Poudre aux yeux

Sexe & drogues & show-business

RENAUD HANTSON

Poudre aux yeux

Sexe & drogues & show-business

Autobiographie

Pygmalion

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© 2012, Pygmalion, département de Flammarion.ISBN 978-2-7564-0788-3

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À Whitney Houston(1963-2012)

Préface

Sexe, Drogues et Rock ’n’ Roll, un cliché véhi-culé dans le monde musical depuis des décen-nies… Et un style de vie qui en a vu tomber plusd’un. Certains se sont relevés.

Je me suis toujours posé une question assezsimple : pourquoi le milieu professionnel artis-tique, en particulier les musiciens, est-il autanttouché par les addictions aux substances ? Médi-calement, cela sous-entendrait-il qu’être artisteconstituerait un facteur de vulnérabilité indivi-duelle de dérèglement du système de récompensecérébral ? Je ne le crois pas. Le phénomène estbien plus complexe. La rencontre de l’individu,son héritage génétique, des facteurs psycholo-giques personnels entrent en interaction avec la

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substance et l’environnement : ce qui donne uneéquation démoniaque à N inconnus…

L’addiction se définit par la perte de contrôled’un comportement de consommation, qui se pour-suit malgré la connaissance de ses conséquences néga-tives sur la santé physique, mentale et au niveau dufonctionnement social. Or, cette maladie chronique

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évolue par rechutes. L’abstinence devient doncla cible thérapeutique ultime pour n’importe quel« addict »…

Dès lors, les personnes dépendantes racontantqu’elles peuvent consommer avec modérationsont dans une rationalisation complètementfaussée. Cérébralement, chimiquement, biologi-quement, la mesure et la retenue sont tout sim-plement impossibles. L’autre distorsion cognitive1

connue avancée par certains est la soi-disantmeilleure créativité artistique sous substance…Eh bien, comparez un artiste que vous appréciezavant/après son addiction active et vous serezétonné de voir combien cette idée reçue est aisé-ment aberrante.

La cocaïne, « Reine psychostimulante », esttrès présente dans l’autobiographie de RenaudHantson. Une substance-récompense, sourced’euphorie, qui fait le bonheur actuel desfameux2 « Docteurs Vice », ces dealers de niveausocial variable. Or cette drogue s’est démocrati-sée à un point tel que toutes les classes socialessont touchées. Si elle avait une image dorée à lafin des années 1990, elle est aujourd’hui sortiedu ghetto artistique. Le plaisir qu’elle peut

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induire la première fois physiquement, psychi-quement, sexuellement, est un hameçon infernalqui fait ensuite courir le consommateur à larecherche de ses effets stimulants sans jamais les

1. C’est ainsi qu’on l’appelle en psychologie clinique.2. Cf. l’album Satan Jokers, AddictionS, Brennus

Music, 2011.

Préface

retrouver, ou alors un tout petit peu parfois…Mais ce au prix de conséquences cardiaques,cérébrales, psychologiques lourdes, au fil dutemps. Le sujet va passer par des « semaines enenfer » où il se « défonce à gogo », l’intensitéétant variable, le rituel identique ; puis il vivra laspirale « detox, lune de miel, chute, rechute » quifait partie de l’apprentissage pour « une viesans »…

Devenir abstinent, Nikki Sixx, bassiste deMötley Crüe, auteur-compositeur américaincélèbre, le racontait dans son autobiographiejournal de bord, Heroin Diaries. « La sobriété estma nouvelle compagne », affirmait-il récem-ment, devenu plus créatif, boulimique de travail,multipliant les projets même s’il ne regrette riende son passé tumultueux de superconsommateurde drogues et de sexe.

Or il me fait penser professionnellement àRenaud Hantson sur certains points, avecquelques tatouages en moins. J’ai rencontréRenaud la première fois au début des années1980 via la célèbre émission de radio WangoTango sur RTL animée par Francis Zegut.« Trop fou pour toi » et la reprise de T-Rex« Get it on » résonnaient dans ma chambre de

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jeune collégien. Son groupe de hard rock SatanJokers était l’un de mes préférés avec Kiss, Möt-ley Crüe, Iron Maiden… Les interviews dansEnfer Magazine restent une empreinte cognitiverock’n’roll. Et si je n’ai pas suivi sa carrière « poprock » ni son versant grand public de Starmania,La Légende de Jimmy ou Notre-Dame de Paris, je

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les ai découverts au fil de ce livre et au cours delongues discussions téléphoniques ou lors de nosrencontres dans mon service à l’hôpital. Renaud,ici, dévoile toutes les facettes de sa vie : sessuccès, ses déceptions, ses émotions positives etnégatives, la musique, les musiques, la poudre,le sexe…

Tout cela m’a inspiré, à partir de son nom etde son expérience des addictions, un acronymedigne d’un ouvrage scientifique de référencequelque peu remanié, capable de définir Renaud.

Hyperthymique : il a l’humeur au top… Laplupart du temps…Anxiolytique : il détend aisément une salle deconcert ou lors de ses stand-up comiques virtuelssur Facebook.Névrosé : il l’est… Comme tout le monde.Tatoué : sur les bras mais son cerveau l’est aussi,comme il le dit lui-même après ces 17 annéespassées en compagnie de Miss C…Sexaholic : son livre regorge d’histoires dignesdes plus grandes autobiographies rock.Obsessionnel : rigoureux, ritualisé dans le tra-vail, il bosse sans cesse.Natural Killer (comme les globules blancs) : soncaractère l’immunise contre les jaloux, les envieux

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et les c…

Tous ces points sémiologiques résument par-faitement son profil psychologique. Commentnous sommes-nous rencontrés ? En vérité, demanière improbable via un réseau social mondialnous mettant en connexion au milieu de son

Préface

armée de fans. Mon livre, Une histoire de poudre,lui avait plu ; ses créations artistiques rock meplaisaient. Alors un travail a commencé, donnantnaissance à AddictionS, un concept-album de13 titres accompagné d’un livre numérique pourSatan Jokers, qui est plus qu’un simple projetmusical : de l’art-thérapie ! Le tout accompagnéd’échanges à l’hôpital qui ont, en outre, donnénaissance à cette autobiographie initiée par lesséances de thérapie comportementale que Renauda entamées.

L’histoire retracée dans ce livre se range aisé-ment à côté des récits autobiographiques deGene Simmons (Kiss), Slash (Guns N’Roses),Eric Clapton, Steven Tyler (Aerosmith), KeithRichards (Rolling Stones)…

Sexe, coke, rock’n’soul… Ce n’est pas un cli-ché… 17 années… Renaud s’en est relevé, maisreste tatoué à vie.

Docteur Laurent Karila

1Préliminaires…

— Qu’est-ce que vous faites comme métier ?— Je fais chanteur.— Mais à part ça, vous avez un vrai métier ?!

Était-il évident que j’écrirais les premièreslignes de ce qui pourrait bien être une autobio-graphie en écoutant la musique et les mots deGlenn Hughes, l’ancien bassiste et chanteur deDeep Purple ? Glenn, que j’ai eu la chance derencontrer grâce à un ami et avec qui je reste encontact depuis 1992, demeure une de mes plusgrandes références vocales. Il aura gâché pasmoins de vingt années de sa vie musicale avecdes problèmes de drogue et de cocaïne.

Est-ce que tout est écrit ? Est-ce qu’on suitforcément les traces de ceux qui nous ont mar-qués ou influencés ? Était-ce mon destin de meperdre près de 17 ans dans le même vice et lamême dépendance ?

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Le problème de la drogue est qu’on éprouveautant d’attirance que de répulsion pour elle. Aumoment où j’entame l’écriture de ces pages, si jesuis parfaitement convaincu qu’il faut que j’arrêtecomplètement la coke, je ne suis pas encorecomplètement sorti d’affaire. C’est en effet unlent processus que de savoir s’écarter de la plus

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attrayante, la plus pernicieuse et la plus toxiquedes substances, laquelle passe pourtant pour laplus anodine, la plus acceptée par tous lesmilieux, celle que tout le monde prétend facile àgérer ou à arrêter sans problème. Or je peux dire,aujourd’hui, que c’est faux.

J’ai toujours été un peu agacé par les donneursde leçons qui clament : « Je sais comment il fautvivre, parce que j’ai trouvé la voie et je vais vousl’expliquer. » Comment éviter d’en devenir un àmon tour à travers les lignes qui vont suivre ?Qui plus est après l’e-book préventif et l’albumAddictionS écrits en collaboration avec mon ami,mon frère, mon gourou et néanmoins éminentpsychiatre-addictologue Laurent Karila, très pré-sent à nouveau, à mes côtés, dans ce qui va suivre.

C’est lui qui m’a conseillé de tenir un journalde bord, un carnet avec suivi écrit de mesconsommations, voire une autobiographie… J’aichoisi la dernière proposition même si je sais quema notoriété le justifie sans doute moins quecelle de certaines stars s’y étant essayées avantmoi. Elles l’ont décidé pour expliquer leur succèsparsemé d’anecdotes ; je le fais parce que je suisun survivant et qu’il fallait cette introspectionpour revivre à nouveau.

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Dans le parcours d’un musicien, on vit rapi-dement beaucoup d’expériences et les choses lesplus étranges. Certains sont partis par excès,d’autres par suicide. Personnellement, je n’aijamais compris, accepté ni cautionné le fait de sedonner la mort, ayant toujours pensé que lesuicide répondait par un acte définitif à une

Préliminaires…

situation qui peut n’être que passagère. J’ai ditcette phrase maintes et maintes fois à des amisdéprimés et au bord du gouffre. Elle aura servià quelques-uns mais ne m’aura pas empêché detomber dans les filets de la drogue. Oui, la cokeest un lent suicide…

J’ai des intentions moins nobles, artistique-ment, que ce que pas mal de gens semblent pen-ser. Je suis plus physique que cérébral dans mamanière d’aborder la musique et ma force prin-cipale réside davantage dans la voix que les mots.Si je chantais le Bottin, j’y mettrais autant decœur. Les textes sont un véhicule pour monphrasé vocal, pour mes mélodies ou les gimmickset intentions que je mets dans les parties dechant. Dans ce que je fais musicalement, il y aun aspect plus sexuel et bien moins intellectuelque la démarche de certains artistes ayant plus leverbe que la voix. Je préfère le contraire : unebelle mélodie m’emportera même avec un textemoyen, rarement l’inverse. J’imagine que denombreux moments ont compté pour pas mal degens du public qui justement ont apprécié à dif-férentes époques mes interprétations vocales.Que ce soit pour Michel Berger dans Starmaniaou La Légende de Jimmy, pour Richard Cocciante

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dans Notre-Dame de Paris1, sur mes albums per-sonnels ou encore mes reprises de titres divers et

1. Trois spectacles écrits sur des textes de LucPlamondon, parolier des plus grandes heures des opérasrock et comédies musicales francophones, d’autant plus sion y ajoute Les Romantiques, auquel je n’ai pas participé,mais que j’avais adoré.

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variés allant de Jean-Jacques Goldman à MichelJonasz en passant par Daniel Balavoine, MichelPolnareff, Serge Lama, Claude François etd’autres dans différentes émissions de télévision.Il faut comprendre que pour moi tout cela estloin et que j’ai littéralement un « black-out » detous les souvenirs auxquels les fans font parfoisallusion. Il ne faut pas penser qu’ils n’ont pascompté ; mais ces instants volés étaient le débutd’une longue période dont j’ai longtemps sou-haité ne pas parler et à laquelle j’essaie, depuisquelques mois seulement, de mettre un terme.

Beaucoup de situations m’évoquent réguliè-rement diverses époques où j’ai découvert ledélire ambigu de prendre du plaisir à déviermes fantasmes et à casser une sexualité que j’airapidement trouvée trop basique avec une saletéde partenaire chimique, tout ça pour accéder àune excitation que je n’avais pas connue aupa-ravant…

Certaines personnes ont plus de prédisposi-tions que d’autres à plonger dans ce qui pourraitêtre sans retour. J’en fais partie. L’intégralité del’album AddictionS parle des 17 dernières annéesde ma vie. Même si ce n’est pas clairement indi-

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qué et même si c’est un psychiatre reconnu dansla lutte contre les addictions qui a écrit la plupartdes textes de ce concept-album, cet opus n’ajamais autant dévoilé de choses personnelles meconcernant. J’ai rencontré Laurent Karila, monthérapeute, grâce à Facebook : appréciant montravail, il faisait partie de mes amis sans que je

N°édition : L.01EUCN000478.N001Dépôt légal : mars 2012