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52 522 - Mai - Juin 2008 Droit et jurisprudence Aude CHARBONNEL Juriste Centre de droit JuriSanté, CNEH C ette jurisprudence récente donne l’occasion de s’intéresser à la délicate question de la distinction entre faute personnelle détachable du service et faute de service, notamment dans la fonction publique hospitalière 2 . Le professionnel de santé est, par prin- cipe, libre de ses actes et personnelle- ment responsable. Cependant, les fautes commises par un agent public, dans le cadre de l’exercice de ses fonc- tions, engagent la responsabilité de l’ad- ministration hospitalière et sont jugées devant le tribunal administratif. En revanche, si les juges considèrent que l’agent n’a pas commis une faute de service mais une faute détachable de la fonction, il sera condamné sur ses deniers personnels à indemniser la victime, la faute personnelle, détacha- ble de la fonction étant celle qui révèle « l’homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences 3 ». Le débat sur le caractère détachable ou non de la faute est essentiel, car de son issue dépendent la répartition des compétences entre juge civil et juge administratif, ainsi que la responsabi- lité civile ou non de l’agent. La difficulté réside dans le fait qu’il n’y a pas de défi- nition stricte de la faute personnelle détachable du service : la répartition entre faute de service, faute personnelle non dépourvue de lien avec le service et faute personnelle détachable du service n’est pas évidente. Le panorama de la jurisprudence récente illustre cette difficulté de quali- fication et, surtout, les différences d’in- terprétation entre les magistrats sur des faits identiques. La Cour de cassation a une appréciation stricte du caractère détachable de la faute personnelle et il n’est pas rare de la voir censurer les décisions des juges du fond 4 . La faute s’apprécie donc au cas par cas, avec une grande marge d’appréciation du juge. La pratique a toutefois permis de dégager deux types de faute person- nelle, détachables du service, cette faute étant soit strictement extérieure à l’ac- tivité professionnelle, soit d’une gravité telle qu’elle ne peut être couverte par l’administration. Faute totalement détachable de l’activité du service Le caractère détachable de la faute peut revêtir deux formes : matérielle ou psychologique. Absence de lien entre la faute et le service Ce cas de figure est relativement facile à appréhender. Il s’agit par exemple pour un agent de causer un dommage avec un bien appartenant à l’hôpital, mais utilisé à des fins personnelles. Ou encore des soins donnés par le médecin en dehors de l’établissement. Mais s’il existe un lien avec le service, aussi ténu soit-il, alors la faute de l’agent pourra être couverte par l’établissement. Faute dictée par des considérations personnelles La faute personnelle, détachable du service, est retenue de façon exception- nelle et, parfois, bien que le fait domma- geable ait été dicté par des considérations personnelles, les juges accordent la primauté au lien entre cette faute et le service. Un arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux illustre ce point 5 : « Il résulte de l’instruction que si les agisse- ments de l’agresseur de Mme G… ont été constitutifs d’une faute personnelle, déta- chable de l’exécution du service, ils n’en n’ont pas moins été commis alors que l’in- téressé était de service à l’hôpital ; que Faute personnelle, détachable du service État de la jurisprudence Le 20 février 2008, la Cour de cassation a considéré que le fait pour des médecins de formuler des critiques à l’encontre d’un confrère « ne relevait en rien d’un comportement constitutif d’une faute personnelle détachable du service 1 ». Les magistrats retiennent, en effet, que des jugements ou appréciations, s’ils sont objectifs, font partie de la mission conférée aux agents publics.

Faute personnelle, détachable du servicefulltext.bdsp.ehesp.fr/FHF/RHF/2008/522/52_55.pdf · 54 N° 522 - Mai - Juin 2008 Droit et jurisprudence lement punissable dès lors que cette

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Aude CHARBONNELJuriste

Centre de droit JuriSanté, CNEH

Cette jurisprudence récente donnel’occasion de s’intéresser à ladélicate question de la distinction

entre faute personnelle détachable duservice et faute de service, notammentdans la fonction publique hospitalière 2.Le professionnel de santé est, par prin-cipe, libre de ses actes et personnelle-ment responsable. Cependant, lesfautes commises par un agent public,dans le cadre de l’exercice de ses fonc-tions, engagent la responsabilité de l’ad-ministration hospitalière et sont jugéesdevant le tribunal administratif. Enrevanche, si les juges considèrent quel’agent n’a pas commis une faute deservice mais une faute détachable de lafonction, il sera condamné sur sesdeniers personnels à indemniser lavictime, la faute personnelle, détacha-ble de la fonction étant celle qui révèle« l’homme avec ses faiblesses, sespassions, ses imprudences 3».Le débat sur le caractère détachable ounon de la faute est essentiel, car de sonissue dépendent la répartition descompétences entre juge civil et juge

administratif, ainsi que la responsabi-lité civile ou non de l’agent. La difficultéréside dans le fait qu’il n’y a pas de défi-nition stricte de la faute personnelledétachable du service : la répartitionentre faute de service, faute personnellenon dépourvue de lien avec le serviceet faute personnelle détachable duservice n’est pas évidente.Le panorama de la jurisprudencerécente illustre cette difficulté de quali-fication et, surtout, les différences d’in-terprétation entre les magistrats sur desfaits identiques. La Cour de cassation aune appréciation stricte du caractèredétachable de la faute personnelle etil n’est pas rare de la voir censurer lesdécisions des juges du fond 4. La fautes’apprécie donc au cas par cas, avecune grande marge d’appréciation dujuge. La pratique a toutefois permisde dégager deux types de faute person-nelle, détachables du service, cette fauteétant soit strictement extérieure à l’ac-tivité professionnelle, soit d’une gravitételle qu’elle ne peut être couverte parl’administration.

Faute totalement détachablede l’activité du serviceLe caractère détachable de la faute peutrevêtir deux formes : matérielle oupsychologique.

Absence de lien entre la faute et le serviceCe cas de figure est relativement facileà appréhender. Il s’agit par exemple pourun agent de causer un dommage avec unbien appartenant à l’hôpital, mais utiliséà des fins personnelles. Ou encore dessoins donnés par le médecin en dehorsde l’établissement.Mais s’il existe un lien avec le service,aussi ténu soit-il, alors la faute de l’agentpourra être couverte par l’établissement.

Faute dictée par des considérations personnellesLa faute personnelle, détachable duservice, est retenue de façon exception-nelle et, parfois, bien que le fait domma-geable ait été dicté par des considérationspersonnelles, les juges accordent laprimauté au lien entre cette faute et leservice. Un arrêt de la cour administratived’appel de Bordeaux illustre ce point 5: « Ilrésulte de l’instruction que si les agisse-ments de l’agresseur de Mme G… ont étéconstitutifs d’une faute personnelle, déta-chable de l’exécution du service, ils n’enn’ont pas moins été commis alors que l’in-téressé était de service à l’hôpital ; que

Faute personnelle,détachable du service

État de la jurisprudence

Le 20 février 2008, la Cour de cassation a considéré que le faitpour des médecins de formuler des critiques à l’encontre d’un confrère «ne relevait en rien d’un comportementconstitutif d’une faute personnelle détachable du service 1». Les magistrats retiennent, en effet, que des jugements ou appréciations, s’ils sont objectifs, font partie de la missionconférée aux agents publics.

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cette faute personnelle n’étant donc pasdépourvue de lien avec le service, les agis-sements de cet agent hospitalier enga-gent (…) la responsabilité du centrehospitalier Sud-Réunion à l’égard deMme G…». Le lien entre l’agression et leservice est, en l’espèce, plus que discu-table et l’on peut considérer que l’agent aagi dans l’intention de nuire au patient.Mais les juges considèrent que si cettefaute est bien personnelle, elle est toute-fois rattachable au service. Cette juris-prudence est une illustration du conceptde la faute personnelle non dépourvue detout lien avec le service. Depuis l’arrêtDemoiselle Mimeur du 18 novembre1949, le Conseil d’État considère qu’unefaute personnelle n’est pas dépourvue detout lien avec le service si elle a étécommise dans le service ou avec lesmoyens du service. La haute assembléea récemment précisé cette notion et sesconséquences sur le droit de la respon-sabilité administrative : «La victime nonfautive d’un préjudice causé par l’agentd’une administration peut, dès lors quele comportement de cet agent n’est pasdépourvu de tout lien avec le service,demander au juge administratif decondamner cette administration à répa-rer intégralement ce préjudice, quandbien même aucune faute ne pourrait-elleêtre imputée au service et le préjudiceserait-il entièrement imputable à la fautepersonnelle commise par l’agent, laquelle,par sa gravité, devrait être regardéecomme détachable du service 6.» Cettesolution est favorable à la victime qui setrouve en présence d’un débiteur solvable.

Faute d’une particulière et exceptionnelle gravitéCette hypothèse est souvent illustrée parla célèbre affaire du médecin qui a pris lafuite lors d’un incendie, laissant le patientanesthésié sur la table d’opération 7.Selon une jurisprudence constante de laCour de cassation 8, constitue une fautepersonnelle, détachable du service, lafaute qui révèle un manquement volon-taire et inexcusable à des obligationsd’ordre professionnel et déontologique.Le Conseil d’État a également adoptécette définition, comme le montre l’arrêtrendu le 28 décembre 2001 9. La hautejuridiction a reconnu la qualificationde faute personnelle, détachable duservice, à l’encontre d’un médecin, chefde service, qui avait, délibérément, tardéà révéler une erreur médicale commisepar son équipe. En l’espèce, un patients’était vu injecter, par erreur, de l’eau nonstérile contenue dans une seringue et futvictime d’un choc septique. Le Conseild’État considère qu’en raison de cettefaute, le praticien ne peut prétendreau bénéfice de la protection accordéepar la loi aux fonctionnaires10.Toutefois, tout manquement aux règlesde l’art du praticien ne saurait consti-tuer une faute personnelle, détacha-ble du service. En effet, cette qualifica-tion est rarement retenue et certainsauteurs ont même évoqué une «consé-cration de “l’impérialisme” de la fautede service 11 ». Le juge administratifaurait, dans la pratique, « réduit ledomaine de la faute détachable afin deconserver un champ de compétence

large 12». Le principe est donc la fautede service et l’exception la faute déta-chable des fonctions (la preuve de cettedernière devant être rapportée)13.L’arrêt de cassation rendu par la cham-bre criminelle, le 13 février 200714,montre l’importance accordée au lien entrela faute et le service pour décider de laresponsabilité pécuniaire du médecin.En l’espèce, le chef de service de garde nes’était pas déplacé, malgré l’insistancede la sage-femme, auprès d’une patienteenceinte qui se trouvait dans un étatcritique. La cour d’appel a considéré quele médecin, «en s’abstenant de prendreen main lui-même la situation de périlde l’enfant et de la mère, a commis unmanquement inexcusable à ses obliga-tions d’ordre professionnel et déontolo-gique ; que cette faute est d’une tellegravité qu’elle permet de retenir la compé-tence de la juridiction judiciaire pourstatuer sur les intérêts civils et ne peut êtreassimilée à une simple faute de service».La Cour de cassation a exercé un contrôlesur la qualification de la faute. Cependant,elle ne donne aucune explication sur lesraisons de la censure exercée. Les jugessoulignent simplement que l’homicideinvolontaire a été commis dans le cadredes fonctions d’agent du service public et,qu’à ce titre, il ne peut constituer une fautepersonnelle, détachable du service.Par ailleurs, la chambre criminelle avaitdéjà jugé que «si le fait pour un méde-cin anesthésiste de garde de ne pasrecourir à un chirurgien face à deséléments médicaux graves et non expli-qués, constitue bien une infraction péna-

1. Cass. 1re civ., 20 février 2008,n° 06-21980.2. L’arrêt Pelletier (Tribunal desconflits, 30 juillet 1873,n° 00035) est à l’origine de ladistinction entre faute personnelleet faute de service et fonde lepartage de responsabilité en casde faute causant des dommagesà un tiers.3. Selon la formule du commissairedu gouvernement Laferrière, lors deses conclusions, dans la décisiondu Tribunal des conflits du 5 mai1887, Laumonier-Carriol.4. Par exemple : Cass. crim.,22 mai 2007, n° 06-84034. En1re instance, les juges avaient

retenu la faute personnelle, déta-chable du service, du médecin.La cour d’appel et la Cour decassation ont considéré que la« simple désinvolture caractéri-sée elle-même par les proposméprisants censés avoir ététenus par le prévenu» ne consti-tue pas une faute détachable desfonctions.5. CAA Bordeaux, 8 juillet 2002,Dame Ghanem c/ Centre hospita-lier Sud-Réunion, n° 00BX00013.6. CE 2 mars 2007, Banque fran-çaise commerciale Océan Indien,n° 283257.7. Cass. crim., 9 mai 1956.8. Cass. crim., 17 septembre

2002, n° 02-81873: « Il est (…)constant que la faute détacha-ble du service est celle d’uneinexcusable gravité ou celle quise caractérise par son caractèreintentionnel.»9. CE 28 décembre 2001, Valette,n° 213931.10. Article 11 de la loi n° 83-634du 13 juillet 1983 modifiéeportant droits et obligations desfonctionnaires.11. Vallar C., Zepi S.,« Responsabilité médicale etprimauté de la faute de service»,RDSS, 40 (4), oct.-déc. 2004,note sur l’arrêt CE, 3 novembre2003, Gilbert, n° 224300.

12. Manaouil C., Graser M., VerrierA., Cormier J., Jarde O., «La fautedétachable de service dans lesétablissements publics de santé»,Journal de médecine légale droitmédical, 2004, vol. 47, n° 8,pp. 383-396.13. Tribunal des conflits,22 septembre 2003, MmeLejeune c/Docteur Novak : « Ilrésulte du jugement (…) quele juge judiciaire (…) a jugé quela preuve n’était pas rapportéeque le docteur N. ait commisune faute personnelle détacha-ble du service.»14. Cass. crim., 13 février 2007,n° 06-82264.

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lement punissable dès lors que cetteabstention a privé la victime d’unechance de survie, un tel comportementne caractérise cependant pas la fauted’une gravité telle qu’elle puisse être déta-chable de la fonction15».Ces décisions rappellent que si lafaute pénale est nécessairementpersonnelle, elle n’est pas systémati-quement détachable 16.La juridiction administrative adopte unpoint de vue similaire à celui de la Courde cassation. Ainsi, dans un arrêt rendule 3 novembre 2003 17, le Conseil d’Étata considéré que la faute médicalecommise par le médecin ne se détachaitpas des fonctions qu’il exerçait au seind’un dispensaire. En l’espèce, le méde-cin en chef du service de santé avaitrefusé de réexaminer une patiente etde changer son traitement alors que sonétat ne s’améliorait pas. La patiente étaitdécédée quelques jours plus tard.L’appréciation stricte du caractère déta-

chable opéré par les juridictionssuprêmes n’exclut pas définitivementl’engagement de la responsabilité dumédecin. En effet, il existe une actionrécursoire qui permet à l’administra-tion de réclamer à son agent leremboursement des indemnitésversées par elle à la victime en cas defaute personnelle 18. De même, lajurisprudence admet le partage deresponsabilité et d’indemnisation encas de faute personnelle détachable du

service et de faute dans l’organisationdu service 19.L’analyse de la jurisprudence récentepermet d’affirmer que « la théorie de lafaute service demeure la clé de voûte dela protection juridictionnelle des agentspublics» 20. Les hypothèses où la fauteest telle qu’on ne peut la relier à l’exer-cice professionnel sont donc exception-nelles et traduisent nécessairement uncomportement hors norme du profes-sionnel de santé. ■

15. Cass. crim., 17 septem-bre 2002, n° 02-81873.16. Sur ce point, voir égale-ment Cass. crim., 2 décem-bre 2003, n° 02-85254 (laCour de cassation a retenu laresponsabilité pénale d’unmédecin régulateur du Samumais l’a dégagé de touteresponsabilité civile person-nelle, sa faute n’étant pasdétachable du servicepuisque ce médecin partici-pait indirectement mais

nécessairement à l’exécutiondu service public).17. CE 3 novembre 2003,Gilbert, n° 224300.18. CE ass. 28 juillet 1951,Laruelle et Delville, n° 01074et 04032.19. CAA Bordeaux, 21 février2006, centre hospitalier deSaint-Junien», n°02BX02449:« Lorsqu’une faute person-nelle a, dans la réalisationd’un dommage conjugué seseffets avec ceux d’une faute

de service distincte, l’admi-nistration est tenue decouvrir l’agent de la partimputable à cette faute deservice.»20. Petit S., « Contributionsdu Tribunal des conflits, duConseil d’État et de la Courde cassation à l’évolution dela notion de faute de service(par référence à sa gravité) »,Gazette du palais, 25 au29 mai 2001, C4899.

La Commission d’accès aux docu-ments administratifs (CADA)continue à «affiner » sa définition

de l’ayant droit. Dans un avis du24 janvier 2008, elle considère quepour l’application des dispositions desarticles L. 1110-4 et L. 1111-7 ducode la santé publique (CSP), « lanotion d’ayant droit revêt un champd’application plus large que celle d’hé-ritier définie par les articles 718 etsuivants du code civil ». Dès lors, la

L’un des apports majeurs de la loi du 4 mars 2002 est la possibilité pour le patient ou, en cas de décès, ses ayants droit, d’accéder directement aux informationscontenues dans le dossier médical. La mise en œuvre des dispositions prévues par le législateur est source d’un contentieux qui n’est pas de nature à faciliter les relations entre patients, familles et établissements de santé.

Sur la qualité d’ayant droit d’une personne ayant renoncé à la succession :Avis de la Commission d’accès aux documents administratifs, 24 janvier 2008 - N° 20080509

Patrick FLAVINResponsable du service juridique,

SHAM

Communicationdu dossier médical

aux ayants droit

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renonciation d’un ayant droit à lasuccession «doit être regardée commerestant sans influence sur son droit àobtenir la communication des informa-tions médicales concernant le défunt,dès lors qu’il remplit les autres conditionsfixées par le texte». En conséquence,

pour apprécier la qualité d’ayant droit, ilconvient de prendre en compte la qualitéde successeurs légaux au sens des arti-cles 731 et suivants du code civil, ainsique la qualité de successeur testamen-taire du défunt. Toutefois, il semble quepour la CADA, l’ordre de la succession

doit être respecté, chaque ordre desuccession excluant les suivants (cf. avisCADA du 22 février 2007 -n° 20065402 ; contra : tribunal admi-nistratif de Cergy-Pontoise 25 avril 2006,RHF n° 512, septembre-octobre 2006,p. 50).

En la matière, le dernier alinéa de l’ar-ticle L. 1110-4 du code de la santé

publique (CSP), auquel renvoie l’articleL. 1111-7 du CSP, prévoit que « le secretmédical ne fait pas obstacle à ce que lesinformations concernant une personnedécédée soient délivrées à ses ayantsdroit, dans la mesure où elles leur sontnécessaires pour leur permettre deconnaître les causes de la mort, défendrela mémoire du défunt ou faire valoir leursdroits (…)». Le Conseil d’État, dans unarrêt du 26 septembre 2005(n° 270234), a interprété ces dispositionscomme ne permettant aux ayants droitque de consulter les seules informationsdu dossier médical nécessaires pouratteindre celui ou ceux des trois objectifsprévus à l’article L. 1110-4 CSP. Un arrêtédu 3 janvier 2007 (JO du 16 janvier2007) est venu modifier en ce sens l’ar-rêté du 5 mars 2004 portant «homolo-gation des recommandations de bonnespratiques relatives à l’accès aux informa-tions concernant la santé d’une personne(…)» qui jusqu’alors recommandait decommuniquer l’intégralité du dossier.Si, d’un point de vue juridique, cette inter-prétation restrictive correspond certai-nement mieux à l’esprit du législateur, son

application suscite des difficultés.Comment apprécier la pertinence desdocuments en rapport avec la demandede l’ayant droit? Il est à craindre que toutesélection de document par l’établissementhospitalier soit de nature à créer un climatde suspicion quant à l’intérêt des piècestransmises (RHF 2006 n°512, p. 50).La CADA s’estime incompétente, ce quiest logique compte tenu de la naturemédicale des pièces (avis du25/01/2007, n° 2007412).Dans la présente affaire, la fille d’unepersonne décédée contestait le fait qu’uncentre hospitalier lui ait refusé de commu-niquer l’entier dossier médical de sa mère,au motif que certaines pièces étaient rela-tives à une hospitalisation sans rapportavec la cause du décès.Au vu des pièces produites par la requé-rante, le tribunal estime que c’est à comp-ter de l’hospitalisation en cause du 7 au27 novembre 2001, que l’état général dela mère de la requérante, décédée le22 janvier 2002, s’est singulièrementaggravé puisqu’elle a présenté une dénu-trition profonde, des escarres inquiétanteset un diabète moins d’un mois après sasortie du centre hospitalier ; qu’ainsi, etfaute pour le centre hospitalier d’apporter

un commencement de preuve de natureà justifier la matérialité des faits sur lequelrepose la décision attaquée, les pièces dudossier médical concernant l’hospitalisa-tion du 7 au 27/11/2001 doivent êtreregardées comme étant de nature àpermettre à la requérante de connaître lescauses de la mort de sa mère.L’établissement de santé est condamné àcommuniquer les pièces en questiondans le mois de la notification de la déci-sion, sous astreinte de 30 euros par jour.On ne peut que constater et regretterqu’au nom d’un strict respect du secretmédical, et alors qu’en l’espèce la défunten’avait fait aucunement connaître, de sonvivant, son opposition à la communica-tion de son dossier médical, on en vienneà débattre dans un prétoire de l’état desanté d’une personne. La solution adop-tée par les recommandations de bonnespratiques, avant qu’elle ne soit annuléepar le Conseil d’État en 2005, qui permet-tait aux ayants droit d’obtenir l’entierdossier médical, semblait plus soupleet moins conflictuelle. Les ayants droitpeuvent toujours avoir accès aux infor-mations médicales, lors de l’expertise,dans un contentieux, notamment enresponsabilité médicale. ■

Sur la nature des documents communicables aux ayants droitTribunal administratif de Nantes, 24 janvier 2008 - n° 045003

à commander auprès de

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