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No 5 15 Mars 1928 Df. lA SQ(!.jété d -- "-"L'ECOLE PRIM IRE paraît 14 fois pendant le cours scolaire Abonnement annuel: Fr. 4.50 Les se règlent par chèque postal Ile 56 Sion, ou à ce défaut contre remboursement. Tout ce qui concerne la publication doit être adressé directement à M. LOUIS DELALOYE, Secrétaire au Dé- partement de l'Instruction publique à Sion. Les annonces sont reçues exclusivement par PUBLICITAS, Société Anonyme Suisse de Publicité, Sion Rue de Lausanne 4 - Téléphone 2.36

L'Ecole primaire, 15 mars 1928

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Page 1: L'Ecole primaire, 15 mars 1928

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No 5 15 Mars 1928

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Abonnement annuel: Fr. 4.50

Les ~bonnements se règlent par chèque postal Ile 56 Sion, ou à ce défaut contre remboursement.

Tout ce qui concerne la publication doit être adressé directement à M. LOUIS DELALOYE, Secrétaire au Dé­

partement de l'Instruction publique à Sion.

Les annonces sont reçues exclusivement par PUBLICITAS, Société Anonyme Suisse de Publicité, Sion

Rue de Lausanne 4 - Téléphone 2.36

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_:=====================-Un appétit monstre.

L'appétit, comme vous le savez, est le meilleur baromètre de l'état de santé de vos enfants. Le manque d'appétit annonce généralement l'approche d'une ma­ladie.

Essayez le

"mMALT du Dr WANDER

L'attestation suivante d'une institutrice vous don­nera une idée de l'action du Jemalt:

« Enfant S. P., 9 ans. La cure de Jemalt dura du 17 janvier au 26 février. L'enfant a pris la préparation avec plaisir. La mère ne peut presque plus mettre assez sur la table. L'enfant, dit-elle, a un appétit monstre. »

Influence .~llr la mine: Celle-ci est devenue flo-rissante.

Influence sur la vivacité: Plus de fatigue ou d'apa­thie comme auparavant.

Infillence sur le travail: L'enfant est devenu excel­lent élève.

Le Jemalt stimule l'appétit et fortifie comme l'huile de foie de morue, mais sans l'odeur répugnante de celle-ci, qui empêche tant d'enfants de la prendre. Le Jemalt est une poudre granulée, au goût agréable et qu'on supporte très bien; .les enfants le considèrent même comme une friandise.

. Le Jemalt est en vente dans toutes les pharmacies et bonnes clrogueries au prix de fr. 3.50 la boîte.

Dr A. WANDER S. A., BERNE SANS LE GOUT DÉSAGRÉABLE

NI LA FORME HUILEUSE

DE L'HUILE DE FOIE DE MORUE

_i======================_

47me Année No 5 15 Mars

Organe de la Société valaisanne d'éducation

<1i\,ÏMAIRÉ. - Conférence régionale. - Retraite. - Chronique de l'Union . - La Conférence de Sierre. - La lutte antia lcoolique. -De quelques défauts dans la lecture à haute voix. - Langue fran­çaise : l'habitation (suite) . - Contribution à l'étude de la nar­ration . - Leçon de calcul. - NOS PAGES. - Opinions. - Quel­ques mots sur le bolchév i sme~ - La Question sociale: les régimes du Travail. - Bib1iographie.

Conférence régionale

Les instituteurs des dislricts de Conthey et Martigny sont inl'ormés que la Con féren ce annuelle pour 1028 aura lien ù Mar­tigny le 20 mars prochain. C?uverture cie la séan~e : 8 h: 46 ~l la gr[lnde saI1e de l'Hôtel de VIlle, a\ ec l'ordre du Jour Slllvant :

1. Affaü'es aclIninistratives; 2. COHllTlunications diverses; ;.{. Conf('rence ci e IVI. Sermoucl du D(~p[lrtement ft'déral des

F inances s ur ie monopole de l'alcool et Sllr les ravages de l'al -cool isme;

4. Propos ition s individu ell es. 12 heu l'es: Dîner. No Les: 1. Aucune ahsen ce ù la Con{'(·rence ne sera admise ,

san r cas de force majeure; 2. Les membres de la Chorale devront apporter leu r livr e t

<l e ch[l nt. (Signé) : Les 1 nspecte LZrs scolaires

des districts de M{/rfigny ct de Conlhcy .

Retraite La retraite des ins titute urs commen cera le dimanch e de

Pâques au soir et sera clôturée le jeudi m a lin . Les cmiditions se­ront Les mêmes que cell es d 'il y a deu x ans; on n e demandera qlle ;) fran cs à ch aq ll e participant. Prière de s'i nscrire [Ill pIns tôt; la liste sera close le dimanche des Rameaux. A. H.

Chronique de l'Union

Nos traitements et l'opinion En ces temps de course a u x sa laires, de campagne arclen te

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I~our I:augmentation des traitements , de polémiques enlre fon c­tlOnn31reS de catégories différentes s'estimant lésés les lins par par rapport aux autres, il serait peut-être hon de se pénétrer de quelques vérités capables de faire mieux concevoir les conditions auxquel1es est Ué le succès de telles revendications.

Ces vérités ne consistelÙ point en de hautes considérations philosophiques, n ayant aucune racine dans le réeL Il suffit, pour les découvrir, d 'ou\ rir le plus humhle des manuels de sociologie, cette science qui , chacun le sait, « traite de ce qui est » et tire ses réflexions de 1 expérience et de l 'ohservation de la vie sociale.

« Ouvriers et patrons, Usons-nous dans un de ces ouvraO'es , iorsqll 'ils fixent le salaire, sont dépendants des conditions b du m~lieu et de l 'opinion publique ... Pour chacun de nous, quels que s~)]ent son talent et son originalité, . son œu\ re ne sera pas appré­clée selon son mérite et ses conceptions personnelles , mais selon le vouloir et les conceptions de la fou le ... Du manœuvre à 1 in­tellectuel, la différence n 'est pas telle qu'on se plaît à l'imaginer. C:hacun remplit une fonction sociale rémunérée selon la v(~lon té sociale. » Qu 'es t-à-dire, sinon que, dans le domaine particulier cie l'enseignement puhlic, les maîtres doivent, s'ils veulent donn er à leurs r evendications quelque chance de succès, s'efforcer tout d 'abord de faire estimer leur fonction , leur travail et son utilité sociale? Faire pénétrer dans la masse cette idée que la tâche éducatrice est noble indispensable; amener la collecti\ ité à conce­\ oil' cette tâche comme ayant une valeur particulière, capitale pour l'avenir de la société: telles doivent être, à notre avis, quelques-unes des préoccupations des éducateurs.

Com.ment atteindre ce but? Par des articles de presse? Par cles éloges dithyrambiques de la profession ? Non pas ! La réus­site exige moins de tapage et plus de modestie. Certes, il est né­cessaire, aujourd'hui plus que jam.ais, de réhabiliter , dans l'esprit de la foule , le travail intellectuel et l 'école peut agir dans ce sens. Mais le véritable moyen d 'imprégner la conscience collective de cette valeur de la tâche éducatrice, c 'est non pas de proclamer cette \ aleur, mais de la faire sentir, de la reüdre tangible. Et comment, sinon en demandant à tous les maîtres d 'être la vivante personnification de cette valeur , par l'ardeur et la foi qu'ils doi­vent apporter à 1 accomplissement de leur tâche?

Peut-être serai-je mal cOlnpris ? Peut-être aussi m.'accusera-t­on de protester contre les revendications pécuniaires des groupe­ments corporatifs! Ces critiques porteraient , à faux , car, autant que d'autres, j'estime légitimes ces revendica tions. Mais, je le répète, il ne suffit pas qu elles soient légitimes à nos yeux, il est indispensable qu elles le soient à ceux de la collecti\ ité. Or , elles sont loin de l 'être. Pour qu'elles soient acceptées sans récrimina-

. tions et sans qu 'on nous accuse d 'être insatiables, il faut que

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cbaque éd ucateur apporte' clan s 1 accomplissement de sa lâch e, et sans marchandage, toutes les ressources de son ln telligence, tout son cœur, taule son énergie, toute sa volonté, en un mot, qu 'il se donne tout entier. X.

La Conférence {le Si erre En ces temps de marasme général , de déchéance mOl'ale pro­

fonde, la question de l'alcooli sme revêt une aGui té incontestable. C'est pouquoi nous ne pouvons que féliciter le Département pOUl' l 'h eureux choix et du conférencier et du sujet de la conférence. Nou s nous trouvions le (j mars parmi nos collègues cle Sion et S1erre ras­semblés dans la « Halle ' de gymnastique ». Après lecture' du proto.cole de l'assemblée de Géronde en 1926, la parole est à 1\11. Sermoucl. L"ora­teur fait converger vers lui toute notre attention et la capte si bien que nous avons vu grand nombre d 'auditeurs immobiles duran~ une h eure et plus, le buste penché en avant avec dans le regard l'expres­sion de celui qui sait et qui sent. Oh la belle conférence! Il n 'en faudra pas plus pour enfl ammer les âm es d'apôtres des instituteurs et pour les voir entreprendre auprès de la masse une action vive, irrésistible, en faveur de la révision de la loi sur les alcools.

De 1 exposé de M. Sermoucl transpire la vérité crue, brutale, propre à nous inspirer 1 effroi en face du fléau alcoolique menaç.an t de ravager notre pays. Le conférenc ier nous apprend que notre petite Suisse se classe en tète des nations consommatrices d'eau-de-vie avec 7.58 litres par habiüll1t, contre 1.12 pour le Danemark, 2.17 pOUl' la Grande Bretagne. Et la cau se de cette proportion effrayante d'ab­sorption d 'a lcool '? Cherchons-la tans la grande production de fruits et la taxe fisca le dérisoire imposée par la Confédération cUl litre de schnaps à 50 degrés. Cette taxe n 'est que de 25 centimes par litre, alors qu'en Angleterre, la même marchandise paye 19 fI'. 50 d 'im­position.

L 'abu s des boissons alcooliques entra în e les conséquences les plus gr aves dans toutes les cou ch es de la population. Indépendamment des misères qu'il pl'ovoque, des discordes qu 'il sème dans ]es familles , il peuple les hôpitaux, les asiles d 'alién és et les pénitenciers. '-M. Ser­moud li. procédé lui-même à des enqu êtes minutieuses, par consé­quent les clliffr es qu 'il avance ont dans sa bouche une éloquence particulière. Et son exposé est émaillé de scènes vécues, poignantes, qui donnent du relief à ses paroles. D'autre part, ses statistiqu es dé­montrent à l'évidence que le pourcentage des admissions d 'hommes a lcooliques clans les asiles cl 'a li én és et les établissements de l'elève­ment pOUl' buveurs sont en raison directe du bon marché de l'eau­de-vie.

C'est donc là un e constatation cRpitale. 01' la nouvelle loi pl'évoi1 le r enchérissement de l' alcool. Il ne peut clone exister de moyen

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plus efficac e pOUl' lutter contre le fl éau. E t il a ppart.ient aux ins titu­teurs de collaborer a u triomphe de cette loi et de contribuer a.insi à réduire cette dépense écra sante de 600 millions de fra n cs qu e le peuple suisse dépense annuellement en boissons alcooliques.

Dans la discussion qui intervient, M. Gribling souli gne l'impor­tance d e rabstinen ce totale parmi la jeunesse. Une Rbsorption bi e ll qu 'occasionnelle et r ar e d 'alcool peut à la longu e prédisposel' l' enfant à l'alcoolisme et il vau t mieux prév enir que gu érir.

Puis les échanges de vues se font rares. Qui n e clit ri en consent. Nos collègues semblent cOllvaincus et o'agn és à IR ca use an tia lcoo­lique. lVI. Sermoud p eut donc a voir la consolatioll d 'avait' a.ccomIJ]i œuvre utile.

API'ès l'élection du nouv eau secr étaire de l'a ssemb1 6e d e di s tri ct en ia. personne de M. Rey de Montan a , la séance est close.

Le ba nquet a li eu clans la gr ande sa lle de l'Hàtel Tel'minus. Ce LLe pal,ti e gastronomique nous para ît plus courue que l'assemlJl ée <.ln matin. A la t abl e d 'honneur, les préfets de Sien e et de Sion encadrent le Chef du Départem ent. M. Sermoud se r etrouv e dans un milieu famili er, les pédagog ues éta ien t ses collègu es il y a vÜ1gt a ns en­viron, MM. les ecclésias tiques, parmi lesquels nous r em arquons le cha noin e de Courten, les Rds Curés Tabin, inspecteur scolaire, Pont., Monnet , Zuffer ey, l'abbé Daniel, entretiennen t des r ela tions cl e bon voisinage. Après le dîner. les « officiels », comm e les appelle M. H é­riti er élu m a jor de t able font les plus grand s frRis cle la }Yu'tie Ol'èI ­toi1'e. Les discours se suiv ent et, comme l es jours, n e se r essembl ellt point. Des points cl e vue nombreux sont envi sagés, cles (lUes tiollS multipl es sont effl eurées. A tout seign eur tout honneur. M. le Conseil ­l l' d 'Etat '7\7a lpen ouvre les feux. Il p Rl'l e cle cil'culèlires et ch er ch e à t.nmquilliser la subtilité d e cer tains ü1stituteurs offusqués peut -è1.l'e var l es examens et contrôles int.roduits depuis un ~ eTta.in temps pHI ' le Départem ent de l'Instruction pubhque clans le domain e ie ]'f' col e. '

M. d e Ton'enté r ecommande viv em ent la loi sur l'assUl'allce-chà­mao'e. 1\11. Pont, Rd Curé de Si erre, pensant au soleil dit (lUe cel astre brille toute l 'année, tandis que le tra item ent de l 'in st.it.uteur 11 e rayonne que durant six mois, pOUl' la plupart; c'est pourquoi l 'E tat devra it fair e en sorte qu e l 'un soit }'jmage cle l 'nutre. Des applau­dissements frénétiques montrent qu e l'auditoire partage c'ette mn­nière de voir. M. le chanoine d e COUl'ten a encore })l'ésent cl an s hl mémoire le bon souvenir des instituteurs de Sien e et nous adresse des paroles aimables. Nous entendons en outre NI. Juli el', professeuJ' à l 'Ecole normale, magnifi er le dévouem ent; M. Gard, au nom de la muniC'ipalité de Sim're, parle de bienvenue ; .M. Gribling:, de nos devoil's dans nos relations av ec le peuple; M. l\tla this, de vin sans alcool ; M. Bérard expose à M. le Chef d e l 'Instruction publique qu elques J'e­vendications.

Il s'agit d 'abol'd des instituteurs qui tombent malades. Ils r e­çoivent, en Valais, le traitement m ensuel, après quoi on les aban-

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donne complètement à leurs propres ressources s 'ils en ont. Cette si­tuation n'est vraiment pas rassurante. L'Etat de Fribourg se montre meilleur prince à l'égard de ses fidèles serviteurs. Les maîtres d'école tombant malades, reçoivent, là-bas, le traitement entier durant les trois premiers mois, les trois mois suivants, le 75 % et les six autres mois la moitié du traitement. Ils sont mis ensuite au bénéfice de la caiss~ de retraite. M. 'iValpen, en réponse, nous donne l'assurance qu'à l'avenir l'Etat s 'occupera d 'une façon plus équitable des insti­tuteurs tombant m a lades. Il affirme, d'autre part, que la délivrance des permis d'enseigner sera subordonnée au besoin -du personnel.

M( le Dr de '\tVerra prend également la parole. En des ,termes sa­voureux, dans lesquels flotte une imperceptible et déliC'ieuse ironie, M. de '\tVerra se montre sceptique sur la valeur des conférences anti­alcooliques. Il se demande, en outre, si l 'on croit à leur effet, pour­quoi la boIine parole n 'est point annoncée aux institutrices. Il les croit mieux placées que leurs collègues instituteurs pour la pro­pagande contre l'alcool

La séance récréative prit ,fin vers 4 hem'es. Chq,cun emporte de cette journée les impressions les plus agréables qu'augmente encore la perspective d 'une journée de congé pour le lendemain. M.

T,oast aux Inst ituteurs réunis à Sierre (porté par M. le Professeur JULIER)

Monsieur le Président du Conseil d'Etat, Messieurs les Membres honoraires, Messieurs les Instituteurs,

Lai~sez-moi d 'abord vous faire part de la vive satisfaction que j'éprouve chaque fois qu'il m 'est donné de participer à une réunion pédagogique où j'ai roccasion de fraterniser quelques instants avec des collègues qui travaillent tous à ce sublime idéal: préparer à la jeu nesse valaisanne qui monte le chemin des nOble,s ascensions.

Comme je le disais l'année dernière à quelques-uns parmi vous, lors de la conférence de Grimisuat, l'instituteur chrétien d'aujourd'hui est le chevalier moderne qui, à l'instar de celui du moyen âge s'est proposé un idéal élevé, qui s'est mis lui aussi au service de la dame de son cœur, je veux dire, de notre mère la sainte Eglise:

Oui, Messieurs, c'est la réalisation de ce idéal qui vo:us met au cœur ce zèle apostolique dont je voudrais vous entretenir un instant, moins pour l'allumer en vous, puisqu'il existe déjà, que pour vous encourager à ne jamais le laisser se refroidir ni par l'âge, ni pal' l,a fatigue, ni par le découragement que pourrait engendrer la mécon­.aissance de vos services ou les conditions défavorables au milieu ciesquelles vous accomplissez votre tâche.

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E n appelant ',' otl'C zèl e apostolique, j'cn indique la S OUl'C 9 ou le générateur.

Vous êtes, en effet, des apôtres, c'est-à-dire des envoyés, des am­bassadeurs. Vot:e vocation vous a mis à la disposition de la Provi­dence, et vous etes devenus les ouvriers du Maître de la' moisson.

~a~s doute, le devoir apostolique incombe d 'abord a u prêtre. Mais cel,~l-c~ ne peut, de nos jours, suffire à toute la tâche; de plus les p~eJu.ges, les, haines l'excluent de bien des milieux. Le laïque surtout l'mstItuteur, qu 'anime la charité du Christ doit donc se se~tir sol­licité à l'action, car il n'est pas permis au~ bons d'enfouir dans une âme paresseuse les trésors de la foi et de la vert u.

C'est, au reste, pour élever l'enfanc'e dans toute l'acception du terme, que vous avez embrassé la carrière d'éducateur. Loin de moi la pensé~ ~ue vous vous êtes laissé guider par votre propre intérêt. Votre mISSIOn en eût été abaissée, dénaturée; vous ne pourriez plus

,~lors vous considérer comme les auxiliares du Christ dans le salut des ~mes; vous seriez devenus des débitants de grammaire, d 'arithmé­t~que, assimilables à votre voisin qui livre des étoffes ou des spi­rItueux.

, L'éducateur remplit une haute mission. Il est le dépositaire d 'une ~Ulssance redoutable. Honneur à celui qui l'ex~rce pour le bien des ames. et la gloire de Dieu. Heureux celui qui met dans les jeunes gé­nératIOns plus de vérité et plus de- vertu. Malheur au contraire à cel~~ ~ui n,églige son devoir , car l'enfance est aUjo~rd'hui une pl~ce asslegee; SI vous 1;1e vous y tenez constamment en o-arde l'ennemi qU~ veille à la porte, s'en emparera. Or, cette place ap;arti~nt à Dieu: qUI compt~ sur vous, ses lieutenants, pour la conserver. Un jour, il vous sera demandé compte des âmes que vous aurez laissées se perdre ~al' votre négligence. Quel 'compte terrible, si vous étiez accusé de trahISon!

De là découle pour vous la nécessité d 'un zèl e actif et ininter­rompu.

, M~ssi eurs, il est avéré qu 'aujourd'hui les instituteurs sont plus m~trUlts. qu'ils n e l'étaient il y a trente, quarante et à plus forte r,aIso~ cmquante ans. Une sorte de fièvre encyclopédique a envahi l enseIgnement donné dans les écoles normales. Incontestablement aussi, les méthodes sont meilleures. Mais le zèle, le dévouement a-t-il progressé dans la même proportion? La conscience professionllelll~ e~t-elle devenue plus délicate, plus scrupuleuse? Nous n 'osons l':lf­:lrmer, car nous nous souvenons de ces bons régents d'il y a t.nmte' a quarante ans, pétris de foi religieuse et soucieux de donner ::l,Yan ~ ~o~t une bonne éducation religieuse et morale, education qui, ~euJe., faIt les hommes de conscience et de caractère.

Et pourtant le zèle l'emporte de beauc-oup sur l'instruction, Sa,n" zèle , l'édifice éducatif manque d'une base solide. - '"

?'il fall~it opter entre un instituteur peu instruit, mais zélé, et un ll1stituteur très lettré, mais n'aY;:tnt pas le feu sacré, nous pren-,

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drions, sans hésiter, le premier. Et la raison en est palpable. Le zèle, c'est l'énergie, c'est l'esprit vital, c'est le courage tenace, la force qui triomphe. A qupi sert le savoir, si on ne le fait pas valoir; si on s'as­soupit dans l 'indifférence? A, quoi servent les bonnes méthodes, si l'ap~thïe par a lyse l'enseignement? A quoi bon une machine puis­s~_nte et perfe~tio11l1ée si elle manque de combustible ou de moteur?

Avec un cœur plein de feu et de' bonne volonté, tout s'améliore et finit par m archer, Les lacunes se comblent par le travail; les connaissances s 'acquièrent par la peine qu'on se donne pour s 'in:s­truire; on supplée au défaut de méthode par la vie des leçons et l'en­tr,ain d 'une p arole animée. A-t-on de la peine à asseoir son autorité, on en étudie les causes et on tâche de trouver les remèdes appropriés.

Quoi_ qu'il en coûte, le zèle ne se refuse à rien et finit par triom­pher des difficultés qui paraissaient d'abord très grandes, insurmon­tables même.

Après vous a voir exposé très brièvement la nécessité du zèle, s?­sour~e, ses résultats, permettez-moi encore de vous dire rapidement un mot d-e ses principales formes 0\1 champ d' actiy~té .

Avant tout, votre zèle doit se manifester da n$ la t enue de votre école ou de votre classe. C'est là votre milieu par excellence, celui où la Providence vous a placés, le champ qu'elle vous a donné à défricher et à ensemencer. Vous vous devez donc à vos élèves et à leur formation complète, physique, intellectuelle et surtout morale. Je dis surtout morale , ca r vous le savez aussi bien que moi, ce qui im­porte le plus, c'est l 'éducation morale, dont l'instruction n'est qu'un moyen , Aussi l'instituteur profite-t-il de toutes les occasions, et elles sont nombreuses, pour porter ses élèves au bien par le bon exemple, les exhortations, les conseils, les r éflexions opportunes, etc. L 'institu­teur chrétien peut donner une leçon chrétienne à chaque parole qu'il prononce, à chaque geste qu'il fait.

Ce travail se c-ontinuera au cours complémentaire si on en est chargé. On aura simplement soin d'adapter le fond et la forme à l'âge et aux besoins des ,ieunes gens.

Puis, Messieurs les Instituteurs, vous ' avez encore à être apôtres en dehors de l'école. Vos études, votre formation font de vous les auxiliaires désignés des pasteurs de paroisses pour la direction des patronages, des cercles d 'études. Quel bonheur pour un maître dé­voué de se retrouver au milieu de ses élèves ou anciens élèves ailleurs que dans les limites étroites d 'une salle de classe, de participer à leurs distractions, d'avoir l 'occasion de satisfaire leur curiosité na­turelle de savoir, de redresser leurs idées fausses et de leur fournir d'utiles directives de conduite,

Il y a les sociétés établies dans la localité où vous enseignez. Voilà encore un champ d'activité, non pas seulement sc-ientifique, a.rtistique ou sportive, mais surtout moralisatrice.

'1 !

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Et la bonne presse? Pourquoi, Messieurs, ne vous en feriez-vous pas aussi les apôtres, les zélés propagateurs? Qu'est-ce qui vous em­pêche de la soutenir par la parole, par la plume et surtout par l'abonnement? Pourquoi ne passeriez-vous pas votre journal, une fois lu, à un voisin trop peu fortuné ou trop indifférent pour s'y abonner? Ne faut-il pas vous recommander également de ne pas re­fuser votre collaboration à ceux qui luttent contre le fléau de l'al­coolisme par la création de ligues d'abstinence et de tempérance, à ceux qui essayent d'arrêter le flot montant du socialisme par les orga-nisations chrétiennes sociales? .

Enfin, Messieurs, soyez des apôtres partout. Le fameux anar­chiste Ferrer, fusillé dans les fossés de . Monjuich en 1908, disait: « Partout où j~ vais, partout où je suis, en tram, en chemin de fer, en réunion privée ou publique, partout je m 'applique à répandre mes idées.)} Eh bien, que n'en faites-vous pas autant pour la bonne cause? Vous en avez pourtant l'occasion, car, Messieurs, je vous vois partout: en famille, à l'école, dans les conseils communaux, au Grand Conseil, dans l'armée, dans le commerce ou l'industrie' au milieu des tl~avaux champêtres. Que d'occasions pour vous de ~'ectifier des idées fausses, de faire tomber des préjugés, même des haines stupides.

Sous ce rapport, Messieurs, vous avez plus d'influence qUe les prêtres et les religieux qui n'ont pas les contacts que vous avez, qui vivent dans un milieu très restreint et qui, en général, attendent qu'on ' aille à eux. Et quand ils parlent, ils passent pour le faire par métier, paree qu'ils sont payés pour cela.

Messieurs, je termine.

Rappelez-vous que votre tâche est grande et belle. Remplissez-la avec générosité et courage.

Gardez-vous d 'une vie égoïste et étroite, sans autre but que la satisfaction des ambitions et l 'accroissement du bien-être matériel. C'est méconnaître son devoir que de vivre dans un coin pour soi et tout au plus pour sa famille et quelques amis.

Soyez un peu à la communauté, à ce qui peut réunir les hommes. Rappeles-vous le mot de Sénèque: « Notre société est une voûte de pierres liées ensemble qui tomberaient si l'une ne soutenait l'autre. »

« Dans le monde phYSique, disait quelqu 'un, la force centrifuge tend à disperser les atomes dans l'espace, tandis que l'attraction les retient et les enchaîne.» Il en est de même pour la société h:umaine, l'égoïsme tend à la désagréger, tandis que l'amour de l'homme pour son semblable en est le véritable lien. Quand on parlait de quelqu'un à Ollé-Laprune, il se contentait de poser cette question : « Fait-il quel­que chose? )}

Eh bien, Messieurs, faisons quelque chose, nous aussi et répé­tons ce qu'un officier de la grande guerre écrivait à un de se~

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amis: « Demandez à Dieu qu'il m'inspire les gestes et les paroles . capables de faire de mes hommes des héro~. »

Nos hommes . à nous, ce sont nos élèves dont nous avons à faire des chrétiens sans peur et sans reproche et des patriotes ardents et dévoués.

Et c'est avec ce ptogramme que je vous laisse, avec comme de­vise la p arole qu'au lendemain de la victoire définitive des Alliés , dev~nt la Chambre des députés frémissante d'enthousiasme, Clemen­ceau prononçait en faisant l'éloge des soldats de l~ ~épub~ique : « Hier soldats de Dieu, aujourd'hui soldats de l'humal1lte; toujours soldats de ridéal.)} ·Eh bien, chers instituteurs valaisans, restez comme vous T'avez toujours été les soldats de Dieu et de son Eglise, les soldats de l'éducation ch;étie~ne de la jeunesse et les soldats de l'idéal 'SodaI.

C'est dans ces sentiments que je lève mon verre à la prospérité du personnel enseignant des deux grands et beaux districts de Sierre et de Sion et que je lui apporte les sympathies de l'Ecole nOrI:na~e: en particulier celles de M. le Directeur Hœh qui, s'il se trouvaIt ICI ,

vous invitèrait à profiter tous de la retraite annoncée pour la se maîne de Pâques et où vous auriez l'occasion d'alimenter le feu a postolique dont je viens de vous parler. .

Lutte antialcoolique Sur la demande du Département de l'Instruction publique,

NI. Sermoud, fonctionnaire au Département ~édéral des Finances, a bien voulu donner dans différentes localItés de notre canton une conférence sur la lutte antialcoolique qui, en Suis~e, se révèle tous les jours plus urgente et plus nécessaire.

Il a eu l'obligeance de distribuer à un certain nombre de ~~s auditeurs des tracts qui contiennent des renseignements suggestIfs sur les ravages de l'a1coolisme dans notre beau pays.

Nous croyons rendre service à nos collègues qui n 'auraient pu bénéficier de l'avantage d'entendre l'intéressant et surtout con~­pétent conférencier, en reproduisant un de ces tracts dans le pre­sent No de l'Ecole primaire.

Les indications qu'ils y rencontreront leur serviront, à l'o.c­casion dans les entretiens antia1cooliques que nous leur conseIl­lons vivement d'avoir de temps en temps avec leurs élèves; entre­tiens que nous considérons co~me,.un~ ~uvre patrioti~ue et. hu­manitaire au premier chef, pmsqu Il s agIt de la sante phySIque et morale de notre population.

Consommation de boisS01~S alcool-iques.

D'après M. le Dr Koller, directeur de l'asile d'aliénés de Pré-

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fargier, la consommation de boissons distillées, par tête d'habi­tant et par litre est la suivante:

Litres à 50° 2.17 . 1.12 2.27 2.49 4.64 7.58

En francs 19.50 suisses

Imposition. 8.75 3.75 2.50 2.- 0.25 par litre

à 50°

A cela vient s 'ajouter p"our la Suisse une consommation de 135 litres de boissons fermentées, par tête d'habitant.

Avec Nf. le Dr, . Koller et d'autres staticiens, nous sommes d'avis qu'en éliminant les enfants en-dessous de 15 ans les fem­mes, nombre de tempérants et de gens sobres, la prop;rtion par tête peut être largement doublée.

Dégénérescence.

L'alcool, comme facteur étiologique de l'aliénation mentale, est la cause du 20.20 % des cas de psychoses alcooliques pures (psychoses toxiques alcooliques) chez les, hommes et du 3.67 % chez les femmes. Quant au psychoses associées: choc traumati­que ou émotionnel, revers de fortune, chagrins, maladies infec­tieuses, se développant chez d'anciens intoxiqués, elles forment le gros contingent des incurables de tous les asiles.

Sur 814 descendants de 215 familles de buveurs, Legrain (France) a constaté: -

174 décès (avant terme, mort-nés ou peu après la naissance) 640 dégénérés (idiots , épileptiques, aliénés, alcooliques, per­

vers ' ou criminels).

Demme" directeur de la clini;rue infantile à Berne a cOlnpté : Sur 57 'enfants d'alcooliques: Sur 61 enfants de gens sobres: 25 enfants = 43.86 % décès 5 enfants 8.20 % décès 2,3 » = 40.35 % anormaux 6 » = 9.84 % anormaux 9 » = 15.79 % normaux 50 » = 81.96 % normaux

Premier groupe: déchet 84.21 % - état normal 15.79 % Deuxième» » 18.04 % -» » 81.96 %

Les rôles sont renversés suivant que les familles sont alcooli­flues ou ne le sont pas . L'enquête du Département fédéral des finances nlontre que le 40 % des enfants fàibles d'esprit (arriérés , imbéciles, idiots) et que le 25 % des enfants retardés des classes sépciales (arriérés et imbéciles) sont issus de parents adonnés à la boisson. La proportion des cas d'épilepsie imputables à l'alcoo­lisme peut aller jusqu'au 60 % .

Etablissements pour enfants faibles d'esprit, Etablissements pour l'éducation des jeunes gens et jeunes filles difficiles à élevez' ou moralement défaillants . - Orphelinats.

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De l'enquête que nous avons faite, il résulte que le 40 à 50 % des enfants, des jeunes gens et des jeunes filles de ces établisse­lllents sont issus, de parents adonnés à la boisson (non compris ,ceux dont le père est inconnu (25 %).

Classes spéciales pnlll' enfants retal'(lés. Le 25 % de ces enfants ont une tare héréditaire alcoolique

directe . Pénitenciers.

Parmi les prisonniers, le 60 % au minimum ont abusé des boisSOl~S enivrantes, le 35 % des crimes et des délits ont été causés sous l'empire de la boisson.

Ce que coûte l'alcoolisme . Selon la statistique du Département fédéral des finances, nos

dépenses annuelles en boissons alcooliques atteig~ent 600 .mil­lions de francs" preque autant que celles pour le pam et le laIt.

D'après une enquête officielle que nous avons faite, il res­sort que l'assistance publ~que obligatoire à cbarge des contribuables est de 80 millions de francs, nombre rond . La plupart des can­tons et des ~ommunes estiment que le quart, pour ne pas dire le tiers de leurs hais d'assistance est absorbé par l'entretien des al­cooliques et des personnes à leur charge. Pour certaines commu­nes, ces dépenses vont jusqu'au 50, 75 et 90 %.

Le % de ces 80,000,000, soit 20,000,000 de francs représente la valeur d'un troupeau de vaches de 25,000 bêtes qui, marchant trois de front occuperaient une route de 25 km. de longueul'. {Prix d'estimation d 'une vache, 800 francs).

Quelque.~ chiffres: Nous avons en Suisse: avec:

1. 24 asiles d'aliénés " . . . . . , . .. 10,873 aliénés. 2. 16 établissements de relèvement pour buveurs 428 .ivrognes. 3. 40 établissements pour faibles d'esprit.. 3,000 dégénérés. 4. Epileptiques . . ........... 20,000 5. 200 classes spéciales pour enfants retardés . 3,600 élèves. 6. 175 établissements d'éducation pour enfants,

jeunes gens et jeunes filles difficiles à élever ou moralement défaillants

7. 250 orphelinats . . . '. 8. 29 pénitenciers 9. 39 sanatQria et hôpitaux

10. 250 hôpitaux . . . . .

(:j,300 indisciplinés. 7,000 orphelins.

18,615 prisonniers. 9,000 tuberculeux.

78.816 malheureux.

dont près de la lnoitié sont des victinles de l'alcool, sans compter celles qui vivent en liberté et qui échappent ainsi à tout contrôle de la statistique.

Page 8: L'Ecole primaire, 15 mars 1928

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De quelques défauts dans la lecture à baute voix

Dans un précédent article, nous avons exposé les difficultés: de la lecture dit~ « expressive ». Aujourd:hui, nous voudrions, abs ­traction faite de l' « expression », signaler les fautes 'les plus sail ­lantes qui se rencontrent dans la lecture à haute voix, telle qu 'on la pratique communément.

Nous laissons de côté les pauses « expressives » dont nous avons déjà une fois entretenu les lecteurs de l'Ecole primaire.

La toute première faute à éviter dans la lecture à haute voix, c 'est la précipitation. Neuf fois sur dix, on lit trop vite. '

« Pour apprendre à lire, dit M. Faguet, ~l faut d'abord lire très lentement, et ensuite, il faut lire très lentement, et toujours lire très lentement. Lire lentement, a joute-til , ~' est donc la pre­mière règle de la lecture; c'est la clé de tout l'art dans lequel vous désirez vous exercer et devenir habile. » \

Voilà qui est clair. Avec la précipitation, en effet, il es t très difficile, sinon impossible, de voir d'avance les mots qui suivent celui qu 'on lit; de là, des accrocs, des hésitations , des reprises , parfois des barbarismes et des non-sens hilarants ; la prononcia ­tion s'embarrasse; on escamote des syllabes ou des mots ; on che­vauche sur d 'autres, car on n e laisse p as à la langue et aux lTIUS­cles buccaux le temps d'abandonner une position pour en pren­dre une autre.

Un second défaut, très COIllmun aussi, c'est le manque d'ar ­ticulation. L'articulation , c'est -Ia prononciation correcte, n ette, distincte des consonnes. Et parmi les consonnes, il y en a qui don­nent aux syllabes ou aux IllOtS un certain relief , une vigueur agréable; c'est le cas, par exeIllple, des T , des l, des m , des n , des s .

Or, qu'a>rrive-t-il trop souvent? Beaucoup de consonnes sor ­tent de la bouche écrasées, broyées; au lieu d 'offrir comnl e cer ­taines pièces de mécanisme des arêtes nettes et vives, elles ne pré­sentent que des bords usés , éllloussés chargés de bavures .

Ainsi, il ne se prononce pas : il-le, mais i - devoir = de­voir, mais deouoir - r.égu lièrement = ré-gu-li-è-rement, mais réguièrement - sensiblem ent fera sensibl'ment - amour, aillou - il l'a pris deviendra il a pris, etc. , etc.

Un trois'ème défaut consiste dans l'escamotage des syllabes muettes. '

On dira, par exemple, meubI' au lieu de meuble(u) - quel­qu~ années pour quelques années - pauvr' fou en place de pau­vre(u) fou - le batlier pour bate(u) lier , etc.

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Au sujet des syllabes muettes, nous ferons remarquer: .1. que l'e muet est fortement accentué dans les mots mono­

syllabiques, comme je, le, me, ne, se, de, te, etc. 2. qu'il l'est moins dans l'intérieur . des mots polysyllabiques,

comme dans redemander, pauvreté, etc. 3. qu'il l'est moins encore à la fin des mots à plusieurs syl­

labes; tels que table, muette, cane, etc.

Mais, dans ce dernier cas, il ne doit pas subir d'élision COIll· pIète comme cela n'arrive que trop fréquemment. Les mots ont alors quelque chose de dur et d'incomplet; on dirait entendre alors des Allemands ou des Anglais peu familiarisés avec la langue française. Ils · disent, en effet, tabl', muscl'. guerr' et ainsi de 'S uite. '

Voltaire recommande de prononcer la syllabe muette finale des mots de manière à pouvoir comparer cette prononciation avec la légère résonance que fait entendre encore une touche de piano après qu'elle a été frappée du doigt.

Un quatrième défaut qui se rencontre plus fréquemment qu 'on ne cr Qi t, c'est le nasillement. Les syllabes nasales, an, en, in , un, on, se prononcent trop du nez; ceci vient généralement de ce que l'on n'ouvre pas assez la bouche et que le souffle se porte surtout vers le haut de la cavité buccale.

Un cinquièrne défaut, plutôt rare, consiste à ne pas donner à l'accent tonique la place qui lui revient.

En français, on accentue la dernière syllabe sonore d'un lllOt. Ainsi dans chapeau, bonheur, pauvreté, ce sont les syllabes eau , eur, té qui se prononcent le plus fortement:

Or, chez certains lecteurs - nous ne voulons pas parler ici de ceux dont l'allemand est la langue d'origine et qui ont l'ha­bitude d 'accentuer l'avant-dernière syllabe - certains 'lecteurs même français de race, prononcent les diverses syllabes d'un mot en pratiquant une sorte de decrescendo, de manière que la dernière syllabe, quoique sonore, reste comme affaiblie, diminuée.

Enfin, il nous reste à dire encore un mot de l'accent local.

Par accent local, on entend des prononciations incorrectes propres à certaines régions. Ce défaut existe dans tous les pays.

En France, par exemple, nous connaissons pour le moins ,une dizaine de régions où l'on a des défauts de prononciation, défauts parfois assez bizarres.

En Valais, nous avons constaté particulièrement les vices de prononciation suivants qui yarient naturellement selon les régions, les vallées ou même les localités :

On , dira chteur pour cœur - ann' poui- an - tchié pour fié

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(pitié = pitchié) --:- u pour eu (bonheur = bonhur) ---:- un pour in (infidèle = unfIdèle) - in pour un (un enfant = ln enfant) - é pour è (père = pére) - ouin pour oin (loin = lou:n) -OUOI' pour ail' (noir = nouor - eu pour ai, ait, aye, etc. COll­

draie = coudreu) - ess pour 'ex (exception = esseption) - â ou a pour a simple (gage = goge) - à la fin d'un mot ille aux 1 mouillés sera prononcé il-ien (ex. famillien).

La cause principale qui produit et perpétue l'accent local, c'est l'exemple défectueux qui, hors de l'école, frappe sans cesse les oreilles des enfants. Ceux-d, en conséquence, arrivent à l'école avec des habitudes prises, ancrées, qu'il est extrêmement difficile de corriger. Ajoutez-y la timidité et le respect humain si naturels, aux enfants de la campagne et vous voyez les difficultés inouïe;; que présente là correction de l'accent local.

, Néan~noins, l'instituteur ne doit pas se décourager. Qu'il commence . par étudier soigneusement les défauts de prononcia­tion de ses élèves et qu'il en recherche ensuite les causes et les, remèdes.

Parmi les remèdes , nous lui conseillons les suivants:

1.' L'exemple. Le maître s'efforcera d 'avoir lui-même une prononciation très correcte, lente et distincte.

A l'Ee;ole normale, on attache une grande importance à la bonne prononciation des futurs instituteurs, et les efforts conju­gués des maîtres et des élèves donnent, au bout de trois . ans, des résultats satisfaisants. Malheureusement, quand les jeunes maîtres se retrouvent dans leur milieu natal, ils oublient vite de se sur­veiller ~t ils , retombent rapidement dans les défauts dont on les avait corrigés en grande partie.

2,. Ex. d'assouplissement. Dès leur entrée à l 'école, les en­fants doivent'être soumis à des exercices réguliers et méthodiques de _prononciation. Ce travail se fait surtout pendant les leçons de lecture et der;nande à être appliqué et poursuivi dans tout ce que les enfants ont à -lire ou à dire en classe.

L'essentiel, c'est de forn'ler à la longue l'oreille de l'élève; il fera de. lui-même les exercices de conformation des organes de la bou~he pour arriver à ' une prononciation correcte. Il en est ainsi cnez l'enfànt qui 'apprend de sa mère à parler.

, ' 1

Mais le lnoyen le plus efficace pour arriver à un certain ré­sûU;:\t, c'est une patience et ,une ténacité inébranlables . . IIII "si 'le maître"se décourage, s'il se rel~che quelque temps, si tous les jours et à chaque moment, il ne corrige et n'améliore, il n',(t)htiendra que 'de maigres, d'insignifiants progrès. ," \.' ';n faut~ dè ' plus là bonnè vOloÎ1-té, disons l'a' 'collaboration éner­gique et soutenue de l'enfant. Pour y arriver, le maître ëmploiera

J T t~ • • t • ',. . : • , \ \. \.

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les 'encouragements, les récompenses; il tâchera d'obtenir que les élèves se rendent le service de se reprendre réciproquement en dehors de l'école.

A tout prix, il proscrira les moyens' humiliants, tels que les railleries, les contrefaçons offensantes, et il ne tolèrera pas les moqueries d'élèves qui prononcent bien ou mieux que leurs ca­mm'ades.

Ce travail aura encore l'avantage de cultiver cette faculté ~i importante dans l'homme, la volonté . '

Et maintenant, chers collègues, continuez, si vous avez déjà fait quelque chose sur ce point; commencez, si vous n 'y avez 1)a" encore songé.

Ayez à cœur (le bien faire tout ce que vous faites.

Langue française

L'habitation - (Voir Ecole Primaire du 29 févl'iel'.)

2. Chaznnièl'es. ' C'est une rencontre bien jolie et hlen , gra­cieu~e qu'une chaun'lière au bord du chemin. De ces quelques bottes de paille dont les paysans croient faire un toit, la nature fait un jardin. A peine le vilain a-t-il fini son œuvre triviale que le printemps ' s'en empare, souffle dessus, y mêle mille graines qu 'il a dans son haleine, et en m oins d'un m ois, le toit végète, vit et fleurit. S'il est de paille, comme dans l'intérieur des terres, ce sont de belles végétations jaunes, vertes, rouges, admirablement . mêlées pour l'œil. Si c'est au bord de la n'1er et si le chaume est fait d'ajoncs, ce sont de magnifiques mousses roses, robustes com­me des goémons, qui carapaçonnent la cabane. Si bien qu'il faut vraiment peu de temps , et un rayon de soleil ou un souffle d'air pour que le lnisérable gueux ait sur sa tête des jardins suspendus , comme Sémiramis. A chaque souffle du printemps une chaumière fleurit. V. Hugo.

a) Conjuguer oralement aux temps composés de l'indicatif: poser, un toit de chaume sur sa maison, souffler sur le capitule d 'un pissenlit en graine, admÎl~er un toit fleuri.

b) Pourquoi la végétation des toits ' est-elle différente au bord de la mer et à l'intérieur des terres? Cela est-il un embellissement pour la chaumière et quels sont les termes de l'auteur qui le

. prouvent? (Au bord ' de la 'mer, le vent apporte des semences de plantes marines; tandis qu'à l'intérieur des terres, ce sont des gl'ai­nes de plantes terrestres qu'il charrie. C'est évidemment un em-

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bellissement : la chaumière devient bien jolie et bien graci~u~: ... le payan croit faire un toit et cela devient un jardin, la chaumlere fleurit...)

e) Ajouter quelques épithètes à: chemin, chaumière, paille ~ végétation, chaume, jardin. ., . ,

chemin: creux, pierreux, défoncé, empIeq'e, macadanuse, en-caissé ...

chaumière: basse, enfumée, fleurie, délabrée, coquette ... paille : lisse, blanche, tressée, hachée, h~oissée ... végétation: tropicale, désertique, parasIte, abondante, tar -

dive ... chaume: épais, léger, fleuri, noirci, pourri... . r

jardin: suspendu, anglais, légumier, eI?-tretenu, néglIge, sale ...

3. Aimez la maison. Aimez la maison où vous êtes né. Si pau-vre qu'elle soit, elle vous a défendu. Sans les mur§, le plafond , les vitres des fenêtres, vous seriez mort. Rappelez-~ous que, ,~a,ns l'hiver, vous avez vu des oiseaux, les plumes gonflees et soufIlees par le vent, se poser sur l'appui de la fenêtre, et ~ous reg~rder , en penchant la tête de côté. Les rouges-gorges mem:, qlU son! curieux et hardis comme des explorateurs, ont peut-etre frappe du bec contre les carreaux. Cela voulait dire, dans la ~~ngue d~s oiseaux: « Petit, comme il doit faire bon là-dedans! S'Il Y ~vaIt un trou pour m'y glisser, surtout si tu n'étais p~s ,là , coml~1e J'en­trerais avec plaisir! » Bien des voyageur~, oblIges de faIre une Ion crue route à pied, sous la bourrasque, bIen des bergers ~ard~nt les °bêtes, bien des luarins ont désiré d'avoir, pour s'~ refugl~r , une chambre, grande com~e la moi.tié de la vôtre .. MalS !a n1.eIl­leure raison pour laquelle Il faut alluer votre maIson, c est que c'est là que vous-même vous avez été le plus aimé~ qu'on a le ~lus souvent pensé à vous, que votre père et votr~ mere. ont parl~ de vous, se .sont inquiétés à votre sujet, ont faIt plUSIeurs proJets , pour que vous soyez bon et pour que vous soyez he~ueux.' ~ous , leur enfant! Rene Bazzn.

_a) Conjuguer oralement au prése~t du , conditionnel. et du subjonctif: se rappeler les froids de l'hIver , h'~pper du dOIgt sur le carreau, se réfugier dans une chambre chauffee.

b ) Vous devez aimer ,la maison parce qu'elle vous. a , déf en du et parce qu'on vous y a aimé. Retracer le plan en ajoutant les idées secondaires.

La maison vous a défendu : l~s intempéries n'ont eu aucune action sur vous.

les oiseaux vous l'envient. bien des hommes vous l'en­

vient: voyageurs, bergers, Ina­rins ...

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V ous a vez été aimé à la n1aison : à la maison on a pensé à vous.

on a parlé de vous, on s'est inquiété pour

vous.

e) Dire le contraire ' de: naître (mourir), pauvre (riche" cossu), défendre (attaquer), mort (vivant) ; se rappeler (oublier), se poser (s'envoler, s'enfuir), curieux (discret, ,insouciant, indif­férent), hardi (timide), faire bon (faire mauvais), dedans (dehors), entrer (sortir), plaisir (peine, douleur), raison (prétexte), inquiet (tranquille, rassuré), projet (réalité).

4. Maison. « Où vas-tu? - A la maison ». Ainsi répondent les petits garçons et les petites filles qu'on rencontre sur les che­mins, sortant de l'école ou revenant des champs. Ils ne disent pas: « Nous rentrons chez nous: et pas davantage: « Nous allons à notre maison ». Ils disent: « la maisoil ». Quelquefois c'est. une mauvaise bicoque à moitié par terre: Iuais , tout de même, c'est la maison. Il n'yen a qu'une au monde. Et même de jeunes hom­mes, des personnes d'âge et des gens n1ariés, s'il vous plaît, se servent de cette expression. « A la maison, on faisait comlne ceci; à la maison on faisait comme cela. » On croit qu'ils désignent leur propre foyer. Pas du tout. Ils parlent de la maison de leur enfance, de la maison de leur père et lnère, qui est inunuable dans leur souvenir. Vous, oyez bien qu'il n 'yen a 'pas deux.

(d'après Henry B0rdeaux.)

a) Conjuguer oralement au présent de l'indicatif et au temps composé correspondant: répondre au passant qui m 'interroge, se servir d'une expression favorite, préférer son propre foyer. .

b) Qui sont ceux qui disent « à la maison » ? Pourquoi continuent-ils à le dire? (Tous disent « à la maison » : petits garçons, petites filles, jeunes homn1es, personnes d'âge, gens Ina­riés lnême. Il semble qu'ils ne devi'aient pas parler ainsi. Pour les enfants, c'est « notre maison » qu'il faudrait dire, car il y a d'au­tres maisons que la leur; pour les jeunes gens « ma maison na­tale }) , car il ont travaillé dans d'autres demeures; pour les gens d'âge ou les gens lnariés « la maison de mes parents », parce qu'ils ont abandonné la Inaison natale et qu'ils ont fondé une famille habitant une nouvelle maison. Mais non, ils disent tous « la maison }) parce que, pour tout homme, il n 'yen a vraÏluent qu'une, celle de son enfance, immuable dans son souvenir .. ).

. e) Dire un mot dérivé de : aller (allée, allant), sortir (sortie), école (écolier, écolage, scolarité), champ (campagne, campagnol, campagnard), maison (maisonnée), dire (dit, diction, dictionnaire), terre (terrain, terreau, territoire), jeune . (jeunesse), marier (ma­riage), servir (serf, servitude, service, serviteur), exprimer (expres-

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sion), faire (faction, facteur, facture) , croire (croyance, crédulité; crédibilité), désigner (désignation), parler (parlement, parlotte, parloir), souvenir (souvenance).

5. L'Eglise. Nous la fréquentons sans nous dovter, la plu­part du teInps, de ce qu'elle est! ... Elle est tout. Au Moyen Age, on y vivait. L'Eglise n 'est pas seulemen~, la maison de Dieu, mais celle des hommes. On y peut entrer cornIlle on veut, co mIlle chez. soi, et nulle part on ne se sent plus libre, moins prisonnier des soucis et des chagrins. C'est un refuge, un asile, une retraite. C'est le cloître du passant et le monastère d 'une minute ou d'une heure. On y espère et on y attend toujours quelque chose d'en haut. C'est la salle d 'attente. Personne ne vous y r:éclame rien , qui que vous soyez, et vous n 'y devez rien à personne, qu 'à Dieu. As-tu jamais songé à ce que serait la vie, cette vie gaie, amusante, plaisante, où il n'arrive .laInais rien que d 'heureux, n 'est- ce pas? si, brusquement, toutes les églises cessaient d'être, si l'on ne sa­vait plus où aller, .le ne dis pas seulement pour prier, mais pour penser, pour reposer son esprit, pacifier son cœur , reprendre ha­leine, chercher un conseil dans les lueurs d 'un vitrail et trouver un avis à l'ombre d'un pilier? Et, enfin , où pleurerait-on sans honte - , je te le demande - presqu~ avec permission, et avec autant de laisser-aller confiant et douloureux? L 'église est l'en­droit qui renferme et rassemble en lui le plus de souvenirs ·hu­mains, précieux et chers , baptêlnes, mariages , morts. L 'églisç ' est nécessaire, indispensable. H. Lavedan.

a) Conjuguer oralement à l 'imparfait de l'indicatif et au temps composé correspondant: fréquenter l'église pour les offi­ces , penser avec effroi à la disparition des égli ses , chercher conseil auprès du Tabernacle.

'b) L'auteur use d'ironie pour dire que la terre est triste. L'auteur n'était pas encore converti quand il écrivit cette page: qu'est-ce qu'un vrai chrétien ajouterait?

(L'ironie: As-tu jamais songé à ce que serait la vie, cette vie gaie, aIllUsante, plaisante, où il n'arrive rien que d'heureux, n'est-ce pas? Cela signifie tout le contrairf : cette vie triste, en­nuyeuse, pénible ... et c'est pourquoi on devra aller dans les églises prier, se reposer, pleurer ... Le chrétien se souviendrait du taber­nacle où l'on peut parler à Dieu, de la table de Communion où on le reçoit, du confessionnal où l'on est pardonné, etc. La religion de l'auteur est une religion plus poétique que réelle.)

.c) Dire un verbe dérivé de : temps (temporiser), vivre (revi­vre, survivre) ', Dieu (déifier, diviniser), homme (humaniser), libre (libérer) ,souci (se soucier), chagrin (chagriner), refuge (réfugier), cloître (cloîtrer, claustrer) attente (attendre), personne (personni­fier) gai (égayer), brusque (brusquer), esprit (spiritualiser), cœur

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(encourager, décourager), conseil (conseiller, déconseiller), lueur (luire, reluire), ombre (ombrer, ombrager), honte (honnir), cher (chérir) .

Contribution à l'étude' de la narration (Fin.)

7. Tracer, d'après Veuillot, le caractère du moine donneur. Ce caractère est-il Ul'ai, soutenu?

Au long du récit , le caractère du héros se trace par touches successives: il est homme et il est moine, et cette « dualité , con­trastée » , pour parler comme V. Hugo, concourt elle-même à l 'in ­térêt général.

Homme, le Père a un invincible penchant au ,sommeil , dont le "religieux est contrarié; si le premier est dormeur par tempéra­ment, le second est plein de ponne volonté par profession; aussi ]a lutte éclate pour laquelle le .religieux parvient à cçmfisquer mê­me les forces supérieures de son adversaire: son talent de méca­nicien et son génie inventif. Hélas, l'homme inférieur, le tempé~ rament, triomphe d'abord: malgré toutes les indutries, ' le moine ronflait. Mais le religieux est courageux; il cherchera remède plus énergique encore. Hélas! le mal est .plus grave qu'on ne ' le soup ~ çonnait; le religieux qui se contrôle et se scrute, se découvre pa­resseux : nouvelle lutte plus âpre, où le diable lui-même intervient pour narguer moine et mécanicien; celui-ci s'ingénie, l'autre en souffre mais veut et chérit cette souffrance; jusqu'à 'ce que, triste de n 'avoir pu se corriger entièrement de sa paresse, au lieu de prendre les choses au tragique, il voit avec joie arriver la mort, ce réveil sur l'éternelle vie.

Résumons-nous: par tempérament, l'homme est dormelll' et même paresseux. Le moine est fervent, de bonne volonté; il s'exa­mine, se contrôle, se suit; il emploie tout son talent et son génie à se corriger; il admet, entre autres moyens violent~, la souffrance volontaire, aussi malgré ses faiblesses ne craint-il pas la mort.

. Ce caractère est d 'une valeul' psychologique parfaite. Quel­ques traits qui le démontrent: un génie mécanique sans études ne peut que s'ingénier à réaliser de petites choses, des bibelots curieux ou bizarres; le progrès pour un tel genre d'artisans con­siste toujours à ajouter, jamais à simplifier; le religieux s'examin~ s~r les motifs de ses actes: pour lui, la paresse est plus effrayant~ parce qu'elle est volontaire et entraîne une faute; la paresse a d'in­génieux moyens et de se justifier, et de se soustraire au châ-timent. .. .'

, .' \ \

, Enfin ' ce caractère ' est soutenu. Auclln des détails successive-

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ment apportés ne contrarie le dessein de l'ensemble; de plus, c'est de ce caractère que découlent tout~s les péripéties COllIne nous l'avons montré. .

8. Quelles sont les sources de l'intérêt dans ce récit? Est-il en progression ?

Il nous est facile maintenant de déterminer les sources d'in­térêt. Il naît: de l'originalité de la question posée, de l'enchaîne­n~ent parfait des péripéties, du développement du caractère du héros, de la double lutte extérieure et intérieure qu'il' soutient, de la sobriété et de la rapidité du récit. Il naît aussi du style: style précis, varié, pittoresque, remarquable par la propriété des termes.

Le plan fait toucher du doigt la progression de l'intérêt.

9. Le style de Veuillot est remarquable pal' l'admirable va­riété qu'on y donne, le pittoresque et la propriété des termes. En faire la démonstration par l'examen du présent morceau.

1. La variété existe dans les mots et dans les tours de phrases .. a) Dans les mots. Relevons seulement les termes synonymes que l'auteur emploie par exemple pour: Père: Inoine, chartreux, reli­gieux, pauvre Père, fervent chrétien - bruit: sonnerie, carillon, tapage, tintamarre, fausset - lit: dure couchette - l'heure du réveil: onze heures, matines, avertissement, heure fatale. - b) Dans les ' tours de phrase. Inversion au début de la phrase: il y a peu de temps, avec la meilleure volonté, sans études, à l'heure dite ... - Tournure interrogative: Le croirait-on? ... - Tournure exclamative : Endormir oh! non ...

2. Le pittoresque sobre et nerveux ressort: a) du choix des adjectifs, malicieux, spirituels ou imagés: rude carillon, tinta­marre supplémentaire, triste découverte, dure couchette, lourde planche, avertissement charitable, boiteux et Ineurtri, jambes en­durcies, criminelle habitude, heure fatale, projets somnicides, pe­tit péché ...

b) de l'emploi du verbe imagé: chapiteau qui couronnait le cadran, invoquer son génie, machiner un serpent, siffler dans l'oreille, savourer la douceur du lit, arguer l'un et l'autre, le châ­timent tombe, jeter à bas du lit, rouler des projets dans sa tête ...

c) des expressions métaphoriques: jouer à dormir, perdre son fausset, se tendre sans crier gare ...

d) de l' harmonie imitative née du choix des verbes, de leur accumulation, de l'identité des consonnances finales: le cariUon carillonnait, le merle sifflait, le tambour battait et le moine ron­flait. ..

3. La propriété des termes est une des caractéristiques du style de Veuillot. L'étude littérale en a fourni maints exemples. EI1 voici quelques autres: contrarier étrangement et non fort, extrê-

1 !

1

- 149 -

nlement - chanter matines et non dire, réciter - à force de réflexion et non de méditations - horloge parfaite et non juste, exacte - découragé et non dépité - placé sous sa tête, avec in­tention, et non glissé - siffler à l'oreille et non soufller, glisser ou dire... .

10. Aller des idées suivantes à leur forme dans le texte: Le Père souffrait de sa somnolence, il avait le génie de la mécanique, tous les bruits éclataient à l'heure marquée, il fabriqua un serpent qui l'avertit, le merle, le coq et le tambour marchaient aussi, il y avait de la paresse dans son cas, il aimait son lit et y restait vo­lontiers encore un peu, cela ne pouvait pas durer, la planche Je blessaj il lutta contre ce défaut jusqu'au jour de sa mort.

Leçon de calcul

Transformation des fractions à l'école primaire

QUATRIÈME DEGRÉ Programme

A. - Conversion des fractions ordinaires en tractions dé­ciJnales.

Il s'agit évidemment d'aborder les fractions périodiques, les autres n'offrant aucune difficulté ainsi qu'il vient d'être dit au 3me degré.

Premier cas . - Conversion de fractions ordinaires en frac-tions décimales.

Ici, rien de neuf; il suffit d'appliquer le procédé ordinaire de la division du numérateur par le dénominateur. Mais on fera des constatations intéressantes:

337 a) - 0,75; - = 0.6; - = 0.35

4 5 20 transformation en fractions décimales exactes, car les dé­

nominateurs ne renferment que les facteurs 2 et 5. 2 5 13

b) - = 0.66666 ... ; - = 0.5555 .. ; - = 0.13131313 ... 3 ' 9 99

Les dénominateurs ne renferment pas les facteurs 2 et 5. Les fractions décimales ' sont pél'iodiques. La période commence avec le chiffre des dixièmes. On dit que ces fractions sont des fractions périodiques sim­

ples. 5

c) - = 0.83333; 6

7 -,: = 0.4666; 15

5 - '= 0.41666 .. 12

Page 13: L'Ecole primaire, 15 mars 1928

- 150 -

Les dénominateurs renferment les facteurs 2 ou 5, avec d"au­tres facteurs.

Les fractions décimales sont périodiques. Mais la période ne commence pas avec le chiffre des

dixièmes. Ces fractions sont dites périodiques mixtes. Conclusions. - Une fraction irréductible ordinaire donne

naissance: 1. A une traction déciInale exacte terminée, lorsque son dé­

nominateur ne renferme aucun des facteurs 2 et 5. 2. A une fraction déciInale périodique simple lorsque son

dénominateur ne renferme aucun des facteurs 2 et 5. ~. A une fraction déc~male périodique mixte lorsque son dé­

nomInateur renferme les facteurs 2 ou 5 avec d'autres facteurs. 2 5 13 5 7

Remarque. - Les fractions ordinaires 3

5 et qui ont donné naissance à des fractions périodiques

12 simples ou mixtes sont appelées fractions génératrices des frac­tions périodiques équivalentes.

. B. - Conversion des fractions périodiques en fractions Ol'Cli­n?,r~s ou recherche des fractions génératrices des fractions pé-1'l0dlques.

N.-B. ----: N~us ne don~ons pas ici une démonstration rigoureuse, maIS bIen une . demonstration siInple et suffisante pour le 4e degré. . Premier cas. Soit la fraction périodique simple:

0.12 12 12 12 12 ... Soit x la fl'action génératrice

1) x = 0.12 12 12 12 12 ... Multiplions par 100 2) 100x = 12, 12 12 12 12 ... Soustrayons 1 de 2 et nous avons 99x = 12

12 donc x =-

99 . Coz:-clusion. - La fraction génératrice d 'une fraction pério­

dIque sImple est une fraction ordinaire qui a pour némérateur le nombre formé par la période et pour dénominateur un nom­bre formé d'autant de 9 qu'il y a de chiffres dans la période.

Deuxième ca,s~ - Soit la fraction périodique' mixte , , " 0.12 374 374 374 374 374 ...

La fraction 'génél:atrice x=Ü.12 374 374 374 374 374 ....

1) Le nombre de périOdes étant infini, nous faisons abstraction de la dernière période lors de la soustraction, afin de ne pas ' com­pliquer la démonstration. ,

- 151 -

Mùltiplions par 100; 1) 100x = 12.374374374374 ... Multiplions par 100,00b; 2) 100,000x = 12374.374374374 1)

Soustrayons 1 de 2 ; 99900x = 12374 - 12 12374 -12

x=-----99900

Conclusion . - La fraction génératrice d 'une' fraction pério­dique mixte et une fraction ordinaire qui a pour numérateur le nombre fonné par la partie non périodique suivi d 'une période, moins le nombre formé par la partie non périodique, et pour dénominateur un nombre formé d'autant de 9 qu'il y a de chif­fres dans la période, et suivis d'autant de 0 qu 'il y a de chiffres dans la partie non périodique.

~ N os P ages '~~0) ~ COURRIER DES INSTITUTRICES ~

============================ SOMMAIRE. - Rêv e. - Le meilleur des mentors. Le voyage. - Pharmacie de la maison. - Pensée.

---c3 Rêve (5"­

Comme l'étoile cm ciel, en l'orbite de feu Accomplit sans repos sa course fulgurante, Moi , pauvre atome, né d'un vouloir de Inon Dieu, J'aurai ma place aussi dans son œuvre géante.

Venai-j e des humains m'appeler clans le soir, COllune un phare sauveur SUI' une l'ive heul'euse, Ou bien, tl'ompant leurs vœux et lâche à mon devoir , Serai-je l'astl'e éteint clans la nuit ténébrellse ?

Sel'cLÏ-.ie utile à tous ou fatal à quelqu'un? Serai-je le figuier cm stérile feuillage? Serai-ie le fruit mûr qui clonne cent pour un? Le sous-Inarin brutal, la barque ou beau sillage?

Je l'ignol'e, Seignel.l1: : mon sort est dans ta main; Mais le destin n'est pas chose fatale, Et mon rêve a bien clroit cle fail'e S011. chemin Pour trouver en Toi seul sa réponse finale.

Mon rêve est d'être artiste et pal' là cl' être saint, Cal' le Beau, c'est le Bien, la route lumineuse; C'est d'acheveI' en moi ton éternel dessein, Réalisant ton ptcm d'une âme géné!'euse.

Page 14: L'Ecole primaire, 15 mars 1928

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Artiste, pOUl' chanter, comnle un prêtre à l'autel, Un cantique d'amour et de reconnaissance. Accompli1' dans ma vie, et devant l'Eternel, Le rite adorateur de l'univers immense.

Etre saint, pour monter vers mon Dieu, sans détow', Pour aller, en son nom, vers les hommes, -mes frères, Portel' aux plus lointains, l'Evangile d'amour Et le pain de la foi, la douceur des mystères.

Mon beau rêve, Seigneur, c'est l'esquif dans le port, C'est l'oiseau prisonnier, voyant le vent qui passe ... Mais la barque et l'oiseau, pour guidçr leur -effort, N'attendent, tous les deux, qu'un souffle de ta grâce.

Erne.

Le meilleur des mentors Lq. conscience est pour nous un guide sans égal. Elle remplit d'abord le rôle de lumière; elle nous renseigne sur

la valeur morale de nos pensées, de nos déterminations, d-e nos actes. « Voilà ce qui est bien - Voilà ce qui est mal », nous dit-elle sans hésitation; elle nous fait discerner la vertu du vice, le bon chemin du mauvais.

Elle n'a même pas besoin d'être consultée pour fournir cette lu­mière nette et précise, elle opère pour ainsi dire automatiquement; dès qu'elle est amenée à considérer une idée ou un fait, elle projette sur lui son rayon et tout de suite elle en fixe la qualité. Son juge­ment est sûr, il ne se laisse pas séduire par les arguments de - la paresse, de la passion; il est prononc-é ep toute indépendance et en toute impartialité.

Un tel secours est extrêmement précieux pour nous, il nous rend d'incomparables services, nous évitant les tâtonnements et les erreurs d'appréciation.

Mais la conscience fait plus, elle ne se contente pas de poser une froide étiquette sur tout, _ elle exerce aussi un commandement; après nous avoir montré la bonne voie, elle nous y pousse très impé­rieusement: « Fais ceci - Evite cela », nous dit-elle, et son ordre est pressant; elle le répète avec ténacité, comme pour nous soutenir si nous l'exécutons, et, si nous y contrevenons, elle le répète encüre, comme pour nous rappeler au bien.

Après avoir montré le devoir et réclamé qu 'il -soit accompli, la conscience ne se désintéresse pas de l'at.titude que nous avons adop­tée devant son indication: si nous avons été soumis vis-à-vis d'elle, la récompense ne se fait pas attendre, elle nous inonde d'une douce satisfaction, d'une légitime fierté; au contraire, avons-nous été re­belle? La punition survient; c1est un malaise intérieur, une honte secrète, un regret intense qui nous laboure l'âme, .

- 153 -

La conscience assure, donc, cümplètement la fonction de mentor r _

puisqu'elle déSigne -nettement le devoir, qu'elle impose l'obligation de le remplir et, enfin,- qu'elle applique la sanction à notre obéissance. ou à notre révolte et, par cette sanction, -nous prépare à persévérer dans la vertu qui nous vaut une telle .ioie intérieure ou à éviter le vice qui nous attire de si cr~els -remords.

Véritablement, pour les âmes de bonne volonté, ce guide infaillible est un trésor incomparable; tous leurs efforts doivent tendre à le garder. Car la conscience demeure plus ou moins vivante, plus ou moins agissante, suivant la manière dont elle est traitée.

Elle juge clairement; mais, quand on est résolu à la faire taire,_ à laisser les mauvais penchants parler plus haut qu 'elle, on la réduit au silence; quand on résiste souvent à son impulsion, on détruit sa force; enfin, quand on ne cesse de professer une indifférence cyni­que à l'égard des reproches qu'elle fait entendre au dedans, on se blinde contre le remords.

Et ce maître clairvoyant, sage, finit par abdique!'; il semble mort, parce qu'il n 'agit plus, parce qu'il est destitué.

Au contraire, nous pouvons donner à notre conscience une vi­gueur extrême en l 'écoutant avec déférence et docilité.

Chaque fois qu'elle a à jouer son rôle d'indicateur, laissons-la opérer en pa ix; laissons-lui le calme pour juger, n 'essayons pas de presser sur elle, de la noyer dans un déluge de considérants étrangers à la morale.

Puis, quand elle nous a montré de quel côté nous devons nous diriger, acceptons sa décision, allons suivant la direction qu'elle nous désigne, sans amertume, sans marchandage, sans compromission.

Si par malheur nous avons résisté à son influence et pris le mau­vais chemin, ne bravons pas sa condamnation; acceptons le blâme intime qui nous humilie et entraînons-nous au ferme propos qui doit en être la suite logique.

Notre conscience peut être déformée par nous-mêmes, par notre veulerie, par la crainte que nous inspire l'effort vertueux; elle peut ètre aussI, déformée par les influences pernicieuses, par les conseils de tous ceux qui nous engagent à jouir de la vie, à saisir les occa­sions de plaisir et de profit que les m alins ac.caparent au préjudice des honnêtes, par les sarcasmes aussi de ceux qui , faisant mal, n_e veulent pas sentir à côté. d'eux des gens essayant de faire bien.

Enfin, les lectures peuvent exercer une action décisive sur notre conscience; nous nous défions parfois d 'un interlocuteur, son élo­quence sent aisément la partialité; tandis que les idées exprimées dans un livre ont une apparence de calme, comme ce livre lui­même,- dont les caractères bien alignés, se détachant fFanchemeent sur le blanc du papier, semblent contenir de la loyauté et de la modé­ration; le travail de persuasion de l'auteur est discret, pénétran~, tout en profondeur.

Page 15: L'Ecole primaire, 15 mars 1928

---- - - - -- - -~ - - ~ - /

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Pour sauvegarder la droiture ' de notre conscience, fuyons les mauvais livres, leur perfidie est presque sans contrepoids.

A vee une conscience sûre, à laquelle nous laissons toute autorité, comment ne 1Jas nous diriger vers; la perfection?

I:-e voyage Je t'ai emportée, Iua petite fille, je t'ai emportée dans ma

patrie. Je suis passée avec toi sur ses routes ensoleillées, et comme c'était le temps où ' fleurissent les genêts et les roses sauvages, on aurait dit que mon pays voulait te faire fête avec tous ces bouquets répandus autour de toi. Il riait. Il se couronnait de vertes vignes et de cerises rouges. Il était . beau, plus beau que jadis au temps de ma jeunesse, lorsque je l'aimais sans com­prendre ,encore ses charmes, lorsque je ne rêvais pas autre chose que de rester toujours. sous son ciel doré.

Tandis que .le t'emportais dans mes bras, à travers les grands paysages, .le me demandais si c'étaient eux qui se don­naient à toi comme une grappe bleue que l'on savoure, ou si c'était toi que .le donnais à eux, comme une rose à peine fleurie sur un rameau que rien n 'a jan~ais détaché... .

- Regarde, regarde, disais-je d'une voix aussi chaude que le vent; regarde ces chèvrefeuilles échevelés sur les talus de glaise rouge. Regarde ces Iuonstrueux aloés dont le grand Inât rigide va fleurir. Regarde, sur ces foins coupés, la lumièrè am­brée qui ruisselle, et sur ces jeunes vignes, regarde la brise char­rier pêle-mêle des abeilles et des pollens ...

Toi, tu ouvrais, sur les beaux horizons tes paupières éblouies, et tu soupirais, silencieuse, comme je le faisais ' jadis lorsque .le ne savais pas encore les mots de la joie et de l'émerveillement...

- Ecoute, t'ai-je dit plus bas, écoute comme la brise chante sous la feuille pointue des platanes 1. .. Il y a bien aussi quel­que cigale collée au tronc, et toute vibrante d'un perpétuel fré­n~issement 1. .. et puis, il y a la mer soyeuse avec son murmure animé, il y a les passereaux, il y a les rainettes, il y a les mille bêtes des herbes et leurs voix mêlées ... il y a les torrents ...

- Toi, tu te taisais pour reconnaître chaque bruit distincte­ment dans la grande rumeur · confuse, et tu penchais ta tête brune sur ton épaule fraîche, avec ce geste d'oiseau aux écoutes que j'avais moi-même autrefois ...

'" Lorsque nous avons eu rôàé longtemps ensemble sous les oliveraies et sous les grands lièges, .le t'ai emmenée, ma petite fille, vers les hauts cyprès qui veillent des tombeaux. Il y a là un carré de terre sous -lequel dorment des cendres d'où, flamme éperdue, j'ai jailli. Il y a ici, Inorte, la racine d 'où est né l'arbre qui t'a portée, fleur matinale 1. .. Ah ! sous cette terre il y a quel­que chose qui retient mes pieds frémissants, et qui me tounnente et m'attire jusqu'à ce qu'en pleurant .le tombe à genoux ...

- 155 -

_ Regarde, regarde ... voici le lieu où toutes les joies de mon passé sont ensevelies ...

Toi, tu m'écoutais, toute rose, interdite de me voir un tel visage de douleur. Tes yeux se m,ouillaient, eux aussi, de la chaude rosée qui attiédit un peu les pierres des sépulcres .

... Et' comme je te prenais dans mes bras, ton regard a cher­ché le ciel, avec ce trouble douloureux, cette ferveur suppliante qu'avaient mes pruIlelles, jadis, lorsque je lue réfugiais contre le cœur de ma luère ...

M. BARRERE-AFFRE.

Pharmacie de la maison Le kirsch et le cognac sont des désinfectants du tube digestif, sauf

pour les ivrognes. L'alcool camphré peut remplacer 1. .... ' teinture d'iode pour tout pe-

tits enfants. Les frictionner avec un gani. imbibé d'alcool camphré. On peut aussi se servir d'alcool camphré pour calmer les rages

de dents. (Tampon d 'ouate imbibé d'alcool sur la dent malade.) L'alcool camphré peut, s 'il est appliqué à temps arrêter les pa­

naris. Dès le début du mal, entourer le doigt de coton hydrophile, puis d'un imperméable (toile C'irée, etc.), retenir le tout au moyen d'un bandage. Verser par le haut de l'alcool camphré de façon à ce que le doigt soit toujours humide, cela pendant trente-six heures consécutives. Par ce moyen, le panaris disparaît.

On se $ert aussi de l'alpool camphré contre les points tuberculeux. Frictionner jusqu'à ce que la peau devient rouge.

'. 'L:alcool pur et l'eau de Cologne s'emploient contre les boutons au visage.

La vaseline boriquée s 'emploie contre les gerçures et les coupures de la peau.

L'amoniaque anisée aide à l'expectoration des glaires. Elle s'ajoute à raison de 1 goutte par année d'âge dans une tasse de tilleul; mp,is il ne faut pas dépasser 20 gouttes.

Le bicarbonate de soude resserre les tissus. On s 'en rince la bouche quand les dents branlent.

Pour couper une indigestion, faire dissoudre du bicarbonate de soude de la grosseur d'une demi-noix dans un quart de verre d'eau tiède. Il guérit aussi le.s crampes d'estomac.

Le sel de Carlsbad est un purgatif. Il n'exige pas le jeûne. La poudre est plus forte que les cristaux. Dissoudre dans l'eau et boire à différentes reprises.

L'huile de ricin, purgatif, exige le jeûne, la chaleur, la tranquillité. Pour que l'huile de ricin se prenne plus facilement, mettre un

peu de jus de citron au fond de la cuillère et par dessus t'huile. La camomille est écb.auffante .. Ne pas laisser cuire, mais ·mettre

la camomille dans la passoire et verser l'eau bouillante. La camomille soulage quand on a des crampes d'estomac.

Page 16: L'Ecole primaire, 15 mars 1928

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On se sert de la 'farine de lin pOUl' faire des eataplasmes, très utile 'Pour guérir des froids ou aider à mûrir des abcès. '.

On doit toujours faire de grands cataplasmes. Mettre la farme de lin seulement quand l'eau bout et laisser cuire un moment en ayant bien soin de remuer. Etendre ensuite sur une toile claire et fermer la toile au moyen d'épingles de sûreté. Ne pas refroidir le cataplasme 'avant de l'appliquer. Mais pendant qu'il est trop chaud, mettre plu­sieurs double.s de laine (châle, écharpe) entre le corps et le cata-

plasme. Si ont doit faire un cataplasme moutardé, avant d'étendre le lin

cuit sur la toile, on saupoudre cette dernière de farine de moutarde. Les personnes exposées aux attaqués d'apoplexie devraient pren­

dre 2 fois par semaine des bains de pieds moutardés. On m et la fa­rine de moutarde dans un sac de gaze que l'on trempe dans l 'eau

froide. L'huile mentholée pour personnes qui ont des dispostiions au

rhume de cerveau. Mettre 4 ou 5 gouttes dans le nez 3 ou 4 fois 'par jour.

L'Eucalyptus s'emploie pour les « Sanitas» en temps d'épidémie.

Les cristaux de menthol (4 ou 5) se mettent dans un pot avec une poignée de sureau ou de tilleul et 1 litre d'eau bouillante. Aspirer cette vapeur (en ayant soin de mettre les yeux à l 'abri) quand on a un rhume.

Le liniment oléo-ealcaire se prépare ainsi: on fait dissoudre 2 ou 3 cuillerées de chaux dans un litre d'e'au. Laisser déposer puis mé­langer cette eau avec de l'huile de lin, à parts ' égales.

Ce liniment s'applique sur les brûlures de premier et deu~ième 'degrés pour calmer les plus grandes douleurs.

Si la brûlure a produit des ampoules, il faut les per cer avec une aiguille flambée à la lumière bleue de la flamme. Tamponner avec du coton hydrophile puis appliquer un linge imbibé de ce liniment et le recouvrir d'un imperméable.

Ce remède n'est pas un désinfectant; c'est pourquoi, les plus grandes douleurs passées, on désinfecte la brûlure avec de la pom­made boriquée.

Pour les brûlures profondes, il faut appeler le docteur. Le dermenthol est une poudre 'cicatrisante. Une cartouche à pansement comprend: 1. Un paquet de coton hydrophile; 2. des épingles de sûreté; 3. des bandes,

1e tout stérilisé et applicable à sec.

En cas d'entorse, % d'heure de douche froide. Compresse d 'eau de 'Goulard, puis bandage. On peut aussi faire des applications de Wald­meister chauffé dans du vin blanc. Ce remède fait désenfler prompte­ment, active la circulation du sang et prOduit toujours d'excellents î'ésultats.

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Pensées Ai-je vécu, Seigneur? Où sont les yeux màins triste's' Pour 's'être reposés sur les regards des miens? Où sont les douloureux qUe ma ferveur assiste? ' Où sont les désolés' dont le songe résiste Au désespoir depuis que ma voix les soutient? ...

Opinions

Avis très sage

A la suite d'une enquête. ordonnée par la Direètion de l'Ins­h'uction du Canton de Berne au sujet de l'activité excessive de certains membres du personnel enseignant dans le domaine pro­prement politique, la dite Direction s'exprime comme suit: « Pour ce qui concerne tout d 'abord la question de pI'incipe de . l'activité politique du corps enseignant et de ses effets sur l'école, il y a lieu de considérer que, comme tout autre citoyen, l'instituteur a le droit de s'occuper de politique hors de sa classe, selon ses convictions. Il sera néanmoins bien inspiré, à ce sujet, de ne point oublier la situation de confiance particulière qu'il occupe en tant que maître, par rapport aux parents de ses élèves. Comme l'expé­rience l'apprend, une intervention extrême et passionnée dans les compétitions politiques peut lui faire perdre, chez les parents qui' pensent autre'ment que lui, une partie de cette confiance et de cette, sympathie qui facilite au pédagogue sa tâche difficile. Il appa­raît dès lots désirable à la Direction de l'Instruction publique et aux autorités scolair es en général que, dans 1''Ïntérêt de l'école" le maître ne participe pas aux luttes politiques d'une façon vio-· lente et propre à blesser les citoyens de conceptions ' différentes. Aussi la Direction de l'Instruction publique ne peut-elle que re­commander au corps enseignant d'observer dans ce· domaine une juste modération. Mais, ce faisant, elle ne saurait porter atteinte au droit légitime des maîtres d'user de leur liberté politique hors de l'école, quand ils remplissent leur devoir envers celle-ci. »

E xtrait de l'Annuail'e de l'Instl'uction publique de 1927., (Rapport de IVL Marchand.)

miettes pédagogiques

Saint-CYl'an répétait souvent: « A la mort, une des 1)lu's gran­des consolations que nous puissions avoir est, si nous avons con-, trib~é à la bonne éduc~tion de que~que enfant, què cet e~ploi. suffIt pour sanctifier une âme. » /

, '!~ * * Rollin : « Le grand art et la grande habileté est de savoir ins-· . '

Page 17: L'Ecole primaire, 15 mars 1928

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. me' dl' ocres mêmes la confiance dans l'effort. )l - « Les puer aux . ~ 'f préceptes qui regardent les mœurs d?lVent etre courts ~t VI S et 1 ' omme un trait c'est le plus sur moyen de les faIre entrer ances c , E ' d t' 1

dans l'esprit et de les y faire demeurer.» n e uca IOn, a que~-tion finale n'est pas: « Qu'est-ce que les enfants savent? » maIS « Qu'est-ce qu'ils seront dans la vie? »

*:t: .~P

Si le chemin de l'école ne dépasse pas 1500 luètres, il est favo­rable à la santé.

Platon: « Former l'enfance est une chose divine. - Si l'en­fant n'a reçu qu'une formation insuffisante ou mauvaise, il de­vient le plus farouche des anim:ux que produit la terre. »

*~,.. * Les Anciens appelaient les écoles « les séminaires ou pépi­

nières . de l'Eglise et de l'Etat, les noviciats du christianisme, les ég1ises des enfants. »

Quelques mots sur le bolchévisme Les mots « communisme» et « bolchévisme» sont pratiquement

employés l'un pour l'autre. Le bolchévisme, en tant que méthode po­litique et que système d'organisation et de tactique est l'union étroite, indissoluble, entre une direction stratégique hardie, rationnelle et clairvoyante, vrai état-major de la Révolution, et l'enthousiasme des masses ouvrières qui s'élancent au combat contre le capitalisme et la société bourgeoise. Son but est de créer un parti communiste mon­dial, homogène et compact.

Le bolchévisme est une vraie foi nouvelle qui enflamme le cœur de ses adeptes ' et .qui discipline leurs volonté~ pour la conquête dll

monde. Cette Foi a po';!r base le communis!l1e marxiste.

Les ouvrages du Juif Karl Marx ont été interprétés., mis en forme plus claire, complétés et appliqués par le Russe Lénine. Le marxisme est dominé par la théàrie matérialiste de l'histoire, théorie en vertu de laquelle toute l'activité humaine, religieuse, littéraire, politique et sociale, est déterminée par les seules conditions économiques, par la technique de la production et des moyens de transport. D'une pareille conception découle ce principe, que toute l'histoire et toute sociéte se résument dans l'antagonisme de deux classes ennemies: la bour­geoisie qui possède et le prolétariat qui né possède pas. Il suffit 'de transformer l~ propriété privée en propriété collective, et de trans­férer celle-ci au prolétariat pour qu'aussitôt surgisse une société, une humanité nouv~lles, pour que le paradis terrestre succède à .l'enfer, pour qu'y fleurissent l'ordre . véritable, la justiee, la frate.l'nité, la li-

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berté sans limites ... Le Capital est socialisé, tous les moyens de pro­ducÜon et de transport appartiennent à l'Etat bolchéviste et l'Etat­propriétaire, l'Etat-patron répartit les produits au prorata du travail et des besoins de chacun. Le marxisme accorde, au moins en appa­rence et dans un but démagogique évident, au travail manuel une importancé exagérée au détriment des travailleurs intellectuels. Les communistes préténdent que, dans leur cité unitaire, l'ouvrier, soli­daire du corps social, subordonnera, nécessairement, mécanïquement, son intérêt particulier à l'intérêt général. C'est là une utopie, que l'expérience russe suffit à juger. Il n'est au pouvoir d'aucun faiseur de système de changer la nature humaine. Il est évident que, sans la concurrence, sans l'intérêt personnel, vital, que chacun sent à pro­duire pour vivre, nourrir sa famille, assurer l'avenir de ses enfants, s'élever soi-même dans l'échelle sociale, il est évident que la pro­duction diminuera; que, .par conséquent, le prix des choses augmen­tera, que le progrès s'arrêtera, que le bien-être de l'ouvrier lui-même deviendra impossible et que la civilisation tout entière rétrogradera vers la barbarie.

Si le communisme n 'était qu'une doctrine économique, seientifέque, il auraIt peu d'emprise sur les masses. Mais il est aussi une véri­table religion, il a sa « mystique », et son mysticisme inspire une disci­pline politique des plus complètes et des plus efficaces, la discipline des bataillons du prolétariat. Dans cette mystique prolétarienne, il ne s'agit plus d'idées pures, de concepts abstraits, mais de sentiments et de passions qui s'emparent de l'individu tout entier et le poussent à tout sacrifier à la cause. Il ne s'agit plus de liberté, mais au con­traire d'une servitude consentie, d 'une obéissance passive et com­plète au parti. Les cerveaux saoûiés par l'alcool des grands mots, les cœurs, enflammés par de paradisiaques espérances, ne tendent plus qu'à la « lutte finale» qui va régénérer le genre humain.

Le communisme a déclaré la guerre à l'au-delà; il a fàit de l'athéisme une institution d'Etat avec sesécQles, ses bibliothèques, sa presse, ses spectacles cinématographiques, ses agitateurs. « Tout dieu, a déclaré Lénine, si 'pur, si idéal soit-il, est un mensonge. C'est l'opium du peuple; l'idée de la divinité représente l 'ignominie la plus dan­gereuse, la contagion la plus abominable ... » Le bolchévisme en v~ut surtout à la doctrine chrétienne de la résignation, qui enseigne aux malheureux à supporter leurs souffrances, avec l'espoir d'une ré­compense dans la vie ultérieure. Le chrétien eonvaincu est un homme perdu pour la cause, c'est la raison de la haine du communisme pour toute religion chrétienne, surtout pour le catholicisme.

« L 'ouvrier doit rester un révolté, dit Lénine. En endormant sa souffrance pal' des soins, en le secourant, en le soignant, la charité bourgeoise ne poursuit que des buts égoïstes et cherche à le lier par une reconnaissance. imméritée. Or l'ouvrier ne doit aucune reconnais­sance, car il ,a droit, non seulement à tout ce qu'on lui donne, mais

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,encore à tout ce qu'on lui refuse, c'est lui qui devrait être maître absolu du capital: il lui appartient.» Il est aisé de eonclure de ce qui précède, qu'en aucun cas, on ne peut compter ' sur la bienveillance ·du communisme pour les tentatives d'améliorations sociales, ni se . flatter de s'en approcher assez pour désarmer son hostilité. Bien au -contraire, car les œuvres sociales retardent la révolution.

La déesse Humanité ne supporte aucun autre autel; elle relègue . aussi dans les. ténèbres les idées de propriété et de patrie. Elle s'at­taque de même, cela va sans dire, à l'autonàmie familiale, prenant le

.bébé au berceau pour lui ~aire sucer le lait èommuniste, supprimant l'autorité paternelle et l'autorité maritale, abolissant l'héritage et tout ·ce qui fixe les traditions, on peut dire que le communisme éteint les foyers ... Il en fait à ce point table rase que la loi russe actuelle bou­leverse l'état civil en autorisant les camarades à changer de nom comme bon leur semble. Pour ce prétendu progrès, on appelle les femmes à la resco'usse: « Il faut que la femme se révolte et détruise

' les vieilles traditions imbéciles ... qui la laissent encore à l'état de ser­·vage et de soumission ... Les communistes désirent que la femme se libère le plus tôt possible de son ' foyer, qu 'elle ne subisse le joug de la maternité que d 'une fa çon consciente et raisonnée, qu'elle participe avec tous les droits de l'homme à l'activité économique et à la vie politique du pays ». (( Humanité », du 8 nov. 1924.)

Le mariage se dissout par consentement mutuel sans instance ju­diciaire. C'est l 'enfanee qui porte les plus terribles conséquences. D'a­près la « Pravda» elle-même, des millions d 'enfants sont abandonnés, des armées entières se réfugient dans les villes, loqueteux, affamés, grelottant de fièvre ... »

Pour le communiste, la guerre civile est une guerre sainte et il 's 'agit de la mener, par tous les moyens, jusqu'au bout. « Nous som­mes, disait le député Doriot, le 9 décembre 1924, pour la violence qui fait avancer l'histoire. Les bourgeois recourent à la violence pour faire reculer l'histoire. Voilà ce qui nous sépare.» - « L'implacabilité dans la guerre civile est la plus haute humanité révolutionnaire parce que, assurant le succès, elle raccourcit par là-même la voie pénible de la -crise.» (Trotsky.)

Voie pénible, en effet: non seulement, il faut enlever aux ennemis de la Révolution toute liberté, monopoliser la presse et l 'enseignement, faire du vote, de l'éligibilité et des fonctions publiques les privilèges des prolétaires, mais il faut encore extermi~er tous ceux qui résistent ·ou qui sont suspects au nouveau régime.

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La question sociale

Les réginles du travail IX .

" « La religion chrétienne, qui ne semble avoir d 'autre ·ob.iet que la félicité dans l'autre vie, fait encore notre bonheur dans celle-ci »

MONTESQUIEU .

But essentiel de toute organisation du Travail. - L'hon'lme ne travaille pas seulement, comme beaucoup le croient trop fa­cilement, pour gagner le plus d'argent possible et en faire gagner le plus possible à son patron. Il n'est pas une machine. n' a une âme, une destinée à atteindre, un rôle à jouer dans la société. Il s'ensuit qu'il doit, par son travail, supvenir aux besoins de son corps, Inais sans l'épuiser, et garder au milieu de ses occupations le souci de son intelligence à cultiver, de sa famille à élever, de la société à servir, de Dieu à prier.

Toute organisation, tout régime du Travail, qui ne respec­tera pas ces nécessités essentielles, sera défectueux et contraire au progrès. Voyons ce qu'il en a été à cet égard dans le passé et puis ce qu'il en est aujourd'hui.

LES TEMPS ANCIENS Le Paganisme était caractérisé non seulement par le culte

rendu à des idoles, à des faux dieux, mais encore par une orga­nisation de la société basée principalement sur le triomphe de la force et où les droits des faibles, des pauvres, des vaincus étaient .souvent foùlés aux pieds, brutalement. De là l'esclavage, dont la disparition ne fut obtenue que lentement et progressivement par l'Eglise ..

L'Esclavage. Un régime de tl'avail injuste et inhumain. - Au temps du

paganisme, les travaux les plus communs et les plus durs étaient généralement réservés aux esclaves, par exemple: les petits mé­tiers, les défrichements, les luttes dans les arènes , les transports par bateaux et par caravanes, la construction des routes, des ca­naux, des ponts, des monuments innombrable~, l'entretien , des maisons et des villes, etc.; être esclave, c'était appartenir à son maître comme une chose ou un animal, pour son service ou son plaisir. Cet état misérable nous semble contre nature et pourtant il était tellement entré dans les mœurs païennes qu'il l:ecevait l"approbation des grands génies, des meilleurs esprits du temps , comme par exemple, Aristote, ce grand philosophe grec, qui ne craignait .pas de dire: « L'esclave est une propriété animée et un instrument supérieur à tous les autres . »

En conséquence, les esclaves, qui étaient le plus souvent des fils d 'esclaves ou des prisonniers de guerre, viv?-ient habituellement dans les conditions les plus misérables. Il y avait des marchés d'esclaves,

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où les marchands vendaient des ;tlOmm,es, des femmes, de's enfants, plus ou moins cher, suivant la force, la ~eaut,é, l'âge~ tout comme les marchands de best~aux vendent lew's , betes a, l~ f?lre. Les esclaves n'avai~nt point de nom, mais un surnom qm etaIt comme un nu­méro. Ils n'avaient point de famille, car la femme, et les enfants d~ l'esclave appartenaient au maître qui pouvait en faIre ce ~ue bon lm

mblait· ils ne possédaient rien à eux, pas même la vIe, car leur se , , " maître pouvait les maltraiter, les vendre, les donner a SOI~ gre~, VOIre les tuer sans . avoir de compte à rendre à personne. Les lOIS palennes ne s 'occ:upaient pas 'plus des esclaves' qùe nos lois actuelles , ~e ,. s'oc~u: peht des bêtes; moins encore, puisq~e nous avons un,e legI~latlOn qui' interdit de maltra iter les animaux.

Et c 'était là le sort d 'innombrables êtres humains! Les riches, en petit nombre, faisaient faire tout le travail de leurs propriétés, souvent immenses, et (aisaient fonctionner leurs entrepnses de commerce et de fïRance par un peuple d'esclaves; beaucoup ,de luaîtres en possédaient 1000, 2000, certains jusqu 'à 4000, 10000 et même plus.

L'œuvre secourable de l'Eglise. - L 'Eglise cependant, dès sa naissance conformément aux leçons de Notre-Seigneur Jésus­Christ; chercha à guérir cette hideuse plaie de l'esclavage. Jésus­Christ, en effet, avait appris au monde que les hommes sont t.ous frères, tous descendants du mêlue père, sorti des mains de DIeu, et ' qu'ils ànt tous une âme semblable, destinée au même bonheur du ciel. Il avait du mên1.e coup montré combien l'esclavage ré­pugne à la dignité de l'homme, combien il était injuste de priver les esclaves de leur liberté, de les rabaisser au rang des ammaux dome~tiques. Et puis, nous l'avons vu dans le précédent enh~etien, Notre-Seigneur avait aussi réhabilité, par son exemple personnel ,.. le travail manuel. Toutefois l'esclavage ne disparut pas immédia­tement en enlier après la mort du Christ .: il subsista encore pen-dant des ·siècles . '

Deux raisons principales expliquent ce fait. D'abord l'Eglise, à son commencement, n 'était pas assez puissante pour imposer une vé­ritable révolution à des Etats dont la population, en très grande ma-·· ,iorit~, était encore si profon'démentattachée aux mœurs du paga-­nisme. Ensuite l'Eglise l 'aurait-elle pu, il eût. été ~prudent qu'elle le fît: les ' esclaves, traités en bêtes, avaient perdu en partie le sens de leur digriité 'humaine; Hs étaient devenus le plus souvent très gros- ­siers ' ~t s 'abindonnaient" à la débauche ' et au vice; avant de leu1' donner la liberté, il était nécessaire de leur apprendre à vivre ,en homrries. Supprirrier l'esclavage d'un seul coup, c'eût été jeter le monde dans des troubles et des dé,sordres pires que le mal même · qu'on voulait déracin,er.'

, Même au milieu des persécutions, l'Eglise multiplia ses efforts pour le faire disparaître. Beaucoup des premiers chrétiens , et des premières chrétiennes étaient des esclaves. Elle' encouragea

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les riches qui se convertissaient à donner la liberté à leurs escla­ves' elle racheta avec les aumône~ Qes fidèles ceux qu'on vendait ,sur' les marchés et les libéra; elle poussa les empereurs chrétiens à adoucir les dures lois qui pesaient s'tu les esclaves et à faciliter leur libération; elle adrrlit les esclaves dans ses églises et à la table eucharistique sur le même rang que leurs maîtres; au commence­ment du Ille siècle, un ancien esclave libéré devint même, chose extraordinaire, pape: ce fut saint Callixte 1er; surtout elle mon­tra par l'exemple de ses moines , qui s'engageaient à ti'availler de leurs mains, en quelle haute estime elle tenait le travail et qu'elle l'égalait presque à la pri~re.

Le Servage.

Un premià progrès. - Mais l'Eglise était impuissante à faire disparaître en quelques siècles les mœurs païennes. Cependant, peu à peu l'esclavage recula devant le servage d'abord, qui recon­naissait dans une large mesure la dignité humaine et la liberté personnelle, puis devant la vraie liberté elle-même.

Le servage était encore un état misérable, sans doute, mais déjà bien supérieur à l'esclavage. Les serfs, l'épandus dans les campagnes, dépendant des seigneurs et des abbayes, avaient ~es

.droits indispendables : ils pouvaient fonder une -famille, posséder de l'argent et se libérer luoyennant rachat. Toutefois, ils étaient fixés à la terre qu'ils cultivaient et changeaient de maître quand la terre changeait de propriétaire. Vers le Xe siècle, l'influence de l'Eglise amène de nouveaux adoucissements: le serf devient ,vilain. Vilain revient à dire : campagnard, paysan; car le vilain est celui qui habite une villa, mot latin qui désigne une ferme, une maison de campagne. Le vilain n 'a plus à payer au seigneur qu 'une redevance comparable au loyer du fermier. Bientôt, il sera assez considéré et assez indépendant pour pouvoir jouer un rôle dans le mouvement populaire qui aboutit à fonder les Communes; il siégera lui aussi dans les assemblées communales. Enfin, il deviendra peu à peu propriétaire de ses terres qu'il achète .

TEMPS MODERNES

Depuis le .Moyen Age, et de nos jours tout particulièrement, on peut dire que le régime de travail le plus habituel et à peu près universel est le régime du salariat. C'est vrai surtout du travail qui se fait dans les villes, dans l'industrie.

Le Salariat.

Le régilne du libre contrat. - Dans quelques années, plu­sieurs d'entre vous seront devenus des ouvriers habiles ou des

-employés expérimentés et entreront chez un patron; ils fixeront avec lui le prix moyennant lequel ils travailleront pour lui. C~ prix convenu entre le patron et l'ouvrier, c'est le salaire; le

. salariat est le régime où le patron paie par un .. salaire, le plus', généralement en argent, 'le travail que fournit l'ouvrÎer; après

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quoi l'objet ou le produit fait par l'ouvrier. appartient 'en entier au patron, qui le ·vend ou le cède comm~ y l'entend.. ,

Or il est remarquable que plus ce regime du salanat s est éloi~né des tr~di~ions et ?~ l'esprit dl!- p~ganisme, ?l~s- il, s'est inspué des prInCIpeS chretIens', et InOlns Il a donne heu a des duretés et à des injustices. Au contraire, plus on a oublié dans les relations' et les contrats entre patrons et ouvriers la justice et la charité qu'exige la religion, plus la situation des travailleurs a empiré. Et ceci encore est une pteuve dè la vérité, de l'excellence· des principes · chrétiens.

Une pl'ériode florissante d)ol'dl'e chrétien. ----.: Il y a une époque de notre histoire où le christianisme a tout pénétré, la vie individuelle et la vie sociale: je veux parler du temps de saint Louis, du XIIIe sièc.1e chrétien. Jamais peut-être la situation du travailleur, du compagnon) comme op disait alors, véritable sa­larié,. payé par son patron comme la majorité des ouvriers d'au­jourd'hui, ne fut plus douce. En ce temps-là, il n 'y avait pas, comme à présent, de grosses manufactures et d'énormes usines , mais simplement de très nombreux petits métiers familiaux. L'ouvrier gardait alors avec son patron - appelé maître à cette '

. époque - des rapports qui avaient quelque c!10se de fraternel , puisqu'il passait, sa journée avec lui, travaillant sous le n1êlne toit, logeant le plus souvent dans sa maison et niangeant à sa table, et qu'il pouvait aspirer quelque jours à devenir son égal.

En effet" après un apprentissage plus, ou moins long selon le métier, l'apprenti devenait ouvrier. Ensuite l'ouvrier pouvait devenir maître à son , tO~ll" . POlU: cela il fallait qu'il eût réalisé assez d'éco­nomies pour acheter les outils néeessaires à sa profession, subi avec succès un ~xamen et pr04uit devant ses juges un ouvrage satisfai­sant, qu'on appelait le « chef-d 'œuvre ».

Travaillant ensemble, ' soumis tous aux habitudes, aux obliga­tions qu'impose une , professi~n à tous ses membres, maîtres, compa.,. gnons et apprentis se groupèrent par profession et constituèrent des associations nommées corporations.

Les Corporations. - En France, même au telnps où les Cor­porations furent les plus florissantes, elles ne groupaient pas, il s'en fallait de beaucoup, tous les travailleurs. Cependant, grâce au vigoureux esprit chrétien de cette époque, elles rendirent de très grands services, firent régner la paix sociale et aidèrent ainsi beaucoup au développement de l'industrie et du commerce.

Sous des règles communes, dont l'observation était con~ trôlée pat des jUl'~S de métier, la Corporation défendait les inté,· rêts de ses membrés vis-à-vis des autres corpotations. Elle étaIt une protection poui- eux. Elle défendait aussi les intérêts du pu­blic. Des assemblées générales de maîtres et de compagnons se tenaient {ous lés ans, réglant toutes les questions intéressant ,la profession. C'est ainsi que la clause d'un contl'at de travail publi­quement conclu, qui devait être conforme à la .iustice~ qu'on avaif

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juré d'ohserver « sur les saints », c'est-à-clire sur les reliq~les , ne pouvaient être violées sans qu'une conc1am.nation pécuniaire ne fût prononcée. La durée de travail 'était strictement litnitée, le repos du dim.anche rigoureusement observé; si certaines journées de labeur, l'été, étaient longues , le grand nombre des fêtes chô­mées faisait que, dans une année, l'ouvrier d 'alors n 'avait pas fourni plus de travail ni même autant, parfois , que celui d 'au­jourd'hui.

A côté de la Corporation qui groupait les travailleurs, patrons, ouvriers, SUI' le terrain professionnel ) la Confrérie les groupait SUl' te terrain religieux.

Dans la Corporation on s'assemblait pOUl' défendre se:::; intérêts ll e travailleur, patron ou ouvrier; dans la Confrérie on s 'assemblait en tant que chrétiens, membres d'une mème profession, pour s'édifier mutuellement. La CoIifrérie avait son saint protecteur, sa ba.nnière derrière laquelle on suivait les processions sa chapelle qu 'elle ornait et où elle avait des fêtes religieuses spéciales. Dans certaines villes de France, comme Limoges par exemple, qui possède encore une cha­pelle des bouchers .. on trouve certa ins restes des a nci enn es coutumes. En outre, comme la Confrérie posséda it des revenus propres, qui pro­venaient de fondations faites par testament par ses m embres, elle assistait les pauvres de la profession; m êm e parfois, en son sein, se formèrent de véritables mutualités pour les secours en cas de mala­cbes, de décès, de chômage, etc ...

ComIne, d 'autre part, les règlements de métiers réduisaient les inconvénients de la concurrence et punissaient sévèrement la l'raude, vous cOlnprenez aisément que ce XIIIe siècle fut une époque d'harmonie et de paix sociales. C'est qu'en effet le senti­tnent de la justice, toute pénétrée d 'amour chrétien , qui réglait alors les rapports entre les homm es, n '[1 pas cessé d aller en per­dant de sa vigueur: corporations et confréries dégénérèrent pcu cl peu. Cette décadence fut surtout sensihle au XVIIIe siècle. Les rois cherchèrent à tirer des revenus des corporations, notammenl en leur vendant des privilèges; l 'esprit chrétien diminua petit ù petit dans les confréries; de nombreux c1hus se produisirent de tous côtés, s'aggravant toujours , si bien que la Révolution n 'eut pas grand mal à faire voter en 1791 une loi dite loi C]wpclier, qui décréta la suppression des corporations. Sous le prétexte de supprimer les abus de ces groupements, cette loi interdisait ù tous les travailleurs et artisans de s'associer, les obligeant aÜlsi à "ivre et à travailler isolés.

La période industrielle du XIXe siècle. - Or, une terrible crise luorale et matérielle allait ache, el' de bouleverser ù fond la société . L 'amour de l'argent et des jouissances tendait de plus en plus à remplacer l'amour de la justice, le sens de l'honneur; en conséquence, le niveau moral de la société continuai t à haisser , au Inoment même où le développement de la grande industrie, transformant toutes les coutumes du trav,ail, aurait exigé plus

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que jamais un vigoureux esprit chrétien. Avec les grandes exploi­tations qui se multipliaient, une place importante fut donnée aux machines, toujours de plus en plus perfectionnées et nombreuses: par là-même se trouvaient diminués considérablement le rôl~ personnel et la valeur professionnelle de l'ouvrier, qui n'avait souvent plus d 'autre tâche que de servir sa machine; hesogne rou.tinière ne développant ni l'intelligence ni le goüt du travail. Et seul, sans soutien , depuis que la Hévolution avait enlevé aux ouvriers le droit de se grouper, le lravailleur des usines , surtout, se trouva presque sans défense dans un monde où l'esprit chré­Lien et les conditions mênles de l'industrie ne modéraient plus, comme autrefois, la course après la fortune.

Dans la société si peu chrétienne de la Restauration et de Louis­Philippe, en Angleterre et dans cl'autres pays, on vit de terribles nbus; plus à l 'étranger peut-être qu 'en France, où lïndustrie grandit moins vite et où, fort heureusement, la grande majorité de la popu­lation resta longtemps à la campagne, cultivant, le plus souvent com­me propriétaires, les terres cle notre pays. Des ouvriers travaillent jusqu'à quinze et même seize heures par jour dans des condi­tions hygiéniques déplorables; des f emmes sont soumises au même régime; des enfants forcés de fréquenter l'usine à l'âge de quatre ou cinq ans et contraints aussi d 'acc'ÜTl1plir de longues journées. Il y avait, par exemple, dans le filatures de Ste-Marie-aux-1Vlines (France), (les dévideurs que quatre à six ans, qui faisaient quatorze heures de travail par jour.

La lutte contre les abus. - Cette lamentable misère, qui heureusement diminua peu à peu, excita la compassion d'un as­sez grand nombre d'hommes. Dure 11 t tout le XIXe sièc.le, il s 'en trouva dans toutes les classes et dans tous les partis pour pro­tester contre ces ahus et pour réclamer un grand nomhre d 'arné-1iorations et de transformations . Les catholiques doivent être fiers de compter à la tête de ces réformateurs le grand apôtre catho­lique qui dépensa tout son lTwgnifique talent d 'orateur et toutes ses forces au service des ouvriers , Albert de Mun. Beaucoup d'autres catholiques marchèrent ù sa suite et travaillèrent avec. lui à faire passer dans nos lois les idées chrétiennes, que le pape Léon XIII exposa si hardiment et si nettelTlent en 1891 dans sn lettre cm monde entier (encyclique) sur: La condition des ou­ul'iers. Quand vous aurez grandi, il vous faudra étudier de près cette lettre . Les collectivistes , qui parlen t si volontiers et si fort des services qu 'ils ont rendu au peuple, ouhlient trop facilement de dire ce que les catholiques, avec plus de sagesse qu'eux, heaucoup moins cIe tapage et sans ,iolence, ont fait pour améliorer le sort des Otn riers, par exeniple pour limiter la du rée du travail faire relever les salaires, protéger les femmes et les enfants , etc .

De leur côté, les mn riers ne restaient pas inactifs. Malgré la loi ; forts de leurs droits, ils faisaient tentati, es sur tentatives pour s'unir entre eux et obtenir, par la force de leur union, la

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suppression des abus dont ils souffraient. Ils obtinrent enfin le droit de former des syndicats professionnels, c'est-à-dire de s'as­socier pour la défense de leurs in térêts comnluns.

Ils ont usé de ce droit, pas toujours avec la modération et le discernement souhaitables. iVlais tout de même, ils sont pa.rvenus à faire introduü'e plus de justice dans le contl'at de salariat. Ils ont notamment obtenu de travailler dans cle meilleures conditjons d 'lW­giène, de ne plus faire d 'accablantes journées de travail, de touche}' des salcl ires proportionnés à .leurs besoins, de se reposer un jour pal' semaine, d 'être g'arantis des suites des a.ccidents de la mala.die, du chômage, etc.

Cela ne veut pas dire que ' tout aille maintenanl pour le mieux dans une société qui ressemhle par Lien des côtés à l'an­cienne société païenne. Notamment, l'esprit de fraternité et cIe justice n'a pas encore assez remplacé l'esprit de violence et ,de haine, et les relations entre les ouvriers et ceux qui les emploient s en ressentent encore trop souvent: des deux côtés , on est plus d 'une fois porté à écouter la voix de l'intérêt personnel, de l'égOÏS­me, plutôt que celle de la charité. Il faut donc souhaiter que, de plus en plus , le travail soit régulièrement organisé, afin qu'on supprime de plus en plus, de part et d 'autre, entre patrons et ouvriers, les injustices, les disputes et les haines. Un bon moyen pour cela est celui que nous allons indiquer dans l'entretien suivant: les comités ou commissions mixtes) où les représentants des ouvriers et des patrons se réunissent pour discuter ensemble les conditions du travail, avec la volonté loyale de réaliser la justice dans la paix . NIais, d 'abord , il est nécessaire que, soit les patrons d 'une part, soit les ouvriers de l'autre, s'associent dans des syndicats professionnels. C'est [a première étape vers rorgcmi­sation.

RÉSUMÉ

1. L 'organisation sociale, le régime du Travail n 'est juste que si le travailleur trouve dans son tra v~âI un moyen d 'assurer la vie de son corps et de développer la vie de son âme.

2. L 'organisation du travail Cl subi de pr%ncles modifica­tions à travers les siècles.

Le travailleur, autrefois, était le plus souvent un esclave. I/esclclUage était l'état d'une personne appartenant ù une autre comme une chose ou un animal, dépendant en tout de la volonté d'autrui. L'Eglise condamna l'esclavage et l'abolit par une ré­forme lente et pacifique des esprits et des mœurs.

Le servage le remplaça dans les campagnes. Le servage sau­vegarda dans une large IneSlue la dignité humaine; il fut un ache­minement vers la liberté que les habitants des campagnes acqui­rent peu à peu, en devenant propriétaires de leurs terres contre paiement et moyennant des redevances.

3. A partir du Moyen Age, le régÎllle du travail dans les mé­tiers et l'industrie fut, le plus habituellement, le régime du

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salariat . Dans la m esure où cet ' esprit s'est éloigné d e l'esprit du paganism e e t s 'es t inspiré des pr incipes chréti en s, la situ ation du tra vailleur est de, enue m eill eu re. A l' époque si chrétienn e du XIIIe siècle, les conditj ons du ·tra vail f urent particu lièrem enl bonnes p our l 'a rtisan.

L 'oubli des principes chrétiens, la soif de 1 ar gent, la sup­pression du droit d'association pOl' la loi Chapelier, à l'époq ue lllêlne où l' on comme nça à bâtir les grandes usines, mirent l'ou ­vri er dans u ne situa tion trop souvent misér ahle au XIXe siècle .

4'. Ses réclamations én er giqu es , qu 'ap p u yaient des ca tholi ­ques comme des socialistes lui ,obtinren t le d r oit d 'association. E n usant de ce droit, quoique p as toujours a vec la nlodération e l Je di scernem ent souh aitabl es , l' ouvrier es t p arvenu à fa ire r égn er plu s de jus tice dans le contrat d e sal a ria t.

5 . Il r es te encore beau coup à fa ire, notamment pour r em ­placer l' esprit de viol ence et de h aine pa r l' esprit de j"rrtlcrllit t? et d e fllsti ce . T elle esl l'œu vr e qu e dui vent se proposer les "y IH.h ca ts professionn els.

BIBLIOGRAPHIE

Un livre utile On fait en ce m om ent, en Vala is, un vigoureux el'l'ort pour

l'organisation du mouvement chrétien social, qui s 'a ver e de jour en .iour comme seul ca pabl e, p arce q u 'il s appui e sur la doctrilll' d e l'E glise de r ésister au flot m on ta nl el des tru c tellr d ll so ­c iali sm e.

A cette cr oisade, on co nvie sp écialem en t le personil el (:':nse i­g na nt qui, par son influence sur la .i eunesse, peut seconder elïÎ ­cacem ent les èli r igean ts d u di t nlouvement.

Malheureusem ent, b eau coup de bonnes vol ontés sont pnra ­lysées par 1 ignor an ce des questions sociales , Je m nnqu e de m a­tériau x de conférences ou de discussions, le m anque d 'argunlenls capables de dém olir les r a isonnem ents sophi stiqu es d es décI nm a­teurs socialistes .

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