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No 5 15 Mars Vllllalve Dt LA 50 ·eiélé d'édu<tafion ) L'ECOLE PRIMAIRE pal · aît 14 fois pendant le cours scolaire Abonnement annuel: Fr. 4.50 Les ubonnenlents se règlent par chèque Ile 56 Sion, on à ce défaut contre remboursement. Tout ce qui concerne la pUblication doit être adressé directement à M. LOUIS DELALOYE, Secrétaire au Dé· partement de publique à Sion. Les annonces sont reçues exclusivement par PUBLICITAS, Société Anonyme Suisse de PUblicit', Sion Rue · de Lausanne 4 - Téléphone 2.36 Cl) a.. E 6 .c () >-. 1- - <1) p.; E C\S ..r:: U +-' Cf) c: ..r:: - <1) Cf) 0 .-, c C\S <1) ....-, -+-' <1) 1]

L'Ecole primaire, 15 mars 1927

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Aux membres du Corps Enseignant Valaisan fle manquez pas . de compléter votre 1

Caisse .. Retraite par la conclusion d'une assurance sur la \lie à Jo

B.A..LO'XSE ·Compagnie d'assurance sur la vie, Bâle.

Inspecteur de la Branche Vie pour le Valais:

Léon PANC.HARD, Bramois

PUBLI(JITAS· . SOCIÉTE ANONYME SUISSE DE PUBLICITÉ

Rue de Lausanne 4, ·8 ION Téléphone 2.36

No 5 15 Mars

Vllllalve OR&~l~JI

Dt LA

50·eiélé valai~at)"e d'édu<tafion

)L'ECOLE PRIMAIRE pal·aît 14 fois pendant le cours scolaire

Abonnement annuel: Fr. 4.50

Les ubonnenlents se règlent par chèque post~l Ile 56 Sion, on à ce défaut contre remboursement.

Tout ce qui concerne la pUblication doit être adressé directement à M. LOUIS DELALOYE, Secrétaire au Dé·

partement de l'Ins~ruction publique à Sion.

Les annonces sont reçues exclusivement par PUBLICITAS, Société Anonyme Suisse de PUblicit', Sion

Rue · de Lausanne 4 - Téléphone 2.36

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JEMALT « Je ne pouvais pas me décider à tourmenter les

enfants avec l'huile de foie de morue. It

LE RAPPORT D'UN r

MEDECIN « Je vous félicite d'avoir créé le Jemalt, qui est vrai­

ment un triomphe de la technique pharmaceutique. Ma femme, par exemple, qui ne supporte même pas l'odeur de l'huile de foie de morue, est enchantée du Jemalt. Je me suis rendu compte, moi-même de son goût excellent et je rai prescrit largement cet biver, a.lors qu'autrefois, je ne pouvais me décider à tourmenter les enfants avec l'huile de foie de morue. »

Dr méd. O. H. V.

Le Jemalt est ·un extrait de malt à base de 30 % d'huile de foie de morue, sous forme sèche sans goiH désagréable et possédant les mêmes propriétés que l'huile de foie de morue. Naturellement, le Jemalt est cher. Mais partout où des enfants scrofuleux, rachiti­ques et affaiblis ont besoin d'huile de foie de morue et qu'ils la refusent, le Jemalt rend sans autre la cure possible.

Les instituteurs qui ne connaissent pas encore le Jemalt en recevront un échantillon gratuit, sur de­mande.

Le JEMALT est en vente dans toutes les pharmacies et drogueries au prix de fr. 3.50 l'a boite.

Dr A. WANDE'R S. A., BERNE SANS LE GOUT DE~AGREABLE

NI LA FORME BUlLEUSE DE L'BUlLE DB rOll: DE IIORUE

46me Année No 1) 15 Mal~s 1927

Organe de la Société "alaisanne d'éducation

SOMMAIRE: Société des Educateurs abstinents. - A propos de Syn­dicat. - Chorale des Instituteurs. - Statuts du Syndicat du P. E. _ Des punitions corpo'relles à l'école. - Les Eclaireurs et l'école. - Leçon de choses: le chat. - Devoir d'élève. - « NOS PAGES ». - En glanant. - Toto, ou l'art d'élever les enfants.

La Société valaisanne d'Educateurs abstinents Le 20 février a eu lieu à Sion la fondation d'une Société

valaisanne cl' Educateul's abstinents qui se propose un double but: Promouvoir l'éducation abstinente de la jeunesse et mettre l'in­fluence sociale des éducateurs au service de la réforme des mœurs dans l'usage des boissons alcooliques.

Sans exclure aucun côté de la vaste question antialcooli­que, le nouveau groupement en envisage les aspects qui sont en étroite connexion avec notre tâche éducative.

Peuvent être membres actifs de la Société valaisanne d'Edu­cateurs abstinents les éducateurs en fonctions; peuvent être melll­bres associés les anciens éducateurs, les personnes qui font partie de commissions et d'administrations scolaires et les élèves-insti­tuteurs.

Dans .sa séance constitutive, la jeune société a désigné le comité suivant:

Président: M. C. Gribling, Sion. Secrétaire: M. Cl. Bender, Fully. Caissier: M. E. Dorsaz, Fully. Le COlllité de la Société valaisanne d'Education, dans sa

séance du 24 février, a bien voulu reconnaître comme section abstinente le nouveau goupement qui fait appel ' avant tout au dévouement de ses membres.

Une douzaine d'éducateurs ont adhéré jusqu'ici à la société dont le but précis est d'intensifier notre action pour préserver les énergies vitales de nos enfants de la déchéance alcoolique.

D'autres éducateurs, comprenant la portée énlinemment chrétienne et la nécessité urgente de notre mouvement, voudront joindre leur dévouement au nôtre en faveur de la santé physique et de l'intégrité morale 'de notre jeunesse.

A propos de 'Syndicàt Nous constatons avec bonheur que l'organisme nouveau qui

vient de naître au sein de la S. V. E. est accueilli avec beaucoup

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d'enthousiasme par les mell1bres du corps enseignant. De la Ras­pille au Léman, de . nombreuses adhésions nous sont parvenues et affluent chaque jour encore. C'est pourquoi nous convoquerons sous peu l'assemblée générale. Dès lors , le syndicat des institu­teurs travaillera à la réalisation des institutions sociales prévues dans les statuts. Ces dernières, nombreuses et divers,es, contribue­ront dans la meSlue du possible à améliorer la situation sociale du corps enseignant. '

Cependant, nous nous surprenons à songer avec amertume au sort qui leur sera réservé, si l'esprit d'union au sein du corps enseignant ne se réveillait pas avec l'institution du syndicat. Si d'une part, nous espérons beaucoup de l'intelligence, de l'initia­live, de la loyauté de l'instituteur en général, nous avons, d'autre part, à craindre son esprit de liberté et d'indépendance. L'habi­tude du commandement en classe, l'exercice de fonctions hono­rables dans la commune contribuent pour une large part à diriger le maître d'école dans 1:1 voie unique qu'il s'est tracée et à effacer de lui le souvenir qu'il est membre d'une corporation et que, comme tel, de nombreux devoirs lui incombent.

Nous avons en effet entendu, dans une réunion d'institu­leurs, J'un d'eux affinner n'être point disposé à lier son indé­pendance au syndicat. Cette détennination nous a surpris; nous nous sommes demandé si notre cause n'était pas aussi la sienne, et comment, en adhérant au syndicat, il croyait sacrifier sa liberté; car nous savions d'autre part que cet instituteur est un des diri­geants de la politique de sa comm.une et qu'il ne souffrirait jamais une dissidence dans son groupe. Or, nous S0l11.n1es cles membres du corps enseignant et l'esprit d'union et de discipline n'est-il pas de plus grande nécessité clans notre corporation que clans un village où la passion et les haines de famille sont bien souvent les seules causes de division? Les citoyen~ que cet insti­tuteur a embrigadés ne lui ont-ils pas livré leur indépendance? La sienne ne l~lu· serait-elle pas à charge? Ces quelques considé­rations devraient an"lener à notre cause tous les n1embres du corps enseignant qui craindraient aussi pour leur indépenqance. Ils apporteraient ainsi au syndicat un brü1 de la lnagnifique ardeur qu'ils déploient clans leur commune pour le parti auquel ils ont adhéré. Ils travailleraient avec enthousiasme à rendre notre g'roupement fort et uni en le libérant des entraves qui pour­raient paralyser son action. Ces entraves: indifférence, inertie, indiscipline des memhres réduiraient à néant l'action du comité et seraient la cause directe de découragement et de division, tandis qu'avec la collaboration de tous dans la corporation, le syndicat aura acquis la . cohésion indispensable et l'instruction populaire dans le canton ne pourra qu'en bénéficier. M.

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Chorale des Institu~eurs

Résultat splendide! Nous étions plus de 70 à la dernière répétition. Sortant définitivement du domaine des utopies, notre chorale est devenue une réjouissante réalité; et septante régents, qui n 'étaient hier que de vagues col~ègues, vont devenir autant d amis. Presque un faisceau, par la vertu du chant!

Nous sommes convaincus qu'il serait parfaite~lent inutile de leur dire que nous conlptons SUT eux pour la prochaine répétition; d 'autant plus que le caissier sera à son poste, et que l'organisation prévue d'un sen ice d'autocars partant de Sierre et de Monthey les délivrera du cauchemar des trains qu'on risque de nlanquer. Un point à retenir, cependant. Il est nécessaire que chacun considère conlme un devoir absolu d apprendre pour la prochaine fois toutes les strophes des 4 chœurs étudiés dans le recueil. Cela pour des raisons très claires que chacun comprend, et parce que 4 autres chants seront mis alors à l'étude. Et ceci n 'est pas des phrases, on est prié de le croire.

Le présent appel s'adresse' aux retardataires qui pourraient renforcer notre registre de ténors. Allons, c'est assez tôt: un bon mouvement. On assiste à une répétiton, le charme opère, et la rois suivante on se sent capable de faire à pied sous la pluie le trajet Martigny-Saxon pour ne pas être en retard. On est des V:::tlaisans ou on n 'en est pas!

Donc pour la prochain répétition, le mardi 29 mars, à l heure qui sera fixée ultérieurement par un cOlnlnuniqué aux journaux, nous serons 82 avec les ténors qui ne luanqueront pas cle nous arriver. Et vous verrez si c'est" une utopie! .

Le Comité.

Statuts du Syndicat du P. E.

Nous n 'avons pas eu l'avantage de pouvoir corriger les épreuves des statuts du syndicat du P. E.; aussi nous constatons qu'un certain nombre d'erreurs se sont glissées dans l'impression <.lu texte. Nous yous laissons corriger les nombreuses fautes de ponctuation et quelques fautes de français. Nous vous signalons simplen1ent :

Page 105 § 3, al. 1, ajouter: ... du corps enseignant pl'imail'e. Page 106 § 6: ... est au clOlnicile du secrétaire. Page 108 § 23, titre; lire assemblée des délégués au lieu de

générale. Page 108 § 23, lire: des présidents des assemblées de distJ'icts. Page · 109 § 23, litt. Cl) lire: autorités scolaires cantonales et

comlJlZfnales. '

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Nous vous prions de bien vouloir corriger les statuts d'après ces indications.

D'autre part, nous sommes heureux d'informer les adhérents au syndicat que nous pensons les convoquer prochainement en assemblée générale. L 'organisation définitive de la corporation et la discussion des statuts ·de la Caisse de Secours mutuels figu­reront à l'ordre du jour de la séance.

T ,es instituteurs qui n'ont pas encore envoyé leur bulletin it'~ithésion sont instamlnent priés de le faire au plus tôt. Si notre cOl'noration est forte et active, elle exercera une influence réjouis­s<;:lnte pour le développem.ent de la situation matérielle et sociale du P. P..; elle atteindra alors facilement le but qu'elle se pro­pose O!lns ses statuts. Mais pour cela elle doit pouvoir compter sur l'applli de tous les instituteurs.

Oue tous ceux qui ont déjà adhéré au mouvement mettent leur dévollf~TYlent au service du syndicat; qu'ils persuadent des colIèQ'ues h~sit l=l nts; et que chacun enfin sache que parfois l'in­différence pst r.oupable, que toujours se plaindre est lâche et que tout effort tend <:J nt à l'amélioration de . notre situation doit être soutenu. B.

D es ounit ions corporelles à l'école La loi scolaire valaisanne interdit les Inauvais traitements et

le règlement énumère aux articles 90, 91 et 94 les moyens disci­plinaires qu'il accorde au personnel enseignant et aux autorités scolaires.

Au ~este, l'opinion publique se lTIOntre manifestement hostile à ce genre de punitions qui, comme nous allons le voir, présente des inconv~nients nombreux et sérieux.

Tout d 'abord , les châtiments corporels peuvent présenter un dam~er pour la santé de élèves. En effet, quand le maître en use, c'est souvent sous l'empire d'une vive émotion. Lui est-il alors toujours . possible de mesurer les conséquences de son acte, de se fixer des limites qu'il ne dépassera pas? Et ces limites les connaît­il exactement? ·Ne varient-elles pas avec la constitution, la santé de chaque enfant? Ne se rencontre-t-il pas des élèves sujets à quelque mal interne, à une affection latente que l'instituteur ne soupçonne pas et que des coups imprudemment donnés risquent d'aggraver? Les tribunaux de maints pays n'ont-ils pas eu à s'occuper de cas où la responsabilité du maître était fortement engagée? Nous avons entendu parler de personnes qui ont pâti leur vie durant des conséquences d'une brutalité subie à l'école de la part d'un maître irrité.

Ensuite, ces punitions humilient à la fois le maître qui les applique et l'élève qui le~ reçoit , Le maître d 'abord. Celui-ci, qui

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doit se montrer un homme digne, calme et vertueux, c'est-à-dire ferme de volonté, se laisse vaincre par une passion brutale, en­traîner à une sorte d'ivresse ou de folie passagère, et cela parfois pour les motifs les plus futiles: une étourderie, une inattention qui échappe à des enfants plus légers que méchants. Ne subit-il pas, dans ce cas, une honteuse défaite?

Et si, en infligeant une correction corporelle, il conserve son sang-froid et s'expose moins à certaines conséquences physi­ques regrettables, ne laisse-t-il pas percer de la cruauté qui le ren­dra plus ou moins odieux?

L'élève, lui aussi, est humilié. Il se voit, en effet, traité com­me un être sans raison, incapable de comprendre un autre argu­ment, de se rendre à un raisonnement ou à un bon conseil. Ces répressions brutales ont généralement pour conséquence de l'aigrir et de l'endurcir dans le mal, car l'humiliation est une arme extrêmement dangereuse. Il ne faut pas s'imaginer que l'immense majorité des hommes l'acceptent comme les saints.

Ajoutons, en troisième lieu, que le maître qui frappe s'arroge un droit qu'il n'a pas.

Sans doute, il estimera que toute règle comporte des excep­tions, qu'une fois ou l'autre n'est pas coutume, qu'il existe des natures indomptées qui sont insensibles aux punitions ordinaires, à la persuasion.

D'abord, une ~ois n'est pas coutume; c'est très vrai. Seule­ment, attention: on glisse facilement sur cette pente; l'habitude <;le frapper se prend aisément et on s 'en corrige difficilement. Puis, donner le mauvais exemple, même une seule fois, laisse tou­jours une impression défavorable et fait un accroc au prestige du m·aître. De quelle autorité recommandera-t-on aux autres la résistance aux inclinations mauvaises, si soi-même on se laisse entraîner à quelque faiblesse? Quant à ces natures indomptées qu'on ne réussit pas à discipliner par les moyens permis, nous ferons remarquer que leur nombre doit en être très restreint. Souvent, l'insuccès tient à ce qu'on ne sait pas découvrir la fibre de sensibilité qui subsiste dans tout cœur, même le plus mé­chant.

C'est ici que l'éducateur a besoin de beaucoup d 'expérience, de tact et de perspicacité.

Tout le monde connaît l'anecdote du cheval d'Alexandre-Ie­Grand . . Ce roi avait un coursier que dans certaines circonstances personne ne pouvait monter. Alexandre s'aperçut un jour que la cause en était la peur que la ·bête éprouvait de l'ombre projetée devant elle quand sa croupe était tournée du côté du soleil. Dans la suite, il suffisait de tourner le cheval, la tête du côté d'où venait le soleil, pour qu'il restât calme.

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Ce n'est pas à l'instituteur qu'incon~be la rude ' tâche de vaincre certaines natures obstinées; il n'a pas à jouer le rôle de dompteur. Si un enfant, par suite de tare physique ou morale,

' devient pour la classe une cause de trouble fréquent ou perma­nent, l'autorité scolaire doit le l~endre à ses parents, au 1110ins tem.poraireluent, jusqu'à amélioration sensible. Du Teste, il existe des établissements spéciaux pour enfants vicieux ou incorrigibles.

Une raison qu'allèguent parfois certains maîtres pour justi­fier des punitions corporelles, c 'est l'autorisation que leuT en ont accordée les parents.

Cette autorisation n'enlève pas à ce genTe de répression tout l'odieux qu'il présente, surtout quand il est appliqué en public.

Puis, nous dirons que c est imprudent d'useT de c~tte auto­risation, car les paTents qui l'ont donnée seront peut-être les premiers à blâmer le maître qui s 'en es't servi, surtout si la trace laissée par les coups excite leuT compassion ou irrite leuT suscep­tibilité.

Si ces parents s'en remettent si facilement à l'instituteur du soin de corriger leurs enfants, c'est qu'ils se sentent souvent ~m­puissants à le faire eux-mêmes, et cette faiblesse vient préCIsé­ment de leur affection déréglée p,our leur progéniture.

Neuf fois sur dix les enfants insupportables à l'école ont Teçu ou reçoivent à la m.aison une éducation nlolle ou négligée; ce sont eux qui commandent, et ce sont les parents qui obéissent, comnle le fait bien voir le trait intéressant qu'on trouvera un peu plus ~ ~t qui est dü à la plunle de Pierre [' El'n1ite . .

Happelons en tenuinant, que l'éducation n'e,st pas une œuvre de contrainte, un travail de forçats; elle demande la collabora­tion volontaire et joyeuse de l'enfant, et le nleilleur luoyen d'ob­tenir une bonne discipline, c'est l'ascendant moral du 11laître fondé sur le respect et 1 affection. Rien ne remplace cette autorité. Un lnaître pourra,par la crainte, obtenir dans sa classe un cer­tain ordre extérieur, un travail plus ou moins régulier, des succès aux examens, Inais il n'aura pas fait l'éducation de ses élèves. Ceux-ci s'ingénieront à être plus dissÎlnulés, plus adroits. Mon­taigne en juge bien ainsi quand il dit.: « Il y a je ne sais quoi de servile en la rigueur et la contrainte. Je n'ai vu d'autre effet aux verges, sinon de rendre les ânles plus lâches et plus lualicieuse­luent opiniâtres. »

Locke est du nlêlue avis: « Ces sortes de châtinlents ne contribuent pas du tout à nous faire vaincre l'inclination na­turelle que nous avons à goüter les plaisirs du corps, mais plutôt à nous y encourager et confirnler ainsi en nous le principe de toutes sortes d'actions méchantes et vicieuses ... Il n'y a rien de plus ordinaire que de voir certains enfants concevoir de la haine

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pour certaines choses , aussitôt qu'on les a battus afin de les -y contraindre; »

Ajoutons clue le système de.b douceur réus~i~ lnême dans le dressage des animaux; pourquOl ne nous en serVInons-nous pas dans la conduite de nos semblahles. J

Est-ce par la douceur ou la violence que St F~'ançois ?e S~les a ramené dans le bercail de l'Eglise plus de sOlxante-dlx nll11e hérétiques ?

N est-ce pas aussi par la bonté, les procédés aff~ctueux et surtout la prière que les Salésiens métamorphosent des loups en agneaux?

« H eZZfeux ceux qui sont cloux, cal' ils possédel'ont la terre. »

Les Eclaireurs et l'Ecole (Suite et fin.)

Le « bon élève » est-il nécessairement un « bon éclaireur », ou vice-versa? Voyons un peu. 11 nle souvient du p~rtrait angéli­que du hon élève qui se trouva~t dans « Les. premIers pas » , le vieux manuel où j'ai appris à lue. Propre, pIeUX, ~on~tuel, sel'· viable, sludieux, .iamais en défaut, tel il.no~ls appar~lssaIt dans 1::\ « journée de Fritz »; et je nle garderaI bIen de raIller ce brave en'fant; la seule crainte que je me pernlett,l:ai d~e.xprimer, c ' ~.~t celle que ces heureux dons de caractere et cl 111telhg.ence ,ne .suffI­sent pas il l'armer pour la vie telle qu'elle est aU.lolll'd InlI. Les exenîples ahondent de forts en thème qui n'on su être autre chose que des subalternes; et il ne manque pas de directeurs d'entre~ prises, d'écri, ains, d'artistes de talent, de self nwcle nwn, q:UI furent taxés de nlédiocres sur les bancs de l'école. Est-ce ù dne que la vie contredise nécessairement le verdict de l'~cole? Loin de nous une telle pensée 1 Nous avons, certes, besOln de bons élèves au sens traditionnel du mot, mettant à l'acquisition du savoir désirable, toute leur bonne volonté et toutes les facultés dont la nature les a pourvus. Mais il faut pourtant se rendre COl1lpte qu'il est des zones d i!lrh~ence qui échapp~nt à.l'acti0t; de l'école; qu'il y a, dans l 'avemr d un enfant, des sItuatIOns qu" elle ne peut prévoir. L école telle qu'elle est, telle qu'elle peut etre, ne suffit pas cl elle seule, ~l tout prévoir et à tout préparer. Son action s'exerce trop exclusivement dans le d~maine cér~bral; ell~ est le plus souvent impuissante à susciter le saint enthousIasme qUI ,pourrait sauver les jeunes générations du matérialisme écrasant ou du dilettantislne blasé.

Pour parer à ce double danger, le mouvement éclaireuT a fait quelque chose. Il n'a pas fait tout ce qu 'il y aurait à faire, mais il a fait ce qu'il a pu, en ' opposant, au découragement qui

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menaçait la jeunesse au lendemain de la guerre, l'antidote le plus sûr. Le bon éclaireur « sourit et souffle » , disait Baden-Powell. Il est le frère de tous les autres éclaireurs du monde, et cela ne l'empêche pas d'aüner son pays et de le servir de tout son cœur. Il sait obéir, et s'il ne le sait pas encore, il faut qu'il l'apprenne; devenu chef, il saura à son tOUl< se faire obéir, non pas à la ma­nière d'un caporal d 'armée, mais par le simple prestige qui s'at­tache au mérite. Ainsi donc, dans l'ordre matériel, l'effort viril pour l'endurcissement physique, le souci d'aiguiser ses faucltés d'observation, de connaître bien son pays, d'honorer le travail, et de se préparer à être un homme actif qui prend joyeusement sa part des corvées auxquelles nul n'échappe sans lâcheté; dans l'ordre moral, un sain altruisme et un ensemble de traits de ca­ractère condensés dans une loi qui tient lieu de consigne à cette chevalerie du jeune âge: voilà les deux aspects du scoutisme dont il faut être pénétré pour devenir un bon éclail'elll', et qu'il faut discerner si l'on veut porter , sur l'institution tout entière, un juge­ment impartial.

Revenons maintenant à la question posée au début de cet article; tout d'abord, le bon élève au sens traditionnel du mot peut-il être bon éclaireur? Nous affirmons que oui; nous l'affir­mons pour l'avoir vu bien souvent. Il faudra quelque effort de sa part pour conscilier la préparation régulière et soignée de ses devoirs d'école et la participation aux exercices d'éclaireurs; mais s'il réussit (et il doit y réussir!) ce sera une preuve de volonté dont il recueillera les fruits le tout premier. Le telnps de nos éco­liers ne doit pas être mesuré à ce point que, à moins d'impérieux devoirs de famille , ils ne puissent trouver trois ou quatre ' heures par ~emaine pour explorer leur contrée natale, tout en exerçant leurs sens, leur intelligence et leur sentiment social. La prépara­tion des devoirs scolaires et la participation aux exercices de pa­trouille ne s'excluent que pour les enfants - vraiment à plaindre - que l'amour-propre des parents oblige à des études dépassant leurs moyens intellectuels.

La question inverse - le bon éclaireur est-il nécessairement' un bon élève? - appelle quelques réserves assez subtiles. Bien des garçons ont été attirés vers le scoutisme parce qu'il satisfait leuts besoins d'aventures, de cam~raderie et de plein-air. Ce sont des garçons pleins de vie, quelque peu « bougillons » , pas tou­jours très soigneux, peu intellectuels peut-être, ayant besoin d'ac­tion et de réalités plus que de spéculations de l'esprit ou de sa­tisfactions esthétiques. Ils pourront faire carrière utile dans les métiers, l'agriculture; le commerce pratique, les professions tech­niques. Les nations coloniales ont besoin de tels éléments; sans avoir des colonies, la Suisse fournit sa large part des vocations qu'inspire l'esprit d'aventure: planteurs, commerçants, coloniaux, ingénieurs , officiers , aviateurs, etc. Or, il arrive que, sur les bancs

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de l'école, et parfois Inême au sein de la famille, des gal'çons mon­trant de telles dispositions ne trouvent pas toute la compréhen­sion désirable; leur mobilité est parfois considérée comme de l'in­discipline, et la difficulté de fixer leur attention sur les sujets qui ne les intéressent pas, COlnme un manque d 'aptitude ou de bonne volonté. De là à reporter 'la cause de ces lacunes sur leur qualité d'éclaireur, il n'y a qu'un pas tôt franchi. Un tel raisonnement est profondément injuste: ces garçons seraient certainment des élèves moins bons encore ,sans l'influence de la troupe et de la discipline conforme à leur caractère qu'elle leur impose. Les ran­données, les jeux, les camps, ont servi, selon l'expression de Freud, à sublimer l'instinct d'aventure, l'instinct combattif qui se Inanif~stait chez eux; le scoutisme a canalisé vers un bon but, grâce à la lor et à l'influence du chef, des tendances que l'école « assise » ne pouvait pas utiliser, et qu'elle jugeait même nuisi­bles. De nombreux parents punissent leur fils, collégien de son mauvais carnet d'école par la privation de la sortie de patrouille; ce moyen « d'encourager » à l'étude est le plus souvent déplo­rable.

Pour que le scoutisme exerce son influence heureuse et ne nuise pas à l'école, une condition est cependant indispensable: c'est que les chefs (de patrouille, de groupes ou de troupe) soient conscients de leur responsabilité et possèdent, pour diriger les camarades à peine plus jeunes qu'eux, des dons innés que rien ne retnplace.

C'est sur ce dernier point que les relations entre l'école et éclaü"eurs posent d 'intéressants problèmes sur lesquels nous aurons sans doute l'occasion de revenir .

COURS ELEMENTAIRE

Lseçon de choses Le chat

Un tableau représentant des chats ou avoir un chat. Inviter aup~ravant1es élèves à observer leur chat et faife rendre compte de leurs observations. '

. Histoir.e. - Raminagrobis est à la chasse, dans le verger à proximité d'une grange. Il marche sans bruit, il écoute, il , flaire, il guette, il poursuit la souris, il bondit sur le r'at, il grimpe à l'arbre pour sùrp'rendte l'oiseau. Raminagrobis n'aime pas qu'on le"dérange dans sa chasse. Il s'est arrêté net au milieu de l'allée, parce que' le -chien Tom passait près de là, par hasard. Il est tout prêt à 'la ,bâtaiHe-:et ~Tom ,fera bien' de disparaître au plus ' .vi·te.'

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• T. Introduire. - Définir: Faire 'trouver que le chat est ,un petIt quadrupède domestique qui fait la chasse aux souris.

II. Description. - a) Le corps du chat. - Le chat est de petite taille, beaucoup plus petit que le chien et beaucoup plus grand que la souris. II a quatre pattes et une queue très longue. - La couleur de ses poils varie beaucoup. lis sont longs et soyeux. - ' L'extrémité du nez, le dessous de ses pattes sont nus. - Sa propreté est extrême. - Son cri est un miaulement. (Faire 'cons­t~ter tout ceci et faire trouve!' les réponses at;l moyen de ques ­hons.)

b) Tête. - La tête du chat est-elle allongée comme celle du chien? - Elle est arrondie? ' , Que remàrque-t-on de chaque côté de la tête? ~ Deux oreilles petites et dressées. "

Que voyez-vous dans lés oreilles? - Des poils fins. Puisqu'elles portent des poils, on dit qu'elles sont poilues,

velu,es. A quoi peuvent bien lui servir ses oreilles? - A écouter, à en­

tendre le menu bruit des souris qu'il guette. Qu'avez-vous remarqué en regardant les yeux du chat? -

Qu'ils sont verdâtres. Comment est la pupille? - Elle est fendue verticalement,

noire, longue et étroite. Comment devient la, pupille lorsqu'il fait sombre'? , '-:"- Elle

s'élargit beaucoup et devient phosphorescente. Les yeux devien­nent brillants dans l'obscurité. Le chat a des yeux perçants, une vue excellente. C'est heureux pour lui, car les souris ne se pro­mènent pas en plein soleil, n'est-ce pas? Au contraire, elles travail­lent la nuit et dans les endroits les plus sombres. Malgré cela, elles doiveQt compter avec le chat qui, lui, les voit bien, grâce à ses bons yeux. ,~

c) Passons à sa bouche. - Qu'y voit-on? - Deux mâchoires mises en mouvement par des muscles courts mais très solides. Quand elles se renfennent, c'est avec une très grande force: leurs 42 dents s'enfoncent comme de,s aiguilles dans la chair.

. ltem~rquez les trois sortes de dents: Les canines sont lon­güe's et pointues, les incisives petites et "les molaires peu nom­~re.u~es, sont coupantes. Expliquer à quoi servent les 'canines, les InCISIves et les molaires.

N'y a-t-il' par encore autre chose dans la bouche? ~ La lan­gue mincè et râpeuse.

, A quoi lui sert la langue? - A lécher et à boire.

, Qu'y a-~-il p~ès de la bouche? - De longues moustaches for ­mees de pOlIs , raIdes, Ce sont pour lui les ,organes du , toucher. Essayez , de)e~ , lui tQuGher et vous' direz ce qu'il , arrivera? ,. : ,,' :

~ 12,3 -

Comparez son nez à celui du chien? ---- A-t-il le même.flair? ~ Pourquoi pas?

' d) Tl'one. - De quoi est recouvert son corps? - De poils fins et soyeux.

, Comment est son corps? - Souple'. - (Le faire constater lorsqu'il passe sous une porte.)

Comment se couche le chat? - En rond. Que fait-il quelquefois, surtout lorsqu'il est en colère? - Le

gros dos. '

e) Pattes. - Que distingue-t-on à l'endroit où les p'attes se détachent du corps? - Une bosse dirigée en arrière. Cette bosse fonne, en avant, le coude et, en arrière, le genou du chat.

Où se trouvent donc les bras et la cuisse? - Ils sont cachés sous la fourrure, on les sent avec la main. - On distingue, plus bas, une autre bosse, qui correspond au poignet en avant, au talon en arrière. - Quelle est la partie qui touche le sol? - Les doigts. - Que porte le chat à l'extrémité de ses doigts? - Des griffes qui sont dures comme de l'acier et. pointues comme des aiguilles.

Les voit-on toujours? - Ordinairenlent, elles sont relevées et cachées dans la foun~ure: elles ne risquent pas de s'émousser sur le sol. - A quoi lui serviront ses griffes? - A grimper aux arbres, à griffer et à retenir les souris.

I"e chat ne marche pas comme le chien pour chasser sa proie. Le chien Inarche sur ses pattes et ses griffes et attrape la proie à la course. C'est donc un coureur. Le chat, lui, pour chas­ser, ne nlarche pas sur ses griffes, il les cache afin d 'éviter tout bruit, car les souris ne font pas de longues courses comme les lièvres et les lapins, elles se cachen~ tout de suite dans leur trou. Le chat ne court pas, il ne fait pas de bruit, mais il surveille, guette, puis saute ou bondit prestement sur sa proie, Le chat est donc un sauteur plutât qU''ll:n coureur.

, f) Nourritul'e. - Vous pouvez me dire de quoi se ' nourrit le chat? - Il fait la chasse aux souris et aux rats et quelquefois aux oiseaux. - Que fait-il lorsqu'il aperçoit sa proie? - II s'aplatit sur le sol, s'avance sans bruit, la guette jusqu'au moment où il bondit sur elle. II ne fait pas bon alors s'approcher de lui, car il gronde et griffe.

Que mange encore le chat en déhors des produits· de sa chasse? II aime la viande, la graisse, le pain, le fromage et quel­ques légunles; il boit du lait. Les petits chats sont nourris avec le lait de leur mère.

g) Habitation. - Le chat n'a pas, comme le ~hien, une hapi,­tation ~péciale. Il reste ,à la maison qu'il connaît bien, mais ne s'attache pas aux personnes. Faire trouver ~ù le , chat se ti~nt de

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~ 124 .-:

préférence, en été, en hiver 'et le pourquoi. . Faire trouver' ce' qu'il fail lorsqu'il est couché et montrer que la chatte soigne, nourrif, dresse ses petits à la chasse et les défend contre ceux qui les attaquent. '

h) Caractère du chat. - Le chat est flatteur , sournois, hypo­crite. II donne volontiers un coup de griffe, c'est sa manière, bien souvent, de remercier.

Le chat est l'alni de la lnais'on, tandis que le chien est 'l'ami fidèle de l'homme.

i) Devoirs. - Application. - (Voir leç~ns de cho,ses : « Le Livre ' » , No 11 de l'Ecole Pl'imaire 1924.)

Devoir d'élève

Comment l'instituteur peut-il, dans sa sphère, contri­buer à la lutte antialcoolique?

L'alcoolisme est un fléau qui, dans notre patrie, et plus par­ticulièrement dans notre cher Valais, prend des proportions de plus en plus effrayantes. Nos sanatoria, nos maisons d'aliénés, nos prisons se remplissent de malheureuses victimes de l'alcoo­lisme, la misère visite les familles, la démoralisation envahit nos populations.

Une réaction s'impose donc si l'on veut éviter une catastro­phe, si l'on veut préserver le pays d'une ruine complète. Tons les hommes de cœur se feront un devoir de s'opposer au flux dé­vastateur , chacun suivant ses forces. Et, dans cette lutte, celui qui par sa situation est le mieux placé pour s'opposer au redou­table ennemi, c'est l'instituteur.

L'instihlteur façonne l'enfant et peut, par conséquent, com­battre le mal à sa racine. Par son influence extra-scolaire, il peut jeter la semence du bien autour de lui. Qu'il se montre donc digne de la place qui lui revient dans l'armée antialcoolique; qu'il mette ses énergies au service de la cause que sa religion, s-a patrie, son devoir d'honnête homme lui commandent de défendre.

Par l'exemple, la parole, l'action, il fera rayonner dans le ,mi­lieu où il vit, les idées de tempérance et de nlodération; il tâ­chera de remplacer les préjugés et les habitudes mauvaises par des idées vraies et des pratiques morales.

Mais pour arriver à ce résultat, il doit se persuader d'une chose: un homme ne sera tempérant que s'il le veut. C'est la vo-lonté de l'enfant qu'il importe avant tout de fonnel< '

Par la stricte observance du règlement, par l'accomplisse­Inent ponctuel des devoirs et par une foule d'exercices appropriés, le maître tâchera de donner au caractère de l'enfant cette force nécessaire poux dominer les appétits et les remettre au devoir.

I~

Homme de caractère, le ' maître donnera hÏi-ni.ême l'exemple de la modération, de la tempérance sous toutes ses formes. La force de l'exemple n'est pas à démontrer" et elle est d 'autant plus forte chez l'instituteur que celui-ci jouit d'un prestige tout parti­culier. Que le maître se garde donc de toute licence, qu'il conserve partout la dignité que lui confèrent ses fonctions d'éducateur.

Cependant, il ne suffit pas de former la volonté de l'enfant et de lui indiquer par le bon exemple le chemin à suivre. Il faut encore lui montrer les avantages réels de la tempérance et le mettre à l'abri des préjugés par un enseignement antialcoolique. Et pour cela, il n'est pas besoin de longs entretiens et de gran­des démon'strations scientifiques. Un Inot dit en passant, une ré­flexion faite à propos, un appel en faveur de la dignité per­sonnelle chaque fois qu'il se produit un fait capable de provoquer chez l'enfant du dégoût pour ce vice si avilissant, des rédactions, des problèmes qui font ressortir les avantages de la tempérance, tout peut contribuer à diriger l'enfant dans la voie -du bien. Et cet enseignement sera d'autant plus fructueux qu'étant donné comlne par miettes, il sera assimilé et que l'enfant se sera mieux rendu compte de la vérité des paroles du Iuaître. Cette nouvelle géné­ration sera prête à renoncer à un passé d'erreurs et de préjugés pour prendre des habitudes nouvelles, des habitudes d'épargne et de sobriété.

Mais quelque bien fornlée que soit la volonté, il ne faut pas croire qu'elle sera assez forte pour résister toujours. L'expérience prouve le contraire. A quinze ans, l'enfant verra les difficultés surgir de toutes parts , entravant l'exécution de ses résolutions. Il devra compter avec les Iuauvais camarades, les habitudes sociales, les sollicitations de temt genre. Là encore, l'instituteur devra in­tervenir, soutenir , éclairer, agir en faveur de la victoire. Il sera le collaborateur, sinon le fondateur d'œuvres sociales propres à aider les jeunes gens à se soustraire au' joug du vice qui les guette partout. Il sera un apôtre, éclairant, combattant partout où il se trouve, un pionnier qui ne craint pas de s'avancer tout seul au Inilieu de la troupe ennemie. Et dans cette lutte aride, il ne doit pas se décourager, il ne faut pas que les déceptions fassent tomber les armes de ses mains. Ce serait compromettre, sinon anéantir toute l'œu~Tre qu'il a accOluplie.

Que le maître persévère donc dans sa voie et qu'il demande à la consolation du devoir accompli la ré~onlpense et le soutien.

C. S.

Examens d'Emancipation 1926 Rectification au tableau paru le 28 février: Commune de

Sieue) il faut lire note 4 et 4 1/2 32 % au lieu de 17.50; non émancipés, 17.50 % au lieu de 32.

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~ Nos Pages ~ \~ ~@ COURRIER DES INSTITUTRICES ~~

SOMMAIRE: Premier sourire du printemps. - A ma fantaisie. La Japonaise. _ Les Livrets scolaires. - Rectification. - La leçon à la. poupée. - Pensée.

~ Le premier sourire du printemps ~

Tandis qu'à leurs œuvres perverses Les hOlnmes courent haletants, Mars qui rit malgré les averses, Prépare en secret le printemps.

POUl' les petites pâquerettes, Sournoisement, lorsque tout dort, Il repasse des collerettes . Et ciselle des boutons d'or.

Dans le verger et dans la vigne Il s'en va, furtif perruquier, Avec une houppe de cygne, Poudrer à frimas l'amandier .

La nature au lit se repose; Lui, descend au jardin désert Et lace les boutons de l'ose Dans leur corset de velours vert.

Tout en composant des solfèges Qu'aux merles il siffle à mi-voix, Il sème (lUX prés des perce-neiges Et des violettes aux bois.

Sur le cresson de la fontaine Où le cerf boit, l'oreille au guet, De sa main cachée, il égrène Les grelots d'argent du muguet.

Sous l'herbe pour que tu la cueilles, Il met la fraise au teint vermeil, Et te tresse un chapeau de feuilles Pour te garantir du soleil.

- 1 27 --'

Puis, lorsque sa besogne est faite Et que son . règne va finir, Au seuil d'avril tournant la tête, Il dit : « Printemps tu peux venir! »

Théophile GAUTHIER,

A ma fantaisie

Nicole vient d'avoir vingt et un ans; on lui demandait, à cette occasion, de développer son programme de vie et de révéler ses juvéniles aspirations; la réponse a été rapide: Nicole n'a pas eu à se consulter, à peser et à comparer des arguments; tout de s'uite, sans hésitation, elle a dit:

- Je veux désormais être libre.

A ceux qui s'alarmaient de cet impérieux désir de se sous­.traire à toute espèce de joug, elle ajoutait, rassurante:

_ Si .le réclame mon indépendance, ce n 'est pas polir faire le mal, c'est simplement pour vivre à ma guise. Je ne suis pas la seule, croyez-le bien, la plupart de mes contemporaines ont le même idéal que moi,

Alors, ma chère petite, si je vous entends bien, votre mnbi ­tion se borne à vous refuser à une existence dominée par un prin­cipe et régie par une luéthode; voùs ne voulez pas entreprendre une œuvre de longue haleine, qui réclame un effort persévérant et ordonné; d'ailleurs, vous vous dérobez à tout effort, puisque vous êtes résolue à ne suivre que votre fantaisie ... Vous irez du côté où dansera un rayon de soleil le jour où votre humeur sera ensoleillée, vous irez du côté de l'ombre, le jour où vous vous sentirez taciturne; vous ferez bon accueil à votre amie si sa- robe ou ~on sourire vous pla,isent à son arrivée, vous la fuirez si quel­que chose en elle vous cause une impression désagréable.

V ous agirez de la sorte, sans raison valable, cédant sinlple­ment à votre bon plaisir de l'heure.

Qu'en résultera-t-il? Pour remplir votre tâche, pour diriger vos relations avec les humains, pour cultiver votre âlne, vous n'aurez pas de plan et pas d 'idée directrice; votre boussole sera cette poussée confuse, primesautière et essentiellement versatile: le c~price!

On ne trouverait pas en dehors de Phulnanité un être vivant qui agisse sous l'empire d'une force aussi incohérente; la chauve­souris dont' le vol semble déconcertant, n'a cette allure en zigzags que pour suivre les insectes qui se sauvent éperdus, en tous sens, devant elle.

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A cette remarque,· Nicole luoderne, qui avez certaineluent fait des études' scientifiques, -vous -répondrez catégoriquement: « Les anÎluaux sont dirigés 'pat leur instinct, ils obéissent à des lois fixes; moi , je suis un être int~lligent et je veux vivre à mon gré. »

Sans doute (et je n 'en disconviens pas) , vous êtes dans la création un être süpérieur; mais que faites-vous de tant de belles facultés qui vous assureront cette supériorité? Sous prétexte d'agir à votre guise, vous vous mettez à la remorque, non pas d'une conviction, non pas d'un sentiment, non pas mê.lJle d'un goût précïs ' et spécial, mais à la rem.orqüe de la moins éclairée, de la moÏns raisonnée, de la moins élevée des impulsions: celle ' de la fantaisie subite.

Que faites-vous de votre conscience, de votre jugement? que faites-vous de vos profondes tendresses? le mouvement qui vous emporte n'en tient guère compte.

Je ne prétends pas que vous ne serez jamais sage, bonne, patiente, dévouée, nlodeste , en vous conduisant ainsi; mais vous le serez en mu'ateur et prête à cesser de rêtre dès que « cela ne vous dira plus » , puisque votre seul principe, c'est de faire ce qui . vous plaît et d 'écarter tout ce qui vous déplaît.

L 'indépendance vers laquelle tendaient probablement déjà vos· rév,oltes de petite fille indisciplinée, vous la regardez comme un bien ,supr.ênle, Inais , en réalité , elle n'est que misère et infé­riorité. Cette prétendue émancipation est une abdication; vous ne vouliez pas d'une loi morale, élevée, précise, féconde, . pour vous guider et vous voilà sOlunise à des attirances vagues et irréflé­chies! . Y a -t-il maîtres plus piteux et plus méprisables?

Votre vie sera creuse, stérile; vous arriverez à la vieillesse les mains vides, le 'cœur desséché; dans vos jours lassés, ,vouS ~'au'­rez pas la joie de jeter un regard sur une beUe œuvre de longue haleine accomplie par vos- soins; vous ne verrez dans le passé que de menues satisfactions qui vous paraîtront bien puériles.

La 'véritable liberté, 'la seule qui soit digne de vos forces vives et de vos ardentes aspirations, ma jeune amie, c'est celle 'que vous aurez en acceptant librement et de tout votre cœur la loi du .devoir ; si vous la subissez, vous êtes en effet .esclave, vous travaillerez en Inercenaire, sans enthousiasn'\e, sans convic­tion; Inais si vous choisissez cette voie, si vous y marchez ·de plein gré, vous y ferez de splendides progrès en même temps que vous garderez réellement votre indépendance, puisque vous ferez ce qüe vous avez décidé de faire , secouant le joug frivole et humi­liant de vos caprices et de vos passions.

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La Japonaise Parce que des tramways relient les divers quartiers de Tokio,

de Yokohama et autres villes principales, que des pendules à l'européenne marquent l'heure, dans les gentilles maisons aux portes à coulisse et aux vitres de papier, et parce que le Japonais, qui excelle à s'assimiler les sciences et les méthodes d'Occident, s'enlaidit volontiers d 'un chapeau de feutre, on imagine notre petite sœur exotique, la Japonaise, en bonne voie vers l'éman­cipation.

Les jeunes filles, ·élevées dans les écoles occidentales, ne peu­vent être identiques à leurs mères et à leurs aïeules; mais, pour quelques douzaines d'étudiantes accessibles aux idées modernes des milliers de Japonaises, de tout âge, sont encore pérsuadées de l'infériorité de la femme et prêtes à subir le joug ancestral.

Tout enfant, la jeune 'Japonaise a fréquenté l'école avec ses compagnes; blotties sur leurs petits bancs, elles écoutaient le maître lire d'un ton monotone un morceau du « Tokuhon » (livre de lecture), que leurs voix puériles reprenaient en chœur, tandis qu'il marquait la mesure d 'un mouvement de la main. Plus tard, la jeune fille étend ses connaissances, parfait son éducation; cer­taines étudient les langues européennes, pricipalement l'anglais; toutes apprennent les arts charmants de la femme: « l'ikebana » (art de disposer des fleurs en bouquets), la « cérémonie du thé » ... Toute chose, au Japon devient un art... même peler et présenter un fruit, de ces fines mains de poupées, un peu inconsistantes au toucher, mais si souples, si dociles, exquises à voir agir.

Le choix des vêtenlents est Inoins une coquetterie qu'un sym­bole : l'âge, le rang social, les saisons, chaque circonstance de -la vie, chaque phase de la journée s'expriment par la couleur ou les dessins des divers kimonos qu'endosse tour à tour la gentille pou­pée japonaise.

Comme les jeunes filles du nlonde entier, celles-ci sont, entre elles, joyeuses, insouciantes .. . mais point de confidences: leurs rires, leurs jeux puérils, leur babillage superficiel ne laissent rien transparaître de leur pensée, de leur cœur... Pour traduire une furtive émotion" une velléité d 'enthousiasme, elles empruntent la formule apprise de quelque « uta » (court poème japonais). Ou bien elles égrènent les notes argentines de leur instrument favori: le « samisen »... Le soir, sous la véranda, quand la lune brille au ciel, elles cherchent, naïves « pêcheuses de lune » , à la capter dans une cuvette d'eau.

Mais . cette vie inoff ensi ve et gracieuse de la jeune Japonaise, dont le rang social correspond à notre Inoyenne bourgeoisie, ne saurait longtemps se prolonger. La voici nubile; il faut la marier. Or, elle n'a pas voix au chapitre; . au Japon, la « lçi de la recon­naissance » oblige un enfant à l'obéissance aveugle... ou au suicide 1 ...

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Le jour de l'entrevue arrivé, 1::t jeune fille, aidée de sa mère, ' revêt ses vêtelnents symboliques, qui, par leur somptueuse fan­taisie, égalent les robes de « Peau d~Ane » . Un voile entoure ses 'épaules. Son visage fardé, grimé, est blanchi ~t la craie, les lèvres rougies, rapetissées. L'entremetteuse - g,énéraleluent une parente plus ou moins éloignée - la regarde ct un air satisfait: elle ne diffère pas' de mille autres poupées japonaises. Etre, conform,e à la normale tel est ici 1 idéal. La vieille femme la Inène alors à l'endroit cl~oisi, le l)lus souvent une maison de thé 'avec jardin. Bambous et ' iris se réflètent dans un i)etit vivier, où la jeune J aponaiS'e feint de contempler les poissons rouges, tandis que deux yeux d 'émail détaillent à loisir sa factice et mignonne personne ... Puis, son exam,en terminé, le prétendant inconnu s'incline silen­cieuseluent, par trois fois, avant de disparaître... .

Si, bibelot vivant, elle a eu l'heur - ou le malheur - de lUl plaire, elle doit accepter sans n~urmure ce fiancé dont elle ignore tout; ses parents le veulent, et aussi les ancêtres défunts dont les tablettes fixé'es près de l'autel de Boddah sYlnbolisent et perpé­tuent l'occulte présence ' dans la maison paternelle.

Une des plus heureuses chances, en ce pays, est de ne ,point avoir de belle-mère, celle-ci exerçant presque toujours sur sa très jeune bru une tyrannie qui rappelle les pires, luarâtres des contes.

En nlettant les choses au luieux, notre petite « pêcheuse de lune » sera, C01ume toutes celles qui l'ont précédée; une épouse soumise, respectueuse et, selon nos idées occidentales, un peu servile. Elle aura de gentils enfants aux cheveux noirs et drus , rasés autour de la partie supérieure du crâne, et qui, en leurs kimonos de couleurs vives, senlbleront baUre des ailes, tandis qu'adroitement, au lTIoyen de baguettes, elle leur donnera la bec­quée ... Et, tout le long de la vie, douce ou cruelle, elle aura aux lèvres le Inême sourire inlmuable, énigmatique: « Une jeune fille ou une femme ne doit .iamais faire parler d'elle » , affirnle un précepte .iaponais.

Terminons sur un détail curieux: l'histoire du Japon étant divisée en cycles de soixante années, lorsqu'une femn~e devient sexagénaire, elle doit... recomlnencer' son existence. O!'\ lui l:ase la tête, on la coiffe d'un bonnet de bébé et on la revêt d 'un kllnono aux couleurs de la première année; elle ne le porte qu'un jour, n~ais elle peut garder le bonnet. Voilà, en vérité, le record du ra-.ieunisselnent.

RECTIFICATION Dans la dernière livraÙ~on de « Nos Pages », une confusion s 'est

produite dans la mis,e e11 page des ~lichés relJrésentant les patrons du pantalon.

,En tête du dessin, page 95, il faut lire: « pantalon fermé » et, :Hl verso: « pantalon ouvert ».

,L 'CX1il exercé le nos lectrices a sans doute déjà rectifié cette errem'.

- 1S1 -

Les livrets scolaires

Est-il un messager renseignant mieux les parents sur la conduite et le travail des enfants que le livret scolaire? Il est d'une importance capitale pour ceux, surtout, qui n 'ayant pas l'oc­casion de parler aux maUres , trouvent dans une colonne l'appré­ciation de 1 effort inteliectuel et nlO1'al de l'élève. , Et pourtant, ces chiffres ne donn,ent qu'une , explication très vague qui est rarement bien comprise des parents. Ainsi un élève ayant manqué , de politesse se voit attribuer la note 3. Le 111aître lui fait remar­quer sa faute et l'admoneste sévèrement: mais, de crainte d'être grondé, l'enfant n'en dira rien a la méUson. Donc, l'adjonction d 'une rubrique « observations » serait tout indiqué~; elle facili­terait aux parents et aux maîtres leur noble tâche d'éducateurs.

Rachel.

B! La leçon à la poupée •

Je vous trouve ma poupée Bien souvent inoccupée. , Il faut vous prendre le bl'às ) POllr vous faire faire un pas!

Vous n)aimez que la toilette: C'est laid cfêtre .rtinsi coquette! Prenez un peu ce balai Et balayez) s)il vous plaît.

Lavez-nlOi cette vaisselle Vivelnent) I\lIadenlOiselle; Ecumez le pot cm feu; Relnuez-vous un peu!

Mon maJ'Ï) votre bon pèl'e) Travaille assez) lui) fespèl·e. En l'entrant) il veut avoir Sa soupe challde l~ soir.

Regardez notre voisine Comme elle tient sa cuisine) Sa chambl'e) son linge et tOllt . Vous devriez rougil' beaucollp.

Une fille adroite et sage Aide sa Inèl'e à votre âge! Et ie vous pattl'ais) .le crois) Si vous n)étiez pas de bois.

, 1

J. AICARD.

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Pensées Ne parle pas de ton bonheur; Ainsi qu'un doux oiseau flâneur, Le bonheur vient, gazouille e~ passe. Ne parle pas de ton bonheur; N'en parle pas, même à voix basse.

Ne parle pas de ta douleur, Ainsi que l'oiseau roucoule ur, Parfois un murmure l'effraie. Ne parle pas de ta douleur, Qu'elle reste profonde et vraie!

Ch. FUSTER.

<7 =v ~'==: :=E=N=C=L=A=N=A=N=T==: :=d)

Les mois ~

Janvier prend la neige pour châle; Février fait glisser nos pas; Mars de ses doigts de soleil pâle, J eUe des grêlons aux lilas;

Avril s'accroche aux âmes vertes; Mai travaille aux chapeaux fleuris; Juin fait · pencher la rose ouverte Près du beau foin qui craque et rit;

Juillet met les œufs dans leur coque; Août sur la moisson s'endort; Septembre aux grands soirs équivoques Glisse partout ses feuilles d'or;

Octobre a toutes les colères; Novembre a toutes les chansons Des buissons débordant d'eau claire; Et Décembre a tous les frissons!

ROSTAND.

.a~ Les glissades ~a>

« En allant à l'école, enfant, sois bien prudent! « .J'ai vraiment peur pour de toi: si glissante est la terre?

Marche sans te hâter, ne va pas en dansant,

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« Robert, je t'en supplie ... » « Oh ! ne crains rien, ma mère. » Puis Robert s'éloigna. Mais désobéissant, A peine sur la route, oubliant sa promesse Il glissa sans remords, en criant, en chantant, Raillant ses compagnons et sûr de son adresse. Malheureux étourdi! Voilà qu'en trébuchant, Avec force il tombe sur la terre durcie! ... Sa pauvre nlère, hélas! le reçut en pleurant, Et Robert fut boîteux le reste de sa vie.

L. STAPPAERTS ..

....... Page détachée ~

Ayez rintelligence de vos souffrance~, comme la joyeuse spontanéité de vos sacrifices.

Les âmes vulgaires ne voient que le côté banal et nlauvais des douleurs, et c'est ainsi qu'elles leur donnent une fausse in­terprétation.

Elles devraient s'en faire une richesse et un honneur devant Jésus-Christ, et voilà qu'elles s'en font, au contraire, un breuvage empoisonné.

Les larmes, qui sont quelque chose de noble et de précieux, devraient n'être versées que pour les grandes causes.

Jésus pleura sur Jérusalem. Il ne pleura pas sur lui-mêlne.

J'honore les larmes COlnme le sang; mais .le ne trouve belles et touchantes que les larmes qui jaillissent d'un sentiment noble et profond. Je ne donne aucun prix aux pleurs de l'épiderme.

Et pourtant, je ne suis point de ceux qui se rient de la sen­sibilité. Ce sont des mauvais cœurs, ceux-là.

Oh ! non, la sensibilité est une vibration précieuse que Dieu a donnée aux âmes délicates et charitables. Mais la vraie sensi­bilité vient de la partie haute de notre âme, tandis que la fausse sensibilité ne vient que de la partie inférieure de notre corps. Celle-là est généreuse, éclairée, tranquille. Celle-ci est égoïste, aveugle, désordonnée .

D. M. H.

1.

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- 134-

Voici une · page sortie de la pillme de Pierre rEn11ite, i'epl'o ~ duite dé,;à il y a quelque temps ]Jal' le Bulletin pédagogique de Fribourg et qui montre avec quelle faiblesse . bien des parents élèvent leurs enfants.

Toto, ou l'art d'élever le's enfants

Il est midi. Papa monte l'escalier, Inachinaleluent, en C0111p­[:ant les il1arches: seize, dix-sept... clix-hu'it ... Tout à coup, il s'arrête, entendant distinctement résonner des hurlements connus ,

, mal étouffés par- les tentures. . - Allons, bon, Toto encore roto' Qu'est-ce qu'il a, ce lnou­

tard-là, pour faire déjà une vie pareille? 'T'ota, c'est l'héritier , l'unique, naturellement: songez donc ...

on est si étroitement logé' .. . Et comIne c'est l'unique, par une conséquence 10giqiIe, c'est le choyé le gâté dans tous les sens du mot, le petit tyran auquel tout Je monde obéit en trenlblant.

Pensez donc: si on le perdait! ... Et tout peut le tuer; un coürant d'air, une arête, une simple contrariété. .

, Toto le sait }) jen, que tout pourrait le tuer; aussi, lui refuse-t­on quelq~H~ chose? Le g~illard se Inet à rougir comnle un ho­mard, fait une pose, et puis d 'un seul coup, prend sa note, et fameusement; un de ces hurlelnents sauvages, rageurs , dans les cordes hautes, qui font luonter les concierges et mettre les voi­sins aux fenêtres, en disant:

- C'est le petit du troisiènle, quel nlÔme!. .. Seigneur ... quel nlônle!

C est le cas aujourd'hui; aussi ce fut d'une Inain déjà énervée que le père tira le cordon de la sonnette ...

- Tire donc pas si fort! IVlerci , ton fils fait assez de bruit! Et pour confinner ces paroles, on entendait la voix du pro­

fesseur du second filonter dans la cage de l'escalier. - Non, · ce n est pas un fils, c'est un iguanodon. - Allons, nlon canard, c'est fini .. . Tante Claire est une lné-

chante, elle mangera sa tartine à l'envers! ... Et maman arrangeait les cheveux soyeux, relevait les boucles

blondes bouleversées en coup de vent, essuyait les larmes qui trem­blaient en perles brillantes au bord des longs cils et coulaient sur les joues enflammées.

- Et maintenant, tu vas manger ta soupe. Oh! la bonne sousoupe ! ... Tu sais, la soupe ça fait grandir! Allons, fais risette à 111aman!

Toto reste impassible. - Allons 1 mon chéri, tiens .... Oh! la belle cuillère ... Toto, énervé, tire ses preluiers jeux. Puis, vlan! la cuillère

toute pleine, au lui lieu du carreau du buffet.

/

- 135 -

- N'en veux pas , na. , - Ah çà! Toto , dit le père, 'faisant l'Îlnpossible pour se

contenir , tu sais , en voilà assez ', Tu vas manger' ta soupe ou alors tu auras affaire à luoi ! . '" .

Pour toute réponse, Toto prend l'assiette, et froidement, en regardant le père bien en face , l'envoie rejoindrè ln cuillère.

- N'en veux pas, na. , . . En un clin . d'œif, en nlOins de temps qll 'il n,e fa'ut PRur le.

due, Toto e~t pris , enlevé et installé dans un cabinet de débarras , entre une pile de \ ieilles houteilles , et la collecbon de \~rateq;oofs de grand'maman. ' .,

, i

- Au moins, dH le père, en fenl1ant la p,ort.e: on rnangera tranquille ... Puis , \ oyant la mère qui , haisse le~ yeux, tout at-tristée : '

, - Voyons , ai-je tort? Faut-il attendre qu'il , nous vienne cracher à la figure?

- Tiens, . tais-toi, tn me révoltes! Il ne s'agit pas de cr~­cher à la figure; il s'agit d'un enfant qui n 'aime pa's la SOllp~ et que tu veux forcer à manger. Toi , tu détestes la ' :tête de vequ; si je t'obligeais à en prendre tous les jours , qu'est-ce que tu dirais? Et tu \ as denlander à un enfant ce que tu ne ferais pas toi­même! Oh! les homnles !

Si tu as des ennuis au bnrean ~ ce n 'est pa,s une ndsol1 pour les passer sur ton fils.

Ai-je tort? - Tiens, écoute-le ... Et en effet, le moutard , calculant qu'il y avait : lIeux parles

pour étouffer sa voix, hurlait comme un putois. , - Oh! va le chercher, ce nloutard-là 111e ferait donner

congé !... . La nlaman revient avec son fils sur les hras :' Toto fll1n~~lt de

colère la face congestionnée et se tortillant con1.me {me poignée de puces.

- Assez! Assez! tu m'entends? J'en ai par-dessus la tête ... Donne-moi Je second plat; il est trois quarts, je n 'ai que le temps ...

- Veux-tu ce morceau-là, nlon gros loup blanc,' avec de la bonne sauce autour?

Non! Pour faire plaisir à petite Inère ? Non!

Et Toto tire son assiette de côté. N'en veux pas? Veux ça!

Page 14: L'Ecole primaire, 15 mars 1927

- 136-

Et Toto, du doigt montre un petit pot de colle anglaise, noire et O'luante, qui mirQite au bord du buffet. .

o _ Mais c'est de la cocole, mon lapin, tu sais , celle qu'on a recollé la potiche que Toto avait cassée hier .

- En veux! - Qu'est-ce qu'il chante? dit le père. - Ii veut de la colle. - De la ... ? (avec colère). Ah ça ! il est fou! . " - Allons! bon. Encore des gros mots: la Crlse etaIt cal-

mée faut aue ca Tecommence! EncoTe une fois l'appelle-toi que c'est un enfant:' fais au moins semblant de lui en donner .

- .. . De la colle? . - Mais, puisqu'il en veut.

- Eh bien! tiens , en voilà. . " , Et le père ahuri prend le pot , en verse une cUIlleree a cafe

dans une assiette: . , . _ Avale ça et colle-toi tous les boyaux avec, .le m en fIche;

si ça pouvait seuleillent te clouer le b~c ! - Sans cœur , va ! . , . Toto recon1mence à sangloter. Le père, la bouteIlI~ a l~ mal? ,

l'assiette de l'autre, re~a.rde en l'air poussant ~~s ~oupn'~ enerves. _ Voyons, qu 'est-ce qu'il veut encore, ct anImal-la? - Oh ! c't'animaI... Le père, se contenant . --.:... Alors , ça va Tecommencer ? Voyons,

Toto, mon petit Toto , qu'est-ce que tu veux? - Mange d'abord, toi! _ Que L,je mange? Quoi? - La cocolle. - Que je mange de... . . _ Oui dit la mère, il te demande de manger de la colle , .le

suis sûre ql~e ça ne doit pas être si mauvais que ça. - Merci! - Fais au moins semblant 1. .. - Ah ! vrai de vrai 1 ... Toto recommence: - Hi ! hi 1... hi 1... '11 _ Allons , tu es exaspérant; prends-en au moins une CUI e-

rée' tu la cracheras après ... , Le père vaincu abruti , promène la cui11ère à la surface de

la colle ; se la met dans la bouche, sans en avaler le contenu. La mère, triomphante, embrasse Toto longuement. . _ Es-tu. content, Illon mignon? tu vois comme papa Il est

gentil .! . , Toto se rejette en arrière avec fureur, la face congestIonnee,

et entre deux hurlements: - Nà ramassé toute la crème! ... Toute la mousse 1... que ne

voulais t ...

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