27
Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA Le contentieux des conventions et accords collectifs de travail Sommaire 1000 1. L'action en exécution d'une convention ou d'un accord collectif de travail 1001 1.1. L'action individuelle des salariés et des employeurs en exécution d'une convention collective 1002 1.2. L'action en exécution d'une convention ou d'un accord collectif exercée par un syndicat 1003 1.3. L'action en exécution d'une convention ou d'un accord collectif exercée par les groupements signataires 1004 2. L'action en nullité d'une convention ou d'un accord collectif de travail 1005 3. L'action en annulation d'un arrêté d'extension 1006 4. L'action en interprétation d'une convention ou d'un accord collectif de travail 1007 4.1. Les règles régissant l'interprétation des conventions et accords collectifs de travail 1008 4.2. La procédure relative à une action en interprétation d'une convention ou d'un accord collectif de travail 1009 5. Les juridictions compétentes en matière de contentieux civil des conventions et accords collectifs de travail 1010 6. Les sanctions pénales des dispositions conventionnelles

Le contentieux des conventions et accords collectifs de ...efp-cgt.org/wp-content/uploads/2012/12/lexbase_fev2009_contentieux... · Les juridictions compétentes en matière de contentieux

Embed Size (px)

Citation preview

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Le contentieux desconventions et accords

collectifs de travail

Sommaire

1000 1. L'action en exécution d'une convention ou d'unaccord collectif de travail

1001 1.1. L'action individuelle des salariés et des employeursen exécution d'une convention collective

1002 1.2. L'action en exécution d'une convention ou d'unaccord collectif exercée par un syndicat

1003 1.3. L'action en exécution d'une convention ou d'unaccord collectif exercée par les groupementssignataires

1004 2. L'action en nullité d'une convention ou d'un accordcollectif de travail

1005 3. L'action en annulation d'un arrêté d'extension

1006 4. L'action en interprétation d'une convention ou d'unaccord collectif de travail

1007 4.1. Les règles régissant l'interprétation des conventionset accords collectifs de travail

1008 4.2. La procédure relative à une action en interprétationd'une convention ou d'un accord collectif de travail

1009 5. Les juridictions compétentes en matière decontentieux civil des conventions et accords collectifsde travail

1010 6. Les sanctions pénales des dispositionsconventionnelles

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 1

1000 1. L'action en exécution d'une convention ou d'un accord collectif detravail

[E6755AEW]

Les conventions et accords collectifs obligent tous ceux qui les ont signés, ou qui sontmembres des organisations ou groupements signataires. La bonne exécution de ces accords etconventions est garantie par la loi. Plusieurs actions en exécution sont donc autorisées.

1001 1.1. L'action individuelle des salariés et des employeurs en exécutiond'une convention collective

[E6767AED]

Les personnes liées par une convention ou un accord peuvent intenter des actions contre lesorganisations ou groupements liés par cette convention ou accord en vue d'obtenir l'exécutiondes engagements contractés, ou des dommages-intérêts.

Les personnes liées par une convention ou un accord collectif de travail peuvent intenter desactions contre les organisations ou groupements liés par la convention ou l'accord en vued'obtenir l'exécution des engagements contractés.

C. trav., art. L. 2262-12, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 135-6, version du 14-11-1982, à jour

L'action en exécution d'une convention ou d'un accord collectif exercée par plusieurssalariés contre un même employeur et tendant à un même objet ne perd pas son caractèreindividuel. Le conseil des prud'hommes peut donc être saisis dans ce cadre.

Cass. soc., 24-04-1975, n° 74-40.509

Le non-respect par l'employeur d'un accord collectif, ayant pour objet le maintien de l'emploien contrepartie d'une réduction de rémunération pour les salariés, peut donner lieu à l'octroide dommages-intérêts au profit de ces derniers.

Cass. soc., 22-01-1998, n° 95-45.400

La conseil de prud'hommes est compétent pour une demande émanant d'un salariéconcernant la réparation du préjudice résultant pour lui de la non-application au sein del'entreprise des dispositions d'un avenant à une convention collective.

Cass. soc., 12-07-2006, n° 04-47.550, M. Hervé Dorveaux, FS-P+B

Application d'une convention collective et compétence élargie du conseil de prud'

L'éparpillement du contentieux du travail constitue l'un des traits marquants, et l'une des faiblesses, dudroit du travail qui n'a pas su, ou pas voulu, réformer en profondeur la compétence des conseils deprud'hommes. C'est pour tenter de remédier à cette situation que la Cour de cassation retient de lacompétence du juge prud 'homal une conception large, comme le confirme cet arrêt rendu par laChambre sociale le 12 juillet 2006 (Cass. soc., 12 juillet 2006, n° 04-47.550, M. Hervé Dorveaux c /Centre médical de l'Argentière, FS-P+B ) dans une affaire où était en cause l'application à un salariéd'un accord de réduction du temps de travail. Si l'affirmation de la compétence du juge prud'homal doitêtre pleinement approuvée (I), le fondement retenu est des plus contestables (II).

I - La confirmation de la compétence élargie du conseil de prud'hommes

Compétence du conseil de prud'hommes et notion de litiges individuels

Les différends qui naissent de l'exécution d'une convention collective sont de deux ordres.

Une première série de litiges relève purement et simplement du droit conventionnel et oppose les parties

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 2

à l'accord. A l'instar des solutions qui prévalent en droit commun des contrats, les parties à laconvention, qu'il s'agisse des syndicats signataires ou du chef d'entreprise contractant, peuvent agir afind'obtenir l'exécution forcée de l'accord ou pour obtenir des dommages et intérêts en cas d'inexécution(C. trav., art. L. 135-5 et L. 135-6).

Il s'agit, ici, de différends "purement conventionnels", collectifs "par nature", et qui relèvent de la seulecompétence du tribunal de grande instance. Ainsi, les salariés pris individuellement ne disposentd'aucune action propre dès lors qu'ils n'invoquent aucun intérêt personnel, qu'il s'agisse d'obtenirl'interprétation du texte conventionnel (Cass. soc., 30 avril 1997, n° 95-43.227, M. Gosse et autres c/Société niçoise d'exploitation balnéaire Casino Ruhl , Bull. civ. V, n° 153) ou même d'en réclamerl'application à l'ensemble du personnel sans présenter de requête propre (Cass. soc., 6 mai 1998, n°96-41.712, Société Les Verreries de la Somme c/ M. Salle , Dr. soc. 1998, p. 731, obs. G. Couturier).

D'autres différends peuvent opposer les salariés, bénéficiaires de l'accord, mais qui n'y sont pas partie,au sens juridique du terme. Les dispositions de l'article L. 135-6 du Code du travail ne sont alors pasdirectement applicables, la convention collective constituant un acte juridique auquel ils sontjuridiquement tiers. Cet accord est, toutefois, susceptible de faire naître, à leur profit, un certainnombre de droits (mais également de devoir) et il est alors normal que les salariés disposent d'actionsjudiciaires pour se faire rétablir dans leurs droits. L'action du salarié est alors rattachée au contrat detravail et relève bien de la compétence du conseils de prud'hommes (en ce sens, Cass. soc., 24 avril 1975,n° 74-40.509, CIE AIR-INTER SA c/ Chaminade Syndicat national des pilotes de ligne ).

De manière constante, la Cour de cassation a jugé que la compétence du conseil de prud'hommes nepouvait être écartée sous prétexte qu'il conviendrait, pour trancher le litige, de régler une difficultéd'interprétation de l'accord collectif applicable (Cass. soc., 10 mars 1965, n° 60-40.177 , D. 1965, p. 624,note J. Villebrun. Cass. soc., 21 mars 1984, n° 81-42.320, Colombo c/ SARL Sotrasi , JCP éd. E 1985, I,14472, n° 2, obs. B. Teyssié), ni même que la demande concernerait plusieurs salariés (Cass. soc., 11 juin1975, n° 74-40749, Besset et autres , Bull. civ. V, n° 321) ou émanerait de plusieurs salariés (Cass. soc.,26 mars 1981, n° 79-41.610, Société Sogara Carrefour c/ Dame Laffont , Bull. civ. V, n° 264. Cass. soc., 3octobre 1991, n° 87-43.250, M. Beninca et autres c/ Société CGA-HBS ).

C'est cette conception large de la compétence du conseil de prud'hommes que vient confirmer cet arrêten date du 12 juillet 2006.

L'affaire en cause

Dans cette affaire, un salarié se plaignait du non-respect par l'employeur d'un accord de réduction dutemps de travail et réclamait des dommages et intérêts. Le conseil de prud'hommes, puis la courd'appel, avaient considéré la juridiction prud'homale comme incompétente après avoir jugé, ensubstance, que la demande du salarié était artificielle et mal fondée, puisque ce dernier visait l'article L.135-6 du Code du travail applicable en principe aux seules parties signataires.

L'arrêt ayant rejeté le contredit est cassé, la Chambre sociale de la Cour de cassation considérant qu'ilrésulte de l'article L. 135-6 "que chaque salarié est recevable à agir individuellement afin d'obtenirl'exécution des engagements énoncés dans le cadre d'une convention ou d' un accord ou desdommages-intérêts contre les personnes liées par cet accord qui violeraient à leur égard cesengagements".

Une compétence élargie parfaitement justifiée

La conception large de la compétence du conseil de prud'hommes, confirmée par cet arrêt, ne peutqu'être approuvée. L'éparpillement actuel du contentieux du travail doit, en effet, être combattu dans lamesure où il nuit à une interprétation homogène du droit du travail. Dans la mesure où les demandesémanent de salariés agissant en leur nom personnel et pour leurs propres intérêts, il est souhaitable quele conseil de prud'hommes soit compétent pour apprécier un litige incontestablement individuel.

Il appartiendra, par conséquent, au conseil de prud'hommes de renvoi d'examiner la demandeprésentée par le salarié et de déterminer si le manquement invoqué est avéré et s'il a bien causé unpréjudice.

Compte tenu de la nature de l'accord "donnant-donnant", il est plus que vraisemblable qu'il obtiendragain de cause. Comme dans beaucoup d'accords de réductions du temps de travail issus de la loi

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 3

"Robien" (loi n° 96-502 du 11 juin 1996 ) ou de la loi "Aubry I" (loi n° 98-461 du 13 juin 1998 ), lebénéfice des aides publiques (réductions de charges salariales) dans le cadre d'une réduction de la duréedu travail était en effet subordonné à l'existence d'engagements en termes d'emplois sauvés (accordsdéfensifs) ou créés (accords offensifs). Ces accords s'accompagnaient souvent d'un gel partiel ou totaldes salaires, comme c'était le cas ici (la durée des échelons pour les salariés présents au moment de lamise en oeuvre de la réduction du temps de travail était en effet prolongée de seize mois). Or lesentreprises manquent parfois à leurs engagements en terme d'emplois, mais rarement au gel dessalaires, ce qui entraîne un préjudice évident pour les salariés (ainsi Cass. soc., 10 octobre 2002, n°00-42.906, M. Philippe Charrière c/ Mme Annie Antoine, F-P , Dr. soc. 2002, p. 1158, et les obs., où laresponsabilité de l'entreprise avait été retenue bien que celle-ci ait été placée en redressementjudiciaire).

II - Le fondement contestable du droit des salariés de réclamer l'application d'une convention collective

La nécessaire distinction de la recevabilité et du bien-fondé

Le débat sur le bien-fondé de la demande présentée par le salarié ne doit pas venir polluer la questionde sa recevabilité et de la juridiction compétente pour en connaître. Or le conseil de prud'hommes, puisla cour d'appel de Lyon, avaient, semble-t-il, mélangé les deux questions.

De ce point de vue, la solution semble donc pleinement justifiée.

L'autonomisation de l'article L. 135-6 du Code du travail

La question du fondement retenu pour justifier la solution est, en revanche, plus délicate.

Ce n'est pas la première fois que la Cour de cassation se fonde sur l'article L. 135-6 du Code du travailpour reconnaître aux salariés le droit de réclamer à l'employeur des dommages et intérêts lorsque cedernier n'a pas respecté ses obligations conventionnelles, singulièrement lorsque sont en cause desengagements en terme d'emploi (en ce sens Cass. soc., 22 janvier 1998, n° 95-45.400, Briou , Dr. soc.1998, p. 375, obs. G. Couturier).

C'est, en revanche, de manière totalement inédite que la Cour de cassation affirme très clairement quece droit se fonde sur le seul article L. 135-6 du Code du travail. Dans ses décisions précédentes, etsingulièrement dans l'arrêt "Briou" rendu en 1998 (préc.), la Cour visait, aux côtés des articles L. 135-5et L. 135-6 du Code du travail, l'article 1147 du Code civil () qui concerne bien la responsabilité civilecontractuelle de l'employeur, justifiant alors parfaitement le caractère individuel du litige et, partant, lacompétence du conseil de prud'hommes.

Une solution contestable sur le plan strictement juridique

Toute référence au Code civil disparaît donc des textes ici applicables, au profit des seules dispositionsdu Code du travail.

L'éviction de l'article 1147 du Code civil est audacieuse. L'article L. 135-6 du Code du travail neconcerne, en effet, que "les personnes liées par une convention ou un accord collectif de travail",c'est-à-dire les seules parties à l'accord. Or les salariés ne sont pas parties à l'accord, puisqu'ils y sont"représentés", tout au moins leurs intérêts, par les syndicats représentatifs qui seuls ont compétencepour conclure les accords collectifs. Certes, l'article L. 135-6 du Code du travail fonde bien l'obligationfaite aux parties signataires d'exécuter les accords et conventions collectives, mais il ne contient aucunedisposition de nature à fonder l'action personnelle des salariés, bénéficiaires de l'accord.

La mise à l'écart de l'article 1147 du Code civil s'inscrit, par conséquent, dans un mouvement plus vasted'autonomisation du droit du travail par rapport au droit civil, très sensible ces dernières annéessingulièrement lorsque est en cause la responsabilité civile des employeurs et des salariés (en matièrecontractuelle, en revanche, l'article 1134 du Code civil règne en maître. Notre étude La figure ducontrat dans le rapport de travail, Dr. soc. 2001, p. 802), comme en témoignent les derniersdéveloppements de la jurisprudence en matière de harcèlement moral (en ce sens, Cass. soc., 21 juin2006, n° 05-43.914, M. Jacques Balaguer, FP-P+B+R+I notre chron. L'employeur responsable duharcèlement moral dans l'entreprise, Lexbase Hebdo n° 223 du 13 juillet 2006 - édition sociale ).

Cette mise à l'écart des dispositions du Code civil, et le forçage des textes du Code du travail, n'est pas

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 4

satisfaisante. Elle ouvre, en effet, la porte à tous les arbitraires et à toutes les interprétations, renforçantencore un peu plus le sentiment d'insécurité en droit du travail.

Christophe RadéProfesseur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IVDirecteur scientifique de LexbaseHebdo - édition sociale Lexbase Hebdo n° 226 du 6 septembre 2006 - édition sociale

L'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire et les autorisations de licenciementdonnées dans ce cadre ne privent pas d'effet un engagement de garantie d'emploi prisantérieurement par l'employeur pour une durée déterminée.

Cass. soc., 02-02-2006, n° 04-41.275, société civile professionnelle (SCP) Laureau-Jeannerot, mandatairejudiciaire, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société Baumann, F-D

Ainsi que le souligne Marie Hautefort, les entreprises qui s'engageaient sur la base des loissubordonnant des exonérations de cotisations sociales à des engagements en terme de création ou demaintien d'emploi (loi n° 96-502 du 11 juin 1996 tendant à favoriser l'emploi par l'aménagement et laréduction conventionnels du temps de travail ; loi n° 98-461 du 13 Juin 1998 d'orientation etd'incitation relative à la réduction du temps de travail ) "pensaient que le pire qui pouvait leur arriver,c'était d'avoir à verser les cotisations dont elles avaient été indûment exonérées, si elles ne parvenaientpas à tenir leur objectif d'emploi".

Dans un arrêt rendu le 2 février 2006, la Cour de cassation précise que le risque peut largementdépasser le simple paiement de charges sociales (Cass. soc., 2 février 2006, n° 04-41.275, Société civileprofessionnelle (SCP) Laureau-Jeannerot, mandataire judiciaire, ès qualités de commissaire àl'exécution du plan de la société Baumann, F-D ).

Dans cette affaire, une société conclut, en application de la loi Robien du 20 décembre 1993 un accord"destiné à éviter des licenciements pour motif économique par la réduction-annualisation du temps detravail". Par cet accord, la société s 'engage à maintenir l'effectif pendant une durée de trois années àcompter du 1er octobre précédent, "sur les bases économique actuelles". Sur le fondement de cetaccord, la société conclut une convention avec l'Etat par laquelle elle s'engage au maintien de l'emploi.Par la suite, un avenant autorise une réduction d'effectifs de 25 personnes, du mois d'octobre 1998 aumois d'octobre 1999. L'engagement de garantie d'emploi est renouvelé pour deux ans à compter du 1ernovembre 1999. Une procédure de redressement judiciaire est ouverte le 1er février 2000 et lejuge-commissaire autorise des licenciements économiques sans se soucier des promesses faites par l'entreprise. Les salariés licenciés, estimant que l'accord de garantie d'emploi a été violé, saisissent lajuridiction prud'homale.

La Cour de cassation affirme que "l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard del'employeur et les autorisations de licenciement données dans ce cadre ne privent pas d'effet unengagement de garantie d'emploi pris antérieurement par l'employeur en faveur de son personnel, pourune durée déterminée". Ce faisant, la Cour écarte l'argument de l'employeur selon lequel l'accord avaitété signé "sur les bases économiques actuelles".

La Cour de cassation avait déjà eu l'occasion de faire preuve d'une grande sévérité s'agissant dunon-respect par l'employeur de clauses de garantie d'emploi résultant du contrat de travail (Cass. soc., 2février 1999, n° 96-40.773, M Bichard c/ Société Diamant Boart ) ou d'un accord d'établissement (Cass.soc., 1er avril 1997, n° 95-45.284, société Case Poclain aujourd'hui dénommée Case France, sociétéanonyme c/ M. Joaquim Carneiro ).

On sait donc désormais que l'employeur ne peut se libérer de son engagement de garantie d'emploi,même en cas de procédure judiciaire. Selon Marie Hautefort, "cela doit donner à réfléchir auxentreprises quand elles aborderont la négociation, désormais obligatoire tous les trois ans, sur la gestionprévisionnelle des emplois et compétences".

D'après Marie Hautefort, Maintien de l'emploi : gare aux promesses !, La rédaction Web des Echos, 28février 2006.

L'inexecution de l'engagement pris par accord collectif de maintenir les effectifs encontrepartie d'une réduction du temps de travail assortie d'une réduction de rémunérationjustifie l'action des salariés en réparation de leur préjudice.

Cass. soc., 10-10-2002, n° 00-42.906, M. Charrière c/ Mme Antoine, inédit

Le respect d'une garantie à laquelle l'employeur est tenu en application d'une conventioncollective constitue une obligation de faire dont la violation permet au salarié l'obtention dedommages-intérêts.

Cass. soc., 18-10-2006, n° 05-40.891, Mme Jacqueline Audibert, FS-P

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 5

1002 1.2. L'action en exécution d'une convention ou d'un accord collectifexercée par un syndicat

[E6768AEE]

Tous les syndicats, signataires de l'accord ou non dès lors que leurs membres sont liés par laconvention en cause, peuvent ester en justice pour son application à condition que les intéressésaient été avertis et n'aient pas déclaré s'y opposer.

Les syndicats peuvent exercer, pour leurs membres, des actions en justice pour l'applicationd'une convention collective à condition que les intéressés aient été avertis et n'aient pasdéclaré s'y opposer. Les syndicats peuvent alors agir sans mandat.

C. trav., art. L. 2262-9, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 135-4, al. 1, version du 14-11-1982, à jour

Lorsqu'un syndicat exerce une action en justice pour l'application d'une convention ou d'unaccord collectif, en faveur de ces membres, ceux-ci peuvent toujours intervenir à l'instanceengagée.

C. trav., art. L. 2262-10, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 135-4, al. 1, version du 14-11-1982, à jour

Lorsqu'une action née de la convention ou de l'accord collectif de travail est intentée, touteorganisation dont les membres sont liés par la convention ou l'accord peut intervenir àl'instance engagée.

C. trav., art. L. 2262-10, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 135-4, al. 2, version du 14-11-1982, à jour

Un syndicat ne peut se substituer à une action de l'un de ses membres née d'une conventioncollective, que si celui-ci a été averti de l'action envisagée et ne s'y est pas opposé.

C. trav., art. L. 2262-9, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 135-4, al. 1, version du 14-11-1982, à jour

Un syndicat n'a pas qualité pour agir en justice en son nom propre pour demanderl'exécution des engagements contractés dans un accord collectif dont il n'est pas signataire :seuls les syndicats signataires de l'accord ou de la convention le peuvent.

Cass. soc., 03-03-1998, n° 96-11.115Cass. soc., 10-05-1994, n° 92-14.097

Un syndicat non signataire d'un accord collectif de travail mais auquel ses membresadhérents sont liés peut agir en exécution des droits que les salariés tirent de l'accord ouintervenir à une instance engagée en défense de l'intérêt collectif.

Cass. soc., 14-02-2001, n° 98-46.149

Le droit du syndicat d'ester en justice pour l'application d'un accord collectif

L'arrêt rendu le 14 février 2001 par la Cour de cassation (Cass. soc. 14 février 2001, pourvoi n° 98-46.149) constitue une nouveauté.

L'article L135-4 du Code du travail permet à un syndicat dont les membres adhérents sont liés à une convention ou un accord collectif de travail, soit d'agir en justice pour l'exécution des droits que les salariés tirent de cet accord, à la condition de les avertir et qu'ils ne s'y opposent pas, soit d'intervenir à une instance engagée, à raison de l'intérêt collectif que la solution du litige peut présenter pour ses membres.

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 6

Dans l'arrêt dont il est question, la Cour estime pour la première fois que cet article concerne tous les syndicats ayant la capacité d'ester en justice qu'ils soient signataires de l'accord ou non dès lors que leurs membres sont liés par l'accord ou la convention en cause.

En revanche, l'article L135-5 du Code du Travail, qui permet aux syndicats d'agir en justice contre les autres organisations, leurs propres membres ou toute personne liée par une convention ou accord collectif pour obtenir l'exécution des engagements contractés ne concerne, lui que les seuls syndicats signataires de cet accord. Le syndicat agit alors en son nom propre.

L'extension de la convention a pour effet de la rendre obligatoire, les syndicats professionnelsnon signataires sont donc recevables à en demander l'exécution, leur non-respect causantnécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession.

Cass. soc., 12-06-2001, n° 00-14.435

La constitution de partie civile d'un syndicat, à une instance engagée par un salarié, en vuedu paiement de différentes sommes en vertu d'une convention collective, est recevable.

Cass. soc., 28-11-1995, n° 92-43.742

Le jugement qui rejette l'intervention d'un syndicat dans l'instance engagée par un salariécontre son employeur, pour l'application d'une convention collective, au motif que lepréjudice collectif n'est pas établi, viole l'article L.135-4, al.2.

Cass. soc., 28-11-1995, n° 92-43.742

Tout syndicat, qu'il soit signataire ou non, peut intervenir à l'instance engagée en exécutiond'une convention collective qui lient ses adhérents, en raison de l'intérêt collectif que lasolution du litige peut présenter pour ses membres.

Cass. soc., 09-04-2002, n° 99-45.963, publié, FS-P

Le syndicat désirant exercer une action de substitution au nom de certains de ses membresdoit indiquer les éléments permettant de déterminer ceux au nom desquels il entend agir.

Cass. soc., 19-12-1978, n° 77-40.826

Un syndicat ne peut se substituer à des salariés pour exercer leur action individuelle enannulation d'une mesure disciplinaire tenue pour abusive, l'action n'étant pas fondée surune convention collective.

Cass. soc., 02-02-1977, n° 75-40.384

Une action en substitution exercée par un syndicat peut aboutir à la condamnation del'employeur à verser aux intéressés, au nom desquels l'action a été intentée, les sommes duesen application d'un accord.

Cass. soc., 20-06-1990, n° 88-12.516

La possibilité pour les salariés d'agir individuellement devant le conseil de prud'hommespour contester la qualification de cadre autonome donnée à leurs fonctions n'est pasexclusive de l'action engagée par une organisation syndicale.

CA Paris, 1ère ch., S, 18-12-2002, n° 2001/16901, SA Hachette Livre c/ Syndicat national livre-édition CFDT

L'action du syndicat tendant à la condamnation de l'employeur à constituer une réserve

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 7

spéciale de participation (RSP) en application d'un accord de participation n'est pasrecevable.

Cass. soc., 03-05-2007, n° 05-12.340, Société de fabrication et commercialisation Sofaco, FS-P+B

Précisions

L'action du syndicat tendant à la condamnation de l'employeur à constituer une réserve spéciale departicipation (RSP) n'est pas recevable. Telle est la solution qui résulte d'un arrêt du 3 mai 2007 (Cass.soc., 3 mai 2007, n° 05-12.340, Société de fabrication et commercialisation Sofaco, FS-P+B ). En l'espèce,des salariés ont ratifié à la majorité des deux tiers un contrat de participation aux résultats del'entreprise. Ce contrat prévoyait que, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties contractantes, 3mois au moins avant la date de son échéance normale , il se renouvellerait par tacite reconduction et parexercice. La société ayant cessé d'appliquer le contrat à compter de l'exercice ouvert en 1995, unsyndicat a saisi la juridiction civile d'une demande tendant à sa condamnation à constituer une RSPpour divers exercices et à la répartir entre les salariés conformément au contrat de participation. Lacour d'appel ayant déclaré l'action du syndicat recevable, la société se pourvoit en cassation. En vain.Selon la Cour de cassation, indépendamment de l'action réservée par l'article L. 135-5 du Code dutravail () aux syndicats liés par une convention ou un accord collectif de travail, les syndicatsprofessionnels sont recevables à demander, sur le fondement de l'article L. 411-11 de ce code (),l'exécution d'une convention ou d'un accord collectif de travail, même non étendu, son inapplicationcausant nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession. Or, en l'espèce, l'action dusyndicat tendait à la condamnation de l'employeur à constituer une RSP d'un certain montant pourchacun des exercices litigieux ainsi qu'à sa répartition entre les salariés de l'entreprise et non à laconstitution de droits déterminés au profit de salariés nommément désignés . Dès lors, le syndicat nedéfendait pas en son nom propre les intérêts individuels des salariés.

Les dispositions d'un accord collectif ne peuvent restreindre les droits syndicaux que lesreprésentants des salariés tiennent des lois et règlements en vigueur.

Cass. soc., 27-05-2008, n° 06-46.403, Mme Christiane Fouque, F-P

Les syndicats sont recevables à demander sur le fondement de l'article L. 2132-3 l'exécutiond'une convention ou d'un accord collectif de travail même non étendu, son inapplicationcausant nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession.

Cass. soc., 11-06-2008, n° 06-22.167, syndicat CGT des salariés d'Eurocopter, F-D

1003 1.3. L'action en exécution d'une convention ou d'un accord collectifexercée par les groupements signataires

[E6769AEG]

Les organisations, syndicats signataires, liées par une convention ou un accord, peuvent en leurnom propre, agir contre toute autre personne, ou propres membres liés par la convention, pourobtenir l'exécution des engagements ou des dommages-intérêts.

Les organisations liées par une convention ou un accord collectif de travail, peuvent en leurnom propre, agir contre toute autre personne liée par la convention ou l'accord pour obtenirsoit l'exécution des engagements soit des dommages-intérêts.

C. trav., art. L. 2262-11, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 135-5, version du 14-11-1982, à jour

Exécution des conventions collectives et action en justice des syndicats

Notre droit du travail fait coexister plusieurs types d'action en justice des syndicats qui ont chacuneleurs conditions de recevabilité. On doit ainsi soigneusement distinguer l'action propre du syndicat,l'action exercée au nom du salarié auquel le syndicat se substitue et l'action "syndicale" de défense desintérêts collectifs (J. Pélissier, A. Supiot, A. Jeammaud, Précis Dalloz, 21ème éd., 2002, §§ 568 et s., A.Mazeaud, Droit du travail, 3ème éd., 2002, Montchrestien, §§ 277 et s.). Un tel triptyque se retrouveprécisément en matière d'inexécution des conventions et accords collectifs de travail. Il est par suiteimportant d'essayer de tracer des frontières claires entre ces différentes actions, qui ont en commun detrouver leur origine dans un même événement : le non-respect de dispositions conventionnelles.

Parce que l'on ne saurait trop rappeler que la convention ou l'accord collectif de travail est d'abord etavant tout un contrat, les syndicats disposent d'une action contractuelle, qu'ils exercent dans leur intérêtpropre, afin d'obtenir l'exécution de l'acte collectif ou pour réclamer des dommages et intérêts en cas

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 8

d'inexécution. Cette action est réservée aux seuls syndicats signataires de la convention ou de l'accordcollectif qui n'a pas été respecté. Cette condition est expressément visée par le texte applicable en lamatière, à savoir l'article L. 135-5 du Code du travail () et constamment affirmée par la Cour decassation (v., par ex., Cass. soc., 14 février 2001, n° 98-46.149, Société Moulinex c/ Mme Delalande etautres, publié ).

On notera que cette action contractuelle, quoique le plus souvent exercée par les syndicats de salariés àl'encontre d'employeurs qui ne respecteraient pas les dispositions conventionnelles, est égalementouverte aux groupements d'employeurs, non seulement contre leurs propres membres (1), mais aussicontre des syndicats de salariés qui ne respecteraient pas les obligations mises à leur charge par un actecollectif. On admettra qu'une telle hypothèse devrait rester rarissime étant entendu que les conventionset accords collectifs ne renferment en général aucune obligation à la charge des syndicats de salariés (2).

Enfin, il importe de souligner que l'action en justice exercée sur le fondement de l'article L. 135-5 duCode du travail () ne produit pas d'effet au bénéfice individuel de chacun des salariés, à la différence del'action de substitution de l'article L. 135-4 du même code ( ; Cass. soc., 20 juin 1990, n° 88-12.516,Société d'encouragement pour l'amélioration des races de chevaux c/ Syndicat CGT des employés duPari mutuel, publié ; Cass. soc., 12 janvier 1994, n° 91-20.443, SA Socatrem c/ Syndicat FILPAC CGTde Reims, inédit ).

Il résulte de ce dernier texte que les organisations ou groupements, dont les membres sont liés par uneconvention ou un accord collectif de travail, peuvent exercer toutes les actions en justice qui naissent dece chef en faveur de leurs membres, sans avoir à justifier d'un mandat de l'intéressé. Toutefois, etcomme pour toutes les actions dites "de substitution", l'intéressé doit avoir été dûment averti par lesyndicat et ne doit pas s'être opposé à cette initiative (Sur cette question, v. la décision du Conseilconstitutionnel du 25 juillet 1989 n°89-257 DC ). En outre, il peut toujours intervenir à l'instanceengagée par l'organisation ou le groupement. Enfin, l'alinéa 2 de l'article L. 135-4 () permet à toutgroupement ou organisation d'intervenir à l'instance engagée par une personne ou une autreorganisation ou groupement, à raison de l'intérêt collectif que la solution du litige peut présenter pourses membres.

S'agissant des conditions de recevabilité de l'action en justice fondée sur l'article L. 135-4 du Code dutravail, celle-ci est ouverte aux syndicats, dont les membres sont liés par une convention ou un accordcollectif de travail. Il faut donc comprendre, pour ce qui est des syndicats de salariés, que le syndicatsera recevable à agir dès lors que ses membres sont soumis à l'acte collectif. En revanche, dès lors quecette condition est remplie, il n'y a pas lieu de tenir compte du fait que le syndicat est signataire ou nonde la convention ou de l'accord collectif en cause (Cass. soc., 14 février 2001, n° 98-46.149, SociétéMoulinex c/ Mme Delalande et autres, publié ; Cass. soc., 9 avril 2002, n° 99-45.963, Société Autoroutesdu Sud de la France c/ Syndicat CGT ASF, publié ).

Le syndicat n'agissant pas ici dans son intérêt propre, il apparaît normal que cette action ne soit pasréservée aux seuls syndicats signataires de l'acte collectif, cette condition n'étant en outre nullementvisée par l'article L. 135-4 du Code du travail, à la différence de l'article L. 135-5. Un arrêt récent de laCour de cassation invite toutefois à s'interroger sur ce bel ordonnancement, dont on peut se demanders'il survivra, à plus ou moins long terme, à cette solution.

En effet, dans une décision rendue le 12 juin 2001, la Chambre sociale a affirmé qu'"indépendammentdes actions réservées aux syndicats par les articles L. 135-4 et L. 135-5 du Code du travail, en casd'extension d'une convention ou d'un accord collectif qui a pour effet de rendre les dispositions étenduesapplicables à tous les salariés et employeurs compris dans leur champ d'application, les syndicatsprofessionnels sont recevables à en demander l'exécution sur le fondement de l'article L. 411-11 duCode du travail, leur non-respect étant de nature à causer nécessairement un préjudice à l'intérêtcollectif de l'ensemble de la profession" (Cass. soc., 12 juin 2001, n° 00-14.435, Société Euro Disney SCAet autres c/ Fédération nationale des syndicats du spectacle de l'audiovisuel et de l'action culturelle CGTpublié ).

On ne reviendra pas ici sur le fondement de cette solution qui a pour conséquence première depermettre à un syndicat de demander l'exécution d'une convention ou d'un accord collectif sans y avoirpour autant apposé sa signature. Il importe, en revanche, de s'intéresser à la portée de cette décision etde se demander principalement si la solution retenue, pour l'heure cantonnée aux conventions etaccords collectifs ayant fait l'objet d'un arrêté d'extension, pourrait à l'avenir être appliquée àl'ensemble des actes collectifs. Selon certains auteurs, une réponse affirmative doit être apportée à cettequestion, étant entendu que la violation d'une convention ou d'un accord collectif, quel qu'il soit, estconstitutive d'une atteinte à l'intérêt collectif de la profession et commande, de ce fait, la recevabilité del'action en justice fondée sur l'article L. 411-11 (), pour demander l'exécution des dispositionsconventionnelles en cause. En d'autres termes, un syndicat devrait, dans tous les cas, être admis àdemander en justice l'exécution d'une convention ou d'un accord collectif sans pour autant en êtresignataire. Force est de constater qu'une telle solution reviendrait à contourner le jeu de l'article L.135-5 du Code du travail (). Il suffirait à un syndicat non signataire de se fonder sur l'article L. 411-11du Code du travail pour exiger d'un employeur le respect des dispositions conventionnelles oudemander des dommages intérêts pour l'inexécution de ces mêmes dispositions. On avouera qu'une tellesolution ne satisfait guère, en ce qu'elle revient à écarter purement et simplement l'application d'unedisposition du Code du travail, au profit d'une autre.

Pour autant, on peut se demander si la Cour de cassation ne sera pas d'une certaine façon tenue de seranger à cette opinion, dans la mesure où elle paraît s'être aujourd'hui enfermée dans une constructionjurisprudentielle d'ensemble qui fait prévaloir l'aspect réglementaire des conventions et accordscollectifs de travail.

Il importe en effet de rappeler ici que, dans un arrêt Cegelec, désormais fameux, rendu le 29 mai 2001(Cass. soc., 29 mai 2001, n° 98-23.078, Union nationale des syndicats CGT-Cegelec c/ Société Cegelec etautres, publié ), la Cour de cassation est venue affirmer qu'il résulte des articles L. 412-21 (), L. 426-1 ()et L. 438-10 () du Code du travail que les dispositions d'une convention ou d'un accord collectif quitendent à améliorer l'exercice du droit syndical dans les entreprises ou les institutions représentatives

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 9

du personnel sont applicables de plein droit à tous, et en particulier aux syndicats représentatifs, sansqu'il y ait lieu de distinguer entre ceux qui ont signé ou adhéré à la convention ou à l'accord collectif etles autres.

Etait notamment en cause, dans cette espèce, le financement des syndicats par l'employeur, financementqui était réservé aux syndicats signataires. Or, en admettant qu'un tel financement ne puisse pas êtreréservé aux syndicats signataires, que se passe-t-il si l'employeur refuse malgré tout de verser lefinancement prévu par l'accord collectif aux syndicats non signataires ? On est alors bien obligé deconsidérer que ces derniers ne peuvent agir en justice pour obtenir l'exécution de cet engagement ou desdommages intérêts pour réparer son inexécution, puisque précisément l'article L. 135-5 () soumet cetteaction contractuelle à la signature de l'accord par le syndicat. L'employeur serait dès lors tenu à uneobligation dépourvue de sanction en cas d'inexécution. On mesure là toutes les limites de la positionconsistant à vouloir nier tout aspect contractuel à l'accord collectif. Et on comprend mieux par là mêmequ'il soit désormais fait appel à l'article L. 411-11 du Code du travail () et à la solution retenue dansl'arrêt du 12 juin 2001. On admettra que l'intérêt collectif de la profession est en cause, mais qui nieraque c'est aussi et peut-être d'abord et avant tout de l'intérêt propre du syndicat dont il est question ?

En tout état de cause, et sauf à abandonner les rivages du "tout réglementaire" en matière deconventions et accords collectifs, on ne voit pas comment la Cour de cassation pourrait éviter d'étendrela solution retenue dans l'arrêt du 12 juin 2001 à l'ensemble des actes collectifs.

Gilles AuzeroMaître de conférences à l'Université Montesquieu Bordeaux IV

(1) L'article L. 135-5 du Code du travail dispose en effet que cette action peut être exercée "contre lesautres organisations ou groupements, leurs propres membres ou toute personne liée par la conventionou l'accord (...)".

(2) On pense principalement ici aux dispositions conventionnelles obligeant les syndicats, et eux seuls, àrespecter une procédure de concertation avant d'appeler à la grève.

LEXBASE HEBDO n° 85 du Jeudi 11 Septembre 2003 - Edition SOCIALE

Les organisations liées par une convention ou un accord collectif de travail, peuvent en leurnom propre agir contre toute autre personne liée par la convention ou l'accord, y comprisleurs propres membres.

C. trav., art. L. 2262-11, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 135-5, version du 14-11-1982, à jour

L'extension de la convention a pour effet de la rendre obligatoire, les syndicats professionnelsnon signataires sont donc recevables à en demander l'exécution, leur non respect causantnécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession.

Cass. soc., 12-06-2001, n° 00-14.435

Une action exercée par un syndicat en vertu de l'article L.135-5 du code du travail ne permetque l'exécution des engagements contractés et éventuellement l'obtention dedommages-intérêts.

Cass. soc., 12-01-1994, n° 91-20.443

L'action fondée sur l'article L.135-5 C.Trav. ne permet d'obtenir la condamnation del'employeur au paiement de sommes dues à des adhérents en application d'une conventioncollective, cette possibilité relevant de l'article L.135-4 C.Trav.

Cass. soc., 20-06-1990, n° 88-12.516

L'action du comité d'entreprise sur le fondement de l'article L. 135-5 n'est pas recevable. Cetarticle ne concerne que les organisations définies à l'article L. 132-2 CT qui ont le pouvoir deconclure une convention ou un accord collectif de travail.

Cass. soc., 20-09-2006, n° 04-10.765, association Les Amis du Jeudi Dimanche, FS-P+B

L'action en exécution d'une convention collective reste fermée au comité d'entrep

Lorsqu'un employeur se refuse d'appliquer une convention ou un accord collectif auquel il est

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 10

impérativement soumis, les syndicats signataires de l'acte en cause peuvent , sur le fondement del'article L. 135-5 du Code du travail (), agir en justice pour obtenir l'exécution des engagementscontractés et, le cas échéant, des dommages-intérêts. En revanche, il est de jurisprudence constante quecette disposition ne concerne pas le comité d'entreprise, qui se voit donc interdire d'ester en justice surle même fondement. Dans un intéressant et important arrêt rendu le 20 septembre dernier, la Chambresociale vient réaffirmer avec force cette solution (Cass. soc., 20 septembre 2006, n° 04-10.765,Association Les Amis du Jeudi Dimanche c/ Syndicat départemental CFDT des services de santé et desservices sociaux du Rhône et autres, FS-P+B ). Si elle ne constitue pas une surprise, cette décision n'ensuscite pas moins un certain embarras eu égard au fait que le comité d'entreprise peut désormais êtrehabilité à conclure des conventions et accords collectifs de travail.

I - L'action en exécution d'un accord collectif intentée par un syndicat

Présentation

L'action en justice des syndicats présente la particularité d'être plurale. Il existe en effet différents typesd'action syndicale (V. notamment, J. Pélissier, A. Supiot, A. Jeammaud, Droit du travail, Précis Dalloz,22ème éd. 2004, pp. 690 et s.). Tout d'abord, et ainsi que l'énonce expressément l'article L. 411-11 duCode du travail (), les syndicats peuvent agir dans l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.Ensuite, et par exception au principe selon lequel "nul en France ne plaide par procureur", denombreuses dispositions autorisent les organisations syndicales de salariés à se substituer à ces dernierspour exercer une action en justice (F. Petit, L'action en substitution, un cadeau promis à un avenirmeilleur, Dr. Soc. 2004, p. 262). Enfin, les syndicats, en tant qu'ils sont titulaires de la personnalitéjuridique, peuvent ester en justice pour défendre leurs intérêts propres de groupement.

Relève de cette dernière catégorie l'action du syndicat signataire d'une convention ou d'un accordcollectif de travail pour en obtenir l'application ou pour réclamer des dommages-intérêts en casd'inexécution. Cette action contractuelle, visée par l'article L. 135-5 du Code du travail, est, en effet, uneaction qu'il exerce dans son intérêt propre (V. en ce sens, J. Pélissier, A. Supiot, A. Jeammaud, ouvragepréc., § 575).

Régime juridique

Au terme de l'article L. 135-5 du Code du travail, "les organisations ou groupements ayant la capacitéd'ester en justice, liés par une convention ou un accord collectif de travail, peuvent en leur nom propreintenter contre les autres organisations ou groupements, leurs propres membres ou toute personne liéepar la convention ou l'accord, toute action visant à obtenir l'exécution des engagements contractés et, lecas échéant, des dommages intérêts".

Encore que la disposition qui vient d'être citée ne puisse être réduite à cette seule hypothèse (1), cetteaction est la plupart du temps mise en oeuvre par un syndicat à l'encontre d'un employeur quin'applique pas une convention ou accord collectif auquel il est impérativement soumis. Ainsi que lelaisse clairement entendre le texte lorsqu'il vise "les organisations ou groupements [...] liés par uneconvention ou un accord collectif" (2), cette action en justice est ouverte aux seuls syndicats signatairesde la norme conventionnelle (Cass. soc., 10 mai 1994, n° 92-14.097, Syndicat CGT Sollac Dunkerque c/Société Sollac , Bull. civ. V, n° 173). La Cour de cassation a, toutefois, décidé qu'un syndicat nonsignataire peut, lorsque la convention a été étendue, invoquer l'atteinte à l'intérêt collectif de laprofession pour exercer une action fonde sur l'article L. 411-11 du Code du travail (Cass. soc., 12 juin2001, n° 00-14.435, Société Euro Disney SCAet autres c/ Fédération nationale des syndicats du spectaclede l'audiovisuel , Dr. soc. 2001, p. 1019, note P.-H. Antonmattéi). Réservée pour l'heure aux seulesconventions collectives étendues, cette solution pourrait être, à terme, appliquée à l'ensemble desconventions et accords collectifs de travail, ainsi que le souhaitent d'ailleurs certains auteurs (H.Nasom-Tissandier et P. Rémy, obs. ss. l'arrêt cité : D. 2002, p. 361). Cette extension, qui aurait poureffet de rendre sans objet les prescriptions de l'article L. 135-5 et qui reviendrait à nier purement etsimplement la dimension contractuelle de la norme conventionnelle, serait pour le moins critiquable.

En tout état de cause, une action fondée sur l'article L. 135-5 du Code du travail doit être réservée auxseules organisations syndicales signataires. Pour en revenir à l'espèce commentée, l'associationemployeur critiquait la décision des juges d'appel qui, rappelons-le, avait admis l'action en justiceintentée par le syndicat départemental CFDT des services de santé et sociaux du Rhône. Il était, en effet,argué que l'accord collectif en cause avait été signé par la fédération des services de santé et sociauxCFDT et non par le syndicat départemental. Par suite, en admettant l'action en justice intentée par cedernier, la cour d'appel aurait violé l'article L. 135-5.

Une telle argumentation avait peu de chance de prospérer et on ne sera pas surpris qu'elle soit rejetéepar la Cour de cassation qui affirme que "le syndicat départemental CFDT des services de santé et desservices sociaux du Rhône, membre de la fédération des services de santé et sociaux CFDT signataire del'accord, est lié par l'accord au sens de l'article L. 135-5 du Code du travail". Cette solution doit êtreentièrement approuvée. Le terme "lié", visé par cette disposition, ne doit pas être compris commerenvoyant uniquement aux seules organisations ayant apposé leur signature au bas de la convention ou

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 11

de l'accord collectif. Doivent être considérées comme "liées" par la norme conventionnelle l'ensembledes syndicats membres de la fédération ou de la confédération signataire (3). Il en va d'ailleurs de mêmede l'employeur membre d'un groupement ayant signé l'acte juridique.

Il convient, pour conclure sur ce point, de souligner que l'action contractuelle ne produit pas d'effet aubénéfice individuel de chacun des salariés (Cass. soc., 20 juin 1990, n° 88-12.516, Sociétéd'encouragement pour l'amélioration des races de chevaux c/ Syndicat CGT des employés du Parimutuel , Bull. civ. V, n° 308). Seule l'action de substitution fondée sur l'article L. 135-4 du Code dutravail peut produire un tel effet (4). Action dont on doit relever qu'elle n'est pas réservée aux seulesorganisations signataires, mais ouverte à toutes celles, signataires ou non, dont les membres sont liés parla convention ou l'accord collectif de travail (Cass. soc., 14 février 2001, n° 98-46.149, Société Moulinexc/ Mme Delalande et autres , Bull. civ. V, n° 56 ; Dr. soc. 2001, p. 572, obs. M. Miné).

II - L'action en exécution d'un accord collectif intentée par le comité d'entreprise

Rejet de l'action intentée par le comité

Afin de déclarer recevable l'action du comité d'entreprise de l'association, les juges d'appel avaientrelevé que celui-ci justifie de son intérêt à agir dès lors que la question soumise à une incidence sur lamasse salariale sur laquelle est calculée la subvention de fonctionnement annuelle fixée à 0,2 % de laditemasse et sur le montant de la contribution patronale aux activités sociales et culturelles (5).

Cette argumentation n'était pas dénuée d'ingéniosité. Conformément aux règles les plus élémentaires dela procédure civile, le comité d'entreprise doit, pour pouvoir ester en justice, faire état d'un préjudicepersonnel et direct (NCPC, art. 31 ; v. aussi, sur les actions en justice du comité, M. Cohen, Le droit descomités d'entreprise et des comités de groupe, LGDJ, 8ème éd., 2005, pp. 450 et s.). Outre qu'onpourrait toujours discuter de l'existence d'un préjudice direct en l'espèce (6), c'est surtout la qualité àagir du comité qui faisait, ici, défaut. Ainsi que le juge, en effet, la Cour de cassation de manièreconstante, un comité d'entreprise n'a pas le pouvoir d'exercer une action en justice au nom des salariéspour l'application d'un accord collectif (Cass. soc., 18 mars 1997, n° 95-15.010, M. Harter, ès qualités deprésident du comité d'établissement des automobiles Peugeot à Mulhouse et autre c/ Comitéd'établissement des automobiles Peugeot à Mulhouse et autres , Dr. soc. 1997, p. 544, obs. G. Couturier.V. aussi CA Paris, 26 septembre 2001 : D. 2001, IR, p. 3011).

C'est cette solution que reprend la Chambre sociale dans l'arrêt sous examen, en affirmant "que s'ilrésulte de l'article L. 135-5 du Code du travail que les organisations ou groupements ayant la capacitéd'ester en justice, liés par une convention ou un accord collectif de travail, peuvent en leur nom propreintenter contre toute personne liée par la convention ou l'accord toute action visant à obtenir l'exécutiondes engagements contractés et le cas échéant, des dommages-intérêts, cette disposition ne concerne pasle comité d'entreprise mais seulement les organisations ou groupements définis à l'article L. 132-2 duCode du travail qui ont le pouvoir de conclure une convention ou un accord collectif de travail". Si cettesolution paraît s'inscrire dans la droite ligne de la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation, saportée mérite d'être précisée.

Portée de la solution retenue par la Cour de cassation

L'idée selon laquelle le comité d'entreprise ne peut exercer une action en justice sur le fondement del'article L. 135-5 du Code du travail paraît tomber sous le sens. En effet, cette institution ne saurait êtreconsidérée comme "liée" par une convention ou un accord collectif de travail. Pour reprendre le motifde principe retenu par la Cour de cassation, le comité n'a pas le pouvoir de conclure un tel actejuridique qui, en application de l'article L. 132-2, est réservé aux seuls organisations et groupementsvisés à cet article, c'est-à-dire aux syndicats de salariés et aux groupements d'employeurs. Le fait que lecomité ait apposé sa signature au bas de l'accord collectif, au côté des signataires habilités, ne changerien à la solution (7) : il n'a pas le pouvoir de conclure un tel acte et ne peut dès lors être considérécomme "lié" par celui-ci.

Un tel raisonnement présente toutefois le défaut majeur de laisser de côté le fait qu'en application de laloi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (loin° 2004-391 ), le comité d'entreprise peut désormais, sous certaines conditions, être habilité à concluredes conventions et accords collectifs de travail (C. trav., art. L. 132-26 ). Or, à supposer que tel soit lecas, le comité peut-il agir en justice pour contraindre l'employeur à appliquer l'accord et, le cas échéant,demander des dommages-intérêts ? On est évidemment tenté de répondre par l'affirmative. Mais surquel fondement ? Ainsi que le laisse entendre la motivation adoptée par la Cour de cassation dansl'arrêt sous examen, pas sur le fondement de l'article L. 135-5 qui "ne concerne pas le comité maisseulement les organisations ou groupements définis à l'article L. 132-2 du Code du travail qui ont lepouvoir de conclure une convention ou un accord collectif de travail". On doit avouer ici un certainembarras, faute pour le législateur de 2004 d'avoir pris soin de modifier cette disposition. Il est, enoutre, difficile d'avancer que le comité d'entreprise pourrait être assimilé aux "organisations" ou"groupements" visés par l'article L. 135-5 du Code du travail et de compter par suite sur uneinterprétation renouvelée de celui-ci par la Cour de cassation, à la lumière des modifications apportées

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 12

par la loi précitée.

Il reste que la convention ou l'accord collectif est fondamentalement un contrat et que, dès lors, lecomité d'entreprise pourrait fonder son action en justice sur les règles du droit commun. Il convient à cepropos de relever que, dans un arrêt rendu le 5 juillet 2006 commenté dans ces mêmes colonnes, la Courde cassation a décidé que le comité d'entreprise, lorsqu'il a été co-signataire d'un accord de fin de conflitavec un syndicat représentatif et que l'employeur ne respecte pas cet accord, a qualité pour agirconjointement avec le syndicat, pour demander l'application de l'accord ou l'indemnisation de sonpréjudice (Cass. soc., 5 juill. 2006, n° 04-43.213, Société TCAR, publié et les obs. de N. Mingant,L'action n justice du comité d'entreprise signataire d'un accord de fin de conflit, Lexbase Hebdo n° 226du 7 septembre 2006 - édition sociale ).

Gilles AuzeroProfesseur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV Article paru dans Lexbase Hebdo n°230 du 5 octobre 2006 - édition sociale

(1) Ce texte permet en outre à un syndicat de salariés d'agir contre un autre syndicat ou encore à uneorganisation ou un groupement d'agir contre ses propres membres.(2) Souligné par nous.(3)Inversement, sera "liée" par la convention la fédération ou la confédération à laquelle appartient lesyndicat signataire.(4) On pourra dès lors s'étonner que la Cour de cassation n'ait pas répondu àl'argumentation de l'association employeur qui avançait que l'action du syndicat ayant pour objet leversement à des salariés d'une indemnité différentielle de réduction du temps de travail prévue par unaccord collectif, elle n'entrait pas dans les prévisions de l'article L. 135-5 du Code du travail. (5) Il fautici rappeler que l'action du comité d'entreprise, comme celle du syndicat, avait pour objet l'applicationd'un accord collectif prévoyant le versement d'une indemnité différentielle de réduction du temps detravail.(6) En prenant appui sur la jurisprudence de la Cour de cassation relative aux hypothèses danslesquelles un comité d'entreprise porte plainte avec constitution de partie civile contre les dirigeantscoupables de certaines infractions (V. par ex., Cass. crim., 7 juin 1983, n° 83-91.210, Dame Cointreau c/SA Rémy-Martin , Bull. crim., n° 172).(7) Il reste à se demander si, dans pareille hypothèse, le comité nepourrait pas exercer une action contractuelle de droit commun, fondée sur l'article 1147 du Code civil().

1004 2. L'action en nullité d'une convention ou d'un accord collectif de travail [E6756AEX]

La nullité d'une convention ou d'un accord peut être invoquée en cas d'incapacité à conclure, device du consentement ou si les dispositions dérogent à l'ordre public absolu.

La nullité d'une convention ou d'un accord collectif peut être invoquée en cas d'incapacité àconclure, c'est-à-dire lorsque la représentativité de l'organisation signataire peut être mise encause ou lorsqu'il y a défaut d'habilitation des signataires.

C. civ., art. 1108, version du 17-02-1804, à jour

La nullité d'une convention ou d'un accord collectif peut être invoquée en cas de vices duconsentement (violences, dol).

C. civ., art. 1109, version du 17-02-1804, à jour

Une convention ou un accord collectif de travail peut être annulé lorsqu'il contient desdispositions dérogeant à l'ordre public absolu.

C. trav., art. L. 132-4, version du 14-11-1982, à jourC. trav., art. L. 2251-1, version du 01-05-2008, à jour

La nullité de l'accord relatif au développement du dialogue social dans l'artisanat du 12décembre 2001 est écartée par la cour d'appel de Paris.

CA Paris, 18e, C, 18-05-2006, n° 04/08809, ASSOCIATION MEDEF MOUVEMENT DES ENTREPRISES DEFRANCE c/ CFDT CONFEDERATION FRANCAISE DEMOCRATIQUE DU TRAVAIL

La nullité d'une convention ou d'un accord collectif est encourue lorsque toutes les

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 13

organisations syndicales n'ont pas été convoquées à sa négociation, ou si l'existence denégociations séparées est établie.

Cass. soc., 10-10-2007, n° 06-42.721, société SEB, F-P+B

Nullité d'un accord négocié avec une partie seulement des syndicats : nouveau pri

La nullité des conventions et accords collectifs de travail reste un contentieux récent et jusqu'à présentrare, ce qui s'explique, en partie, par l'objet traditionnel de ces actes qui est l'obtention d'avantagespour les salariés. Les conventions et accords collectifs de travail ne contenant, désormais, plus seulementdes avantages pour les salariés, les syndicats non signataires contestent de plus en plus fréquemmentleur contenu. A quelles conditions un syndicat peut-il obtenir la nullité d'un accord collectif de travail ?Dans l'espèce commentée du 10 octobre 2007, des syndicats convoqués à une négociation qui n'avait pasabouti (aucun accord n'ayant été conclu, aucun procès-verbal de désaccord n'ayant été signé),entendaient obtenir l'annulation d'un accord signé postérieurement par deux syndicats, au motif qu'ilsne l'avaient pas négocié, ce dernier étant différent de celui qui leur avait été présenté lors de la premièreréunion. La Cour de cassation vient, ici, affirmer, dans un attendu de principe, que la nullité d'uneconvention ou d'un accord collectif de travail est encourue lorsque toutes les organisations syndicalesn'ont pas été convoquées à sa négociation, ou si l'existence de négociations séparées est établie, ou,encore, si elles n'ont pas été mises à même de discuter les termes du projet soumis à la signature endemandant, le cas échéant, la poursuite des négociations jusqu'à la procédure prévue pour celle-ci. Ceshypothèses de nullité, bien qu'elles soient pour la première fois, à notre connaissance, affirmées demanière aussi catégorique, doivent pleinement être approuvées.

1. Encadrement de la nullité des accords collectifs de travail Notion et formation de la conventioncollective de travail

L'accord collectif de travail est un acte juridique conclu entre des syndicats de salariés, d'une part, et unou plusieurs employeurs, d'autre part (C. trav., art. L. 132-2 ). Il se distingue de la convention collectivepar son objet.

La convention, tout comme l'accord, est un acte écrit à peine de nullité. Il doit être rédigé en français etdoit, une fois conclu, être déposé à la fois à la direction du Travail et de l'Emploi et au secrétariat greffedu conseil de prud'hommes.Causes de nullité des conventions et accords collectifs de travail

Les accords collectifs se formant comme des contrats, ils sont soumis aux conditions de validité des actesjuridiques définies par les articles 1108 et suivants du Code civil ().

La nullité de la convention ou de l'accord collectif peut être ainsi, par exemple, obtenue en casd'incapacité de conclure. Tel est le cas lorsque la représentativité du syndicat est contestée ou lorsqu'il ya défaut d'habilitation des signataires (C. civ., art. 1108).

La convention ou l'accord collectif de travail peut, encore, être touchée par un vice du consentement (C.civ., art. 1109 ). La jurisprudence a toujours fait application des règles du droit commun, admettant,notamment, la violence pour prononcer la nullité de l'accord collectif conclu (T. civ. Nantes, 6 janvier1956, Dr. soc. 1956, 87)

Si, en application du droit commun, le défaut de consentement, de capacité, un objet ou une cause illicitesont des causes de nullité, elles ne sont pas les seules. La nullité est, également, encourue lorsque lesclauses de la convention dérogent aux dispositions d'ordre public absolu de la loi. L'article L. 132-4 duCode du travail () dispose, à cet effet, que, si la convention et l'accord collectif de travail peuventcomporter des dispositions plus favorables aux salariés que celles des lois et règlements, ils ne peuventdéroger aux dispositions d'ordre public de ces lois et règlements. La convention et l'accord doiventdonc, à peine de nullité, se conformer aux dispositions d'ordre public absolu contenues dans les lois etrèglements.

Ces cas de nullité concernent le fond des conventions et accords collectifs de travail. La nullité est,également, encourue en cas de non-respect des conditions de forme prescrites par le législateur.

La nullité est ainsi prononcée lorsque l'employeur n'invite pas à la négociation tous les syndicatsreprésentatifs de l'entreprise (C. trav., art. L. 132-19 ), voire lorsqu'il ne négocie pas avec l'ensemble dessyndicats représentatifs dans l'entreprise.

Quid lorsque les syndicats ont tous été convoqués mais que tous n'ont pas participé à l'intégralité desnégociations ? L'accord conclu est-il annulable ?

C'est à cette question que devait répondre la Cour de cassation dans la décision commentée.Espèce

Dans cette espèce, la société et différentes organisations syndicales avaient signé, le 14 décembre 1998,un accord sur la réduction du temps de travail concernant l'ensemble des salariés de l'entreprise, àl'exception des cadres pour lesquels les négociations avaient été ouvertes au deuxième semestre 2000.

A cet effet, une réunion de négociation s'était tenue, au cours de laquelle les diverses organisationssyndicales avaient indiqué qu'elles ne signeraient pas le projet d'accord proposé et avaient refusé designer un procès-verbal de désaccord.

Un accord sur ce sujet avait été, néanmoins, signé ultérieurement avec deux syndicats seulement. LaCFDT, syndicat non signataire, avait saisi le tribunal de grande instance d'une demande d'annulationde cet accord, faisant valoir que ses termes n'avaient pas été soumis à la négociation de l'ensemble desorganisations représentatives.

L'accord avait été annulé par la cour d'appel, qui avait condamné la société SEB à payer des dommages

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 14

et intérêts au syndicat CFDT.

La Cour de cassation confirme cette nullité.

Dans un attendu qui a toutes les caractéristiques d'un attendu de principe, elle affirme que la nullitéd'une convention ou d'un accord collectif de travail est encourue lorsque toutes les organisationssyndicales n'ont pas été convoquées à sa négociation ou si l'existence de négociations séparées est établieou, encore, si elles n'ont pas été mises à même de discuter les termes du projet soumis à la signaturedemandant, le cas échéant, la poursuite des négociations jusqu'à la procédure prévue pour celle-ci.

Or, comme le relève la Haute juridiction dans cette espèce, aucun accord ni aucun projet de désaccordn'avait été signé à l'issue de la première réunion, ce qui signifiait que la négociation était seulementinterrompue. Aucune signature n'ayant été prévue et le texte signé ultérieurement par deux syndicatsétant différent de celui discuté lors de la première réunion, l'accord négocié et signé par une partieseulement des syndicats représentatifs était nul.

Cette solution doit pleinement être approuvée.

2. Logique de nullité des conventions et accords collectifs d'entreprise

Les hypothèses de nullité relatées dans la décision commentée sont parfaitement logiques. Elles sontconformes à la lettre et l'esprit des textes applicables à la négociation et étaient annoncées par lajurisprudence. Néanmoins, on peut regretter ce ralentissement apporté à la négociationcollective.Précédents jurisprudentiels

L'article L. 132-19 du Code du travail dispose que la convention ou, à défaut, les accords d'entreprisesont négociés entre l'employeur et les organisations syndicales de salariés représentatives dansl'entreprise au sens de l'article L. 132-2 du Code du travail (). La nullité, en cas de défaut deconvocation individuelle à la négociation de tous les syndicats représentatifs dans l'entreprise, n'est pasdouteuse. Elle a, d'ailleurs, été expressément prononcée par les juges. Cette nullité a été étendue par lajurisprudence.

La Cour de cassation a déduit de l'article L. 132-19 du Code du travail, l'illicéité de l'accord négociéavec une partie seulement des syndicats représentatifs dans l'entreprise (Cass. soc., 9 février 2000, n°97-22.619, Union syndicale des personnels de la société Lyonnaise des eaux Dumez c/ Société Lyonnaisedes eaux et autres, publié ). Dans la décision du 9 février 2000, les juges avaient, ainsi, prononcé lanullité de l'accord négocié et conclu avec une partie des syndicats représentatifs de l'entreprise, et cemalgré le fait que les syndicats non signataires avaient délibérément quitté la table des négociations.

Cette déduction est logique. Si le législateur souhaite que l'employeur convoque à la table desnégociations tous les syndicats représentatifs de l'entreprise, c'est en vue de négocier et d'aboutir à unaccord qui satisfasse tout le monde et qui ait été soumis à toutes les mouvances syndicales del'entreprise.

La solution retenue dans la décision commentée est respectueuse de la lettre des textes applicables en lamatière. Elle constitue, toutefois, un frein à la conclusion de conventions et accords collectifs de travail.Une solution respectueuse de la lettre des textes

L'article L. 132-19 du Code du travail impose, en effet, que les accords soient négociés entre l'employeuret les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise. Cette disposition ne limite donc pas lesobligations de l'employeur à la convocation des syndicats représentatifs de l'entreprise. Elle lui imposede négocier avec ces derniers. Dès lors, tant qu'un accord négocié avec tous ces syndicats n'est pasintervenu, aucun accord ne peut valablement être signé.

On peut trouver la jurisprudence -et donc le texte sur lequel elle se fonde- un peu radicale et peupropice à la conclusion de conventions et accords collectifs de travail. Que doit faire l'employeur lorsquecertains syndicats mécontents avec les termes du projet quittent la table des négociations ?

Si l'on suit cette jurisprudence, il doit attendre qu'ils se décident à bien vouloir venir négocier laconvention s'il veut qu'un accord soit conclu et soit donc applicable dans son entreprise. L'interruptiondes négociations n'est pas un motif lui permettant de conclure un accord avec ceux qui sont restés... Cesystème risque de bloquer la négociation, du moins de la ralentir....

Stéphanie Martin-Cuenot, Ater à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV LEXBASE HEBDO n° 278 du25 Octobre 2007 - Edition SOCIALE

La nullité est encore encourue si toutes les organisations syndicales n'ont pas été mises àmême de discuter les termes du projet soumis à la signature en demandant le cas échéant lapoursuite des négociations jusqu'à la procédure prévue pour celle-ci.

Cass. soc., 10-10-2007, n° 06-42.721, société SEB, F-P+B

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 15

1005 3. L'action en annulation d'un arrêté d'extension [E6757AEY]

L'arrêté d'extension d'une convention ou d'un accord collectif, contenant un vice de forme, desclauses illégales, peut être annulé ; il doit faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoirdevant le Conseil d'Etat dans les 2 mois suivant sa publication.

L'arrêté d'extension d'une convention ou d'un accord collectif de travail peut faire l'objetd'un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat. Ce recours doit être exercé dansun délai de 2 mois suivant la publication de l'arrêté.

CE contentieux, 16-04-1982, n° 21531

L'arrêté d'extension d'une convention ou d'un accord collectif peut faire l'objet d'un recourspour excès de pouvoir devant le conseil d'Etat pour vice de forme lorsqu'il n'y a pas eu avismotivé de la commission nationale de la négociation collective.

CE contentieux, 16-04-1982, n° 21531

L'arrêté d'extension d'une convention ou d'un accord collectif de travail peut faire l'objetd'un recours pour excès de pouvoir devant le conseil d'Etat lorsque la convention ou l'accordcontiennent des clauses illégales.

CE contentieux, 07-03-1986, n° 48455

L'arrêté d'extension peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Lorsque la validitéde l'accord lui-même est contestée, le juge administratif doit surseoir à statuer et renvoyer àl'autorité judiciaire l'examen de la question préjudicielle.

CE Contentieux, 07-03-1986, n° 48455CE 1re et 2e sous-section, 28-04-2000, n° 197357

Un syndicat, affilié à une organisation syndicale de salariés reconnue représentative au plannational, n'ayant pas été invité à la négociation de l'accord étendu, celui-ci ne pouvaitlégalement être rendu obligatoire pour tous les établissements.

CE 1/6 SSR., 29-10-2008, n° 300844, SYNDICAT NATIONAL DES PERSONNELS DE L'ENSEIGNEMENT ET DE LAFORMATION PRIVES

1006 4. L'action en interprétation d'une convention ou d'un accord collectif detravail

[E6758AEZ]

1007 4.1. Les règles régissant l'interprétation des conventions et accordscollectifs de travail

[E7723AER]

Le juge, saisi d'une action en interprétation, doit selon les règles d'interprétation des contrats,rechercher la commune intention des parties contractantes, le sens qui lui donne le plus d'effets.

Les régles régissant l'interprétation des conventions collectives sont celles qui sont définiesaux articles 1156 à 1164 du code civil. Les juges du fond apprécient donc souverainementl'intention des parties.

Cass. soc., 22-07-1986, n° 85-40.816

Lorsque le juge est saisi d'une action en interprétation, il doit selon les règles d'interprétationdes contrats, rechercher qu'elle à été la commune intention des parties contractantes plutôtque de s'arrêter au sens littéral des termes.

C. civ., art. 1156, version du 17-02-1804, à jour

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 16

L'interprétation souveraine des juges du fond saisis d'une action en interprétation d'uneconvention collective est soumise au contrôle de la Cour de Cassation qui sanctionne lafausse interprétation et la dénaturation des clauses conventionnelles.

Ass. plén., 26-04-1991, n° 87-43.726

Lorsqu'une clause d'une convention ou d'un accord collectif est susceptible de deux sens, ondoit l'entendre dans le sens qui lui donne le plus d'effets.

C. civ., art. 1157, version du 17-02-1804, à jour

Les termes d'une convention ou d'un accord collectif susceptibles d'avoir deux sens doiventêtre pris dans le sens qui convient le plus à la matière de la convention ou de l'accord.

C. civ., art. 1158, version du 17-02-1804, à jour

Les clauses des conventions collectives s'interprètent les unes par les autres, en donnant àchacune le sens qui résulte de l'acte entier.

C. civ., art. 1161, version du 17-02-1804, à jour

Si une partie invoque une convention collective précise, il incombe au juge de se la procurerpar tous moyens, au besoin en invitant les parties à lui en fournir un exemplaire.

Cass. soc., 10-12-2002, n° 01-40.010, inédit

Dès lors qu'une convention prévoit le versement d'une prime à chaque salarié "chef defamille", sans restriction, tout salarié dont le conjoint, salarié d'un autre employeur, perçoitdéjà une prime familiale, peut revendiquer le bénéfice de cette prime.

Cass. soc., 10-03-2004, n° 02-40.010, publié

Conditions d'attribution d'une prime : de l'égalité à la discrimination

Dans cette affaire, la convention collective applicable à l'entreprise offrait une prime familiale mensuelle"à chaque salarié du réseau qui est chef de famille".

La question portait ici sur le point de savoir si cette disposition était de nature à interdire aux salariés,dont le conjoint ne travaillait pas dans l'entreprise et percevait une prime pour charge de famille, ledroit de revendiquer le bénéficie de la prime conventionnelle.

Comme le souligne la Haute juridiction, le texte prévoit le versement d'une prime familiale à chaquesalarié "chef de famille" du réseau. Ces dispositions n'étant assorties d'aucune restriction, tout salariédont le conjoint, salarié d'un autre employeur, perçoit un supplément de rémunération au titre desenfants dont ils ont la charge ou dont ils contribuent à l'entretien, peut revendiquer le bénéfice de cetteprime.

Cette solution, parfaitement logique et fondée, n'est toutefois pas exempte de critiques.

Elle illustre, en premier lieu, une application désormais classique des règles d'interprétation desconventions et accords collectifs de travail (J.-Y. Frouin, L'interprétation des conventions et accordscollectifs de travail, RJS 3/96, p. 137). Les juges, face à un texte clair (singulièrement dans lequel il n'estprocédé à aucune distinction) en font une stricte application, pour ne pas dire une application stricte.En l'absence de distinction dans la convention collective de travail, tout salarié chef de famille au sensde la convention doit pouvoir bénéficier de la prime. Par "salarié chef de famille" au sens de laconvention et en présence d'un couple, il fallait entendre "l'ensemble formé par les deux conjoints ouassimilés".

Cette solution est, en second lieu, pour les couples dont l'un des membres travaille dans une entrepriseextérieure, strictement respectueuse du principe d'égalité. Le principe "à travail égal, salaire égal"semble avoir été celui qui a éclairé la solution retenue ici par la Cour de cassation (C. trav., art. L. 140-2 ; Cass. soc., 29 octobre 1996, n° 92-43.680, Société Delzongle c/ Mme Ponsolle, publié Dr. soc. 1996, p.1013, obs. A. Lyon-Caen).

Outre le silence de la convention, l'objet de la prime interdit toute distinction. Rien d'objectif ne permet,à notre sens, d'exclure du bénéfice de cet avantage les salariés dont le compagnon ne travaille pas dansl'entreprise. Or, seule la présence de cet élément autoriserait qu'il soit procédé à une telle distinction.Les juges n'admettent la validité des clauses restrictives que lorsqu'ils peuvent constater que ladistinction est fondée sur un ou plusieurs éléments objectifs matériellement vérifiables.

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 17

La prime dont il est question dans l'espèce commentée était destinée à aider le "chef de famille" àassumer la charge, directe ou indirecte, représentée par les enfants dont il devait assurer l'entretien.L'attribution de cette prime mensuelle n'était donc subordonnée à aucune condition de ressource,d'absence de travail du "compagnon" ou d'absence d'avantage familial que ce dernier aurait pupercevoir à l'occasion de son travail. La convention ne limitait en effet pas le champ d'application de laprime aux seuls salariés dont "la moitié" ne percevait aucune rémunération, pas plus qu'ellen'interdisait au salarié dont le conjoint bénéficiait déjà ou simultanément d'un avantage familial decumuler.

Elle est, en outre, conforme aux solutions retenues en matière de conditions d'attribution de certainesprestations familiales en droit de la Sécurité sociale, à cette différence près que le législateur(contrairement à la convention) prévoit ici le non-cumul des prestations non seulement par enfant maisencore par famille (CSS, art. R. 513-1, al. 1 et 2 ). L'allocataire, donc le bénéficiaire de la prestation, estla personne qui assume la charge effective et permanente d'un ou plusieurs enfants (CSS., art. R. 513-1 ; CSS, art. L. 513-1 ).

La position qui était retenue par l'employeur n'était toutefois pas dénuée de tout fondement. Celui-ciprocédant à une interprétation littérale de la convention collective justifiait l'exclusion de tous lescouples (qu'ils soient ou non d'entreprise) par la notion de chef de famille. Ceci est, certes, inégalitaire etrisqué, puisque les couples extérieurs sont avantagés (il leur appartient de décider de déclarer ou non àl'employeur que leur compagnon touche une prime de son coté). Pourtant, la position retenue parl'employeur a le mérite d'éviter le risque de faire tomber la convention sous le coup du principe denon-discrimination, ce que ne permet pas la solution retenue par la Haute juridiction.

Pour cette raison, la présentation idyllique de la solution que nous venons de faire se trouve ternie parce qui va suivre.

La solution rendue laisse sur ce point apparaître un problème d'égalité.

2. Une violation du principe d'égalité

Comment peut-on justifier qu'il existe une différence entre les couples de l'entreprise et ceux ou un seulmembre du couple y travaille ? Sur quoi l'employeur peut-il se fonder pour justifier son refus de leuraccorder le bénéficie de l'avantage cumulé ?

Si les juges posent le principe d'une distinction, ils ne prennent même pas la peine de justifier leurposition. La Haute juridiction se contente en effet d'affirmer que "tout salarié du réseau des Caissesd'épargne et de prévoyance dont le conjoint, salarié d'un autre employeur, perçoit un supplément derémunération au titre des enfants dont ils ont la charge ou dont ils contribuent à l'entretien...".

En affirmant l'égalité des salariés devant le droit à la prime, le juge créait une discrimination entrecouples puisqu'il imposait qu'une distinction soit faite selon que le couple en question est ou non uncouple de l'entreprise.

Les couples dont les deux membres travaillent à la caisse ne peuvent cumuler l'avantage et n'aurontdroit qu'à un seul supplément familial, à la différence des couples travaillant dans deux entreprisesdifférentes qui pourront cumuler. Cette position résulte d'ailleurs uniquement d'une interprétationstricte de la convention collective qui ouvre l'avantage à "tout salarié" mais en limite le bénéfice à unpar couple d'entreprise.

En se plaçant sur le fondement de la discrimination, n'est-il pas possible d'étendre le champd'application personnel de la prime par son objet : aider à la charge de famille ? Ne peut-oncorrélativement pas ouvrir le cumul des avantages familiaux aux couples de l'entreprise ? Ce fondementest, à notre sens, le seul qui permette d'éviter que les salariés, dont le couple contribue à la productivitéde l'entreprise, ne soient les seuls lésés.

Il s'agit, en outre, d'un fondement aisé pour les couples de l'entreprise puisqu'il leur appartientseulement de porter à la connaissance du juge le contenu de la convention collective et l'interprétationqui en a été retenu, à charge pour l'employeur de démontrer que la distinction est justifiée par deséléments objectifs (C. trav., art. L. 140-2 ).

La limite rappelée par la Haute juridiction nous laisse donc un goût d'inachevé et le sentiment d'unesolution insuffisante et insatisfaisante.

Rien n'est pourtant perdu. Qu'est ce qui empêche désormais les couples mariés, travaillant dansl'entreprise, de contester ce texte sur le fondement du principe de non-discrimination ? Les jugesapprécieront la pertinence de la justification apportée par l'employeur.

Article paru dans LEXBASE HEBDO n° 113 du Mercredi 24 Mars 2004 - Edition SOCIALE

La garantie de rémunération prévue par une convention en cas d'absence pour incapacitéliée à une maladie ou à un accident, ne peut être étendue aux absences pour une curethermale hors le cas d'incapacité de travail.

Cass. soc., 13-04-2005, n° 03-41.502, société Bretagne Chrome c/ M. Loïc Le Boulaire, F-P

L'employeur ne peut exclure les travailleurs de nuit de l'application d'une dispositionconventionnelle prévoyant une majoration pour jours fériés dès lors qu'aucune disposition de

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 18

la convention collective ne prévoit une telle exclusion.

Cass. soc., 21-02-2007, n° 05-40.991, société Flexi France, FS-P+B

L'entrée en vigueur d'un accord d'entreprise portant sur le même objet qu'un engagementunilatéral de l'employeur a pour effet de mettre en cause ce dernier et de s'y substituer,indépendamment du caractère plus favorable aux salariés de l'accord.

Cass. soc., 24-09-2008, n° 07-40.540, société Réalisation des techniques industrielles (RTI), F-D

Mise en cause d'un engagement unilatéral par un accord d'entreprise : rappel du p

L'application volontaire d'une convention collective par l'employeur lui permet-il d'en imposerl'application aux salariés ? Pas si cet engagement unilatéral a été mis en cause par la conclusion d'unaccord d'entreprise postérieur portant sur la même cause et/ou le même objet répond la Cour decassation dans un arrêt du 24 septembre 2008. Dans ce cas, en effet, l'engagement unilatéral se trouveremplacé par l'accord d'entreprise, sans dénonciation préalable. En l'absence de concours de normes, iln'y a donc pas lieu de rechercher la disposition la plus favorable aux salariés. L'accord d'entreprisesubstitué s'applique aux salariés. L'application de ce principe, désormais, classique doit être approuvée.

I - Mise en cause de l'engagement unilatéral par l'accord collectif portant sur le même objet

Nature juridique de l'engagement unilatéral de l'employeur

Le droit du travail se caractérise par la pluralité de ses sources. Lois, règlements, conventions et accordscollectifs de tous niveaux, usages, engagements unilatéraux, accords atypiques, contrats individuels detravail se rencontrent et, parfois, s'affrontent.

L'engagement unilatéral est l'acte par lequel l'employeur s'engage à l'égard d'un ou plusieurs salariés.Cette source atypique ne dispose d'aucun régime propre et légal. Construit par la jurisprudence, iln'existe pas de règle particulière entourant sa création. Il peut, ainsi, résulter de l'application volontaire,par l'employeur , d'une convention collective inapplicable en principe dans l'entreprise (Cass. soc., 9avril 1973, Dr. ouvrier, 1974, p. 138), d'une circulaire ou note de service, d 'un accord de fin de conflit,d'un accord dit atypique, c'est-à-dire conclu entre l'employeur et des personnes non habilitées àconclure des conventions ou accords collectifs de travail au sens légal du terme (Cass. soc., 14 juin 1984,n° 82-14 .385, SARL Grohe c/ Comité d'entreprise de la Société Grohe , Dr. soc ., 1985, p. 192, obs. J.Savatier).

L'engagement unilatéral trouvera à s'appliquer aux contrats de travail s'il est plus favorable auxsalariés que les normes qui leur sont applicables (Cass. soc., 14 juin 1984, n° 82-14.385, préc.).

Disparition de l'engagement unilatéral

L'engagement unilatéral disparaît par une manifestation de volonté. Deux solutions sont, alors,possibles. La première s'inspire très largement des règles applicables à la dénonciation des conventionset accords collectifs de travail, la seconde trouve son fondement dans la hiérarchie des normes. Dansl'une comme dans l'autre de ces hypothèses, l'engagement unilatéral (non contractualisé) disparaît sansque les salariés ne puissent revendiquer un quelconque maintien des avantages individuels acquis.

Le mode "normal" de disparition de l'engagement unilatéral est la dénonciation (Cass. soc., 20 juin2000, n° 98-43.395, M. Argillet-Barre et autres c/ Caisse d 'allocations familiales de Seine-Saint-Denis etautres ). Pour permettre à l'employeur de se dégager des obligations résultant d'un engagementunilatéral (ou, plus généralement, de toute source atypique), la jurisprudence impose le respect de troiscritères. L'employeur doit procéder à une double dénonciation collective et individuelle. Il luiappartient, ainsi, d'informer chaque salarié pris individuellement de la disparition de l'engagementunilatéral (Cass. soc., 7 avril 1998, n° 95-42 .992, Centre médico-chirurgical de Vinci c/ Mme Sirmon etautres ). Il lui appartient d'effectuer une dénonciation collective de l'engagement unilatéral eninformant les représentants du personnel ou, lorsque l'entreprise ne possède pas de représentation, enprocédant par voie d'affichage (Cass. soc., 16 mars 1989, n ° 86-42.846, Société anonyme Car et bus duMans (CBM) et autres c/ M. Luc Puig et autres ).

Il appartient, en outre, à l'employeur de laisser un délai raisonnable entre cette double dénonciation etla disparition effective de l'engagement unilatéral, pour permettre d'éventuelles négociations (Cass. soc.,12 février 1997, n° 96-40.972, Association de parents d'enfants inadaptés, Centre Les Hirondelles c/Mme Attanasio et autres ). La jurisprudence considère qu'un délai entre un et trois mois est un délairaisonnable (Cass. soc., 13 février 1996, n° 93-42.309, Société M et N Euro production c/ Mme Carreauet autres ; Cass. soc., 24 octobre 1997, n° 96-40.927, Sica du Silo de La Rochelle-La Pallice c/ M.Laurent Chepeau ).

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 19

Le mode singulier de disparition de l'engagement unilatéral réside, quant à lui , dans la conclusion d'unaccord collectif portant sur la même cause et/ou le même objet (Cass. soc., 19 décembre 1990, n°87-43.568, Mme Chaubaud et autres c/ Lafarge Coppee Recherche , Bull. civ. V, n° 688). Dans ce cas, eneffet, l 'engagement unilatéral est mis en cause par l'entrée en vigueur de l'accord collectif et trouve seulà s'appliquer sans qu'il y ait lieu de rechercher son caractère plus ou moins favorable aux salariés quel'engagement unilatéral auquel il se substitue (Cass. soc., 9 juillet 1996, n° 94-42.773, M. Roche c/Conseil général de la Côte -d'Or et autre , Bull. civ. V, n° 276 ; Cass. soc., 28 janvier 1998 , n° 95-45.220,M. Nicolas et autres c/ Commissariat à l'énergie atomique (CEA) ) ou de procéder à une quelconquedénonciation (Cass. soc., 8 janvier 2002 , n° 99-44.467, Mme Mireille Pruleau c/ Société Leroy, FS-P ,RJS, 2002 , n° 586, Bull. civ. V, n° 4).

C'est ce dernier principe qu'applique la Cour de cassation dans la décision commentée.

Espèce

Dans cette espèce, plusieurs salariés avaient demandé le paiement de diverses sommes de naturesalariale en application de la Convention collective de la métallurgie des Flandres. Face au refus de leuremployeur, ils avaient saisi la juridiction prud 'homale. Ces salariés avaient été licenciés.

La cour d'appel avait fait droit à la demande des salariés et avait condamné l'employeur à leur verserdes sommes au titre de la prime d'ancienneté, outre les congés payés y afférents, sur le fondement de laconvention collective de la métallurgie. Pour la cour d'appel, il convenait de faire application de l'accordd'entreprise postérieur qui déclarait expressément applicables, concernant la prime d'ancienneté , lesdispositions de la Convention collective de la métallurgie, ce dernier ayant mis en cause sur ce pointl'engagement unilatéral antérieur.

Cette solution est approuvée par la Cour de cassation. Relevant la conclusion d 'un accord d'entreprisepostérieur à l'entrée en vigueur de l'engagement unilatéral portant sur le même objet, elle confirmequ'il convenait de faire application, à titre exclusif, de l'accord d'entreprise postérieur indépendammentde son caractère plus ou moins favorable aux salariés, ce dernier ayant mis en cause l'engagementunilatéral. Elle rappelle corrélativement qu'en l'absence de conflit de normes, le principe de faveur nepouvait s'appliquer.

Cette solution, désormais, classique ne peut qu'être approuvée.

II - Une solution, désormais, classique

Principe de mise en cause de l'engagement unilatéral par l'accord collectif

Bien que contestable, le principe jurisprudentiel de la mise en cause de l'engagement unilatéral et, pluslargement, de toute source atypique par l'entrée en vigueur d 'un accord portant sur la même cause et lemême objet n'en demeure pas moins classique (Cass. soc., 19 décembre 1990, n° 87-43.568, préc. ; Cass.soc., 25 janvier 1995 , n° 90-45.796, Mme Charre c/ Comité français contre la faim , Bull . civ. V, n° 40).

Depuis quelques années maintenant, la jurisprudence affirme qu'il peut être mis fin à un usage par voied'accord collectif sans mettre en oeuvre la procédure de dénonciation. Après avoir fondé cette"disparition" sur le caractère supplétif de la volonté des parties de l'usage (Cass. soc., 19 décembre1990, n° 87-43.568, préc .), la jurisprudence affirme, désormais, que l'accord postérieur portant sur lamême cause et le même objet a mis fin à l'engagement unilatéral (Cass. soc., 9 juillet 1996, n° 94-42.773,préc. ; Cass. soc., 28 janvier 1998, n° 95-45.220, préc.).

L'engagement unilatéral étant dans la hiérarchie des normes à un niveau inférieur à la conventioncollective, cette dernière prime, même si l'usage auquel elle se substitue contient des dispositions plusfavorables (Cass. soc., 25 janvier 1995, n° 90-45.796, préc.). Dans une telle hypothèse, en effet, lespartenaires sociaux, ont, en négociant sur le même objet, implicitement entendu mettre en cause lecontenu de la norme imparfaitement négociée.

Cette disparition/substitution ne fonctionne que si l'accord contient des dispositions portant sur lamême cause et/ou le même objet que l'engagement qu'il fait disparaître . Seuls, en effet, les avantagesrepris par l'accord disparaissent, les autres restent en vigueur. Elle ne s'applique, en outre, que sil'accord collectif est postérieur à l'engagement unilatéral. S'il est antérieur à l'entrée en vigueur del'engagement unilatéral, il y a conflit de normes, celui-ci trouve sa résolution dans le principe de faveur(Cass. soc., 19 novembre 1997, n° 95-43.945, M. Cappelle et autre c/ Société P&O Ferrymasters , Dr.soc., 1998, 89, obs. Couturier).

Une exclusion logique du principe de faveur

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 20

Le principe de faveur est le principe général de règlement des conflits de normes en droit du travail envertu duquel en cas de conflit de normes portant sur la même cause et/ou le même objet, seules trouventà s'appliquer les dispositions plus favorables aux salariés (Ass. plén., 18 mars 1988, n° 84-40.083, MmeChevallier , D., 1989, 221, note Chauchard).

S'agissant d'une règle de conflit de normes, le principe de faveur suppose que deux ou plusieurs normesportant sur la même cause et/ou le même objet trouvent simultanément à s'appliquer au salarié (Cass.soc., 7 octobre 1997, n° 95-41.188, Association PEP 80 c/ Mme Jeannette Martin, inédit , RJS, 1997, 781,n° 1266). S'il n'y a pas conflit, c'est-à-dire qu'une seule norme trouve à s'appliquer, le principe defaveur n'a pas à jouer.

Dans l'espèce commentée, le fait, pour l'employeur, d'avoir conclu, postérieurement à son engagement,un accord portant sur la prime d'ancienneté, avait mis un terme à l'application de l'engagementunilatéral, ce qui excluait tout conflit. Une seule norme trouvant à s'appliquer, la conventiond'entreprise, il n'y avait, ainsi, pas lieu de s'interroger sur son caractère plus ou moins favorable auxsalariés.

Stéphanie Martin-Cuenot, Ater à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Mise en cause d'unengagement unilatéral par un accord d'entreprise : rappel du principe et de ses conséquences, LexbaseHebdo n° 323 du 23 octobre 2008 - édition sociale.

1008 4.2. La procédure relative à une action en interprétation d'uneconvention ou d'un accord collectif de travail

[E7725AET]

Une action en interprétation d'une convention ou d'un accord collectif de travail peut êtreintentée à titre principal, c'est-à-dire en dehors de tout litige né ou actuel, à titre incident oudevant une commission paritaire d'interprétation.

Une action en interprétation d'une convention ou d'un accord collectif de travail peut êtreintentée à titre principal, c'est-à-dire en dehors de tout litige né ou actuel.

Cass. soc., 06-12-1979, n° 78-11.562

L'action en interprétation d'une convention ou d'un accord peut être incidente. La questionde l'interprétation est alors soulevée à l'occasion d'un litige.

Cass. soc., 06-03-1964, n° 63-40.140

Les conventions de branche et les accords professionnels instituent des commissionsparitaires d'interprétation.

C. trav., art. L. 2232-9, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 132-17, version du 14-11-1982, à jour

Le demandeur à une action en interprétation d'une convention collective n'est pas obligé desaisir la commission paritaire d'interprétation avant de saisir le tribunal.

Cass. soc., 18-06-1970, n° 69-40.331

L'action judiciaire en interprétation est possible même après qu'ait été saisie la commissionparitaire d'interprétation.

Cass. soc., 27-04-1964, n° 62-40.930

Le tribunal peut, afin d'obtenir l'avis de la commission paritaire, surseoir à statuer lorsqu'ilest saisi d'une action en interprétation. Cet avis ne lie pas le tribunal sauf si la convention aprévu que l'avis aura la valeur d'un avenant.

Cass. soc., 06-03-1964, n° 63-40.140, Cass. soc., 14-05-1987, n° 84-40.456Cass. soc., 11-10-1994, n° 90-41.818

Le juge prud'homal est compétent pour statuer sur une question préjudicielle relative à

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 21

l'interprétation d'un accord collectif posée par le juge administratif dans le cadre d'un litigeindividuel opposant le salarié à son employeur.

Cass. soc., 18-03-2008, n° 07-41.813, société Toupret, FS-P+B

Seul un avenant interprétatif à une convention collective s'impose de manière rét

Comme n'importe quel autre contrat, la convention ou l'accord collectif de travail est de nature àcomporter des stipulations dont le sens peut prêter à discussion . Dans une telle situation, les partiessignataires de l'acte initial sont en droit de préciser quelle a été leur volonté commune lors de saconclusion. Dès lors qu 'il est conclu par l'ensemble des parties en cause, cet acte juridique doit êtrequalifié d'avenant interprétatif. Il s'impose alors à tous de façon rétroactive, à l'image d'une loiinterprétative. Ainsi que le rappelle la Cour de cassation dans un important arrêt en date du 18 mars2008, la qualification d'avenant interprétatif est exclusive de toute modification de l'accord initial. Adéfaut, l'acte juridique litigieux relève de la catégorie des avenants de révision et ne vaut que pourl'avenir. La Chambre sociale précise, en outre, dans cette même décision, que le juge prud'homal estcompétent pour statuer sur une question préjudicielle relative à l'interprétation d'un accord collectifposée par le juge administratif dans le cadre d'un litige individuel opposant le salarié à son employeur.

I - L'interprétation de la convention collective par le juge

Juridiction judiciaire ou juridiction administrative

Alors même qu'il produit un effet réglementaire, la convention ou l'accord collectif de travail reste,fondamentalement, un contrat de droit privé. Pour cette raison , son interprétation ou l'appréciation desa validité ne peut qu'être soumise aux juridictions judiciaires.

Il en résulte, notamment, que, si l'interprétation d'une convention collective ou sa validité est contestée àl'occasion d'un recours dirigé contre un arrêté d 'extension, le juge administratif, placé devant unequestion préjudicielle, doit surseoir à statuer (1). De même, lorsque, comme en l'espèce, le jugeadministratif est appelé à statuer sur le recours formé par un salarié protégé, contre la décision d'uninspecteur du travail ayant autorisé sa mise à la retraite, il doit surseoir à statuer jusqu 'à ce quel'autorité judiciaire se soit prononcée sur les questions préjudicielles ayant trait à l'interprétation del'accord collectif sur le fondement duquel la mise à la retraite a été décidée. Reste alors à déterminer lajuridiction judiciaire compétente .

Conseil de prud'hommes ou tribunal de grande instance

On sait qu'en vertu de l'article L. 511-1 du Code du travail (, art . L. 1411-1, recod. ), le conseil deprud'hommes est compétent pour connaître de tous les différends individuels nés du contrat de travail.Cette formule exclut, à l'évidence, les différends collectifs. Par suite, et s'agissant de l'interprétationd'une convention ou d'un accord collectif, si le litige oppose groupements patronaux et syndicats desalariés, il convient de saisir le tribunal de grande instance (2 ).

En revanche, et ainsi que le rappelle la Chambre sociale dans l'arrêt rapporté , le juge prud'homal estcompétent pour connaître de l'interprétation d'un accord collectif, lorsque celle-ci est nécessaire à lasolution d'un litige lié au contrat de travail d'un salarié (3). En outre, et la précision apportée par laCour de cassation sur ce point n'est que la conséquence de ce qui vient d'être dit, ce même conseil deprud'hommes est compétent pour statuer sur une question préjudicielle relative à l'interprétation d'unaccord collectif posée par le juge administratif dans le cadre d'un litige individuel opposant le salarié àson employeur. Tel était le cas en l'espèce, la question préjudicielle étant relative à la situationindividuelle du salarié qui contestait les conditions de sa mise à la retraite, lesquelles étaient liées àl'interprétation de la convention collective applicable dans l'entreprise .

II - L'interprétation par les parties signataires

L'avenant interprétatif

Lorsque le sens d'une disposition conventionnelle fait problème, les parties signataires de la conventionou de l'accord collectif peuvent éprouver le besoin de préciser quelle a été leur volonté commune lors desa conclusion. L'acte conclu doit, alors , être qualifié d'avenant interprétatif. Celui-ci doit êtresoigneusement distingué d'un avenant de révision (4). Tandis que ce dernier conduit à une modificationsubstantielle de l'acte juridique initial, le premier ne fait qu'interpréter une ou plusieurs de ses clauses.

La distinction entre avenant interprétatif et avenant de révision est fondamentale dans la mesure où, àl'image d'une loi interprétative (5), le premier va s'imposer de façon rétroactive aux juges, àl'employeur et aux salariés (6). La qualification de l'avenant conclu ne saurait, cependant, êtreabandonnée aux parties signataires . Ainsi qu'en témoigne l'arrêt sous examen, elle relève du pouvoir dujuge.

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 22

En l'espèce, l'article 9.3.2 de l'accord du 22 décembre 1998, signé entre l'Union nationale des industriesde carrières et matériaux de construction, d'une part, et la Fédération des travailleurs de la céramique,des carrières et matériaux de construction CGT-FO, d'autre part, autorisait un employeur à mettre à laretraite un salarié âgé de moins de soixante-cinq ans, sous réserve que ce salarié puisse bénéficier d'unepension de vieillesse à taux plein versée par la Sécurité sociale et qu'il puisse faire liquider sa pension deretraite complémentaire sans abattement. Aux termes de l'avenant conclu entre les mêmes parties le 21mars 2001 et qualifié par elles d'interprétatif, la pension de retraite complémentaire doit s'entendre decelle acquise au titre des tranches A et B, à l'exclusion de celle acquise au titre de la tranche C qui nepeut être liquidée avant l'âge de soixante-cinq ans. Selon la Cour de cassation , les juges d'appel ontdécidé à bon droit que cet avenant modifie les conditions de mise à la retraite des salariés cadrescotisants au titre de la tranche C. Par suite, étant, dès lors, dépourvu de caractère interprétatif, il nepeut s'appliquer à une mise à la retraite prononcée antérieurement.

Cet arrêt confirme que seul un avenant interprétatif peut avoir un effet rétroactif à l'exclusion de toutavenant de révision. Les juges se doivent d'apprécier si l 'acte juridique conclu modifie, ou non, lesstipulations de l'accord initial. Si tel est le cas, la qualification d'avenant de révision s'impose et celui-cine peut produire effet que pour l'avenir.

Au-delà, il importe encore d'ajouter que la qualification d'avenant interprétatif ne peut être retenue quesi l'acte juridique est conclu par l'ensemble des parties à l'accord initial (7). A défaut, cela n'a,cependant, pas pour effet de disqualifier l'accord en avenant de révision dès lors, à tout le moins, qu'iln'apporte aucune modification à l'acte initial. Celui-ci reste un avenant de révision. Toutefois, et fauted'être conclu par l'ensemble des parties signataires de l'acte initial, il ne lie pas le juge.

Une dernière question reste posée : celle de savoir si un avenant interprétatif est soumis au principemajoritaire. Dans la mesure où ce dernier relève de la catégorie des accords collectifs, une réponseaffirmative paraît s'imposer (8). Ce raisonnement , un peu trop simpliste, peut, cependant être contesté.En effet, et ainsi qu'il a été vu, il ne s'agit nullement ici de créer des stipulations conventionnellesnouvelles , mais bien de préciser celles de l'acte initial. Ce qui importe donc, ce n'est pas tant dedéterminer la légitimité des parties à l'acte, que de connaître leur volonté au moment de sa conclusion.

L'avis d'une commission paritaire

Il est fréquent que l'interprétation des conventions ou accords collectifs, spécialement lorsqu'ils sontconclus au niveau de la branche, soit réservée, par la norme conventionnelle elle-même, à unecommission paritaire, composée des personnes qui l'ont négociée et dont la mission devient, ainsi,permanente (9).

La Cour de cassation considère que l'avis donné par la commission paritaire ne lie pas le juge, sauf si laconvention collective prévoit que l'avis en question a valeur d'un avenant à la convention. Dans ce cas, lejuge n'a plus à interpréter une clause ambiguë, il doit appliquer une clause conventionnelle claire etprécise (10).

Bien que la Chambre sociale n'ait, à notre connaissance, jamais été saisie de la question, il paraîtpouvoir être avancé que le juge doit s'interroger sur le fait de savoir si l'avis donné par la commissionparitaire revêt bien un caractère interprétatif . Si tel est le cas, et à condition que la normeconventionnelle aille en ce sens , il est lié par cet avis, qui s'impose à lui de façon rétroactive.

(1) CE, 4 mars 1960, Féd. Industr. Chim., Dr. soc., 1960, p. 342. La Cour de cassation retient le mêmepoint de vue : Cass. civ. 2, 12 juillet 1963, JCP 1964, II, 13495 , note P. S. et Ch. G..(2) Il en va de mêmelorsqu'est en cause la validité de la norme conventionnelle. Sur l'ensemble de la question, v.,notamment, J. Pélissier , A. Supiot, A. Jeammaud, Droit du travail, Précis Dalloz, 23ème éd., 2006, pp.1322 et s..(3) V., antérieurement, Cass. soc., 15 janvier 2002, n° 00-41.117, Société nationale des cheminsde fer français (SNCF) c/ Mme Pascale Kempf-Dierstein, FS-P (), RJS, 4/02, n° 467.(4) Lire, sur laquestion, nos obs., Précisions quant aux avenants interprétatifs des accords collectifs de travail, LexbaseHebdo n° 47 du 14 novembre 2002 - édition sociale ().(5) Ce rapprochement peut être perçu comme uneillustration du caractère réglementaire de la norme conventionnelle . Mais le caractère rétroactif del'avenant interprétatif s'explique tout aussi bien au regard des principes les plus classiques du droit descontrats.(6) Cass. soc., 1er décembre 1998, n° 98-40.104, Caisse d'allocations familiales de l'Essonne c/Mme Castiaux et autres (), Dr. soc., 1999, p. 303, obs. J. Savatier. On se reportera à ces observationspour des précisions sur les conséquences de cet effet rétroactif. A titre d'exemple, on peut souligner que,lorsque l'avenant interprétatif est intervenu postérieurement à la décision des juges du fond et quecelle-ci ne lui est pas conforme, la cassation est inévitable.(7) V., en ce sens, Cass. soc., 1er décembre1998, n° 98-40.104, préc..(8) Ce qui peut entraîner de sérieux problèmes . En effet, et bien qu'elle soitpeu envisageable en fait, l'hypothèse selon laquelle des syndicats majoritaires lors de la signature del'acte ne le seraient plus lors de la négociation de l'avenant interprétatif n'est pas à exclure.(9) J.Pélissier , A. Supiot, A. Jeammaud, ouvrage préc., § 813.(10) Cass. soc., 11 octobre 1994, n ° 90-41.818,

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 23

Mme Longlade c/ Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines et autre (), Bull. civ. V, n° 272 ; Dr.soc., 1995, p. 359, note M.-A. Moreau.

Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Seul un avenant interprétatif à uneconvention collective s'impose de manière rétroactive, Lexbase Hebdo n° 299 du 2 avril 2008 - éditionsociale.

1009 5. Les juridictions compétentes en matière de contentieux civil desconventions et accords collectifs de travail

[E6759AE3]

Seules, les juridictions judiciaires sont compétentes pour régler les différends nés del'application des conventions et accords : conseil de prud'hommes, tribunal de grande instance.

Les juridictions judiciaires sont seules compétentes pour règler les différends nés del'application des conventions collectives.

Cass. soc., 04-02-1987, n° 84-42.583

Le Conseil des prud'hommes est compétent pour trancher les litiges dont la solution reposesur une interprétation de la convention collective.

Cass. soc., 20-10-1988, n° 85-45.164

Le juge du tribunal de grande instance, juge de droit commun est compétent pour statuer surles actions en nullité de clauses d'une convention ou d'un accord collectif.

C.O.J, art. R. 311-1, version du 15-09-2003, à jour

Le juge du tribunal de grande instance, juge de droit commun est compétent pour statuer surles réclamations faites par des syndicats pour obtenir l'application d'une convention ou pourdemander l'interprétation d'une convention.

C.O.J, art. R. 311-1, version du 15-09-2003, à jour

Si un salarié sollicite l'application d'une convention collective sans formuler de prétentionpersonnelles, le litige doit être porté devant le tribunal de grande instance.

Cass. soc., 06-05-1998, n° 96-41.712

L'extension et l'élargissement ne modifient pas le caractère de contrat de droit privé de laconvention collective.

CE Contentieux, 07-03-1986, n° 48455

L'extension ou l'élargissement d'une convention ou d'un accord collectif n'a pas pour effetde donner compétence aux tribunaux administratifs. Leur compétence est limitée àl'appréciation de la validité des arrêtés d'extension ou d'élargissement.

CE contentieux, 07-03-1986, n° 48455

Le juge administratif doit renvoyer à l'autorité judiciaire l'examen de la validité du contratcollectif après avoir sursis à statuer lorsque celle-ci est mise en cause à l'occasion del'appréciation de la légalité d'un arrêté d'extension.

CE Contentieux, 07-03-1986, n° 48455

Le Tribunal de Commerce est compétent pour trancher un conflit entre commerçants relatif àl'application ou à l'interprétation d'une convention collective.

T. com. Paris, du 04-11-1991, SA l'Entreprise ferroviaire c/ SA la technique française de nettoyage

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 24

L'accord signé ayant fait l'objet d'un arrêté d'extension validé par les juges administratifs, ila, donc, été conclu dans un secteur d'activité objectivement autonome, les juges judiciaires nesont pas compétents pour apprécier l'autonomie de ce secteur.

Cass. soc., 12-10-2006, n° 05-15.069, Fédération nationale des personnels des secteurs financiers CGT Case537, FS-P+B+R+I

La loyauté dans la négociation collective n'interdit pas d'apporter des modificat

On peut désormais tenir pour acquis que la négociation collective est soumise à l'exigence de loyauté.Dans un important arrêt rendu le 12 octobre dernier, paré du fameux label "P+B+R+I", la Cour decassation vient tirer toutes les conséquences de cette exigence en affirmant, en substance, qu'une partiene peut critiquer les modifications apportées au projet d'accord soumis à la signature après la dernièreséance de négociation, lorsque ni cette partie ni aucune autre partie à la négociation n'en a sollicité laréouverture en raison de ces modifications avant l'expiration du délai de signature (Cass. soc., 12octobre 2006, n° 05-15.069, Fédération nationale des personnels des secteurs financiers CGT Case 537 c/Fédération des syndicats chrétiens des organismes et professions agricultures CFTC et autres,FS-P+B+R+I ). Ainsi que le relève la Cour de cassation dans le communiqué (1) accompagnant cettedécision, "la solution retenue fait donc confiance aux négociateurs pour apprécier l'importance desmodifications apportées et si elles nécessitent une nouvelle discussion (2)".

I -L'exigence de loyauté dans la négociation collective

Si notre Code du travail réglemente dans le détail la conclusion et l'exécution des conventions et accordscollectifs de travail, il est resté pour le moins silencieux sur leur négociation. Ainsi que l'a relevé unauteur, "ce silence du législateur français n'est pas tout à fait surprenant. Il s'explique certainement enpartie par le peu d'intérêt que les juristes français ont porté à la négociation collective dans les relationsde travail" (J. Pélissier, La loyauté dans la négociation collective, Dr. ouvrier 1997, p. 496). En outre, etparce que les conventions et accords collectifs sont fondamentalement des contrats, on ne peut manquerde relever que l'absence de réglementation de la négociation collective fait écho au silence du Code civilsur la phase de négociation précontractuelle (3).

Cela étant, il convient de relever, avec d'autres, que l'exigence de bonne foi trouve à s'appliquer dans lanégociation collective que ce soit au regard de certaines dispositions éparses du droit du travail ou de lajurisprudence de la Cour de cassation (4).

La nécessité de convoquer l'ensemble des syndicats représentatifs

Ainsi que le rappelle la Cour de cassation dans l'arrêt commenté, la nullité d'un accord est encouruelorsque toutes les organisations syndicales représentatives n'ont pas été convoquées à sa négociation.Loin d'être nouvelle, cette solution a été affirmée par la Cour de cassation dès 1988 (Cass. soc., 13 juillet1988, n° 86-16.302, Société Nouvelles Messageries de la presse parisienne c/ Syndicat de la régionparisienne livre, papier, presse, publié ; v. aussi, Cass. soc., 10 mai 1995, n° 92-43.822, M. Plé Christianc/ Société Vandenostende, inédit ). Bien plus, dans des arrêts postérieurs, et alors que la solution n'allaitpas de soi (5), la Cour de cassation a considéré qu'un accord collectif ne peut être révisé sans quel'ensemble des organisations syndicales représentatives ait été invité à sa négociation (Cass. soc., 26mars 2002, n° 00-17.231, Société Sanofi Synthelabo c/ Syndicat FO Sanofi, publié ; Cass. soc., 17septembre 2003, n° 01-10.706, Fédération Chimie CGT FO atome c/ Union des industries chimiques,publié ).

La règle est donc désormais très claire, aucune négociation ne peut être valablement menée sans quetous les syndicats représentatifs dans le champ d'application considéré aient été convoqués. Il n'en restepas moins évident que chaque organisation reste, ensuite, libre de venir s'asseoir à la table desnégociations.

L'interdiction de négociations séparées

Si le Code du travail interdit explicitement que les négociations d'une convention de branche susceptibled'extension puissent être menées séparément (C. trav., art. L. 133-1 ), il n'en va pas de même pour lesautres négociations. Tel paraît, cependant, être le sens de la jurisprudence de la Cour de cassation(Cass. soc., 13 juillet 1988, préc. ; v. aussi, Cass. soc., 9 juillet 1996, n° 95-13.010, Fédération généraledes mines et de la métallurgie CFDT et autres c/ Société IBM France et autres ). Cette position doit êtreentièrement approuvée, dans la mesure où elle est conforme à l'exigence de loyauté qui doit présider à lanégociation d'un accord collectif (v. aussi, J. Pélissier, op. cit., p. 499).

L'interdiction de négociations séparées apparaît, également, en filigrane, dans la décision commentée,lorsque la Chambre sociale vient préciser qu'une partie ne peut critiquer les modifications apportées auprojet d'accord soumis à la signature après la dernière séance de négociation "lorsque l'existence denégociations séparées n'est pas établie [...]".

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 25

II - Mise en oeuvre

Solution

L'arrêt commenté fait une application des principes précités d'une manière relativement pragmatique.Rappelons que l'auteur du pourvoi demandait la nullité de l'accord collectif en raison de modificationsapportées au texte de l'accord, après la dernière séance de négociation et avant l'expiration du délaiprévu pour sa signature. Sans nier ces modifications, la Chambre sociale refuse, après les juges du fond,de faire droit à cette demande, en affirmant que "si la nullité d'un accord est encourue lorsque toutes lesorganisations syndicales représentatives n'ont pas été convoquées à sa négociation, une partie ne peutcritiquer les modifications apportées au projet d'accord lorsque l'existence de négociations séparéesn'est pas établie et lorsque ni cette partie ni aucune autre partie à la négociation n'en a sollicité laréouverture en raison de ces modifications avant l'expiration du délai de signature".

Il convient de le relever d'emblée que la Cour de cassation ne rejette, en aucune façon, la possibilitéd'apporter des modifications unilatérales à un projet d'accord proposé à la signature, après la dernièreséance de négociations. Elle soumet, toutefois, cette faculté à de strictes conditions qui sont à mettre enrelation avec l'exigence de loyauté dans la conduite de la négociation collective.

Portée

Il ressort clairement de l'arrêt que ne saurait être admise l'adjonction à un projet d'accord demodifications qui seraient le fruit de négociations séparées. Cela étant, il ne faut pas en déduire queseules des modifications consécutives à une négociation avec l'ensemble des organisations syndicalespourraient être admises. En effet, et ainsi que l'indique la Chambre sociale dans son communiqué, "neseraient pas non plus admissibles des modifications intervenues dans des conditions telles quel'ensemble des parties n'auraient pas été à même d'en discuter ou de faire des contre-propositions avantla date fixée pour la signature de l'accord".

Il faut donc comprendre que, pour la Cour de cassation, les partenaires sociaux sont maîtres dudéroulement de la négociation. En effet, elle ne dit pas que les modifications doivent, dans tous les cas,être soumises à la négociation. Responsabilisant les partenaires sociaux, la Cour de cassation leur laissela faculté d'apprécier l'opportunité de demander la réouverture des négociations. Par suite, de deuxchoses l'une : ou bien l'une des parties à la négociation demande la réouverture des négociations auregard des modifications apportées au projet d'accord et celles-ci ne peuvent en aucune façon intervenirsans que cette négociation ait eu lieu ; ou bien aucune des parties en cause n'exige une telle réouvertureet les modifications entreront en vigueur dès lors que le texte aura recueilli la signature d'une ou deplusieurs organisations syndicales de salariés (6). En d'autres termes, si aucune des parties ne s'estmanifestée antérieurement à l'expiration du délai de signature, elle perd tout droit de critique à l'égarddes modifications opérées et, par voie de conséquence, quant à la validité de l'accord, de ce point de vuelà.

Cela étant, et c'est sans doute le seul bémol que l'on apportera à la solution retenue dans l'arrêt sousexamen, cette latitude laissée aux partenaires sociaux n'a de sens que si un délai précis a été arrêté pourla signature de l'accord. La Cour de cassation ne dit pas autre chose lorsqu'elle prend soin de relever,toujours dans son communiqué, qu'"en décidant que, jusqu'à l'expiration du délai de signatureconvenu, les parties ont la possibilité de demander la réouverture des négociations pour faire leursobservations ou contrepropositions, l'arrêt considère donc que jusqu'à cette date, la négociation est encours, et invite ainsi implicitement les partenaires sociaux à fixer un terme au délai de signature pourmarquer le terme de la négociation". Reste à se demander ce qu'il adviendrait de la solution retenue,faute pour les parties à la négociation d'avoir fixé, d'un commun accord, un tel délai. Sans doutepourrait-on alors considérer que la signature de l'acte, dans les conditions légales, par un ou plusieurssyndicats, met un terme à la négociation. Il n'en demeure pas moins, qu'en pratique, les partiesconcernées signent rarement l'accord en même temps. Or, il nous semble difficile d'admettre que lanégociation prend fin dès lors qu'au moins une signature a été apposée au bas de l'acte juridique. Cettedernière ne semble, en effet, pas de nature à interdire à une autre organisation syndicale de demanderla réouverture des négociations.

Gilles AuzeroProfesseur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IVArticle paru dans Lexbase Hebdo n°233 du 26 octobre 2006 - édition sociale

(1) On ne peut que prendre acte de l'importance qu'il convient désormais d'attribuer aux communiquésde la Cour de cassation (v. sur la question, F. Guiomard, Sur les communiqués de presse de la Chambresociale de la Cour de cassation, RDT 2006, p. 222.(2) On relèvera que l'arrêt commenté comporte, enoutre, deux rappels importants, d'une part, sur les compétences respectives de la juridiction judiciaireet de la juridiction administrative pour apprécier la validité d'une convention collective étendue et,d'autre part, sur les accords de branche relatifs à la modulation du temps de travail (v., sur cesquestions, le communiqué préc. de la Cour de cassation).(3) Lacune qui pourrait être comblée sil'avant-projet de réforme du droit des obligations était, à terme, transposé dans notre droit positif.(4) V.en ce sens, J. Pélissier, art. préc. ; Y. Chalaron, La conduite de la négociation, Dr. soc. 1990, p. 584 ; M.Miné, La loyauté dans le processus de négociation collective d'entreprise, Travail et Emploi, n° 84, 2000,p. 47.(5) Compte tenu du fait qu'un avenant de révision ne peut être valablement signé que par un

Généré le 05/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA

Page 26

syndicat de salariés signataire ou adhérent à la convention initiale (C. trav., art. L. 132-7 ).(6) A défautde demande de réouverture de la négociation, la signature vaut approbation des modifications apportéeset la non signature vaut désapprobation. Ainsi qu'il ressort du communiqué de la Chambre sociale, leConseil d'Etat, comme les juges du fond qui avaient écarté la critique en raison du caractère purementformel ou déclaratif des modifications contestées, en avaient, ainsi, apprécié la portée eu égard aucontenu de l'accord. La solution retenue par la Cour de cassation repose au contraire sur l'analyse desconditions de la négociation de l'accord.

1010 6. Les sanctions pénales des dispositions conventionnelles [E6760AE4]

Plusieurs types d'infractions aux conventions et accords collectifs peuvent être sanctionnés.

Une sanction pénale peut être prononcée en cas de violation des dispositions d'uneconvention étendue dérogatoire lorsque la dérogation à été expressement prévue par desdispositions législatives ou réglementaires.

C. trav., art. L. 153-1, version du 14-11-1982, à jour

Lorsqu'une disposition législative ou réglementaire est assortie de sanctions pénales, celles-cine peuvent être appliquées à la violation de dispositions conventionnelles améliorant la loi.

Cass. crim., 04-04-1991, n° 88-84.270

Lorsqu'une convention ou un accord collectif a fait l'objet d'un arrêté d'extension,l'employeur lié par cette convention ou cet accord qui paye des salaires inférieurs à ceux quisont fixés conventionnellement est passible d'une amende de 5000F.

C. trav., art. R. 153-2, al. 1, version du 01-03-1994, à jour

En matière de durée et d'aménagement du temps de travail, est sanctionnée la violation desstipulations d'une convention ou d'un accord d'entreprise qui dérogent à des dispositionslégislatives ou à celles d'une convention ou d'un accord étendu.

C. trav., art. L. 212-10, version du 05-05-2004, à jour

En matière de durée et d'aménagement du temps de travail, est sanctionnée l'application destipulations conventionnelles qui dérogent à des dispositions législatives ou à celles d'uneconvention étendue dans des conditions non autorisées par la loi.

C. trav., art. L. 212-10, version du 05-05-2004, à jour

Le refus de l'employeur d'engager la négociation annuelle obligatoire est passible d'unepeine d'emprisonnement de 1 an et d'une amende de 3 750 euros ou de l'une de ces deuxpeines seulement. En cas de recidive les peines sont doublées.

C. trav., art. L. 2243-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 153-2, version du 10-05-2001, à jour

Le défaut d'affichage dans l'entreprise de l'avis indiquant les textes conventionnelsapplicables est puni de la peine d'amende prévue pour les contraventions de quatrième classe.

C. trav., art. R. 153-1, version du 01-03-1994, à jour

Le défaut de participation d'une organisation syndicale à une commission mixte convoquéeen vue de l'extension d'un texte est punie de l'amende prévue pour les contraventions de lacinquième classe.

C. trav., art. R. 153-3, version du 01-03-1994, à jour