique afin d’anticiper l’apparition des

mycoses.

Impact de l’antibiothérapie sur la flore vaginale

© DR

© DRR

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Page 2: On vous demande, sachez répondre

Actualités pharmaceutiques

• n° 531 • décembre 2013 •12

questions de comptoir

Je suis sous neuroleptiques et un ami m’a dit que prendre ces médicaments durant l'hiver constituait un risque.

F La réponse du pharmacien

Certains médicaments peuvent perturber les

mécanismes thermorégulateurs et être respon-

sables de la survenue ou de l’aggravation de

symptômes liés au froid. C’est notamment le cas chez

les personnes âgées et ce, d’autant plus qu’elles sont

atteintes de pathologies chroniques et traitées en

conséquence par des médicaments. Les antipsycho-

tiques sont connus pour favoriser les dysrégulations

thermiques. En cas d’épisode de grand froid, ils peuvent

perturber la thermorégulation centrale et sont suscep-

tibles d’aggraver une hypothermie par inhibition du

mécanisme du frissonnement au niveau central et par

action sur les centres thermorégulateurs. De plus, dans

des conditions normales de température, les anti-

psychotiques sont capables d’induire à eux seuls une

hypothermie. La vasoconstriction cutanée et l’augmen-

tation de la fréquence cardiaque qui en découlent

peuvent perturber la biodisponibilité de certains

médicaments ayant des profils pharmaco-

cinétiques particuliers. La distribution

et l’élimination des médicaments à

marge thérapeutique étroite (sels de

lithium, digoxine, certains antiépilep-

tiques) et l’absorption des médicaments

administrés sous forme de patch ou par voie sous-

cutanée pourront être modifiées. Cependant, il n’existe

aucune règle générale sur la modification des schémas

posologiques. L’Agence nationale de sécurité du médi-

cament et des produits de santé (ANSM) rappelle que

toute diminution ou arrêt d’un médicament doit être un

acte raisonné devant prendre en compte la pathologie

traitée, ainsi que le risque de syndrome de sevrage et

d’effet indésirable. Il convient donc d’opérer une

surveillance accrue de ces patients (température,

pression artérielle, pathologie chronique stable) en

période de grand froid et de les informer des risques

d’hypothermie1.

1 Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Mise au point sur le bon usage des médicaments en cas d’épisode de grand froid. ANSM, 2009.

Neuroleptiques/antipsychotiques et grand froid 

Des vergetures sont apparues sans variation de poids, comment est-ce possible ?

F La réponse du pharmacien

Les vergetures sont connues pour être la

conséquence d’une grossesse, d’une varia-

tion de poids importante ou d’une poussée de

croissance à la puberté. Mais il existe d’autres étio-

logies. En effet, elles peuvent apparaître en cas de taux

élevé de cortisol au cours de certaines maladies méta-

boliques et endocriniennes, lors d’une corticothérapie

prolongée ou à la suite d’une application locale de dermo-

corticoïdes fluorés. Elles surviennent de préférence sur les

zones de tension de la peau, notamment autour de

l’ombilic, sur les seins, le dos, les faces internes des

cuisses ou les aisselles. Les vergetures seraient impu-

tables à une stimulation de l’axe hypophyso-surrénalien

à l’origine de la sécrétion de corticostéroïdes en

excès ayant pour conséquence un blocage de

la prolifération et du métabolisme de la cellule

fibroblastique. Or, c’est dans ce même fibro-

blaste situé dans le derme que sont formées les

fibres de collagène. Un taux élevé de cortisol

aurait pour conséquence une diminution de la for-

mation de collagène et une modification de l’architec-

ture de la peau. Le collagène ne pouvant plus jouer son

rôle d’élasticité et de résistance aux étirements, les

vergetures apparaissent. Des actifs visant à stimuler le

métabolisme des fibroblastes ou conférant à la peau

nutrition et hydratation des couches superficielles de

l’épiderme pourront prévenir leur apparition.

Vergetures

© DR© DR

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Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir

de confl its d’intérêts en relation

avec cet article.