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LA COMMUNICATION NONVERBALE LA COMMUNICATION NONVERBALE Motto : « Le fait est que « de simple mots » ça n’existe pas. Il n’y a que des mots doublés de gestes ou d’interactions ou d’autres choses de ce genre». G. Bateson (1977, 31) INTRODUCTION La communication est souvent fondée sur l’intention d’émettre un message en vue de modifier l’opinion, la décision, les sentiments, les émotions ou le comportement d’un récepteur. En règle générale, au moment où il produit un signal, l’émetteur conscient de ses moyens agit pour y parvenir par référence à la finalité qu’il s’est fixé. Or, bien des fois, nous émettons des messages et nous modifions le comportement de nos proches à notre insu. Car, le système verbal de communication s’accompagne d’un système nonverbal, parfois même plus „parlant” que le premier. Ainsi, avant même d’ouvrir la bouche pour parler, les gens fournissent une abondance d’informations par l’intermédiaire de leurs comportements. Quels seraient, par exemple, les messages transmis par quelqu’un qui se présente à un entretien d’embauche? Depuis la manière dont il / elle est habillé(e), coiffé(e), chaussé(e) et jusqu’à sa manière de s’asseoir sur une chaise, son regard, sa voix, tout parle à ceux qui observent la personne. Ses postures, ses gestes, ses expressions faciales sont également de bons indicateurs qui apportent pas mal d’information. La personne se tient-elle droite? A-t-elle une poignée de main ferme? Sourit-elle? Vous regarde-t-elle dans les yeux lorsque vous lui serrez la main? (Certes, l’impression que dégage le comportement d’une personne forme un ensemble et il serait assez difficile de séparer chaque forme de communication nonverbale, surtout dans la vie courante * ). L’étude de la communication nonverbale proprement dite est de date relativement récente, car pendant longtemps on a cru que s’il n’y avait pas de mots, il n’y avait pas de communication. Les temps modernes connaissent une vraie mode du nonverbal et de nombreux savants venus d’horizons très divers – biologistes, psychologues, psychiatres, anthropologues, sociologues, linguistes, sémioticiens et autres * Les spécialistes de l’embauche sont, par exemple, formés pour observer le moindre comportement nonverbal. Parfois, ils se constituent même en équipes afin que rien ne leur échappe. 2

La Communication Non-Verbale

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Page 1: La Communication Non-Verbale

LA COMMUNICATION NONVERBALE

LA COMMUNICATIONNONVERBALE

Motto : « Le fait est que « de simple mots » ça n’existepas. Il n’y a que des mots doublés de gestes oud’interactions ou d’autres choses de ce genre».

G. Bateson (1977, 31)

INTRODUCTION

La communication est souvent fondée sur l’intention d’émettre un message en vue demodifier l’opinion, la décision, les sentiments, les émotions ou le comportement d’unrécepteur. En règle générale, au moment où il produit un signal, l’émetteur conscientde ses moyens agit pour y parvenir par référence à la finalité qu’il s’est fixé. Or, biendes fois, nous émettons des messages et nous modifions le comportement de nosproches à notre insu. Car, le système verbal de communication s’accompagne d’unsystème nonverbal, parfois même plus „parlant” que le premier. Ainsi, avant mêmed’ouvrir la bouche pour parler, les gens fournissent une abondance d’informations parl’intermédiaire de leurs comportements.

Quels seraient, par exemple, les messages transmis par quelqu’un qui se présente à unentretien d’embauche? Depuis la manière dont il / elle est habillé(e), coiffé(e),chaussé(e) et jusqu’à sa manière de s’asseoir sur une chaise, son regard, sa voix, toutparle à ceux qui observent la personne. Ses postures, ses gestes, ses expressionsfaciales sont également de bons indicateurs qui apportent pas mal d’information. Lapersonne se tient-elle droite? A-t-elle une poignée de main ferme? Sourit-elle? Vousregarde-t-elle dans les yeux lorsque vous lui serrez la main? (Certes, l’impression quedégage le comportement d’une personne forme un ensemble et il serait assez difficilede séparer chaque forme de communication nonverbale, surtout dans la viecourante*).

L’étude de la communication nonverbale proprement dite est de date relativementrécente, car pendant longtemps on a cru que s’il n’y avait pas de mots, il n’y avait pasde communication. Les temps modernes connaissent une vraie mode du nonverbal etde nombreux savants venus d’horizons très divers – biologistes, psychologues,psychiatres, anthropologues, sociologues, linguistes, sémioticiens et autres * Les spécialistes de l’embauche sont, par exemple, formés pour observer le moindre comportementnonverbal. Parfois, ils se constituent même en équipes afin que rien ne leur échappe.

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LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

politologues - s’adonnent à des recherches théoriques et surtout expérimentales.Parmi les pionniers, citons dans la foulée Ch.Darwin et W.Wund ( le créateur de lapsychologie expérimentale) au siècle passé, ainsi que, plus récemment, K.Lorenz etS.Freud.

Ce dernier affirme: „celui qui a des yeux pour voir et des oreilles pour entendreconstate que les mortels ne peuvent cacher aucun secret.”

ORIGINES DU NONVERBAL

Pour Charles Darwin le comportement nonverbal est inné chez l’homme, tout commeles émotions fondamentales, alors que les chercheurs modernes parlent plutôt deconventions culturelles. Pourtant, en dépit des marques culturelles, on peut parlerd’un langage universel, car tous les hommes sourient, pleurent ou tremblentd’émotion. (Plessner H., 1982)

R.Paget (1930, cité par T.Slama-Cazacu, 1959, 30) considère que le système gestuelde communication s’est élaboré avant l’apparition du langage articulé.

Plusieurs arguments sont invoqués par ce chercheur: les ensembles gestuels par lesquels communiquent encore de nos jours diversestribues ainsi que les sourds-muets et même les primates;

le caractère universel de certains gestes chez les Blancs aussi bine que chez lesNoirs;

les réactions imitatives motrices et les mimiques affectives imitatrices du bébé(exemple: lorsqu’on lui sourit, le bébé vous sourit).

En 1963, Otto Klineberg attaque cette théorie avec force contre arguments:• le langage des signes des Indiens d’Amérique n’a pu être décodé, du premier

abord, par les Européens de Christophore Colomb; • la possibilité d’une communication exclusivement motrice et gestuelle a été

dépassée, même par les singes anthropoïdes. Car, on a pu constater que lesvocalisations différenciées émises par ces animaux représentent les signaux d’unevariété d’états affectifs que ces animaux se communiquent. En même temps, lecomportement motrice, les divers cris non-articulés et un certain langage gestuelsont tous antérieurs à l’apparition de l’homme.

Ce qui est propre à l’homme c’est que les gestes ont un sens et servent lacommunication uniquement grâce à la naissance du langage articulé.(cf. A. Leroi-Gourhan, 1964) Comme nous l’explique A.N.Leontiev (1964), la communicationgestuelle s’est formée chez l’homme en même temps que le détachement de sesmouvements de l’action sur les objets et que sa nominalisation (le geste doit êtrenommé pour avoir un sens). Lors de leur évolution, les gestes requièrent dessignifications sociales et culturelles, se standardisent et servent à la communicationaussi bien que le langage verbal (M.Von Cranach, 1973).

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LES MESSAGES NONVERBAUX

Bien que nous étudiions pour des raisons d’ordre pédagogique les formes de lacommunication nonverbale une à une, elles sont toutes reliées entre elles dans le fait.En même temps, leur étude relève de la transdisciplinarité et s’effectue au cadred’équipes de chercheurs venus d’horizons très divers : anthropologues, sociologues,linguistes, psychologues et médecin psychiatres. Ainsi l’anthropologue RayBirdwhistell (1968), influencé par la linguistique descriptive et structurale, crée-t-il lakinésique ou l’étude des mouvements corporels.

Ce chercheur argue que la signification d’un geste n’existe pas, car le geste s’intègredans un système interactionnel à multiples canaux qui se confirment ou s’infirmentmutuellement. Pour lui, gestualité et langage s’intègrent dans un système constituéd’une multitude de modes de communication, tels que le toucher, l’odorat, l’espaceet le temps. Si une place si importante est accordée au langage dans les recherches surla communication face à face, c’est sans doute parce que le langage est un mode decommunication essentiel, mais aussi parce que les travaux sur les autres modes sontencore très peu développés. Pour Birdwhistell, il n’est donc pas possible dedéterminer une hiérarchie des modes de communication selon leur importance dansle processus interactionnel. Si le mode verbal porte le plus souvent l’informationintentionnelle explicite, d’autres modes assurent des fonctions tout aussi nécessairesau bon déroulement de l’interaction. Ainsi l’étude isolée du langage ou de lagestualité n’intéresse plus ce chercheur qui s’adonne, par exemple, à des travauxconcernant les marqueurs kinésiques qui accompagnent les pronoms et les adverbesainsi que les kinèmes d’accentuation et de jonction qui ponctuent, découpent etrelient les éléments du flot verbal au cadre d’une étude qu’il nomme lui-même« linguistico-kinésique »

Quelques marqueurs kinésiques de la syntaxe américaineselon R. Birdwhistell ( in Y. Winkin, 1984, 73)

LA COMMUNICATION NONVERBALE

Page 4: La Communication Non-Verbale

LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

LES « CATEGORIES MAJEURES DE L’ACTION »

Les taxinomies concernant les comportements communicatifs que nous avonsconsultées (A.E. Scheflen (1965/1984, 147), S. Duncan Jr. et D. Fiske (1977,6), R.Ghiglione (1986,144)) sont élaborées à partir de nombreuses études pour la pluparttransdisciplinaires, entreprises surtout dans la deuxième moitié du XXe siècle. Lescomportements qui contribuent à l’interaction verbale face à face sont nommés parDuncan et Fiske « major categories of action ». Or, parmi ces catégories, il n’est passans intérêt de mentionner le fait que ce n’est qu’en dernier lieu que ces auteurs citentle langage verbal « tel qu’il est traditionnellement défini ». Selon A.E. Scheflen (dontnous avons pris la plupart des comportements compris dans le « TABLEAU DESCOMPORTEMENTS COMMUNICATIFS ») il est restrictif de parler decomportement verbal et nonverbal, car bien des composantes de la communicationface à face transgressent ce cadre.

Le tableau ci-après représente une énumération, chaque comportement étant illustré –sans prétentions exhaustives – par des chercheurs représentatifs pour chaquedomaine.

Ajoutons le fait que l’interaction incessante entre verbal et nonverbal a conduitT. Slama-Cazacu à la création du concept de « syntaxe mixte » (1976,1977,1979,1999), tant il est vrai que ces deux principaux canaux de lacommunication humaine sont inextricablement imbriqués. L’émission ainsi que laréception dans la communication face-à-face ne saurait ignorer l’implication d’aumoins trois des canaux perceptifs : auditif, visuel et kinésique (T. Slama-Cazacu,1999, 184-196).

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LA COMMUNICATION NONVERBALE

TABLEAU

DES COMPORTEMENTS COMMUNICATIFS

I. Le comportement vocal

(a) linguistique ;(b) paralinguistique

Le paralangage est défini comme la totalité des éléments de la prononciation qui nesont pas inclus dans la description phonologique d’une langue (G.L. Trager, 1958,M.Argyle, 1969, 1993);

II. Le comportement kinésique

(a) les mouvements corporels (les gestes) ainsi que l’expression faciale (le regard,la mimique), sont appelés par A. Kendon (1967) „ le comportement visible ”(R.L.Birdwhistell, 1952, 1967,1970,1986)

(b) les éléments « neuro-végétatifs » :coloration de la peau, dilatation de lapupille, activité viscerale etc. (A.E. Scheflen, 1965).

(c) la posture (A.E. Scheflen, 1964(d) les bruits corporels (A.E. Scheflen, 1965).

III. Le comportement tactile (« Heptics »)

Le contact corporel entre les hommes dans l’interaction verbale et nonverbale(Austin, 1967)

IV. Le comportement territorial

La « proxémique » ainsi que les autres comportements sont fortement marqués par laculture des interactants (E.T. Hall, 1959,1968, 1976,1994)

V. L’utilisation de l’odorat (« social olfaction »)

Est un comportement encore peu étudiée.

VI. L’utilisation des artefacts

Est défini par le choix des vêtements, couleurs, bijoux, articles de décoration desespaces etc. (R.Mead, 1990)

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LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

RAPPORTS ENTRE VERBAL ET NONVERBAL

M. Ritchie Key (1975) ainsi que d’autres chercheurs trouvent qu’il y a des formesd’interaction significatives entre messages verbaux et nonverbaux: „The nonverbalact can repeat, augment, illustrate, accent or contradict the words” (M. Ritchie Key,1975, 35). Nous les passeront en revue et donnerons quelques exemples dont certainssont tirés de J.de Vito (1993, 110):

1. L’accentuationOn utilise des signaux nonverbaux afin de souligner ou de mettre en évidence uneportion quelconque de son message verbal. Ainsi, un sourire peut-il éclairer le sensque nous voulons donner à un mot ou à une phrase. Frapper du poing peut soulignerune conclusion etc.

2. Le renforcementTout message se trouve renforcé lorsque le nonverbal est en harmonie avec le verbal.Par exemple, en affirmant: „Je n’aime pas Marie: son attitude est duplicitaire” et enfronçant en même temps mes sourcils, je renforce mon message et macommunication devient plus cohérente.

3. La répétitionRépéter ou réitérer le message verbal est une autre manière d’interagir par dessignaux nonverbaux. Lorsque vous dites sur un ton impératif „Sortez tout de suite!”et que ensuite vous indiquez la porte avec votre bras tendu et votre doigt (mais vouspouvez le faire aussi en même temps) vous dites la même chose, mais de deuxmanière différentes. Là encore vos gestes sont cohérents avec vos paroles.

4. La contradictionParfois la contradiction est intentionnelle. Vous clignez de l’œil d’une façoncomplice pour indiquer que vous ne dites pas la vérité ou encore, vous racontez unehistoire amusante avec une mine triste pour provoquer l’hilarité (Cette contradictionest d’ailleurs l’une des sources de l’humour). On observe également de nombreuxmessages nonverbaux relevant d’une contradiction non-intentionnelle.Sans s’en rendre compte, le locuteur émet des messages nonverbaux qui vont àl’encontre de son message verbal. Ainsi, lorsque l’on affirme compatir à la douleurd’une personne sur un ton égal, sans modulation de la voix et avec une expressionfaciale impassible.

5.La substitutionSelon K.Danzinger (1976, 66) il y a des gestes qui servent la parole („motor-primacy”) et d’autres qui remplacent la parole („speech-primacy”).Dans la vie quotidienne on hoche souvent la tête pour dire „oui” ou on la secoue ensigne de négation (mais gare aux différences entre les cultures!). Les gestesremplacent aussi les paroles lorsqu’on se trouve à grande distance ou dans un lieu detravail très bruyant (voir T.Slama-Cazacu, 1954).

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LA COMMUNICATION NONVERBALE

6. La régularisationPar les indications non-verbales qui se constituent en vrais „rites conversationnels”pour utiliser l’expression de E.Goffman on peut régulariser le débit des messagesverbaux, leur étendue, signaler qu’on n’a pas fini de parler, demander ou donner laparole etc.

MISES EN GARDE

Depuis plusieurs années, l’étude de la communication nonverbale a suscité l’intérêtde larges catégories de personnes intéressées à comprendre, à influencer, voire àmanipuler autrui ou simplement à faire „bonne impression” (dans les entretiensd’embauche, notamment). Certaines précautions sont cependant à signaler afin de nepas nous illusionner sur l’excellence sans failles de nos „décodages”. (Selon E. Hall(1979,81) les ouvrages de vulgarisation représentent un vrai danger de ce point devue)

Tout d’abord, il faut nous rendre compte du pouvoir relatif des comportements non-verbaux dont l’interprétation ne doit pas être détachée de son ensemble contextuel etcommunicatif. Ceci consiste surtout à relier chaque comportement nonverbal:

• aux autres messages verbaux ou nonverbaux qui l’accompagnent;• à la relation interpersonnelles entre les interlocuteurs ;• à la culture à laquelle appartient l’interlocuteur ;• à d’autres éléments contextuels.

Si mon patron me fixe d’un drôle d’air, est-ce parce que je suis mal coiffé(e), est-ceparce que j’ai refusé la semaine dernière de lui rendre un service ou parce qu’ilréfléchit s’il doit ou non m’accorder une prime? Avant de tirer des conclusions, ilvaut mieux observer d’autres signes de son comportement, réfléchir à la qualité denotre relation et aussi, tout simplement écouter ce qu’il dit.

Ensuite il arrive, comme nous l’avons montré, que certains de nos comportementstransgressent des typologies trop rigides. Par exemple, croiser les jambes esthabituellement interprété comme un geste d’autoprotection. Mais comme il ne fautpas dissocier les différentes parties du corps, l’air décidé et les mains libres d’unepersonne peuvent prouver sa confiance en elle-même.

Enfin, s’il est vrai que des types généraux de messages nonverbaux signifienttoujours les mêmes choses dans un environnement donné, il y a des utilisationsspéciales et même uniques d’une personne à l’autre et surtout d’une culture à l’autre.

Page 8: La Communication Non-Verbale

LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

LE COMPORTEMENT TEMPOREL

Le « langage » temporel - qui est lui aussi culturellement déterminé - ne se trouve pasau « tableau des comportements communicatifs » bien que ce comportement soit« fondamental » en communication de l’avis de E. Hall (1984,1994). Aussi pour agirefficacement dans un milieu étranger, est-il indispensable d’apprendre le langagetemporel qui y prévaut.Selon E. Hall (1984) deux systèmes temporels opposés régissent les cultures: Letemps monochronique et le temps polychronique.

LE TEMPS MONOCHRONIQUE : « TEMPS M »

Dans les cultures monochroniques, le temps est perçu et utilisé d’une manière trèslinéaire. Il est une route conduisant du passé au futur. C’est un temps que l’on peutdécomposer en segments de plus en plus fins. Chaque segment reçoit une affectionprécise, il est réservé à un projet parfaitement déterminé. C’est lui qui permet de nefaire qu’une seule chose à la fois.

On parle de lui comme de l’argent : on peut le dépenser, le perdre, le gaspiller, onpeut aussi bien l’économiser. Il tend à isoler, à diminuer le nombre des interactionspossibles.

Le mode de vie des Allemands est une parfaite illustration du temps monochronique.

LE TEMPS POLICHRONIQUE : « TEMPS P »

Il est l’antithèse du temps monochronique. Il est caractérisé par les simultanéités dedifférentes activités et par un intérêt plus vif pour les individus qui priment sur toutprogramme pré-établi.

C’est un temps très latin. Le « Temps P » est moins « tangible » que le « Temps M ».Il correspond davantage à un nuage de points qu’à la droite évoquant le « Temps P ».

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LA COMMUNICATION NONVERBALE

LES SYSTEMESTEMPS ELEMENTS CARACTERISQUES*

SYSTEME POLYCHRONIQUE (P)On mène plusieurs tâches de front.

SYSTEME MONOCHRONIQUE (M)On ne fait qu’une chose à la fois.

On admet les interruptions et leschangements d’occupation.

On se consacre totalement etexclusivement à la tâche entreprise.

Programmes et projets sont fréquemment On suit scrupuleusement leset facilement modifiés. programmes établis.

L’exactitude est très relative. L’exactitude est poussée à l’extrême.

La gestion à court terme est supérieure àla gestion à long terme.

La gestion à long terme est supérieure àla gestion à court terme.

Les engagements considérés comme lesplus contraignants concernentles personnes.

Les engagements considérés comme lesplus contraignants concernent le temps,les dates, les délais…

Les individus manquent de patience ettendent à passer directement à l’action.

Les individus sont plus lents, plusméthodiques et moins impliquéseffectivement.

Les échanges, les prêts et les empruntsd’objets familiers sont bien admis.

Chaque chose doit être à sa place, tout estcloisonné. Organisation fonctionnelle etrigide.

Il existe une charge affective dans lesaffaires. On peut sacrifier du temps prévupour le travail afin de nouer des relations.

Le programme prime sur les relationspersonnelles.

LES CULTURES (∗ )

POLICHRONIQUES INTERMEDIAIRES MONOCHRONIQUES- Cultures du Bassin Méditerranéen- Cultures asiatiques- Cultures africaines- Cultures latino-américaines

- Cultures françaisesmonochroniques parla pensée etpolycroniques dans lecomportement.

- Cultures germaniques- Cultures nordiques- Cultures anglo-saxonnes

∗ Ce classement n’est pas fait pour enfermer chaque individu d’un pays dans des comportements invariants mais plutôt

pour donner une tendance générale.

Page 10: La Communication Non-Verbale

LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

COMMUNICATION NONVERBALE ET ENSEIGNEMENTDES LANGUES ETRANGERES

Lors d’une étude de terrain R. Birdwhistell s’aperçoit que la gestualité des Indiensbilingues change lorsqu’ils passent de leur langue à l’anglais. Il interprète cechangement comme une imitation de l’homme blanc. Mais il sent que ce n’est pas làla réponse définitive. De retour à l’Université il a l’occasion d’étudier un film surl’homme politique new-yorkais Fiorella La Guardia qui parle couramment italien,yiddish et anglo-américain. Birdwhistell montre le film après avoir coupé le son àplusieurs personnes connaissant ces trois cultures. Toutes peuvent déterminer quellelangage La Guardia utilise à chaque moment. Comme chez les Indiens, il y a autrechose qu’une performance d’acteur. Car en changeant de langue, l’homme changeégalement de langage corporel. (cf. Y. Winkin, 1984,66,67).

Cette constatations aura – mais de nos jours seulement – un impact considérable surl’enseignement des langues étrangères.

Car, si les professeurs de langues du temps de la méthode directe usaient de maintsgestes, attitudes et mimiques pour faire décoder à leurs élèves des mots qu’ilsn’étaient pas permis de traduire dans leur langue maternelle (On aura constaté plustard que l’élève traduit mentalement de toute façon!), ces gestes, attitudes etmimiques étaient pour la plupart utilisés - afin d’être décodés – dans le codenonverbal de l’élève. Ainsi verbal et nonverbal étaient artificiellement dissociés dansl’apprentissage d’une langue-cible.

La méthode AVSG (audio-visuelle structuro-globale) fit naître le film didactiquedans lequel les acteurs, des natifs, usent d’indices nonverbaux qui leur sont proprespour renforcer ou illustrer leurs dires. Ceci permet à l’élève de comprendre à la fois legeste et la parole ou bien de ...brouiller les cartes selon leurs perceptions sociales„nationales”, car là aussi la traduction est interdite au professeur. Quand aux manuelsdialogués de l’époque, ce sont de véritables bandes dessinées dont les imagesdoublent (répètent) et même expliquent, en illustrant tant bien que mal par desmimiques, des attitudes, des gestes concordants les paroles des protagonistes(ANNEXE 1). Cependant, ces manuels ont rarement quelque chose de caractéristiqueà la gestualité du code étranger.

De nos jours, soucieux d’inculquer à leurs apprenants une compétence decommunication réelle en anglais–langue étrangère, les auteurs américains vontjusqu’à élaborer des manuels accompagnés de vidéocassettes, spécialement conçuspour l’acquisition d’un comportement nonverbal adéquat aux situations decommunication spécifiques à la culture de la langue enseignée. En même temps, lesexercices sont centrés sur l’apprentissage de la communication verbale et nonverbaleà la fois. (ANNEXE 2)

Page 11: La Communication Non-Verbale

LA COMMUNICATION NONVERBALE

Alors, nous sautons sur nos vélos et

nous pédalons

- Laissez-moi passer le premier! crieJacques.

- Attention! Tu vas tomber! le prévientLuc.

Et en effet*, Jacques dérape et

*en effet – într-adevăr

ANNEXE 1

Page 12: La Communication Non-Verbale

LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

tombe

Pauvre Jacques! Il pleure et pourtantseulement sa culotte est déchirée

- Un peu de courage! Conduis-toicomme un grand*, lui dit Juliette.

*comme un grand – ca un băiat mare

- Arrêtons-nous ici et

commençons à manger nos sandwiches,décide Madame Morel.

Source: M. Gulea, H.P. Blottier (1976); Curs intensivde limba franceză, Bucureşti, Editura Ştinnţifică

Page 13: La Communication Non-Verbale

LA COMMUNICATION NONVERBALE

ANNEXE 2

1 Handshakes

What kinds of handshake did you receive inThe role-play on page 19?What kind of handshake did you give?

2 First impressions

People who work with their hands (artists,musicians, surgeons etc.) often give a limpHandshake. What can you tell about peopleFrom their handshakes?

She has a firm handshakeI think she’s a confident person

Use the words opposite.

Page 14: La Communication Non-Verbale

LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

ATELIER

� Exercice 1.Trouvez vous-mêmes – à partir des « marqueurs kinésiques de la syntaxeaméricaine » - des exemples linguistico-kinésiques chez les locuteurs roumains.

� Exercice 2.Illustrez la « syntaxe mixte » chez les Roumains ou chez des locuteurs étrangers pardes exemples.

� Exercice 3.A partir du tableau des « comportements communicatifs », rappelez-vous certainessituations sociales au cadre desquelles vous avez pu déceler des messages à partiruniquement de comportements nonverbaux.

� Exercice 4.Vous est-il arrivé de vous tromper quand au sens d’un « comportement nonverbal » ?Décrivez la situation.

Page 15: La Communication Non-Verbale

LA COMMUNICATION NONVER

� Exercice 5: RENFORCER LE MESSAGE

Le geste (a) exprime un....Le geste (b)....Le geste (c

� EXERCICE 6: CONTREDIRE LE MESSAGE

Source: Gilber D, Rozé Y.,(1992)Verbal et nonverbal – les outils de l’influenc

Images pour la formation

(a)

(c)

t

BALE

e, Paris,

(b)

Page 16: La Communication Non-Verbale

LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION F

Que dit chaque geste?Le geste (a) dit:....

Source : Gilbert D., Rozé Y., op. cit.

� EXERCICE 7.

(a)

(c)

(b)

ACE A FACE

Page 17: La Communication Non-Verbale

LA C

� EXERCICE 8.

Commentez le rapport texte-image dans les dix r(tiré de Gulea, M., H.P.Blottier, 1976: Limba frEditura Ştiinţifică şi enciclopedică);

� EXERCICE 9.

Commentez l’efficacité des deux exercices propos

� EXERCICE 10.

Comparez les deux démarches didactiques respectivement 2.

Les gestes ci-contre renforcentles messages verbaux.

Trouvez les mots qui peuvent accompagnerces gestes pour chaque cas.

Plusieurs variantes sont possibles.

1.abc

2.abc

3.abc

1

OMMUNICATION NONVERBALE

épliques du dialogue de l’annexe 1anceză – curs intensiv, Bucureşti,

és dans l’annexe 2.

proposées dans l’annexe 1 et

3

2

Page 18: La Communication Non-Verbale

LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1 Argyle M. (1969) : Social interaction, Chicago, London, Aldine Publishere Co.,Methnen

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Page 19: La Communication Non-Verbale

LA COMMUNICATION NONVERBALE

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20 *** (1966) : La dimension cachée, Paris, Seuil (traduction française, 1971).

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23 Hall E. T., HALL M. R. (1994) : Comprendre les Japonais, Paris, Seuil

24 Kendon A. (1967) : Some Functions of Gaze Direction in Social Interaction,« Acta psihologica 26 », pp. 1-47, apud Y. Winkin (1984)

25 Kerbrat-Orecchioni C. (1994) : Les interactions verbales. Variations culturelles etuniversaux, vol III, pp. 16-34

26 Klineberg O. (1963) : Le langage, Paris, Flammarion

27 Leontiev N. (1964) : Probleme ale dezvoltării psihicului, Bucureşti, EdituraŞtiinţifică

28 Lorenz K. (1978) : Les fondements de l’éthologie, Flammarion, (traductionfrançaise,) pp. 11-23, 403-404

29 Mead R. (1990): Cross-cultural management

30 Pacout N. (1991) : Le langage des gestes, Marabout.

31 Paget R. (1930) : Human speech, London Kegan, Trench, Trubner apud T.Slama-Cazacu (1999) Psiholingvistica, o ştiinţă a comunicării, Bucureşti, ALL,

32 Plessner H. (1982) : Le rire et le pleure. Une étude limite du comportementhumain. Paris, Maison des Sciences de l’Homme (traduction française, 1985).

33 Ritchie Key M. (1975) : Paralanguage and Kinesics (Nonverbal communication),Methuen, New York, The Scarecrow Press. Inc.

Page 20: La Communication Non-Verbale

LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE

34 Scheften A.E. (1964) : The Significance of Posture in communicational Systems ,« Psychiatry », 27, pp. 316-331.

35 *** (1965) : Systèmes de la communication humaine in Y. Winkin (1981), op. cit.,pp. 145-190.

36 Slama-Cazacu T. (1959) : Limbaj şi context, Editura ştiinţifică.

37 *** (1964) : Comunicarea în procesul muncii, Bucureşti, Editura Ştiinţifică

38 *** (1976): Non verbal components in messages sequence. The “mixed syntax” inLanguage and man. Anthropological issues, Eds. W. Mc Carmack, S. Wurm, TheHague-Paris, Mouton.

39 *** (1979) : Sémiotique et psycholinguistique. Recherches sur la « syntaxe mixe »in Panorama sémiotique (Actes du Ier Congrès Int. de Sémiotique Milano), TheHague, Monton, pp. 560-564.

40 *** (1999) : Psiholingvistica, o ştiinţă a comunicării, Bucureşti, Bucureşti, ALL.

41 Trager G. (1958) : Paralanguage : A First Aproximation, « Studies inLinguistics », 13, pp. 1-12.apud Y. Winkin (1984) op. cit.

42 Von Cranach M. (1973) : La communication nonverbale dans le contexte ducomportement de communication in S. Moscovici (éd.) Introduction à lapsychologie sociale, 2, Paris, Librairie Larousse, p. 135-168.

43 Winkin Y. (1984) : La nouvelle communication, Paris, Seuil.

44 WundT W. (sans année) Eléments de psychologie physiologique, Paris, Alcan,(traduction française) apud T. Slama-cazacu, 1999 op cit.