10
Toxoplasmose B. Cimon, F. Biquard CHAPITRE 34 Parasitose fréquente due à Toxoplasma gondii, la toxoplas- mose est une affection souvent bénigne mais potentielle- ment grave chez le patient immunodéprimé et le fœtus. La toxoplasmose congénitale est la conséquence d'une trans- mission maternofœtale du parasite qui résulte elle-même d'une primo-infection toxoplasmique survenue en cours de grossesse. L'atteinte fœtale est très variable, allant de formes asymptomatiques à une mort in utero en passant par des atteintes oculaires retardées survenant pendant l'enfance ou l'adolescence. La prévalence des atteintes oculaires est d'environ 1 % des sujets atteints en Europe et en Amérique du Nord, tandis qu'elle peut atteindre jusqu'à 20 % des personnes infectées en Amérique du Sud où les lésions oculaires sévères potentiellement responsables de cécité semblent aussi plus fréquentes. En France, la prévention de la toxoplasmose congéni- tale, qui fait l'objet d'une législation depuis 1978, repose d'abord sur un programme de dépistage et de surveillance sérologique des femmes enceintes. En cas de séroconver- sion toxoplasmique pendant la grossesse, un diagnostic prénatal est proposé, s'appuyant alors sur l'exploration échographique du fœtus et l'analyse biologique du liquide amniotique. Les progrès de l'échographie et des tech- niques biologiques, ajoutés à un cadre législatif mieux défini, ont permis d'optimiser ce diagnostic prénatal et ainsi d'ajuster la stratégie thérapeutique initiée pendant la grossesse. Données épidémiologiques La toxoplasmose est une parasitose cosmopolite mais sa fréquence varie beaucoup selon les pays. En France, la séroprévalence est assez élevée, même si elle tend à régresser. En effet, les enquêtes nationales réalisées en 1995 puis en 2003 montrent une diminution significative de la séroprévalence chez les femmes enceintes, passée respectivement de 54 à 45 %, alors qu'elle atteignait 80 % dans les années 1960 [1]. La séroprévalence augmente progressivement avec l'âge et la primo-infection toxoplas- mique survient assez fréquemment chez des femmes en âge de procréer. L'incidence de la toxoplasmose chez les femmes enceintes est ainsi estimée entre 6,1 et 7,2 pour 1 000 grossesses [1]. Ces chiffres issus de l'enquête nationale de 2003 ont été obtenus par modélisation à partir de la séroprévalence et de l'âge des patientes et doivent donc être confirmés. Le Centre national de référence de la toxoplasmose mis en place récemment a notamment pour objectif d'actualiser ces données épidémiologiques [2]. L'incidence de la toxoplasmose congénitale en France en 2007 était de 2,9 pour 10 000 naissances vivantes, soit inférieure aux estimations antérieures [3]. Transmission maternofœtale Seuls le chat et les félidés sauvages constituent les hôtes définitifs de T. gondii. Le cycle sexué du parasite se déroule dans leur tube digestif et conduit à l'excrétion d'oocystes dans le milieu extérieur. L'homme ainsi que l'ensemble des animaux à sang chaud sont des hôtes inter- médiaires, hébergeant le parasite sous sa forme asexuée (fig. 34.1) En France, le principal mode de contamination des femmes enceintes est lié à l'absorption de kystes (for- mes quiescentes du parasite) contenus dans la viande insuffisamment cuite et n'ayant pas subi de congélation. L'infestation peut également résulter de l'absorption d'oocystes lors de la consommation de fruits et légu- mes crus mal lavés, ou d'une hygiène des mains insuffi- sante après contact avec la terre (jardinage) ou les chats. Paradoxalement, la présence d'un chat dans l'entourage d'une femme enceinte n'apparaît pas aujourd'hui comme un facteur de risque majeur, compte tenu à la fois de la Fig. 34.1. Cycle parasitaire de Toxoplasma gondii.

3 s2.0-b978229ncvn4709623000343-main

Embed Size (px)

Citation preview

ToxoplasmoseB. Cimon, F. Biquard

chapitre

34

Parasitose fréquente due à Toxoplasma gondii, la toxoplas-mose est une affection souvent bénigne mais potentielle-ment grave chez le patient immunodéprimé et le fœtus. La toxoplasmose congénitale est la conséquence d'une trans-mission maternofœtale du parasite qui résulte elle-même d'une primo-infection toxoplasmique survenue en cours de grossesse. L'atteinte fœtale est très variable, allant de formes asymptomatiques à une mort in utero en passant par des atteintes oculaires retardées survenant pendant l'enfance ou l'adolescence. La prévalence des atteintes oculaires est d'environ 1 % des sujets atteints en Europe et en Amérique du Nord, tandis qu'elle peut atteindre jusqu'à 20 % des personnes infectées en Amérique du Sud où les lésions oculaires sévères potentiellement responsables de cécité semblent aussi plus fréquentes.

En France, la prévention de la toxoplasmose congéni-tale, qui fait l'objet d'une législation depuis 1978, repose d'abord sur un programme de dépistage et de surveillance sérologique des femmes enceintes. En cas de séroconver-sion toxoplasmique pendant la grossesse, un diagnostic prénatal est proposé, s'appuyant alors sur l'exploration échographique du fœtus et l'analyse biologique du liquide amniotique. Les progrès de l'échographie et des tech-niques biologiques, ajoutés à un cadre législatif mieux défini, ont permis d'optimiser ce diagnostic prénatal et ainsi d'ajuster la stratégie thérapeutique initiée pendant la grossesse.

Données épidémiologiques

La toxoplasmose est une parasitose cosmopolite mais sa fréquence varie beaucoup selon les pays. En France, la séroprévalence est assez élevée, même si elle tend à régresser. En effet, les enquêtes nationales réalisées en 1995 puis en 2003 montrent une diminution significative de la séroprévalence chez les femmes enceintes, passée respectivement de 54 à 45 %, alors qu'elle atteignait 80 % dans les années 1960 [1]. La séroprévalence augmente progressivement avec l'âge et la primo-infection toxoplas-mique survient assez fréquemment chez des femmes en âge de procréer.

L'incidence de la toxoplasmose chez les femmes enceintes est ainsi estimée entre 6,1 et 7,2 pour 1 000 grossesses [1]. Ces chiffres issus de l'enquête nationale de 2003 ont été obtenus par modélisation à partir de la séroprévalence et de l'âge des patientes et doivent donc être confirmés. Le Centre national de référence de la toxoplasmose mis en place récemment a notamment pour

objectif d'actualiser ces données épidémiologiques [2]. L'incidence de la toxoplasmose congénitale en France en 2007 était de 2,9 pour 10 000 naissances vivantes, soit inférieure aux estimations antérieures [3].

Transmission maternofœtale

Seuls le chat et les félidés sauvages constituent les hôtes définitifs de T. gondii. Le cycle sexué du parasite se déroule dans leur tube digestif et conduit à l'excrétion d'oocystes dans le milieu extérieur. L'homme ainsi que l'ensemble des animaux à sang chaud sont des hôtes inter-médiaires, hébergeant le parasite sous sa forme asexuée (fig. 34.1)

En France, le principal mode de contamination des femmes enceintes est lié à l'absorption de kystes (for-mes quiescentes du parasite) contenus dans la viande insuffisamment cuite et n'ayant pas subi de congélation. L'infestation peut également résulter de l'absorption d'oocystes lors de la consommation de fruits et légu-mes crus mal lavés, ou d'une hygiène des mains insuffi-sante après contact avec la terre (jardinage) ou les chats. Paradoxalement, la présence d'un chat dans l'entourage d'une femme enceinte n'apparaît pas aujourd'hui comme un facteur de risque majeur, compte tenu à la fois de la

Fig. 34.1. – Cycle parasitaire de Toxoplasma gondii.

352 Pathologies infectieuses du fœtus

période très courte d'émission des oocystes chez les jeu-nes chats, de la part plus importante dans l'alimentation des chats de produits industriels contrôlés, mais aussi des conseils prophylactiques donnés aux femmes enceintes. Dans les pays en voie de développement, la consommation d'une eau non filtrée est une source de contamination.

Après l'étape digestive qui suit la contamination orale survient une phase de parasitémie habituellement de courte durée et au cours de laquelle peut se produire la transmis-sion maternofœtale du parasite. Cette phase de parasitémie n'est généralement présente que lors de la primo-infection toxoplasmique, sauf en cas d'immunodépression où des récurrences parasitémiques peuvent être observées par réactivation d'une toxoplasmose ancienne. Une fois dans le sang maternel, le parasite infecte d'abord le placenta avant de passer secondairement dans la circulation fœtale. Cette phase placentaire précédant l'éventuelle atteinte fœtale est un élément physiopathologique pris en compte pour établir la date de l'amniocentèse, fixée 4 semaines au moins après la date présumée de la contamination.

En cas de primo-infection toxoplasmique pendant la grossesse, le risque de transmission maternofœtale du parasite est d'autant plus élevé que l'infection sur-vient tardivement pendant la grossesse. Évalué à 6 % à 13 semaines de grossesse, ce risque augmente progres-sivement pour atteindre environ 70 % à 36 semaines, avec un risque global estimé à 29 % [4]. À l'inverse, la gravité de l'atteinte diminue avec le terme. Ainsi, une contamination maternelle au cours du 1er trimestre expose aux lésions fœtales les plus graves, tandis qu'une conta-mination tardive ne provoque que des formes dégradées, retardées ou mêmes inapparentes de toxoplasmose congé-nitale. Les réinfections ne sont que très exceptionnelle-ment à l'origine de toxoplasmose congénitale [5].

Diagnostic chez la mère

Diagnostic clinique

Dans la majorité des cas, la toxoplasmose reste asymp-tomatique. Parmi les formes apparentes qui représentent environ 10 % des cas, la plus classique associe adéno-pathies, fièvre et asthénie. Les adénopathies sont avant tout cervicales, sans caractère inflammatoire. La fièvre est habituellement modérée et l'asthénie, parfois intense, peut persister plusieurs mois. L'évolution est en règle bénigne et la guérison survient spontanément.

Diagnostic sérologique

Règles générales du sérodiagnostic

La fréquence des formes inapparentes place le sérodia-gnostic au premier plan dans la surveillance des fem-mes enceintes. Il vise tout d'abord à détecter les femmes enceintes séronégatives, donc exposées au risque d'infec-tion toxoplasmique pendant la grossesse. Une fois iden-

tifiées, ces patientes à risque doivent être informées des mesures prophylactiques et surveillées sérologiquement à raison d'une sérologie mensuelle jusqu'à l'accouchement selon le programme officiel de prévention actuellement en vigueur en France. L'objectif est alors de déceler le plus tôt possible une séroconversion de façon à engager précocement les mesures diagnostiques et thérapeutiques adaptées. L'indication d'une amniocentèse pour diag-nostic biologique prénatal de la toxoplasmose ne pourra être discutée qu'après expertise sérologique approfondie, permettant d'une part d'authentifier la primo-infection toxoplasmique et d'autre part de la dater par rapport à la grossesse en cours.

Le sérodiagnostic de la toxoplasmose associe au minimum un dosage des IgG antitoxoplasmiques, avec expression des résultats en unités internationales, et un test de détection des IgM. Le laboratoire doit en outre mentionner sur son compte rendu la nature exacte des techniques utilisées avec leur seuil significatif, et a l'obli-gation de conserver pendant un an les échantillons de sérum analysés.

Techniques de sérodiagnostic

Aujourd'hui, les techniques de première intention habi-tuellement employées dans les laboratoires sont des tech-niques immuno-enzymatiques automatisées détectant IgG et IgM antitoxoplasmiques. Lorsque les résultats obtenus par ces tests de dépistage soulèvent un problème d'inter-prétation, des techniques de seconde intention réalisées habituellement dans un laboratoire spécialisé sont néces-saires pour clarifier le profil sérologique [6].

Des tests complémentaires doivent ainsi être entrepris devant un profil associant IgG et IgM antitoxoplasmiques de façon à préciser le stade évolutif de l'infection toxo-plasmique. La détermination de l'avidité des IgG utilisée comme test d'exclusion d'une infection toxoplasmique récente est un bon outil pour dater la contamination par rapport au début de la grossesse [7]. De même, la détec-tion des IgA antitoxoplasmiques peut contribuer à cette datation. La présence simultanée d'IgA et d'IgM spécifi-ques est en effet en faveur d'une infection toxoplasmique à la phase aiguë [8]. Toutefois, ce marqueur sérologique doit être interprété avec prudence car, s'il est présent habi-tuellement dans les premiers mois après la séroconver-sion, il est parfois absent lors d'une primo-infection et, à l'inverse, peut persister au-delà d'un an dans certains cas.

Des tests de seconde intention sont également nécessai-res pour préciser le statut immunitaire d'une patiente dont le taux sérique d'IgG antitoxoplasmiques est égal ou très légèrement supérieur au seuil significatif de la technique utilisée [9]. Le dye-test ou l'immunofluorescence indi-recte peuvent alors être employés, mais ces techniques, bien que de grande valeur diagnostique, sont difficiles à mettre en œuvre et de moins en moins pratiquées. Des méthodes telles que l'agglutination directe hypersensible ou l'immunoblot, de réalisation plus aisée et qui possè-dent une très bonne sensibilité dans la détection des IgG, constituent des alternatives de choix dans ce contexte.

Toxoplasmose 353

Une expertise sérologique est également indiquée face à une positivité du seul test de détection IgM antitoxo-plasmiques qui peut traduire une infection toxoplasmique débutante ou une réaction non spécifique dans la détec-tion des IgM. Il convient alors de réaliser une seconde technique de détection des IgM telle que la méthode d'im-munocapture-agglutination qui se positive habituellement très tôt en début d'infection et possède par ailleurs une bonne spécificité [10]. Une recherche d'IgA spécifiques, marqueur d'apparition précoce lors d'une primo-infection toxoplasmique, peut venir compléter l'expertise.

Interprétation du sérodiagnostic

L'interprétation du sérodiagnostic, qui nécessite de bien connaître les limites propres à chaque méthode, est une étape essentielle car elle conditionne toute la conduite

à tenir ultérieure, à la fois prénatale et postnatale, dans la prévention de la toxoplasmose congénitale. Un guide simplifié d'interprétation du sérodiagnostic est proposé dans la figure 34.2.

La multiplicité des trousses de sérodiagnostic actuel-lement sur le marché est source de difficultés dans l'in-terprétation des résultats. En effet, quelle que soit la trousse employée, les résultats sont exprimés en unités internationales (UI), ce qui suggère une standardisation des valeurs observées. Or, il n'existe pas actuellement de correspondance entre les titres obtenus par les différentes techniques commercialisées qui font appel à des princi-pes immunologiques et à des réactifs différents. Cette donnée doit impérativement être prise en compte lorsqu'il convient de comparer les titres en anticorps de sérums successifs qui ne pourront être interprétés qu'au sein d'un même système analytique.

IgG négatives

IgM négatives

Absence dimmunité

Surveillance sérologique mensuelle Conseils hygiéno-diététiques

Contrôles sérologiques

IgM non spécifiques ou début dinfection

IgM positives

IgG restant négatives Apparition dIgG

Séroconversiontoxoplasmique

IgM positives

IgG positives

IgM négatives

En faveur dune infection ancienne

Contrôle à 3 semaines

IgG stablesIgG augmentées Avidité basse Avidité élevée

Réactivation(avidité élevée)ou, rarement,

infection récentesans IgM

Infection ancienne Infection récentepossible

Infection récenteexclue

Contrôle à 3 semaines

IgG augmentées IgG stables

Infection < 2 moisau 1er prélèvement

Infection > 2 moisau 1er prélèvement

Infection récente possible

Tests complémentaires (avidité des IgG)

Fig. 34.2. – Guide simplifié d'interprétation du sérodiagnostic de la toxoplasmose chez une femme enceinte immunocompétente.

354 Pathologies infectieuses du fœtus

Concernant l'interprétation des marqueurs, la présence d'IgM doit être considérée comme un signal d'alarme mais ne peut constituer à elle seule un argument suffisant pour affirmer le caractère récent de la toxoplasmose [11]. En effet, les IgM peuvent être détectées parfois plus d'un an après le début de l'infection, et des réactions non spécifi-ques peuvent être observées dans certains cas. Par consé-quent, en présence d'IgM et IgG chez une femme enceinte à la déclaration de grossesse, sans antécédent sérologique connu ou avec un antécédent de sérologie ancienne néga-tive, une datation précise de l'infection toxoplasmique par rapport au début de la grossesse s'impose. Elle requiert l'utilisation de tests sérologiques complémentaires spéci-fiques et l'analyse de la cinétique des marqueurs sur des échantillons de sérum prélevés à 3 semaines d'intervalle.

Les taux faibles d'IgG antitoxoplasmiques, voisins du seuil significatif, sont également à l'origine de fréquentes difficultés d'interprétation [6]. Dans cette situation, si des analyses successives sont effectuées dans différents labo-ratoires, le statut immunitaire des patientes peut apparaî-tre « fluctuant ». En fait, ces apparentes fluctuations sont liées aux techniques utilisées qui varient d'un laboratoire à un autre, et pour lesquelles il existe une hétérogénéité des valeurs seuils. Les taux faibles d'IgG entretiennent aussi une ambiguïté sur la notion d'immunité protectrice. En fait, les anticorps circulants, s'ils sont largement uti-lisés pour le diagnostic, jouent en réalité un rôle mineur dans les mécanismes de défense contre le toxoplasme qui dépendent avant tout de l'immunité à médiation cellu-laire. En pratique, en présence d'un titre faible d'IgG, il convient de réaliser une seconde technique de détection des anticorps comme le prévoit la législation actuelle, et de contrôler ce résultat sur un second sérum prélevé 3 semaines plus tard. Si les deux tests sont positifs et que l'analyse du second échantillon confirme la stabilité, la notion d'infection toxoplasmique ancienne est confirmée et la surveillance sérologique ultérieure est alors inutile. Dans le cas d'une discordance entre les techniques, il paraît en revanche souhaitable d'inclure la patiente dans le groupe à risque et de la surveiller sérologiquement pen-dant la grossesse.

Des examens complémentaires sont également néces-saires devant une augmentation significative du taux d'IgG sans IgM chez une patiente sans antécédent sérologique connu. Il convient ici de discriminer une séroréactivation d'une séroconversion toxoplasmique avec IgM fugaces, non détectables à la date de l'analyse. Dans notre expé-rience, la détermination de l'avidité des IgG peut présen-ter un intérêt dans cette situation, en écartant l'hypothèse d'une séroconversion récente sans IgM, si l'indice d'avi-dité est élevé [6].

Atteinte fœtale

L'atteinte fœtale dépend du terme de transmission du parasite pendant la phase de parasitémie. On distingue les séroconversions périconceptionnelles entre 2 semai-

nes avant et après le début de la grossesse, où le risque de transmission maternofœtale est faible mais l'atteinte embryonnaire grave avec arrêt spontané précoce de la grossesse. Les séroconversions maternelles du 1er trimes-tre et du début du 2e sont les plus à risque de lésions fœta-les graves, à savoir des lésions cérébrales avec nécrose tissulaire responsables de dilatation ventriculaire et de calcifications intracrâniennes (fig. 34.3). La triade classi-que de la toxoplasmose congénitale associe calcifications intracrâniennes, hydrocéphalie et choriorétinite macu-laire. Les formes sévères septicémiques se manifesteront plutôt par une hépatosplénomégalie, un épanchement des séreuses, des calcifications intra-abdominales et une atteinte hématopoïétique (fig. 34.4). Les lésions oculaires de choriorétinites peuvent survenir quel que soit le terme de l'infection fœtale et leur survenue peut être retardée après la naissance. À 4 ans, 16,5 à 18 % des enfants dépis-tés et traités en période prénatale ont une atteinte oculaire rétinienne [12, 13]. À côté de l'âge gestationnel de surve-nue de l'infection maternelle, d'autres facteurs de gravité sont le type, la virulence de la souche de toxoplasme et la réaction immunitaire maternelle. Une étude européenne

Fig. 34.3. – Calcifications intracérébrales toxoplasmiques (cliché du docteur Lépinard).

Fig. 34.4. – Hépatomégalie, ascite et calcifications intra - abdominales (cliché du docteur Boussion).

Toxoplasmose 355

prospective a observé 19 % d'enfants symptomatiques à un an ; dans cette étude, il a été retrouvé 9 % de lésions cérébrales, 14 % de choriorétinites, tandis que 5 % des enfants présentaient des séquelles neurologiques [14].

Diagnostic prénatal

Une fois la primo-infection toxoplasmique confirmée et datée par rapport à la grossesse en cours, le diagnostic prénatal doit permettre de savoir si le fœtus a été infecté de façon à guider l'attitude thérapeutique ultérieure. Le diagnostic prénatal de la toxoplasmose repose sur l'ana-lyse biologique du liquide amniotique et sur une sur-veillance échographique du fœtus.

Diagnostic biologique prénatal

Modalités pratiques

L'amniocentèse peut être réalisée à partir de 18 SA, en res-pectant un délai d'au moins 4 semaines après la date présu-mée de la contamination maternelle. Actuellement, la date limite pour réaliser cette amniocentèse ne fait pas l'objet d'un consensus en France, et certains centres la pratiquent jusqu'au terme de la grossesse. L'analyse biologique est effectuée dans un laboratoire agréé, soumis à autorisa-tion ministérielle. Une fois prélevé, le liquide amniotique, accompagné des documents légaux, doit parvenir le plus rapidement possible au laboratoire. Un volume maximal de 20 mL de liquide amniotique est prélevé puis réparti dans deux flacons qui permettent de réaliser les deux tech-niques d'analyse, la PCR (polymerase chain reaction) et l'inoculation à la souris. La ponction de sang fœtal n'est plus utilisée pour le diagnostic de toxoplasmose congéni-tale compte tenu des risques imputables à ce prélèvement par rapport à l'amniocentèse. Elle permettrait encore de rechercher des signes biologiques aspécifiques d'infec-tion fœtale disséminée comme l'anémie, la neutropénie, la thrombopénie et l'atteinte hépatique fœtale.

Techniques d'analyse parasitologique

La recherche d'ADN toxoplasmique par PCR est aujourd'hui la méthode de choix pour rechercher le para-site dans le liquide amniotique. Elle est réalisée dans tous les laboratoires français autorisés à pratiquer ce diagnos-tic prénatal, mais il existe une grande diversité dans les protocoles employés selon les laboratoires [15]. La tech-nique repose sur une amplification de séquences d'ADN spécifiques du génome de T. gondii. Différentes cibles peuvent être recherchées mais, actuellement, les séquen-ces d'ADN situées sur le gène B1 et une séquence de 529 paires de bases fortement répétée dans le génome (REP 529) sont les cibles qui se montrent les plus performantes [16]. Techniquement, les méthodes de PCR dites conven-tionnelles sont dorénavant supplantées par des méthodes de PCR quantitatives qui permettent une mesure en temps

réel des produits amplifiés directement dans le tube réac-tionnel, réduisant ainsi le risque de contamination.

Conjointement à la PCR, le parasite est recherché par inoculation du liquide amniotique à un lot de souris. L'inoculation est réalisée par voie intrapéritonéale dans les 4 heures qui suivent le prélèvement, et l'infection toxoplasmique est détectée chez les souris par recherche d'anticorps sériques 3 et 6 semaines après l'inoculation. Si la sérologie est positive, le diagnostic est confirmé par la mise en évidence de kystes dans le cerveau des souris.

Valeur du diagnostic biologique prénatal

La PCR, plus rapide et plus sensible que l'inoculation à la souris, est la méthode la plus performante dans le diagnos-tic prénatal de la toxoplasmose. Toutefois, la négativité de la PCR ne permet pas d'exclure de manière formelle le diagnostic. En effet, la sensibilité de cette technique rapportée dans les études publiées au cours des 10 der-nières années n'est pas parfaite, souvent comprise entre 70 et 80 % [17, 18]. L'utilisation conjointe de l'inocula-tion à la souris permet d'augmenter cette sensibilité, ce qui a justifié jusqu'alors de conserver cette technique en complément de la PCR [17, 19]. La spécificité de la PCR et plus globalement des techniques parasitologiques est en revanche très satisfaisante, souvent proche de 100 %, même si des résultats faussement positifs par PCR ont été rapportés [16].

Par ailleurs, des différences en termes de sensibilité et de spécificité existent entre les laboratoires compte tenu de la multiplicité des protocoles techniques employés [20]. En France, une démarche a été entreprise au sein du Centre national de référence de la toxoplasmose afin d'évaluer les pratiques et méthodes de diagnostic molécu-laire dans les laboratoires, et proposer à terme des recom-mandations pour améliorer globalement les performances du diagnostic prénatal de la toxoplasmose [15].

Surveillance échographique

La surveillance échographique devient spécifique à partir du diagnostic de séroconversion toxoplasmique maternelle quel que soit le résultat de la recherche du toxoplasme sur le liquide amniotique, la sensibilité de ces examens étant incomplète. Elle doit être réalisée par un échogra-phiste ayant l'expérience du diagnostic des lésions fœta-les d'origine infectieuse et travaillant dans le cadre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Cette sur-veillance est mensuelle jusqu'à la fin de la grossesse. Le recours à l'échographie par voie vaginale est intéressant selon la position fœtale, lorsque le fœtus est en présenta-tion céphalique. Les éléments de surveillance fœtale sont la croissance fœtale, la quantité de liquide amniotique, l'aspect et la taille du placenta, la recherche d'une hépa-tosplénomégalie fœtale ou d'un épanchement des séreu-ses, les yeux et le cerveau fœtal. Les lésions sont d'autant plus sévères que la contamination est précoce. Les lésions sévères sont cérébrales et font le pronostic. On recherche une dilatation ventriculaire uni- ou bilatérale, postérieure

356 Pathologies infectieuses du fœtus

ou antérieure, des calcifications intracérébrales péri-ventriculaires ou intraparenchymateuses typiquement hyperéchogènes sans cône d'ombre et des kystes périven-triculaires. Toute mise en évidence de lésions échogra-phiques cérébrales incite à réaliser une imagerie cérébrale fœtale par résonance magnétique nucléaire ; elle permet de compléter le bilan en visualisant des zones difficile-ment explorables par l'examen échographique en fonction de la position fœtale et précise d'éventuelles anomalies de la gyration ou de la migration neuronale. En revanche, les calcifications intracrâniennes fœtales (voir fig. 34.3) ne sont pas visibles en IRM. Dans l'étude européenne pros-pective, 7 % des fœtus infectés présentaient des images cérébrales, essentiellement à type de dilatation ventricu-laire ou de calcifications intracrâniennes [14].

Conduite à tenir pendant la grossesse

Femme non immunisée

Les femmes séronégatives doivent faire une sérologie toxoplasmose tous les mois jusqu'à l'accouchement. Il s'agit d'une obligation légale – arrêté du 19 avril 1985 et décret 92–144 du 14 février 1992. Cette sérologie est de préférence réalisée régulièrement et dans le même laboratoire qui peut ainsi traiter deux examens succes-sifs en parallèle pour juger de l'évolutivité des taux si nécessaire. Ces femmes doivent par ailleurs respecter des règles hygiénodiététiques spécifiques pour éviter de se contaminer par ingestion d'aliments contaminés par des kystes, le médecin devant leur remettre une liste de recommandations selon la circulaire du 27 septembre 1983 (tableau 34.1).

Séroconversion en cours de grossesse

La prise en charge en cas de séroconversion toxoplasmi-que per-gravidique est issue d'une étude datant de 1974 qui concluait que la spiramycine diminuait le risque de transmission maternofœtale du toxoplasme [21]. Cette donnée n'est pas confirmée. Il n'existe pas d'essai rando-misé l'évaluant. Le traitement instauré dans les 3 semaines après l'infection maternelle réduirait le taux de transmis-sion de la mère à l'enfant [22], qui serait dans la grande majorité des cas précoce. Aucun protocole de traitement n'est prouvé comme supérieur à un autre pour réduire le taux de transmission et le nombre d'enfants infectés symptomatiques.

En France, dès la suspicion de toxoplasmose évoquée, la femme enceinte doit bénéficier d'un traitement prophy-lactique de la transmission maternofœtale par spiramycine 9 millions UI/j en 3 prises. Si la séroconversion mater-nelle n'est pas confirmée, le traitement est interrompu. La séroconversion toxoplasmique d'une femme enceinte étant avérée, dépistée par à un laboratoire à deux exa-mens successifs et confirmée et datée par un laboratoire

de référence, la question du diagnostic prénatal fœtal se pose. Celui-ci est possible sur liquide amniotique prélevé par une amniocentèse qui est programmée avec un délai supérieur à 4 semaines après la date supposée de l'infec-tion maternelle et dans tous les cas après 18 SA. Si la recherche du toxoplasme est négative sur liquide amnio-tique, la surveillance échographique est poursuivie, le traitement par spiramycine aussi et le bilan néonatal réa-lisé. Si la recherche sur liquide amniotique est positive, un traitement associant la sulfadiazine 3 g/j et la pyrimé-thamine 50 mg/j pendant 4 semaines en alternance avec la spiramycine pendant 2 semaines est proposé. D'autres auteurs suggèrent d'associer la sulfadiazine et la pyrimé-thamine en continu (sans alternance avec la spiramycine). Il s'agit d'un traitement paraciticide ; l'objectif est de trai-ter in utero le fœtus mais le bénéfice attendu en termes de diminution du nombre de choriorétinites ou de lésions cérébrales postnatales de cette stratégie n'a pas été claire-ment démontré [23]. La pyriméthamine est un antiméta-bolite qui présente un risque d'aplasie par dépression du fonctionnement de la moelle osseuse, et a comme autre effet secondaire notable la possibilité d'entraîner des trou-bles digestifs. Il est conseillé de vérifier la numération-formule sanguine maternelle une fois par semaine et de supplémenter en acide folinique à la dose de 50 mg heb-domadaire. La sulfadiazine présente des risques cutanés à type d'éruption jusqu'au syndrome de Lyell. Dans environ 3 % des cas, il est nécessaire d'interrompre le traitement.

L'interruption médicale de grossesse est envisagée avec les parents lorsque l'infection fœtale est avérée et qu'il existe des lésions cérébrales fœtales à l'examen échographique et/ou IRM ou des arguments échographiques en faveur d'une forme disséminée (fig. 34.5). En 2007 en France [3], les interruptions médicales de grossesse et les morts fœtales in utero étaient toutes secondaires à une infection maternelle

Conseils hygiénodiététiques chez une femme enceinte non immunisée.

Bien cuire la viande dans toute son épaisseur (bœuf, mouton, porc, cheval)Éviter la consommation de viande salée, marinée ou fumée

Lors de la préparation des repas, laver soigneusement les légumes et les plantes aromatiques consommés crusLaver soigneusement les ustensiles de cuisine ainsi que les plans de travail

Se laver les mains après contact avec des légumes, des fruits ou de la viande crue et avant de passer à table

Éviter les contacts avec les objets qui pourraient être en contact avec les excréments de chat (comme les bacs des litières, la terre) et porter chaque fois des gants en cas de manipulation de ces objets

Éviter le contact direct avec la terre et porter des gants pour jardinerSe laver les mains après des activités de jardinage même si elles sont protégées par des gants

Tableau 34-1

Toxoplasmose 357

du 1er ou du 2e trimestre de la grossesse. Les infections de la fin du 2e trimestre et du 3e trimestre n'ont abouti à aucune interruption médicale de grossesse.

Bilan néonatal et conduite à tenir chez l'enfant

Bilan néonatal

Un bilan néonatal complet à la fois clinique, paraclini-que et biologique doit être réalisé systématiquement chez tout enfant né de mère ayant présenté une primo-infection toxoplasmique pendant la grossesse (y compris les séro-conversions pendant la période périconceptionnelle), que le diagnostic biologique prénatal ait été pratiqué ou pas et quel que soit son résultat.

L'examen clinique du nouveau-né qui recherche notamment des signes neurologiques est complété par un bilan paraclinique comprenant systématiquement un fond d'œil, une échographie transfontanellaire et une radiographie du crâne. L'examen du fond d'œil, difficile chez le nouveau-né, permet la détection de foyers cho-riorétiniens uni- ou bilatéraux. L'échographie transfon-tanellaire a pour but de mettre en évidence des lésions cérébrales méconnues pendant la grossesse, et la radio-graphie du crâne dépiste en particulier des calcifications intracrâniennes (voir fig. 34.3), périventriculaires ou intraparenchymateuses. En cas de choriorétinite, de cal-cifications cérébrales ou de signe d'appel échographique, ce bilan paraclinique peut être complété par une ponction lombaire à la recherche d'une hyperprotéinorachie et par un scanner cérébral.

Le bilan biologique néonatal, à la fois parasitologique et sérologique, est indispensable car il permet de confir-mer le diagnostic de toxoplasmose congénitale, même si elle reste cliniquement asymptomatique à la naissance.

Le parasite peut être recherché à partir du placenta, et éventuellement à partir du sang de cordon, par inocula-tion à la souris et/ou PCR. Le placenta doit être recueilli dans sa totalité et conservé à 4 °C sans congélation ni agent fixateur, puis transmis le plus rapidement possible au laboratoire.

Les analyses sérologiques réalisées sur sang de cordon et sang de l'enfant ont pour objectif de mettre en évidence des anticorps de type IgG, IgM ou IgA synthétisés par le fœtus en réponse à une contamination toxoplasmique in utero. La recherche des marqueurs sérologiques à la période néonatale doit reposer sur des techniques très sen-sibles et validées dans ce contexte [24]. Du fait de la sen-sibilité des tests employés, une légère contamination du sang de cordon par du sang maternel, due à une effraction placentaire à l'accouchement, peut suffire à positiver les tests de détection des IgM et/ou des IgA. L'analyse du sang de cordon doit donc être systématiquement complétée par une analyse du sang du nouveau-né. Effectué habituelle-ment entre le 4e et le 10e jour de vie, ce contrôle permet de réaliser la comparaison des profils immunologiques mère/enfant par immuno-empreinte (western-blot) ou par méthode ELIFA (enzyme-linked immunofiltration assay), capables de différencier les anticorps maternels transmis des anticorps néosynthétisés par l'enfant [24, 25].

La recherche simultanée des différents marqueurs bio-logiques par des techniques adaptées permet de confirmer le diagnostic de toxoplasmose congénitale à la période néonatale dans près de 90 % des cas [17]. Les cas de toxoplasmose congénitale non diagnostiqués à la période néonatale sont confirmés par le suivi sérologique ultérieur,

Séroconversion toxoplasmique(confirmée sérologiquement et datée par rapport au début de grossesse)

spiramycine (Rovamycine) 9 MU/j

Diagnostic biologique prénatal(amniocentèse > 18 SA et 4 semaines > primo-infection)

Négatif Positif

Échographienormale

Échographiepathologique

Échographienormale

Échographiepathologique

Rovamycinejusquà

l’accouchement

IMGsi anomalies

échographiquessévères

association M.A.L.ou

Fansidar

IMGsi anomalies

échographiquessévères

Fig. 34.5. – Prise en charge d'une femme enceinte après séroconversion toxoplasmique.

358 Pathologies infectieuses du fœtus

ce qui impose une surveillance pendant une période mini-male d'un an de tous les enfants nés de mère ayant présenté une séroconversion toxoplasmique per-gestationnelle.

Surveillance de l'enfant

La surveillance à la fois clinique, ophtalmologique et sérologique se déroule au cours de la première année selon un calendrier présenté dans la figure 34.6. En l'ab-sence de toxoplasmose congénitale, les anticorps mater-nels transmis disparaissent en 5 à 10 mois et la sérologie de contrôle réalisée à l'âge d'un an est totalement néga-tive. En revanche, la persistance, voire l'augmentation, des IgG au cours de la première année de vie confirme le diagnostic dans les quelques cas où celui-ci n'a pas été posé à la période anténatale ou néonatale. Mais quelle que soit la période du diagnostic, la surveillance de l'enfant doit être poursuivie au-delà de la 1re année si la toxoplas-mose congénitale a été confirmée biologiquement, même

si l'affection reste initialement asymptomatique. Cette surveillance clinicobiologique sur le long terme, prolon-gée jusqu'à l'âge adulte, a pour objectif de dépister des atteintes oculaires retardées ou secondaires.

L'attitude thérapeutique postnatale va être guidée par les résultats des différents bilans cliniques et biologiques entrepris chez l'enfant depuis sa naissance. Certaines situations (séroconversion toxoplasmique survenue en fin de grossesse, positivité du diagnostic biologique préna-tal) conduisent à engager le traitement dès la naissance de l'enfant (voir fig. 34.6).

Cas cliniques

À titre d'exemple, voici deux cas cliniques issus de la pratique qui mettent en évidence l'importance de l'exper-tise sérologique pour infirmer, affirmer et dater une séro-

Diagnostic de toxoplasmose congénitale à la période néonatale

Probable Peu probable

Pas de traitement initial

Traitement jusquà 1 an si forme infraclinique,poursuivi jusquà 2 ans si signes cliniquesFond d’œil : – tous les 6 mois jusquà 4 ans

– tous les ans de 4 à 9 ans– tous les 6 mois en péri-pubertaire– tous les ans jusquà 25 ans

Enfant indemnede toxoplasmose congénitale

Arrêt de la surveillance

Placenta*

Certain

Malocide®-Adiazine®

J5 à J60

• Diagnostic prénatal positif• Signes de toxoplasmose congénitale• IgM et/ou IgA et/ou Western Blot positifs à J4–J10

• Séroconversion du dernier mois de grossesse même si bilan néonatal négatif

• Séroconversion avant le dernier mois de grossesse• Bilan néonatal négatif

Malocide®-Adiazine®

• J5 à J60–90 si forme infraclinique• J5 à J80 si forme clinique puis Fansidar®

Sérologies à 3, 6, 9 et 12 mois

IgG négativesà 12 mois

Synthèse d’anticorps

• Fond d’œil à 2, 4, 6, 9 et 12 mois• ETF et radio crâne à 4 mois• Sérologies à 3, 6, 9, 12 mois

Fig. 34.6. – Stratégie diagnostique et thérapeutique chez un enfant à risque de toxoplasmose congénitale. (*Si le placenta a été analysé par inoculation à la souris, sa positivité à 6 semaines conduit à appliquer le protocole de traitement et de surveillance tel que défini pour un diagnostic « certain ».)

Toxoplasmose 359

conversion maternelle toxoplasmique supposée. De cette étape essentielle dépend la mise en route d'un protocole de surveillance et de soins associant prélèvement fœtal et traitement antiparasitaire qui présentent des complica-tions graves potentielles.

Observation 1

Madame B., 31 ans, débute une grossesse le 2 août 2008. La sérologie de la toxoplasmose négative lors de la pre-mière analyse en novembre se positive lors du contrôle réalisé le 3 janvier 2009 (tableau 34.2). Les résultats des tests complémentaires ainsi que l'étude de la cinétique des marqueurs à l'aide d'un nouveau prélèvement le 21 janvier permettent de situer le début de l'infection toxoplasmique autour du 15 décembre 2008, soit à 21 SA. Un traitement par Rovamycine® est débuté le 6 janvier 2009 et une sur-veillance échographique régulière est instituée.

Une amniocentèse pour diagnostic de la toxoplasmose, proposée par le centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal, est réalisée le 21 janvier 2009, à 26 SA. À cette date, l'examen échographique est normal. La positivité de la PCR, témoignant de la présence de T. gondii dans le liquide amniotique, conduit à modifier le traitement, et des cures de Malocide®, Adiazine® et Lederfoline® sont alors mises en place en alternance avec le traitement par Rovamycine®.

À 33 SA, l'échographie met en évidence des kystes sous-épendymaires bilatéraux, principalement à gauche, et une ventriculomégalie modérée. Une interruption médi-cale de grossesse est alors proposée et réalisée le 1er avril 2009 à 36 SA. Le diagnostic de toxoplasmose congénitale est confirmé par l'analyse du sang fœtal, qui révèle la pré-sence d'IgM et d'IgA antitoxoplasmiques, et par la détec-tion du parasite à partir d'un échantillon de placenta.

Observation 2

Madame P., 33 ans, accouche à terme le 27 novembre 2008 d'un garçon dont l'examen pédiatrique à la naissance est strictement normal. Deux jours après la naissance de l'enfant, le pédiatre est informé par le laboratoire de la positivation de la sérologie toxoplasmique chez la mère. La patiente connue négative pendant toute sa grossesse présente en effet un taux élevé d'IgG antitoxoplasmiques, mais sans IgM associées, lors du contrôle effectué à l'ac-couchement (tableau 34.3).

Devant ce résultat qui peut laisser supposer une séro-conversion toxoplasmique de fin grossesse, un traitement

associant Malocide®, Adiazine® et Lederfoline® est débuté chez l'enfant. En outre, un bilan biologique néo-natal spécifique pour recherche de toxoplasmose congé-nitale est demandé avec analyse du sang de l'enfant à J4. Une expertise des sérologies maternelles est également engagée avec reprise de différents échantillons de sérums prélevés pendant la grossesse et à l'accouchement.

L'expertise de ces sérums révèle d'abord que la patiente, considérée pendant sa grossesse comme « non immunisée » vis-à-vis du toxoplasme, possède en réalité des anticorps spécifiques, à taux faible mais néanmoins significatif, comme le montre la positivité du test d'agglu-tination directe haute sensibilité sur tous les échantillons de sérums repris. Cette patiente est donc anciennement immunisée et l'augmentation du taux des IgG observée à l'accouchement correspond en fait à une séroréactiva-tion et non à une primo-infection toxoplasmique, d'où l'absence d'IgM et la valeur élevée de l'avidité des IgG confirmées lors de l'expertise sérologique. L'hypothèse d'une séroconversion toxoplasmique de fin de grossesse évoquée au départ est donc écartée, et ce contexte de séro-réactivation chez la patiente qui n'est pas immunodépri-mée ne constitue pas classiquement une situation à risque de toxoplasmose congénitale.

Le bilan biologique réalisé chez l'enfant à J4 montre l'absence d'IgM et d'IgA antitoxoplasmiques par techni-que d'immunocapture-agglutination, et la négativité de l'analyse western-blot comparant les profils immunologi-ques mère/enfant. À l'issue de ce bilan, le traitement anti-parasitaire est arrêté. Un contrôle sérologique réalisé chez l'enfant en octobre 2009 montre la disparition complète des anticorps maternels transmis, confirmant de manière définitive l'absence de toxoplasmose congénitale.

Résultats des sérologies toxoplasmiques de madame B.

Date du prélèvement

IgG(seuil = 3 UI/mL)

IgM(seuil = 0,600)

Avidité des IgG(seuil = 0,3)

IgA(seuil = 8)

20/11/2008 0 0,095

03/01/2009 41 6,358 0,065 8

, 148 6.258 12

Tableau 34-2

Résultats des sérologies toxoplasmiques de madame P.

Date du prélèvement

IgG (seuil = 8 UI/mL) Zone grise : 4 à 8 UI/mL

IgM (seuil = 0,65)

31/05/08 6 0,190

22/06/08 7 0,220

04/08/08 5 0,190

16/10/08 7 0,180

27/11/08 215 0,230

Tableau 34-3

360 Pathologies infectieuses du fœtus

Réf

éRen

ces [1] Berger F, goulet V, le Strat Y, DeSencloS Jc.

Toxoplasmosis among pregnant women in France : risk factors and change of prevalence between 1995 and 2003. Rev Epidemiol Sante Publique 2009 ; 57 : 241–8.

[2] Villena i. Enjeux et missions du Centre national de référence de la toxoplasmose. Spectra Biologie 2008 ; 165 : 17–22.

[3] Villena i, ancelle t, DelmaS c, et al. Toxosurv Network and National Reference Centre for Toxoplasmosis. Congenital toxoplasmosis in France in 2007 : first results from a national sur-veillance system. Euro Surveill 2010 ; 15 (25) : pii=19600.

[4] Dunn D, Wallon m, PeYron F, et al. Mother to child transmission of toxoplasmosis : risk estimates for clinical counselling. Lancet 1999 ; 353 : 1829–33.

[5] elBez-ruBinStein a, aJzenBerg D, DarDle ml, et al. Congenital toxoplasmosis and reinfection during pregnancy : case report, strain characterization, experimental model of reinfection, and review. J Infect Dis 2009 ; 199 : 280–5.

[6] cimon B, Penn P, Brun S, chaBaSSe D. Comment résoudre les difficultés du sérodiagnostic de la toxoplasmose chez la femme enceinte. Immun Biol Spécial 2002 ; 17 : 143–7.

[7] Jenum Pa, StraY-PeDerSen B, gunDerSen ag. Improved diagnosis of primary Toxoplasma gondii infec-tion in early pregnancy by determination of antitoxoplasma immunoglobulin G avidity. J Clin Microbiol 1997 ; 35 : 1972–7.

[8] FouDrinier F, marx-chemla c, auBert D, et al. Value of specific immunoglobulin A detection by two immunocapture assays in the diagnosis of toxo-plasmosis. Eur J Clin Microbiol Infect Dis 1995 ; 14 : 585–90.

[9] cimon B, martY P, morin o, et al. Specificity of low anti-Toxoplasma IgG titers with IMx and AxSYM Toxo IgG assays. Diagn Microbiol Infect Dis 1998 ; 32 : 65–7.

[10] DeSmontS g, naot Y, remington JS. Immunoglobulin M-immunosorbent agglutination assay for dia-gnosis of infectious diseases : diagnosis of acute, congenital and acquired toxoplasma infections. J Clin Microbiol 1981 ; 14 : 486–91.

[11] BeSSièreS mh, chemla c, cimon B, et al. Les difficulté d'interprétation de la sérologie de la toxoplas-mose. Rev Fr Lab 2006 ; 383 : 43–9.

[12] Freeman K, tan hK, PruSa a, et al. Predictors of retinochoroiditis in children with congenital toxoplasmosis : European Prospective Cohort Study. Pediatrics 2008 ; 121 : e1215–22.

[13] Binquet c, Wallon m, quantin c, et al. Prognostic factors for the long-term development of ocular

lesions in 327 children with congenital toxoplas-mosis. Epidemiol Infect 2003 ; 131 : 1157–68.

[14] graS l, Wallon m, PollaK a, et al. Association between prenatal treatment and clinical manifes-tations of congenital toxoplasmosis in infancy : a cohort study in 13 european centers. Acta Paediatr Scand 2005 ; 94 : 1721–31.

[15] BaStien P, JumaS-BilaK e, Varlet-marie e, martY P. On behalf of the ANOFEL Toxoplasma-PCR Quality Control Group. Three years of multi-laboratory external quality control for the molecular detec-tion of Toxoplasma gondii in amniotic fluid in France. Clin Microbiol Infect 2007 ; 13 : 430–33.

[16] KaSPer Dc, SaDeghi K, PruSa ar, et al. Quantitative real-time polymerase chain reaction for the accu-rate detection of Toxoplasma gondii in amniotic fluid. Clin Microbiol Infect 2009 ; 63 : 10–5.

[17] roBert-gangneux F, gaVinet mF, ancelle t, et al. Value of prenatal diagnosis and early postnatal diagnosis of congenital toxoplasmosis : retrospec-tive study of 110 cases. J Clin Microbiol 1999 ; 37 : 2893–8.

[18] thaliB l, graS l, romanD S, et al. Prediction of congenital toxoplasmosis by polymerase chain reaction analysis of amniotic fluid. Br J Obstet Gynaecol 2005 ; 112 : 567–74.

[19] antSaKliS a, DaSKalaKiS g, PaPantoniou n, et al. Prenatal diagnosis of congenital toxoplasmosis. Prenat Diagn 2002 ; 22 : 1107–11.

[20] KaiSer K, Van loon am, Pelloux h, et al. Multicenter proficiency study for detection of Toxoplasma gondii in amniotic fluid by nucleic acid amplifica-tion methods. Clin Chim Acta 2007 ; 375 : 99–103.

[21] DeSmontS g, couVreur J. Congenital toxoplasmosis. A prospective study of 378 pregnancies. N Engl J Med 1974 ; 290 : 1110–6.

[22] thieBaut r, leProuSt S, chene g, gilBert r. Effectiveness of prenatal treatment for congenital toxoplasmo-sis : a meta-analysis of individual patients' data. Lancet 2007 ; 369 : 115–22.

[23] PeYron F, Wallon m, lou c, garner P. Treatment for toxoplasmosis in pregnancy. Cochrane Database Syst Rev 2010 ; 5.

[24] Pinon Jm, Dumon h, chemla c, et al. Strategy for diagnosis of congenital toxoplasmosis : evalua-tion of methods comparing mother and newborns and standard methods for postnatal detection of immunoglobulin G, M and A antibodies. J Clin Microbiol 2001 ; 39 : 2267–71.

[25] triDaPalli e, caPretti mg, Farneti g, et al. Congenital toxoplasmosis : the importance of the western blot method to avoid unnecessary therapy in potentially infected newborns. Acta Paediatr 2008 ; 97 : 1298–300.