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Évaluation pour le développement: Faut- il revisiter nos critères d’évaluation? «… [L]es thèses fondamentales qui recouvrent l’ensemble du paradigme du développement peuvent difficilement prospérer, et les penseurs du développement doivent faire preuve d’une nouvelle humilité devant la complexité gran- dissante de la question du développement», Curry-Alder et al, 2014. Le présent article estime que «l’évaluation du développement» ne contribue pas assez au développement, compte tenu surtout des diffi- cultés auxquelles font face les pays du Sud. Il faut passer à une approche plus dynamique nous permeant d’évaluer POUR le développe- ment. Ce qui va nous obliger à nous assurer que les critères déterminants de ce que nous évaluons et la manière dont nous y prenons sont affinés, tant en théorie qu’en pratique, tout en étant conscient de ce qu’on entend par intervention qui favorise véritablement le développement.

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«… [L]es thèses fondamentales qui recouvrent l’ensemble du paradigme du développement peuvent difficilement prospérer, et les penseurs du développement doivent faire preuve d’une nouvelle humilité devant la complexité gran-dissante de la question du développement», Curry-Alder et al, 2014.

Le présent article estime que «l’évaluation du développement» ne contribue pas assez au développement, compte tenu surtout des diffi-cultés auxquelles font face les pays du Sud. Il faut passer à une approche plus dynamique nous permettant d’évaluer POUR le développe-ment. Ce qui va nous obliger à nous assurer que les critères déterminants de ce que nous évaluons et la manière dont nous y prenons sont affinés, tant en théorie qu’en pratique, tout en étant conscient de ce qu’on entend par intervention qui favorise véritablement le développement.

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eVALUation Matters / Premier trimestre 2017

Introduction

LA communauté de l’évalua-tion du développement est consciente que nos critères d’évaluation, surtout les omniprésents critères du

Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE, doivent être revisités. Quelques contributions pertinentes plaident pour l’affinement (par ex., Picciotto, 2014) ou un véritable changement (par ex., Heider, 2017) à la fois du concept et de la pratique. Mais qu’est-ce qui déterminera leur forme à l’avenir? Sur quelle base choisirons-nous les critères à écarter, affiner ou ajouter?

Même si suivant l’agenda 2030, le «dével-oppement» est une tâche qui incombe désormais à tous les pays, les pays à faibles revenus sont ceux qui font face aux diffi-cultés les plus graves. À notre avis, «l’évalu-ation du développement» ne contribue pas suffisamment au développement, compte tenu des difficultés auxquelles le Sud est confronté. Il faut passer à une approche plus dynamique susceptible de nous permettre d’évaluer POUR le développement.

Ce qui nous obligera à nous assurer que les critères déterminants de ce qu’il faut évaluer et de la manière dont il faut évaluer sont affinés, tant en théorie qu’en pratique, tout en ayant connaissance de ce qu’on entend par intervention1 qui favorise vrai-ment le développement.

Le présent article entend stimuler le débat autour de la question en proposant

quelques critères d’«évaluation pour le développement» (E4D) qui devraient nous aider à redéfinir les critères d’évaluation, et la manière dont ils sont appliqués aux interventions – tout en reconnaissant que même si les «interventions» ne sont pas la seule priorité de l’évaluation, elles restent une de ses grandes priorités. Par ailleurs, nous relevons les points communs entre l’approche holistique des interventions sanitaires qui caractérise la médecine orientale traditionnelle et la notion d’éval-uation pour le développement vue sous le prisme de systèmes complexes.

Une nouvelle ère pour l’évaluation du développement?

Au cours des deux dernières décennies, la fonction d’évaluation s’est véritablement mondialisée, et «l’évaluation du dével-oppement2» connaît actuellement un véritable essor. Nous sommes désormais entrés dans une ère où les difficultés auxquelles les évaluateurs travaillant dans le contexte du développement font face exigent de nouvelles manières de penser et de travailler (Picciotto, 2015). Les plans de développement, les idéologies dominantes et la notion de «meilleures pratiques» sont remplacés par un mélange bigarré de cadres, de modèles, d’objectifs et de pratiques. Dans le même temps, les crises et catastrophes naturelles et anthropiques déstabilisent de vastes parties du monde, et les pays et les régions qui s’affrontent pour le pouvoir influen-cent le potentiel et les stratégies de

Zenda Ofir, experte en évaluation

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Évaluation pour le développement: Faut-il revisiter nos critères d’évaluation?

C’est un parfait argument pour fusionner l’ «évaluation» dans le Nord et l’ «évaluation du développement» dans le Sud5 . Cepend-ant, le développement en Suisse, au Japon ou au Canada n’a pas le même sens que le développement au Népal, au Yémen, au Mali ou au Paraguay. Modifier des politiques ou des secteurs dans le cadre d’institutions et de systèmes robustes en s’appuyant sur de solides fondations (reposant sur les indicateurs de dévelop-pement) peut être difficile. Mais, c’est de loin moins compliqué que de définir une trajectoire positive de développement sur des bases fragiles, sur plusieurs fronts et sur une longue période, sans oublier l’in-terférence des asymétries de pouvoir, de ressources et de capacités.

développement. Le secteur privé est sur le point de devenir un bailleur de fonds de développement plus actif et plus visible. Et nous commençons seulement à comprendre quelle sera l’influence d’un monde interconnecté sur le développe-ment au moment où l’ambition de l’Agenda 2030 et ses objectifs de développement durable (ODD) devraient coïncider avec la quatrième révolution industrielle3 , et l’économie numérique avec «l’écono-mie humaine4»

Le fait que l’Agenda 2030 rappelle avec insistance que la responsabilité du dével-oppement incombe à tous les pays vient souligner le fait que le développement est un processus et non un objectif précis.

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eVALUation Matters / Premier trimestre 2017

C’est pourquoi nous ne pouvons réus-sir la fusion complète de l’ «évaluation du développement» et de l’ «évaluation» tout court que seulement si nous sommes sûrs que nos théories et pratiques nous permettent véritablement de servir ces pays et ces sociétés qui font face à des défis majeurs de développement. Après tout, les théories fondamentales qui ont façonné notre profession proviennent des pays riches de l’Occident avec peu de référence aux contextes du monde en dévelop-pement. Par conséquent, nous devons nous assurer que nos théories, pratiques, normes, critères et questions d’évaluation nous aident à évaluer pour un développe-ment qui améliore vraiment le bien-être de nos sociétés et de leurs écosystèmes.

Le problème: l’évaluation du développement ne favorise pas toujours le développement

L’essentiel pour une intervention de dével-oppement est de contribuer au développe-ment. Mais, nous arrive-t-il de réfléchir à ce que cela signifie véritablement? Sommes-nous trop sûrs de notre compréhension du concept de développement? Sommes-nous devenus des consommateurs trop complaisants des affirmations sur l’effi-cacité du développement et l’évaluation du développement?

Le développement reste un concept à controverse; les différences entre les perspectives ascendantes/descendantes, ou micro/macro continuent à donner naissance à des idées et des idéologies très variées différentes sur la manière dont on peut parvenir au développe-ment (Curry-Alder, 2014). Par conséquent, il est très difficile pour un évaluateur d’apprécier le bien-fondé d’un modèle spécifique de développement à un stade donné de l’évolution d’un pays ou d’une région. Nous pouvons être clairs sur l’idéologie, les valeurs et le modèle utilisé

pour apprécier le bien-fondé, la valeur ou l’importance d’une intervention de développement. Comme en témoignent partiellement les critères d’évaluation que nous retenons dans le ciblage de nos interventions, et la manière dont nous les appliquons dans la réalité.

Nous devons, dans le même temps, tenir compte des facteurs suivants:

❚ Les progrès en matière de dévelop-pement sont presque toujours envis-agés et mesurés à l’échelon d’un pays (à savoir, sociétal, national) et d’une région, comme l’atteste la prolifération des indices mondiaux et les modalités d’établissement des rapports pour la réalisation des ODD.

❚ Les définitions de l’efficacité du dével-oppement confirment la nécessité d’une action collective, sinon coordon-née de la part d’une gamme d’acteurs locaux et étrangers. L’efficacité du développement est une mesure de l’impact cumulé de ces acteurs, et la responsabilité les résultats est part-agée par plusieurs acteurs.

❚ D’un point de vue national, on ne peut «obtenir le développement sans le dével-oppement» (Chang, 2010). C’est notam-ment le cas lorsque des interventions dites de développement ciblent les conditions propices au développement comme la réduction de la pauvreté, le développement personnel ou la satis-faction des besoins fondamentaux sans aucune vision de la capacité du pays à soutenir, à long terme, une trajectoire positive de développement.

❚ Un pays qui enregistre des progrès en matière de développement aura besoin de trajectoires positives sur plusieurs aspects interconnectés de la vie de ses citoyens. Une intervention dont le ciblage est trop étroit et

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Évaluation pour le développement: Faut-il revisiter nos critères d’évaluation?

qui n’est pas mise en œuvre en temps opportun de concert avec d’autres interventions ou objectifs, ou qui donne des résultats et impacts local-isés ou insignifiants en comparaison avec ce qui doit être fait pour assurer une trajectoire positive de dévelop-pement, ne peut pas être considérée comme une contribution importante au développement.

❚ Ce qui pose problème en particulier dans ce que Chang qualifie d’ «ersatz de développement», qu’il soit soutenu par l’aide ou par des organisations caritatives, le secteur privé ou un gouvernement – qui s’appuie sur des interventions non coordonnées qui ne tirent pas parti des synergies entre les interventions et n’offrent pas la cohérence susceptible de

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«Non seulement, nous n’arrivons pas souvent à remplir les exigences les plus élevées des théories du changement qui requièrent l’établissement de liens entre l’intervention et un contexte ou modèle spécifique de développement, mais aussi nos critères d’évaluation ne nous obligent pas en pratique à examiner toutes les questions qui comptent pour le développement».

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Évaluation pour le développement: Faut-il revisiter nos critères d’évaluation? 71

faciliter le changement à une plus grande échelle.

❚ Si les résultats et les impacts obtenus ne soutiennent pas ou ne favorisent pas l’action spontanée entraînant d’autres effets ou répercussions d’impact, une intervention de dével-oppement ne saurait être considérée comme un succès. Elle peut même être une source de régression si les gens sont désillusionnés ou découragés.

En conclusion, toutes les «interventions de développement» menées dans un pays à faibles revenus ne contribuent pas toujo-urs au développement, même si elles font partie du plan de développement national ou local, répondent aux attentes de la «communauté», produisent les résultats ou impacts désirés, et/ou ont un effet mira-cle. Quand bien même elles réussissent à renforcer les compétences, permettent la construction d’infrastructures, amélior-ent l’accès aux services de santé, dévelop-pent le leadership ou sauvent des vies.

Non seulement, nous n’arrivons pas souvent à remplir les exigences les plus élevées des théories du changement qui requièrent l’établissement de liens entre l’intervention et un contexte ou modèle spécifique de dévelop-pement, mais aussi nos critères d’évaluation ne nous obligent pas en pratique à examiner toutes les questions qui comptent pour le développement.

La solution: Évaluer pour le développement

Si nous mettons l’accent sur une approche plus dynamique et holistique de l’évaluation pour le développement, nous pourrions ainsi affiner nos critères. Cette approche de l’évaluation part de

l’hypothèse que nous acceptons l’in-tégralité des conséquences pratiques de la vision du développement comme un système adaptatif complexe (SAC) (Rama-lingam, 2014). Nous devons ensuite nous assurer que nous avons intégré cette vision dans nos critères d’évaluation.

Vue sous cet angle, l’évaluation pour le développement (E4D) présente au moins cinq caractéristiques distinctives6:

1. Le développement en tant que système adaptatif complexe

L’E4D voit le développement à travers le prisme de systèmes «socio-écologiques» adaptatifs complexes.

L’E4D reconnaît que le développement et les interventions de développement sont des systèmes socio-écologiques adaptatifs complexes7 (Ramalingam, 2014; Orstrom, 2009). Ce qui signifie que les évaluateurs doivent faire face aux conséquences de la dynamique et des propriétés telles que l’interdépendance, la non-linéarité, la coévolution, la dépendance de sentier, l’auto-organisation et l’émergence qui affectent les relations entre les interven-tions et à l’intérieur de celles-ci, ainsi que les modèles qui en résultent au sein

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de la société. Nous devons affiner nos priorités et nos critères d’évaluation, en ayant conscience qu’une approche SAC a des conséquences sur la pratique de l’éval-uation qui vont bien au-delà de la gestion et de l’apprentissage adaptatifs guidés par l’évaluation.

2. Tenir compte des préalables

L’E4D accorde plus d’importance aux préal-ables du succès au détriment des théories du changement trop simplistes et des notions rigides de «résultats».

La vague actuelle de plans reposant sur les théories du changement remplissent plusieurs objectifs importants. Cependant, ils sont souvent trop simplistes au vu de la réalité, et les hypothèses et les résultats sous-jacents sont souvent si mal concep-tualisés qu’ils perdent pratiquement tout sens. Les planificateurs et les évaluateurs du développement doivent mettre plus d’ac-cent sur l’identification et la compréhension d’éventuels préalables à toute réussite8 afin d’accroître les chances d’obtenir des résul-tats et impacts de développement durables, dans un contexte en mutation.

Dans une certaine mesure, les préalables peuvent être identifiés grâce aux connais-sances et enseignements (puisés dans la littérature et l’expérience), la compréhen-sion des prédispositions d’une société dans un contexte précis, et l’apprentissage fondé sur les données probantes9.

3. Tenir compte des trajectoires

L’E4D privilégie les trajectoires d’interven-tion et de développement par rapport aux résultats en tant qu’instantanés.

L’accent mis actuellement sur la gestion adaptative souligne la nécessité de réal-iser les évaluations en tenant compte des trajectoires (à diverses échelles temporelles et spatiales). Par exemple, le sentier suivi

par une intervention afin de contribuer aux impacts de développement désirés qui se rapportent à leur tour au sentier de développement d’une société, d’un pays ou d’une région.

Une intervention peut être paralysée ou échouer avant de produire des résultats. Elle peut soudainement atteindre un seuil ou échouer à cause d’un changement de contexte qui bloque un sentier essentiel. Ainsi, si l’évaluation est faite au mauvais moment, les conclusions ne refléteront pas la contribution potentielle de l’interven-tion au développement. D’où la nécessité impérieuse non seulement s’assurer le suivi, mais aussi de comprendre les trajectoires de progrès et de développement à travers la gestion et l’apprentissage adaptatifs.

4. Se positionner pour produire de l’impact sur le développement

L’E4D se préoccupe de savoir si l’interven-tion est bien positionnée pour avoir un impact sur le développement.

Si on les examine de près, l’on se rendra compte que les critères couramment utilisés que sont la pertinence, l’effi-cacité et l’impact ne suffisent pas pour bien comprendre la justesse d’une inter-vention, ou son positionnement afin qu’elle contribue au développement. Par conséquent, il faut en outre se pencher sur la nature voulue et réelle, ainsi que la portée de l’intervention et de ses résultats et impacts. Ce qui permet de déterminer la couverture et l’importance de l’interven-tion par rapport à un contexte de dévelop-pement précis. Une telle analyse mettra par exemple l’accent sur:

❚ La conception de l’intervention: Les résultats et impacts désirés sont-ils bien liés à un modèle de développe-ment? L’intervention cible-t-elle les causes immédiates, intermédiaires ou profondes d’un problème?

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7373Évaluation pour le développement: Faut-il revisiter nos critères d’évaluation?

Facilite ou empêche-t-elle le changement?

❚ La mise en œuvre: L’intervention est-elle initiée au bon moment, compte tenu des priorités, des besoins ou des stratégies de développement de la société, du pays ou de la région? Y a-t-il quelques signes de mesures catalytiques susceptibles d’accélérer les progrès vers un impact sur le développement ou ayant la capac-ité de le faire durer? Existe-t-il des boucles de rétroaction bénéfiques ou renforce-t-elle ces boucles, ou alors des seuils sont-ils atteints?

❚ Les changements désirés ou réels: Les changements sont-ils marginaux, ont-ils un impact sur le développe-ment ou sont-ils transformateurs? Concernent-ils de grands change-ments sociaux ou des systèmes entiers, de modestes changements marginaux de direction vers un résultat précis? Les actions menées produisent-elles ou ont-elles produit des effets d’entraîne-ment supérieurs aux attentes? L’ampleur, la portée et la couverture des changements (désirés) (par exemple, «une amélioration de 2 %) sont-ils suffisants pour justifier

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l’intervention? La couverture de la population et de son écosystème est-elle suffisante? Les groupes vulnérables ou marginalisés ont-ils été suffisamment touchés? Les ressources sont-elles suffisantes ou adaptées pour permettre les changements désirés?

5. Gérer le risque pour un impact durable (sur le développement).

L’E4D met l’accent sur la gestion du risque de non-obtention de la totalité des résul-tats ou impacts désirés, ou du risque qu’ils pourraient ne pas être assez durables pour soutenir le développement.

L’un des points importants est de comprendre que si les impacts et les contributions au développement doivent être durables, nous devons davantage nuancer la façon dont nous évaluons la «durabilité». En général, elle est considérée comme un critère d’évaluation du dével-oppement, alors qu’elle est toujours abordée de manière très superficielle. Il est injuste de considérer une interven-tion comme une «réussite» si les résultats et impacts positifs émergents ou obtenus ne soutiennent pas, ou ne permettent pas aux autres changements de développe-ment désirés de se réaliser.

Il faut mettre davantage l’accent sur la gestion des risques afin de garantir les meilleures chances de succès en se fondant sur la double stratégie consistant à i) renforcer les résultats positifs de développement (potentiels ou émergents), et ii) tenir compte des facteurs susceptibles d’empêcher l’obtention de ces résultats ou leur durabilité.

En conséquence, les priorités ci-après devi-ennent importantes pour l’évaluation:

1. Renforcement par la complémentarité: Dans les pays à faibles revenus dont

les indicateurs de développement sont mauvais, les efforts de développement doivent être déployés de manière systématique, cohérente et en syner-gie. Autrement dit, les activités de chaque intervention (et des diverses interventions) doivent être mises en œuvre suivant un certain ordre, successivement ou simultanément, en s’appuyant les unes sur les autres ou en se renforçant les unes les autres afin de produire le plus d’impact. Pour refléter une trajectoire positive de développement dans une société, les activités doivent s’étaler sur des décen-nies, dans les écosystèmes et entre eux, intégrant les aspects économiques, socioculturels et environnementaux. Par conséquent, les évaluateurs doivent s’assurer qu’une attention suffisante est accordée à la dynamique résultant de l’interdépendance des interventions, actions, objectifs, etc. (Nilsson et al, 2016). C’est-à-dire établir dans quelle mesure une intervention ou un ensemble d’interventions a tiré parti du pouvoir de l’effet synergique grâce auquel l’ensemble est plus effi-cace que la somme des parties.

2. Neutralisation des effets secondaires négatifs. Nous ne pouvons pas estimer qu’une intervention de développement est «réussie» ou a produit de «l’impact» si nous n’examinons pas les conséquences, effets ou impacts négatifs imprévus qui ont pu considérablement réduire voire annuler ses résultats et impacts posi-tifs (ou qui sont susceptibles d’avoir de telles conséquences à l’avenir). | Nous devons établir si les concepteurs et les réalisateurs de l’intervention ont fait assez d’efforts pour neutraliser ces effets négatifs. Il faut aussi rechercher de façon méthodique les effets secon-daires, positifs et négatifs, ainsi que les influences qui empêchent, gênent

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peut également affecter la culture sociétale. Elle a de sérieuses implica-tions sur le développement, mais elle est rarement prise en compte dans les travaux d’évaluation. Si nous voulons assurer la durabilité des impacts sur le développement, cet aspect doit être mis au centre des préoccupations de la communauté de l’évaluation.

Vers l’élaboration d’un cadre de l’E4D

Il existe des similitudes frappantes entre l’intérêt croissant porté à une approche plus holistique du développement fondée sur des systèmes complexes, et l’intérêt crois-sant accordé au potentiel de la médecine intégrative pour le traitement des maladies chroniques10 . Cette tendance a suscité un regain d’intérêt pour la médecine tradi-tionnelle orientale dont l’approche holis-tique est basée sur des systèmes venant d’Asie qui, à leur tour, se fondent sur une vision intégrée d’un système traditionnel de gouvernance. Il est de plus en plus évident que les mélanges complexes de plantes et d’autres traitements utilisés par cette médecine sont plus efficaces et mieux adaptés à la gestion des questions sani-taires et la prévention ou la prise en charge des maladies chroniques (Kim et al, 2015).

Les caractéristiques de l’approche holis-tique de «l’évaluation pour le développe-ment» correspondent assez parfaitement à celles de la médecine traditionnelle orientale. Des efforts ont été faits pour mettre en lumière les similitudes entre les diagrammes des figures 2A et 2B11 . Certes, les concepts ou les cadres d’une discipline ou pratique doivent être appliqués avec précaution à une autre disci-pline ou pratique, mais, il y a des raisons de ne pas rejeter purement et simplement les synergies évidentes entre les deux disci-plines, à savoir l’intervention sur l’état de santé d’une personne et l’intervention

ou facilitent et favorisent la réussite, et utiliser ces informations dans l’évaluation.

3. Produire de l’impact et le pérenniser: le faire durer”. La mise en œuvre doit produire des résultats et impacts de développement, et de manière à permet-tre au changement positif de durer, ou favoriser d’autres impacts positifs. C’est pourquoi les priorités de l’évaluation sont axées sur l’efficacité et l’efficience – qui sont deux critères d’évaluation bien connus du CAD de l’OCDE. Ce qui justifie par ailleurs le recours croissant à la gestion et à l’apprentissage adaptatifs. Nous devons par conséquent évaluer le niveau d’application adéquate de la gestion et de l’apprentissage adaptatifs dans une intervention afin d’assurer qu’elle est adaptée, le cas échéant, mais toujours dans un système comptable de résultats réalistes et adéquats. En outre, si nous voulons garantir la «pérennité» des changements positifs, nous devons aussi prêter attention à ce que nous désignons, en l’absence d’un terme plus approprié, la légitim-ité d’une intervention. Elle est fonc-tion des valeurs et perspectives d’une société et des parties prenantes, par exemple, il faut s’assurer que les points de vue des parties prenantes, des associations, ou encore des aspects de la culture, sont suffisamment pris en compte dans la conception et la mise en œuvre de l’intervention. | L’un des aspects essentiels à prendre en compte dans l’E4D c’est la coévo-lution de la culture sociétale et du contexte (figure 1). Elle détermine les modèles mentaux ainsi que ses sché-mas de réflexion et de comportement d’une société, à savoir son psychisme, sa disponibilité et sa réaction à l’égard d’une intervention spécifique (Ofir, 2016). À son tour, une intervention

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eVALUation Matters / Premier trimestre 2017

sur le niveau de développement d’un groupe social. La médecine orientale considère le corps humain comme une version miniaturisée de l’univers, suivant à une vision fractale de la vie. Ce qui cadre parfaitement avec les principes de la biol-ogie systémique qui joue désormais un rôle central dans l’étude de la biologie et de la médecine. L’évolution récente de la médecine corps-esprit et de l’épigénétique ont aussi montré que notre constitution génétique et les réactions biochimiques sont considérablement influencées par les interactions complexes qui se produis-ent dans notre corps et notre esprit, ainsi qu’avec notre comportement et notre envi-ronnement social et physique.

D’autres travaux sont en cours pour clarifier les synergies et les différences entre les deux systèmes, et comprendre les implications sur le développement et son application.

Revisiter nos critères d'évaluation

Malgré le dynamisme actuel de notre profession, l’évaluation doit évoluer rapidement pour devenir une force plus puissante au soutien du développement durable. Nous devons innover, surtout ceux qui travaillent dans le monde en dével-oppement et font face quotidiennement à de grands défis de développement.

Figure 1: Éléments de la coévolution de la culture sociétale et du contexte déterminant la psychologie et les schémas de comportement d’une société.

Source: Ofir, 2016.

Culture Sociétale Contexte Histoire & Temps

Expression dans les symboless

Rituels "Héros" Mèmes & dèmes

Constellations de puis-sances mondiales Dynamiques relationnelles globales Changement des écosys-tèmes mondiaux

Environnement physique Confort économique Climat politique Conditions sociales

Normes Relations interpersonnelles Lois Institutions

Valeurs partagées

Hypothèses et croy-ances sous-jacentes

La connaissance des citoyens, Manière de

percevoir

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Évaluation pour le développement: Faut-il revisiter nos critères d’évaluation? 77

eVALUation Matters / Premier trimestre 2017

Figure 2A: Composantes d'un nouveau cadre d'évaluation pour le développement (e4D) pour les interventions

Figure 2B: Caractéristiques de l’approche holistique des interventions de la médecine traditionnelle orientale

Neutralisant Assistant/officiel

Zuo

Acheminement, Conservation Ambassadeur

Shi

Complémentaire Ministre Chen

COMPOSIT

ION

ÉVOLUTION

DE LA SANTÉ

ENVELOPPEUTILISATION

Principal Roi/Président

Jin

Transmission de la plantes principale

Efficacité principale du médicament

Constituants d'acheminement et de conservation pour faciliter

l'acheminement des plantes au lieu ciblé, et pour les conserver longtemps

dans les cellules.

Composants neutralisants pour réduire les effets

secondaires

composants complémentaires

pour renforcer l'éf-ficacité de la plante

principale

Composants complémen-

taires

Livraison, maintien

Composants complémen-

taires

CONDITIO

NS

PRÉALABLE

STRAJECTOIRES

CONTEXTECULTURE

DISPOSITION

Intervention majeure

Impact sur le développementPertinenceCouverture

EquitéEfficacité

ImportancePOSITIONNEMENT POUR

L'IMPACT (DÉVELOPPEMENT)

GESTION DES RISQUESDÉVELOPPEMENT DURABLE

S'y tenir:EfficacitéLégitimitéDurabilité

Réactivité (à la culture et au contexte)

Réduire les effets secondaires

Neutralisation (conséquences et influences négatives)

Renforcement de l'impactCohérenceSynergie

(Effet synergique)

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Évaluation pour le développement: Faut-il revisiter nos critères d’évaluation? 78

eVALUation Matters / Premier trimestre 2017

Notes de bas de page

1 Les politiques, stratégies, portefeuilles, thèmes, programmes, projets, événements, processus, etc. les actions systématiquement planifiées et exécutées qui engendrent des perturbations à l’intérieur et en dehors des systèmes.

2 Définie dans le Glossaire du CAD de l’OCDE comme étant «[l]’appréciation systématique et objective d'un projet, d'un programme ou d'une politique, en cours ou terminé, de sa conception, de sa mise en œuvre et de ses résultats».

3 Il paraît de plus en plus probable que la Quatrième révo-lution industrielle va modifier, la nature du travail, des entreprises et du leadership et changer profondément les aspects sociaux, techniques et éthiques du développement. Le cloud computing, les réseaux intelligents, les services d’Internet mobile et les réseaux sociaux s’intègrent à l’in-telligence artificielle, à la robotique de pointe, et à la fusion des technologies pour brouiller les frontières entre les mondes physique, numérique et biologique. Les asymétries de pouvoir

4 Une conception plus holistique, moins égoïste des besoins et des intérêts des sociétés, et qui considère l’humanité comme un ensemble.

5 Il est toujours important d’établir une distinction (certes superficielle) entre le Nord et le Sud. Les différences entre les indicateurs de développement de ces deux parties du monde sont trop saisissantes pour être ignorées.

6 Il s’agit d’une liste préliminaire destinée à stimuler une réflexion approfondie. Elle sera bientôt suivie d’une publi-cation plus détaillée.

7 Système cohérent et facteurs biophysiques et sociaux qui interagissent régulièrement, de manière durable; défini à plusieurs échelons spatiaux, temporels et organisation-nels; un ensemble de ressources essentielles (naturelles, socioéconomiques, et culturelles) dont le flux et l’utilisation sont régis par une combinaison de systèmes écologiques et sociaux; un système perpétuellement dynamique, complexe qui s’adapte sans cesse.

8 Un préalable est une condition nécessaire et non suffisante pour que le changement se produise. Ils englobent les conditions initiales et celles qui émergent à mesure que l’intervention est mise en œuvre. Il peut s’agir, sans s’y limiter, de ce qui est couramment appelé l’«environnement propice».

9 Une raison supplémentaire d’adopter la gestion et l’ap-prentissage adaptatifs dans les activités de développement et d’évaluation.

10 La médecine intégrative combine l’approche réduction-niste de la médecine conventionnelle et les approches holistiques de la médecine alternative à la gestion des problèmes sanitaires.

11 La longueur de cet article ne permet pas d’expliquer de manière exhaustive; l’auteur peut, sur demande, vous fournir des explications plus poussées.

12 Les ajustements potentiels aux critères d'évaluation sont brièvement abordés ici et seront détaillés dans un prochain document.

13 Conformément à l'initiative «Faire un développement différent».

Les critères d’évaluation, notam-ment ceux du CAD, doivent refléter les valeurs que nous prônons sur ce qui soit être privilégié si nous voulons que l’évaluation contribue au développement. La conceptualisation et l’application des critères peuvent avoir une forte influence sur notre travail, et sur le développement. Par conséquent, il est important et urgent d’examiner d’un œil critique et de réviser ces critères afin d’innover et de nuancer à la fois ce que nous évaluons et la manière dont nous évaluons.

Dans cet article, nous avons proposé une approche à cette fin, en mettant en lumière les implications de l’E4D dans notre quête

d’un ensemble affiné de critères d’évalu-ation12 . Les aspects à prendre en compte sont résumés à la figure 2A. La mise en œuvre de certaines des mesures à prendre ne sera probablement pas aisée. Mais, si nous voulons évaluer différemment13 , il faut que les plus puissants acteurs de la profession, à savoir les bailleurs de fonds et les commanditaires des évaluations dans le Sud et dans le Nord, réfléchissent à la meilleure stratégie pour permettre à notre profession de contribuer véritablement au développement. Par ailleurs, il faut que nos critères, théories, pratiques et normes d’évaluation traduisent entièrement cette volonté.

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Évaluation pour le développement: Faut-il revisiter nos critères d’évaluation? 79

eVALUation Matters / Premier trimestre 2017

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Références

Pro

fil de

l’au

teur

Zenda Ofir est une spécialiste sud-africaine de l’évaluation. Titulaire d’un PhD en chimie, elle a été administratrice prin-cipale de programmes au Conseil national des sciences d’Afrique du Sud et Directrice de la recherche à l’université de Prétoria avant de se tourner vers l’évaluation. Depuis 2000, elle a rempli de nombreuses missions d’évaluation aux niveaux local et international, avec un accent sur l’Af-rique et l’Asie, et conseillé des organisations comme le GAVI, le PNUD, CLEAR-AA, le FIDA, l’AGRA et la Fondation Rockefeller. Elle a été présidente de l’AfrEA, Vice-présidente de l’IOCE, et membre du Conseil d’administration de l’AEA. Elle est par ailleurs membre des conseils éditoriaux pour l’évaluation et la planification des programmes de l’African Evaluation Journal. Elle est aussi ensei-gnante invitée à l’université d’Hiroshima, et a enseigné à l’univer-sité des Nations Unies à Tokyo, et a été faite Professeur honoraire à l’université de Stellenbosch, en Afrique du Sud, une distinction venue récompenser sa réussite professionnelle en dehors du monde académique.