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Le mardi 11 septembre 2012 | Volume 102 Numéro 01 Retressit depuis 1977 Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill delitfrancais.com le seul journal francophone de l’Université McGill élections_ _4-5 frosh _ _ 7 zapartistes_ _ 11

Le Délit

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Édition du 11 septembre 2012

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Le mardi 11 septembre 2012 | Volume 102 Numéro 01 Retressit depuis 1977

Publié par la société des publications du Daily, une association étudiante de l’Université McGill

delitfrancais.comle seul journal francophone de l’Université McGill

élections_ _4-5 frosh _ _ 7

zapartistes_ _ 11

rédaction3480 rue McTavish, bureau B•24

Montréal (Québec) H3A 1X9Téléphone : +1 514 398-6784

Télécopieur : +1 514 398-8318Rédacteur en chef [email protected]

Nicolas QuiazuaActualité[email protected] de section Louis Baudoin LaarmanSecrétaire de rédaction Camille Gris Roy Rédacteur [email protected] VacantArts&[email protected] de section

Anselme Le TexierSecrétaire de rédaction

Thomas SimoneauSociété[email protected]

Fanny DeveauxCoordonnateur de la production [email protected]

Samuel SigereCoordonnatrice [email protected]

Lindsay P. [email protected]

VacantCoordonnateur de la [email protected]

Myriam LahmidiCoordonnateur [email protected]

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Mathieu MénardCollaborationAlexie Labelle, Victor Constant, Mathilde Michaud, Simon Albert -Lebrun, Alexandre Gauvreau, Anabel Cossette Civitella, Alba Benito Miranda, Noemie Ott CouvertureImage: Nicolas Quiazua Montage: Nicolas Quiazua

bureau publicitaire3480 rue McTavish, bureau B•26

Montréal (Québec) H3A 1X9Téléphone : +1 514 398-6790

Télécopieur : +1 514 [email protected]

Publicité et Gérance Boris Shedov

Photocomposition Mathieu Ménard et Geneviève Robert

The McGill [email protected]

Queen Arsem-O’MalleyConseil d’administration de la Société des publications du Daily (SPD)Nicolas Quiazua, Olivia Messer, Sheehan Moore, Erin Hudson, Joseph Henry, Matthew Milne, Farid Muttalib, Shannon Pauls, Boris Sheldov, Queen Arsem-O’Malley, Rebecca Katzman

le seul journal francophone de l’université McGill

Le Délit a pris l’habitude de vous souhaiter la bienvenue à McGill en début d’année.

Malheureusement, cette année nous avons été devancés par la principale de l’Université, Heather Munroe-Blum et ses salades –litté-ralement. En même temps, j’espère que vous appréciez notre journal pour d’autres raisons que celles de vous réchauffer le cœur.

Le Délit a vu le jour en 1977, devenant du même coup le seul journal francophone de l’Univer-sité McGill. Depuis, notre mandat premier est celui d’informer les étudiants de McGill, en français, sur les différents aspects de la vie universitaire.

Si vous nous avez suivi en ligne cet été, à défaut de recevoir un résumé poétique de celui-ci par courriel, vous avez pu voir que Le Délit n’a pas lessivé. Nous avons suivi le développement du conflit étudiant, remarquant l’évolution de celui-ci.

L’arrivée de policiers aux cos-tumes tout droit sortis de Star Wars est devenu routine pour plusieurs. De cette façon, malgré la fin de la grève étudiante et le ralentisse-ment du rythme des manifesta-tions, après près de sept mois de grève, la culture de désobéissance civile semble s’être inscrite dans la mémoire collective des «apathiques i grecs».

Quand le fils d’un ami mani-feste, pancarte à la main, parce qu’il n’a pas droit à la voiture jouet qu’il veut tant, plus qu’anecdoti-que, la situation me semble refléter jusqu’à un certain point la situation au Québec. Ses habitants, même les plus jeunes, y ont compris qu’ils pouvaient contester, exiger, déso-béir…

Après les élections du 4 sep-tembre, le Parti Québécois (PQ), maigre vainqueur, prend le tau-reau étudiant d’une seule corne –sans trop de jeu pour les erreurs. Le moindre faux pas et le PQ de Pauline Marois risque de se retrou-ver avec une nouvelle crise sociale entre les mains. Pas étonnant que Pauline ait si rapidement promis d’annuler la hausse des frais de scolarité… Pour deux ans tout au moins, le temps que les choses se calment.

De notre côté, à McGill, plus ça change, plus c’est pareil. En commençant par les démêlés de l’administration de l’Université avec les divers syndicats, jusqu’à la place du français sur le campus, en passant par la hausse des frais de scolarité, les thèmes se répètent, mais continuent de nous capti-ver. Cette année risque d’être fort intéressante après l’éveil politique du campus lors de l’année passée et, comme toujours, on sera de la partie. Si vous voulez participer à l’écriture d’une page de notre his-toire, nous vous invitons à venir nous voir dans la grotte du B-24 du bâtiment Shatner et collaborer pour votre Délit. x

Mêlez-vous de vos saladesNicolas QuiazuaLe Délit

2 Éditorial xle délit · le mardi 11 septembre 2012 · delitfrancais.com

É[email protected]

Volume 101 Numéro 13

LUNDI. MARDI. MERCREDI.

NOS MARCHÉS SONT DANS VOTRE QUARTIER :

3421, av. du Parc514 281-04888 h à minuit, tous les jours

1953, rue Sainte-Catherine O.514 932-37568 h à 1 h, tous les jours

50, av. du Mont-Royal O.514 849-80288 h à 23 h, tous les jours

Commencez la semaine avec 10 % de rabais à l’achat de 50 $ ou plus d’épicerie.* Les lundis, mardis et mercredis seulement sur présentation de votre carte étudiante.

*Ce programme ne s’applique pas aux pharmacies affiliées à la bannière CENTRESanté ni à aucune des catégories de produits en vente libre qui sont la propriété des pharmaciens du Québec et vendues par ceux-ci telles que définies par les lois applicables, aux postes d’essence À Plein Gaz, aux nettoyeurs, aux comptoirs de Postes Canada ni à tout autre commerce exploité par une tierce partie à l’intérieur de nos magasins. En aucun cas notre programme ne sera appliqué s’il en résulte une infraction aux lois et règlements en vigueur (ex : alcool, tabac, loterie). Ne peut être combinée à aucune autre offre. Le rabais ne peut être réclamé que par la personne apparaissant sur la carte d’identité. Dans les magasins participants seulement. L’offre peut être modifiée en tout temps.

INSCRIPTION MAINTENANT SESSION D’AUTOMNE

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Actualité[email protected]

Élections et retombéesLa victoire de Pauline Marois devrait mettre fin à 7 mois de grève étudiante.

POLITIQUE PROVINCIALE

Louis BaudoinLe Délit

Le 4 septembre 2012, Pauline Marois est entrée dans l’histoire en devenant la première femme

première ministre du Québec. C’est une victoire électorale cependant miti-gée par l’incapacité du Parti Québécois (PQ) à former un gouvernement majori-taire. Battant de peu le Parti Libéral du Québec (PLQ), la représentante du PQ a ainsi tourné la page sur les neuf années au pouvoir de Jean Charest.

Le dernier mandat du chef libéral aura été perturbé sur la fin, en parti-culier à cause du mouvement étudiant contre la hausse des frais de scolarité, un mouvement qui aura sûrement contribué à la perte de crédibilité du leader. Mardi, Charest a non seulement perdu les élec-tions en tant que chef de parti, mais il a aussi perdu son siège de député dans sa propre circonscription. Cependant, le score du PLQ n’a été que de 1 point de pourcentage (quatre sièges) de moins que celui du Parti Québécois, ce qui prouve que les Québécois sont encore nombreux à soutenir le Parti Libéral.

Le Parti Québécois pourra comp-ter sur le soutien d’Amir Khadir et Françoise David, fraichement élue pour la première fois dans sa circonscription

de Gouin après plusieurs tentatives. Les deux co-porte-paroles de Québec Solidaire ont affirmé leur soutien à Pauline Marois sur les questions de la hausse et de la Loi 12.

Retrait de la hausseL’impasse politique dans laquelle

Charest se trouvait à la fin de son man-dat a beaucoup joué dans sa perte des élections. Pauline Marois de son côté s’est approprié une large portion des étudiants votants en promettant l’annu-lation de la hausse des frais de scolarité et de la loi 12. Elle a ainsi rappelé ses pro-messes dans un communiqué de presse après sa victoire: «Même en minorité, j’ai l’intention d’obtenir des résultats pour les gens. Mon gouvernement va annuler la hausse des droits de scolarité par décret. La loi 12 n’aura donc plus lieu d’être. J’ai l’intention de proposer son abrogation et je suis convaincue que les partis d’opposition vont être d’accord». Ce retour sur la question des frais de scolarité devrait donc enfin débloquer les pourparlers entre les étudiants et le gouvernement du Québec, qui, après presque un an de grève, manifestations et autres actions, ne sont toujours pas parvenus à un accord. Le seul bémol reste que le gouvernement péquiste n’étant pas majoritaire au Parlement,

Pauline Marois devra annuler la hausse par décret ministériel, c’est-à-dire sans vote au Parlement.

Dans l’ensemble, les syndicats étu-diants sont satisfaits des promesses de la nouvelle première ministre, mais comptent bien continuer à faire pression si elles ne sont pas tenues: «Il va falloir qu’ils [le gouvernement péquiste, ndlr] mettent ça de l’avant, on va pas laisser tomber, continuer de faire pression et s’assurer qu’ils vont passer de la parole aux actes», dit Martine Desjardins, présidente de la Fédération Étudiante Universitaire du Québec (FEUQ). Elle est cependant confiante pour ce qui est de la capacité du gouvernement à an-nuler la hausse des droits de scolarité, puisqu’il s’agit d’un: «décret ministériel, une volonté du gouvernement».

Abrogation de la loi spécialeL’impopulaire projet de la loi 78,

adoptée le 18 mai 2012 par le gouverne-ment Charest avait pour but d’arrêter les grèves, manifestations et piquetages qui paralysaient de nombreuses universités au Québec. Pour réaliser cet objectif, la loi spéciale prévoyait entre autres de for-cer tout rassemblement ou manifestation de plus de 50 personnes à communiquer à la police la date, l’heure et l’itiné-raire prévus sous peine d’être déclaré(e)

illégal(e) et d’être dispersé(e). Cette loi avait alors provoqué l’indignation des syndicats étudiants et d’une grande partie de la population. Pauline Marois devrait maintenant l’abroger. En vérité, l’abrogation de cette loi ne changera pas beaucoup de choses car, selon Robin Reid-Fraser, VP externe de l’AÉUM, la loi «n’a pas arrêté les manifestations, et a même augmenté leur nombre». Même si elle est plus symbolique qu’effective, l’abrogation de la Loi 78 satisfait les syn-dicats étudiants et leurs alliés: «C’est suffisant», dit Camille Robert, co-porte-parole de la CLASSE, tout en rappelant que le PQ avait déjà tenté d’augmenter les frais de scolarité en 1993 mais avait reculé après de nombreuses grèves.

La fin de la grève?La grève étudiante qui secoue le

Québec depuis 7 mois au point d’être remarquée aux États-Unis et outre-At-lantique et qui divise les Québécois va donc sans doute prendre fin prochai-nement. Les syndicats étudiants, ainsi que les Québécois en général attendent beaucoup de ces élections, et même si le gouvernement péquiste est minoritaire, on espère quand même de lui qu’il pour-ra tourner la page sur le plus long cha-pitre de l’histoire de grèves étudiantes au Québec x

Lindsay P. Cameron

4 Actualités x le délit · le mardi 11 septembre 2012 · delitfrancais.com

Alors que plus de 2 000 partisans du Parti Québécois (PQ) étaient rassemblés au Métropolis —

théâtre situé sur la rue Ste-Catherine— pour assister au discours de victoire de Pauline Marois, les spectateurs et téléspectateurs ont soudainement vu la nouvelle première ministre disparaître de la scène, empoignée par deux gardes du corps. On a appris un peu plus tard, après le retour de madame Marois sur scène, qu’un homme armé avait tenté de pénétrer dans le théâtre, avait tué un homme et gravement blessé un autre individu avant de mettre le feu à l’ar-rière de la bâtisse, par où Mme Marois était censée sortir. La salle a alors était évacuée dans le calme et l’ordre.

Richard Henry Bain, 61 ans, s’est déplacé depuis sa résidence dans les

Laurentides jusqu’à Montréal avec, dans sa fourgonnette, cinq des vingt-deux armes qu’il possédait. Il avait l’intention d’attaquer les militants péquistes et membres du nouveau gou-vernement, mais il n’a pas pu se rendre plus loin que l’arrière-scène du théâtre. Rapidement maitrisé par la Sûreté du Québec, l’homme a crié à la foule: «les anglais se réveillent, payback day is co-ming», alors qu’on le menait vers la voi-ture de police

Depuis plusieurs mois, les tensions au sein de la province du Québec ont monté d’un cran en raison du conf lit étudiant et, plus récemment, de l’an-nonce du premier ministre sortant, Jean Charest, de lancer la campagne électorale. L’attentat qui a mis fin à la soirée électorale laisse chez les Québécois un sentiment de tristesse. Il semble aussi démontrer une augmenta-

tion de tensions déjà existantes. Par le passé, la quête d’une identité nationale québécoise avait créé de graves diffé-rends entre les francophones et les an-glophones, mais l’élection il y a de cela 12 ans du Parti Libéral [parti fédéra-liste, ndlr] les avait apaisés, si ce n’est éteints. Il semble que l’arrivée au pou-voir d’un parti souverainiste ait ravivé ce qui avait été oublié.

Y aura-t-il réellement une modifi-cation des relations entre anglophones et francophones au Québec, et particu-lièrement à Montréal? Rien ne semble l’indiquer jusqu’à présent, mais il est grand temps que nous commencions à discuter de ces enjeux de société. Comme l’a dit Nicolas Lévesque, phi-losophe, psychologue et psychanalyste, en entrevue avec le Devoir: «le psy qui parle en moi est certain que le délire de cet homme n’aurait pas pris cette

forme-là si le Québec était une société où on pouvait vraiment discuter». Avec l’élection d’un Parti Québécois minori-taire et la volonté de ce parti de renfor-cer l’application de la loi 101 et d’abolir les écoles passerelles, il semblerait que nous ayons besoin d’une vraie discussion de famille comme nous n’en avons pas eu depuis le dernier référendum, en 1995.

Nous pourrons sûrement voir les premières réelles répercussions de cette élection et de l’attentat dans les prochaines semaines, avec la reprise de la session parlementaire et l’apport de différents projets de loi et amen-dements à la Chambre Bleue. Ce sera donc un dossier à suivre activement, car il promet d’intéressants développe-ments. x

Triste fin de soirée électoraleUn homme ouvre le feu au Metropolis le soir des élections

POLITIQUE PROVINCIALE

Mathilde MichaudLe Délit

Le 20 juin, après six mois de grève, MUNACA et McGill s’accordai-ent enfin sur la signature d’une

convention collective. La trêve des hosti-lités n’aura pas duré longtemps, alors que l’Université McGill annonçait quelque jours plus tard que 100 postes seraient libérés par un processus d’attrition; autrement dit en ne remplaçant pas un employé de support sur deux quittant leur poste ou partant à la retraite. McGill expliquait ces coupures en disant vouloir respecter le projet de loi 100.

Le projet de loi, avancé par Raymond Bachand, ministre des Finances sous le gouvernement Charest, et adopté par l’assemblée nationale en juin 2010, vise «le retour à l’équilibre budgétaire en 2013-2014 et la réduction de la dette».

Dans cette optique, le gouvernement demande entre autres aux différents or-ganismes gouvernementaux, des réseaux de santé, de service sociaux et d’éduca-tion, ainsi qu’aux universités de réduire les «effectifs de leur personnel d’enca-drement et de leur personnel adminis-tratif en privilégiant l’attrition». Le projet de Loi fournit également une échelle à suivre pour majorer les salaires du per-sonnel de direction et d’encadrement (0.5% pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011) et ne permet aucune «rémunération additionnelle fondée sur le rendement».

Dans un communiqué publié sur leur site web le 29 août, MUNACA ac-cuse l’Université McGill de ne pas se conformer réellement au projet de loi 100. David Kalant, vice-président des finances à MUNACA affirme qu’«il y a des dispositions dans la loi que McGill ne semble pas respecter». «McGill applique

la Loi et coupe dans le personnel des employés de soutien, mais n’applique pas la loi de la même façon aux postes admi-nistratifs».

Des documents obtenus par MUNACA listant les «salaires, primes, et dépenses voyages (des hauts membres de l’administration) pour 2009, 2010, et

2011», montrent des augmentations de salaires allant jusqu’à près de 9% ainsi que des primes allant jusqu’à 33%.

De son côté, Lyne Gervais, Vice-Présidente Associée aux Ressources Humaines, assure que McGill respecte le projet de Loi 100. Gervais affirme que l’article 8 du projet de loi permet aux or-ganisations de payer ses membres exécu-tifs et managériels une «progression dans une échelle de traitement lorsque celle-ci dépend d’une évaluation du rendement, non plus que le versement d’une rému-nération additionnelle fondée sur le ren-dement pour un exercice ayant débuté au plus tard en 2009».

Comme les membres exécutifs et managériaux reçoivent des augmenta-tions de salaires en fonction du mérite et non pas automatiquement et que l’éva-luation pour la première période cou-verte par le projet de loi 100 se soit faite en 2009, Gervais affirme que l’Université est en harmonie avec la loi.

De plus, par rapport aux allégations de versement de primes, interdites sous le projet de loi 100, McGill affirme qu’il s’agit plutôt de «compensations moné-taires n’étant pas incluses dans le salaire de base», incluant des assurances-vie, des allocations de transport ou habitation, etc.

MUNACA a envoyé une lettre à l’ancienne ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MÉLS), Michelle Courchesne, «afin de lui faire connaître la situation […] et lui demander pourquoi la loi n’est pas appliquée». Aux dernières nouvelles le ministère n’a pas répondu, et le changement de cabinet ministé-

riel suite aux élections du 4 septembre risque de retarder une fois de plus toute réponse.

La porte-parole du MÉLS, Esther Chouinard, explique qu’en ce moment les employés administratifs du MÉLS sont «entre deux chaises» et par le fait même qu’aucune décision ne peut être prise dans le dossier. Même son de cloche du côté du conseil du trésor, qui serrait en charge de s’assurer que la Loi est appliquée. «Tant que le nouveau cabi-net n’est pas assermenté, nous sommes un peu dans le noir» explique Clément Falardeau, relationniste au secrétariat du Conseil du Trésor. «C’est au nouveau gouvernement de prendre connaissance des dossier et de décider par la suite quoi en faire en fonction de leur orientation.»

Si une diminution dans les effec-tifs de travail pourrait laisser présager une tâche de travail plus lourde pour les employés de soutien demeurant en poste, McGill assure que l’exercice vise simple-ment à «éliminer des tâches non néces-saires et à se concentrer sur le travail qui doit être fait pour atteindre les objectifs et priorités de l’Université». Malgré le fossé salarial qui se creuse, Olivier Marcil pense que le statut d’université d’excel-lence repose entre autres sur le fait de pouvoir «amener les administrateurs qui sont de la plus grande qualité possible et c’est sûr que les questions salariales font partie d’un avantage compétitif». Cependant, toujours selon Olivier Marcil, ceci ne devrait pas être un obstacle pour un rapport positif entre les différentes parties de l’université. «J’ose espérer que dans le dialogue avec les employés, les étudiants et le professeurs, il n’y a pas de questions salariales qui viennent interfé-rer. Il faut qu’on travaille sur ce qui nous rassemble». x

Un début d’année (encore) sous tensionMUNACA accuse McGill de ne pas respecter la loi 100

CAMPUS

Nicolas QuiazuaLe Délit

Lindsay P. Cameron

5Actualitésx le délit · le mardi 11 septembre 2012 · delitfrancais.com

Et la grève dans tout ça ?L’élection du PQ a laissé entrevoir la fin de la grève étudiante. Mais la session est encore incertaine.

ÉDUCATION

Rappel des faits Si la rentrée à McGill s’est déroulée

sans embûches, il n’en a pas été de même pour toutes les universités québécoises. La loi 12 (anciennement le projet de loi 78), qui prévoyait le retour normal en cours des étudiants au mois d’août n’en a pas empê-ché un certain nombre de continuer de manifester et de bloquer l’accès aux cours. Malgré l’interdiction stipulée par l’article 14  «[d’]entraver l’accès d’une personne à un lieu où elle a le droit où le devoir d’ac-céder […]», plusieurs groupes d’étudiants ont fait comprendre qu’ils souhaitaient poursuivre le combat. À l’Université de Montréal et à l’UQÀM, plusieurs cours ont donc été perturbés, et la police est inter-venue pour disperser les étudiants. Pierre Billon, professeur en études cinématogra-phiques à l’UdeM, a noté «un grand chaos» lors des premiers jours après la rentrée. Il

ajoute avoir donné des cours à des classes «de deux ou trois étudiants seulement».

Cependant depuis mercredi, le lende-main des élections, on a pu observer un relatif retour au calme. Le Parti Québécois (PQ) de Pauline Marois, élu mardi soir, a en effet promis l’annulation de la hausse des droits de scolarité et l’abrogation de la loi 12, une démarche qui sera appuyée par Québec Solidaire. Cette semaine, un certain nombre d’associations étudiantes devaient tenir des assemblées générales pour déter-miner la suite de leur plan d’action. La majorité a décidé de reprendre les cours. Ainsi l’Association Facultaire Étudiante des Sciences Humaines (AFESH) de l’UQÀM affiche sur son site internet «qu’aucune proposition de grève générale illimitée n’a été adoptée». Pour les étudiants de ce dé-partement, «les cours vont [donc] se pour-suivre [normalement]». Les étudiants en an-thropologie à l’Université de Montréal ont également décidé qu’ils retourneront sur les bancs d’école, bien qu’ils aient annoncé

le 27 août dernier qu’ils «[seraient] en grève jusqu’au 11 septembre». D’autres associa-tions comme l’AEEHAUM - Association des Étudiants et Étudiantes en Histoire de l’Art de l’Université de Montréal - ont pris la même décision, et certaines doivent encore tenir des assemblées générales dans les prochains jours.

Une session qui reste incertaineLe 8 septembre, La Presse rapportait

les propos de Martine Desjardins,  suite à l’annonce du PQ d’annuler la hausse: la présidente de la Fédération Étudiante Universitaire du Québec (FEUQ) déclarait voir là «la fin d’un long conflit».

Mais la question n’est pas totale-ment réglée; on n’est pas encore revenu à une situation complètement normale. La CLASSE affiche sur son site Internet qu’elle «accueille avec prudence l’élection d’un gouvernement minoritaire péquiste», et que «certaines questions […] demeurent en suspens». Plusieurs associations étudiantes

ont également voulu montrer qu’elles ne comptaient pas tout de suite mettre un point final à cette grève. L’AFESH, men-tionnée plus haut, déclare avoir «voté [une] grève le 22e jour de chaque mois jusqu’à satisfaction de [ses] revendications». Une journée de manifestation nationale est pré-vue pour le 22 septembre, un événement auquel participeront de nombreuses asso-ciations étudiantes.

Ces éléments laissent donc penser que cette grève a laissé des traces qu’une simple élection ne pourra balayer du revers de la main. Par ailleurs, l’UdeM a annoncé ven-dredi l’annulation de huit cours (en anthro-pologie et sociologie) pour cette session de rattrapage. Une décision qui ne passera pas inaperçue et qui risque de faire des mé-contents. Toujours est-il que la session ne pourra pas se conclure sereinement. x

Camlle Gris RoyLe Délit

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Société[email protected]

Après une fin de session d’hiver chaotique, le campus se rem-plit de nouveaux élèves, encore

vierges de toute opinion sur le conflit étudiant.

Alors que la semaine d’intégration se finit à McGill, on enregistre plusieurs changements. Le Frosh est traditionnel-lement une série d’événements plus ou moins alcoolisés qui permettent aux nouveaux étudiants de se retrouver dans leur faculté et de rencontrer d’autres McGillois. Cette année, les Frosh des Facultés se sont associés au Frosh de l’AÉUM de sorte que les événements organisés par l’AÉUM alternaient avec ceux des facultés. Alors que les organi-sateurs essayent manifestement de faire en sorte que la cohésion des froshies soit plus importante, on assiste en même temps au bourgeonnement de multiples Frosh alternatifs, notamment des Frosh religieux.

Tout d’abord, même si les Frosh des Facultés essayent de s’éloigner tant bien que mal de leur tradition de la boisson, une ambiance hypersexualisée et alcoo-lisée existe réellement, ce qui chiffonne certains éléments du campus. Du coup, la vie mcgilloise se scinde en deux: ceux qui tolèrent ou adhèrent à cette idée et ceux qui l’exècrent.

Les leaders étaient prévenus qu’au-cune chanson paillarde ou nom vul-gaire inscrit sur les tee-shirts ne serait toléré. Pourtant, dès le deuxième jour, les coordonnateurs de l’organisation du Frosh de la Faculté des Arts ont dû rap-peler les consignes par courriel. «Si vos froshies ont des messages grossiers sur leurs tee-shirts, veuillez leur demander de les porter à l’envers». Justine Perrot, la coordonnatrice externe de ce même Frosh, a rappelé: «Il faut que l’adminis-tration et la communauté environnante soient un tant soit peu contentes afin de ne pas détruire le Frosh pour les années à venir».

Au conseil administratif de l’AÉ-FA, le VP événements Josh Greenberg s’estime satisfait des retombées du Frosh sur les relations publiques, même si la police a été très présente dans le ghetto.

Plusieurs raisons peuvent expliquer l’augmentation de la popularité de ces propositions parallèles.

De plus les Frosh alternatifs sont

beaucoup moins chers: 60 dollars pour Rad Frosh, 35 dollars pour le Frosh mu-sulman et jusqu’à 20 dollars pour le Fish Frosh. Une broutille comparée aux 140 dollars demandés pour participer au Arts Frosh. Enfin, les nouveaux venus se retrouvent en plus petits groupes, ce qui est moins intimidant par rapport aux milliers de participants qu’accueillent les Frosh mainstream.

En fin de compte, c’est sûr: ces Frosh alternatifs sont attirants, conviennent mieux aux besoins de certains et per-mettent à chacun de se sentir à l’aise. Mais s’il est clair qu’il est rassurant au sortir du secondaire de se retrouver avec des gens qui partagent le même passé,

est-ce là le but de l’université? De rester confiné dans ses propres idées?

Le Rad Frosh est un événement orga-nisé par le GRIP-McGill, mais les froshies ne connaissent pas nécessairement les opinions politiques du groupe de re-cherche, celles-ci n’étant pas affichées clairement dans leur invitation à l’évé-nement. Est-ce que le fait de participer au Rad Frosh fait aveuglément adhérer le nouveau venu au mouvement sans qu’il ait accès aux opinions opposées?

En fin de compte, au lieu d’être une semaine d’intégration à la commu-nauté mcgilloise dans son ensemble, la semaine d’orientation est devenue l’oc-casion pour chacun de s’intégrer dans une communauté qui lui ressemble. Des Frosh plus près des valeurs de chacun et qui facilitent l’intégration des membres au sein de leur communauté, mais pas au sein de l’école.

Alors que les organisateurs tra-vaillent sur l’intégration individuelle, que dire des communautés de plus en plus isolées? Pour la première fois un Frosh pour la communauté juive, le Getilfe Frosh, est institutionnalisé.

Genesis, une étudiante mexicaine qui a participé au Fish Frosh il y a deux ans, partage son expérience: «Le Fish Frosh correspondait à ce que je voulais, mais les gens que j’ai rencontrés durant ces trois jours, je les aurais croisés de toutes façons à la messe. J’ai l’impres-sion de ne pas connaître le McGillois moyen».

De son côté, Nicolas, U3, confesse avoir participé aux soirées organisées par la FSC (French Student Community) lors de son entrée à l’université, et, depuis, ne côtoyer que des Français. Il témoigne: «J’ai tellement regretté de ne pas avoir rencontré d’anglophones en première année que j’ai été leader l’an-

née d’après».D’autres universités, comme

Concordia, proposent des Frosh moins importants, mais qui rassemblent leurs étudiants lors d’événements qui conviennent à la grande majorité, comme des concerts. De cette façon, tout le monde est rassemblé et a une occasion de se retrouver.

Certains, comme Louis, en troi-sième année d’histoire, pensent qu’en faisant les activités proposées par le Frosh avec la résidence on obtient plus un sens de communauté.

Victor, élève de quatrième année, confirme: «Les Frosh de Faculté, c’est normal mais la multiplication des Frosh alternatifs: ça, c’est de la vrai polarisa-tion. Comme si on avait besoin de ça après les événements de l’an dernier».

En fin de compte, ces nouveaux Frosh alternatifs permettent à un plus grand nombre d’étudiants de sentir qu’ils font partie d’une communauté, mais il faut se poser la question de la croissante polarisation du campus à laquelle on a assisté l’an dernier. On se rappelle les affrontements entre «car-rés blancs», «rouges» et «verts»… Une politisation du campus est inévitable, et même souhaitable, mais une telle polarisation est dangereuse pour la co-habitation pacifique de toutes les com-munautés au sein de l’école. Si chaque nouvel arrivant se retrouve directement avec des gens partageant ses idéaux, n’y a-t-il a pas un risque d’extrémisation hâtive? Il faut leur laisser le temps de se faire des opinions avant de leur en inculquer. x

Intégration et polarisationL’émergence de Frosh alternatifs redéfinit la semaine d’Orientation

Musulman Student Association

Teresa Gerner

Fanny DevauxLe Délit

7Sociétéx le délit · le mardi 11 septembre 2012 · delitfrancais.com

On aura tOus lu les mots de Stéphane Laporte dans les pages de La Presse suite aux événements du 4 septembre: «le Québec est en deuil». Rien de moins, certes, mais la nation québécoise est d’abord et avant tout divisée. Et c’est peu dire, car, depuis quelque temps, plu-sieurs fossés semblent prendre place à un moment clé de notre histoire. De la hausse des frais

de scolarité aux élections pro-vinciales, en passant par la sou-veraineté, les divisions intergé-nérationnelles, idéologiques et politiques se sont véritablement ancrées dans le sol québécois. De simples conversations quo-tidiennes réussissent à éclaircir mon constat: l’unisson québé-cois est en crise.

Ceci dit, cette crise s’étend au-delà des résultats électo-raux; elle émane ainsi d’un malaise profond à l’égard de l’avenir de la province, s’ajou-tant hargneusement aux éter-nels débats existentiels, en plus d’alimenter un paradoxe qué-bécois véritable. Cet inquiétant cocktail Molotov se retrouve donc propulsé par de fausses affirmations et pseudo peurs provenant de bouches malhabi-les et de plumes mal informées.

Prenons la hausse des frais de scolarité. Les étudiants ont mené une chaude lutte face à un gouvernement trop confor-

tablement assis au pouvoir, sans pour autant convaincre la «majorité silencieuse», compo-sée entre autres de payeurs de taxes, issus donc d’une autre génération pour la plupart. Tout au plus, la lutte étudiante n’a pas réussi à convaincre un Canada anglais de la pertinence de son acharnement. On n’avait qu’à ouvrir le Globe and Mail pour être témoins de propos désolants et d’un ton condes-cendant face aux «Québécois-trop-gâtés-qui-chialent-tout-le-temps».

Tournons-nous maintenant vers la souveraineté. À la suite des résultats électoraux, cer-tains souhaitent plier bagages et trouver refuge en Alberta parce qu’évidemment, le Québec perd sa boussole. Pauline Marois et la rue ont pris le pouvoir! Faites vite, les caribous en-trent à l’Assemblée Nationale!

Cette incohérence me dé-sole. Non seulement ceci relève

d’une ignorance certaine, mais la souveraineté québécoise, qui ne risque pas d’arriver de sitôt, semble davantage rassurante face à un «Harperland» majori-taire. Étrangement, ici réside le paradoxe québécois: aux élec-tions fédérales, les Québécois ont massivement emprunté le chemin de la résistance face à Stephen Harper. Pourtant, le 4 septembre dernier, à la ve-nue d’un parti souverainiste à Québec, certains osent parler d’apocalypse. La fin du mon-de, elle risque plutôt d’arriver prématurément avec les mesu-res guerrières de Harper, telle la destruction du registre des armes à feux et non pas avec la maigre minorité de Pauline Marois.

Il découle de cette réac-tion un autre fait intéressant: le malaise des Québécois et des Québécoises. Bien que nous ne voulions pas d’un Canada dirigé par les Conservateurs, nous n’osons pas pour autant

prêcher pour une nation sou-veraine. Les dernières élections provinciales résument avec brio ce malaise: aucun parti, fédé-raliste ou souverainiste, n’est ressorti gagnant de cette lutte à trois. Résultat: une nation plus divisée que jamais, ou presque.

Chose certaine, le 4 sep-tembre dernier, nous avons fait l’histoire. Le 4 septembre, le Québec a élu la première fem-me à la tête de son gouverne-ment. Malgré l’incertitude de la population et au-delà de la division du vote, je suis fière de mon Québec. En cette ren-trée parlementaire, je souhaite y voir un Québec progressiste, dans lequel chacun et chacune peut jouir d’une égalité hors pair.

Pour toutes ces femmes en politique, de Françoise David à Christine St-Pierre, un chapitre a enfin été fait; une page d’his-toire a finalement été tournée. Et on ne le répètera jamais assez x

Alexie Labelle | Court-circuit politique

CHRONIQUE

x le délit · le mardi 11 septembre 2012 · delitfrancais.com8

Il exIste une légende,tenace, que nous perpétuons tous les jours par nos paroles et par nos actes. Nous la per-pétuons quand nous achetons un kilo de mangues importées du Burkina Faso en plein mois de février juste parce que cela nous tente bien, dans le fond, de manger des mangues quand il neige dehors. C’est encore elle qui nous pousse à acheter le gadget dernier cri alors que nous avions fait l’acquisition de son prédécesseur quelques mois auparavant. C’est tou-

jours elle qui nous pousse à acheter plus de produits moins onéreux et par conséquent de qualité moindre, ce qui a pour conséquence de pousser les producteurs à produire de plus en plus pour des coûts mini-misés.

Cette légende qui a bercé notre génération, c’est celle qui raconte que, non seule-ment l’on peut, mais aussi que l’on doit produire de ma-nière infinie dans un monde dont les ressources naturelles et humaines sont finies. Ce cycle de la consommation et de la production sans bornes est validé et encouragé quo-tidiennement au nom des sacro-saints principes de la croissance, du développement et du progrès.  Il existe peu de personnes, surtout en période de crise, pour remettre en cause cette folle doctrine, peu d’hérétiques pour s’opposer au dogme dominant de la crois-sance à tout prix. Il est pourtant capital pour nous, en tant que jeunes, de réaliser que le sys-tème actuel n’est pas durable et de travailler pour trouver une alternative qui nous permet-tra d’optimiser les ressources

naturelles et humaines à notre disposition pour retrouver un mode de vie sain.

L’alternative à ce système existe déjà, elle se nomme dé-croissance et transcende les clivages traditionnels gauche-droite pour venir farouche-ment s’opposer à une vision du monde partagée par les deux «camps». Les décroissants avancent à contre-courant face au rouleau compresseur du monde moderne, mais que préconisent-ils pour arrêter ce bulldozer? Pour eux, la solu-tion commence par la reloca-lisation des biens, des activités et des personnes. C’est-à-dire? C’est-à-dire, si l’on a l’hon-nêteté de suivre le raisonne-ment jusqu’à son paroxysme logique: encourager la pro-duction locale et ainsi réduire considérablement les f lux commerciaux, limiter les f lux migratoires et re-sédentari-ser les populations dans leurs patries charnelle, ainsi que tra-vailler à l’inversion de l’exode rural. À ces points majeurs on peut ajouter une critique plus générale de la société de consommation et de l’homme-consommateur d’aujourd’hui.

Pour eux, l’homme, esclave de la publicité, doit s’émanciper d’un système qui perpétue la course aux profits au mépris de l’écosystème dans lequel nous évoluons. Rappelez-vous en effet: il ne s’agit pas sim-plement ici de «sauver le grand panda ou le ouistiti tacheté des forêts équatoriales», il s’agit de préserver les peuples en pré-servant l’environnement dans lequel ils vivent. Je ne me fais pas de soucis pour la planète, elle a survécu à beaucoup de catastrophes et elle perdurera j’en suis sûr, je me fais du souci pour nous, habitants de nos pa-tries qui dépendons de la santé et des ressources d’une planète qui n’aura pas les moyens, à ce rythme, de nous soutenir.

Dès aujourd’hui, il faut re-jeter le dogme de la croissance et du progrès à tout prix dans lequel nous avons été élevés. Cela baissera-t-il ponctuel-lement notre niveau de vie  ? Certainement, mais c’est le prix à payer pour assurer une vie décente à nos enfants. Pas be-soin de vivre en ermite dans les bois pour aller dans le sens de la décroissance, c’est possible pour chacun, tous les jours, de

commencer à inverser la ten-dance consumériste et mon-dialiste actuelle. Pour com-mencer, consommez des fruits et légumes de saison, achetés localement et si possible direc-tement à l’agriculteur (donc fréquenter les marchés Atwater et Jean-Talon). Consommez, en quantités raisonnables, de la viande élevée localement, de préférence en plein air, et évi-tez à tout prix les fast-foods et les viandes produites de ma-nière industrielle. De manière générale, achetez le plus sou-vent possible des choses pro-duites localement (ou au moins produites au Canada ou en Amérique du Nord) et encou-ragez par des courriers, des pétitions ou votre portefeuille, le rapatriement d’entreprises délocalisées. Limitez votre consommation au nécessaire et tentez de viser la durabi-lité. Enfin, renouez avec votre vie de quartier, votre identité locale, régionale et nationale. Ré-enracinez-vous, votre vie et votre consommation, recon-nectez-vous avec votre histoire et vos compatriotes, reconnec-tez-vous avec votre terre, votre patrie charnellex

Victor Constant | Pensées corsaires

CHRONIQUE

Élections, divisions et paradoxes

Décroissance et enracinement

Pourtant, qui aurait pu le prédire? Certains malins me répondront que les étudiants allaient gagner coûte que coûte, que la hausse tomberait évidem-ment avec le départ de Charest et que le petit carré rouge ne ferait que grandir puisqu’il est épinglé sur le cœur des idéa-listes. D’autres, néanmoins,

auraient affirmé que la hausse serait adoptée, que c’était cer-tainement ce qu’il y avait de mieux à faire, que cela déblo-querait les rues de manifestants pour laisser passer les fonction-naires et travailleurs en voitures, que le Québec n’avait pas à se plaindre en premier lieu et que je devrais être content de la fin du mouvement étudiant: «toi qui vis sur Sherbrooke, tu ne les entends pas à minuit passé?».

Aujourd’hui on le sait, les car-rés rouges ont «gagné», les car-rés verts sont allés se cacher au fond d’une poche de pantalons en soie. Pour moi, cela me fait chaud au cœur de voir les étu-diants comblés après tant d’ef-forts contre un gouvernement si peu peu loquace, qui n’aura pas bougé jusqu’à ce qu’il s’écroule. Au fond, la victoire du Parti Québécois et ses plans futurs sont la récompense pour ceux qui se sont réellement im-

pliqués dans la politique l’an-née passée. Je les ai entendus tous ces étudiants, à minuit passé, les soirs d’été, à mar-cher et chanter.   Quelquefois une petite centaine, d’autres fois plusieurs milliers. Et moi qui ne savait pas vraiment dans quel parti m’investir, je regar-dais de mon balcon, trouvant cela génial que des centaines de milliers de jeunes étaient assez investis dans la politi-que pour faire des manifes-tations. Jour, nuit, pluie, ma-traques ou soleil, cela ne les ralentissaient pas pour autant. Je ne dirais tout de même pas que les étudiants ont été de petits anges trompettistes, annonçant le droit chemin et la bonne nouvelle. Non, on a vu des sauterelles lâchées dans des locaux universitaires, des alarmes de feu tirées en plein milieu d’examens, du graffiti revendicateur qui ferait pâlir

un Marseillais et même un ca-rambolage de casseroles et de cuillères devant l’entrée d’exa-mens finaux.

Quoique je ne sois en aucun cas d’accord avec cer-taines des méthodes utilisées par ceux dénonçant la hausse des frais de scolarité, j’essaie de me rendre bien compte que les quatre cents coups du carré rouge n’avaient souvent rien à faire avec les vrais buts «anti-hausse». Des dépanneurs sac-cagés, des boites aux lettres renversées, des pétards contre et entre les bâtiments- je me dis que ce sont des actes peut-être pleins de convictions, mais tout simplement mal dirigés. Pour une foule énervée, composée de milliers d’étudiants, de jeunes désemparés, de touristes éber-lués, de Québécois, d’Ontariens, de Français, de Sud-Américains, la casse a été minime, surtout comparée à certaines remontées

étudiantes en Europe. En tant que Français vivant au Canada depuis environ dix ans, je dois avouer que même dans des si-tuations aussi délicates que cel-le qui s’est déroulée ici durant la dernière année, les Canadiens restent extraordinairement civi-ques comparés à leurs voisins outre-Atlantique.

Je finis donc cette première colonne en honorant la polites-se Canadienne si unique en son genre, et en suggérant à tous les étudiants vainqueurs de ne pas trop se galvaniser devant les petits carrés verts, mais plutôt d’aller discuter l’affaire autour d’un p’tit verre de je-ne-sais-quoi. Après tout, la hausse aurait coûté en moyenne 1$ de plus par jour, autant l’investir dans un rafraîchissement si bien mérité. x

Simon Albert-Lebrun | Jeux de maux

CHRONIQUE

CHRONIQUE

9Société

Lindsay P. CameronLindsay P. Cameron

Premières impressionsDe nouvelles McGilloises venues d’Outre-Mer

alba Benito Miranda, Espagne

S’il fallait décrire ma première se-maine à McGill en un seul mot, je choi-sirais «bordélique». Au début, fraîche-ment arrivée d’Espagne, tout se passait comme dans un rêve où j’étais l´actrice principale sur un plateau de tournage. Le campus me paraissait immense et j’étais submergée par la quantité de clubs, ac-tivités et services possibles. Je jonglais avec les cours et les formalités adminis-tratives et me perdais en cherchant les bâtiments. Mais avec le début des classes, l´émerveillement des premiers jours a été remplacé par l´inquiétude, l´incertitude et la nostalgie de me trouver seule dans un autre pays. Tout est tellement diffé-rent, il me faudra surement un peu de temps pour m’acclimater même si, au fond, je sais que je ne suis la première ni la dernière à être dans cette situation.

noemie ott, France

Avec la quantité d’informations à laquelle j’avais accès pour choisir l’université où j’allai passer mon année d’échange universitaire, j’aurais dû avoir une idée très claire de ce que se-raient mes premiers jours à Montréal et à McGill. Il faut croire que j’ai lu en diagonal les rapports de mes prédéces-seurs et écouté d’une seule oreille la conseillère et les étudiants de McGill en échange, parce que j’ai été de dé-couverte en découverte.

Pour Montréal, c’est d’autant plus trompeur qu’à part l’architecture et l’accent, tout à l’air plus ou moins comme en France. Et puis on voit pour la première fois une «ligne» devant un bus. Pour McGill, l’acclimatation est plus progressive. La première fois que je suis venue sur le campus, je ne

réalisais pas sa taille. Alors, quand j’ai découvert le bâtiment de l’AÉUM, j’ai repensé au local de 10 m² accordé à son homologue de Sciences Po Paris et j’ai compris mon erreur; j’en ai ri. Même chose quand je suis allée au Bâtiment de biologie Stewart et que j’ai confondu les bâtiments nord et sud; sauf que là, je riais moins. Autre chose, les services: le jour où il y aura un programme WalkSafe, une vente d’affiches ou des chiots (!!) dans une université française, croyez moi, les français feront moins la grève. Et puis finalement, les cours ont commencé. Quand mon premier professeur a réus-si à faire participer un amphithéâtre de deux cent élèves, je me suis dit qu’il était super bon! Au deuxième cours, puis au troisième, je me suis dit que ce n’était peut-être pas un hasard.

Les petits carrés rouges

Le conseil de rédactionLes membres du conseil éditorial du Délit se présentent.

Comme la plupart des éditeurs du Délit, j’ai commencé mes études universi-taires en grande pompe et avec de grands idéaux – la belle époque. Quatre ans plus tard, on va à peine à la moitié des cours, manquons cruellement de soleil et faisons semblant de nous plaindre de l’heure à laquelle on se couche alors que, dans le fond, on ne peut plus vraiment se passer des soirées de production interminables.

Nicolas Quiazua : Rédacteur en chef

Écolier éternel et amateur de connaissances inutiles, j’ai fini un bac en biochimie avant d’entamer cette année spéciale et supplémentaire en études classiques. Toujours dans le rush, vous me rencontrerez sûrement à courir dans les couloirs.

Samuel Siger : Coordonateur de la production

Cette année, je suis le chef de section actualités. Dû à mon goût pour les cursus scolaires obscurs, j’étudie les sciences po-litiques, l’arabe et l’espagnol. Ma passion immodérée pour le sable fait que j’aime les longues promenades en rollers sur la plage au clair de lune en plus de passer l’été prochain dans une tribu nomade au Sahara.

Louis Baudoin-Laarman : Chef de section - Actualités

Je suis étudiante en U2 à McGill, en sciences politiques et développement international. Curieuse, j’adore voyager, m’informer, et j’adore écrire. Travailler au Délit me permet d’apprendre plein de trucs passionnants sur le futur métier que je voudrais exercer (journaliste!).

Camille Gris Roy : Secrétaire de rédaction - Actualités

Parfois je me dis que je suis à McGill pour mes études et non pour le Délit. Clope à la bouche, Bible à la main, je passe tout mon temps au journal. C’est ma troisième année ici. J’en apprends chaque jour un peu plus sur le journalisme, l’un des rares sujets qu’on ne peut pas étudier à McGill. Le Délit c’est pour moi une expérience sur notre langue et notre communauté; mais c’est surtout notre journal à tous. Par contre ça pourrit mes cycles du sommeil.

Anselme Le Texier : Chef de section - Arts & Cultures

Joint Honours - Études Hispaniques et Sciences Politiques.- à consommer avec modération -Un jour, je me suis perdue dans la métropole montréalaise. Depuis, j’essaye d’apporter un peu des cigales et des oliviers de mon petit village méditerranéen au patchwork culturel de la ville. Sinon - ouais: la paix dans le monde les gars.

Fanny Devaux : Chef de section - Société

J’étudie la pharmacologie et la lit-térature anglaise. J’ai grandi dans un monastère dont je me suis échappée sur un bateau de marchandises, désirant la liberté du Canada. J’aime faire de la bière maison, grimper jusqu’à la croix du Mont-Royal et faire des feux de camps dans la forêt.

Lindsay P. Cameron : Coordonatrice Visuel

Collaboratrice au Délit depuis un an et montréalaise depuis toujours, cette année, je corrige! J’étudie la science politi-que à temps plein, la littérature anglaise à temps partiel, et je ne peux m’empêcher de penser continuellement en français, même à McGill. Fait très important: j’adore le chocolat.

Myriam Lahmidi : Coordonatrice de la correction

Photos : Lindsay P. Cameron

10 x le délit · le mardi 11 septembre 2012 · delitfrancais.com

11Arts & Culturex le délit · le mardi 11 septembre 2012 · delitfrancais.com

Arts&[email protected]

J’ai une bonne amie dont j’aurais aimé vous par-ler aujourd’hui, mais il advient que cette dernière a récemment connu un essor de popularité et pour éviter de m’adonner à la redondance ou de vous ser-vir une réflexion presque intel-ligente sur un sujet prémâché, cette chronique ne parlera pas de mon amie Démocratie. Une prochaine fois, ma tendre.

Ainsi, j’ai sondé mes pen-sées à la rescousse de cette pre-mière chronique que je signe et un éclair, je n’oserai pas dire de génie, m’a frappé. Les chats. J’adore les chats. Et aussi rapi-dement qu’il s’était manifesté, cet éclair s’anéanti sombrement,

parce qu’une première chroni-que sur les chats, c’est franche-ment ridicule, sans pour autant nier que je sais donner dans le ridicule quand on m’en offre la tribune. On me l’a toujours dit, ça ne tue pas.

Néanmoins insatisfait, je naviguai donc plus loin, plus longtemps et plus tard dans la soirée pour vous trouver the su-jet mais je remis le tout au len-demain. Conséquemment, vous entretenir des dangers de mon plus grand défaut, la paresse, eut été de circonstance, d’autant plus que ce sujet me connait au moins depuis quelques lustres. Toutefois, la teneur en opti-misme brillerait de son absence

dans une première chronique sur un péché capital et loin de moi l’idée d’attiser le cynisme chez mon lectorat – je me sup-pose déjà un lectorat, parce que je le vaut bien.

Dans l’optique, donc re-quise, de vous offrir un sujet optimiste portant un messa-ge transcendant la condition humaine (notez l’ambition), il m’est apparu plausible que l’art soit au menu. L’art, que dis-je, l’Art avec un grand A. À tout le moins, l’Art est partout et il est salvateur de la condition humaine. C’est peu dire, mais c’est aussi tout ce que je peux faire, puisque davantage serait agir comme si j’osais prétendre

y connaitre quoi que ce soit. Je laisserai donc le soin aux plus ambitieux parmi vous, ou les autres, de m’entretenir de l’Art et je me contenterai de répondre en acquiescements succincts tout en interpellant des noms de chefs-d’œuvre dont j’ai entendu parler en écoutant Who wants to be a millionaire.

«Hm. Hm hm. Saturno Devorando a un Hijo. Du génie!»

Non. J’aime l’Art, ce n’est pas faux et c’est même vrai, mais c’est un terrain risqué pour un premier pas. Au delà, donc, de ce sujet audacieux, il m’eut été nécessaire d’en trouver un plus anodin, mais qui vous laisserait entrevoir le futur de cette nou-

velle aire de divertissement que je possède dans les pages de ce journal qui m’est cher. Je n’ai toutefois jamais trouvé de sujet et le temps est venu (depuis hier, au moment d’écrire ces li-gnes) de remettre ma chronique. Dommage.

***Il va de soi que le sujet de

cette chronique est évident à qui sait comprendre que je ne vous ai pas trainé au bas de ce texte sans avoir l’ambition de vous faire faire le voyage à tra-vers les dédales de ma pensée. Je m’appelle Alexandre et je viens de me présenter. À bientôt! x

Alexandre Gauvreau | Perspectives

CHRONIQUE

La salle était comble, sur-voltée et surtout anti-Charest au Club soda le

mardi 4 septembre dernier alors que le public des Zapartistes a pu se gargariser à souhait des maintenant classiques «la loi spéciale on s’en câlisse» et des «chou, Michou!» en attendant le dévoilement des résultats électoraux… plutôt satisfai-sants.

Pour tous les détracteurs du Parti libéral du Québec, le spec-tacle des Zapartistes le soir des élections relevait de la jouis-sance. Intrinsèquement anti-droite, anti-capitaliste et anti-mou, (pour reprendre le thème de la soirée), Christian Vanasse, Brigitte Poupart, Vincent Bolduc, François Patenaude et Jean-François Nadeau ont su voler la vedette aux chefs des principaux partis.

Le spectacle a pris son en-vol avec un retentissant «On espère fêter la fin du règne de Jean Charest ce soir!», expulsé par un Christian Vanasse dans une forme superbe.

Pour une heure, les Zap faisaient leur spectacle (revue de presse, imitations, musique

et chansons), puis, ils baissaient un écran pour que la salle voie en direct le déroulement de la soirée électorale à Radio-Canada. La soirée se terminait par un discours de chaque chef.

Imitations réussiesChristian Vanasse, Brigitte

Poupart et Jean-François Nadeau ont volé la vedette grâ-ce à des imitations incroyable-ment bien jouées et au charis-me qu’on leur connaît. Vincent Bolduc et François Patenaude sont quant à eux restés égaux à eux-mêmes, sans grandiloquen-ce, mais sans accroc non plus.

En revenant sur le mou-vementé printemps 2012, les Zapartistes ne se sont pas trom-pés: la foule avait soif d’enten-dre parler des protestations étudiantes qui s’étaient éclip-sées des thèmes de campagne au cours du mois d’août.

Comme toujours, les Zap ne se sont pas gênés d’écor-cher le gouvernement libéral et son chef Jean Charest, leur tête de turc depuis la fondation du groupe en 2001.

«À tous ceux qui se sont faits arrêtés, on n’a que cette phrase à dire: Quand les ban-dits sont au pouvoir, l’honnête homme est en prison», a cru

bon réciter Christian Vanasse en faisant référence au nom-bre d’arrestations exagérées du «printemps québécois».

Après une revue de presse pimentée par l’humour acerbe des cinq acolytes, les Zapartistes ont généreusement ridiculisé les différents acteurs de la cam-pagne électorale, les slogans des partis, ainsi que leurs chefs en reprenant les personnages qu’on leur connaît bien.

Le Georges Brossard de Vincent Bolduc, par exemple, a énuméré les insectes qui sor-tent lors des campagnes électo-rales. Très à propos, il a men-tionné entre autre le «ver soli-daire qui n’est là que pour faire chier toutes les autres bibittes».

Le Jean Charest de Jean-François Nadeau, le nez en sang et les cheveux en bataille puisqu’il s’est fait battre dans son comté était au-delà de ce qui pouvait être espéré de ce nouvel humoriste dans le grou-pe des Zapartistes. La salle s’est trouvée face à unedilemm: crier «CHO!!» à Jean Charest ou ap-plaudir Nadea?

Les libéraux ne sont pas les seuls à écoper.

La Pauline Marois de Brigitte Poupart s’est elle aussi démarquée par son constant

roucoulement et ses manières bourgeoises qui se transfor-ment en une rage incontrôla-ble contre les dissidents de son parti. Imaginez Pauline Marois se rouler par terre en hurlant et vous aurez une idée de l’extrait.

Le François Legault de Christian Vanasse avait visible-ment des problèmes d’élocu-tions, ce qui lui donnant un air niais, mais ô combien ressem-blant. Sa tactique électorale de répèter en boucle et sans autre contenu ses phrases chocs comme «médecins de famille», «Bataille d’autobus» et «faire le ménage» a fait hurler de rire l’auditoire.

Le Jean-Martin Aussant de François Patenaude a malheu-reusement manqué de travail. Il n’était pas reconnaissable (outre le fait que Patenaude lui ressemble comme deux gouttes d’eau) et n’a fait rire personne. Le parti est encore jeune et c’était la première apparition d’Aussant. Espérons qu’il y en aura d’autres.

Si Vincent Bolduc ne s’est pas démarqué au courant de la soirée, il a toutefois réussi à sauver sa tête avec son inter-prétation de Françoise David en communiste-hippie soudai-nement hautaine qui chasse

son collègue Amir Khadir de la scène.

LE moment culminant de la soirée est sans contredit lors-que le premier ministre Jean Charest a été défait dans son propre comté. Ça a d’ailleurs donné lieu à l’unique ovation debout de la soirée. Dans un moment d’amour-de-sa-patrie-partagé, les spectateurs se sont embrassés, enlacés, félicités. On se serait cru à Noël.

Et c’est là tout le brio des Zap.

Autant ils savent relever le discours à la hauteur de l’humour intelligent, autant ils excellent à faire vibrer les cœurs des gens qui les écou-tent. L’amour du Québec est en cause, mais c’est l’impression d’appartenir à un grand peu-ple et d’en être responsable qui prévaut.

Impossible, par exemple, de ne pas réagir aux propos de Brigitte Poupart, qui incar-ne l’Autochtone qui n’a pas voté par ce qu’elle «ne se sent pas concernée». Ce genre de moment n’est pas drôle, il est poignant. Il donne peut-être envie de pleurer ou génère une culpabilité collective, mais il ne laisse personne indifférent. x

Les Zap à la conquête du centre mouLe groupe des cinq humoristes politiques a galvanisé la foule lors de la soirée électorale.

HUMOUR

anabel Cossette CivitellaLe Délit

Au-delà du sujet

12 Arts & Culture x le délit · le mardi 11 septembre 2012 · delitfrancais.com

Arts sans frontièresLes Escales Improbables de Montréal mélangent réalité et fiction jusqu’au 14 septembre

Le 9e festival international des Escales Improbables de Montréal se veut le

«Rendez-vous des Arts sans fron-tières». Lors des Escales de Jour, présentées du 7 au 9 septembre sur les quais du Vieux-Port, il ne s’agit pas seulement de traverser les frontières entre différentes cultures. Le défi lancé au spectateur est de briser le «qua-trième mur» qui le tient trop sou-vent à l’écart de l’artiste. En plus de déambuler d’une performance artistique à l’autre, les specta-teurs sont invités à se joindre aux œuvres présentées. La participa-tion du spectateur peut se dérou-ler en groupe ou encore de façon plus intime, en tête-à-tête avec l’artiste.

ConteStéphane Pelliccia, alias

Nasarov le trimardeur, rassemble les spectateurs en leur faisant le récit de son amour pour les abeilles et le miel. En se faisant le point central du demi-cercle de ses auditeurs, Nasarov crée une ambiance semblable à celle qu’on trouve habituellement autour d’un feu de camp, lorsqu’entre amis on se raconte des histoires fantastiques qu’on ne peut s’em-pêcher de croire.

De l’origine des abeilles à la façon dont nait une reine, Nasarov connaît tout sur les fabricatrices de miel. Le conteur entraîne les spectateurs dans un univers mythique où l’apicul-

ture est intimement liée au divin. Nasarov raconte l’histoire d’Aris-tée, fils du dieu grec Apollon, qui vit une nué d’abeilles sortir de taureaux et de génisses sacri-fiés après que l’ensemble de ses abeilles eut péri. La dégustation d’hydromel, breuvage à base de miel, «la boisson des dieux» se-lon Nasarov, ajoute au sentiment d’intimité que le conteur crée en regardant chaque spectateur dans les yeux et en posant fré-quemment des questions sur son propre récit.

Sur un site où les spectateurs peuvent facilement se laisser dis-traire, Nasarov réussit à garder toute l’attention sur lui grâce à son manteau aux innombrables secrets. On y trouve, entre autres, des verres pour boire l’hydromel, une dizaine de flasques contenant différentes sortes de miel et des abeilles sous la forme de marionnettes. L’insistance du conteur à faire goûter une variété de miels aux spectateurs confirme sa passion pour l’apiculture.s, Mis à part son coté amusant, ce monologue souligne l’inquiétude de l’artiste quant à l’avenir des abeilles. Dans le monde de Nasarov, per-sonne ne s’est aperçu de la dis-parition de la dernière abeille, et des fleurs qui dépendent de ces ouvrières pour se reproduire. Pour lui, nous sommes trop oc-cupés par la routine pour voir mourir le «dernier coquelicot». Nasarov conclut en insistant sur l’importance de protéger les abeilles qu’il nous reste, à nous les spectateurs. Ainsi, il réussit à inspirer chez ses auditeurs un sentiment de responsabilité par rapport à la nature, et bien sûr, aux abeilles.

DanseC’est cette deuxième option

qu’a choisie Emmanuel Jouthe, de Montréal, concepteur de Proximités Variables. Pour cette prestation, chaque danseur per-forme au son d’une musique audible pour lui seul et le spec-tateur. Ainsi, on se retrouve lié au danseur non seulement par le fil qui relie les deux paires d’écou-teurs, mais aussi par une réalité sonore complètement privée.

Chaque danseur exécute une

chorégraphie différente, ce qui permet de vivre une nouvelle ex-périence à chaque essai. Le dan-seur occupe totalement la bulle du spectateur, mais l’ambiance musicale et la grâce des artistes empêchent cette intrusion de devenir agressante. Elle est tout simplement intime, et la proximi-té permet au spectateur de com-prendre l’espace qu’occupe son

propre corps.Selon Emmanuel Jouthe,

la musique et les mouvements du corps créent une réaction viscérale. «Parce qu’on a tous un corps, on peut tout de suite comprendre les sensations vé-cues par les autres» affirme-t-il, ajoutant qu’«avec la danse et la musique, on se retrouve dans un monde physique et instinctif». Ici, contrairement à la littérature ou au théâtre, la prestation ne fait pas dans la sémantique. Selon l’artiste, «il ne s’agit pas de cher-cher un sens à la performance artistique, mais plutôt de créer un lien entre la danse, le danseur et le spectateur».

Ce lien, il existe sans l’ombre

d’un doute. Les écouteurs isolent complètement le spectateur des bruits ambiants. L’engagement des danseurs est absolu. Leur regard intense qui scrute le vi-sage du spectateur sans ciller et leur léger frôlement permettent au spectateur d’être transporté dans un monde où l’intimité peut exister entre deux incon-nus, simplement par l’empathie

des corps, comme le dit si bien Emmanuel Jouthe. Cette intimi-té peut même être vécue à trois. Sarah Dell’ava et Andrée-Anne Ratthé le prouvent par leur duo. En se mettant nez-à-nez avec le spectateur et en créant différentes perspectives en s’éloignant et se rapprochant, elles créent une per-formance radicalement différente.

MusiqueL’Épicerie Musicale permet

la découverte d’une vingtaine d’artistes locaux ayant composé une chanson spécialement pour l’installation de Jérôme Minière et Marie-Pierre Normand. La proposition est de se nourrir le corps et l’esprit de produits de

la région. De la sorte, les spec-tateurs peuvent se procurer, pour la somme de 99 cents, une chanson et un fruit ou un lé-gume. L’agriculture et la culture se trouvent ainsi réunies. De plus, les concepteurs réinven-tent ici l’aspect physique d’une œuvre musicale, au moment où la musique est de plus en plus immatérielle, dû au numérique. Les Tumbones d’Antigua i Barbuda, et Les Siestes Musicales, offrent aux spectateurs un moment de détente. L’installation d’Antigua i Barbuda consiste en une dizaine de chaises berçantes où les spec-tateurs, bercés par le mouvement et la musique classique, se voient offrir un massage par le chef machiniste. Aux Siestes Musicales, plusieurs artistes se relaient tout l’après-midi devant les specta-teurs confortablement installés sur des chaises longues. Ces deux performances sont parfaites pour un moment de relaxation au bord du fleuve et permettent d’oublier complètement les tracas et la rou-tine de la ville.

Les Escales de Jour réus-sissent à créer un lien entre les spectateurs et les artistes. Le site de l’évènement, près du bassin Bonsecours est assez petit pour pouvoir assister à toutes les per-formances artistiques sans trop se fatiguer. De plus, la présence des artistes et leur joie à discuter avec les spectateurs renforce la rela-tion qui devrait toujours exister entre un artiste et son public x

Myriam LahmidiLe Délit

Les Escales Improbables de Montréal, du 2 au 14 septembre Les Escales de Nuit, du 11 au 14 septembre Les Escales de Ville, du 2 au 11 sep-tembre, sur la promenade des Artistes du Quartier des spectacles

Lindsay P. Cameron

«De l’origine des abeilles à la façon dont nait une reine, Nasarov connaît tout sur les fabricatrices de miel.»

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«L’agriculture et la culture se trouvent ainsi réunies.»

Lindsay P. Cameron