11
- 1046 - Recherches sur la deshydration catalytique des systemes phenols-aleools par E. Briner, W. Pltiss et H. Paillard. (17. X. 24.) I. INTRODUCTION. La dbshydratation catalytique dcs alcools, des phbnols et des syst&mes constituks par ces deux classes de corps, a fait I’objet dc nombrcux travaus dc la part de plusicurs expkimcntateurs, et surtout de Sabatier ct de ses collaborateurs’). Ccs derniers curent tout spbcialo- mont le grmd m6ri te, par leurs nombreuses recherches expbrimentales, de prbciser l’action propre ails divers catalyseurs susceptibles de favoriscr la dbshydratation. Sabatier a bt.6 ameiib ainsi a rkpartir lcs oxydes mi:talliques, qui sont le plus souvent considkrbs pour des ophatioiis catalytiques, en trois classes : lcs oxgdcs favoiisant exclusivement (ou presque) la dkshydratation, les oxydes mixtes favorisant a la fois la dBshydratation et la dbshydrogbnation, et les oxydes favorisant ex- clusivcinent (ou presque) la d6shydrogbnation. Les catalyseurs pos- sbdant les propribtes dbshydratantes les plus marquees soiit, d’aprbs Sabatier, l’dun&e h1,0,, la tliorinc ThO,-ct l’oxyde blcu de tungstbne 117~0~. L‘ouvragc de Sabatier expose lien les grandes lignes directrices dont on s’inspircra avec profit dans 1’6tude de la catalysc de d6s- hydratation. Mais, lorsqu’on cxamine de plus prks l’action catalytique, en prochdant pour chaquc systitmc, a des mesurcs noinbreuscs dans des conditions opbmtoires aussi varihes que possible, notamment en cc qui concerne la temperature et la composition des systbmcs, on s’aperqoit que chaque catalyseur de dkshydratation se distingue pour un systhme donnb par une action bien B lui, et qui peut 8tre trks dif- Eereutc de celle d’autres catalyseurs considbres pourtant comme trbs voisins. C’est ainsi que dans un travail rbcent,), portant principalement sur l’ohtention de l’aniline par dkshydratation du systbme phenol- ammoniac, 1’activitQde l’alumine s’est r6vk16e de beaucoup sup6rieure a celle de la thorine. De plus, dans ce msme travail, quelques essais, cffectubs pour prkciser les conditions de dhshydratation des systkines ternaires ph6nol-ammoniac-alcool m(?thylique, ont mis en Bvidence une autre particularit6 diff Brenciant complbtement la thorine de l’alumine : le premicr do ces corps favorisant bien, conformement aux observations 1) Cf. Bur ce sujet les chapitres, consacr6s B la dbhydratation catalytique, de l’im- portant ouvrage de Sabalier ,,La catalyse en Chimie organique“, &*me Bdition, Paris 1920. 2) Briner, Ferrero et de Lusernu, Helv. 7, 282 (1924).

Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1046 -

Recherches sur la deshydration catalytique des systemes phenols-aleools

par E. Briner, W. Pltiss e t H. Paillard. (17. X. 24.)

I. INTRODUCTION.

La dbshydratation catalytique dcs alcools, des phbnols et des syst&mes constituks par ces deux classes de corps, a fait I’objet dc nombrcux travaus dc la part de plusicurs expkimcntateurs, et surtout de Sabatier ct de ses collaborateurs’). Ccs derniers curent tout spbcialo- mont le g rmd m6ri te, par leurs nombreuses recherches expbrimentales, de prbciser l’action propre ails divers catalyseurs susceptibles de favoriscr la dbshydratation. Sabatier a bt.6 ameiib ainsi a rkpartir lcs oxydes mi:talliques, qui sont le plus souvent considkrbs pour des ophatioiis catalytiques, en trois classes : lcs oxgdcs favoiisant exclusivement (ou presque) la dkshydratation, les oxydes mixtes favorisant a la fois la dBshydratation et la dbshydrogbnation, et les oxydes favorisant ex- clusivcinent (ou presque) la d6shydrogbnation. Les catalyseurs pos- sbdant les propribtes dbshydratantes les plus marquees soiit, d’aprbs Sabatier, l’dun&e h1,0,, la tliorinc ThO,-ct l’oxyde blcu de tungstbne 1 1 7 ~ 0 ~ .

L‘ouvragc de Sabatier expose l ien les grandes lignes directrices dont on s’inspircra avec profit dans 1’6tude de la catalysc de d6s- hydratation. Mais, lorsqu’on cxamine de plus prks l’action catalytique, en prochdant pour chaquc systitmc, a des mesurcs noinbreuscs dans des conditions opbmtoires aussi varihes que possible, notamment en cc qui concerne la temperature e t la composition des systbmcs, on s’aperqoit que chaque catalyseur de dkshydratation se distingue pour un systhme donnb par une action bien B lui, et qui peut 8tre trks dif- Eereutc de celle d’autres catalyseurs considbres pourtant comme trbs voisins. C’est ainsi que dans un travail rbcent,), portant principalement sur l’ohtention de l’aniline par dkshydratation du systbme phenol- ammoniac, 1’activitQ de l’alumine s’est r6vk16e de beaucoup sup6rieure a celle de la thorine. De plus, dans ce msme travail, quelques essais, cffectubs pour prkciser les conditions de dhshydratation des systkines ternaires ph6nol-ammoniac-alcool m(?thylique, ont mis en Bvidence une autre particularit6 diff Brenciant complbtement la thorine de l’alumine : le premicr do ces corps favorisant bien, conformement aux observations

1) Cf. Bur ce sujet les chapitres, consacr6s B la dbhydratation catalytique, de l’im- portant ouvrage de Sabalier ,,La catalyse en Chimie organique“, &*me Bdition, Paris 1920.

2) Briner, Ferrero et de Lusernu, Helv. 7 , 282 (1924).

Page 2: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1047 - dejb faites par Sabatier, la formation de l’anisol, le second donnant lieu it la production abondante d’un corps solide de nature restant 9 determiner.

On voit par 18 que 1’8tude de la dhshydratation catalytique, en presence d’alumine, des systhmes alcools-phhnols mhritait d’Btre ap- profondie tant au point de vue des corps produits que du mecanisme de leur formation. C’est le but que nous nous sommes propose dans les presentes recherches.

Dans celles-ci, la particularit6 singulikre signalee plus haut a l’actif de l’alumine, soit formation d’un corps autre que l’anisol dans la des- hydratation du systbme phbnol-alcool mkthylique, s’est revelhe encore plus digne d’attention que nous ne le supposions. En effet, ce meme corps s’est produit lorsqu’on remplace dans le systbme &die le phenol lui-m6me par toute une s6rie d’homologues (crksols, xylhols), par un diphhnol (resorcine) et mBme par un triphbnol (pyrogallol).

Aprks de multiples essais, nous sommes parvenus a identifier ce corps, qui est l’hexamethylbenzkne, et st fixer en nous basant sur l’htude des gaz produits, le miteanisme de sa genkse. Celle-ci est doe a l’inter- vention d’une dbshydroghation qui vient associer ses effets a la d6s- h ydratation.

La nature du corps ainsi engendr6 &ant ittablie, il y avait lieu de determiner les conditions dans lesquelles cette production s’accomplit avec les meilleurs rendements. Ces conditions observhes, les rendements sont trks satisfaisants, en sorte que, par ce proced6, il est des plus facile d’obtenir l’hexam6thylbenzhne dont la preparation par les autres mkthodes est particulikrement laborieuse.

A considitrer ce ritsultat d’un point de vue theorique, il convient de souligner la tendance que posskde l’hexam6thylbenzkne st se former plut6t que tout autre derive m6thyl6, lorsqu’on soumet st l’action catalytique de l’alumine les systkmes formes par l’un ou l’autre des diffhrents phenols et l’alcool mkthylique, quelles que soient d’ailleurs les proportions de ce dernier corps dans le melange.

L’6tude tliermochimique numbrique, exposbe plus loin, montre bien que de tous les derives mitthyles du benzhne, c’est bien l’hexa- methyl-benzhne dont la formation comporte le maximum d’energie disponible. Mais, ainsi qu’on le verra, cette consideration Bnerghtique n’hlucide pas complbtement le phenomkne qui pourrait Btre discut6 A la lumikre des nouvelles theories Blectroniques ‘proposbes pour le noyau benzhique.

Les rhsultats interessants obtenus dans l’htude des systbmes phhols-alcool methylique nous ont tout naturellement conduits a examiner des systkmes analogues constitubs par d’autres alcools et d’autres phenols ou des naphtols. Quelques donnees ont deja &ti! recueillies dans l’htude de ces systhmes sur lesquels on se propose de revenir dans un travail ulthrieur.

Page 3: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1048 - Dans les pages qui suivent, nous exposons les parties exphimentales

de nos recherches ainsi que lcs principales conclusions qui s’en d6gagent.

Nos essais ont Bb5 effectues dans un apparcil qu’il est inutile de decrire ici, car il est semblable h celui utilise dans un travail prhckdentl); on s’en fera d’aillcurs une id6e d’ensemble par le dessin figurant plus loin qui le represenk avec les adjonctions dont il sera question. Rappeloris cependant que cet appareillage permet d’etudier les sgst$mes soumis B la catalyse dans des conditions bien dkterminees de temperature, de debit e t de composition. De plus, il convicnt de signaler la modification suivantc que nous avons 6th amen6s B apporter par la suite i ce mode operatoire.

Lars de nos prcrniers essais, nous avons introduit le sgseme phenol-alcool dans le tube laboratoire B 1’6tat de vapeurs en l’entrainaut par un courant de bioxyde de carbone sec de vitesse bien reglee. Ensuite, n’ayant, constah5 aucune baisse de rendement, nous avons utilise un eritonnoir B robinet duquel le m6lange alcool-ph6nol coule directe- ment goutte B goutte dans le tube laboratoirc. A la sortie du four, ce tube est fix6 B un systbme de recipients dont le dernier, plong6 dam le melange glace-sel, assure une meil- leure condensation que le dispositif deerit dans le memoire prhcklent.

La determination du poids de l’hexam6thylbenzhe form6 se fait d’une fapon tr6s simple en tirant parti de ce qu’il est tr&s peu soluble dans les alcools methylique e t 6thy- lique froids. I1 suffit de traiter le produit de la reaction par uue quantite d’alcool m6thy- lique double de celle du phenol utilis6, de filtrer e t de laver le prkcipit6 B l’alcool ktbylique e t de le s6cher dam un dessicatcur avant la pes6e. L’hexamhthylbenzhe brut se prksente sou8 forme d’une poudre jaune, dont la pure6 est d6jh asses grande pour permettre l’btablissement de rendements comparatifs. La petite quantitk d‘impuretk, dont il est souill&, est trbs difficile B Oliminer m&me par recristallisation. La purification coniplete de la substance, son identification e t ses propri&s sont decrites plus loin.

111. ETUDE DE LA FORMATION DE L’HEXXMGTHYLBENZQNE DANS DIFPE- RENT6 SYSTkMES PHGNOLS-BLCOOL MGTHYLTQUE SOUS L’ACTION C.4TA-

LYTI QUE 1)E L’ALUMINE. Essais comparatifs sur l’alumine et la thorine. Leur action sur le syat8me phtnol-alcool

mtthylique. Leu conditions operatoires de cctto skrie d’essais sont indiqukes ci-dessous :

11. APPAREILLAGE E T MODE DE TRAVAIL.

Essai KO.

C,H,OH gr.

CH,OH gr.

~.

37.9 36,4 64,4

Temp. du four

41 60 4200 408” 41 2 O 426”

Evsni 1. -- Tie prodnit solide ob tmu de coulcur hrune est soumis B uno distil- lation frac+1oun8r~. I1 cst constitub presque cmti2rement par d u phenol non transformC, nccompagnd d‘nnc t k petite quantik5 d’oxyde de pldnylc C,H, . 0 . C,H,. 11 ne s’est done produit qu’une trbs l&ke d6shydratation.

Essnz 2. - En rcmplapant l’alurnine par la thorine, le rendernerit c%n oxyde de phbnylr c s s t UII peu mcilleur quoique tr& faible (0 8 gr.).

h’ss(n 3. - L’alvool m6ttiylique seul se d6shgdrate facileirient sur l’alurnine ; dam les conditions ob nous avom op8rb nous avons recueilli de I’oxyde de methyle avec un

l) Briwr , Ferrero c t de Ltlsernu, loc. cit. p. 284.

Page 4: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

1049 - -

rendement de 40%. Nous reviendrons sur cette decomposition de l’alcool dans le para- graphe consacre B 1’6tude du mecanisme de la reaction.

Essais 4 et 5 . - 11s nous confirmcnt de suite la grande difference d’action des deux catalyseurs sur le syseme mixte. Avec de l’alumine nous obtenons 8,2 gr. d’hexamethyl- benzbne brut, B cat6 de phenol e t d‘alcool non transformes e t d’oxyde de methyle. L a thorine au contraire ne nous faurnit que des produits liquides dont nous avons pu extraire 5 gr. de corps neutres parmi lesquels l’anisol (rendement 8% par rapport au phenol trans- form&). Afin de nous rendre compte si Bventuellement le bioxyde de carbone exerpait une action sp&iale, nous l’avons remplacb par de I’azote et avons trouve exacternent les mdme resultats.

Etude spdciale de I‘action de l’dumine sur le systLme phknol-alcool mkthylique. - Toutes nos exgriences ultkrieures ont Btk faites en utilisant I’aluminel) comme catalyseur. Nous avons fait varier successivement les different8 facteurs susceptibles d‘influencer la reaction soit: proportions relatives d‘alcool methylique e t de phenol, temp6rature e t dude de contact, e t avons determine dans chaque cas les rendements de transformation (fraction du phenol, mis en ceuvre, convertie en hexam6thylbenzbne).

Nous avons observe de suite qu’un tres grand exobs d’alcool methylique ameliore notablement ce rendement: il atteint Q peine 15% si l’on emploie les deux constituants du syst&me en parts B peu prbs,6gales, tandis que si l’on utilise un pDids d’alcool de 8 fois superieur B celui du phenol, il s’61bve jusqu’Q 49,3%.

La temperature exerce auwi une grande influence: B 356O, le rendement est d’en- viron 2,5%, B 370°, il s’B1bve d6jQ Q 15%. La temperature optimum est comprise entre 41O0 et 440O. Au dessus de 450°, il se forine des resines qui encrassent le catalyseur e t la production d’hexam6thylbenzbne est fortement diminuee.

Quant B la d u d e de contact du melange reactionnel avec l’alumine, il ne semble pas que, dans les conditions de nos essais, elle ait une action tr+s marquee, puisqu’en le faisant varier dans le rapport de 1 B 2,3, le rendement a passe seulement de 48,7 B 49,3%. C‘est !a preuve que la quantitk d‘alumine etait suffisante pour assurer une catalyse efficace.

Les meilleurs rendements obtenus dam nos essais n’ont pas depasd le 50%. Mais comme dam le sysame obtenu, il y a encore du phenol non transforme. une prolon- gation trbs grande de la d u k e de contact ou mieux, puisque cette d u d e agit plut6t faible- ment, une reprise du phenol dans une nouvelle operation permettrait d’en convertir la majeure partie en hexam6thylbenzbne. Les seules causes de pertes sont dfies Q la for- mation de resines produites d‘ailleurs en trbs faibles quantites dans les conditions de temperatures reconnues les plus favorables.

Identificution de l’hexambthylbenzhze. Propriktks et autres modes de preparation. - Le corps brut provenant des differents essais a 6th soumis B des recristallisations rep6Ges dans l’alcool ordinaire jusqu’Q ce que son point de fusion atteigne 1610. I1 se presente alors sous la formo de cristaux jaune clair qui ne se laissent pas purifier davantage par cette methode. I1 est necessaire de les soumettre B une sublimation entre deux verres de montrc. Le sublimat est constitu.4 par de jolies aiguilles blanches, solubles dans le benebne e t le toluene; elles fondent B 163,5--164O 2, et leur point de fusion ne change pas aprks une seconde sublimation.

Pour l’analyse e t la cryoscopie, la substance sublimee a 6t.6 s6ch6e B poi& constant. 0,1208 gr. subst. ont donne 0,3926 gr CO, e t 0,1211 gr. H,O

Calcul6 pour C,,H,, C 88,81 H 11,19% Trouv6 ,, 88,68 ,, 1132%

l) L’alumine a 6 6 preparke par dcssication 1 350-400° dans un courant d’air, d‘alumine hydratee (provenance Maison Siegirierl). Pour nous placer dans des conditions rigoureusement comparables, nous avons effectue tous nos essais avec le catalyseur fraichement prepare.

,) Temperature prises B l’aide de thermometres L 6chelle reduite e t corrigees de l’erreur de colonne Bmergente.

Page 5: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

Essai No.

1 2 3

On notera particulierement dans ces resultats que le dkriv6 mkta resiste plus forte- ment B la methylation clue l’ortho et le para.

l) Friedel et Crufts, A. Chim. [6] 10, 420 (1887). 2) Friedel et Crafts, A. Chim. [6J I, 467 (1884). 3) A. W . Hofmunn, B. 13, 1729 (1880). 4, H. Reckleben e t J. Scheiber, B. 46, 2363 (1913). 5) Sur ce dernier p i n t , nous avons fait une constatation analogue: en effet un

corps jaune s’accumule dans les rdsidus de sublimation e t les liqueurs mires de recristalli- sation; nous en avons ainsi obtenu finalement 3 gr. pour une trentaine de grammes d’hexa- mkthylbenzdne, mais nous n’en avons pas fait 1’Qtude.

Rendement en

benzine

Crksols CH,.CH Temp. du gr. gr. four

DurBe hexamkthyl-

(ortho) 16,3 126,7 403 2 h. 45 24,7% ( m k t a ) 15,g.i 100,6 400° 2 h. 45 3 16 Yo (para) 18 98,6 411 3 h. 23,3%

- 1050 - C’est I’absence inattendue d’oxygbne dans ce corps, r6v6lee contre toute attente

par l’analyse, qui orienta nos essais d’identification dam la direction des derivks mkthyl6s d u benzhne.

Cryoswpie: 0,5603 gr. subst. dans 12,61 gr. phenol - abaiss. -1,460O Calcule pour C,,H,, 162,l Trouve 160

Deux autres preuves sont venues nous confirmer que nous nous trouvions bien en presence de I’hexamktliylbenz&ne : I’addition B notre produit d’hexam6thylbenzbne pur de Kahlbaum n’a donnk lieu A aucun changement du point de fusion; d’autre part, nous avons pu. selon les indications de Friedel e t Crafts1) preparer B partir de notre pro- duit, le mbitylene que nous avons identifit5 par son point d’kbullition e t par le pint de fusion de son dkrivh nitrk.

Lcs autres modes de production de I’hexamhthylbenzBne indiquks par la biblio- graphic montrent bien qu’il se forme plus facilenient que d’autres derives mkthyles du benykne. Parmi les diffhrentes synthkses nous mrntionnerons celle de Friedel e t Crafts2) qui I’ont obtenu en petites quantites B partir du benz8ne e t du toluine, celle de Ilofmann consistant ti chauffer a l’autoclave vers 25Ou-3OOu un melange de chlorhydratc de xyli- dine et d’alcool rn6thyliqiie3), et le procCdk catalytique de Hans Reckleben e t Joh. Scheiber4) sur lequel nous insisteroris un peu plus: ces auteurs font agir de l’alumine chauffee 400° sur un melange de vapeurs d’acetone e t d’alcool mkthylique. La reaction reprksentke par I’kquation suivante:

est done une simple dbshgdratation. Les meilleurs rendements qu’ils aient observes sont de l’ordre de 20% e t en rkcuperant I’acetone e t l’alcool non transform&, ils croient p u - voir I’an16liorer notablemcnt. De plus ti c8tk de l’hexam6thylbenzi.ne ils ont trouve line huile complcxe5).

S?jstdmes monophknols-alcool nikthylique. - Pour klucider le mecanisme du phkno- mhie, dkcrit dans les paragraphes preckdcnts, il nous a paru indiquk d’ktudier aussi le comportement d’autres systhmes mixtes tels que ceux formks par les cresols ou les xylknols ou meme de polyphbnols e t I’alcool mkthyliquc. Les tableaux qui suivent donnent un aperpu des rksultats obtenus:

3 CH,. CO . CH, + 3 CH,. OH --+ CJCH,); + 6 HZO

Essai s w les crdsols.

On notera particuli6rement dans ces resultats que le dkriv.5 mkta resiste plus forte- ment B la methylation clue l’ortho et le para.

l) Friedel et Crufts, A. Chim. [6] 10, 420 (1887). 2) Friedel e t Crafts, A. Chim. [6J I, 467 (1884). 3) A. W . Hofmunn, B. 13, 1729 (1880). 4, H. Reckleben e t J. Scheiber, B. 46, 2363 (1913). 5) Sur ce dernier p i n t , nous avons fait une constatation analogue: en effet un

corps jaune s’accumule dans les rksidus de sublimation e t les liqueurs mires de recristalli- sation; nous en avons ainsi obtenu finalement 3 gr. pour une trentaine de grammes d’hexa- m&hylbenzdne, mais nous n’en avons pas fait 1’Qtude.

Page 6: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1051 - Essais sur les xylbnols.

Essai NO.

1

2 3

Rendement en

benzene

54%

Les rendements en hexam6thylbenzbne sont supCrieurs B ceux obtenus dans le cas du phhol. De plus, le produit brut est trks pur puisqu’il pr6sente un point de fusion de 161 O sans recristallisation pr6alable.

Systkmes polyphchols-alcool methylique. - L’6tude de ces systbmes offre un assez grand interkt puisque la methylation complete exige le depart de plusieurs hydroxyles.

Essai sur la rksorcine et le pyrogallol.

Rendement en

benzbne

Rksorcine CH, . OH Temp. du gr. gr. four

Dur6e hexamkthyl-

23,l 142,2 451 O 5 h.% 43 %

22,4 136,l 416O 3 h.1/2 1,2% Pyrogallol

10,4 69,2 376O 2 h. 0 ~ 3 %

Le rendement obteiiu avec la rbsorcine est satisfaisant; en revanche, par suite de l’instabilitk du pyrogallol aux temperatures des essais, tres peu de ce corps a BtB trans- form6 en hexamPthylbenz6ne; la majeure partie a donne des goudrons.

Essais avec examen des gaz produitr. - Ainsi que nous l‘avons d6jB relev6, 1’61imi- nation de l’oxygene dans le processus avait de quoi surprendre. I1 6tait donc n6cessaire de chercher B pr6ciser le m6canisme de la formation de l’hexam6thylbenz6nel celle-ci ne pouvant r6sulter uniquement d’une deshydratation.

Kous avons pens6 qu’un rBle important Btait jou6 dans le phknomene par la formal- dehyde ou plutBt par ses produits de d6compsition, I’oxyde de carbone e t l’hydrogiine. En effet, Sabatierl) a constat6 qu’& 350° dejja l’action de I’alumine sup l’alcool mkthylique donne naissance, B cBtB de I’oxyde de niethyle (CH,),O B une petite quantitk de formal- dehyde e t des deux gaz prBcbdemment mentionnhs.

Au lieu de nous contenter de recueillir uniquement les liquides e t les solides, nous avons ainsi 6th amen& B examiner 6galement les gaz. L’ensemble de I’appareil est repr6- sen6 par la figure ci-apres:

l) Sabatier, loo. cit. p. 278.

Page 7: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1052 -

X O .

1 2 3

4 5

Le premier rbcipient B, est refroidi par de la glace; le serpentin e t le 2 m ballon B2, ce dernier immerge dans un melange do glace et de sel, doivent condenser les dernihres traces de liquide. Les dcux premi6res ampoules A,, A, servcnt B la condensation de I’oxyde de methyle; Ics recipients Dewar contiennent un melange d’alcool 0x1 d’ether e t de neige carbonique. La dernikre ampoule A,, dont le tube interne est perch de trous L diffkrentes hauteurs, cst plongee dans I’air liquide. Les gax non condensables sont recueillis dans le gazomktre; comme dam certains rssais, il s’en est produit une trks grande quantiG, nous avom eu soin de fairc porter leur analyse sur line portion recueillie vers le milieu de I’experience, lorsquc: lc r6gimc peut dtrc consider6 comme constant.

Nous avons effectuk en tout cinq essais dont lcs caractx5ristiques sont rksumecs dans

Systhmes traitks

CH, - OH CH, * OH CH, * OH aveo un peu

PGH6 * OH CH,. OH,C,H,(OH),

cle CH,O

Temperature du four

425O 358O 428O

410-420’ 420°

Duree de I’essai

Essais 1 et 2. - 11s avaient pour but dc nous renseigner sur le comportement de I’alcool m8thylique seul vis-a-vis de I’alumine. Leurs rbsultats montrent que sous l’in- fluenec de c‘e corps l’alcool rnkthylique est non seulemcnt deshydratk en oxydc de mCthyle, mais aussi dkconipose en uu melange d’oxyde de carbone e t d’hydrogbne; ce melange peut lui-ni8me resulter dc la decomposition d’aldehyde formique form6 intermediaire- rrient et qui est peu stablc Q ces temperatures, ainsi que le prouve I’essai suivant. 11 s’ac- complit donc, dans les conditions op6ratoircs, une vCritable deshydrogenation de l’alcool methylique; elle est peu marquee B 358O oh la dbhydratation en oxyde de methyle pr6- domine, mais elle devient trLX notable b 425O, oh plus de la moitiede l’alcool mis cn Ceuvre est transform6 en oxycle dc carbone e t hydroghe.

Essni 3. - La destruction pour ainsi dire totale de la formaldehyde ajoutkc, con- firme l’instabilith de ce corps aux temperatures de nos essais; on s’explique pourquoi nous n’en avons trouvi: qu’i I’Btat de traces dans les produits de la reaction.

Essni 4. - Get essait fait ressortir la stabilitk du phenol seul en pksence de l’alu- mine. A la temperature de 410-420°, aucun gaz ne s’est degage e t on n’enregistre qu’une faible dkshydratation du phenol aboutissant & la formation d’un peu d’oxydc de phhnyle

On peut ainsi conclure dw esp6riencc.s prBcBdcntes qu’aux temperatures lcs plus favorablcs Q la formation de I’hexainkthylbcnzine, l’alumine, & c8G de son pouvoir d6s- hydrahnt, excrce sup I‘alcool niBthylique une action d8shydrogenante trbs prononc6e d‘oh rCsulte finalement la production d’oxydc dc carbone e t d’hydrogBnc selon 1’6quation

CH,OH = CO + 2 H2’). Lc milicu dcvirnt trbs fortcrncnt rdducteur, ce qui cxplique 1’6limination complhte

dca I’osygGne phknolique, malgre la stabilitb relative du phenol dans lcs m h e s conditions. Essni 6. -- Si nos vues sont justcs, 1111 systkme mixte phenol-alcool, renfermant

une quantitk dbfinic: d’alcool metliylique, doit alors degager rnoins d’hydroghe qtlc n’cn donncraient Ics mBmcu quantitks d’alcool, dans les conditions opkratoires semblables. (?rut ce que prouve cet essai effect& sur un systkme renfermant l’alcool mbthyliquc et la rksorcine, cc derniw mrps comportant deux oxyghnes phenoliques L Blimincr per

1) Cettc: r6action posskk d’ailleurs la propriete d’6tre reversible puisqu’il existe des prochdks permettant de prkparer l’alcool methylique L partir d’un melange d’oxydc de carbone e t d‘hydrogkne en pr6sencc de eatalyseurs appropri6s. Cf. par cx. H . Dreyluss, E. P. 157 047 (1917).

( CoH,),O.

Page 8: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1055 - r6duction. Les gaz form& en grande quantit4 renfewent en effet des proportions beaucoup plus faibles d‘hydrogkne que celles enregistkes dans la d6composition de l’alcool seul.

Remarques sur le micanisme de la riaction. - De ces donnbes expbrimentales, il resulte que, dans les conditions auxquelles le systkme a BtC: soumis B l’action de l’alumine, il s’est form6 un milieu rbducteur constitub par un melange d’oxyde de carbone et d’hydrogbne. C’est a la faveur de ce milieu qu’une reduction est venue superposer ses effets a la deshydratation. Au total, le processus est represent6 par l’kquation ci-dessous :

qui explique pourquoi l’on a avantage B mettre en aeuvre un grand exc&s d’alcool mkthylique. Pour tenir compte de l’alcool dhshydrat6 en ether, cet excks doit meme Btre encore plus marque que ne l’indique l’equation.

Pour Bviter l’action reductrice, il faudrait opkrer a des temp6- ratures ou la deshydroghation de l’alcool rnkthylique est trks peu marquee, c’est-&-dire au dessous de 350O. Mais alors, le phhnol, ainsi que les essais relates plus haut l’ont dbmontrk, ne rkagit pour ainsi dire pas avec I’alcool mkthylique. Les temperatures supkrieures a 400° sont done nkcessaires et leur intervention a pour consequence la superposition des effets de la dbshydratation et de la rkduction.

Ce qui est remarquable dans le processus Btudie, c’est la formation privilegiee de l’hexam6thylbenzbne. Que l’on emploie le phenol ou ses homologues, un diphbnol tel que la ritsorcine, ou un triphenol, tel que le pyrogallol, on enregistre toujours la production, avec des rende- nients plus ou moins bons, de l’hexam6thylbenzhne. Quelles que soient aussi les proportions d’alcool mbthylique m i s en ceuvre, c’est toujours le derive hexamkthyli! du benzene qui se produit et non pas les derives mbthylhs infbrieurs.

Pour essayer d’interprbter le phenomhne, il y avait lieu tout d’abord d’envisager les quantites d’hergie mises en jeu dans les diffk- rentes bventualitks. Pour ktablir les equations thermochimiques, nous nous sommes servis des donnees thermochimiques fournies par les tables pour les chaleurs de formation des systbmes figurant dans .ces equations. De plus, comme les reactions s’accomplissent en systkme gazeux, les chaleurs de formation a utiliser doivent se rapporter 1’6tat gazeux. Pour plusieurs des corps, nous les avons calculees a partir des chaleurs de vaporisation et de fusion. Nous sommes arrivks ainsi aux six equations thermochimiques ci-dessous, qui donnent les quantitks d’energie disponible dans la formation des homologues mkthylks successifs du benzene. C,H,. OH gaz + 2 CH, OHgaz = C,H, CH, gaz + 2 H,O gaz + CO + H, + 8,7 Cal. C,H, OH gaz + 3 CH, * OH gaz = C,H, (CH,), gaz + 3 H,O gaz + CO + H, + 19,2 Cal. C,H, * OH gaz + 4 CH, . OH gaz = CBH, (CH,), gaz + 4 H,O gaz + CO + H, + 26,4 Cal. C,H, * OH gaz + 5 CH, . OH gaz = C,H, (CH,), gaz + 5 H,O gaz + CO + H, + 49,3 Cal. C6H5* OH gaz + 6 CH, . OH gaz = C,H (CH,), gaz + 6 H,O gaz + CO + H, + 57,O Cal. C,H, * OH gaz + 7 CH, OH gaz = C, (CH,), gaz + 7 H,O gaz + CO + H, + 60,7 Cab

CGH,. OH + 7 CH,. OH = C,(CH& + 7 H,O + CO + H,

Page 9: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1054 - Ainsi qu’on le voit par ces chiffres, si l’on par t d’une molhcule

de phenol, c’est bien l’hexam6thylbenz8ne dont la formation est le plus riche en knergie disponible; de la un certain privilege dont bhnkficie sans doute cette formation. Mais cette condition Bnergktique n’esplique pas t.ontJ; car, B IN juger que d’aprks la grandeur de l’effet thermique, on derrait s’attcndre aussi B voir sc former l’hexarnbthylbenz~ne facile- ment partir du benztne lui-m6me mis en prksence de l’alcool inkthyliqua e t de l’alurnine. En effct, cornrne l’indique 1’6quation tjhermochiiniqne cj-aprks, ce processus serait> eilcwre plus riche en Bnergie clue les aiitres.

C,H, gaz -t 6 CH, . OH gaz = C,(CH& + 6 H,O + 63,4 Cal. Or, 1’cspi.rience nous a dkinontri: que le bcnzhne, trait6 par l’alcool

m6thyliclue c t l’alamine dans leu mPmes conditions opkratoires yne le pliitnol, ne clonnc lieu 8. aucune rkaction.

A vrai dire, le chimiste nc s’iitonnera pas de cette incrtic du benzbnr rnise en regard de In r6activitB relativemcnt facile du phbnol, car il sait combien la subst,i tut,ion d’un hycirosyle affiziblit la ritsistnncr: du noyeau imizkniyiie vis-a-vis dc>s substitutions ultBrieures. I1 y a don(: aussi a I’origine tle cet,tc formation privilkgike de I’hesamBtl iyl l~enz~n~ line question t ~ e st.nl)ilitb st,ructuralc rclevant du probltmic structnral du b e n z h e 1ui-mi.me. A d t j 6 dc bcaucoug cl’mt,rcs, leu plihomi?nes que nous a,voiis ohservks liourront pcut-Ctre contribuer a la rksoliit,ion de ce p r o b l h e , auquel plusieurs cherclieursl) se sont :ittaqm‘:s dans ct:s derni Plcs n n i h s cn s’nidnnt d’une part des rksult,atu fourriis par 1’Gtiide rCrntgrGriogi.Uy,lii~~~i~s cltis d6rivi.s aromatiques et tl’aiitre p r t dos conceptions iilectroniciuc!s de la matiere.

IV. SYSCEMES NAPHTOLS-ALCOOL MgTHYLI QUE. Le naphtol traith a dtb pr6alablement purifid par distillation dans le vide. Les

produits de la rCaction se prksentant ti I’btat de corps huileux, nous les avons recueillis dans un ballon dc forine appropridc.

Essais sur le P-nriphtol. - Nous avons prockdb B dcux sdries dont les caractkristiques e t les r6su&t,s sont r6sumi.s ci-aprbs:

Produits resultant

du naplitol

9,7 gr. 423 -426’ 19 h. 49 gr.

l ) Parmi lcs theories rdcemnient dniises, citons celle de Pauly, J. pr. [2] 98, 118 (1 918). Voir aussi sur ce sujet, Henrich, Theorien der organischen Chemie. 38me 6dition. Rraunschweig 1924, p. 187. Cette thborie, basCe sur les rbsultats obtenus par Debye e t Scherrer dans l’dtude rcentgknographique de la structure du benzdne faite au moyrn de la mdthode Claborbe par ces deus savants, expliquerait, entre autres phi.norn&nes, comment la prbsence d‘atonies tels que l’oxygdne e t le chlore, peut bouleverser le champ de forces qui assure la stabilith du noyeau benzbnique e t augmenter ainsi considdrablement sa rhactiviti..

Page 10: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1055 --

Le produit total de la reaction se &pare dans le ballon en deux couches: un liquide incolore contenant l’alcool mhthylique en exces, l’eau dfie B la deshydratation et un peu de naphtol surmontant une huile brune B fluorescence verte. Par analogie avec les rbultats observes sur le phenol, il y avait lieu de s u p p e r que cette huile ren- fermait, B c6tA du naphtol non transform6 rev616 par son odeur, une assez forte pro- portion de derives m8thyles de la naphtaline; cette supposition a 6th confirmbe par l’examen dont il sera par16 plus bas. Pour debarrasser l’huile du naphtol, nous l’avons additionnk de lessive potassique caustique et avons soumis le tout B la distillation par la vapeur d’eau. Le distillat, une suspension trouble, a 6th agithe avec de 1’6ther afin d’en extraire les corps organiques. La solution BthBrBe, sechbe sur du chlorure de calcium, abandonne par evaporation en quantith notable (au total 29 gr. pour lea essais de la s6rie 2) une huile jaune Bans odeur bien caractkristique. C’est ce liquide que nous avons examine plus specialernent en le fractionnant sous une pression reduite (13 mm.). Voici les observations enregistrbes dans cette premiere etude: Les fractions bouillant au dessus de 136O ont fourni par refroidissement B -15O, 3 grammes environ d’une substance constituee par des aiguilles blanches qui, apr8s deux cristallisations dans l’alcool, ont prhenth un point de fusion de 104-105°.

0,1531 gr. de subst. ont donne 0,5117 gr. CO, e t 0,1237 gr. H,O Calcule pour C,4H16 C 91,24 H 8,76% trouv6 ,, 91J5 ., 9,M%

L’absence d’oxygAue prouve bien que selon les pr6visions, on se trouve en presence d’un dbrivb mCthyl6 de la naphtaline. Les dhterminations cryoscopiques donnent comme moyenne le poids molbculaire 182, ce qui correspond senqiblement B une tbtram6thyl- naphtaline C,,H,, (p. m. calcule pour ce dernier corps 184). Le picratc recristallise dans I’alcool forrne de jolies aiguilles rouge orange, dont le point de fusion est de 184-185O. Daprks ce resultat il s’agit d‘une thtram6tbyl-naphtaline non encore decrite B notrc connaissance.

A juger selon les analyses e t les mesures cryoscopiques, les fractions bouillant au dessous de 13G0 paraissent aussi constituees par des melanges de different8 dkrivbs me- thyl& de la naphtaline. L’huile, obtenue en traitant avec l’ether les residus de la distillation 6, la vapeur d’eau, a 6t.4 de m8me fractionnee sous pression kduite. L’huile a passe pour la plus grande partie au dessus de 136O e t a fourni aussi par refroidissement une petite quautite du corps solide signal6 plus haut.

Ainsi qu’on le voit, les produits issus de la transformation du naphtol sont des melanges complexes qu’il est difficile de separer en leurs constituantsl) qui sont des derives methyles de la naphtaline. I1 suffit de marquer ici qu’en presence de I’alumine, les systkmes alcool m6thylique-naphtols2) se cornportent comme les systbmes alcool mB- thylique-phhnols et donnent lieu i3 la formation de derives methylhs de l’hydrocarbure.

v. SYSTI~ME PHI~NOL-ALCOOL I~THYLIQUE. Le remplacement de l’alcool mhthylique par l’alcool ethylique

offrait un inter& special psrce qu’on sait3) qu’en presence de l’alumine l’alcool Bthylique se deshydrate en se transformant en un melange

l) Un esaai de separation par sulfonation, d‘aprks Weissgerber e t Kruber (B. 52, 346 (1919)) n’a pas donne de r6sultats bien nets. Gee essais seront repris concurremment avec d’autres.

2, Nos esaais ont montr6 que l’a-naphtol se comportait de la m6me fapn que le /3-naphtol.

3, Gigorieff, XC 33, 173 (1901); Ipntieff, B. 37, 2986 (1904); Senderens, B1. [4] 3, 824 (1903). A. Ch. [8] 25, 505 (1912); R. Please, Am. SOC. 46, 390 (1924).

Page 11: Recherches sur la déshydration catalytique des systèmes phénols-alcools

- 1056 -

d’Bther et d’kthylbne, de composition variable suivant la temperature, sans donner par consbquent un systkme rkducteur, comiiie c’est le cas pour l’alcool mkthylique. On ne pouvait donc s’attendre it la formation de l’hexaethylbenz&ne 011 d’un homologue bthylk infbrieur. Effectivernent dans les trois essais effwtuBs dont les rksultats e t les caractkristiqucs figurent ci-aprk, aucun de ces corps n’a 6th dbcele.

C,H,. OH C,H, . OH Temperature Essai No

105,7 403O 3 h. 4,s 31,7 77,4 4350 2 h. 1/? 17,3

Le produit obtenu est un liquide jaune contenant des gouttes huileuses en sus- pension. Afin de &parer ees dernikres, nous avons extrait B 1’6ther; la solution 8thBde skch6e sur du chlorure de calcium abandonne une huile jaune qui a 6t6 lavbe B la soude caustique pour enlever le phenol en ex& e t fractionnee dans le vide. Ce fractionnement n’ayant pas permis d’isolor des corps B point d’ebullition constant, il faut conclure ti la formation d’un mblange complexe dont Ies constituents sont probablement des dbriv6s Btherks du phen6td; c’est ce que tendent B prouver la determination cryoscopique e t I’analyse, cette derniirre ayant d6niontr6 la presence de I’oxygirne.

Cetke sBrie met done en hidenee les reactions trPs diffbrontes, quant A leur mkcanisme, qui prenneiit naissance dans les systbmes a base d’alcool mkthylique et d’alcool Bthylique.

RI~SUMI~ .

L’action cat,alytique de l’alumine sur le systPme ph6nol-alcool m0tliylique aboutit it la formation de l’hexamethylbenzbne, aver de bons rendcments dans les condit,ions optima de temperature. La format,ion de ce corps est due 2~ la superposition d’une dhshydrat,at.ion et d’une rkluction ; le milieu rhducteur est crBB par la dbcomposition (~~sh~drofiBnRt,ioii) de l’alcool methylique.

I~’hexamkthylbcnzbne, qui prend naissance quelles que soient les proportions d’alcool mbthylique, e t quel que soit le ph6nol mis en (cuvre (pliknols plus ou moins mbthylbs, polyphhnols) constitue un exernple rcmarquable de f ormat8ion privilBgi6e.

En remplaprit le phenol par le naphtol, on obtient aussi des dbrivks niirthylks de l’hydrocarbure, tandis qu’en reniplaqant l’alcool rn6thylique par l’alcool kthyliquc, l’oxyghe phknoliquc, selon les prhisions, n’a pas B t B Bliininh par rkduction.

lJaborat,oire de Chimie technique et theorique de 1’Unircrsitk de Gcnbve. Clctobre 1924.