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Editorial Terrorisme et résistance L’ année 2015 restera comme une année noire dans l’Histoire de la France, en particulier à Paris : attentats islamistes djihadistes en janvier contre la rédaction du journal Charlie Hebdo et contre les clients d’une supérette cacher, Porte de Vincennes – 17 morts ; nouv eaux attentats, le 13 no vembre dernier - 130 morts, 352 blessés, dont 99 en situation d’ur gence absolue. Ces derniers attentats, les plus meurtriers exécutés en France depuis la dernière Guerre et les seconds en Europe, après ceux de Madrid en 2004. Des semaines après, nous n’avons pas fini de partager le deuil des victimes. Le retentissement des premiers attentats fut considérable, tant dans notre pays qu’à l’étranger . En France, plus de 4 millions de personnes, les « Marcheurs républicains » , défilèrent dans les rues. A Paris même, plus d’un million et demi de manifestants étaient précédés de quarante quatre chefs d’Etat. Et n’y aurait-il pas eu plus de Français des banlieues - très peu présents - et autres militants antisionistes, s’ils n’avaient pas été arrêtés par la scanda- leuse présence du Premier ministre israélien, Benyamin Netan yahou, et son célèbre ministre des Affaires étrangères de l’époque, Lieberman ? (Ils se seraient « imposés » paraît-il… et il a été f ait un appel ur gent au Président palestinien, Mahmoud Abbas, pour qu’il soit là lui aussi). Ils avaient 23, 24, 32, 38, 41 ans, avec une exception pour une ancienne élue de la Seine Saint Denis v enue à plus de 60 ans accompagner sa f ille à ce concert, tous ces jeunes frappés au célèbre lieu festif, le Bataclan, ou aux ter- rasses de cafés des X ème et XIème arrondissement. Selon la ministre de la Justice, Christiane Taubira, 29 villes étaient concernées par les victimes, et 25 des 130 morts étaient de nationalité étrangère ou binationale, représentant une vingtaine de pays ! suite en page 2 Sommaire : Tribune de Marw an Barghouti parue dans The Guardian du 12 octobre, p.3 En finir avec l'impunité d'Israël par Bernard Ravenel, p.4 La cr ise syr ienne, prob lématique universelle par Boutros Hallaq, p.5 Une par lementaire palestinienne condamnée, p.6 La solution à deux Etats est la seule raisonnable par Zee v Ster nhell, p.8 La droite isr aélienne s'attaque à une association d'anciens soldats , p . 10 DOSSIER : attentats du 13 novembre, p. 11 à 14 La campagne BDS dans le monde , p.15 L'autre victoire des Palestiniens par Mohammed Larbi, p.16 La fin du rôle histor ique de la France au Mo yen-Orient par Alain Gresh, p.17 Le projet de destr uction d'al-Aqsa n’a r ien d'une théor ie du complot par Ilan Pappe, p.18 Les souffrances psychologiques en Palestine, entretien a vec Samah J abr médecin psychiatre , p.19 Génération spontanée en Palestine par Julien Salingue, p.20 L'accord historique entre le Vatican et les P alestiniens entre en vigueur , p.21 Courrier des lecteurs, p.22 Nous adressons nos meilleurs voeux à tous nos lecteurs OCTOBRE NOVEMBRE DECEMBRE 2015 N° 5 9 «Une cause jamais perdue», Jacques Berque Courrier du C.V.P.R. Bulletin du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient L’Assemblée générale du CVPR PO se tiendra le vendredi 12 février 2016 de 18 h à 20 heures. Elle sera suivie, de 20 h 15 à 22 heures, d’une conférence de RICHARD LABEVIERE Contre les chars israéliens les lance-pierres. David contre Goliath. © Keystone

Jacques Berque Courrier du C.V.P.R

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Page 1: Jacques Berque Courrier du C.V.P.R

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à adresser à Me Maurice Buttin, 54 rue des Entrepreneurs 75015 Paris

sition avec sa propre société, notammentles chiites et les K urdes, qui ont étéexclus du pouvoir pendant plus de 80 ans.Après l’intervention américaine en 2003,la communauté chiite prend sa re vancheau détriment de l’ensemble du pays, tan-dis que les Kurdes bâtissent une indépen-dance.

En Syrie, prenant modèle sur l’e xpé-rience druze et maronite au Liban, laFrance cherchera, de son côté, à s’ap-puyer sur les communautés minoritairesdruze et alaouite sans pouv oir éviter lacontestation. C’est l’appartenance à lacaste militaire qui permet alors de gagnerle pouv oir et ceux qui s’in vestissentdavantage dans les carrières militairessont les alaouites et les druzes. Le prin-temps arabe de 2011 aboutit en Syrieavec l’alliance de Damas a vec Téhéranouvrant vers le chiisme à une dégénéres-cence confessionnelle dans une popula-tion en grande majorité arabe sunnite.

Daech a réussi à cristalliser le senti-ment d’injustice ressenti par les popula-tions musulmanes qu’il présente commed’éternelles victimes d’un Occidentdominateur et mécréant. Il ne vise pas àopposer deux cultures mais à créer unchoc entre islam et mécréance.

« L’Etat islamique » est parvenu à sesfins en impliquant l’Occident dans saguerre alors que la coalition anti-Daechn’a aucune solution à offrir. La Turquie acru pouv oir maîtriser un processus decommunautarisation du conflit syrienpour affaiblir à la fois le régime syrien etles K urdes, à ses dépens puisque lechamp politique turc est désormais conta-miné. Quant à l’Arabie saoudite, elle estarrivée à qualifier aujourd’hui de « terro-ristes » des mouvements qui étaient desvecteurs de l’influence w ahhabite. Uneguerre lancée sans perspecti ve politiqueest perdue d’avance : c’est le piège tenduaux démocraties occidentales.

Henri MARCHAL

Chrétiensde la Méditerranée

En cette période où nous v enons devivre des événements tragiques, il

importe que nous ne cédions pas à lapeur, que nous ne nous laissions pasentraîner dans des amalgames et des opi-nions trop rapidement formulées sous lecoup de l’émotion, mais que nous pre-nions du recul pour tenter de comprendrecomment et pourquoi nous a vons pu êtretouchés par cette monstruosité. Plus quejamais, nous a vons besoin de com-prendre… Chrétiens de la Méditerranée aconsacré son Uni versité d’Hi ver dedécembre 2014 à la question du Mo yen-Orient et v ous propose ses Actes :« Guerre ou Paix au Moyen-Orient ? »

Pour la première fois, un livre à desti-nation d’un lar ge public e xplique, avecclarté, précision et rigueur , les conflitsqui, de l’Irak à la Libye, de la Syrie à l’É-gypte, ravagent le Mo yen-Orient ets’étendent désormais, sous l’emprise deDaech, à l’Afrique et à l’Europe. Vous ytrouverez des articles très éclairants despécialistes reconnus de cette question :spécialistes de géopolitique (JacquesHuntzinger et Thierry Garcin), spécia-listes du monde islamique (ChristianLochon et Boutros Hallaq), spécialistesdes relations islamo-chrétiennes (F adiDaou, Christophe Roucou et JeanToussaint), ou encore des journalistes(Henri Tincq, Roula Zein, Luc Balbon).

(Vous pouvez commander cet ouvrageau prix de 10 eur os - chèque à l'ordr e deChrétiens de la Méditerranée chez LouisBoulanger 26 Chemin J oseph Aiguier Bât.1-2 13009 Marseille)

« Ben Barka,Hassan II, De Gaulle,ce que je sais d'eux »

de Maurice Buttin. Ouvrage réédité etcomplété, avec une préface de Bachir BenBarka. Aux Editions Karthala - octobre2015. Il est possible de le commander dédi-cacé chez l’auteur. 26 euros.

L’auteur, né à Meknès (Maroc), avo-cat à la Cour d'Appel de Rabat,

puis de P aris - après son interdiction derevenir au Maroc pendant 17 années aulendemain de sa plaidoirie aux Assises dela Seine, en septembre 1966 - est l'avocatde la f amille Ben Barka depuis toujours,constitué à Rabat par la mère du leadermarocain, dès le 31 octobre 1965. Il adonc « accompagné » 50 ans d'instructionet 10 juges différents.

Et il continue à sui vre le dossieraujourd'hui encore en espérant v oir unjour émerger la vérité judiciaire .

Editorial

Terrorisme et résistanceL’année 2015 restera comme une année noire dans l’Histoire de la France,

en particulier à Paris : attentats islamistes djihadistes en janvier contre larédaction du journal Charlie Hebdo et contre les clients d’une supérette cacher,Porte de Vincennes – 17 morts ; nouv eaux attentats, le 13 novembre dernier -130 morts, 352 blessés, dont 99 en situation d’ur gence absolue. Ces derniersattentats, les plus meurtriers exécutés en France depuis la dernière Guerre et lesseconds en Europe, après ceux de Madrid en 2004. Des semaines après, nousn’avons pas fini de partager le deuil des victimes.

Le retentissement des premiers attentats fut considérable, tant dans notrepays qu’à l’étranger . En France, plus de 4 millions de personnes, les« Marcheurs républicains » , défilèrent dans les rues. A Paris même, plus d’unmillion et demi de manifestants étaient précédés de quarante quatre chefsd’Etat. Et n’y aurait-il pas eu plus de Français des banlieues - très peu présents- et autres militants antisionistes, s’ils n’avaient pas été arrêtés par la scanda-leuse présence du Premier ministre israélien, Benyamin Netan yahou, et soncélèbre ministre des Affaires étrangères de l’époque, Lieberman ? (Ils seseraient « imposés » paraît-il… et il a été f ait un appel ur gent au Présidentpalestinien, Mahmoud Abbas, pour qu’il soit là lui aussi).

Ils avaient 23, 24, 32, 38, 41 ans, avec une exception pour une ancienne éluede la Seine Saint Denis v enue à plus de 60 ans accompagner sa f ille à ceconcert, tous ces jeunes frappés au célèbre lieu festif, le Bataclan, ou aux ter-rasses de cafés des X ème et XIème arrondissement. Selon la ministre de laJustice, Christiane Taubira, 29 villes étaient concernées par les victimes, et 25des 130 morts étaient de nationalité étrangère ou binationale, représentant unevingtaine de pays !

� suite en page 2

SSoommmmaaiirree ::

�Tribune de Marw an Barghoutiparue dans The Guardian du 12octobre, p.3�En finir avec l'impunité d'Israël parBernard Ravenel, p.4�La cr ise syr ienne, prob lématiqueuniverselle par Boutros Hallaq, p.5�Une par lementaire palestiniennecondamnée, p.6�La solution à deux Etats est laseule raisonnable par Zeev Sternhell,p.8�La droite isr aélienne s'attaque àune association d'anciens soldats , p .10�DOSSIER : attentats du 13novembre, p. 11 à 14�La campagne BDS dans le monde,p.15�L'autre victoire des Palestiniens parMohammed Larbi, p.16�La fin du rôle histor ique de laFrance au Mo yen-Orient par AlainGresh, p.17�Le projet de destr uction d'al-Aqsan’a r ien d'une théor ie du complot parIlan Pappe, p.18�Les souffrances psychologiques enPalestine, entretien a vec Samah J abrmédecin psychiatre , p.19�Génération spontanée en Palestinepar Julien Salingue, p.20�L'accord historique entre le Vaticanet les P alestiniens entre en vigueur ,p.21�Courrier des lecteurs, p.22

Nous adressonsnos meilleurs voeuxà tous nos lecteurs

OOCCTTOOBBRREE � NNOOVVEEMMBBRREE � DDEECCEEMMBBRREE� 22001155 � NN°° 55 99

«Une cause jamais perdue», Jacques Berque

Courrier du C.V.P.R.Bulletin du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient

L’Assemblée généraledu CVPR PO

se tiendra le vendredi12 février 2016

de 18 h à 20 heures.

Elle sera suivie, de 20 h 15à 22 heures,

d’une conférence de

RRIICCHHAARRDD LLAABBEEVVIIEERREE

Contre les chars israéliens les lance-pierres. David contre Goliath.

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Courrier N°59 4 pages couverture 18/01/16 14:39 Page 1

Page 2: Jacques Berque Courrier du C.V.P.R

Editorial

Courrier du CVPR, n°59 p.2 Courrier du CVPR, n°59 p.23

De nouveau, des milliers de personnes ont manifesté dans toute la Francepour la paix et contre le terrorisme. Et aujourd’hui la place de la République estdevenue le haut lieu de recueillement national en hommage aux victimes. Desmanifestations ont aussi eu lieu, dans touts les pays étrangers, en signe de soli-darité au drame vécu par notre pays et, partout, des minutes de silence ont étéobservées, la Marseillaise chantée !

Le risque était grand - et le demeure - de v oir assimilés « islamistes » et« musulmans ». Erreur gravissime ! Je me pose même la question de sa voir sices barbares terroristes ont une idée quelconque de l’Islam qu’ils évoquent pouragir ? Le président Barack Obama ne s’y est pas trompé. Le 6 décembre, il aappelé ses compatriotes à ne pas céder à la tentation de stigmatiser les musul-mans, assurant que le groupe Etat islamique « ne parle pas au nom de l’islam».

MAIS, après ces attentats les dirigeants israéliens et leurs partisans ont tentéde discréditer, une fois de plus, l’admirable résistance à l’occupation du peuplepalestinien, depuis plus de 47 ans. (Nos compatriotes sont-ils conscients quel’occupation de la France n’a duré que 4 années ?).

Le Premier ministre Benyamin Netanyahou n’a pas hésité, contre toute véri-té, à laisser entendre que ceux qui condamnaient les attentats de P aris, sanscondamner la violence contre les Israéliens, étaient des « hypocrites et desaveugles. Derrière ces attentats terr oristes, selon lui, se tient l’Islam r adical,qui cherche à nous détruire, le même islam radical qui a frappé Paris et mena-ce l’Europe entière ». Le ministre de la Défense,Moshe Ya’lon - qui voit en toutPalestinien un « terroriste » en puissance - a déclaré de son côté : « Ce quenous avons, c’est l’islam djidahiste qui appelle à la destruction de la cultur eoccidentale »… alors même que la majorité des victimes des groupes djida-histes dans le monde sont des musulmans ! A l’encontre des résistants palesti-niens, toujours la même rengaine depuis la création de l’Etat d’Israël,en 1948 :« Ils veulent nous tuer parce que nous sommes juifs ».

Non, la violence actuelle, la résistance, des jeunes P alestiniens n’exprimenullement le refus de l’e xistence de l’Etat d’Israël. C’est le désespoir de vantl’occupation de leur pays qui persiste, et la volonté d’Israël, bien au contraire,de refuser l’existence de l’Etat de Palestine.

Uri Avnery, ancien député israélien, cofondateur de Gush Shalom - un mou-vement israélien qui milite pour la paix et en vue de la création d'un État pales-tinien - répond dans son Blog (1) aux errements de Netan yahou :

« Cela fait des semaines maintenant qu’Isr aël vit dans la panique. » Fauted’une meilleure expression, on parle de « la va gue de terreur ». Chaque jourmaintenant deux, trois, ou quatre jeunes, y compris des enfants de 13 ans atta-quent des Isr aéliens (…) et ils sont génér alement abattus. (…) Netanyahouessaie de surfer sur cette va gue (…). Il évoque l’Holocauste (compar ant unenfant de 16 ans de Hébr on à un of ficier SS endurci d’Auschwitz) et n’arrêtepas de parler d’antisémitisme. Tout cela pour marquer un fait évident : l’occu-pation avec harcèlement de la population palestinienne c haque jour, et mêmeà chaque heure et à chaque minute. (…).

Il n’y a pas de lien dir ect entre le terr orisme de l’Etat islamique dans lemonde et le combat national palestinien pour obtenir un Etat. Mais, si on n’yapporte pas de solution, ces problèmes finiront par se mêler – un Etat isla-mique, beaucoup plus puissant fera l’union du monde musulman, comme lefit autrefois Saladin, pour s’attaquer à nous, les nouveaux Croisés . (ndlr :souligné par moi) Si j’étais croyant, je murmurerais : qu’à Dieu ne plaise ! »

Maurice BUTTIN, président du CVPR PO(1) Le 28 novembre

�suite de la première page Le piège Daech,

L’Etat islamique ou le r etourde l’Histoire

de Pierre-Jean LUIZARD, Le piègeDaech, Editions La Découv erte, Paris,2015, 148 p.

En 2014, un groupe salafiste fait bruta-lement irruption sur la scène proche-

orientale et af fiche une déterminationsanguinaire à effacer les frontières et à setransformer en « Etat islamique » sous ladénomination de Daech. Cette volonté dese présenter comme un Etat le distinguede la néb uleuse al-Qaïda. Spécialiste duMoyen-Orient, P.-J. Luizard se proposedans cet essai de faire comprendre le stu-péfiant succès de cette or ganisation parun retour sur l’Histoire et d’e xpliquercomment l’Occident est tombé dans le« piège Daech ».

Les ingrédients de la réussite ne sontpas à l’origine militaires ; ils tiennentdans la région à la déliquescence desstructures étatiques dans un conte xte decorruption et de frustration. Daech a ins-trumentalisé à son prof it une histoire quiremonte à l’ef fondrement de l’Empireottoman et à création d’Etats arabes sousmandat britannique ou français, en viola-tion des promesses d’un ro yaume arabeunifié et indépendant. L’Etat irakien va seconstruire a vec les Britanniques sous ladomination de la communauté arabe sun-nite minoritaire et se perpétuera en oppo-

Islamophobieet judéophobie.L’effet miroir

de Ilan Halevi - Préface d'Alain Gresh,Editions Syllepse, juin 2015

Les éditions Syllepse publient ce texteposthume d’Ilan Hale vi. Excellent

petit livre (160 pages) pour e xpliciter demanière aussi précise que documentée lasituation des Palestiniens en Israël depuis1948.

Illustration parmi tant d’autres de laparenté entre islamophobie et judéopho-bie, la question juive hier, celle de l’islamaujourd’hui, sont des lieux privilégiés du« délire idéologique ». On ne saurait doncappréhender la réalité de l’islamophobieactuelle sans passer par le détour de l’an-tisémitisme, dont elle est lar gement unavatar tardif et une mutation coloniale.L’auteur nous invite à relire avec les yeuxd’aujourd’hui les Réflexions sur la ques-tion jui ve de Sartre qui év oquait lesfureurs discursi ves antijui ves en France.Omniprésente dans le discours public etdans les politiques d’État, l’islamophobieest exacerbée par les crimes réels commisau nom de l’islam par une néb uleuse degroupuscules et d’or ganisations directe-ment ou indirectement manipulées pardes États.

Comme sa soeur jumelle, la judéopho-bie, l’islamophobie apparaît comme lanouvelle forme de la peste raciste, larésurgence d’un virus social dont la noci-vité est notoire, opérant désormais àl’échelle globale. Certes, comme toutparallèle, celui-ci connaît des limites.

Histoire d'un Palestinien

de Didier Destremau, ancien ambassa-deur de France à Malte. EditionsMaisonneuve et Larose, juin 2003

Très jeune, il s'est passionné pour lemonde arabe. Déjà au lycée, il avait,

choisi d'apprendre en première languel'arabe, avant même l'anglais. Amenélongtemps par sa vie professionnelle, etnotamment celle de diplomate, à parcou-rir et à vi vre au Maghreb et au Machrek,il s'est particulièrement penché sur le pro-blème palestinien et a découvert l'immen-se douleur de la tragédie de ce peuple.

La rencontre quotidienne a vec Teisir,un P alestinien d'une trentaine d'annéesqui l'aidait à améliorer ses connaissanceslinguistiques, lui a donné l'idée d'écrire celivre d'où émer ge l'intensité de la souf-france que pro voque cette situationpérenne de chaque P alestinien, où qu'ilsoit. C'est donc cet homme, Teisir, qui luia fourni la trame du personnage central,Adel, le malheureux héros de ce récit,dont la vie est une véritable et conster-nante saga. L'auteur disposait aussi demultiples autres témoignages qu'il a inté-grés dans la vie d'Adel.

A tra vers la vie et les sentiments deson personnage, l'auteur a f ait une réellesynthèse de l'existence du peuple palesti-nien durant ces cinquante dernièresannées. C'est cette immense saga qu'ilouvre ici, à travers un roman qui a valeurd'essai.

LIVRES

DIXIT

François Hollande

Vendredi 13 no vembre, cejour que nous n’oublierons

jamais, la France a été frappéelâchement, dans un acte de guer-re organisé de loin et froidementexécuté. Une horde d’assassins atué 130 des nôtres et en a blessédes centaines, au nom d’unecause folle et d’un dieu trahi.

Aujourd’hui, la Nation toutentière, ses forces vives, pleurentles victimes. (...) Ces femmes,ces hommes, incarnaient le bon-heur de vi vre.(…). C’est parcequ’ils étaient la France qu’ils ontété abattus. C’est parce qu’ilsétaient la liberté qu’ils ont étémassacrés.

Ces femmes, ces hommes,étaient la jeunesse de France, lajeunesse d’un peuple libre, quichérit la culture, la sienne, c’est-à-dire toutes les cultures (...).

L’attaque du 13 novembre res-tera dans la mémoire de la jeu-nesse d’aujourd’hui comme uneinitiation terrible à la dureté dumonde, mais aussi comme uneinvitation à l’af fronter en in ven-tant un nouvel engagement.

Je sais que cette générationtiendra solidement le flambeauque nous lui transmettons.

Je suis sûr qu’elle aura le cou-rage de prendre pleinement enmain l’avenir de notre Nation. Lemalheur qui a touché les martyrsdu 13 novembre investit cette jeu-nesse de cette grande et nobletâche. La liberté ne demande pasà être v engée, mais à être servie.(...)

Malgré les larmes, cette géné-ration est aujourd’hui de venue levisage de la France.

Extraits du discours du présidentde la République, François Hollande,lors de l'hommage national aux vic-times des attentats, le 27 novembre.

Courrier N°59 4 pages couverture 18/01/16 14:39 Page 3

Page 3: Jacques Berque Courrier du C.V.P.R

niens. Nous ne pouv ons coe xister a vecl'occupation israélienne, et nous ne capi-tulerons pas devant elle.

L’incapacité de la communautéinternationale

On nous a demandé d'être patients, etnous l'a vons été, donnant une chanceaprès l'autre pour la conclusion d'unaccord de paix, y compris depuis 2005 etjusqu'à aujourd'hui. Il est peut être utilede rappeler au monde que notre déposses-sion, exil et transfert forcés, et l'oppres-sion que nous subissons ont duré près de70 ans et nous sommes le seul point tou-jours à l'agenda des Nations Unies depuissa création. On nous a dit qu'en ayantrecours aux mo yens pacif iques et auxcadres diplomatiques et politiques, nousengrangerions le soutien de la commu-nauté internationale pour mettre fin à l'oc-cupation. Et pourtant, comme en 1999 àla f in de la période intérimaire, la com-munauté internationale n'a pas réussi àadopter une seule mesure signif icative, ycompris mettre en place un cadre interna-tional assurant la mise en œuvre du droitinternational et des résolutions onu-siennes, et adopter des mesures pourmettre f in à l'impunité, y compris à tra-vers le bo ycott, les désinvestissements etles sanctions, en s'inspirant des outils quiont permis de débarrasser le monde durégime d'apartheid.

En l'absence d'intervention internatio-nale pour mettre f in à l'occupation, et enl'absence d'actions sérieuses des gouv er-nements pour mettre f in à l'impunitéd'Israël, et en l'absence de toute perspec-tive de protection internationale accordéeau peuple palestinien sous occupation, etalors même que la colonisation et sesmanifestations di verses, y compris lesattaques violentes des colons israéliens,s'intensifient, que nous demande-t-on defaire? Laissez f aire et attendre qu'uneautre famille palestinienne se fasse brûler,qu'un autre jeune palestinien se fasse tuer,qu'une nouv elle colonie soit construite,qu'une autre maison palestinienne soitdétruite, qu'un autre enf ant palestiniensoit arrêté, qu'une nouv elle attaque decolons ait lieu, qu'une autre agressioncontre notre peuple à Gaza soit lancée?

Le monde entier sait pertinemmentque Jérusalem est la flamme qui peutinspirer la paix ou déclencher la guer-re. (ndlr,souligné par nous) Alors pour-quoi demeure-t-il impassible alors que lesattaques israéliennes contre le peuplepalestinien dans la ville et les lieux saintsmusulmans et chrétiens, notamment Al-

L’escalade n'a pas débuté avec la mortde deux colons israéliens. Elle a

débuté il y a longtemps, et s'est poursui-vie durant des années. Chaque jour , despalestiniens sont tués, blessés, arrêtés.Chaque jour , le colonialisme a vance, lesiège contre notre peuple à Gaza se pour-suit, l'oppression et l'humiliation persis-tent. Alors que certains v eulent que noussoyons accablés par les conséquencespotentielles d'une nouv elle spirale de laviolence, je continue à plaider , commeje l'ai fait en 2002, pour que l’on s’at-taque aux causes de cette violence : ledéni de liberté pour les P alestiniens.(ndlr, souligné par nous)

Certains ont suggéré que la raison pourlaquelle nous ne sommes pas parv enus àconclure un accord de paix est le manquede volonté de feu Président Yasser Arafatou du manque de capacité du PrésidentMahmoud Abbas, alors que tous les deuxétaient prêts et capables de signer un telaccord.

Pas de négociations sans un engage-ment israélien clair de r etrait desterritoires occupés depuis 1967

Le véritable problème est qu'Israël achoisi l'occupation au dépend de la paixet a usé des négociations comme d'unécran de fumée pour f aire a vancer sonprojet colonial. Tous les gouv ernementsau monde connaissent pertinemmentcette vérité élémentaire et pourtantnombre d'entre eux prétendent que leretour aux recettes éculées nous permet-tra d'atteindre la liberté et la paix. La foliec'est de répéter sans arrêt la même choseet d'espérer un résultat dif férent. Il nepeut y a voir de négociations sans unengagement israélien clair de se retirercomplètement du territoire qu'Israël aoccupé en 1967, y compris en ce quiconcerne Jérusalem ; une f in de l'en-semble des politiques coloniales ; lareconnaissance des droits inaliénables dupeuple palestinien, y compris le droit àl'auto-détermination et au retour ; et lalibération de tous les prisonniers palesti-

Courrier du CVPR, n°59 p.3

Palestine

Tribune de Marwan Barghoutiparue dans

The Guardian du 12 octobre

Courrier 59 p. 3 à 22 A part 11 à 14 18/01/16 14:22 Page 1

Page 4: Jacques Berque Courrier du C.V.P.R

En finiravec l’impunité d’Israël :suspendre l’accordd’association UE-Israël

par Bernard Ravenel (1)

Haram Al-Sharif, continuent sansrelâche? Les actions et les crimes israé-liens ne détruisent pas seulement la solu-tion à deux Etats sur les frontières de1967 et violent le droit international. Ilsmenacent de transformer un conflit poli-tique qui peut être résolu en un conflitreligieux éternel qui ne fera que déstabili-ser plus a vant une région qui f ait déjàl'expérience de bouleversements sans pré-cédents.

Aucun peuple sur terr e n'accepteraitde coexister avec l'oppression.

Par nature, les êtres humains aspirentà la liberté, luttent pour la liberté, sesacrifient pour la liberté. Et la liberté dupeuple palestinien n'a que trop tardé.Pendant la première Intif ada, le gouver-nement israélien a lancé une politique« briser leurs os pour briser leur volon-té », mais une génération après l'autre, lepeuple palestinien a démontré que savolonté ne peut être brisée et ne doit pasêtre testée.

Cette nouvelle génération palestinien-ne n'a pas attendu les pourparlers deréconciliation pour incarner une uniténationale que les partis politiques ontéchouée à réaliser, dépassant les divisionspolitiques et la fragmentation géogra-phique. Elle n'a pas attendu d'instructionspour mettre en œuvre son droit, et mêmeson devoir, de résister à cette occupation.Elle le fait sans armes, alors même qu'el-le est confrontée à une des plus impor-tantes puissances militaires au monde. Etpourtant, nous demeurons convaincus quela liberté et la dignité l'emporteront, etque nous triompherons. Et que le drapeaupalestinien que nous avons levé avec fier-té à l'ONU flottera au-dessus desmurailles de la vieille ville de Jérusalem,pas pour un jour, mais pour toujours.

J'ai rejoint la lutte palestinienne pourl'indépendance il y a 40 ans, et fut empri-sonné pour la première fois à l'âge de 15ans. Cela ne m'a pas empêché de plaiderpour une paix fondée sur le droit interna-tional et les résolutions de l'ONU. Maisj'ai vu Israël détruire méthodiquementcette perspective année après année. J'aipassé 20 ans de ma vie dans les geôlesisraéliennes, y compris les 13 dernièresannées, et ces années n'ont f ait que ren-forcer ma foi en cette vérité inaltérable:ledernier jour de l'occupation sera le pre-mier jour de paix. Ceux qui veulent réali-ser cette dernière doi vent agir , et agirmaintenant, pour précipiter la première.

Marwan BARGHOUTIprison de Hadarim.cellule n°28

Certes Israël n’est pas le seul Etat dumonde à violer le droit international

et les résolutions de l’ONU mais le f aitqu’il s’agit d’un Etat dont la création il ya 70 ans aujourd’hui est le fruit d’unerecommandation de ces mêmes NationsUnies et ce au détriment de la populationindigène renforce le caractère insuppor-table de cette situation.

Notre problème fondamental est demettre f in à l’impunité d’Israël.Désormais, après l’échec de toutes lesnégociations depuis Oslo en passant parCamp David et Annapolis etc., la commu-nauté internationale (Etats et société civi-le) a pris conscience de la nécessité d’im-poser de l’extérieur une pression suffisan-te sur Israël pour le contraindre à reculer .L’absence de « solution militaire » obligeà réfléchir sur les objectifs et lesmeilleures modalités d‘action pour isolerpolitiquement Israël et déboucher sur despressions supérieures contraignantes, dessanctions économiques, en clair, le stadesuprême de la sanction économique, le Sde BDS, à savoir la suspension de l’ac-cord d’association entre l’UE et Israël.

L’importance de la suspensionde l’accord d’association UE-Israël

Pour comprendre l’importance et lasignification de cet accord, il f aut partirde la Conférence de Barcelone en 1995qui visait à établir un partenariat euro-méditerranéen pour renforcer la présenceéconomique et politique de l’Europe et enparticulier de la France en Méditerranéeface à la toute puissance des Etats-Unis

sortis triomphalement v ainqueurs de laguerre du Golfe.

La Déclaration f inale f ixe trois v oletsdu partenariat euro-méditerranéen : unpartenariat politique et de sécurité ; unpartenariat économique et f inancier ; unpartenariat dans les domaines social, cul-turel et humain

C’est dans le premier v olet que sontrappelés les engagements politiques desEtats signataires ; il suf fit ici de citer lepremier : « agir conformément à la char-te des Nations Unies et à la Déclar ationuniverselle des dr oits de l’homme , ainsiqu’aux autr es obligations résultant dudroit international… » C’est dans cetesprit af fiché que l’Europe - soumise àune pression d’ONG européennes maisaussi arabes, comme les ligues des droitsde l’homme - renforce ses relations éco-nomiques et commerciales a vec dif fé-rents pays à tra vers des accords séparésd’association. En particulier elle accordeun traitement préférentiel à ces pays enréduisant fortement ses droits de douaneou même en les exemptant.

C’est dans ce conte xte géopolitiquequ’est signé l’accord d’association a vecIsraël. Cet accord remplace l’accord decoopération de 1975. Depuis cette dateles relations entre l’UE et Israël se sontcaractérisées par une double tendance :un accroissement des échanges sur le planéconomique et des turbulences sur le plandiplomatique.

Sur le plan économique, entre 1975 et1995, les échanges CEE-Israël se sont

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Au cœur du contentieux c’est l’impunité de l’Etat d’Israël qui depuis desdécennies viole le dr oit international, ignore des dizaines de résolutions del’ONU, agresse ses voisins, refuse d’appliquer les accords qu’il a lui-mêmesignés par exemple à Oslo. Et en même temps il continue d’êtr e traitécomme si de rien n’était et d’êtr e considéré comme la seule démocratie auMoyen-Orient. L’effet pervers, limité mais réel, c’est le r etour des clichésantisémites sur « Les Juifs qui dominent le monde et sont toujours au-dessusdes lois… »

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développés d’une manière considérable.L’UE est de venue le principal partenairecommercial d’Israël, absorbant près de35% de ses e xportations et fournissantprès de 50% de ses importations.

D’autre part, il f aut rappeler quel’Europe s’est souv ent démarquée de lapolitique israélienne, dénonçant à plu-sieurs reprises l’implantation de coloniesdans les territoires arabes occupés ;reconnaissant le droit du peuple palesti-nien à l’autodétermination (Déclarationde Venise en 1980) ; facilitant l’accès surle marché communautaire des produitsagricoles palestiniens (1986) ; condam-nant les politiques répressi ves israé-liennes suite an déclenchement del’Intifada. Par ailleurs, Israël a eu maille àpartir a vec le P arlement européen, parexemple, en 1990, gel de la ligne b udgé-taire destinée à f inancer la coopérationscientifique a vec Israël pour protestercontre l’embar go à l’éducation imposépar Israël dans les territoires palestiniensoccupés.

En 1995, politiquement, l’Europe auProche Orient ne pèse pas lourd. Elle aété marginalisée par les Américains dansle « processus de paix » enclenché àMadrid et continué à Oslo. L’Europe s’estdonné comme fonction de soutenir éco-nomiquement le processus.

Dans ce contexte qu’a été négociél’accord d’association avec Israël

Cet accord améliore les relations éco-nomiques avec Israël et en particulier lacoopération scientifique et technologiquepermettant l’accès d’Israël au programmede Recherche et Développement de l’UE.Pour le reste, l’accord a la même structu-re que les autres accords d’association.

L’accord s’est f ixé pour objectifs lespoints suivants :

a) fournir un cadre approprié au dia-logue politique afin de permettre le déve-loppement des relations étroites entre lesdeux parties ;

b) f avoriser le dév eloppement har-monieux des relations économiques entrel’UE et Israël ;

c) encourager la coopération régio-nale af in de consolider la coe xistencepacifique ainsi que la stabilité politique etéconomique ;

d) promouvoir la coopération dansd’autres domaines d’intérêt mutuel.

Très louables objectifs… mais il y aquand même un petit problème qui tôt outard risque de mettre sérieusement àl’épreuve les relations entre l’UE etIsraël. En ef fet, Israël a vec lequel l’UEs’associe dans le cadre d’un accord departenariat est aussi un pays occupantun territoire qui ne lui appartient pas,le colonisant au vu et au su del’Europe, exploitant ses r essourcesnotamment h ydrauliques et exposantconstamment sa population à un châti-ment collectif… (ndlr;souligné par nous)

Donc le problème hautement politiquequi se pose est le suivant : l’Europe pour-ra -t - elle sans se trahir , sans trahir sespropres engagements, traiter a vec Israëlsans dénoncer sa politique dans les terri-toires occupés ? Sera-t-il admissiblelongtemps sur le plan simplementéthique, d’octroyer à Israël un « statutprivilégié » , alors qu’il dénie tous lesjours au peuple palestinien le droit à l’au-todétermination, droit pourtant rappelépar l’UE dans de multiples déclarations ?

Les violations israéliennes desrègles du droit

Et de fait plusieurs clauses de l’accordsont manifestement violées par la partieisraélienne. Ces violations constituentégalement un non respect plus généraldes principes de la Charte des Nationsunies, du droit des traités, de la IVèconvention de Genève, etc.

Suivant l’article 2 de l’accord, « lesrelations entr e les parties, ainsi quetoutes les dispositions de l’accor d lui-même se fondent sur le r espect des droitsde l’homme et des principes démocr a-tiques qui inspir e leur s politiquesinternes et internationales et qui consti-tue un élément essentiel de cet accor d ».Israël viole systématiquement les droitsde l’Homme dans les Territoires occu-pés : usage disproportionné de la force,sanctions collecti ves ; destructions mas-sives de maisons, etc. Israël, puissanceoccupante, ne remplit pas ses obligationslégales au titre de la IVè con vention deGenève de 1949 sur la protection despopulations ci viles en temps de guerre,qui impose un traitement discriminé entrecombattants et non-combattants.

D’autre part Israël viole des clausescommerciales de l’accord d’association :

- Le champ territorial de l’accord :article 83 : « Le présent accor d s’ap-

Courrier du CVPR, n°59 p.5

Palestine

plique, d’une part, aux territoires où lestraités instituant la communauté eur o-péenne sont d’application et dans lesconditions prévues par les dits tr aités et,d’autre part, au territoir e de l’Etatd’Israël ».

- La règle d’origine. Le Protocole 4 del’accord « concernant la déf inition duconcept de « pr oduit d’origine » et lesméthodes de coopér ation administr ati-ve », prévoit que le traitement préféren-tiel est accordé aux produits pro venantdes territoires des parties, excluant doncles produits pro venant en tout ou pourune grande part des territoires palesti-niens occupés.

L’Europe doit suspendre l’accord d’as-sociation

Dès le 10 avril 2002 le Parlement euro-péen a pris position en demandant à laCommission et au Conseil la suspensiontemporaire et immédiate de l’accord d’as-sociation. La Commission et le Conseilont refusé d’en tenir compte… Par sonrefus d’agir, la Commission devient defait complice des gra ves violations parIsraël de la IVè con vention de Genèv eet des autr es con ventions inter natio-nales.(ndlr,souligné par nous) Le mouve-ment international de solidarité a vec laPalestine n’est pas encore assez puissantpour obliger l’UE à sui vre la recomman-dation du P arlement européen. Cettedemande de suspension doit redevenir unthème phare de la mobilisation descitoyens européens.

Depuis 2002 le mouvement a renforcésa capacité de pression auprès des or ga-nismes européens (obtenant notammentl’abandon du projet de rehaussement –upgrading - des relations entre l’UE etIsraël). A partir d’une démarche des syn-dicats britanniques, bientôt soutenue parde grandes confédérations syndicaleseuropéennes comme la CGT et la FSU enFrance, s’impose auprès des autoritéseuropéennes l’e xigence d’un étiquetagedes produits issus des colonies israé-liennes en Palestine.

La commission bouge enfin !

Finalement en 2014 la Commissioneuropéenne publie ses nouv elles lignesdirectrices concernant sa politique decoopération avec Israël et annonce qu’el-le e xclut désormais toute coopérationavec Israël, avec les institutions et lesentreprises israéliennes ayant des acti vi-

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tés dans les territoires palestiniens occu-pés depuis 1967. Coup de tonnerre ! Pourla première fois l’UE montre sa capacitéet sa v olonté de passer de la parole auxactes…c’est-à-dire à des sanctions. Israëlva alors multiplier les pressions et lesdémarches pour retarder l’application decette mesure ou en restreindre le plus pos-sible la portée. Ce qui v a partiellementréussir grâce au soutien du lobby pro-israélien très présent auprès des institu-tions européennes.

En 2015 a vec l’arri vée de l’e xtrêmedroite au pouvoir en Israël qui accélère lacolonisation, l’UE décide de r endreobligatoire l’étiquetage des pr oduitsissus des territoir es illégalement occu-pés par Israël. (ndlr, souligné par nous)Cette décision porte un coup sensible àl’économie des colonies en pri vant leursproduits des tarifs douaniers préférentielsconsentis par l’UE à Israël par l’accordd’association. Elle a aussi une v aleursymbolique et politique signif icative carelle laisse prév oir d’autres mesures pluscontraignantes qui toucheront de fait l’en-semble des relations commercialesd’Israël surtout si le pouv oir israélien nemodifie pas son comportement. Ce queles Israéliens ont parfaitement compris…Déjà en France le mouvement de solidari-té demande que l’ensemble des marchan-dises ainsi identif iées comme pro venantdes colonies illégales soient interdites surles marchés français et européen.

Tel doit être notre axe de travail pour lapériode. Le problème est de les f aireappliquer…c’est–à-dire d’être ef ficace.Cela suppose la mobilisation d’un mou-vement fort et représentatif de la sociétécivile organisée et de la société politique,en clair une stratégie d’alliances fondéesur la défense et l’application du droitinternational.

11 décembre 2015

(1) Président d’honneur de l’AFPS,ancien président des ONG françaises pourla P alestine) et l’un des or ganisateurs duTribunal Russell

Cependant, deux f acteurs spécif iquessont venus donner à la crise syrienne

une dimension autrement plus drama-tique. L ’hostilité féroce entre l’ArabieSaoudite (et derrière elle de nombreusesdynasties pétrolières) et l’Iran, ne pou-vant se traduire en confrontation directe,s’est cristallisée sur le maillon f aible duréseau iranien, la Syrie secouée alors pardes re vendications démocratiques non-violentes.

De son côté, la Turquie d’Erdogan quin’a pu amadouer le régime d’Assad a finipar se jeter dans la bagarre du côté de sesadversaires. Tout cela se déroulait sous leregard satisfait et d’aucuns diront compli-ce d’Israel.

L’autre facteur provient de la confron-tation de plus en plus dure et ouv erteentre l’O TAN et la Russie. Se sentantmenacée par un encerclement militairerampant, une mar ginalisation écono-mique visant les hydrocarb ures quiconstituent au moins 80% de ses re venuset blessée dan son prestige international,la Russie de Poutine met à profit le règle-ment du problème nucléaire iranien pourdéfendre un pied-à-terre stratégique sur laMéditerranée ; elle intervient en Syrie aumoment où l’Occident échoue à jugulerDaech. Suite notamment au massacreperpétré à Paris le 13 novembre, au défer-lement d’une v ague migratoire sans pré-cédent lâchée par la Turquie et la destruc-tion par celle-ci d’un a vion militairerusse, tout était prêt pour l’entrée enscène d’autres puissances européennes.

L’internationalisation de la guerr een Syrie

Il est clair que l’internationalisation dela guerre en Syrie, déjà évidente depuisau moins deux ans, est maintenant par-

achevée. Le peuple syrien n’a plus sonmot à dire : il sert de terrain d’essai, deprétexte, de chair à canon… ou encore desujet d’apitoiement. Derrière les slogansaffichés de démocratie, de droit, du réta-blissement de l’ « Age d’or islamique »…se cachent les intérêts de deux campsopposés plus ou moins hétéroclites.

Affirmer cela n’autorise pas les parte-naires syriens à crier au complot af in dedégager leurs propres responsabilités.Car, si la société civile syrienne en géné-ral et la jeunesse qui a animé pendant lespremiers mois de la crise les manifesta-tions non-violentes en particulier sont desvictimes innocentes, il n’en v a pas demême pour les dif férentes élites. Ens’agrippant à tout prix à un pouv oir qu’ildétient depuis plus de quatre décennies,le régime assume la principale responsa-bilité a vec les élites économiques, poli-tiques, religieuses et intellectuelles quin’ont cessé de le soutenir.

L’autre part de responsabilité incombeà une autre catégorie d’élites politiques etintellectuelles, qui, par calcul ou naïv eté,s’est mise, au nom de la démocratie, auservice de la stratégie initiée par le Qataret poursui vie a vec l’aide de l’ArabieSaoudite, oasis de démocratie, commechacun le sait. Ces élites n’ont réussi qu’àrenforcer le camp des Frères Musulmans,à justif ier depuis le déb ut les islamistesl’action d’Al-Nosrat et à couvrir indirec-tement Daech, alimenté de manièreouverte jusqu’à ces derniers mois par lesmêmes parrains (en plus de la Turquie).La conséquence immédiate de ce com-portement fut la mar ginalisation del’Armée Syrienne Libre dont le projet nepouvait que contrarier la stratégie desparrains.

La crise syrienne,problématiqueuniversellepar Boutros Hallaq (1)

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A l'origine de la crise : la guerre civile a atteint en Syrie unniveau de barbarie jamais atteint par celles qu’ont connues laJordanie en 1970, le Liban en 1975, puis l’Irak après 1991. Ellesdécoulent toutes, directement ou indirectement, du traumatismesubi par la région a vec l’injustice flagrante injustice infligée aupeuple palestinien en 1948, mais déjà inscrite dans les accordsfranco-britannique de Sykes-Picot.

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L'intervention occidentale :Concernant la France, il con vient

impérativement d’y distinguer la sociétécivile de la politique de MM. Sark ozy etHollande. La première a, sauf sur lesmarges, toujours témoigné empathie etsolidarité avec le peuple syrien, même sielle n’a pas toujours été consciente de lapolitique de ses dirigeants.

Convaincus de la chute imminente durégime syrien et décidés à ne pas fâcherles puissances de la Péninsule qui leurprodiguaient contrats et in vestissements,les dirigeants français se sont soumis lespremiers à la stratégie des puissancespétrolières au point d’accepter de parrai-ner au ni veau international le ConseilNational Syrien, créature de ces mêmespuissances ; pis encore : de l’imposercomme unique représentant légitime de lasociété syrienne. Les autres groupes del’opposition démocratique, présents sur leterrain depuis des décennies, étaient prisen tenailles entre le régime et la politiquede « démocr atisation » prétendue parl’Etat français. Ils se sont peu à peu év a-nouis, et a vec eux toute représentationréelle de la société civile.

Le terrain était libre pour les groupesarmés qui n’ont cessé de pulluler et de seradicaliser. La Syrie est devenue « un lieuoù on n’entend que pleur s et gémisse-ments », selon l’e xpression shak espea-rienne. Les valeurs de la France y ont peugagné, le peuple de France également.

L’avenir de la Syrie

L’avenir de la Syrie, comme celui de larégion, est hypothéqué durablement.L’intervention russe peut rétablir un cer-tain équilibre entre les deux camps enjugulant l’extension des islamistes d’Al-Nosrat désormais coupés de leurs basesen Turquie. Celle des occidentaux peutjuguler l’extension de Daech et défendreainsi les Kurdes et l’Etat irakien. Mais lepays est en f ait démembré, plus gra ve-ment encore que l’Irak, et pourrait mêmereproduire le modèle afghan.

De toute manière, sa démographie estdéjà profondément modif iée, ses struc-tures économiques, sociales et culturellesdétruites, ses villes aplanies au sol, sescompétences émigrées sous d’autrescieux et son mode de vie pluraliste prati-quement anéanti. D’aucuns redoutent, auregard des rapports des forces en présen-ce, que le terrain est préparé pour unedomination, plus ou moins soft, d’unwahhabisme riche de ses trésors enfouisdans le sol et de ses alliances a vec les

puissances occidentales. La peste ou lecholéra, au moins dans un a venir prévi-sible.

A moins que, par miracle, une prise deconscience générale de la gra vité de latragédie qui s’annonce n’émer ge rapide-ment chez les acteurs régionaux et inter-nationaux. Ils n’auront guère d’autrespossibilités que de prendre à bras le corpsles impasses créées dans la région depuisun siècle. S’imposera en premier lieu lacréation d’un Etat palestinien. Et dans lafoulée libérer la région de la dominationwahhabite, relancer la dynamique demodernisation par le développement et ladémocratisation, et respecter les droitsdes peuples au même titre que les droitsdes cito yens, à commencer par l’égalitéabsolue entre homme et femme.

La reconstruction se fera par les

Palestine

citoyens eux-mêmes avec leurs représen-tants légitimes. Mais cela ne pourra sefaire sans procéder à une désescaladedans la lutte entre les puissances, grandesou mo yennes, désireuses d’étendre leurdomination politique et économique surla région. Autrement dit : créer un droitinternational juste et effectif.

Il s’agit au fond de répondre à l’aspira-tion des peuples partout dans le monde, ycompris dans les pays industrialisés. Il neserait pas inutile que les grands de cemonde entendent la voix claire et humblede ce po verello des temps modernesqu’est cet Argentin appelé François, papequi ne cessent de les rappeler au respectdes valeurs universelles.

(1) Boutros HALLAQ est professeurémérite à la Sorbonne Nouvelle.

Une parlementairepalestinienne condamnée

Khalida Jarrar, parlementaire de gauche et féministe, avocate des prisonnierspolitiques, a été condamnée le 6 décembre à 15 mois d’emprisonnement par un tri-bunal militaire israélien, à Ofer. Après son arrestation par les forces militaires d’oc-cupation, qui ont fait intrusion le 2 a vril dans sa maison de Ramallah, l’emprison-nement de Jarrar , ancienne directrice e xécutive et actuelle vice-présidente dubureau des directeurs de l’Association Addameer (= Conscience) de Soutien auxPrisonniers et des Droits de l’Homme, a déclenché une indignation générale enPalestine, dans le monde arabe et sur le plan international.

Jarrar est membre du Conseil Législatif (= P arlement) Palestinien au nom dubloc Abu Ali Mustafa, le bloc parlementaire affilié au Front Populaire de Libérationde la Palestine, organisation de gauche.

En 2014, elle avait été l’objet d’un déplacement forcé de Ramallah à Jéricho parun ordre de l’armée d’occupation, qu’elle a réussi à faire échouer après un sit-in quia duré un mois au bureau du CLP et une campagne internationale de soutien.

En avril, elle a été immédiatement mise en détention administrati ve sans incul-pation ni jugement suite à son arrestation. Une campagne internationale s’en estsuivie, et elle a alors été inculpée de vant les trib unaux militaires israéliens (...)Jarrar a été inculpée de douze chefs d’accusation entièrement politiques concernantson activité publique, parmi lesquels les discours qu’elle a prononcés, les réunionspubliques auxquelles elle a assisté, et les demandes de libération de prisonnierspolitiques palestiniens. Elle a été accusée d’« incitation » pour avoir prétendumentappelé à l’enlèv ement de soldats israéliens d’occupation par la résistance palesti-nienne afin de faire libérer des prisonniers palestiniens. En dépit de cette af firma-tion de l’armée d’occupation, celle-ci n’a pas pu produire de témoin pour confirmerque Jarrar ait pu dire ceci – et les témoins qu’elle a présentés ont tous précisé qu’ilsavaient été menacés et torturés pour les amener à témoigner contre elle.

En dépit de la nature éminemment politique des accusations (...) et du plaidoyerrésolu de ses avocats d’Addameer, elle a été déclarée coupable – comme il est toutà fait classique – et condamnée à passer quinze mois dans les prisons de l’occupant.

« La déclaration de la culpabilité de Khalida Jarrar ne constitue pas une surpri-se ; les tribunaux militaires israéliens n’ont pour seule fonction que de constituerun instrument de répr ession dirigée contr e les P alestiniens.» a déclaré CharlotteKates, coordinatrice de Samidoun, Réseau de Solidarité a vec les PrisonniersPalestiniens.

Samidoun 8 décembre 2015

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Courrier du CVPR, n°59 p.8

Tandis que nous approchions du canalde Suez vers la fin de la campagne du

Sinaï en juin 1967, je demandai à un offi-cier supérieur réserviste de l’armée israé-lienne – qui devint plus tard l’un des prin-cipaux leaders de la gauche sioniste radi-cale – ce qui se passait en Cisjordanie. «On ac hève la guerr e d’indépendance »,me répondit-il. Tel était alors le discoursdominant en Israël, et il l’est encoreaujourd’hui, au même titre que celui desdroits historiques du peuple juif sur laterre de la Bible, qui sert fondamentale-ment à légitimer l’occupation et le projetde colonisation.

Deux concepts distincts de nation

L’ambition du sionisme était, par défi-nition, de conquérir et coloniser laPalestine. C’était la nécessité du moment.Le sionisme était une nécessité, la consé-quence inévitable de la crise du libéralis-me et de la montée du nationalisme radi-cal en Europe. Les dernières décennies duXIXe siècle ont été marquées par l’abou-tissement d’un processus global d’assautcontre l’héritage des Lumières, la défini-tion politique et légale de ce qui f aisaitune nation, et contre le statut et les droitsautonomes de l’indi vidu en tant qu’êtrehumain.Le destin des juifs dépendantdepuis la Rév olution française du destindes v aleurs libérales, les fondateurs dusionisme ont compris que si une crisemettant en cause la démocratie et lesdroits de l’homme de vait se produire enFrance – la société libérale la plus a van-cée du Vieux Continent –, cela n’auguraitrien de bon pour l’a venir des juifsd’Europe centrale et orientale. Depuis lemilieu du XVIII e siècle, existaient deuxconcepts distincts de nation. Le premier ,

qui correspond au point de vue desLumières tel qu’il a été présenté dans leDictionnaire raisonné de Diderot, définitla nation comme un agrégat d’indi vidussoumis au même gouv ernement et vivantà l’intérieur des frontières d’un mêmepays. Le second présente la nationcomme un corps organique, un produit del’histoire, où le rapport aux individus for-mant le peuple est pareil à celui d’unarbre avec ses branches et ses feuilles : lafeuille existe grâce à l’arbre, c’est pour-quoi l’arbre a préséance sur la feuille.

Mythe contre raison

Depuis sa création, le mouv ementnational juif affiche les mêmes caractéris-tiques que celles de ses pays d’origine enEurope centrale et orientale : une identi-té nationale tribale, façonnée par l’histoi-re, la culture, la religion et la langue – uneidentité en vertu de laquelle l’individu nese déf init pas lui-même mais se trouv edéfini par l’histoire. La notion de« citoyenneté », à laquelle est raccroché

en Occident le concept de nation, n’avaitaucun sens en Galicie, en Ukraine oudans la Russie blanche. Et cela valait éga-lement pour les juifs : les sionistes pou-vaient bien cesser d’observ er les pré-ceptes religieux et rompre a vec leur reli-gion au sens de foi métaphysique, mais illeur était impossible de rompre l’attachehistorique et l’identité historique qui sefondaient sur la religion.

Même si chacun sait d’e xpérience quela conquête et la colonisation de laPalestine ont été déterminées par la situa-tion catastrophique qui commençait às’installer en Europe de l’Est à la f in duXIXe siècle, le besoin e xistentiel récla-mait une « couverture » idéologiqueafin que la conquête de la terre soit inves-tie d’une légitimité historique.L’idéologie du retour sur « la terr e denos pères » n’a pas été élaborée par desreligieux pratiquants mais par des natio-nalistes laïcs pour qui – comme cela avaitété le cas pour le « nationalisme inté-gral » français – la religion, dépourvue deson contenu métaphysique, offrait unciment social et ne servait essentiellementqu’à réaliser une fusion nationale.L’histoire précéda une décision rationnel-le, et c’est l’histoire qui a façonné l’iden-tité collective.

La plupart des dirigeants politiquessavent qu’il est bien plus ef ficace deconvaincre les gens par la force d’unmythe que par la force de la raison. Lavérité, c’est qu’au XX e siècle, les juifsavaient plus besoin d’un Etat qu’aucunautre peuple au monde. P ar conséquent,les dirigeants politiques du mouv ementsioniste et du Yichouv (la communautéjuive présente en Palestine avant 1948) sesont focalisés sur ce b ut suprême quereprésentait la création d’un Etat juif. La

La solution à deux Etatsest la seule raisonnable

par Zeev Sternhell (1)

Le Mur des lamentations Le Dôme du Rocher

C’est contre la colonisation continue des territoires conquis en1967 que se rév oltent une f ois de plus en ce moment lesPalestiniens. Ils compr ennent que la colonisation vise à per pé-tuer l’infériorité palestinienne et r endre irréversible la situationqui dénie à leur peuple ses dr oits fondamentaux. Ici se trouve laraison des violences actuelles et on n’y mettra f in que le jour oùles Israéliens accepter ont de r egarder les P alestiniens commeleurs égaux et où les deux peuples accepteront de se faire face surla « ligne verte » de 1949, issue des accords d’armistice israélo-arabes de Rhodes.

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Shoah a transformé l’entreprise sionisteen un projet mondial, une dette due aupeuple juif. Tel était le conte xte sur fondduquel a eu lieu la guerre d’indépendancede 1948.

Le sionisme, victime de son succès

Au lendemain de la guerre, il de vintclair que le Yichouv avait été victime deson succès. La direction prise par l’Etatnouvellement établi s’inscri vait dans leprolongement direct de la période précé-dente : aucun tournant, aucun nouv eaucommencement pour inaugurer une èrenouvelle. Ce fut la grande f aiblessed’Israël et c’est encore aujourd’hui l’unedes sources de notre malaise.

Aussi la communauté de tous les« citoyens », qui incluait nécessairementles Arabes restés sur le territoire, était-elle perçue comme infiniment inférieure àla communauté nationale et religieuse dupeuple juif. La déclaration d’indépendan-ce n’était pénétrée d’aucune puissancelégale ou morale. C’était un document derelations publiques, destiné à l’opinionpublique occidentale.

Jusqu’en 1966, le système démocra-tique israélien n’empêchait pas les pèresfondateurs de placer les Arabes sous auto-rité militaire ni de les pri ver de leursdroits de l’homme et de cito yen. Aucunbesoin de sécurité ne le justif iait, seule-ment une nécessité psychologique : ilfallait enseigner aux Arabes qui étaientles maîtres et maintenir l’état d’urgen-ce qui prév alait a vant la création del’Etat d’Israël. (ndlr, souligné par nous)

La plupart des Israéliens n’ont pascompris, et certains ont refusé de com-prendre, qu’il f allait mettre f in à cettesituation transitoire, que ce qui était légi-time et juste a vant 1949, parce que laconquête territoriale était nécessaire,avait cessé de l’être après la guerre.L’idée selon laquelle moins il y a vaitd’Arabes demeurant dans l’Etat juifmieux cela v alait était compréhensibleétant donné la guerre pour la survie qui sejouait alors.

Cependant, après la victoire et l’ouver-ture du pays à une immigration massi ve,une nouvelle ère de vait commencer. Sonsymbole le plus saillant aurait du être uneconstitution, ainsi que le promettait ladéclaration d’indépendance : une consti-tution démocratique, fondée sur les droitsde l’homme et plaçant en son cœur la vie

politique et sociale du corps des citoyens,et non pas d’une communauté religieuseou ethnique particulière.

Une telle constitution aurait montréque les juifs de venant cito yens de leurpropre Etat aux côtés des non-juifs, unchapitre entièrement nouveau de leur his-toire s’écri vait. En même temps, uneconstitution aurait délimité les frontièresterritoriales telles qu’elles furent f ixées àl’issue de la guerre. Israël n’a pas de fron-tières permanentes ni de constitution,parce que les pères fondateurs l’ont vouluainsi : toutes les options devaient demeu-rer ouvertes, y compris celles qui s’ouvri-rent en juin 1967.

Durant la guerre des Six-Jours de1967, des territoires qui étaient encorehors de portée vingt ans aupara vant tom-bèrent dans les mains israéliennes commeun fruit mûr. Puisque rien n’était définitif,les élites dirigeantes du mouv ement tra-vailliste n’avaient aucune raison de ne paspersévérer dans la v oie qui fut jusque-làsi victorieuse. Quelle importance pouv aitavoir la « ligne verte » aux yeux de celeadership ? N’était-ce pas simplementun instantané de la situation qui sui vit lafin des hostilités en 1949 ?

Sortir de l’impasse

Près d’un demi-siècle s’est écoulédepuis lors et le mouv ement national juifest entré dans une impasse. Encoreaujourd’hui, l’opposition de centregauche est incapable de proposer unealternative idéologique au projet de colo-nisation, alternative fondée sur le principeque ce qui était légitime a vant la guerred’indépendance de 1948-1949, parce quecela était nécessaire, a cessé de l’être parla suite et donc que les colonies ne sontpas simplement illégales mais illégitimeset immorales et qu’elles ne rencontrentaucun critère de principe, parce qu’ellesne sont pas nécessaires et certainementpas utiles pour l’avenir du peuple juif.

Quels sont les hommes politiques del’opposition qui seraient prêts à œuvrerconcrètement pour désamorcer cettefuneste bombe à retardement ? Quiparmi eux accepterait d’assumer l’idéeque les droits historiques du peuple juifsur la terre d’Israël n’ont pas priorité surles droits des P alestiniens à être maîtresde leur destin et donc qu’il f audrait scin-der équitablement le pays.

Le temps est v enu de reconnaître que

l’opération de conquête territoriale quis’est achevée en 1949 et la partition dupays réalisée à la f in de la guerre d’indé-pendance doi vent constituer l’ultimeséparation. Ce n’est que sur cette baseque nous pourrons construire l’a venir.Quiconque r efuse de compr endre quele sionisme fut une opération destinée àlibérer un peuple et non pas des pierressacrées, un acte politique rationnel etnon pas une irruption messianique,condamne Israël à s’enf oncer dange-reusement soit dans une situation colo-niale soit dans un Etat binational,autrement dit dans une guerr e ci vilepermanente. (ndlr, souligné par nous)

La « ligne verte » est la frontièredéfinitive

Tant que la société jui ve ne reconnaîtpas l’égalité des droits de l’autre peuplerésidant sur la terre d’Israël, elle conti-nuera de sombrer dans une réalité ouv er-tement coloniale et ségrégationniste,comme celle qui e xiste déjà dans les ter-ritoires occupés. Le conflit qui sévitaujourd’hui à Jérusalem comme les tragé-dies, les attentats et les meurtres qui frap-pent l’existence quotidienne des Juifs etdes Arabes sont un bon e xemple de ceque l’a venir nous réserv e dans un Etatbinational.

Naturellement, cette approche e xigesymétrie et réciprocité du côté palesti-nien : la « ligne verte » est la frontièredéfinitive, donc aucune colonie jui ve nes’établira plus en Cisjordanie, mais aucunPalestinien ne de vra retourner à l’inté-rieur des frontières de l’Etat d’Israël.

Le sionisme classique s’est f ixé pourtâche d’offrir un foyer au peuple juif. Letemps qui a séparé la guerre d’indépen-dance de la guerre des Six-Jours a montréque tous les objectifs du sionisme pou-vaient être réalisés à l’intérieur du tracéde la « ligne verte ». La seule questionsensée que l’on puisse poser aujourd’huiest donc de savoir si la société israéliennea encore la capacité de se réin venter, desortir de l’emprise de la religion et del’histoire et d’accepter de scinder le paysen deux Etats libres et indépendants

15 octobre 2015

(1) Membr e de l’Académie israéliennedes sciences et lettr es.Professeur àl’Université hébraïque de Jérusalem.

Traduit de l’anglais par P auline Colonnad’Istria « Haaret’z »

Courrier du CVPR, n°59, p.9

Proche-Orient

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B. Nétanyahou dur cit le toncontre d’anciens conscrits del’armée israélienne

Réunis au sein de l’ONG Rompre lesilence, ceux-ci dénoncent, depuis

2004, les pratiques de l’armée dans lesTerritoires palestiniens et sont devenus labête noire de la droite nationaliste. Mardisoir, le ministre de l’Education a annoncéson souhait de leur interdire l’accès auxétablissements scolaires. Peu aupara vant,son collègue en char ge de la Défenseavait indiqué vouloir les bannir des basesmilitaires. « Ces décisions n’aur ont pasde conséquences pratiques dans le mesu-re où nous intervenons très peu dans cetype d’enceintes, réagit Avihai Stollar ,l’un des porte-par oles de l’ONG, maiselles s’inscrivent dans une campa gneinquiétante qui vise à fair e taire un cer-tain nombre de groupes légitimes en r ai-son de leurs prises de position. »

Fondée par d’anciens soldats qui servi-rent à Hébron durant la seconde intif ada,l’association Rompre le silence diffuserégulièrement des recueils de témoi-gnages livrés par des vétérans, en généralsous couvert de l’anonymat, sur le dérou-lement de leurs missions. En mai 2015,elle a ainsi publié un v olumineux rapportsur les coulisses de l’opération « Bordureprotectrice », qui a f ait près de 2.200morts dans la bande de Gaza. « Les règlesd’engagement tr ansmises aux soldatssont les plus permissives jamais portées ànotre connaissance » , affirmèrent alorsles responsables de l’ONG, qui dénoncè-rent « une politique de tir s indiscrimi-nés » et accusèrent l’armée d’a voir violéson propre code éthique. Ce « J’accuse »tonitruant, largement relayé par lesmédias internationaux, contribua à attiserla colère d’une lar ge partie de la sociétéisraélienne contre Rompre le silence . Legouvernement promit, dans la foulée, delégiférer contre plusieurs ONG accuséesde dénigrer Israël.

En déb ut de semaine, les parents desept soldats morts au combat ont écrit auministre de la Défense afin de dénoncer lefinancement de Rompre le silence parCourrier du CVPR, n°59 p.10

plusieurs gouvernements européens. « Ilest impensable, écrivent-ils, que cetteorganisation manipulée par l’étr angerpuisse a gir plus longtemps contr e lesintérêts de l’Etat d’Isr aël. Vous avez lepouvoir, au gouvernement comme à laKnesset, de stopper ce phénomène . »« Comment est-il possible que des of fi-ciers accomplissent une mission sacrée etrisquent leur vie pour af fronter ensuiteles accusations diffamatoires formulées àleur encontre ? » , s’est insurgée MichalSarel, l’une de ces mères endeuillées. Lesauteurs du courrier pressent en particulierle gouv ernement d’adopter un projet deloi qui permettrait de limiter le f inance-ment de ces associations par des bailleursétrangers.

Presque simultanément, l’ONG ultra-nationaliste Im Tirztu a diffusé une vidéoincendiaire qui désigne e xplicitementplusieurs organisations hostiles à l’occu-pation de la Cisjordanie comme autantd’« a gents » stipendiés par l’étrangerpour œuvrer à l’af faiblissement d’Israël.« Pendant que nous combattons le terr o-risme, ils nous combattent » , accusenotamment ce f ilm d’un peu plus d’uneminute, qui cible nommément les respon-sables des associations Rompre le silen-ce, B’Tselem, HaMoked, et Comitépublic contre la torture. La vidéo, quis’est propagée à toute vitesse sur lesréseaux sociaux, a été condamnée par unelarge partie de la classe politique, quiaccuse Im Tirtzu de jouer a vec le feu endésignant des responsables associatifs àla vindicte populaire.

« C’est la pr emière fois que nousassistons à une telle campa gne d’incita-tion à la haine contre des ONG », consta-te Avihai Stollar , le porte-parole deRompre le silence, qui affirme prendre lasituation « très au sérieux » .« Contrairement à ce qu’af firme leministre de l’Education, nous n’avonsjamais appelé au boycott d’Isr aël,illustre-t-il. Mais ce type d’accusationpermet à la droite de balayer le nécessai-re débat sur les conséquences néfastes del’occupation. »

Cyrille LOUISLe Figaro, 17 décembre 2015

Déclaration deJacques Chirac,

il y à 25 ansExtrait de l’inter vention de J .

Chirac, président du gr oupe RPRà la v eille de la guerr e du Golfecontre l’Iraq suite à la résolutiondu 29 no vembre 1990, sous cha-pitre VII (recours à la force) (p. 14-15 du CR au JORF du 17/01/1991)

Certes, les problèmes ne sont pasles mêmes, mais qui empêc hera-t-onde penser qu'il y a de par le mondedeux poids et deux mesur es ? Lerèglement de la crise du Golfe doitpermettre de créer un précédentopposable à toutes les atteintes por-tées aux libertés des peuples et deshommes, et c'est là la justif icationessentielle et primor diale de notr eintervention dans cette région.

En clair, cela signifie que JacquesChirac disait le 17 jan vier 1991 qu’ilfaudrait une résolution du Conseil deSécurité sous chapitre VII pour inci-ter fermement l’Etat israélien à év a-cuer tous les territoires palestiniensoccupés depuis juin 1967. Une évi-dence à rappeler !

La grandedémocratie israélienne

Courant novembre 2015, le villagebédouin d’Al Hadidya dans la Valléedu Jourdain a été rasé au b ulldozer.

14 familles - 97 personnes,dont 30enfants et 6 bébés - ont été abandon-nées sans maison.

Même les tentes qui leur a vaientété données pour s’abriter ont étéconfisquées par les autorités israé-liennes !

La droite israéliennes’attaque à une association

d’anciens soldats

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Courrier du CVPR, n°56 p.11

Attentats du 13 novembre 2015

Antoine Leris a perdu sa femme au Bataclan le 13 no vembre 2015

« Vous n’aurez pas ma haine »

Vendredi soir vous avez volé la vie d’un être d’e xception, l’amour de ma vie, lamère de mon fils mais v ous n’aurez pas ma haine. Je ne sais pas qui v ous êtes etje ne veux pas le sa voir, vous êtes des âmes mortes. Si ce Dieu pour lequel v oustuez aveuglément nous a fait à son image, chaque balle dans le corps de ma femmeaura été une blessure dans son coeur.

Alors non je ne v ous ferai pas ce cadeau de v ous haïr. Vous l’avez bien cherchépourtant mais répondre à la haine par la colère ce serait céder à la même ignoran-ce qui a f ait de vous ce que v ous êtes. Vous voulez que j’ai peur , que je re gardemes concitoyens avec un oeil méfiant, que je sacrifie ma liberté pour la sécurité.Perdu. Même joueur joue encore.Je l’ai vue ce matin. Enfin, après des nuits et des jours d’attente. Elle était aussibelle que lorsqu’elle est partie ce v endredi soir, aussi belle que lorsque j’en suistombé éperdument amoureux il y a plus de 12 ans. Bien sûr je suis dév asté par lechagrin, je vous concède cette petite victoire, mais elle sera de courte durée. Je saisqu’elle nous accompagnera chaque jour et que nous nous retrouv erons dans ceparadis des âmes libres auquel vous n’aurez jamais accès.

Nous sommes deux, mon fils et moi, mais nous sommes plus fort que toutes lesarmées du monde. Je n’ai d’ailleurs pas plus de temps à v ous consacrer, je doisrejoindre Melvil qui se réveille de sa sieste. Il a 17 mois à peine, il va manger songoûter comme tous les jours, puis nous allons jouer comme tous les jours et toutesa vie ce petit garçon v ous fera l’af front d’être heureux et libre. Car non, v ousn’aurez pas sa haine non plus.

Lettre ouverte aux terroristesd'Antoine Leris, journalistede France Bleu

Amitiés de Gaza la vie,à Paris la vie !

par Ziad Medoukh

De Gaza sous blocus à Paris sous lechocDe Gaza la souffrante à Paris l’en-deuilléeDe Gaza l’opprimée à Paris la blesséeDe Gaza, les agressions permanentesà Paris les attentats meurtriersDe Gaza la prison à ciel ouv ert àParis la douloureuseDe Gaza l’isolée à Paris la courageuseDe Gaza la détruite à P aris la villelumièreDe Gaza la pacifique à Paris l’ac-cueillanteDe Gaza la confiante à Paris la tolé-ranteDe Gaza la dignité à Paris la solidaritéDe Gaza l’enclave assiégée à Paris laforce de vieDe Gaza la résistante à Paris l’avenirDe Gaza la déterminée à Paris l’espoirDe Gaza la volonté à Paris les valeursuniversellesLe combat, c’est notre combat à noustousContre la haine, contre la barbarie etcontre le terrorismePour la liberté, l’amour, la fraternité etla paixMessage de tolérance, message desoutien, message de compassionMessage de sympathie, et message desolidaritéLa vie continue à Gaza, et la viecontinuera à Paris malgré ces événe-ments tragiques.Amitiés de Gaza la vie à P aris la viemalgré tout !

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Courrier du CVPR, n° 59 p.12

Nous, uni versitaires et intellectuelspalestiniens, condamnons ferme-

ment les actes de barbarie commis parles terroristes qui se re vendiquent del’Etat islamique, et partageons l’émo-tion et la tristesse des proches des 132victimes de ces tueries ignobles, ainsique des centaines de femmes ethommes blessés durant les massacresde vendredi soir.

En ef fet, ce terrorisme a veugle etinhumain a essayé de viser le cœur etl’esprit de l’être humain en s’attaquant

à la capitale de la liberté, de l’égalité,de la fraternité et des droits de l’hom-me. Ils ont tenté de v aincre la force dela vie représentée par la liberté de pen-ser, de créer , d’aimer et de vi vre enimposant leur vision de la vie basée surla négation de l’autre par son élimina-tion pure et simple quelles que soientson origine, sa culture, ses cro yances,ou ses convictions.

Le peuple français était et resterasensible aux problèmes politiques,économiques, culturels et humains du

monde qui l’entoure et ces actes debarbarie n’atteindront jamais cet espritde liberté et d’humanisme qui est né enlui à tra vers sa lutte contre l’oppres-sion, les inégalités et l’injustice. De cefait, sa capitale P aris blessée par cesévénements tragiques continuera àrayonner contre ces forces d’obscuran-tisme venues du Moyen-âge.

En rendant hommage aux victimesde la terreur à P aris vendredi, en évi-tant qu’il y en ait da vantage et en f ai-sant en sorte que des mots tels que« Liberté, Egalité, F raternité » pren-nent tout leur sens, nous espérons quele gouv ernement français mettra touten œuvre pour continuer à lutter contrel’origine du mal incarné par l’injustice,l’ignorance, la pauvreté et la dictatureet aidera les femmes et les hommesqui, ici et ailleurs, défendent la liberté,les droits de l’homme et la démocratie.

LLLLeeeessss aaaatttttttteeeennnnttttaaaattttssss ddddeeee PPPPaaaarrrr iiiissss dddduuuu 11113333 nnnnoooovvvveeeemmmmbbbbrrrreeee

Déclaration d’un grouped’universitaires

et d’intellectuels palestiniens17 novembre 2015

Une fois remis du choc des attentats,l’Occident comprendra qu’il doit

s’atteler à résoudre les conflits duMoyen-Orient pour trouv er la paix.(…) Ici, le P alestinien se bat pourconserver sa terre et son pays, sedébarrasser de l’occupation, e xercerson droit à l’autodétermination et à laliberté. Là-bas, le b ut du jeu est dedétruire l’Europe et de la soumettre.Ici, la motivation est nationale et poli-tique. Là-bas, c’est le fondamentalismereligieux. Pour l’instant, la droite israé-lienne n’a pas tout à f ait tort de seréjouir. Ses prophéties autoréalisatricessont en train de se concrétiser. Si Israëlne change pas sa politique, le jeuneagresseur au couteau d’Hébron, unefois adulte, de viendra un kamikaze deDaech. Déjà, ses yeux re gardent avecavidité les « e xploits » de ses aînés.Son désespoir ne lui laisse pas d’autreespoir.

Daech n’est pas encore ici. Maisnous pouvons compter sur Nétanyahouet consorts pour le couv er.L’occupation avait déjà donné naissan-ce au Hamas et au Djihad islamique.Une Cisjordanie désespérée et une

giés et attise les flammes de la xéno-phobie, elle fera le jeu de Daech.

La droite israélienne se réjouit tropvite. S’il y a une leçon à tirer des évé-nements de P aris, c’est qu’il n’e xisteplus de guerres locales, mais desguerres mondiales interconnectées. Lemonde ne peut plus continuer à fermerles yeux sur ce qui se passe en Syrie etsous l’occupation israélienne. Unefois remis du choc, le monde se libé-rera peut-être de sa paralysie et com-prendra qu’il doit s’atteler à résoudreles conflits qui font rage dans la Syriemartyre et dans les Territoires palesti-niens occupés. La droite israélienneaura l’air malin.

Ha’aretz, 15 novembre 2015

La droite israélienne se réjouit trop vitepar Gidéon Lévy

Gaza emprisonnée sont des terrainsparticulièrement fertiles pour l’appari-tion de jeunes pousses de Daech. Lesnervis de l’occupation et les « liquida-teurs » qui prennent d’assaut les hôpi-taux et les écoles sont des accéléra-teurs de particules djihadistes. Mais ladroite européenne, elle, se trompe. Lesdizaines de milliers de réfugiés musul-mans qui frappent aux portes del’Europe essaient de sauv er leur peauet d’échapper à la vraie terreur djiha-diste, celle qui est en train d’attaquerl’Europe. A peine sont-ils parv enus àfuir ces gens qui ont déjà détruit leurspays d’origine qu’ils les retrouvent enEurope en train de commettre un mas-sacre comme celui du Bataclan. Sil’Europe ferme ses portes à ces réfu-

Relâchez cet homme, il n’a rien fait ! semble dir e aux forces de l’ordreisraéliennes ce Palestinien dans Jérusalem.

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Courrier du CVPR, n°59,p.13

Les attaques des commandos deDaech à Paris et à Saint-Denis pro-

voquent chez toute personne senséel’indignation et la colère : des cen-taines de civils innocents ont été mas-sacrés par des tueurs armés de kalach-nikovs et d’une idéologie mortifère.Mais on ne peut se limiter à l’indigna-tion, et même devant les images d’hor-reur que les chaînes de télévision nousservent en boucle, il nous f aut f airel’effort de comprendre, ne serait-ceque pour mettre en garde contre ce quirisque de pro voquer de nouv eauxattentats de ce genre.

Le langage utilisé par les tueurs deDaech est celui du choc des ci vilisa-tions. Mais d’où vient cette idéologie ?Certainement pas des quartiers popu-laires de Brux elles ou de P aris, pasplus que des banlieues de Damas oudes uni versités de T unis. L ’idéologiedu choc des ci vilisations est née aumilieu des années 1980 dans les think-tanks néoconserv ateurs américano-israéliens. C’est Samuel Huntingtonqui, sous forme d’anticipation, l’athéorisé de fait. Les politiques néocon-servateurs, en particulier Geor ge W .Bush et Ben yamin Netan yahou, v ontalors en f aire une stratégie, simplistemais sanglante.

Selon la pensée néoconservatrice, lemonde est di visé en deux ( « l’axe dubien » et « l’axe du mal », chers à l’an-cien locataire de la Maison-Blanche età ses conseillers) : d’un côté le mondecivilisé, démocratique et assoif fé deliberté, de l’autre les barbares quimenacent cette ci vilisation. Si, audébut, ils dénommaient l’ax e du mal« le terr orisme international » , il arapidement été ré-identifié comme le« terrorisme islamiste » pour de venirfinalement, dans la logique du choc des

civilisations, l’islam lui-même commemenace civilisationnelle. Pour les néo-conservateurs le choc est bel est bienentre ce qu’ils appellent la « civilisa-tion judéo-c hrétienne » et le mondemusulman.

Le corollaire de cette division civili-sationnelle du monde est la guerre glo-bale, permanente et prév entive, danslaquelle se lancent les États-Unis etleurs alliés, en Afghanistan, en Iraq, auLiban et en P alestine. Des millions demorts, des destructions sans nom, dessommes colossales gaspillées dans laguerre et l’armement pour finalementdéboucher sur un échec cinglant : larésistance des peuples a tenu tête auterrorisme d’État global et a réussi àfaire reculer l’Empire. Bush a dû f aireplace à Barack Obama et la stratégie dela guerre globale à une politique plussubtile faite, entre autres, de sous-trai-tance à des régimes locaux, desgroupes paramilitaires et d’autresÉtats.

La France s’est chargée de ce qu’el-le considère comme sa chasse gardée,l’Afrique subsaharienne francophoneoù elle fomente des coups d’État, armedes milices, et n’hésite pas non plus àbombarder (Libye), v oire à en voyerdes troupes au sol, comme c’est le casau Mali. Et l’appétit vient en bombar-dant : f ace à la prétendue mollesse deBarack Obama, Napoléon-Hollandedécide d’interv enir en Syrie, et d’ysemer la mort et la destruction.Comme les États-Unis en ont f ait l’ex-périence dans des a ventures militairesprécédentes, les frappes dites chirur gi-cales sont grosses de ba vures et les« victimes collatér ales » se multi-plient. S’il y a vait des guerres unilaté-rales, on le saurait. T oute agressionprovoque tôt ou tard une réaction, que

ce soit sous forme de résistance sur leterrain ou d’actes de représailles dansla métropole impérialiste. La tuerie descommandos de Daech à Paris et Saint-Denis est d’abord une action de repré-sailles aux a ventures militaires san-glantes de la France en Syrie. FrançoisHollande aurait dû apprendre du casisraélien que toute agression pro voqueune réaction, quel que soit le rapport deforces d’ailleurs : quarante-cinq ansaprès le début de l’occupation colonia-le israélienne de la Cisjordanie et deGaza, une nouv elle génération se sou-lève, a vec des couteaux de cuisine etdes tourne vis et réduit à néant l’illu-sion d’une normalité et la propagandesur la sécurité des Israéliens.

Et pourtant, le gouv ernement israé-lien, une partie des médias locaux et del’opinion publique, ont le culot de semoquer ces derniers jours de la France,de sa mollesse et de son échec dans lalutte contre le terrorisme ; Netanyahous’est même porté v olontaire pourenseigner aux autorités françaisescomment on f ait front au terrorisme.S’il n’était pas enivré par l’ubris et parses propres discours, le premierministre israélien dirait au présidentfrançais que de nouv elles lois liberti-cides, l’amendement de la Constitutionet la criminalisation de tout ce qui estbasané, ne produisent ni l’écrasementdu terrorisme ni plus de sécurité auxcitoyens, bien au contraire.Netanyahou est le dernier à pouv oir semoquer de l’« impuissance française »,lui qui n’arri ve pas à juguler lesattaques au couteau de cuisine dejeunes adolescents palestiniens. Mais ilfaut bien qu’il dise quelque chose,alors que les terroristes de P aris et deSaint-Denis ne lui ont pas servi cettefois son plat préféré : l’attaque d’unesynagogue ou un attentat dans unHyper Cacher aux cris de « mort auxjuifs ».

(1) P aru dans la r evue de pr esse del’Union Juive Française pour la P aix du 26novembre 2015

La riposte de Parisau choc des civilisationspar Michel Warshawski

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Courrier du CVPR, n°59 p.14

LLLLeeeessss aaaatttttttteeeennnnttttaaaattttssss ddddeeee PPPPaaaarrrr iiiissss dddduuuu 11113333 nnnnoooovvvveeeemmmmbbbbrrrreeee

Les messages de sympathie ontafflué de tous les points du globe.

On m’a écrit du Canada, des États-Unis, d’Australie, de Norvège, d’Israëlet de Palestine. C’est que chacun s’estsenti visé dans son humanité : ce nesont pas les v aleurs de la républiqueque les attentats de P aris ont atteint,c’est le minimum de confiance quinous permet de vi vre ensemble, et quifait que de jeunes parents peuvent s’as-seoir à la terrasse d’un café ou serendre à un concert sans craindre pourleur vie. Une semaine aupara vantc’était Be yrouth qui était frappée, unmois plus tôt c’était Ankara, et depuisau moins trois ans la Syrie toute entiè-re vit ce calv aire. La pensée de toutes

ces victimes nous accompagne.Arrêtez ces massacres !

Il y a trop de problèmes en suspensdans la région, et si on ne les résoutpas, on aura beau écraser Daesh, ilsengendreront d’autres monstres. Leproblème palestinien n’est pas le seul,mais il est emblématique : si on peut lerésoudre sur la base du droit internatio-nal et des résolutions de l’ONU, onaura f ait un grand pas v ers l’apaise-ment.

Mais pour parler le langage du droitet de la solidarité, il faut être exemplai-re. Notre gouv ernement a ressorti lesvaleurs de la république comme on

sortait les saints de leur placard et onles promenait en procession dans lesrues pour conjurer les calamitéspubliques.

Où étaient les v aleurs de la répu-blique quand Bachar El-Assad prési-dait le déf ilé du 14 juillet, quandMuammar Khadaffi plantait ses tentessur les Champs-Élysées, ou que le pré-sident de la République allait auxobsèques du roi d’Arabie Saoudite ?Faute de réfle xion, il est engagé dansune politique belliqueuse à l’e xtérieur,et répressive à l’intérieur . Nous a vonseu la circulaire Alliot-Marie et lespoursuites pénales systématiques enga-gées contre les militants BDS, nousavons l’état d’ur gence prolongé pourtrois mois (au moins), nous aurons uneréforme de la constitution. Nous n’au-rons pas de réfle xion sur l’état del’éducation dans notre pays ni sur l’ab-sence de mixité sociale, nous n’auronspas de débat national sur la politiqueéconomique ni sur la défense des liber-tés, dont la liberté d’e xpression. Ehbien, ces réflexions et ces débats il fau-dra les mener ailleurs, et en tirer lesconséquences, quitte à les imposer ànotre gouvernement par des initiati vescitoyennes.

Sortirde la violencepar Ivar Ekeland,

dans « Newsletter de l’AURDIP »,

23 novembre 2015

Evacuation, par les pompiers de Paris, d’un blessé sorti du Bataclan le 13 no vembre

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Un article du journal israélienHaaret’z publié le 3 jan vier révèle

que le groupe Orange va mettre fin à sonaccord avec la société israélienne PartnerCommunications dès le mois prochain.Ainsi il aura f allu six ans à la campagnede Bo ycott, Désinvestissement etSanctions pour f aire plier Orange etconvaincre sa direction de couper lesliens avec une entreprise complice de lacolonisation brutale et des crimes del'Etat israélien.

En effet, c'est en 2010 qu'une organisa-tion israélo-palestinienne, Who Profits ,signale la présence d’ Orange dans lescolonies israéliennes et la fourniture deservices réservés e xclusivement auxcolons et aux soldats israéliens d'occupa-tion. La Campagne BDS France est alorsalertée, et elle interpelle les syndicats deFrance Télécoms, leur demandant deprendre position contre cette présence enparfaite contradiction a vec la charte

éthique de l'entreprise. En 2011, c'estdonc SUD PTT qui porte d'abord lacontestation au sein de l'entreprise, trèsvite rejointe par la CGT . Malgré cela,Orange renouvelle son contrat a vec l'en-treprise israélienne P artner Communi-cations en mai 2011.

En 2012, l’Association FrancePalestine Solidarité ( l'AFPS ), , lanceune grande pétition cito yenne pour f airepression sur Orange, et une action com-mune est or ganisée entre la CampagneBDS France, l'AFPS, SUD PTT et laCGT lors de l'Assemblée Générale dugroupe en juin 2012. La campagne, avecla participation du Collectif Nationalpour une P aix Juste et Durable entrePalestiniens et Israéliens (CNPJDPI),prend alors deux formes : d'une part, desactions cito yennes de vant les agencesOrange dans toute la France, actions d'in-formation et de collectes de signatures viaune pétition par cartes postales adressées

à la direction d' Orange; d'autre part, desinitiatives directement auprès de la direc-tion d'Orange, du gouvernement françaiset du ministère palestinien des télécom-munications. A l'occasion du F orumSocial Mondial de Tunis en 2013, lescartes postales sont traduites en arabe etla campagne est étendue à la Tunisie,mais aussi à l'Espagne, grâce à la coordi-nation de la campagne BDS en P alestine.La campagne se dif fuse sur F acebook etTwitter, mais aussi dans la presse généra-liste.

En 2015, le site d’informationElectronic Intifada révèle que, lors de l'at-taque israélienne meurtrière sur Gaza del'été 2014, Partner Orange a sponsorisédeux unités de combat et fourni des ser-vices gratuits, des générateurs, des char-geurs et des tablettes aux soldats, ternis-sant encore un peu plus l'image de l'entre-prise. La stupeur est de rigueur, et se ren-force avec la publication du rapport "Lesliaisons dangereuses d'Orange", un réqui-sitoire rédigé par les associations fran-çaises de protection des droits humainsdans le monde dont le CCFD, la FIDH, laLDH, et l'association palestinienne Al-Haq.

La campagne est alors étendue auMaroc, mais surtout à l’Egypte, un paysclé dans la stratégie d'Orange qui souhai-te y renommer sa filiale Mobinil (30 mil-lions d'abonnés) en Orange Egypte . Uncommuniqué commun est publié entreBDS France et BDS Egypte: c'est la gout-te d'eau qui f ait déborder le v ase.Stéphane Richard, le président d’Orange,annonce alors son intention de retirer samarque du marché israélien de téléphoniemobile. La machine est lancée et sesdénégations n'y feront rien : huit moisplus tard, plus aucun téléphone portableen Israël ne mentionnera la marqueOrange. Cette déf aite est particulière-ment cuisante pour Haim Saban, princi-pal in vestisseur de PartnerCommunications, qui a vait déclaré laguerre à la campagne BDS.

Bien-sûr nous resterons vigilants jus-qu’à la rupture déf initive de l'accordd’Orange avec Partner Communica-tions, et nous continuerons inlassable-ment de dénoncer les in vestissements,même réduits, qu’Orange maintient enIsraël. Bien sûr , pour les P alestiniens, lacolonisation continue et PartnerCommunications maintient ses 200antennes relais et installations télépho-

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La campagne Boycott, Désinvestissement Sanctions trouve son origine dansl'appel lancé, le 9 juillet 2005, aux sociétés civiles internationales et aux gensde conscience du monde entier , par 172 partis, organisations et syndicats,représentant la société ci vile palestinienne, en vue d'imposer de lar ges boy-cotts à Israël, et des retraits d'investissement. Elle a essentiellement pour butde f aire respecter par Israël le droit international, superbement ignoré parl’Etat hébreu depuis sa proclamation par Da vid Ben Gourion, le 14 mai1948.

Cet appel énonce les exigences indissociables du peuple palestinien :

1/ Fin de l'occupation de la Palestine (Cisjordanie, Jérusalem-Est, Bande deGaza) et de la colonisation de toutes les terr es.

2/ Egalité absolue des droits accordés aux Juifs et aux Palestiniensd’Israël, dont la nationalité.3/ Droit des réfugiés au retour et à l'indemnisation, comme stipulé par larésolution 194 de l'ONU, du 11 décembre 1948.

La campagne BDSdans le monde

Orange : l'année 2016 commence bienpour la campagne BDS en France

La Campagne BDS France, le 6 janvier 2016

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niques illégales, l'occupation israéliennecontinue à tuer plus d'un P alestinien parjour en mo yenne, Gaza vit toujours sousun blocus insupportable et la moitié desPalestiniens du monde sont toujoursempêchés de rentrer chez eux. Maisaujourd'hui, il y a deux raisons de se féli-citer. D'une part, grâce aux pressionscoordonnées de la campagne BDS dans le

A l'aube d'une nouv elle année, ceretrait d’Orange des colonies ne f ait ques'ajouter à une longue série de victoires(Veolia, G4S, mais aussi sur le terrain duboycott culturel et uni versitaire) quiaugurent du succès d'une campagne quicontribuera inévitablement, tôt ou tard, àlibérer les P alestiniens de leur conditionde servitude sur leur propre terre.

Courrier du CVPR, n°59 p.16

monde entier , l'entreprise françaiseOrange ne participera plus aux e xactionsde Partner Communications dans lescolonies israéliennes. Et d'autre part, ils'agit d'une nouvelle leçon pour les inves-tisseurs étrangers qui doivent comprendrequ'ils ne peuvent désormais plus impuné-ment tirer profit d'une des dernières situa-tions coloniales dans le monde.

L’autre victoire des Palestinienspar Mohammed Larbi

Cette fois, c’est f ait. L’Europe a misfin à ses ter giversations, s’opposant

dans le même temps au lobby israélienqui tentait encore d’influencer sa poli-tique proche-orientale. Ef fectivement, laCommission européenne a demandé hieraux 28 Etats membres de mettre en œuvrel’étiquetage des produits originaires descolonies israéliennes dans les Territoirespalestiniens occupés depuis 1967. Ce quiconstitue une action importante dans lecadre d’une politique qui ne semblait,quant à elle, pas aussi évidente. Surtoutque là, l’Europe ne f ait que se mettre enconformité a vec les résolutions interna-tionales.

C’est véritablement à petits pas quel’Union européenne (UE) déploie sa poli-tique proche-orientale. On la disait tropfrileuse, malgré les rapports que lui fontparvenir ses propres représentants, aussibien en Israël que dans les Territoirespalestiniens, mais se rend-on compte, ellerefuse le statut qu’Israël v oudrait luiimposer, celui de l’omerta. Ce silence quise transforme en complicité. Et visible-ment, l’Europe enfermée dans une poli-tique commune qui ne serait pas celle detous ses membres, procéderait par étapes.Même si cela de vrait prendre du temps.Et même beaucoup, comme on a pu leconstater hier a vec la décision en ques-tion.

Elle-même découlant d’une proposi-tion de parlementaires européens d’éti-queter les produits en pro venance descolonies, et donc de les exclure de la listedes échanges avec Israël, autrement, cela

revendrait à reconnaître ces colonies enviolation des résolutions de l’ONU quiles considèrent comme illégales. C’est cetexte qui a f ait l’actualité ces derniersjours et suscite ce qui apparaît commeune crispation dans les relations entre lesdeux parties, il portait sur les produits descolonies israéliennes implantées dans lesterritoires palestiniens et dans le Golansyrien occupé, des indications qui nemanquent pas de précision.

Ce qui ne risque pas de ruiner l’éco-nomie israélienne, par contre, le coupsera rude, avec un impact diplomatiquecertain. « Nous ne parlons pas d’unequelconque forme de sanction ou de boy-cott, mais d’information du consomma-teur » , a dit une source européenne,comme pour mettre les choses au clair ,mais sans succès, comme en atteste enco-re la réaction israélienne propre d’ailleursà tout occupant.

Quantité négligeable mais…

Les produits concernés représentent«moins de 1,5%» des produits israéliensimportés dans l’UE, a dit cette sourceeuropéenne. Les produits industriels descolonies représentent seulement 0,7% desexportations industrielles israéliennesvers l’UE, et les produits agricoles 2,5%,selon le Parlement israélien.

C’est pourquoi, l’ensemble de la clas-se politique israélienne a eu la mêmeréaction. Elle est inquiète du messagesusceptible d’alimenter , selon elle, uneentreprise globale de délégitimation et la

distinction f aite entre Israël et les colo-nies. Ce qui a toujours été fait quoique demanière timide et presque discrète. Cequi démontre aussi le recul du lobby pro-israélien qui n’a pas empêché l’adoptionde ce texte fondamentalement politique.

Les Israéliens le sa vent et ils ont rapi-dement déplo yé leurs mo yens pour blo-quer cette décision. En recourant princi-palement au chantage, en déclarantqu’une telle décision rendrait larecherche de la paix avec les Palestiniensencore plus compliquée. « L’étiquetageéloigne la paix » , déclarait ainsi laministre adjointe israélienne des Affairesétrangères, sans jamais dire ce qui la ren-drait possible, et la décision européennepourrait y conduire si elle s’ajoutait àd’autres formes de pression pour amenerIsraël à respecter et appliquer les résolu-tions de l’ONU.

Beaucoup, par contr e, y v oient lecontraire, puisque cela rappelle desvérités incontestables, celle d’une occu-pation par la f orce, et c’est bien Israëlqui s’oppose à l’établissement d’unEtat palestinien indépendant. L ’UEtentait d’en atténuer l’impact ou lesens de sa décision. Mais en v ain, enatteste la réaction israélienne. A quandd’autres décisions qui rendraient justi-ce au peuple palestinien ? (ndlr : souli-gné par nous) 12 novembre 2015

L'étiquetage, en effet, implique la distinction entr e pr oduitsisraéliens et pr oduits des colonies. - distinction qu’Israël r efusepar principe - et pourrait ainsi alimenter une entr eprise globaletendant à déligitimer les f ondements mêmes de sa politique decolonisation.

CVPR-PO: Association 1901,fondée par Béréa Adli-Bloch

Président d’HonneurProfesseur Jacques Milliez.Président : Me Maurice Buttin.Vice Présidents : Francis Blanchet,Henri Folliet, Pierre Lafrance,Raymond Du Moulin.Secrétaire générale : Hasna Abid.Trésorier : Henri MarchalDirecteur de la publication : Maurice ButtinRédacteur en chef :Jean RabinoviciSecrétariat : 54, rue des Entrepreneurs, 75015PARISCCP 41 675 48 J La Sour ce.Courriel : [email protected]

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Courrier du CVPR, n°59 p.17

La fin d'une politique autonome de laFrance : Alain Gresh part du

« constat » de la fin, depuis une décennie,d'une politique régionale autonome de laFrance. Cette crise de la diplomatie fran-çaise au Mo yen-Orient s'inscrit dans uncontexte international marqué par « lerecul de la puissance américaine » , l'af-firmation de nouv eaux acteurs mais l'ab-sence de leadership qu'illustre la dif ficul-té à enrayer les nouvelles menaces.

Alain Gresh estime qu'après 2004, laFrance a rompu la tradition diplomatiquede la « neutralité » impulsée par le géné-ral de Gaulle, qui lui conférait son rôle demédiateur dans les conflits régionaux.Selon lui, la diplomatie française secaractérise depuis par la remise en causedu principe de non-ingérence, une attitu-de de « suivisme aveugle » à l'égard desÉtats-Unis, et de « rapprochement incon-ditionnel » avec Israël.

Pour Alain Gresh, cette « involution »s'explique par l'accession au pouv oird'une nouv elle élite dirigeante dans uncontexte où la gouv ernance tend à rem-placer la politique et où la diplomatie estsoumise à l'impératif économique, surfond de crise politique économique etculturelle. L'e xemple du conflit israélo-palestinien traduit cette nouv elle donne.Le principe de la sacralité de la sécuri-té d'Israël a, selon lui, remplacé dansles déclarations françaises la r evendi-cation légitime des Palestiniens à dispo-ser de leur pr opre État. (ndlr, soulignépar nous)

Par ailleurs, les « erreurs d'évaluationstratégique » de la France en Syrie : Parisa dès le départ apporté son soutien auxgroupes d'opposition armés pariant surl'effondrement du régime, puis a appelé àune intervention de l'Otan en septembre2013, pour f inalement s'engager dans le

combat contre l'État islamique (EI) enseptembre 2015. Tout cela illustre, pourAlain Gresh, « l'absence de vision poli-tique cohérente » qui s'insérerait dans unestratégie française au Mo yen-Orient.Comme le soutient l'analyste, en s'enga-geant sur dif férents théâtres au Mo yen-Orient, la France « n'a pas mesuré lesretombées de ses actions sur le plan de sasécurité intérieure ».

Islamophobie en hausse :les conséquencesdes attentats de Paris

Sur le plan interne, Alain Gresh noteque les attentats de P aris ont renforcé leclimat délétère de rejet de l'islam auprèsd'une partie importante de l'opinion.Cette islamophobie est alimentée par undiscours de défense d'une conceptiondénaturée de la laïcité et son instrumenta-lisation. Alors que comme le soulignel'intervenant, la laïcité historiquementgarantit à tout citoyen le libre exercice desa religion, y compris dans l'espacepublic, une relecture de la laïcité a per-mis, selon lui, de justif ier une nouv elleforme de racisme au nom de la moralitérépublicaine et de ses valeurs.

L'absence d'examen critique d'un dis-cours et d'une pratique politique de mar-ginalisation et d'e xclusion d'une compo-sante de la population e xplique l'érosiondes valeurs humanistes et le malaise quiconstitue un terreau favorable à la radica-lisation.

Depuis les attaques de Charlie Hebdojusqu'aux attentats de P aris, de nom-breuses v oix critiques se sont éle véesréclamant un changement d'attitude de laFrance au Mo yen-Orient. Or le polito-logue constate « la même absence deréflexion » sur les causes de la crise desvaleurs politiques et la prégnance du dis-cours de la lutte contre le terrorisme,alors que 15 ans de guerre contre le terro-

Khader Adnan à nouveauemprisonné

Anouveau les forces israéliennesont arrêté le 4 jan vier 2016 l'an-

cien prisonnier palestinien KhaderAdnan, très célèbre pour a voir entre-pris deux grèv es de la f aim éprou-vantes pour obtenir sa libération desprisons d'Israël.

Des témoins ont déclaré à Ma'anqu'un véhicule militaire israélien aarrêté une voiture privée que condui-sait Adnan près du village de Silwad,à l'est de Ramallah, et l'a emmenépour une destination inconnue.

Adnan avait été relâché en juillet2015 après 55 jours de grèv e de lafaim pour protester contre sa déten-tion administrati ve - incarcérationsans procès ni inculpation. « Toutesles gar anties que Sheikh Khader ademandé ont été obtenues, et il adonc triomphé de l'Etat de l'occupa-tion après 55 jour s de grève de lafaim, » a dit l'épouse d'Adnan àMa'an à l'époque. Toutefois, la libé-ration d'Adnan n'a été possiblequ'après qu'il retire son e xigencequ'Israël accepte de ne jamais plus ledétenir en détention administrative.

Sa grève de la f aim, qui l'a menéaux portes de la mort au moment où ill'a terminée était la deuxième qu'ilmenait, après 66 jours de grèv e en2012 qui s'étaient également terminéspar sa libération.

Source : Maan Ne ws Traduction : MRpour ISM.Site personnel: palestine.katin-fo.fr. Maan News.

risme, loin d'éradiquer le phénomène,l'ont au contraire renforcé. Pour l'analys-te, l'engagement de la France contre le« terrorisme » de l'EI non seulement netransformera pas le rapport de forces surle terrain en Syrie, mais ne lui of friraaucun rôle diplomatique majeur etconstructif en Syrie. « Suivisme , ingé-rences, improvisations, incohérences »,autant de symptômes qui semblent mar-quer la fin du rôle historique de la Franceau Proche-Orient, soutient Alain Gresh.

Compte-rendu de Lina Kennouche

http://www.lorientlejour.com/article/958545/alain-gresh-diagnostique-la-fin-du-role-historique-de-la-france-au-moyen-orient.html

Lors d'une confér ence-débat qui s'est tenue hier au Centr econsultatif pour les études et la documentation, Think tank duHezbollah, dans la banlieue sud de Beyrouth, le politologue fran-çais Alain Gresh, spécialiste du Moy en-Orient et actuel rédac-teur en chef d' Orient XXI, analyse les implications des attentatsde Paris sur la diplomatie française au Moy en-Orient.

La fin du rôle historiquede la France au Moyen-Orient

Conférence d’Alain Gresh, le 4 décembre 2015

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La démolition de sites arabes et isla-miques de Jérusalem n’est pas une

nouveauté dans les attitudes et politiquesisraéliennes.

En 1967, Israël a rasé le quartier maro-cain de la vieille ville de Jérusalem.C’était un joyau architectural de la civili-sation islamique qui remontait à la f in du12 ème siècle et avait été le siège d’ordresreligieux islamiques parmi les plusimportants.

Lorsque le sionisme f it son apparitionen P alestine, ses dirigeants n’essayèrentpas seulement d’acquérir des terres pours’y implanter mais aussi d’acheter cequ’ils considéraient être la Jérusalemjuive.

Le baron Edmond Rothschild essayad’acheter le quartier à la f in du 19 èmesiècle, tout comme essaya de le f aire ladirection sioniste sous le Mandat britan-nique – mais en vain.

Les tentati ves d’acquisition n’ayantpas réussi, le quartier fut pris de forcedurant la guerre de 1967 et démoli. Lorsde la démolition, fut aussi détruite lamosquée Sheikh Eid construite par le f ilsde Salah al-Din al-A yubi, qui libéraJérusalem des Croisés. En apprenant ladestruction des années plus tard,Benjamin K edar, historien et présidentadjoint de l’Académie Nationale desSciences israélienne, déclara au journalisraélien Haaret’z que « c’était un crimearchéologique. »

Topologie des destructions

La destruction des mosquées n’étaitpas une pratique nouv elle, ou limitée àJérusalem. Les forces sionistes n’ontépargné que très peu de mosquées des vil-lages et villes détruites pendant la Nakba– opération de netto yage ethnique de1948. Les autorités israéliennes ontensuite con verti un grand nombre desmosquées restantes en clubs, restaurantset enclos pour animaux.

Ainsi, ni les monuments historiquesde Jérusalem, ni les mosquées ailleurs en

Palestine n’ont été à l’abri des politiquesdestructives du colonisateur . Cette ruinedu patrimoine islamique du pays est pro-fondément gra vée dans la mémoire col-lective palestinienne. Les P alestinienssont aussi souvent les témoins de la des-truction d’immeubles par Israël à l’aidede bulldozers D-9 blindés, fournis par lafirme états-unienne Caterpillar.

Cependant, ce n’est pas seulement lamémoire vive de la topologie des destruc-tions israéliennes qui a fait surgir chez denombreuses personnes des craintes quandà l’a venir d’al-Aqsa. C’est une analyseréaliste de l’idéologie de certaines forcespolitiques puissantes aujourd’hui enIsraël, et qui sont représentées dans l’ac-tuel gouv ernement de BenjaminNetanyahou. La plus importante decelles-ci est le mouv ement nationalistereligieux qui gagne constamment du ter-rain. Elle avait à une époque une influen-ce mar ginale, mais elle f ait maintenantpartie des pouvoirs établis.

L’éducation scolair e r eligieuseprone la construction du Troisièmetemple

Comme l’a récemment révélé OrKashti de Haaret’z, une partie du pro-gramme d’études du système d’éducationde ce mouv ement (il y a trois systèmesd’éducation en Israël : un système laïquejuif, un système national religieux, et lesystème « arabe ») prône la constructiondu « Troisième Temple » La constructiondu temple est l’ambition de l’humanitétout entière, explique-t-on aux élèv es.Kashti s’est entretenu a vec des spécia-listes qui ont lu le programme et bien que,souligne-t-il, le programme ne mentionnepas directement la destruction d’al-Aqsa,on instille dans l’esprit des élèv es l’idéequ’ils sont à l’aube de la rédemption juive(Geula) du mont.

Ce programme a le soutien de NaftaliBennet, ministre de l’Education. Commeson collègue, Uri Ariel, Bennet estmembre du F oyer juif, parti qui s’est

engagé à remplacer al-Aqsa par untemple juif. Suite à l’élection qui s’esttenue plus tôt cette année, Ariel a éténommé ministre de l’agriculture.Précédemment, en tant que ministre dulogement, il s’est publiquement prononcépour la construction du nouveau temple àla place d’al-Aqsa. Ce n’est pas unhomme politique mar ginal, pas plus quene l’est son parti.

Le gouv ernement israélien soutienfinancièrement et par d’autres mo yensplusieurs organisations qui se prononcentouvertement en f aveur d’un projet simi-laire. La plus importante d’entre elles estl’Institut du Temple à Jérusalem, fondéepar le rabbin Yisrael Ariel. Uri Blau, jour-naliste à Haaret’z a enquêté sur sonfinancement. L’objectif principal de l’ins-titut, selon son site internet, est de « voirIsraël reconstruire le Temple Sacré sur leMont Moriah à Jérusalem [site de lamoquée al-Aqsa], conformément auxcommandements bibliques. »

Il n’est pas du tout absurde ni inimagi-nable de supposer qu’un zélote sionistemette un jour de tels projets à e xécution.

Novembre 2015* Ilan P appe est dir ecteur du Eur opean

Center of P alestine Studies à l’Uni versitéd’Exeter. Il a publié 15 li vres sur le Moy en-Orient et la Question de P alestine. 10-11-2015 - The Electr onic Intifada-Vous pouv ezconsulter cet article à https://electronicintifa-da.net/cont...Traduction : Info-palestine.eu -MJB

Courrier du CVPR, n°59 p.18

Israël

Un crime archéologique

Le projet de destruction d’al-Aqsan’a rien d’une théorie du complot

par Ilan Pappe

Les groupes appelant à la destruction de l’enceinte de la mos-quée al-Aqsa font partie de l’establishment politique d’Israël

Enfants prisonniersau 1er novembre

2015

Le nombre des enf ants palestiniensdans les prisons israéliennes a dou-

blé . Les mineurs représentent en vironun cinquième des 2000 P alestiniensqu’Israël détient depuis l’escalade de laviolence, début octobre. Les enf antspalestiniens de Jérusalem-Est occupéeen constituent une grande partie.

Avec la brusque montée des arresta-tions, le nombre d’enf ants palestiniensen détention israélienne a doublé, mon-tant à 307 à la f in octobre, contre 155fin août. (...)

Pour pouvoir contenir le grand nombred’enfants qu’il arrête, Israël a ouv ertune aile supplémentaire pour lesmineurs palestiniens, à la prison deGivon en octobre.

Courrier 59 p. 3 à 22 A part 11 à 14 18/01/16 14:25 Page 16

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Q/ Docteur Samah J abr, vous êtesconnue par v os initiati ves au ni veauinternational et votre engagement dansle mouv ement national palestinien,mais v ous êtes également médecin etpsychiatre. Comment souhaiteriez-vous v ous présenter , en quelquesmots ?

Je suis palestinienne, musulmane,médecin, psychiatre et psychothérapeute.Être professionnelle de la santé m’a four-ni une sensibilité plus forte et des moyensen plus à utiliser dans ma modeste contri-bution pour lutter contre l’occupation dela P alestine.(...) L ’occupation est unecrise sur plan sanitaire comme elle l’estsur le plan politique. (...)

Q/ De par votre profession, vous êtesdirectement confr ontée aux trauma-tismes, voir aux ra vages psycholo-giques causés par l’occupation colonia-le la plus longue (et pr obablement laplus impitoyable) dans l’histoir emoderne. Votre métier ne v ous fait-ilque traiter des pathologies liées à cetteoppression ? Et est-il toujours possibled’établir une claire distinction entre cequi en est la conséquence et ce qui nel’est pas ?

Dans ma pratique, je rencontre habi-tuellement une image mélangée, dyna-mique, d’une souffrance qui incorpore lepersonnel et le politique, l’individuel et lecollectif. Une femme souf frant d’unemaladie biologiquement déterminée,comme le trouble bipolaire,pourra éprou-ver plus de rechutes a vec le meurtre deson enfant, la détention de son mari, et ladémolition de sa maison. Un toxicomanepeut être facilement manipulé pour deve-nir un collaborateur . Le modèle biopsy-chosocial qui suggère que la santé ou lamaladie est une interaction de f acteursbiologiques, psychologiques et sociaux,devrait donner une mar ge importantepour l’intégration de la violation desdroits humains et le traitement injustesubi par les Palestiniens. (...)

Q/ L ’occupant est, à pr oprementparler, responsable à grande échelle desouffrances psychologiques et men-tales. Comment arri vez-vous à gér erun tel contexte ? Qu’est-ce qui vous faitpoursuivre sur cette v oie, en dépit detoutes les difficultés ?

Je tente de gérer cela en répartissantmes ef forts entre f aire f ace aux consé-quences et f aire ce que je peux pourcontrecarrer la cause de la souffrance. Enplus de mon vaste travail clinique et d’en-seignement, ainsi que ma contribution audéveloppement des services de santémentale en P alestine, j’écris et m’e xpri-me souvent à tra vers les médias publicspour sensibiliser l’opinion au niveau localet international sur la façon dont les poli-tiques de l’occupation blessent l’esprit etl’état moral de la communauté palesti-nienne. Je tente de contrecarrer la propa-gande dont sont victimes les P alestinienset qui encourage un silence au ni veauinternational sur ce qui se passe enPalestine.?

Je tente de promouv oir la solidaritéavec les P alestiniens auprès de ceux quise battent pour la justice comme à unniveau professionnel, parce que je croisque pour les opprimés, la solidarité estplus appropriée que les médicaments oula thérapie. La solidarité a vec lesPalestiniens, alors que ceux-ci ont étédéshumanisés par l’occupation, donnentde la valeur à ce qu’ils endurent et main-tient leur croyance en la bonté du monde.En conclusion la solidarité les protègecontre l’insensibilisation ou la radicalisa-tion.

Écrire me permet de lutter contre lesentiment d’impuissance et me permetd’organiser mes pensées et sentiments.C’est donner la parole à ce que je ressensou témoigner de ce que j’apprends à tra-vers mes patients. J’ai aussi été aidée pardes personnes qui ont eu de l’importancepour moi, qui m’ont inspirée et aidéedans la voie qui est la mienne.

Q/ Parlons maintenant sur un planpolitique plus général. Le soulèv ementen cours dans les territoir es sous occu-pation, est essentiellement le fait de lajeunesse. S’agit-il d’une nouvelle géné-ration de résistance, en gestation deplusieurs années et apparaissant enpleine lumière aujourd’hui ? Ou est-cejuste une per ception simplif icatrice,depuis l’extérieur de la Palestine ?

Je ne pense pas que ce qui se passeaujourd’hui est un phénomène nouv eaudans la lutte des P alestiniens, même sicela prend une forme dif férente. Tout aulong de l’occupation et même avant, sousle mandat britannique, il y a toujours eudes gens pour résister au nom de la com-munauté. Cette résistance a pris dif fé-rentes formes à dif férentes périodes dansl’histoire. Chaque fois que les partis poli-tiques ont fait marche arrière, la résistan-ce a pris une forme moins or ganisée,comme un phénomène populaire sponta-né.(...) Les événements actuels - qui nesont pas encore un mouvement - sont uneréaction au processus de paix défunt, audanger croissant posé par les colons, à ladéception à l’égard de la direction pales-tinienne et à l’antagonisme qui prév autentre les principaux partis palestiniens.

Ce mouv ement est dirigé par desjeunes qui sont pour la plupart sans af fi-liation à un parti. Ce mouv ement estdésorganisé et spontané. Ses actions sontgénéralement décidées sur le terrain, enréaction à la perte d’amis ou de connais-sances. Les partis politiques tentent desurfer sur cette vague actuelle de la résis-tance. (...) Mais les coups portés par l’oc-cupation et ses sous-traitants sont si dursqu’ils ont un impact sur tous les mouv e-ments de résistance sérieuse.(...)

Q/ Vous avez vécu en France plu-sieurs années puisque vous y avez faitune partie de vos études. Quel souve-nir, quelle perception gardez-vous dela société française ? Que ce soit parrapport à la question palestinienneou en général ?

Je suis arrivée en France sans en parlerla langue, en tant que femme musulmaneportant le foulard. J’ai vécu une hostilitéconsidérable et été de f ait empêchéed’étudier pendant plusieurs mois jusqu’àce que j’obtienne, grâce à l’interv entiond’amis juristes, la permission du ministè-re des Affaires étrangères de poursui vrema formation a vec mon foulard. ÉtantPalestinienne, j’ai une sensibilité spécialepour ressentir la discrimination et leracisme institutionnalisé, et je pouv ais

Courrier du CVPR, n°59 p.19

Les souffrancespsychologiquesen PalestineUn entretien avec Samah Jabr,médecin, psychiatreet psychotérapeute palestinienne

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Ni « tr oisième Intifada » , ni simplejuxtaposition d’incidents isolés, un

nouveau soulèv ement a éclaté dans lesterritoires palestiniens depuis le déb ut dumois d’octobre. L’effet de surprise, voirede sidération qui semble a voir saisi cer-tains observ ateurs s’étonnant de cetteexplosion de la jeunesse,a de quoi … sur-prendre. Pensait-on réellement que desjeunes subissant au quotidien, àJérusalem et en Cisjordanie, oppressionet discrimination, et ce depuis leur plusjeune âge, demeureraient éternellementsilencieux ? Une nouv elle générationpalestinienne se soulève contre l’occupa-tion, et force est de constater qu’alors quele 11 novembre marquera le 11e anniver-saire de la mort de Yasser Arafat, le diri-geant historique de l’OLP (Or ganisationde libération de la P alestine) ces jeunesne se reconnaissent dans aucun leader etne se revendiquent d’aucune appartenan-ce partisane

.Les futurs leaders sont dans la rue

L’histoire palestinienne est scandéepar des c ycles de mobilisation, à mesureque les générations qui se succèdent pren-nent conscience des injustices subies : dela « génération de l’expulsion » de 1948,qui fonda le Fatah au tournant des années1960 et prit les armes en 1965, à la «

génération du mur » qui se révolte aujour-d’hui sous nos yeux, en passant par la« génération de l’occupation » de 1967,principale protagoniste de l’Intif ada de1987. Des générations politiques se sontainsi formées, au sens des « unités degénération » définies par le sociologueKarl Mannheim : « Un ensemble généra-tionnel se constitue à partir de la partici-pation des individus relevant de la mêmesituation de génér ation à un destin com-mun et aux contenus qui en relèvent et quiy sont liés. Alors des unités de génér a-tions particulières peuvent surgir à l’inté-rieur de cette communauté de destin ».C’est ce que ne comprennent pas ceux quiveulent e xpliquer la rév olte actuelle parl’action des f actions politiques, ou quisont – désespérément – à la recherche des« dirigeants du soulèvement ». Les jeunesqui mènent des attaques au poignard oumanifestent de vant des positions mili-taires israéliennes n’obéissent à personne.Les leaders de la jeunesse qui se rév olteactuellement ne sont pas encore connus :ils sont dans les rues, ou en prison.L’histoire des mobilisations sociales etpolitiques nous apprend en effet que c’esttoujours au cours – v oire même au terme– d’expériences de confrontations d’am-pleur qu’émergent des leaders. Les jeunesPalestiniens qui se soulèv ent aujourd’huin’ont pas connu l’OLP-Araf at, et une

Courrier du CVPR, n°59 p.20

facilement les détecter dans les politiqueset les discours des médias dans de nom-breux domaines. Non seulement en ce quiconcerne la P alestine et le f ait qu’enFrance, la cause palestinienne est présen-tée comme une manifestation d’antisémi-tisme, mais aussi dans la couv erturemédiatique des événements dans les ban-lieues, dans la loi sur « l’enseignement del’aspect positif de la colonisation françai-se » en Afrique, et dans la culture islamo-phobe.?Mais j’ai également f ait aussi enFrance de magnifiques rencontres person-nelles avec des personnes qui m’ont sou-tenu socialement et professionnellement,qui ont créé un espace pour moi enFrance et ainsi trouvé, pour toujours, leurpropre place dans mon c?ur et monesprit.??Q/ Et enfin une dernière question... Comment v oyez-vous l’a venir ??Ilsemble sombre. Le discours génocidaireest clairement audible parmi lesIsraéliens, qui jouissent d’une impunitécomplète et réduisent au silence toutevoix d’opposition. Mais il y aura toujoursdes P alestiniens qui lutteront pour lesdroits des P alestiniens, en dépit de tousles sacrifices. Il y aura toujours des mili-tants internationaux qui seront solidairesdes P alestiniens dans les moments lesplus sombres. La politique de l’occupa-tion est de déplacer la majorité desPalestiniens et de réduire et conditionnerau désespoir ceux qui restent. La capacitéde quelques-uns d’entre nous à résisterindique que les Palestiniens sont toujoursen vie en tant que nation, qu’ils sont prêtsà maintenir vi vante la lutte palestiniennepour la libération, et continuent à espérerun tournant politique crucial qui aiderales Palestiniens à imposer leur libérationnationale. Nous ne renoncerons pas etl’occupation n’aura jamais ni paix ni légi-timité.

(1) Le Docteur Samah J abr, née àJérusalem-Est, vit à Shufat en banlieue deJérusalem et travaille en Cisjordanie. Issuede la pr emière promotion en médecine del’université palestinienne d’Al Quds(Jérusalem), elle est l’une des vingt psy-chiatres à pratiquer actuellement enCisjordanie. P arallèlement à ses acti vitésprofessionnelles, Samah Jabr écrit réguliè-rement des chroniques dans la presse inter-nationale depuis la f in des années 1990.Elle a bien voulu répondre à nos questions.

Extraits de propos recueillis par info-pales-tine.eu

Génération spontanéeen Palestinepar Julien Salingue

Jeunes filles palestiniennes lors d’une manifestation

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bonne partie d’entre eux ne sait pas quiest Marwan Barghouthi, sinon un prison-nier palestinien un peu plus célèbre queles 6000 autres

.Les courants traditionnels dépassés

Aucune raison, dès lors, qu’ils obéis-sent aux appels à la lutte ou aux injonc-tions au calme des uns ou des autres,même si certaines f actions, pour des rai-sons qui tiennent a vant tout aux rapportsde forces entre groupes palestiniens, ten-tent d’apparaître aux commandes – ycompris le Hamas qui n’a aucune maîtri-se sur les événements et a, au contraire,plutôt tendance à courir après la jeunessequ’à l’entraîner. Les événements actuelssont le dernier avatar de la crise de leader-ship qui tra verse le mouv ement nationalpalestinien depuis le déb ut des années2000, et de l’incapacité des principauxcourants (gauche, Hamas, Djihad isla-mique, Fatah) à of frir un cadre et desperspectives à la jeunesse. Prisonniers dulogiciel d’Oslo et contrôlés par des cadresvieillissants, ils sont en décalage flagrantavec des jeunes qui n’ont,contrairement ànombre de leurs « dirig eants » , rien àperdre. Des décennies d’occupation onten effet généré des logiques d’adaptationqui, le temps passant, sont devenues desfins en soi et non plus des mo yens de «tenir » : à force de faire malgré l’occupa-tion, on finit par f aire avec l’occupation,et ce même si l’on tient des discours vin-dicatifs. Dès lors, chez les P alestiniens,nombreux sont ceux qui auraient à perdred’un regain de tension durable, a fortioris’il est incontrôlable et donc non « mon-nayable » , avec l’occupant israélien.L’occupation prolongée et l’absence detoute perspecti ve de règlement du« conflit » ont produit des dynamiquesinstitutionnelles conserv atrices, y com-pris dans le mouvement de libération. Onpense ici à la « dialectique des conquêtespartielles » , dont parlait l’économisteErnest Mandel à propos de la b ureaucra-tisation des organisations ouvrières, poin-tant « [ceux qui] se comportent comme sitoute nouvelle conquête du mouvementouvrier de vait êtr e subor donnée demanière absolue et impérative à la défen-se de ce qui e xiste » . Les principauxgroupes et dirigeants palestiniens sontainsi dans une logique de défense, voirede consolidation d’un espace au sein d’undispositif de pouvoir régi par les accordsd’Oslo, avec l’existence de « zones auto-nomes » auto-administrées dont le contrô-le est devenu une fin en soi, alors qu’elles

étaient à l’origine considérées commeune simple étape a vant l’émergence d’unÉtat. Un contrôle d’autant plus con voitéqu’il permet de dév elopper une base ausein de la population, en premier lieuchez ceux qui e xercent un emploi dansl’administration.

L’industrie du « processus de paix »

Les crises à répétition et les di visionsau sein du mouv ement national sont leproduit de ce déplacement des enjeux, dela libération nationale v ers le contrôled’un pseudo-appareil d’État offrant avan-tages matériels (aides internationales,salaires, etc.) et symboliques (contactsinternationaux, postes à « r esponsabili-tés », etc.). Ainsi, alors que le processusd’Oslo est caduc, les structures qui ensont issues continuent d’of frir des a van-tages aux élites politiques et administra-tives, les rendant réti ves à tout boule ver-sement d’ampleur . Les jeunesPalestiniens qui se rév oltent « n’ont rienà perdre que leur s chaînes » . La plupartd’entre eux n’ont pas de situation profes-sionnelle à préserver, de famille à nourrirou de carrière à construire. « Rien àperdre » , « rien à attendr e » , « rien àespérer » : ces formules re viennentcomme une tragique ritournelle dans tousles récents reportages. La « génération dumur » ne répondra pas aux appels au« calme » des bénéficiaires de l’industriedu « processus de paix », davantage moti-vés par la défense de leurs intérêts quepar la libération collecti ve, incapables detirer les bilans de leurs échecs et refusantde transmettre le témoin aux nouv ellesgénérations.

En dernière analyse, le soulèvement encours est l’expression de l’insoutenabilitéd’un « statu quo » qui n’en est pas un etde l’impasse d’un « processus de paix »qui n’a été qu’une réor ganisation du dis-positif d’occupation. L’incapacité du lea-dership palestinien à offrir un cadre et desperspectives politiques à la jeunesserévoltée participe d’une crise bien plusprofonde dans le champ politique palesti-nien, qui ne pourra commencer à serésoudre qu’en actant déf initivement lamort du « processus de paix » et l’échecde la stratégie des négociations, sans rap-port de forces, en vue de la constitutiond’un improbable État palestinien dont lesbases matérielles ont depuis longtempsdisparu.

The Conversation,11 novembre 20

Courrier du CVPR, n°59 p.21

L'accord historiqueentre le Vaticanet les Palestiniensentre en vigueur

L'accord historique entre leVatican et les Palestiniens est entré envigueur après la clôture des formali-tés de procédure, a annoncé le Saint-Siège.

L'accord avait été signé le 26 juindernier, malgré l'opposition d'Israël,deux ans après que l'église catholiqueeut reconnu les Territoires palesti-niens comme un Etat souverain.

« L'accord entre le Saint-Sièg e etl'Etat de Palestine (.) qui consiste enun préambule et 32 articles, concerneles aspects essentiels de la vie et del'activité de l'Eglise en Palestine, touten réaffirmant son soutien à une solu-tion négociée et pacif ique au conflitdans la région » , a déclaré le Vaticandans un communiqué.

Cet accord, qui inclut des disposi-tions protégeant les droits des chré-tiens, est considéré par le Vaticancomme un modèle pour les relationsdes pays arabes et musulmans a vecleurs minorités chrétiennes.

Même si le Vatican parle déjàd'« Etat de P alestine » depuis début2013, à la suite d'un v ote del'Assemblée générale de l'ONU, lesPalestiniens font v aloir que cetaccord équi vaut à « une r econnais-sance de facto » de leur Etat.

Lors de la conclusion de l'accord,le ministère israélien des Affairesétrangères avait « regretté cette mesu-re précipitée », qui « nuit à la per s-pective de faire avancer un accord depaix » israélo-palestien.

« Israël étudiera ses implicationssur la coopér ation future (...) (avec)le Vatican », avait encore indiqué leministère.

Le Saint-Siège, qui a des relationsdiplomatiques a vec Israël depuis1993, négocie également depuis 1999un accord sur les droits juridiques etpatrimoniaux des congrégationscatholiques dans l'Etat hébreu, dontleurs e xonérations f iscales. Maischaque rencontre semestrielle sesolde par un échec.

Palestine

Courrier 59 p. 3 à 22 A part 11 à 14 18/01/16 14:25 Page 19

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Courrier du CVPR, n°59 p.22

Courrier des lecteurs

J’ai bien lu le courrier CVPR, quihonore ses auteurs. Je ne v eux en

rien m'étendre, ayant eu à constater dèsl967 à Rabat les ra vages d'une situationsans issue apparente à court terme, ouavec une issue catastrophique à longterme, car il serait logique qu'une petitegraine semée dans une conflagrationmondiale (Balfour) ait prospéré dans sasuite (shoah, 1947 et 6 jours) et f inissepar s'achever dans une synthèse majeure,que la bombinette a pu dif férer jusqu'àprésent mais qui chemine et in vente : lechar d'assaut a rendu les tranchéesinutiles, la chair d'assaut, terroriste, rendles chars obsolètes et ramène aux tran-chées, les têtes cette fois..

Un problème apparemment insoluble atoujours sa solution dans un contexte pluslarge. Reste à travailler pour une solutionmoyenne, médiane, comme vous le faitessi bien (...) la médiane étant la Vaticane.Oslo et un gentil Président USA ont été leseul moment d'espoir! Pourquoi pas bis ?Les cartes se redistrib uent au Proche-Orient, l'essentiel pour les P alestiniensétant de survivre un jour de plus. Tout estpossible.Bernard Loupias - 12200 Villefranchede Rouergue

Cher ami! j’ai aussi reçu le « Courrierdu CVPR » par poste, et c'est très guéable.

Je vous envoie ce jour le chèque de 30euros demandé par votre papier info pourle colloque au Lux embourg le 21/11, oùje serai « Les Palestiniens d'Israël ».

Ils sont appelés simplement par lesIsraéliens et les journalistes à leurs bottes« Arabes d'Isr aël » ! Ils pourraient dire« autochtones » depuis l'époque biblique,car ces sédentaires résidents étaient-ils aucours de l'Histoire, et en parties dif fuseset ramif iées : mélanges de cananéens,philistins, samaritains, israélites, puischrétiens, puis musulmans ? Gonzague Hutin - Paris

Bravo pour ce beau numéro très inté-ressant !Anwar Abueisheh - Hébron

Je vous remercie beaucoup de m'a voirfait parv enir ce b ulletin. La plupart desarticles sont passionnants et inédits, etexactement dans le créneau des sujets quime concernentDidier Destr emau - Ambassadeur deFrance - Paris

Je pense comme v ous, et commenombre d'esprits lucides de tous horizons,que les dirigeants israéliens, par leurintransigeance a veugle et criminelle, se

font les artisans à échéance de la destruc-tion de l'Etat d'Israël. Comme Marx, dansle Manifeste, voyait la bour geoisie pro-duire ses propres fossoyeurs, Netanyahouet les siens se font les fosso yeurs d'Israëlen refusant de payer le juste prix de lapaix, en ne cessant de multiplier les colo-nies de peuplement, d'empiéter sur lesterres palestiniennes, en violation du plande partage de 1947. Si l'on a pu croire,avec Albert Londres, en 1930, que le Juiferrant était arri vé, porté par l'idée spé-cieuse : « une terr e sans peuple pour unpeuple sans terr e », s'il s'est acquis en1948 un Etat, inversant les rôles, il s'estfait paradoxalement et immédiatement,de persécuté persécuteur . Dès 2002,l'écrivain Michel Warschawski s'est élevécontre la dérive d'une société gagnée parle messianisme et le militarisme, quifonce à sa perte « à tombeau ouvert » .Engels, si ma mémoire est bonne, a notéqu' « Un peuple qui en opprime un autr ene saurait être un peuple libr e » et dansun re gistre dif férend, mais égalementhumain, Abraham Lincoln a déclaré que« Celui qui r efuse la liberté à un autr en'est pas digne d'en jouir lui même » .

Il ne nous reste qu'à espérer , et si pos-sible à contribuer, à un ressaisissement dela société israélienne a vant qu'il ne soittrop tard, pour elle-même, et qu'elle neconnaisse à terme un nouv eau Massada,par elle provoqué.Jean-Paul Lewidoff – Paris

A la page 21 de notre précieux b ulle-tin, je note que les informations trans-

Message adressé au « Courrier »du journal La Croix, non publié

Dans son numéro du 15 octobre (page 28) le journal dresse le portrait de RichardPrasquier « l'ami vigilant », ancien président du CRIF , qui recevait, le même

jour, au Collège des Bernardins à Paris, le prix 2015 de l'Amitié judéo-chrétienne deFrance. Je n'entends pas ici juger l'homme, né en Pologne, d'une famille de rescapés de la

Shoah, d'autant qu'il a beaucoup fait pour le dialogue « judéo-chrétien », qui, commele dialogue « islamo-c hrétien » , ne peut qu'aider au dév eloppement du « vi vreensemble » dans notre République laïque.

En revanche, j'entends critiquer véhémentement ses derniers propos rapportés parLa Croix :« Aujourd'hui, accepter l'antisionisme, c'est accepter la destruction d'Israël,c'est criminel...».

Je me bats depuis 1967 pour la reconnaissance des droits du peuplePalestinien, et mon antisionisme est tout simplement le refus « d'accepter »la politique des dirigeants de l'Etat israélien. Si un jour cet Etat est« détruit », comme Richard Prasquier l'a vance, ce sera la f aute de ces diri-geants et « l'ami vigilant » , de facto ne l'aura pas été. Oui, ce qui est « cri-minel », c'est l'occupation de la Palestine depuis bientôt 50 ans ! Et, commel'a dit voilà des années l'ancien patriarche palestinien Mgr Sabbah : « Il n' yaura jamais la paix, tant que l'occupation de la Palestine durera »

Me Maurice BUTTIN, président du CVPR PO

mises par le ministère de la Santé éma-nent d'un certain Mr . Mos'ad.... Je nepeux pas résister au plaisir (mitigé),compte tenu de la gra vité des f aits, devous le signaler.Georges Féderman - Strasbourg.

Tous mes v oeux pour que l'action duCVPR PO contribue à l'heureuse solutionque j'espère voir au Proche-Orient.Claudine Amoy - 67000 Strasbourg.

Merci pour le dernier b ulletin dontl'édito est très fort, tu es courageux,merci.Martine Millet - pasteur - Versailles 78.

Merci beaucoup pour m’en voyer cemerveilleux Courrier du CVPR Malgréles dif ficultés et la détérioration de lasituation à tous les ni veaux, nous a vonsencore un peu d'espoir. Qustandi Shomali - Beit Sahour - pr o-fesseur émérite de l'Uni versité deBethléemn

J'ai bien apprécié le numéro 58 dujournal. Depuis lors a eu lieu un déchaî-nement de sauv agerie chez les colons etla mort de cet enf ant brûlé vif, puis sonpère décédé de ses blessures. Il auraitfallu montrer le caractère inexorable de l'« ensauvagement » des colons juifs, mal-gré les e xcuses et les re grets deNetanyahou. Il f audrait qu'il en visageaussi d'avoir des remords. On en est loin!Pierre Lafrance - Ambassadeur deFrance - Paris

Courrier 59 p. 3 à 22 A part 11 à 14 18/01/16 14:25 Page 20

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Editorial

Courrier du CVPR, n°59 p.2 Courrier du CVPR, n°59 p.23

De nouveau, des milliers de personnes ont manifesté dans toute la Francepour la paix et contre le terrorisme. Et aujourd’hui la place de la République estdevenue le haut lieu de recueillement national en hommage aux victimes. Desmanifestations ont aussi eu lieu, dans touts les pays étrangers, en signe de soli-darité au drame vécu par notre pays et, partout, des minutes de silence ont étéobservées, la Marseillaise chantée !

Le risque était grand - et le demeure - de v oir assimilés « islamistes » et« musulmans ». Erreur gravissime ! Je me pose même la question de sa voir sices barbares terroristes ont une idée quelconque de l’Islam qu’ils évoquent pouragir ? Le président Barack Obama ne s’y est pas trompé. Le 6 décembre, il aappelé ses compatriotes à ne pas céder à la tentation de stigmatiser les musul-mans, assurant que le groupe Etat islamique « ne parle pas au nom de l’islam».

MAIS, après ces attentats les dirigeants israéliens et leurs partisans ont tentéde discréditer, une fois de plus, l’admirable résistance à l’occupation du peuplepalestinien, depuis plus de 47 ans. (Nos compatriotes sont-ils conscients quel’occupation de la France n’a duré que 4 années ?).

Le Premier ministre Benyamin Netanyahou n’a pas hésité, contre toute véri-té, à laisser entendre que ceux qui condamnaient les attentats de P aris, sanscondamner la violence contre les Israéliens, étaient des « hypocrites et desaveugles. Derrière ces attentats terr oristes, selon lui, se tient l’Islam r adical,qui cherche à nous détruire, le même islam radical qui a frappé Paris et mena-ce l’Europe entière ». Le ministre de la Défense,Moshe Ya’lon - qui voit en toutPalestinien un « terroriste » en puissance - a déclaré de son côté : « Ce quenous avons, c’est l’islam djidahiste qui appelle à la destruction de la cultur eoccidentale »… alors même que la majorité des victimes des groupes djida-histes dans le monde sont des musulmans ! A l’encontre des résistants palesti-niens, toujours la même rengaine depuis la création de l’Etat d’Israël,en 1948 :« Ils veulent nous tuer parce que nous sommes juifs ».

Non, la violence actuelle, la résistance, des jeunes P alestiniens n’exprimenullement le refus de l’e xistence de l’Etat d’Israël. C’est le désespoir de vantl’occupation de leur pays qui persiste, et la volonté d’Israël, bien au contraire,de refuser l’existence de l’Etat de Palestine.

Uri Avnery, ancien député israélien, cofondateur de Gush Shalom - un mou-vement israélien qui milite pour la paix et en vue de la création d'un État pales-tinien - répond dans son Blog (1) aux errements de Netan yahou :

« Cela fait des semaines maintenant qu’Isr aël vit dans la panique. » Fauted’une meilleure expression, on parle de « la va gue de terreur ». Chaque jourmaintenant deux, trois, ou quatre jeunes, y compris des enfants de 13 ans atta-quent des Isr aéliens (…) et ils sont génér alement abattus. (…) Netanyahouessaie de surfer sur cette va gue (…). Il évoque l’Holocauste (compar ant unenfant de 16 ans de Hébr on à un of ficier SS endurci d’Auschwitz) et n’arrêtepas de parler d’antisémitisme. Tout cela pour marquer un fait évident : l’occu-pation avec harcèlement de la population palestinienne c haque jour, et mêmeà chaque heure et à chaque minute. (…).

Il n’y a pas de lien dir ect entre le terr orisme de l’Etat islamique dans lemonde et le combat national palestinien pour obtenir un Etat. Mais, si on n’yapporte pas de solution, ces problèmes finiront par se mêler – un Etat isla-mique, beaucoup plus puissant fera l’union du monde musulman, comme lefit autrefois Saladin, pour s’attaquer à nous, les nouveaux Croisés . (ndlr :souligné par moi) Si j’étais croyant, je murmurerais : qu’à Dieu ne plaise ! »

Maurice BUTTIN, président du CVPR PO(1) Le 28 novembre

�suite de la première page Le piège Daech,

L’Etat islamique ou le r etourde l’Histoire

de Pierre-Jean LUIZARD, Le piègeDaech, Editions La Découv erte, Paris,2015, 148 p.

En 2014, un groupe salafiste fait bruta-lement irruption sur la scène proche-

orientale et af fiche une déterminationsanguinaire à effacer les frontières et à setransformer en « Etat islamique » sous ladénomination de Daech. Cette volonté dese présenter comme un Etat le distinguede la néb uleuse al-Qaïda. Spécialiste duMoyen-Orient, P.-J. Luizard se proposedans cet essai de faire comprendre le stu-péfiant succès de cette or ganisation parun retour sur l’Histoire et d’e xpliquercomment l’Occident est tombé dans le« piège Daech ».

Les ingrédients de la réussite ne sontpas à l’origine militaires ; ils tiennentdans la région à la déliquescence desstructures étatiques dans un conte xte decorruption et de frustration. Daech a ins-trumentalisé à son prof it une histoire quiremonte à l’ef fondrement de l’Empireottoman et à création d’Etats arabes sousmandat britannique ou français, en viola-tion des promesses d’un ro yaume arabeunifié et indépendant. L’Etat irakien va seconstruire a vec les Britanniques sous ladomination de la communauté arabe sun-nite minoritaire et se perpétuera en oppo-

Islamophobieet judéophobie.L’effet miroir

de Ilan Halevi - Préface d'Alain Gresh,Editions Syllepse, juin 2015

Les éditions Syllepse publient ce texteposthume d’Ilan Hale vi. Excellent

petit livre (160 pages) pour e xpliciter demanière aussi précise que documentée lasituation des Palestiniens en Israël depuis1948.

Illustration parmi tant d’autres de laparenté entre islamophobie et judéopho-bie, la question juive hier, celle de l’islamaujourd’hui, sont des lieux privilégiés du« délire idéologique ». On ne saurait doncappréhender la réalité de l’islamophobieactuelle sans passer par le détour de l’an-tisémitisme, dont elle est lar gement unavatar tardif et une mutation coloniale.L’auteur nous invite à relire avec les yeuxd’aujourd’hui les Réflexions sur la ques-tion jui ve de Sartre qui év oquait lesfureurs discursi ves antijui ves en France.Omniprésente dans le discours public etdans les politiques d’État, l’islamophobieest exacerbée par les crimes réels commisau nom de l’islam par une néb uleuse degroupuscules et d’or ganisations directe-ment ou indirectement manipulées pardes États.

Comme sa soeur jumelle, la judéopho-bie, l’islamophobie apparaît comme lanouvelle forme de la peste raciste, larésurgence d’un virus social dont la noci-vité est notoire, opérant désormais àl’échelle globale. Certes, comme toutparallèle, celui-ci connaît des limites.

Histoire d'un Palestinien

de Didier Destremau, ancien ambassa-deur de France à Malte. EditionsMaisonneuve et Larose, juin 2003

Très jeune, il s'est passionné pour lemonde arabe. Déjà au lycée, il avait,

choisi d'apprendre en première languel'arabe, avant même l'anglais. Amenélongtemps par sa vie professionnelle, etnotamment celle de diplomate, à parcou-rir et à vi vre au Maghreb et au Machrek,il s'est particulièrement penché sur le pro-blème palestinien et a découvert l'immen-se douleur de la tragédie de ce peuple.

La rencontre quotidienne a vec Teisir,un P alestinien d'une trentaine d'annéesqui l'aidait à améliorer ses connaissanceslinguistiques, lui a donné l'idée d'écrire celivre d'où émer ge l'intensité de la souf-france que pro voque cette situationpérenne de chaque P alestinien, où qu'ilsoit. C'est donc cet homme, Teisir, qui luia fourni la trame du personnage central,Adel, le malheureux héros de ce récit,dont la vie est une véritable et conster-nante saga. L'auteur disposait aussi demultiples autres témoignages qu'il a inté-grés dans la vie d'Adel.

A tra vers la vie et les sentiments deson personnage, l'auteur a f ait une réellesynthèse de l'existence du peuple palesti-nien durant ces cinquante dernièresannées. C'est cette immense saga qu'ilouvre ici, à travers un roman qui a valeurd'essai.

LIVRES

DIXIT

François Hollande

Vendredi 13 no vembre, cejour que nous n’oublierons

jamais, la France a été frappéelâchement, dans un acte de guer-re organisé de loin et froidementexécuté. Une horde d’assassins atué 130 des nôtres et en a blessédes centaines, au nom d’unecause folle et d’un dieu trahi.

Aujourd’hui, la Nation toutentière, ses forces vives, pleurentles victimes. (...) Ces femmes,ces hommes, incarnaient le bon-heur de vi vre.(…). C’est parcequ’ils étaient la France qu’ils ontété abattus. C’est parce qu’ilsétaient la liberté qu’ils ont étémassacrés.

Ces femmes, ces hommes,étaient la jeunesse de France, lajeunesse d’un peuple libre, quichérit la culture, la sienne, c’est-à-dire toutes les cultures (...).

L’attaque du 13 novembre res-tera dans la mémoire de la jeu-nesse d’aujourd’hui comme uneinitiation terrible à la dureté dumonde, mais aussi comme uneinvitation à l’af fronter en in ven-tant un nouvel engagement.

Je sais que cette générationtiendra solidement le flambeauque nous lui transmettons.

Je suis sûr qu’elle aura le cou-rage de prendre pleinement enmain l’avenir de notre Nation. Lemalheur qui a touché les martyrsdu 13 novembre investit cette jeu-nesse de cette grande et nobletâche. La liberté ne demande pasà être v engée, mais à être servie.(...)

Malgré les larmes, cette géné-ration est aujourd’hui de venue levisage de la France.

Extraits du discours du présidentde la République, François Hollande,lors de l'hommage national aux vic-times des attentats, le 27 novembre.

Courrier N°59 4 pages couverture 18/01/16 14:39 Page 3

Page 24: Jacques Berque Courrier du C.V.P.R

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sition avec sa propre société, notammentles chiites et les K urdes, qui ont étéexclus du pouvoir pendant plus de 80 ans.Après l’intervention américaine en 2003,la communauté chiite prend sa re vancheau détriment de l’ensemble du pays, tan-dis que les Kurdes bâtissent une indépen-dance.

En Syrie, prenant modèle sur l’e xpé-rience druze et maronite au Liban, laFrance cherchera, de son côté, à s’ap-puyer sur les communautés minoritairesdruze et alaouite sans pouv oir éviter lacontestation. C’est l’appartenance à lacaste militaire qui permet alors de gagnerle pouv oir et ceux qui s’in vestissentdavantage dans les carrières militairessont les alaouites et les druzes. Le prin-temps arabe de 2011 aboutit en Syrieavec l’alliance de Damas a vec Téhéranouvrant vers le chiisme à une dégénéres-cence confessionnelle dans une popula-tion en grande majorité arabe sunnite.

Daech a réussi à cristalliser le senti-ment d’injustice ressenti par les popula-tions musulmanes qu’il présente commed’éternelles victimes d’un Occidentdominateur et mécréant. Il ne vise pas àopposer deux cultures mais à créer unchoc entre islam et mécréance.

« L’Etat islamique » est parvenu à sesfins en impliquant l’Occident dans saguerre alors que la coalition anti-Daechn’a aucune solution à offrir. La Turquie acru pouv oir maîtriser un processus decommunautarisation du conflit syrienpour affaiblir à la fois le régime syrien etles K urdes, à ses dépens puisque lechamp politique turc est désormais conta-miné. Quant à l’Arabie saoudite, elle estarrivée à qualifier aujourd’hui de « terro-ristes » des mouvements qui étaient desvecteurs de l’influence w ahhabite. Uneguerre lancée sans perspecti ve politiqueest perdue d’avance : c’est le piège tenduaux démocraties occidentales.

Henri MARCHAL

Chrétiensde la Méditerranée

En cette période où nous v enons devivre des événements tragiques, il

importe que nous ne cédions pas à lapeur, que nous ne nous laissions pasentraîner dans des amalgames et des opi-nions trop rapidement formulées sous lecoup de l’émotion, mais que nous pre-nions du recul pour tenter de comprendrecomment et pourquoi nous a vons pu êtretouchés par cette monstruosité. Plus quejamais, nous a vons besoin de com-prendre… Chrétiens de la Méditerranée aconsacré son Uni versité d’Hi ver dedécembre 2014 à la question du Mo yen-Orient et v ous propose ses Actes :« Guerre ou Paix au Moyen-Orient ? »

Pour la première fois, un livre à desti-nation d’un lar ge public e xplique, avecclarté, précision et rigueur , les conflitsqui, de l’Irak à la Libye, de la Syrie à l’É-gypte, ravagent le Mo yen-Orient ets’étendent désormais, sous l’emprise deDaech, à l’Afrique et à l’Europe. Vous ytrouverez des articles très éclairants despécialistes reconnus de cette question :spécialistes de géopolitique (JacquesHuntzinger et Thierry Garcin), spécia-listes du monde islamique (ChristianLochon et Boutros Hallaq), spécialistesdes relations islamo-chrétiennes (F adiDaou, Christophe Roucou et JeanToussaint), ou encore des journalistes(Henri Tincq, Roula Zein, Luc Balbon).

(Vous pouvez commander cet ouvrageau prix de 10 eur os - chèque à l'ordr e deChrétiens de la Méditerranée chez LouisBoulanger 26 Chemin J oseph Aiguier Bât.1-2 13009 Marseille)

« Ben Barka,Hassan II, De Gaulle,ce que je sais d'eux »

de Maurice Buttin. Ouvrage réédité etcomplété, avec une préface de Bachir BenBarka. Aux Editions Karthala - octobre2015. Il est possible de le commander dédi-cacé chez l’auteur. 26 euros.

L’auteur, né à Meknès (Maroc), avo-cat à la Cour d'Appel de Rabat,

puis de P aris - après son interdiction derevenir au Maroc pendant 17 années aulendemain de sa plaidoirie aux Assises dela Seine, en septembre 1966 - est l'avocatde la f amille Ben Barka depuis toujours,constitué à Rabat par la mère du leadermarocain, dès le 31 octobre 1965. Il adonc « accompagné » 50 ans d'instructionet 10 juges différents.

Et il continue à sui vre le dossieraujourd'hui encore en espérant v oir unjour émerger la vérité judiciaire .

Editorial

Terrorisme et résistanceL’année 2015 restera comme une année noire dans l’Histoire de la France,

en particulier à Paris : attentats islamistes djihadistes en janvier contre larédaction du journal Charlie Hebdo et contre les clients d’une supérette cacher,Porte de Vincennes – 17 morts ; nouv eaux attentats, le 13 novembre dernier -130 morts, 352 blessés, dont 99 en situation d’ur gence absolue. Ces derniersattentats, les plus meurtriers exécutés en France depuis la dernière Guerre et lesseconds en Europe, après ceux de Madrid en 2004. Des semaines après, nousn’avons pas fini de partager le deuil des victimes.

Le retentissement des premiers attentats fut considérable, tant dans notrepays qu’à l’étranger . En France, plus de 4 millions de personnes, les« Marcheurs républicains » , défilèrent dans les rues. A Paris même, plus d’unmillion et demi de manifestants étaient précédés de quarante quatre chefsd’Etat. Et n’y aurait-il pas eu plus de Français des banlieues - très peu présents- et autres militants antisionistes, s’ils n’avaient pas été arrêtés par la scanda-leuse présence du Premier ministre israélien, Benyamin Netan yahou, et soncélèbre ministre des Affaires étrangères de l’époque, Lieberman ? (Ils seseraient « imposés » paraît-il… et il a été f ait un appel ur gent au Présidentpalestinien, Mahmoud Abbas, pour qu’il soit là lui aussi).

Ils avaient 23, 24, 32, 38, 41 ans, avec une exception pour une ancienne éluede la Seine Saint Denis v enue à plus de 60 ans accompagner sa f ille à ceconcert, tous ces jeunes frappés au célèbre lieu festif, le Bataclan, ou aux ter-rasses de cafés des X ème et XIème arrondissement. Selon la ministre de laJustice, Christiane Taubira, 29 villes étaient concernées par les victimes, et 25des 130 morts étaient de nationalité étrangère ou binationale, représentant unevingtaine de pays !

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SSoommmmaaiirree ::

�Tribune de Marw an Barghoutiparue dans The Guardian du 12octobre, p.3�En finir avec l'impunité d'Israël parBernard Ravenel, p.4�La cr ise syr ienne, prob lématiqueuniverselle par Boutros Hallaq, p.5�Une par lementaire palestiniennecondamnée, p.6�La solution à deux Etats est laseule raisonnable par Zeev Sternhell,p.8�La droite isr aélienne s'attaque àune association d'anciens soldats , p .10�DOSSIER : attentats du 13novembre, p. 11 à 14�La campagne BDS dans le monde,p.15�L'autre victoire des Palestiniens parMohammed Larbi, p.16�La fin du rôle histor ique de laFrance au Mo yen-Orient par AlainGresh, p.17�Le projet de destr uction d'al-Aqsan’a r ien d'une théor ie du complot parIlan Pappe, p.18�Les souffrances psychologiques enPalestine, entretien a vec Samah J abrmédecin psychiatre , p.19�Génération spontanée en Palestinepar Julien Salingue, p.20�L'accord historique entre le Vaticanet les P alestiniens entre en vigueur ,p.21�Courrier des lecteurs, p.22

Nous adressonsnos meilleurs voeuxà tous nos lecteurs

OOCCTTOOBBRREE � NNOOVVEEMMBBRREE � DDEECCEEMMBBRREE� 22001155 � NN°° 55 99

«Une cause jamais perdue», Jacques Berque

Courrier du C.V.P.R.Bulletin du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient

L’Assemblée généraledu CVPR PO

se tiendra le vendredi12 février 2016

de 18 h à 20 heures.

Elle sera suivie, de 20 h 15à 22 heures,

d’une conférence de

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Contre les chars israéliens les lance-pierres. David contre Goliath.

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Courrier N°59 4 pages couverture 18/01/16 14:39 Page 1